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198 LSA n° 285 • 5-6/2018 Médicaments de lutte contre Varroa destructor Tests d’efficacité 2017 par Jérôme VANDAME D epuis 2007, la FNOSAD coor- donne un dispositif d’évaluation de l’efficacité en conditions de terrain, des médicaments de lutte contre le var- roa disposant d’une Autorisation de Mise sur le Marché (AMM). Pendant ces 11 années, 7 médicaments ont ainsi été testés avec l’aide d’apiculteurs qui ont réalisé des comptages sur une moyenne de 200 colonies chaque année. En 2017, l’efficacité des médicaments Apivar®, Apistan®, Apitraz® et Api-bioxal®a été suivie sur 209 colonies réparties dans 15 départements. Après une présentation succincte des résultats de 2017, cet arti- cle soulignera l’intérêt des différentes solutions thérapeutiques de lutte contre le varroa, leurs limites et les évolutions récentes observées. Matériels testés et dispositif Protocole des tests d’efficacité Le protocole défini par la FNOSAD pour tester l’efficacité des médicaments de lutte contre le varroa prévoit : Un comptage facultatif mais conseillé des chutes naturelles de var- roas pendant les 15 jours précédant le traitement. Pour effectuer ces comp- tages, les ruches doivent être équipées d’un plateau totalement grillagé permet- tant l’insertion sous le grillage de langes graissés destinés à recueillir les varroas qui chutent. Une durée d’application, conforme à la notice du médicament et déterminée en concertation avec le fabricant, durée pendant laquelle des comptages de chutes de varroas sont réalisés régulière- ment. Pour les médicaments Apivar®, Apistan® et Apitraz®, le temps d’appli- cation retenu est de 10 semaines. Pour l’Api-Bioxal®, une seule application par dégouttement est réalisée ; elle est précé- dée d’un encagement de la reine pendant 25 jours et suivie d’un comptage des chutes de varroas pendant 15 jours (cf. protocole dans l’Encadré 1). Un temps de latence de 9 jours est positionné après le traitement. Pendant ces 9 jours, les chutes de varroas sont

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Médicaments de luttecontre Varroa destructor

Tests d’efficacité 2017par Jérôme VANDAME

Depuis 2007, la FNOSAD coor-donne un dispositif d’évaluation

de l’efficacité en conditions de terrain,des médicaments de lutte contre le var-roa disposant d’une Autorisation deMise sur le Marché (AMM). Pendant ces11 années, 7 médicaments ont ainsi ététestés avec l’aide d’apiculteurs qui ontréalisé des comptages sur une moyennede 200 colonies chaque année. En 2017,l’efficacité des médicaments Apivar®,Apistan®, Apitraz® et Api-bioxal®a étésuivie sur 209 colonies réparties dans15 départements. Après une présentationsuccincte des résultats de 2017, cet arti-cle soulignera l’intérêt des différentessolutions thérapeutiques de lutte contrele varroa, leurs limites et les évolutionsrécentes observées.

Matériels testés et dispositif

Protocole des tests d’efficacité

Le protocole défini par la FNOSADpour tester l’efficacité des médicamentsde lutte contre le varroa prévoit :

• Un comptage facultat i f maisconseillé des chutes naturelles de var-roas pendant les 15 jours précédant letraitement. Pour effectuer ces comp-tages, les ruches doivent être équipéesd’un plateau totalement grillagé permet-tant l’insertion sous le grillage de langesgraissés destinés à recueillir les varroasqui chutent.

• Une durée d’application, conformeà la notice du médicament et déterminéeen concertation avec le fabricant, duréependant laquelle des comptages dechutes de varroas sont réalisés régulière-ment. Pour les médicaments Apivar®,Apistan® et Apitraz®, le temps d’appli-cation retenu est de 10 semaines. Pourl’Api-Bioxal®, une seule application pardégouttement est réalisée ; elle est précé-dée d’un encagement de la reine pendant25 jours et suivie d’un comptage deschutes de varroas pendant 15 jours (cf.protocole dans l’Encadré 1).

