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Capitalisation de bonnes practiques de la convention pour le développement intégral de Guet n'Dar. Senegal.
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“Merci à toutes les personnes
qui ont participé au projet”.
Habitáfrica
“Les femmes ont aimé le projet.
On vous donne de l’argent pour
travailler, c’est pour avancer. Le
projet a permis l’alphabétisation
en français. C’est une bonne
opportunité pour nous. Grâce
au projet, une de mes filles sait
lire et écrire. Il a aussi permis
l’alphabétisation en wolof. Mes
fils et mes filles ont beaucoup
appris. Quand tu apprends quel-
que chose, le futur ne peut jamais
te retirer cette connaissance,
car elle est déjà dans ta tête. La
connaissance est très importante
dans la vie de l’homme. C’est le
premier avantage du projet”.Aïssatou Teuw, bénéficiaire
SIGLES
ASF: Architectes Sans frontières
CDIG: Convention pour le Développement Intégral de Guet N’Dar
FUNDESO: Fondation Espagnole pour le Développement Durable
GIE: Groupement d’Intérêt Économique
JICA: Agence Japonaise Internationale de Coopération
ONG: Organisation Non Gouvernementale
R.S.U.: Déchets Solides Urbains
UFT: Union des Femmes Transformatrices
I CONVENTION POUR LE DÉVELOPPEMENT
INTÉGRAL DE GUET N’DAR
1 Introduction p. 6
2 Scénario d’intervention p. 9
3 Justification p. 11
II CAPITALISATION DE BONNES PRATIQUES DE LA CONVENTION POUR LE DÉVELOPPEMENT INTÉGRAL DE GUET N’DAR
4 Objet de la capitalisation p. 14
5 Programme de microcrédits p. 17
5.1 Système de gestion des microcrédits p. 18
6 Système de gestion des microcrédits p. 31
7 Union des Femmes Transformatrices p. 35 8 Amélioration des systèmes de gestion des déchets solides urbains p. 39
9 Bonnes pratiques p. 43
9.1 Harmonisation p. 43
9.2 Points forts p. 51
9.3 Points faibles p. 55
9.4 Durabilité p. 60
10 Conclusions p. 63
11 Leçons apprises p. 69
INTRODUCTIONHabitáfrica est une ONG de développement qui a
pour vocation d’aider les populations vulnérables ou à
risque d’exclusion en Afrique, d’encourager la promo-
tion d’établissements humains stables, durables, sûrs
et productifs, et d’accompagner des dynamiques de
développement liées aux migrations forcées.
La Fondation Habitáfrica considère
l’habitabilité d’un point de vue intégral (environnement phy-
sique, social et économique adéquat) qui promeut des établis-
sements humains stables dans lesquels peut être développée une
vie digne et avec des perspectives d’avenir. Elle essaie de réaliser
des actions fondées sur un renforcement des services et des in-
frastructures sociales grâce à la participation active des personnes
dans tous les processus et prises de décisions de sorte qu’elles se
complètent tout en créant des synergies.
La Fondation Habitáfrica est présente au Sénégal depuis
1999 dans le cadre de divers projets dans le domaine de la
sécurité alimentaire, du développement intégral, des activités
génératrices de ressources, de la formation, etc. Le présent docu-
ment se concentre sur l’“Amélioration des conditions de vie des
habitants de Guet N’dar employés dans le secteur de la pêche”,
qui a été développée dans la Convention “Accès à l’eau potable,
assainissement basique, habitabilité et traitement des ordures
7
dans le quartier de pêcheurs de Guet N’dar de la ville de Saint Louis, et exploitation des sous-produits du poisson pour l’alimentation du bétail” (en abrégé: Programme pour le développement intégral de Guet N’dar-Saint-Louis) exécutée par la Fondation Habitáfrica, en liaison avec Architectes Sans frontières-Espagne et avec un finan-cement de l’AECID pour la
période 2006-2012. Ce projet a été iden-
tifié et développé en inté-grant dans toutes ses phases les approches d’égalité des sexes, de durabilité environ-nementale et de défense des droits de l’homme, en parti-culier le droit à la santé et à un habitat digne.
9
SCÉNARIO D’INTERVENTION Le quartier de pêcheurs de Guet N’dar est situé
dans la ville de Saint-Louis, au nord du Séné-
gal et près de la frontière avec la Mauritanie,
sur la Langue de Barbarie.
La Langue de Barbarie est une langue
de terre longue de 24 kilomètres qui sépare l’Océan Atlantique
du fleuve Sénégal, jusqu’à l’embouchure de ce dernier. De toute
cette longueur, seuls sont habités 8,8 Km.
Le manque d’espace à Guet N’dar pour l’expansion ur-
banistique ainsi que la forte population (25.000 habitants) a
contribué à la densification de l’espace, le quartier ayant la plus
haute densité de population du Sénégal. Cette pression urba-
nistique, unie à la détérioration de l’environnement, donne à ce
quartier des conditions de salubrité hautement vulnérables.
70% de la population du quartier de Guet N’dar se con-
sacre à l’activité de la pêche, et les femmes, qui sont les principa-
les bénéficiaires du projet, sont affectées de manière spécifique à
l’activité productive d’achat, de transformation et de séchage du
poisson pour sa vente postérieure comme aliment.
Antérieurement, il existait deux zones de transformation
du poisson, la zone du fleuve et la zone de la plage (selon le
recensement effectué pour le projet, 342 personnes travaillaient
dans la zone du fleuve et 600 personnes dans la zone de l’océan).
La zone de l’océan, en dépit de l’absence de conditions d’hygiène
les plus optimales, dispose de conditions de salubrité et de sur-
peuplement les moins mauvaises. Cependant, au sud-ouest du
quartier de Guet N’dar, à l’extrémité de la Langue de Barbarie,
des femmes s’y sont déplacées et ont créé de forme spontanée,
au bord du fleuve Sénégal, un espace pour la transformation du
poisson qui ne réunissait pas les conditions d’hygiène et de salu-
brité adéquates, et la marchandise qui s’y vendait ne satisfaisait
aucune exigence de sécurité alimentaire. Les conditions de sur-
peuplement des femmes provoquaient par ailleurs un emboutei-
llage permanent du trafic des camions qui allaient chercher le
poisson dans cette zone et créait des situations très dangereuses.
Pour ces motifs, la zone du fleuve a été la zone priori-
taire identifiée par la mairie en vue de procéder à une future
évacuation et construire un Centre de
Transformation de Poissons destiné
aux femmes transformatrices de
la zone du fleuve.
11
JUSTIFICATIONAinsi que cela a été exposé, les principales néces-
sités et les problématiques identifiées du quartier
considérées comme prioritaires lors de la mise
en marche du projet ont été:
Faible viabilité économique et financière pour une
autonomie du système de production et d’organisation
des femmes transformatrices.
Taux d’analphabétisme élevé.
Liderazgo y capacidades de negociación débiles que
frenan la comercialización de los productos artesanales
de la transformación.
Faible leadership et faibles capacités de négociation, ce
qui freine la commercialisation des produits artisanaux
de la transformation.
Faible niveau organisationnel et conflits traditionnels
internes entre les deux groupes de femmes transformatrices.
Conditions insalubres et inexistence d’infrastructures
destinées à la transformation et à la production de
qualité du poisson.
Selon les recommandations du Service Régional de la Pêche et des lignes d’action de la politique municipale de Saint-Louis, il a été proposé une convention pour contribuer à l’amélioration des conditions de vie des habitants du quartier de Guet N’Dar à travers l’amélioration des conditions d’hygiène et environne-mentales (Tableau 1). Grâce à des actions de sensibilisation et d’amélioration des conditions de production et de commercia-lisation, cette convention a bénéficié directement aux femmes transformatrices de poissons. Les bénéficiaires indirects ont été la population du quartier de Guet N’dar, qui en tire profit indi-rectement par l’accès à un produit de plus grande qualité, élaboré dans de meilleures conditions d’hygiène et de santé, un quartier plus propre par la mise en œuvre d’un système de collecte des ordures et la libération de l’espace insalubre où travaillaient les femmes pour la future récupération du bord du fleuve.
Plus concrètement, les actions travaillées ont été:Amélioration des conditions de production, d’organisation, d’hygiène et commerciales et d’accès
au financement des habitants de Guet N’Dar employés dans le secteur de la pêche: Cette action vise le renforcement des femmes transformatrices de poissons pour améliorer leursconditions de production, commercialisation, financement, hy-
Contribuer à l’amélioration des conditions de vie des habitants du quartier de Guet N’dar.
LOGIQUE DE L’INTERVENTION (tableau 1):
Améliorer les conditions d’hygiène et environnementales de Guet N’dar par la sensibilisation en matière d’hygiène et de santé. Amélioration des conditions de production et de commercialisation par le renforcement des capacités des femmes transformatrices de poissons.
Amélioration des systèmes de gestion des déchets solides urbains
Amélioration des pratiques d’hygiène par la sensibilisation
Mise en œuvre d’un système de collecte des ordures.Population sensibilisée et formée en matière de traitement des ordures.Système de gestion des déchets solides dans le quartier de Guet N’dar.
Population sensibilisée en matière d’hygiène et de santé.Population sensibilisée en matière d’utilisation, conservation et respect de l’espace, des installations publiques, de l’environnement et de traitement des ordures.
RÉSULTATS INDICATEURSAmélioration des conditions de production-organisation-hygiène-commerciales et d’accès au financement des habitants de Guet N’dar employés dans le secteur de la pêche
1
23
OBJECTIFDE DESARROLLO
OBJECTIFESPECÍFICO
RÉSULTATS
Amélioration des conditions de production par l’accessibilité à un espace avec des conditions d’hygiène et de santé adéquates qui améliorent la qualité de l’activité de production des femmes. Augmentation et amélioration de la capacité de production et d’organisation des deux associations de femmes transformatrices de poissons. Amélioration des connaissances et des procédures de commercialisation des produits de la pêche transformés. Amélioration de l’accès aux ressources financières du GIE des professionnels de la pêche et des femmes transformatrices.
13
giène et santé pour une production de qualité à travers la construction d’un Centre de Transformation de Poissons. La construction du centre a permis des conditions d’hygiène et de salubrité adéquates, rendant possible l’amélioration de la qualité de leur produit de vente et donc leur capacité de com-mercialisation et de revenus. Cela a permis également de répon-dre à la deuxième nécessité du quartier qui était l’évacuation des espaces publics qui étaient occupés pour la transformation du poisson, améliorant considérablement de cette manière les conditions de l’espace public et, par voie de conséquence, les conditions d’habitabilité du quartier. Il a été aussi apporté une amélioration à une proposition de récupération urbanistique de la zone du bord du fleuve Sénégal où étaient installées les femmes transformatrices.