• Un temps de latence de 9 jours estpositionné après le traitement. Pendantces 9 jours, les chutes de varroas sont

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L’Ectodex® est un antiparasitaire externe pour chien dont la substance active est l’ami-

traze. Il est utilisé hors AMM, comme premier traitement de contrôle des médicaments en

test afin de déterminer leur pourcentage d’efficacité et le nombre de varroas résiduels.

Deux applications sont réalisées à 4 jours d’intervalle.

L’application d’Api-Bioxal® est fortement recommandée en deuxième traitement de contrôle,

notamment dans les protocoles de l’Apivar®, de l’Apitraz® et du MAQS®, une fois que

les colonies n’ont plus de couvain, afin de vérifier si le premier traitement de contrôle a

bien été effectif, tout en débarrassant la colonie de ses derniers varroas résiduels pour

l’hiver. Il revient à l’apiculteur de surveiller l’évolution du couvain de ses colonies et d’ap-

pliquer l’acide oxalique au moment opportun, par dégouttement.

Tester l’Api-Bioxal® en fin d’été, à une période suffisamment précoce pour mettre un terme

à l’augmentation exponentielle de la pression parasitaire des colonies, tout en limitant la

présence de couvain impliquait une action permettant de supprimer ou diminuer de façon

drastique le nombre de cellules de couvain operculé. Il a donc été décidé de proposer

une méthode d’encagement de la reine pendant 25 jours suivi d’un traitement par dé-

gouttement d’Api-Bioxal®.

Encadré 1 – Protocole des tests d’efficacité

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additionnées aux chutes comptées pen-dant l’application du médicament. Cetemps de latence permet de dénombrerdes varroas impactés et évacués après leretrait des traitements.

• Un traitement de contrôle pendantlequel les chutes de varroas comptabili-sées (varroas résiduels) permettent decalculer l’efficacité du médicament quicorrespond au ratio :

Ce traitement de contrôle est com-posé de deux applications d’Ectodex®(substance active : amitraze) sur langegraissé à 4 jours d’intervalle, suiviesd’un dégouttement d’une solutiond’Api-Bioxal® (substance active : acideoxalique).

Au cours des années précédentes,la FNOSAD a étudié la possibilité d’uti-liser un autre médicament pour le traite-ment de contrôle af in d’évi ter derecourir à un médicament contenant del’amitraze, particulièrement pour lecontrôle des spécialités contenant lamême substance active. Ainsi le recoursau médicament Bayvarol®, qui disposed’une AMM dans plusieurs pays euro-péens depuis plusieurs années (Suisse,Grande Bretagne, Allemagne) a été en-visagé en 2013, mais les tests d’effica-cité de ce médicament conduits à grandeéchelle dans deux départements en2013, ont présenté une grande hétérogé-néité [1]. La FNOSAD a alors décidé dene pas retenir cette spécialité pour le testde contrôle.

En 2017, un dispositif de 209 colonies

En 2017, la FNOSAD a proposé auxOSAD de tester 4 médicaments à sa-voir :

• Apivar® et Apistan® qui ont tou-jours fait partie du protocole detests établi par la FNOSAD dès2007, en raison de leur utilisationimportante par les apiculteurs enFrance ;

• Api-Bioxal® et Apitraz® qui sonttestés pour respectivement la troi-sième et deuxième année consécu-tivement.

La FNOSAD avait par ailleurs envi-sagé de tester le médicament Varro-med® qui dispose depuis le 2 février2017 d’une AMM délivrée par la Com-mission européenne pour le marché del’Union européenne, suite à l’avis del’Agence européenne du médicamentvétérinaire. Néanmoins il n’a pas étépossible d’obtenir le médicament pourune mise en œuvre des tests en fin d’été2017.

Au cours du printemps 2017, lesOSAD et les apiculteurs ont été infor-més de l’organisation de ces tests puisles protocoles définitifs et les grilles decomptage ont été transmis à la fin dumois de juin.