De plus, cette action a officialisé l’Union des Femmes Transformatrices, ce qui a favorisé leur meilleure cohésion et organisation dans l’intérêt de tous.
Amélioration des systèmes de gestion des déchets solides urbains: Renforcement du système de collecte des ordures en liaison avec le GIE CETOM (Groupe-
ment d’Intérêt Économique du quartier qui travaillait dans cette activité) qui permet l’élimination des déchets des rues. À
cette fin, le quartier a été divisé en six secteurs pour que six charrettes tirées par des chevaux soient organisées et procèdent à la collecte des seaux à ordures qui avaient été préalablement remis à des familles inscrites (3 000 seaux). Par ailleurs, il a été apporté un soutien administratif à la gestion et à la dotation des équipements avec l’objectif de renforcer leurs capacités et mettre en marche un système de collecte des ordures efficace,
réel et durable. Afin de garantir la durabilité de cette action, il a été aussi
réalisé des formations et des actions de sensibilisation parmi la population pour le traitement des ordures, l’hygiène et la santé.
Amélioration des pratiques d’hygiène par la sensibilisation: Dans cette action, les actions de sensibi-
lisation dans le quartier ont été prévues comme appui des autres sections comprises dans le projet et il a été également imparti des campagnes de sensi-bilisation sur l’environnement, l’utilisation, la conservation et le respect des espaces publics.
OBJECTIF DE LA CAPITALISATIONL’objectif principal de ce document est axé sur la
collecte des expériences et des connaissances qui ont surgi durant l’exécution du projet par une réflexion systématique et analytique
permettant de connaître les points forts et les points fai- bles du processus. De même, ce rapport prétend aider à la diffusion et faciliter l’accès à l’information générée pour les différents groupes d’intérêt (partenaires, contreparties, groupements, pouvoirs publics locaux, bénéficiaires, etc.) et contribuer ainsi au développement de bonnes pratiques dans les divers secteurs d’intervention abordés.
“Tout projet doit avoir un suivi. A la fin d’un projet, les personnes
doivent faire un bilan pour voir les failles, si le projet doit être
poursuivi, s’il faut effectuer des changements, augmenter, c’est une
bonne initiative ce que tu es en train de faire”. Ndeye Marie Diallo, bénéficiaire.
“Votre présence est parce que le projet ne nous a pas abando-
nnées, elle voit ce que nous travaillons, si tout va bien, quels
sont nos besoins”.Binta Sarr, Présidente UFT
L’intérêt de cette capitalisation se concentre sur les activités
mises en route dans le cadre du projet relatives au développement
15
intégral du quartier de Guet
N’Dar, parmi lesquelles se
trouvent le renforcement
des capacités de produc-
tion et l’organisation com-
merciale, l’amélioration
du système de collecte des
déchets solides urbains et
l’accès au crédit.
Bien que le docu-
ment se réfère à toutes les
actions mises en œuvre, la
capitalisation a été axée sur
la pêche, les microcrédits et
les activités centrées sur les
femmes, étant donné qu’elles
sont les principales desti-
nataires des actions et elles
qui ont offert la plus grande
partie de l’information re-
cueillie dans ce rapport.
17
PROGRAMME DE MICROCRÉDITSLa pêche est un composant fondamental de
l’activité économique du Sénégal. Elle y joue un
rôle important, non seulement en raison de sa
contribution à la création de richesse, mais éga-
lement en raison de sa capacité de génération de
l’emploi1. Toutefois, ce secteur n’a pas toujours été une
priorité dans les politiques gouvernementales, qui se limitaient
uniquement à la capture, les autres activités associées étant négli-
gées. Le développement de ce sous-secteur implique des actions
liées à l’environnement du travail, à la formation et à la qualifi-
cation des travailleurs ainsi qu’à l’augmentation du financement.
Une des caractéristiques du sous-secteur de la pêche, où se trouve
la transformation de produits halieutiques, est la prédominance
des femmes occupant ces postes de travail. La convention exécu-
tée par la fondation Habitáfrica est intervenue précisément sur
cet aspect de la réalité du quartier de Guet N’Dar.
Les déficientes conditions de travail dans lesquelles ont
toujours travaillé ces femmes transformatrices ont été caracté-
risées par l’application de pratiques précaires dans leur activité
de manipulation des aliments pour la transformation, un cadre
de travail qui manquait de l’équipement nécessaire et la rareté des ressources économiques. Cette situation les conduisait à demander des prêts à taux d’intérêt élevé à des intermédiaires, ce qui revenait qu’après d’intenses journées de travail la marge des bénéfices obtenue était très réduite. De même, les pêcheurs refusaient de vendre directement à des femmes par défiance, ce qui amplifiait la spirale vicieuse de la pauvreté.
“J’ai eu un problème au début du premier crédit. Un jour, j’ai voulu acheté du poisson, une quantité de poissons et le vendeur ne voulait pas m’en vendre parce qu’à cette époque je n’avais pas d’argent. Alors je dis au vendeur : “Je te paierais”. Il me répond: “Comment vas-tu me payer et avec quel argent ? Je n’ai aucune confiance en toi”. Je lui ai juré que: “Demain, dans la matinée ou dans l’après-midi, je te paierais”. Et ce vendeur m’a donné le poisson. Le lendemain, vers midi, je me suis présentée au même endroit pour lui donner l’argent. Quand j’ai commencé à compter les billets, le vendeur a ouvert grand les yeux, parce qu’il pensait que j’étais une femme menteuse et depuis ce jour, il me fait confiance. Je suis une femme respectable,
travailleuse, très honnête. Et tout cela, grâce aux microcrédits”. Aïssatou Teuw, bénéficiaire
À partir de l’instauration du programme de microcré-dits, dans le cadre du projet, les femmes transformatrices de poissons du quartier de Guet N’Dar ont commencé à recevoir
1 La pêche maritime représente 2,5% du PIB national et elle fait travailler 600 000 personnes (selon les données officielles du Gouvernement du Sénégal).
des microcrédits de sorte qu’elles pouvaient faire face à l’achat de poissons en grande quantité, pour le transformer. Le système permet de travailler directement avec une mutuelle de crédits et d’épargne locale évitant de demander de l’argent à des prêteurs
non officiels, éliminant ainsi la pratique de l’usure.
5.1 SYSTÈME DE GESTION DES MICROCRÉDITS
Pour la concession et la gestion du programme de micro-crédits, il a été créé des organismes de gestion composés d’une Assemblée Générale, d’un Comité de Gestion et d’un Comité de Contrôle qui garantissent le correct fonctionnement du système de crédit.
La méthodologie est fondée sur la remise de microcrédits individuels à des femmes qui font partie d’un groupe solidaire2 et qui se consacrent à la transformation de produits halieutiques.
Entre décembre 2008 et mai 2012, ont été organisés sept cycles attribuant un total de 1 170 microcrédits. Les trois premières rotations ont enregistré 100% de remboursement, alors que dans les deux autres, il a été de 98,78 %. Le sixième cycle a observé 88 % de remboursement3 et, bien que la période de remboursement du dernier cycle remis ait été déjà hors du délai d’exécution de convention, à la fin de 2012 il a été relevé un taux de rembour-
sement de 65 %, principalement dû à la période de relâche de
la pêche pour l’arrêt biologique et il a été prévu que, malgré des
difficultés que subissait l’activité de la pêche, la plus grande partie
des crédits remis serait remboursée à brève échéance. Ces informa-
tions démontrent que, en dépit de la finalisation du projet, le fonds
de rotation circule et grâce aux remboursements, la continuité du
programme de microcrédits est garantie.
Dans le cadre des activités réalisées, il a été créé en
2008 un Comité de Gestion du Crédit formé de 10 femmes
appartenant à deux GIE (Groupements d’Intérêt Économique)
impliqués4 et qui ont été chargés d’identifier les nouvelles bé-
néficiaires. Les conditions pour être bénéficiaire exigeaient de
légaliser l’activité auprès des services de police et de consacrer le
crédit à la transformation du poisson. Pour réaliser le processus,
une convention a été signée avec une mutuelle de crédits locale
à laquelle était transféré le capital pour la concession des mi-
crocrédits. Cette mutuelle était chargée de gérer les entrées et
les sorties d’argent, percevant une petite commission pour les
tâches administratives. L’objectif est de garantir la durabilité du
projet à l’échéance de la convention, de mode que le Comité
de Gestion du Crédit, les femmes bénéficiaires et la Mutuelle
puissent travailler ensemble.
2 Chaque groupe est formé par 5 femmes. 3 À partir de ce moment, le remboursement des microcrédits a connu des retards pour des motifs étrangers au propre projet. Entre autres, la zone de Saint-Louis a souffert une série de problèmes qui ont empêché pendant quelques mois la poursuite de l’activité de la pêche. Entre autres phénomènes, il y a eu une augmentation du niveau de l’océan qui a envahi Guet N’Dar et un conflit de la pêche avec la Mauritanie pour l’obtention de licences, ce qui a retardé considérablement le remboursement des microcrédits et donc la concession de nouveaux. 4 GIE Jambaru Siin et GIE Takku Liggeey.
19
Parmi les activités de formation et de sensibilisation,
il convient de souligner la mise en œuvre d’une politique de
sensibilisation sur le microcrédit, d’un séminaire de formation
sur la gestion administrative dans les mutuelles d’épargne et de
crédit et un séminaire de formation sur la gestion des activités
génératrices de revenus pour les femmes transformatrices de
poissons qui avaient été préala-
blement alphabétisées.
“D’entrée, nous avons sen-
sibilisé, nous avons créé
une association des femmes
transformatrices (...) Ensui-
te, pour les mieux organiser,
nous avons développé 100%
des actions de sensibilisation,
avec les gestions du centre,
la gestion administrative
et financière du centre de
transformation, l’hygiène et la qualité (...). L’objectif est de mieux
gérer l’activité de transformation des femmes”.Yarame Fall, Animatrice et Vice-présidente
du Conseil d’Administration Crédit MECPROPAS
Bien qu’à un premier moment, il ait été établi une conven-tion de collaboration avec la mutuelle de crédit RADI, plus tard, en 2010 et après cinq cycles de crédit, il a été décidé de travailler avec MECPROPAS (Mutuelle d’Epargne et de Crédit pour la Promotion de la Pêche Artisanale) compte tenu du fait qu’elle est située dans le quartier de Guet N’Dar, à proximité de l’ancienne zone de transfor-
mation, ce qui facilite l’accès des femmes à ses bureaux et le contact avec les responsables.
“Nous avons tenté de collaborer avec
ce projet car nous y sommes intéressés.
De fait, nous avons de l’expérience
dans le secteur de la micro-finance,
en particulier avec les femmes trans-
formatrices du quartier de Guet
N’Dar. Aussi, nous avons accepté ce
travail pour renforcer les femmes dans
l’activité de transformation(...). Nous
considérons qu’il est très important de travailler avec les femmes
transformatrices pour augmenter les sources des financements et
consolider la capacité des activités pour gagner sa vie(...)”.Sow Toly Kelly, Gérante MECPROPAS
Source: Élaboration propre à partir des documents de travail de la Fondation Habitáfrica.
RÉSUMÉ DES MICROCRÉDITS REMIS ENTRE 2008 ET MAI 2012 (tableau 2). Les crédits remis ont été:
CYCLE
du 15 janvier à18 février 20091
2345
DATE FEMMES BÉNÉFICIAIRES
MONTANT EN FRANCS CFA
TAUX DE REMBOURSEMENT
DÉLAI DE REMBOURSEMENT
67
95 25.000 100 % 1 mois
du 4 mars à 4 mai 2009 100 30.000 100 %
du 11 mai à 11 juillet 2009
159 50.000 et 100.000
100 %
du 29 de juillet à 19 octobre 2009 160 100 %
décembre 2009 à mars 2010 150 98,78 % 3 mois
avril à juillet 2010 200 88 %
février 2012 206 65 %
3 mois
3 mois
3 mois
3 mois
50.000 et 100.000
50.000 et 100.000
2 mois
50.000 et 100.000
50.000 et 100.000
21
Le présent tableau montre comment les mutuelles de
crédit ont une limite quant à leur capacité de gestion et à la
quantité d’argent en circulation. L’analyse des différents cycles
de crédit révèle la difficulté de l’instance de crédit pour gérer un
volume de plus en plus important de crédits à un nombre de plus
en plus élevé de femmes. En effet, un des facteurs qui garantis-
sent le succès (ou le taux d’intérêt élevé de remboursement des
mutuelles de crédit) est fondé sur la pression sociale. Le nombre
de femmes et donc le volume des crédits à gérer augmentant au
cours des derniers cycles, on perçoit plus de difficultés pour faire
face à la gestion des impayés ou des retards qui ont, comme cela
a été dit plus haut, des causes diverses.
Le taux d’intérêt appliqué a été de 1 % mensuel et les cré-
dits les plus importants (100 000 F CFA5) ont été attribués à un
nombre réduit de femmes considérées “grandes transformatrices”,
c’est-à-dire qu’elles pouvaient transformer une grande quantité de
produits, qui les obligeait à recruter d’autres femmes pour les aider.
“Nous pouvons dire qu’il y a de grandes transformatrices parce
qu’au début il y avait 6 groupes qui en ont bénéficié pour véri-
fier la capacité de remboursement. Nous pouvons dire qu’il y a de
petites transformatrices. Il y a beaucoup de transformatrices qui
ne peuvent pas supporter certaines sommes. Des 50 groupes, nous
observons que 80% de ces femmes sont de grandes transformatrices,
mais les 50 000 francs que nous leur attribuons représentent peu
par rapport aux activités, mais elles subsistent. Nous avons vu qu’il
y a une amélioration, ces sommes leur apporte réellement quelque
chose par rapport à leur capacité de production et à la gestion”.Yarame Fall, Animatrice et Vice-présidente
du Conseil d’Administration Crédit MECPROPAS
Les conditions pour l’accès au crédit ont été les suivantes:Être femme transformatrice de poissons, travailler à Guet
N’Dar et être membre de l’Union des Femmes Transformatrices
(UFT) de Guet N’Dar.
Constituer un groupe solidaire de cinq membres et ouvrir
un compte d’épargne à la Production chez MECPROPAS.
Payer les frais de dossier (1.000 F CFA) et de gestion
(1% du prêt) du compte ouvert chez MECPROPAS.
Chaque prestataire est obligée d’épargner un total de
1.000 F CFA au moment de chaque remboursement, mobilisa-
ble après un an et non rémunéré.
5 1 € = 655,957 F CFA.
Il existe deux types de crédit:Le crédit individuel pour chaque membre du groupe
solidaire qui dispose d’un compte d’épargne de Production chez MECPROPAS pour un montant minimum de 50 000 F CFA.
La concession de crédit pour un montant de 100 000
FCFA pour les grandes transformatrices soumise aux critères de MECPROPAS et du Comité du Crédit qui évaluent la capacité de production de la transformatrice et sa solvabilité.
Procédure de concession du crédit:Tenue d’une réunion du Comité du Crédit pour l’analyse
de la liste des bénéficiaires qui doit être signée par la présidente et la vice-présidente de l’UFT avec l’assistance de MECPROPAS et le soutien du Conseil du Service Régional de la Pêche.
La liste est déposée par la secrétaire de l’UFT cinq jours avant la date de la réunion.
Établissement d’un procès-verbal de délibération signé par le Responsable du Comité du Crédit et son adjointe avec en annexe la liste des bénéficiaires validée par le Comité du Crédit et MECPROPAS.
MECPROPAS autorise la liste des demandes en tenant compte des critères d’éligibilité susdéfinis.
MECPROPAS prepara los Contratos para la legalización en un plazo máximo de 48 horas después del examen de la lista de las solicitantes potenciales y prepara las fichas de seguimiento.
Les contrats signés par les bénéficiaires et légalisés sont déposés chez MECPROPAS et les crédits sont attribués dans les 48 heures.
MECPROPAS met les fonds à la disposition des bénéficiaires.
Les distributions des crédits sont effectuées par MECPRO-
PAS à Guet N’Dar dans les maisons des femmes, en présence des membres du Comité du Crédit, des responsables de l’UFT et des bénéficiaires.
Pour pouvoir bénéficier d’un nouveau cycle de crédit, il est nécessaire d’avoir remboursé au moins les 4/5e des crédits concé-dés aux membres de l’UFT. L’instruction d’une nouvelle demande de financement par une bénéficiaire est possible seulement après avoir remboursé 100 % du crédit attribué antérieurement.
23
La garantie est fixée à travers l’UFT, comme personnalité juridique, le compte d’épargne Production ouvert pour chaque groupe et l’épargne mobilisable au bout d’un an.
Les intérêts générés par le fonds (1% mensuel sur chaque microcré-dit) sont répartis de la manière suivante: 4/5 pour MECPROPAS et 1/5 pour augmenter le fonds de crédit des femmes.
“Oui, cela a bien fonctionné, parce que c’était bien organisé. Les femmes se
sentent réellement bien. Elles ont la manière qu’il faut pour dire ce qu’elles
pensent. Après la mise en œuvre de la convention, nous avons discuté avec elles
sur les modalités du prêt. Avant, les femmes n’avaient pas de comptes, par exem-
ple. Elles n’avaient pas de compte à la mutuelle. Elles n’avaient pas l’habitude
d’épargner de l’argent. Cela se prépare au moment du remboursement. Cela les
aide à rembourser le prêt. Si le client, au moment de l’emprunt, chaque jour
elle épargne, par exemple, 1 000 ou 500 francs, cet argent sera épargné dans
son compte. Cela leur facilite leur remboursement. C’est pour cela que nous
avons d’abord posé l’obligation d’ouvrir un compte chez MECPROPAS. En-
suite, nous avons observé qu’il y avait de nombreux changements dans la gestion
de leur travail, dans la manière de gérer l’argent que nous leur avons attribué.
Elles peuvent tirer un grand profit de ces formations pour réellement voir com-
ment gérer la somme. Nous pensons que c’est la manière qui a commencé à leur
donner la parole pour qu’elles s’expliquent sur le prêt, la convention, qu’elles
discutent sur les difficultés, les perspectives”.Amadou Bachir Mbengue, Agent du Crédit MECPROPAS
Le principal motif avancé par les femmes pour demander
le microcrédit est la nécessité qu’elles avaient de faire face à la dure
concurrence, notamment des commerçants, qui les escroquaient
en leur vendant de la matière première à un prix élevé et ensuite
en la leur achetant transformée mais en leur laissant un bénéfi-
ce très faible. Avant de disposer des microcrédits, de nombreux
pêcheurs ne vendaient pas directement le poisson aux femmes car
ils se méfiaient de leur capacité de paiement. Aussi, le crédit leur
a servi pour devenir des micro-entrepreneuses, disposer d’un fi-
nancement propre et négocier directement avec les pêcheurs, sans
nécessité de mettre en gage leur travail auprès d’usuriers.
“Le crédit est une très bonne chose pour moi car je peux travai-
ller, faire des bénéfices, rembourser et avec le bénéfice je peux
faire beaucoup de choses, acheter des terrains, vivre très bien.
Avant je ne pouvais pas le faire. Avec le crédit, tu peux aussi
avoir un bénéfice si tu es malade, tu peux aller au dispensaire et
acheter des médicaments et des femmes qui sont très ambitieuses
peuvent ouvrir un compte pour un avenir meilleur”.Ndeye Marie Diallo, bénéficiaire
“Ce sont les crédits qui ont permis aux femmes d’être des mi-
cro-entrepreneuses car lorsque les femmes allaient chez les com-
merçants, elles n’avaient pas d’argent et les commerçants leur
en prêtaient mais ils leur vendaient l’article le plus cher mais
l’approvisionnement directement chez les pêcheurs est le plus
rentable (...) elles sont très motivées car avant la convention les
femmes achetaient aux commerçants et maintenant elles achètent
directement le produit et elles sont plus autonomes. Par ailleu-
rs, au lieu d’acheter plus cher elles achètent moins cher. Mais
aujourd’hui si tu as à ta disposition ton propre fonds, tu achètes
directement et c’est moins cher”.Corguene Dieye, animatrice
Si toutes les femmes ont insisté sur la nécessité
d’augmenter le montant du microcrédit, vu que celui de
50.000 F CFA leur résulte insuffisant pour pouvoir faire face à
une production qui leur suppose réellement une augmentation
significative des bénéfices, elles ont en même temps reconnu
que le système du crédit leur donne confiance et qu’elles ne
se sentent pas sous pression par le remboursement. Certaines
parlent de femmes qui ont abandonné le projet parce qu’elles
ne pouvaient pas rembourser le crédit6, même si elles se réfèrent
toujours à d’autres personnes, mais elles insistent sur le fait qu’il
faut être responsable pour pouvoir gagner la confiance des bai-
lleurs de fonds.
6 Principalement dû à de longues périodes de pénurie de matières premières et le manque de travail consécutif.
25
“Je n’ai jamais senti la pression d’un agent ni chez moi ni sur mon lieu
de travail. Beaucoup de femmes ont abandonné les microcrédits par la
pression. Par exemple, actuellement, il n’y a pas de poissons, pas de tra-
vail, comment va-t-on rembourser l’argent si elles ne travaillent pas?
Cette année ou ces derniers mois, Binta a dit à la mutuelle qu’elle ne
fasse pas pression sur les fem-
mes. Ce n’est pas une bonne
chose. Parce que ce travail
peut être fait discrètement.