Au cours de l’été 2017, les suivis ontété mis en place pour un total de 305 co-lonies. Finalement, les jeux de donnéescorrespondant à 209 colonies ont pu êtreexploités. Les autres séries de donnéesont été écartées, soit en raison d’une in-festation totale (varroas dénombrés pen-

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dant le traitement et les traitements decontrôle) trop faible (inférieure 1001),soit en raison de l'arrêt des tests pour desraisons variables (mort de la colonie, es-saimage), soit enfin en raison du non-respect du protocole proposé par laFNOSAD (voir Encadré 2).

Des participants dans 15 départements

Les résultats obtenus sur ces 209 co-lonies concernent des apiculteurs de15 départements dont la plupart partici-pent régulièrement à ces tests. À noterqu'en 2017, des apiculteurs du Cher etde la Corrèze (Illustration 1) sont venuscompléter un dispositif qui est encoreloin d’être représentatif de la France mé-tropolitaine.

1 – Seuil suggéré par le groupe de travail européen sur l’évaluation des traitements contre varroa – Standards forexperimental protocols http://www.apis.admin.ch/english/host/ pdf/alternativ/Guidelines.pdf.

Dans cette étude de l’efficacité des médicaments de lutte contre varroa, la FNOSAD afixé le seuil minimum d’infestation des colonies à 100 varroas. Tous les jeux de donnéesprovenant de colonies pour lesquelles les varroas dénombrés pendant le traitement et lestraitements de contrôle étaient inférieurs à 100 ont été écartés.Critères d’efficacité des médicaments (90 et 95 %). L’efficacité, pourcentage de varroas im-pactés pendant le traitement par rapport à l’infestation totale, est le seul critère pris encompte dans les lignes directrices du médicament vétérinaire. Ainsi un médicament conte-nant une molécule de synthèse doit, selon ces lignes directrices dépasser 95 % d’effica-cité, alors qu’un médicament contenant une molécule dite d’origine naturelle doit avoirune efficacité supérieure à 90 %. Les résultats obtenus avec ce critère permettent de véri-fier si les médicaments ont une efficacité conforme à ce qui est prévu au niveau européenet le cas échéant de réaliser des déclarations de pharmacovigilance pour insuffisanced’efficacité.• Le nombre de varroas résiduels. C’est une information importante pour l’apiculteur afin qu’ilpuisse vérifier le bien-fondé de la stratégie de lutte qu’il a définie et, s’il y a lieu, de lacompléter par un traitement additionnel visant à protéger ses colonies contre la pressionparasitaire de l’acarien Varroa destructor. À partir d’une modélisation de l’évolutionde la population de varroas, les chercheurs ont défini que le seuil de 50 varroas rési-duels ne doit pas être dépassé pour un bon hivernage des colonies et surtout pour que,lors de la saison suivante, le seuil critique, préjudiciable à la santé de la colonie, nesoit pas atteint trop rapidement.

• La cinétique de chute. Elle permet d'avoir des indications sur la rapidité d’action du médica-ment et le temps nécessaire pour que la pression parasitaire passe en dessous du seuildommageable de 1 000 varroas, ce seuil ayant été fixé de façon arbitraire à des finsde comparaison des médicaments. Mais une infestation située en dessous de ce seuilpeut être dommageable aux colonies, surtout en cas d’infections virales aggravant l’ac-tion délétère du varroa.

Encadré 2 – Définitions et critères pour écarter les colonies

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Résultats

Infestation des colonies

L’infestation moyenne (somme deschutes de varroas pendant le traitementet les traitements de contrôle) s’élève en2017 à 1 867 varroas, ce qui représenteun niveau proche de celui mesuré en2015 et 2016 et bien inférieur à 2014(2 329).