S’il n’y a pas de discrétion,
les choses ne vont pas fonc-
tionner (...) Si cette femme a
des difficultés, normalement
l’agent doit la comprendre et
lui accorder quelques jours
ou quelques mois pour le
remboursement”. Aïssatou Teuw, bénéficiaire
“Je n’ai jamais ressenti de pression de la part de la mutuelle
pour payer, pour rembourser l’argent (...) Si l’agent vient
pour encaisser la somme et que nous ne l’avons pas, il nous
donne plus de temps pour payer car je suis une femme qui
respecte ses engagements, qui paie dans les délais, mais s’il
s’agit d’une femme qui ne paie pas dans les délais, elle va
ressentir une pression, elle va recevoir et entendre toutes sortes
de paroles, mais ce n’est pas mon cas. Je rembourse dans les
délais chaque mois”.Fatou Bintou Diagne, Présidente
GIE Jambaru Siin et bénéficiaire
Les principaux pro-
blèmes pour le rembourse-
ment du crédit sont dus à
des problèmes saisonniers
qui ont diminué la produc-
tivité, comme l’arrêt biolo-
gique vécu durant l’étape de
l’hivernage7, la pénurie de
licences de pêche et la pré-
sence de bateaux de pêche
étrangers le long des côtes
qui absorbent une grande
partie de l’activité. Néanmoins, il convient d’étudier la situa-
tion car elle se reproduit chaque année à la même époque et
interfère dans la capacité de remboursement des femmes.
7 De juin à novembre, approximativement. Caractérisé par des pluies et une augmentation de la température.
“Le principal problème est la situation actuelle, le problème des
licences. Nous sommes restés 5 mois, 6 mois, sans pouvoir travailler
et s’il n’y a pas de travail il est difficile de rembourser un crédit”.Seynabou Fall, bénéficiaire
“Le programme des microcrédits a bien fonctionné même lorsqu’il y a
eu des difficultés. Les problèmes sont apparus dans le cinquième cycle
de crédit avec un grand retard dans le remboursement. Si une femme
n’a pas de produits pour travailler, il y a un problème et il est normal
qu’elle ne puisse pas rembourser le crédit. Ce sont les risques normaux
de l’activité. Cela a été à cause de la situation conjoncturelle”.Malang Sarr, Responsable Axe Pêche CDIG
Enfin et comme une des grandes réussites du projet de
microcrédits, les bénéficiaires signalent qu’elles font l’objet de
plus de respect. Au-delà des ressources économiques sur lesque-
lles elles comptent, un signe réel d’autonomisation de ces femmes
est le sentiment qu’elles doivent être respectées par leur famille
et leurs voisins, par leurs camarades de travail et les personnes
avec lesquelles elles négocient. Elles ressentent que l’argent leur
a donné l’opportunité d’être plus fortes, indépendantes et de
démontrer qu’elles peuvent travailler durement, gagnant avec
cela le respect de leur entourage.
“J’ai eu beaucoup de pouvoir après avoir reçu le crédit et je sens
aussi que les personnes me respectent beaucoup. Dans mon groupe,
s’il y a des femmes qui veulent un crédit et qui ne parviennent pas à
l’avoir, je peux, avec ce que j’ai reçu, le partager avec elles. Quand
elles travailleront, elles me rembourseront l’argent”.Fatou Bintou Diagne, bénéficiaire et Présidente GIE Jambaru Siin
“Depuis que j’ai reçu le crédit, je me sens maintenant plus puissante,
je sens que les gens me respectent car je vois souvent des personnes qui
s’adressent à moi pour me demander quelque chose. Avant je ne pouvais
aider personne, parce que je n’avais rien, mais avec le bénéfice que je
retire du crédit, je peux aider quelques personnes, pas beaucoup mais
quelques-unes et c’est pour cela que l’on commence à me respecter”.Suzanne Sow, bénéficiaire
Au respect acquis face à d’autres acteurs extérieurs et
grâce à la confiance gagnée, il a été observé un changement dans
l’organisation interne du groupe de femmes. Grâce au crédit, les
femmes ont cessé d’être totalement dépendantes de celles qui
avaient plus de moyens dans leur prise de décisions. Au niveau
interne, cela suppose que la présidente du groupe n’ait plus de
pouvoir de décision absolu sur la prise de décisions et que peu à peu
les autres femmes membres expriment leur opinion.
27
“Au commencement, il
n’y avait pas de système
de microcrédits, ce qui
supposait un problème
avec les femmes. Mme
Binta Sarr avait le mo-
nopole du pouvoir à Guet
N’Dar. Tout ce qu’elle
disait, se faisait. Parce
qu’elle avait de l’argent.
Lorsque les femmes
n’avaient pas d’argent
pour acheter le produit,
c’était elle qui finançait.
Aujourd’hui, avec le
système de microcrédits,
cela a changé. Les fem-
mes sont plus autonomes
qu’auparavant. Binta
conserve encore le pouvoir
mais pas comme avant”.Awa Diallo, Technicienne
Axe Pêche Fondation Habitáfrica
ACTUACIONES UNIÓN DE MUJERES TRANSFORMADORAS (tableau 3)::
Amélioration de l’accès aux ressources financières du GIE des
professionnels de la pêche et des asso-ciations de femmes transformatrices
BJECTIF
Création d’un Comité de gestion du crédit formé de femmes transformatrices.
Renforcement de l’organisation du Comité de gestion du crédit.
Séminaire de formation pour le renforcement de la gestion ad-ministrative de l’épargne et du crédit.
Renforcement de la politique de sensibilisation sobre le microcrédit.
Séminaire de formation pour le renforcement de la gestion ad-ministrative de l’épargne et du crédit.
Séminaire de formation sur la gestion administrative basique à 150 femmes transformatrices de poissons alphabétisées.
2 formations pour les 10 femmes qui composent le Comité du Crédit.
Un fonds de 1070 microcrédits a été mis à la disposition des deux associations de femmes transformatrices.
ÉVELOPPEMENT
29
RÉUSSITES
Comité de Gestion a capacité de décision et de gestion autono-me du crédit.Les femmes transformatrices ont connaissance des techniques et des outils de gestion.Amélioration de la qualité de la gestion financière des activités de production.Les crédits permettent la provision directe du produit frais et d’autres matériels nécessaires pour la production (sal, bois, ma-nutention, etc.). Élimination de la figure des intermédiaires qui normalement vendent plus cher les fournitures.Élimination des dettes pour pouvoir produire.Rentabilisation et allègement des systèmes de transactions commerciales.Plus grand respect et confiance au moment d’acheter à des pêcheurs qui avant n’osaient pas leur vendre.Augmentation de la rentabilité et la capacité de production. Beaucoup se sont transformées en micro-entrepreneuses.Satisfaction des femmes pour l’autonomie acquise lors de la production depuis qu’elles bénéficient du crédit.Depuis qu’elles bénéficient du financement, elles peuvent pren-dre en charge les 30 jours du mois des dépenses quotidiennes de la famille.
400 femmes informées/sensibilisées sur le fonds de microcrédit mis à leur disposition.
Une stratégie de suivi du financement a été mise en marche pour faciliter le remboursement du crédit et pour la prépa-ration de l’augmentation du nombre de bénéficiaires.
31 campagnes de sensibilisation avec l’objectif de renforcer les connaissances des membres des groupes solidaires concernant son organisation interne pour le correct remboursement du crédit.
Nombreuses actions de sensibilisation des femmes transformatrices bénéficiaires du crédit dans 100 zones de repos pour valider la pertinence de change-ment de mutuelle à une plus proche.
Création des conditions du crédit (taux de rembour-sement et délais pour le remboursement abordables) adaptées à la réalité du travail des bénéficiaires.
ÉVELOPPEMENT
31
SYSTÈME DE COMMERCIALISATION
Dans ce projet, il a été pris pour point de
départ une faiblesse du système traditionnel
de commercialisation qui ne permettait pas la
connaissance de la quantité de poissons ven-
dus par chaque femme, avec la perte consécutive
des bénéfices. La forte concurrence que les propres femmes
exerçaient les unes par rapport aux autres et celle des autres
commerçants provoquait de plus en plus une augmentation des
prix d’achat de la matière première et une pression pour dimi-
nuer le prix de vente du poisson transformé, compte tenu de
l’énorme offre existante. Le manque de ressources économiques
suffisantes pour faire face à l’achat initial de produits poussait les
femmes à demander des prêts non officiels à des intermédiaires
commerciaux qui appliquaient des pratiques usurières et perce-
vaient un taux d’intérêt élevé de la part des femmes.
D’autre part, les conditions inadéquates et insalubres
dans lesquelles ces femmes effectuaient leur activité, envahissant
la zone du fleuve où est débarqué le poisson, provoquant un
embouteillage de la route principale à proximité des camions
de transport du poisson, partageant l’espace avec des ordures et
des déchets et appliquant des techniques inappropriées et peu salutaires pour la transformation du poisson, supposaient une menace tant pour le travail quotidien que pour la conservation de l’environnement, aussi la mairie avait envisagé une expulsion
immédiate des femmes de ce lieu.
“Le problème qui a été posé sur ce site a causé beaucoup de diffi-
cultés parmi les habitants, les pêcheurs et les gens qui visitaient la
ville de Saint Louis”. Latyr Fall, adjointe de la mairie de Saint-Louis
Cette série de problèmes rendait difficile l’activité des
femmes transformatrices du quartier de Guet N’Dar, aussi par
le projet il a été décidé d’intervenir dans ce sens et de mettre
en œuvre un système de commercialisation qui renforce
l’organisation du travail et garantisse l’augmentation de bénéfi-
ces et l’amélioration de la qualité du travail.
Le t ab leau
suivant présente un
résumé des activités
qui ont été exécutées
pour atteindre les
résultats commentés.
ACTUACIONES UNIÓN DE MUJERES TRANSFORMADORAS (tableau 4). Algunas de las actividades y resultados alcanzados han sido::
Amélioration des connaissances et des procédures de commer-
cialisation des produits de la pêche transformés et amélioration des conditions de production par l’accessibilité à un espace avec des conditions d’hygiène et de salubrité adéquates qui améliorent la qualité.
BJECTIF
Accompagnement et travail quotidien avec les femmes transfor-matrices de la zone du fleuve durant 5 ans.
Organisation de voyage d’échange d’expériences dans d’autres lieux du Sénégal avec des femmes du même secteur.
Sessions avec les femmes transformatrices pour analyser d’autres systèmes de travail collectif.
Débats sur la nécessité de changement de système de travail.
Sensibilisation sur l’importance de créer un Comité de Com-mercialisation.
Identification des femmes capables de suivre la gestion du Co-mité de Commercialisation.
Création d’un Comité de Commercialisation avec une caisse et une comptable formée dans la gestion qui appuie toutes les femmes transformatrices.
Soutien et formation des membres du Comité de Commercialisation.
ÉVELOPPEMENT
33
Étude d’analyse/solutions pour augmenter et améliorer de la capacité de production.
Installation de deux bascules pour que toutes les femmes puis-sent peser le poisson et paient à cet effet.
Formations sur les méthodes de transformation de 160 femmes et dotation de matériels basiques.
Formations pour une meilleure gestion de leurs activités et fixation de prix qui améliorent les bénéfices et les problèmes de concurrence.
9 campagnes de sensibilisation pour le déplacement de la zone du fleuve vers le nouveau Centre.
Formation d’au moins 300 femmes du bord du fleuve en ma-tière d’hygiène et de santé pour les maintenir dans le nouveau Centre de transformation.
Formation sur les effets négatifs des combustibles nocifs et sur les techniques d’utilisation de 88 nouveaux fours pour le Centre de transformation construit.
Participation des femmes dans tout le processus relatif à la Construction du Centre pour 380 femmes transformatrices de poissons (recensements, définition des plans et des néces-sités, etc.).
Accord sur un protocole d’hygiène dans les installations du nouveau Centre.
Accord entre tous les acteurs d’un manuel de gestion du Centre de transformation.
Création de différentes équipes de gestion du centre : de maté-riels, du sel, des bascules, de l’organisation, etc.
ÉVELOPPEMENT
RÉUSSITES
Renforcement des GIE (Groupements d’Intérêt Économique) de femmes transformatrices.
Installation de deux bascules (une pour le côté du fleuve et l’autre pour le côté océan) destinées à fixer le prix par kilogramme quo-tidien et d’éviter des pertes économiques pour les femmes.
Amélioration de la qualité du poisson par le système de poids par des bascules car lorsqu’il y a plus de poissons, le bénéfice obtenu est plus important.
Régulation d’un prix de poisson qui est respecté par toutes les femmes et qui leur permet d’être plus fortes au moment de négocier avec les marchands de poissons sans nécessité d’intermédiaires.
Centralisation de la vente du produit transformé.
Amélioration du système de transaction commerciale des fem-mes transformatrices.
Accord sur un manuel des procédures internes pour le Comité de Commercialisation.
Compte commun pour toutes les femmes membres des GIE où les gestionnaires des bascules gardent l’argent. Pos-térieurement décision de toutes les femmes sur la destina-tion de cet argent.
Les femmes se sentent plus fortes pour faire face à la féroce con-currence et ont gagné plus de respect et plus d’autonomie.
Amélioration des données statistiques du Service de le pêche de Saint-Louis par le nombre de tonnes que sont transfor-mées et vendues.
Nouveau centre de transformation du poisson qui couvre les nécessités des femmes et géré par elles, où elles développent leurs activités dans des conditions de santé et d’hygiène adéquates.
L’installation des femmes dans le nouveau Centre leur per-met de réaliser une production de qualité.
La libération du bord du fleuve où étaient auparavant les fe-mmes transformatrices offre la possibilité d’améliorer l’espace sur le plan environnemental.
35
UNION DES FEMMES TRANSFORMATRICES
DE POISSONSLorsque la Fondation Habitáfrica a commencé à
travailler à Guet N’Dar, elle a identifié une série de problèmes rela-
tionnels parmi les femmes transformatrices qui travaillaient des deux côtés du quartier, les unes de la partie maritime et les autres de la partie fluviale. Au cours des 40 dernières années, il existait un conflit latent entre les deux groupes de Jambaru Siin et de Takku Liguey qui regroupaient 90 % des femmes transfor-matrices. Des conflits sur les propriétés et sur l’exercice des fonctions de représentation empêchaient l’existence d’un sentiment de groupe et les femmes préféraient travailler de manière individuelle sans reconnaî-
tre les bénéfices que pourrait leur rapporter un groupement.
L’information sur les produits, prix et processus de transforma-
tion ne circulait pas de manière fluide entre les femmes, ce qui
aiguisait les problèmes ci-dessus mentionnés et qui interféraient
dans l’obtention de bénéfices.
Afin de régler ces conflits et de pouvoir agir depuis la force que
donne le travail en groupe,
le projet a examiné une série
d’activités de sensibilisation, le
renforcement de l’organisation
et la création de l’Union des
Femmes Transformatrices qui
regroupe les deux GIE et dont
les organes de représentation
sont élus démocratiquement
et périodiquement par toutes
les femmes membres. Cet
organe est chargé de repré-
senter et de gérer le reste des
actions, tels que le comité de
commercialisation et le comi-
té de gestion du crédit, en accord avec les autres organismes
communautaires.
ÉVELOPPEMENTACTIONS DE L’UNION DES FEMMES TRANSFORMATRICES (tableau 5). Certaines activités et des résultats obtenus ont été:
AAugmentation et amélioration de la capacité de production et de
l’organisation des deux associations de femmes transformatrices de poissons.
BJECTIF
Sensibilisation pour que chacun des deux GIE (Groupements d’Intérêt Économique) soit bien défini.
Sensibilisation sur le fonctionnement d’un groupement avec les obligations et les droits de toutes les femmes et de l’équipe de direction.
Renforcement de l’organisation et de l’équipement de base des deux GIE (Takku Liguey et Jambaru Sinn) de femmes transformatrices.
Sensibilisation de 268 femmes pour le changement des modes de vente des produits de la pêche, en leur faisant prendre cons-cience de la nécessité de le faire ensemble.
Formation en gestion financière au Comité de Gestion chargé des deux GIE.
Séminaire de formation pour le renforcement de la gestion ad-ministrative de l’épargne et du crédit.
Deux niveaux d’alphabétisation avec l’Inspection du Départe-ment de l’Éducation Nationale (IDEN).
Alphabétisation de 155 femmes professionnelles de la pêche avec 59% de réussite et un taux d’assistance de 62%.
37
ÉVELOPPEMENT
Conscience plus aigüe de l’importance et des avantages de l’alphabétisation pour améliorer leurs capacités et la sécurité dans leurs activités de production et dans les transactions commerciales, ainsi que dans leur vie quotidienne.
Amélioration de leurs capacités d’organisation. Elles sont plus for-tes et plus compétitives comme femmes et comme travailleuses.
Conscience plus aigüe des avantages du travail en groupe et de la répartition des rôles et des responsabilités.
Réduction des conflits de communication internes dans les espaces de production.
Mécanismes d’élections démocratiques pour la création des di-fférents comités (commercialisation, microcrédits, gestion du nouveau centre, etc.).
Augmentation de la camaraderie entre elles et encouragement les unes les autres pour participer dans les différents processus.
Création et lancement de l’Union des Femmes Transformatrices.
Organes de gestion de la fédération formés pour répondre d’une seule voix à diverses situations.
Participation de l’UFT dans les organes de décision du quartier.
Formation en gestion administrative de base.
Campagne de formation/information/sensibilisation de la création de la fédération des femmes (avec la JICA).
Formation de 98 femmes sur différentes formes d’organisation économique et sociale du Sénégal.
Sélection de 25 femmes pour la sensibilisation porte à porte de 500 femmes pour se regrouper dans une structure fédérative.
Consolidation de la structure fédérative qui réunit les deux groupes traditionnellement antagonistes.
Tenus d’une Assemblée Générale pour la création de l’Union des femmes transformatrices de Guet N’dar.
RÉUSSITES
39
AMÉLIORATION DES SYSTÈMES DE GESTION DES DÉCHETS SOLIDES URBAINS
La ville de Saint-Louis, comme la plupart des villes du Sénégal, présente un sérieux problème de gestion des ordu-res. Les points habilités pour le dépôt des déchets sont rares et le service de ramassage est irrégulier et ne couvre pas tout le périmètre de la ville. Dans le cas de Guet N’Dar la situation est aggravée s’agissant d’une zone avec une densité de population élevée où l’accumulation des ordures est majeure. La faiblesse des moyens s’ajoute à une faible conscience environnementale de la part de la population, qui a été accoutumée à déposer ses déchets dans la rue ou à les jeter dans le fleuve et l’océan. Ces déficiences provoquent une dangereuse situation d’insalubrité et la prolifération de maladies dans la population qui est par-ticulièrement pressante dans un contexte de surpeuplement et de concentration humaine.
Dans ce contexte, le projet a examiné la nécessité d’améliorer les systèmes de gestion des déchets solides urbains
par un renforcement de l’équipement technique et des ressour-ces humaines du GIE qui gère la collecte des ordures dans le quartier (GIE CETOM) et la sensibilisation de la population du quartier pour augmenter son implication dans ce sens et lui faire prendre conscience des conséquences sur la santé qu’a l’accumulation des ordures ainsi que les bonnes pratiques d’hygiène et de santé.
ACTIONS DE L’AXE DÉCHETS SOLIDES URBAINS (tableau 6). À cette fin, les actions suivantes ont été mises en œuvre:
Formations en gestion financière et organisationnelle de l’équipe du GIE CETOM (chargé de la collecte des ordures dans le quartier).
Soutien à la définition d’un système de collecte autonome dans tout le quartier.
Soutien aux coûts de fonctionnement du GIE les six premiers mois.
Définition de 6 secteurs du quartier avec la numérotation des maisons où sont collectées les ordures.
Dotation de l’équipement nécessaire: 6 charrettes, 6 chevaux, 6 harnais, 40 brouettes, vêtements, masques et gants de protection pour un total de 14 éboueurs.
3 000 seaux à ordures répartis dans différentes familles du quartier.
Améliorer le système de gestion de déchets solides urbains.
BJECTIF ÉVELOPPEMENT
41ACTIONS DE L’AXE DÉCHETS SOLIDES URBAINS (tableau 6). À cette fin, les actions suivantes ont été mises en œuvre:
Mise en œuvre d’un système communautaire de collecte des ordures dans tout le quartier de Guet N’dar.
Amélioration de la communication interne entre le GIE CETOM et le Comité de Quartier en vue d’une transparence de l’activité.
Création d’une base de données électronique des noms des chefs de famille pour un meilleur contrôle du paiement des services de collecte.
Plus de 1 500 personnes inscrites au système de collecte des ordures porte à porte.
Dispositif de collecte de 5 kg d’ordures par maison, 1,85 t par jour et 35 t par semaine des ordures collectées.
Le quartier de Guet N’dar présente un aspect beaucoup plus propre et a amélioré les conditions sanitaires et diminué l’accumulation des ordures.
RÉUSSITES
Formation en mobilisation sociale de 32 femmes élues par la population responsables de secteurs pour la su-pervision et la collecte de la cotisation par les familles.
Formation de 32 femmes en gestion financière.
Formation de 12 éboueurs en hygiène et soin des chevaux.
Engagement durant 9 mois de services vétérinaires.
Campagnes de sensibilisation sur les bonnes pratiques d’hygiène et de santé, et de conservation et de respect des espaces publics.