Ces variations annuelles, éventuelle-ment influencées par les variations cli-matiques, sont complétées par d’impor-tantes variations entre ruchers et entreles colonies d’un même rucher. Cette

dispersion des données constatée chaqueannée apparaît dans l’illustration 2 rela-tive à la moyenne, à l’écart-type2 et aucoefficient de variation3 de l’infestation.Ainsi en 2017, tous médicamentsconfondus, le coefficient de variation del’infestation s’élève à 96 %. Cela carac-térise une grande hétérogénéité des don-nées, comme cela a déjà été souligné lesannées précédentes.

L’efficacité des médicamentset le nombre de varroas résiduels

Ces deux critères sont représentéspar les graphiques en camemberts del’illustration 3.

2 – L’écart-type est défini comme la racine carrée de la variance qui caractérise la dispersion d’un échantillon et quiest la somme du carré des écarts à la moyenne. Une variance de zéro indique que toutes les valeurs sont identiquesalors qu’une variance élevée est signe que les valeurs sont très dispersées.

3 – Le coefficient de variation est défini comme le rapport entre l’écart-type et la moyenne.

Illustration. 1 : Localisation des tests réalisés en 2017.

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Pour chacun des deux critères, appa-raissent en vert les colonies (pourcen-tage) qui atteignent les seuils souhaitéset en rouge les colonies pour lesquelles

ces seuils ne sont pas atteints, ce qui si-gnifie que le traitement n’est pas satis-faisant et ne permet pas de diminuersuffisamment la population d’acariens.

Illustration 3 : Répartition des coloniespar classe d’infestation et classe de varroas résiduels.

Illustration 2 : Indicateurs de tendance centrale de dispersion et d’éten-due (année 2017).

MoyenneInfestation

Nombrede colonies

Api-bioxal®Apistan®

24544883209

Écartypeinfestation

19402661135916231867

Coefficientde variation

12112239104717821785

62 %84 %77 %110 %96 %

Apitraz®Apivar®Total général

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Pourcentage d’efficacité

La moyenne des efficacités obtenuespour les 83 colonies suivies avec Api-var® s’élève à 80 % et le nombre moyende varroas résiduels à l’issue du traite-ment avec ce médicament s’élève à 187.Ces résultats moyens obtenus avec lemédicament Apivar® sont nettementmoins satisfaisants que les années pré-cédentes et en particulier qu’en 2016 oùdes résultats très satisfaisants avaient étéobtenus. Ainsi pour près d’une coloniesur deux l’efficacité est inférieure auseuil de 95 % – fixé dans les lignes di-rectrices du médicament vétérinairepour les acaricides composés de subs-tances de synthèse [2] (cf. encadré 2).

Les résultats sont plus favorables sil’on écarte les tests effectués sur un ru-

cher en Savoie où l’apiculteur constatedepuis plusieurs années que de nom-breux acariens restent présents à l’issuedes traitements de fin d’été. L’analysedes résultats obtenus dans l’ensembledes autres ruchers établit que 65 % descolonies présentent un pourcentage d’ef-ficacité supérieur à 95 % et 62 % des co-lon ie s on t un nombre de va r roasrésiduels inférieur à 50, ce qui reste ce-pendant très inférieur aux résultats desannées précédentes.

À noter qu’en 2014 aussi, beaucoupde colonies présentaient un nombre devarroas résiduels trop élevé [3].

En ce qui concerne les deux autresacaricides de synthèse, Apistan® et Api-traz®, les pourcentages d’efficacité dé-passent 95 % pour 3 colonies sur 4.

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Au regard des varroas résiduels, leconstat est le même, respectivement73 % et 63 % des colonies qui ont ététraitées avec Apitraz® et Apistan® pré-sentent moins de 50 varroas résiduels àl’issue du traitement.

Cinétique de chute

Les courbes de l’illustration 4 per-mettent de visualiser la progression duniveau d’efficacité des médicamentspendant toute la durée du traitement etla rapidité d’action des médicamentsconcernés.

Le profil des courbes est semblableà celui des années précédentes. Il appa-raît clairement que le médicament Api-

Bioxal®, administré après un encage-ment de la reine pendant 25 jours, agittrès rapidement. Sur les 24 colonies re-tenues pour cette analyse, le dégoutte-ment de la solution d’Api-Bioxal®permet de détruire plus de 95 % des var-roas en l’espace de 6 jours.