Campagnes de nettoyage et de sensibilisation sur les places, par des œuvres de théâtre et par la radio à Guet N’dar.
ÉVELOPPEMENT
43
BONNES PRATIQUESComme cela a été évoqué, ce document pré-tend capitaliser les expériences des actions
mises en œuvre dans le cadre de la Conven-tion pour le Développement Intégral de Guet
N’Dar. L’analyse de ces expériences concerne les problèmes et les difficultés préalables et ceux apparus du-
rant son exécution, celles proposées et les approches survenues, les bonnes pratiques mises en application aidant à déterminer les principaux apprentissages du projet. La gestion de ces con-naissances sera utile dans la systématisation du travail effectué et dans la planification et l’exécution de futures interventions, par la Fondation Habitáfrica et les différents acteurs impliqués.
Les pratiques analysées, si elles ne sont pas toujours les plus
tangibles, sont directement liées aux apprentissages que nous pouvo-
ns transférer à d’autres projets comme sont le travail direct avec les
femmes bénéficiaires, le renforcement des groupes et la gestion, la
formation dans divers domaines (alphabétisation, microfinances,
pratiques professionnelles salutaires, etc.), une collaboration avec
les femmes - processus participatifs, accompagnement mutuel –qui
ont été maintenus durant les près de six ans de la convention.
Grâce à l’analyse de l’information recueillie, il a été possible d’identifier quatre catégories d’étude principales : harmonisation, points forts, points faibles et durabilité. Elles rassemblent toutes les actions mises en œuvre dans les trois axes d’intervention du projet.
9.1 HARMONISATIONUne des grandes réussites du projet a été sa capacité d’adaptation
aux nécessités et aux exigences du quartier de Guet N’Dar. S’il existe d’autres interventions, comme la coopération japonaise (JICA) et des projets antérieurs centrés sur l’amélioration de la productivité dans le secteur de la transformation de produits de la pêche, comme le centre du côté maritime, le projet a su regrouper dans une même convention trois axes fondamentaux pour le développement du quartier liés à son activité productive et à la situation environnementale. Les habitants et, en particulier, les femmes participant au projet, conscients de cela, sont reconnaissants et satisfaits des actions engagées.
“Nous voulons que cette fois ils soient d’accord, qu’ils ne partent
pas, qu’ils continuent de travailler, qu’ils accompagnent les femmes,
parce que c’est un grand bénéfice pour les habitants de Guet N’Dar.
Lorsque nous voyons un espagnol c’est comme si nous avions devant
nous les gens de l’ONG, nous sommes contentes”.Aïssatou Teuw, bénéficiaire
“Le projet a respecté notre souhait”.Aminata Fall, bénéficiaire
Mais lorsque nous parlons d’adaptation, ce n’est pas seulement
pour faire référence à l’adéquation avec les demandes des habitants,
sinon que nous avons su respecter les règles de coexistence tradition-
nelles8 sans porter atteinte à la promotion des droits de la femme.
“Ici la plus grande partie des tâches domestiques relève de la femme
car les hommes s’en vont à la mer le matin et rentrent la nuit, et
ce sont les femmes qui s’occupent des enfants, qui font tout. Si tu
aides les femmes c’est comme si tu aidais les hommes. Parce qu’ici si
les femmes sont transformatrices, elles sont des micro-commerçan-
tes ou vendent du poisson. Ce sont les principaux travaux que les
femmes font dans le quartier”.Corguene Dieye, animatrice
“Il y a des maris qui viennent nous parler, d’autres paient pour leurs
femmes (...) Ils les ont autorisées à faire des activités qui vont générer
des bénéfices pour elles, résoudre des problèmes et l’indépendance
du mari. Ceci est important, car lorsque le mari lui demande de
l’argent, elles peuvent décider d’en garder une partie”.Khar Fall, agent de remboursement MECPROPAS
Durant les différentes sessions de collecte de l’information,
il a pu être constaté la satisfaction des participantes sur le
mode de réalisation de ce projet, qu’elles considèrent qu’il
était très nécessaire pour améliorer la production écono-
mique et que, en dépit des nécessités d’amélioration qui
sont détaillées ci-après, il existe un sentiment généralisé
que le projet a été adapté aux besoins du quartier.
“Eau fond, il me semble que le contenu a été bien parce que nous
nous sommes rendu compte que la convention a pris en considération
les difficultés liées au travail de la femme, au remboursement du cré-
dit, surtout dans la durée du crédit. Elle retient le travail des femmes
dans les périodes de pénurie et de remboursement et en général le cycle
de remboursement par rapport aux modes de procéder des pêcheurs,
lorsqu’ils vont en mer, parfois, s’il n’y a pas beaucoup de poissons, cela
affecte le remboursement du prêt (...) Il me paraît que la collaboration
avec la CDIG a été bénéficiaire pour nous. Je dis : non seulement pour
les femmes, mais pour le quartier et les gens. Nous regrettons. À travers
la collaboration de la CDIG, le quartier se sent bien”. Amadou Bachir Mbengue, Agent Crédit MECPROPAS
Plusieurs facteurs comme l’installation de la mutuelle
MECPROPAS dans le quartier, le soutien des animateurs locaux
8 Sénégal est caractérisé par une forte domination patriarcale.
45
et l’accompagnement par des techniciens impliqués dans le
projet, ont favorisé l’harmonisation entre les objectifs et métho-
des du projet et la réalité de Guet N’Dar. Ce quartier est carac-
térisé par des conditions sociodémographiques qui le différencie
du reste9, aussi le soutien du
personnel local et des ani-
mateurs du propre quartier
s’est avéré fondamental pour
garantir la réalisation des
objectifs initiaux.
“Nous pouvons dire
qu’elles sont différentes.
Elles sont toujours au
bord du fleuve, au bord
de l’océan, tout cela fait
qu’elles concentrent leurs
activités autour de l’océan
et du fleuve, c’est pourquoi
elles n’ont pas la même mentalité que les autres habitants des autres
quartiers (...) On peut dire que la MECPROPAS est une initiative
locale et est née avec la volonté des femmes et il y a une union locale
de femmes transformatrices et de femmes commerçantes qui veulent
créer quelque chose. Il y a des tontines partout, il y a des activités non
officielles, mais avec le soutien dans le financement de la pêche, il a
été instauré la mutuelle de crédit et d’épargne où est la naissance de
la MECPROPAS avec les femmes commerçantes, en particulier les fe-
mmes transformatrices des groupes
Takku Liggeey et Jambaru Siin”.Sow Toly Kelly,
Gérante MECPROPAS
“Les animateurs sont du quar-
tier, c’est pourquoi il y a une
implication des acteurs de la
communauté”.Malang Sarr, Responsable
Axe Pêche CDIG
Si les femmes ont
acquis une conscience du tra-
vail de groupe et de la nécessité
d’être unies pour être plus fortes au niveau de l’organisation, néanmo-
ins dans le travail particulier prédomine l’individualisme. Elles sentent
que leur effort doit tourner à leur avantage personnel et que si elles
font un travail en commun, elles devront partager les bénéfices.
9 Entre autres: importante densité de population, ce qui provoque surpeuplement et pénurie des infrastructures de base, taux d’analphabétisme élevés an raison du travail précoce et faible nombre de centres éducatifs par rapport aux autres quartiers, diversité des activités productives réduite.
“Nous préférons le travail individuel au travail de groupe, parce
que si tu travailles en groupe et tu as un problème, tu ne pourras
pas utiliser l’argent de la caisse du groupe et si c’est ton propre
argent, tu pourras l’utiliser et plus tard, un autre jour, si les choses
vont mieux, tu pourras remplacer cet argent, mais avec le travail
de groupe tu ne le peux pas”.Fatou Sène Fall, bénéficiaire
“La coopérative existe mais tout le monde travaille de manière
individuelle, la coopérative crée les conditions de production, c’est
ainsi qu’elles travaillent, parce que l’union que nous avons créée
est pour attirer la coopérative. Mais comme elles sortent d’une
situation difficile de plus de 40 ans, cela ne peut se faire immé-
diatement. Il faut les laisser l’assimiler peu à peu et harmoniser
pour venir et créer une organisation dynamique que comprenne le
système de coopérative. C’est très difficile car c’est une coopérative
qui existe mais il y a des problèmes”.Malang Sarr, Responsable Axe Pêche CDIG
Outre la proximité, les bénéficiaires estiment qu’une des
forces du projet a été l’accompagnement que les techniciens leur
ont apporté, aussi bien pour les questions techniques que dans la
tentative d’une meilleure compréhension de leurs problèmes.
47
“Ma vie a beaucoup changé parce que l’ONG avant de nous
donner le crédit nous a montré le chemin à suivre pour réussir
et un chemin que si nous le suivons, nous réussirons. Les femmes
qui veulent progresser ont bien entendu le message qu’ont fait
passer les espagnols. Que toute femme travailleuse qui veut aller
de l’avant doit prendre un bon chemin et je sais que ma vie a
beaucoup changé avec le projet espagnol(...)”. Astou Gueye, bénéficiaire
De même, la convention a travaillé pour l’union des
bénéficiaires, afin qu’elles puissent améliorer leurs capacités
d’organisation et être plus fortes et compétitives en tant que
femmes et en tant que travailleuses. À cette fin, la création de
l’Union des Femmes Transformatrices a été soutenue, elle est
formée par les deux GIE qui par tradition travaillaient dans la
transformation du poisson, l’une du côté maritime et l’autre du
côté fluvial. Ces deux groupes, jadis séparés et subordonnés à la
seule voix de chacune de leurs présidentes, forment aujourd’hui
une union qui prend des décisions autonomes et dispose de mé-
canismes d’élections démocratiques de ses représentantes. Cela
a eu une incidence sur l’augmentation de la camaraderie entre
les femmes, qui se soutiennent dans le travail et s’encouragent les
unes les autres à participer aux différents processus.
“Les forces du projet se trouvent dans la partie de l’organisation, car
le projet a organisé les GIE, a organisé un ensemble pour les femmes
transformatrices et il y aussi les crédits, qui ont permis aux femmes
d’être des micro-entrepreneuses (...) Auparavant, elles n’étaient pas
bien organisées mais maintenant elles le sont mieux. Avant, cette
relation n’existait pas, aujourd’hui cela a beaucoup changé, elles
travaillent en commun. Les deux groupes ont mis en marche une
union, l’Union des Femmes Transformatrices. L’une est la présidente
et l’autre la vice-présidente (...) pour le travail elles travaillent indi-
viduellement mais pour le groupe elles s’organisent, voient qui n’y va
pas, quelles sont les méthodes à adopter pour que le travail qu’elles
font leur apporte davantage (...) la convention a fait des formations,
a organisé des prises de conscience pour que la population puisse
prendre ses propres responsabilités. Je crois que depuis la convention,
la population est mieux organisée”.
Conguene Dieye, animatrice
“Lorsqu’il y a une réunion, chacune a quelque chose à dire, non
seulement nous laissons la parole à la présidente, qui va décider,
non, chacune dit ce qu’elle pense et tout le groupe en bénéficie. Si
c’est une bonne idée, nous l’appliquons, si c’est une mauvaise idée,
nous la changeons. Nous travaillons ensemble”.
Aminata Diaw, bénéficiaire
Sans doute, la mise en œuvre de la convention a été marquée par la disposition des bénéficiaires à y participer, conscientes du fait qu’il s’agissait d’une opportunité d’amélioration de l’environnement et soutenues par le nouveau système d’organisation à travers l’UFT qui a encouragé l’implication de toutes les participantes. Les actio-ns de sensibilisation ont été fondamentales pour que les bénéficiai-res prennent conscience de la nécessité de s’engager dans le projet et de garantir de cette manière sa durabilité.
“La population s’est bien impliquée. Chaque fois que nous nous fai-
sons des réunions avec les femmes transformatrices, la salle est toujo-
urs petite. J’ai écouté avec attention ce que la CDIG et les autres
partenaires disaient pour améliorer ses conditions de vie. En octobre
2010, l’Union des Femmes Transformatrices de Guet N’Dar a mis
en marche un projet pour toutes les femmes du quartier. C’est un
projet qui a intéressé tout le monde. Si tu y vas, tu verras que toutes
les femmes sont présentes. Je dis que la population de Guet N’Dar a
été impliquée dans ce projet (...) Il y a eu des cours de renforcement
des capacités, des séminaires de formation, des voyages à Dakar et
tout ceci pour les obliger ou pour les aider, en tous les cas, à acquérir
les mêmes connaissances. Non seulement dans la transformation
mais aussi dans les autres activités de la vie publique. Elles étaient
présentes chaque fois que nous avons eu besoin d’elles”.Djibril Gueye, Président Conseil de Quartier
Cette implication a permis que les femmes du quartier puissent participer aux organes de prise de décisions du quartier de sorte qu’elles pouvaient faire entendre leurs demandes comme le font les autres groupes. Elles sont conscientes qu’elles doivent défendre elles-mêmes leurs droits, parce que chaque groupe a ses propres intérêts.
“Le conseil de quartier regroupe pratiquement en son sein toutes
les différentes catégories d’organisations, c’est pourquoi les femmes
transformatrices y sont représentées. C’est ainsi que cela se fait.
À ce niveau, il n’y a pas de problèmes et les femmes du quartier
ont toujours géré les activités, ont rendu des comptes au conseil de
quartier. Bien entendu le conseil de quartier veut être membre du
comité qui va gérer le microcrédit. Les femmes leur ont dit: non,
nous sommes les bénéficiaires, nous sommes celles qui le gérons (...)
Nous pouvons signer le document de concession du crédit, nous
pouvons donner toute l’information de ce qui se passe, nous pouvo-
ns vous inviter à venir pour que observer ce qui se passe, mais vous
ne pouvez pas être membres du comité de crédit (...) pour le centre
il y a vraiment eu une collaboration de négociation”. Malang Sarr, Responsable Axe Pêche CDIG
C’est précisément la participation et la revendication de leurs droits qui nous permettent de calibrer l’implication des
49
femmes dans la convention et qui est comme un de ses points forts. Cependant, il est important de retenir que les caractéristiques so-cioculturelles et la tradition du lieu ont un poids important sur le rôle de la femme dans la société. Bien que le projet ait travaillé dans la transversalisation de la problématique hommes-femmes, la do-mination patriarcale et le sentiment de soumission conservent un poids symbolique fort sur le rôle de la femme dans la communauté.
“À Guet N’Dar au niveau
social, il faut comprendre que
la tradition est un ancrage et
dans les négociations, si tu es
dans le quartier, la femme a sa
place et la femme revendique
sa position et si les femmes sont
à l’extérieur avec des personnes
de l’extérieur, les femmes ten-
dent à donner la parole aux personnes qui ont le pouvoir, par
exemple aux époux ou aux pouvoirs publics. C’est ce qui se passe
durant les négociations. Lorsqu’elles sont au centre c’est ainsi que
cela se passe. Mais dans le quartier elles disent: ce sont les choses
que nous voulons, quand elles sont avec les hommes et avec le con-
seil de quartier. Mais si elles vont à la mairie, par exemple, elles
disent aux hommes qu’ils parlent au nom du quartier. Question:
Que se passe-t-il si les décisions sont contradictoires? Lorsqu’elles
ont décidé autre chose elles le rappellent aux hommes, elles disent:
nous avons dit ceci. Elles n’imposent rien, en tout cas: ce que nous
avons décidé est ceci, c’est ainsi que nous pensons”. Malang Sarr, Responsable
Axe Pêche CDIG
Bien que leurs comporte-ments soient une preuve évidente d’un début de changement, il existe une forte lutte entre le vo-uloir, le devoir et le pouvoir faire.
“Je constate une amélioration de la
prise de conscience, les femmes
deviennent meilleures”.Animatrice et Vice-présidente
du Conseil d’administration Crédit MECPROPAS
L’adaptation au milieu dans lequel évolue la convention a permis de mettre en valeur les capacités des bénéficiaires, tirer profit de leur expérience du travail et des techniciens et
de les renforcer, en particulier grâce au soutien financier, aux
actions de sensibilisation, à l’alphabétisation et aux formations
techniques. Cela a permis d’accroître la capacité de production
et l’obtention de bénéfi-
ces, ainsi que d’instaurer
l’habitude de l’épargne
pour garantir des ressour-
ces minimales en cas de
nécessité. Dans ce sens, le
capital humain a été un
pari de valeur qui a facilité
l’atteinte des objectifs.
“ELe projet a beaucoup
renforcé notre position
dans la société”.Binta Sarr, Présidente UFT
“Nous pensons qu’il est
très important de travailler avec les femmes transformatrices pour
augmenter les sources de ressources et renforcer la capacité des
activités pour gagner sa vie”.Sow Toly Kelly, Gérante MECPROPAS
Les commentaires recueillis dans cette section nous
montrent comment une des réussites de la convention a été
son adaptation à la complexe réalité de Guet N’Dar et qu’elle
a pris en considération la
situation de départ des
bénéficiaires. La durée du
projet (5 ans et demi) a
aussi permis d’inclure des
modifications dans la for-
mulation du projet en vue
de l’adapter aux différentes
problématiques apparues
au cours de son exécution.
La disposition au dialogue
des deux parties, en dépit
où à certains moments cha-
cune d’elles a recherché son
propre bénéfice, a permis
d’atteindre les accords nécessaires pour le développement des acti-
vités. C’est pour tout cela que nous considérons que la convention
a été conforme aux nécessités de la zone et, malgré des difficultés,
a été en concordance avec ce que la réalité sociale a requis.
51
9.2 POINTS FORTSParmi les principales forces et potentialités dont la con-
vention a tiré profit, il faut relever le comportement des partici-pantes, notamment des femmes bénéficiaires qui ont fait preuve d’ouverture aux propositions et décidées dans leur exécution. Entre les bénéficiaires et les techniciens, s’est créé un climat de confiance qui a favorisé l’engagement dans la prise et l’exécution de décisions. Encore une fois, nous insistons sur le fait que le principal actif du projet a été le composant humain.
“Nous sommes celles que vivons ici et nous sommes celles qui pouvons
rendre le quartier plus beau et plus agréable. Si tu visites le quartier
tu verras que c’est un quartier pauvre et s’il y a des ordures partout,
les touristes n’y iront pas. Nous les sensibilisons tout le temps”. Djibril Gueye, Président Conseil de Quartier
“Nous sommes dans un quartier qui vit comme une famille,
que si une personne voit une autre en train de faire une mau-
vaise action, il faut le lui dire : ce que tu fais n’est pas bien,
tu dois changer ou tu dois essayer de changer. L’aide doit com-
mencer ici, dans ce même quartier. Avant de mettre la main à
l’étranger, les Sénégalais doivent d’abord s’entraider”.Farma Diaw, bénéficiaire
La convention a été soutenue par l’axe de sensibilisation qui a servi de base pour la construction de propositions et d’activités successives. Aussi bien les actions de sensibilisation, qui ont supposé une voie de transmission bidirectionnelle entre le message de la Fondation Habitáfrica et celui de la population locale, que les formations, outil véhiculaire d’une série de con-naissances considérées indispensables pour améliorer la capacité de production et de commercialisation des femmes, se sont dé-roulées en français et en wolof, pour faciliter la compréhension. Ces actions ont été très bien évaluées par les bénéficiaires et, bien qu’elles reconnaissent que si elles devaient choisir entre travailler ou se former, elles prendraient la première option, elles sont conscientes de l’importance de la seconde et demandent qu’elle soit renouvelée.
“Les formations ont été très importantes, dans de nombreux domai-
nes. Par exemple, nous avons fait l’objet d’actions de sensibilisation
sur la santé, lorsque nous travaillons comment faire pour être en
bonne santé. Comment faire pour être dans une bonne ambian-
ce, c’est-à-dire comment traiter les femmes. Nous avons aussi reçu
une formation dans le domaine de l’achat du poisson, lorsque nous
achetons du poisson comment le conserver pour qu’il ne pourrisse
pas. Et après l’avoir transformé, comment aller chercher les marchés,
c’est-à-dire les gens qui viennent pour acheter. Et aussi après avoir
transformé le poisson nous devons le peser. Avant nous ne pesio-
ns pas le poisson que nous avions, nous le vendions tel quel, mais
aujourd’hui nous avons des balances pour peser le poisson”.Khonsata Dieng, bénéficiaire
“L’alphabétisation. Beaucoup de femmes qui voulaient suivre cette
formation n’y sont pas allées, elles ont préféré laisser leur place à un
de leurs enfants. S’il y a du travail, nous ne voulons pas suivre de
formations. Ce que nous voulons c’est rester sur notre lieu de travail
pour avoir de l’argent au lieu de recevoir la formation”.Ndeye Astou Ndiaye, bénéficiaire
Ce dernier commentaire est le reflet de la situation de vulnérabilité que vivent les femmes de Saint-Louis dans laquelle, irrémédiablement, elles doivent mettre en avant la recherche de bénéfices économiques à tout autre type de considérations comme l’éducation. Dans ce sens, nous pouvons interpréter que s’il existe une conscience de la valeur de la formation pour améliorer la qualité du travail et donc l’obtention de ressources, la conjoncture socio-économique suppose un frein important pour que les femmes puissent accéder à cette formation.