De même, comme constaté lors destests de 2016, les médicaments à longuedurée d’action, Apistan®, Apitraz® et Api-var®, donnent des efficacités moyennesélevées, dès lors qu’ils sont appliqués aumoins 10 semaines dans la colonie.

Concernant la courbe d’Apivar®,force est de constater que, cette année, leprofil est différent. C’est la première foisau cours des dix dernières années que l’ef-

Illustration 4 : Cinétique de chute de varroas des 4 médicaments testés en 2017.

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ficacité moyenne ne dépasse pas le seuilde 95 %. Si l’on prend le jeu de donnéestotal comprenant 83 colonies, l’efficacitémoyenne après 10 semaines de traitements’élève à 85 %. Ce pourcentage atteint93%, si les 16 colonies présentant des ré-sultats atypiques sont exclues. Un pour-centage qui reste donc inférieur au seuilde 95 %, fixé dans les lignes directricesdu médicament vétérinaire pour les acari-cides composés de substances de synthèse[2] (cf. encadré 2).

En outre, le profil de la courbe estpresque linéaire, ne présentant pas lecôté exponentiel observé habituelle-ment, ce qui signifie qu’un nombre im-portant de varroas restent présentspendant une période prolongée dans lacolonie. Ainsi faut-il 10 jours pour pas-ser sous le seuil de 1 000 varroas pré-sents dans la colonie, 35 jours pouratteindre celui de 500 varroas et 63 jourspour qu’il ne subsiste qu’une moyennede 200 varroas dans les 68 colonies dujeu de données qui n’intègre pas les co-lonies présentant des résultats atypiques.

Avec Apistan®, si après 70 jours detraitement, le niveau d’efficacité moyenobtenu par les 54 colonies retenues pourl’analyse s’élève à 96 %, il a fallu19 jours pour passer sous le seuil de1 000 varroas résiduels contre 14 en2016. À noter, pour relativiser ce résul-tat, que le niveau moyen d’infestationdes 54 colonies suivies avec Apistan®était de 2 661 varroas, contre 1 622 pourApivar® et 1 359 pour les 48 coloniesdu dispositif Apitraz®, dont l’infestationest passée sous le seuil de 1 000 varroasen 4 jours.

Pour le médicament Api-Bioxal®, àl’image de ce qui était ressorti lors desdeux exercices précédents, le niveaud’efficacité moyen est très élevé (99 %en 2017, 97 % en 2016 et 2015) et l’in-festation passe sous le seuil dommagea-ble de 1 000 varroas dans les coloniesdès le deuxième jour après le dégoutte-ment de la solution d’Api-Bioxal®. No-tons cependant que ces résultats sontceux de la méthode c’est-à-dire d’untraitement par dégouttement qui suit unencagement de la reine pendant 25 jours.Il est très probable que si cette méthodeétait utilisée avec les autres spécialités,leurs résultats seraient très améliorés. Eneffet, l’encagement de la reine pendant25 jours entraîne que la totalité des var-roas sont en phase phorétique. Ils sontdonc plus exposés aux acaricides.

Discussion

Infestation des colonies

En 2017, l’infestation moyenne s’estélevée à 1 867 varroas par colonie, soitune valeur proche de la moyenne d’in-festation des colonies depuis le débutdes tests réalisés en 2007, tous médica-ments et toutes années confondus. C’estdonc une infestation bien inférieure àcelle des années 2014 (2 329 varroas) et2011 (2 032 varroas), et plus élevée quedes années à faibles infestations : 2012(1 446 varroas) et 2010 (1 128 varroas).

Bien que moindre que les annéesprécédentes, l’hétérogénéité de l’infes-tation reste élevée. Le coefficient de va-riation en 2017 est de 96 % (l’écart-typereprésente 96 % de la moyenne), contre

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122 % en 2016, et 121 % si l’on se réfèreà la période 2007 – 2017.

Comme les années précédentes, cettehétérogénéité est visible sur l’histo-gramme de l’illustration 5 qui met enévidence que le dispositif de 2017 intè-gre un grand nombre de colonies présen-tant moins de 500 varroas (22 % descolonies) et de colonies dans lesquellesplus de 4 000 varroas ont été dénombrés(12 %).

Évolution de l’efficacité d’Apivar®

Avec Apivar®, il ressort, année aprèsannée, une relative stabilité des résultats.2017 constitue une exception avec desrésultats qui interrogent (Illustration 6).S’agit-il effectivement d’une situation

exceptionnelle ? Ou est-ce la traductiondes constats alarmants d’apiculteurs quisignalent depuis plusieurs années des in-suffisances d’efficacité et des niveauxélevés de varroas résiduels à l’issue destraitements Apivar®? Toujours est-ilqu’en attendant des résultats complé-mentaires qui pourront inf irmer ouconfirmer ces constats, il est souhaitableque les OSAD prennent en compte cesrésultats et incitent leurs adhérents à sur-veiller de près le niveau de varroas rési-duels à l’issue des traitements.

Évolution de la cinétique de chuted’Apivar®

Cette situation exceptionnelle des ré-sultats obtenus avec le médicament Api-var®, se retrouve également dans

Illustration 5 : Évolution du niveau d’infestation.

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l’illustration 7. Il est observable que leprofil de la courbe de cinétique de chutede 2017 est très différent du profil habi-tuel des courbes obtenues les années pré-cédentes. Les jeux de données de 2017(dispositif complet de 83 colonies ou dis-positif incomplet duquel sont exclus lesrésultats de 16 colonies présentant des ré-sultats atypiques), font état d’un niveaud’efficacité bien inférieur (83 % pour ledispositif complet et 93 % pour le dispo-sitif incomplet) à ce qui est constaté ha-bituellement (> 95 %) et absence ducaractère exponentiel de la courbe.

Des médicamentsÀ utiliser de façon rationnelle

Les résultats obtenus en 2017 dans lecadre du dispositif d’évaluation de l’ef-ficacité en conditions de terrain des mé-dicaments de lutte contre le varroadoivent inciter les apiculteurs à être vi-gilants, à alterner les traitements et à sur-veiller systématiquement les niveauxd’infestation post-traitement.

Illustration 6 :Évolution pourcentagedes colonies pour lesquellesl’efficacité dépasse 95 %.

2014 2015 2016 2017Apivar® 81 % 76 % 94 % 53 %Apistan® 77 % 65 % 52 % 74 %

Illustration 7 : Évolution de la cinétique de chute d’Apivar®.

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Alterner les molécules

Depuis de nombreuses années, lemédicament Apivar® est le principalmédicament utilisé dans la lutte contrela varroose4. L’emploi régulier de ce mé-dicament ne permet pas de détruire leséventuelles populations de varroas quiseraient devenues tolérantes ou résis-tantes à l’amitraze, lesquelles pourraientdonc se propager dans les colonies et ru-chers voisins du fait de la phorésie. Ceconstat de la résistance de certaines po-pulations de varroas à l’amitraze avaitété réalisé en 2011 par l’équipe de Su-pagro Montpellier (Encadré 3 [4]).

L’emploi d’un médicament conte-nant une autre molécule (tau-fluvalinate,fluméthrine, thymol, acide formique,acide oxalique) à l’échelle d’un départe-ment permettrait de limiter cette appari-tion de populations d’acariens résistantsà une molécule. Cette stratégie a étéadoptée aux cours des dernièresannées par plusieurs GDSA (de larégion Pays de la Loire, GDSA-13et le GDSA-26 par exemple). Laproposition d’une alternance estéga lement env isagée par lesGDSA-03 et 63.

Surveiller la pression parasitaire

Parallèlement à l’alternance desmolécules, il est vivement conseilléde réaliser un suivi des niveauxd’infestation post-traitement afind'être en mesure d’identifier les co-

lonies pour lesquelles un traitement com-plémentaire est nécessaire pour limiter lapression parasitaire du varroa au cours del’automne et de l’hiver.

Il est également important de dispo-ser d’outils permettant d’obtenir des in-dications sur le niveau de parasitisme àtout moment de l’année pour définir lapériode où la pression parasitaire im-plique un traitement.

Parmi les outils figure le plateaugrillagé équipé d’un lange sur lequel ilest possible à tout moment de dénom-brer les chutes naturelles de varroas etde définir si un traitement est nécessaireou pas (illustration 8). Selon le Centrede Recherche Apicole de l’Agroscope deL iebe f e ld, l e s chu t e s na tu r e l l e smoyennes de 3 varroas par jour fin maiet de 10 varroas par jour fin juillet sontdes seuils limites, au-delà desquelles untraitement doit être réalisé rapidement.

Illustration 8 :Plateau grillagé équipé d’un lange.

4 – Un article de synthèse portant sur la lutte chimique contre le varroa, les phénomènes de résistance aux acaricideset l’organisation de l’alternance et résumant l’expérience acquise par la FNOSAD au cours des dix dernières an-nées sera rédigé et paraîtra dans un prochain numéro de La Santé de l’Abeille.

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La pression parasitaire peut égale-ment être évaluée en mesurant le nombrede varroas phorétiques sur un échan-tillon d’abeilles. La méthode du sucreglace (emploi d’un récipient grillagédans lequel 300 abeilles adultes sont mé-langées à du sucre glace) permet de dis-tinguer les colonies infestées surlesquelles un traitement doit être envi-sagé (illustration 9). En Italie, dès que leseuil de 2 % d'infestation est dépassé finjuin, début juillet, sur un échantillon de8 colonies par rucher, l'UNAAPIconseille d’entreprendre un traitementcontre le varroa de l’ensemble des colo-nies du rucher.

La désoperculation / extraction denymphes permet de repérer les varroas

qui les infestent (illustration 10). Le ni-veau d’infestation est un indicateur quipeut aider l’apiculteur à décider si untraitement est nécessaire avant la fin dela saison. En pratique, il convient de dés-operculer une centaine de cellules préle-vées sur plusieurs cadres pour disposerd’un indicateur suffisamment fiable.

Pendant la saison, un traitement devrarapidement être organisé si plus de 10 %des nymphes d’ouvrières ou 25 % desnymphes de mâles sont parasitées [6].

Envisager le traitementdes varroas résiduels

Dès lors qu’une pression parasitaireest anormalement élevée, les apiculteurs

Entre 2008 et 2013, la FNOSAD a été l’un des partenaires du laboratoire de « Protectiondes cultures et d’entomologie agricole » de Montpellier SupAgro sur le projet d’étude dela résistance du varroa aux acaricides et de recherche de nouvelles molécules.Au cours des deux premières années, Montpellier SupAgro a mesuré la sensibilité de16 populations de varroas provenant de différents ruchers localisés en France et danslesquels des défauts d’efficacité des médicaments acaricides avaient été constatés dansle cadre des tests d’efficacité coordonnés par la FNOSAD.L’intégralité de cet article intitulé « Varroa: résistance aux acaricides actuels et nouvellesmolécules », est paru dans La Santé de l’Abeille no 245 pp. 427-433.

Encadré 3 – Sensibilité de 16 populations de varroa à 3 molécules acaricides

Sensibilité des 16 populations de varroas aux molécules acaricides tau-fluvalinate,amitraze et thymol, calculée par la Mortalité Corrigée (MC) par rapport à la mortaliténaturelle enregistrée dans les échantillons témoins.

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Illustration 9 : Évaluation de l’infestation par la méthode du sucre glace.

Illustration 10 : Désoperculation de nymphes d’ouvrières ou de mâles.

doivent être en mesure de réaliser untraitement acaricide. Plusieurs principesdoivent être pris en compte :

• se renseigner sur la nécessité d’unealternance par rapport au traitement defin d'été ;

• tenir compte de la période pendantlaquelle le traitement complémentairedoit être réalisé :

- en cours de saison apicole,une méthode biotechniquecomme le retrait de couvain demâle [7] peut être envisagé ;

- pour compléter un traitementde fin d’été qui n’aurait pas étésuffisant, et en l’absence decouvain, un médicament à based'acide oxalique peut être ap-

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pliqué par sublimation ou pardégouttement.

Remerciements

Les résultats présentés dans cet arti-cle ont pu être obtenus grâce à la parti-cipation de nombreux apiculteurs etd’administrateurs d’OSAD de 46 dépar-tements qui se sont impliqués dans laréalisation de ces nombreux tests entreles années 2007 et 2017. La FNOSADles remercie pour ce temps consacrépour le bénéfice de la filière apicole. LaFNOSAD remercie également les parte-naires indispensables de ces tests : lesentreprises Véto-pharma, Vita-Europe,Apinov, Calier, Chemicals Laïf et Cen-tral Pharma Logistics.

Les tests d’efficacitédes médicaments en 2018

Cette année, la FNOSAD envisage ànouveau de coordonner des tests d’éva-luation d’efficacité en conditions de ter-rain des médicaments de lutte contrevarroa afin d’une part de confirmer oud’inf irmer les observations faites en2017 et d’autre part d’évaluer de nou-velles solutions thérapeutiques qui sontapparues au cours des deux dernièresannées.

Un protocole de tests d’efficacité esten préparation et sera transmis prochai-nement aux OSAD et apiculteurs inté-ressés.

Contribuer aux analysesde sensibilité/résistancedu varroa aux acaricides

La participation à ces tests en condi-tions de terrain permet d’identifier descolonies pour lesquelles un manqued’efficacité est observé et de le quanti-fier. Il est alors possible d’y prélever deséchantillons de varroas et de les soumet-tre aux analyses de sensibilité/résistanceaux acaricides que la FNOSAD organisedepuis plusieurs années [4] et [5] et pourlesquelles l’implication des OSAD etdes apiculteurs est indispensable.

Si vous souhaitez participer à ces ac-tions coordonnées par la FNOSAD,faites-le savoir à votre OSAD ou à laFNOSAD.

Bibliographie

[1] La Santé de l’Abeille, 2014. LSA 262. Essaiscliniques FNOSAD: Bayvarol 2012 et 2013.

[2] EMA, 2010. Guideline on veterinary medi-cinal products controlling Varroa destructorparasitosis in bees, EMA/CVM/EWP/459883/2008, 15 novembre 2010.

[3] La Santé de l’Abeille, 2015. LSA 267.https://www.apiservices.biz/fr/articles/classes-par-popularite/1063-medicaments-lutte-varroa-destructor-2014.

[4] Romain Bonafos, 2011. Varroa : résistanceaux acaricides actuels et nouvelles molécules.La Santé de l’Abeille 245, pp. 427 à 433.

[5] Yann Sandon, 2017. LSA 277. Étude desensibilité résistance à l’amitraze chez Varroadestructor. La Santé de l’Abeille 277, pp.47–56. https://www.apiservices.biz/fr/articles/classes-par-popularite/1449-etude-sensibilite-resistance-amitraz-varroa.

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[6] Wilkinson D., Smith G., 2001. Modelingthe Efficiency of Sampling and Trapping Var-roa destructor in the Drone Brood of Honeybees (Apis mellifera). Sand Hutton, York,YO41 1LZ, UK. https://www.researchgate.net/publication/230745190_Modeling_the_Efficiency_of_Sampling_and_Trapping_Varroa_des-tructor_in_the_Drone_Brood_of_Honey_bees_Apis_mellifera [accessed Apr. 30 2018].

[7] Gwenaël Delamarche, 2017. L’intérêt éco-nomique pour les exploitations du retrait ducouvain de mâles comme lutte complémentairecontre le varroa. La Santé de l’Abeille 277, pp.81–91.

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