Pour que cette réalité sociale puisse changer, nous avons compris que le soutien des institutions locales est fondamental, elles
sont en partie les garantes du développement de certaines activités10. Nous évoquerons quelques obstacles qu’ont imposés les organismes du quartier pour l’exécution du projet, mais nous devons d’ores et déjà souligner qu’il existe parmi les voisins de Guet N’Dar une recon-naissance envers leurs autorités de référence qui assurent en général la représentativité des différents collectifs du quartier. Ces organes sont essentiellement la Mairie et le Conseil de quartier.
“Le conseil de quartier regroupe pratiquement en son sein toutes les
diverses catégories d’organisations, c’est pourquoi les femmes transfor-
matrices sont représentées au conseil de quartier. C’est ainsi que cela se
fait. À ce niveau il n’y a pas de problèmes et les femmes du quartier ont
toujours géré les activités, ont rendu des comptes au conseil de quartier
(...) Je dis toujours que c’est le service de la pêche qui s’est impliqué
parce que c’est la structure qui doit suivre tout ce qui se fait”.Malang Sarr, Responsable Axe P êche CDIG
Même si la religion et les traditions ont une influence sur tous les domaines de la vie quotidienne, nous avons perçu un début de changement de comportement chez les femmes. L’opportunité que les femmes ont reçu grâce au projet, qui leur a donné des formations et leur a permis d’avoir des ressources économiques pour gérer plus facilement leur activité productive, a commencé à être perçu à travers leurs discours. Les femmes parlent de la mise
10 Par exemple : appui technique, logistique, nettoyage de l’environnement, promotion de la participation vicinale.
53
en valeur des ressources existantes et du fait que le projet les a
orientées vers une voie plus profitable. Elles réfléchissent sur leurs
motivations, elles ont vu ce qu’elles étaient capables de faire et
elles veulent progresser. Elles sont conscientes qu’elles possèdent
un potentiel suffisant pour aller de l’avant par elles-mêmes et que
la forme de changer la situation de leur environnement passe irré-
médiablement par l’effort quotidien et la transparence, aussi bien
de leur part que de celles et ceux qui prétendent les soutenir.
“Le monde a changé. Les mentalités doivent aussi changer. Avant les
femmes au Sénégal et encore aujourd’hui, il y a des femmes qui dépen-
sent beaucoup d’argent dans les cérémonies sans importance. C’est dé-
penser de l’argent au lieu de l’économiser pour construire ou pour vivre
bien, elles dépensent leur argent dans n’importe quoi. Cela m’importe
peu. Ce que je veux c’est changer ma vie de manière positive”. Astou Gueye, bénéficiaire
“Si tu demandes aux femmes: quel est votre objectif pour le futur
concernant votre travail? Elles te répondront: je veux améliorer, je
veux faire ci, je veux faire. Nous pouvons dire qu’il y a un esprit
d’entreprise même si l’argent manque”. Yarame Fall, Animatrice et Vice-présidente
du Conseil d’administration Crédit MECPROPAS
Interrogées sur les principaux points forts du projet, les
personnes rencontrées coïncident pour en signaler essentielle-
ment cinq: l’accès au crédit, les formations, la construction du
centre de pêche, le renforcement dans la gestion de l’organisation
et, à un degré moindre, le nettoyage du quartier.
“Avec la construction du
nouveau centre et avec les ba-
lances dont nous disposons pour
peser le poisson, nous avons déjà
observé une grande différence
(...) La vente va être plus gran-
de et aussi la production et les
bénéfices que nous allons avoir
seront aussi plus importants”.Seynabou Fall, bénéficiaire
“Si toutes les femmes se joignent comme une seule femme, ou
comme un seul homme, elles peuvent aller de l’avant et en retirer
beaucoup de bénéfices. Parce que l’organisation est ici. Si on te
donne de l’argent pour travailler c’est pour que ne restes pas dans la
pauvreté. C’est pour s’enrichir, pour aller de l’avant”.Aïssatou Teuw, bénéficiaire
“Dans mon enfance ici dans ce quartier, il y avait beaucoup
d’ordures, et même nus sentions l’odeur de ces ordures lorsque nous
passions par la rue, parce qu’on pouvait rester 5, 6 mois sans voir
une charrette ou une voiture pour les ramasser, mais tout a beaucoup
changé depuis l’arrivée de la ONG”.
Khady Diaw, bénéficiaire
Même si toutes et
chacune de ces amélioratio-
ns doivent être renforcées,
elles ont été perçues comme
indispensables par les ha-
bitants du quartier et con-
sidérée très positivement la
création d’opportunités que
cela suppose. Désormais, elles
disposent d’une base solide
pour continuer de travailler pour le développement
de Guet N’Dar. Bien que l’on ne puisse pas apprécier
d’autonomisation féminine évidente avec les actions
exécutées, néanmoins nous commençons à distinguer un
changement de comportement.
55
9.3 POINTS FAIBLESCertains des problèmes auxquels est confrontée l’exécution
de la convention ont été l’héritage des conflits antérieurs présents dans le quartier et la lutte des forces, il est possible qu’ils ne soient pas convenablement identifiés dans la formulation du projet et qu’ils se soient reproduits durant son exécution.
“Il y a eu beaucoup, beaucoup, beaucoup de problèmes entre les
femmes et les hommes. Surtout les gens qui disaient que le terrain
leur appartenait, c’est un peu délicat parce qu’il faut savoir que Guet
N’Dar est une famille, malgré des problèmes, c’est une famille. C’est
un quartier très sensible. Il faut faire des études approfondies pour tra-
vailler avec eux et je crois que c’est ce qui a manqué au début. Raison
pour laquelle nous avons eu beaucoup de problèmes avec ce projet”.Awa Diallo, Technicienne Axe Pêche Fondation Habitáfrica
Il existe un certain consensus pour identifier la communica-tion comme le principal problème du projet. Bien qu’il ait été insisté à maintenir des canaux de communication continus dans lesquels participent toutes les parties impliquées, des intérêts particuliers et le manque d’implication de certains acteurs locaux ont entravé les rela-tions et l’ambiance de travail, laissant surgir un échange d’accusations qui ont contribué à la création d’une ambiance de travail tendue.
Pour leur part, les femmes bénéficiaires ont manifesté leur
souhait d’une convention directe entre elles et l’ONG pour garantir
leurs intérêts et éviter des interférences intéressées d’autres organismes.
“Nous aimerions que l’ONG s’adresse directement à nous, que
l’ONG nous consulte directement au lieu de passer par la mairie”. Fatou Sene Diaw, bénéficiaire
“Ni le Conseil de Quartier ni la Mairie n’ont rien fait pour
nous, rien”.Aminata Diaw, bénéficiaire
De fait, il y a un reproche constant des femmes envers la
Mairie et le Conseil de quartier en ce qui concerne l’expulsion
et le transfert de leurs matériels au nouveau centre. Elles pen-
sent qu’il n’y a pas eu d’organisation, elles ont fait l’objet de
pression pour qu’elles partent rapidement, aucune aide ne leur a
été offerte et il n’y a pas eu d’implication suffisante des respon-
sables. Bien que depuis le projet cette action a été préalablement
soutenue par différentes actions de sensibilisation avec tous les
acteurs impliqués, les retards dans la construction du nouveau
centre, a fait que le transfert a été effectué après la signature de
la convention sans accompagnement adéquat.
“Nous voulons savoir si l’ONG avait donné de l’argent pour le
transfert. Nous n’avons reçu aucune aide, ni de la Mairie ni du
Conseil de quartier ni de l’ONG. Nous avons fait tout le possible,
le nécessaire, avec nos propres moyens. C’était un peu difficile parce
que nous n’avions pas beaucoup d’argent pour le faire”.
Fatou Sène Fall, bénéficiaire
“Ce qui ne nous a pas plus est comment nous nous sommes
déplacées vers le nouveau site. Normalement, si la mairie avait
un peu de respect pour nous, elle aurait dû convoquer les fem-
mes, organiser une réunion, discuter avec nous en nous disant,
par exemple: la semaine prochaine un groupe va se déplacer,
pour qu’il se prépare, l’autre semaine qu’un autre groupe se pré-
pare, pour qu’ils se préparent. Mais ils se sont levés un jour pour
nous dire: vous devez emporter toutes vos choses au nouveau
site mais nous n’étions pas prêtes, nous n’avions pas gardé de
l’argent pour cela et nous devions payer les charrettes pour le
déplacement, tout ça. Beaucoup de femmes ont vécu cette situa-
tion et nous pensons que ces espagnols qui ont beaucoup investi
dans ce projet, si c’était eux, c’est-à-dire si c’était les espagnols
qui avaient voulu nous faire déplacer, ils auraient sûrement
organisé une réunion pour discuter avec nous, pour préparer le
terrain, pour préparer le départ (...) et nous le voyons anormal,
prendre une décision sans consulter les collaboratrices”.Fatou Sene Diaw, bénéficiaire
Le transfert des femmes avait de grandes implications
dans la politique locale et, de ce fait, malgré le processus planifié
par la Fondation Habitafrica qui avait envisagé une série de ses-
sions pour l’organiser par une méthodologie participative et in-
cluante, il a été pratiquement impossible de le mettre en œuvre
à cause de retards de la part de la Mairie de Saint-Louis qui a
reporté l’inauguration des travaux rendant impossible une partie
de l’accompagnement prévu pour le déplacement des femmes.
Le transfert n’a pas été la seule déficience liée au nouveau
centre de transformation. Les principaux problèmes ont été pro-
voqués par le retard des travaux, qui initialement étaient prévus
pour être exécutés dans un délai de huit mois et qui ont été
achevés deux ans après, ce qui n’a pas permis d’accompagner
les femmes dans le transfert comme cela était programmé, le
déplacement ayant été réalisé en dehors du délai d’exécution de
la convention.
Néanmoins, à la fin du projet, le travail a été pour-
suivi avec les femmes dans l’installation du nouveau centre,
l’organisation des groupes, etc. en les aidant à résoudre les prin-
57
cipales nécessités parmi lesquelles figurent les problèmes dérivés
des paiements de l’électricité et de l’eau car les compteurs ne
sont pas bien situés et que c’est important pour qu’elles puis-
sent travailler dans les meilleures conditions possibles durant la
période de meilleure pêche. Par
ailleurs, il a été observé une uti-
lisation incorrecte des installatio-
ns qui a obligé à régler les abris
installés sur la plage pour l’usage
individuel des femmes.
Le système de collecte des ordures présente également
de sérieuses déficiences. Après le
transfert complet du matériel au
GIE CETOM la collecte n’est
pas constante, plusieurs semaines
pouvant s’écouler entre les passa-
ges des charrettes. Il arrive que si
un des chevaux tombe malade ou
meurt, le trajet habituel de cette charrette est négligé. Il en est
de même pour les animaux qui sont mal soignés ou mal ali-
mentés. Les seaux à ordures qui ont été distribués aux familles
ne sont pas de la même qualité. Ceux de la première livraison
étaient des seaux plus résistants, mais ceux de la seconde ont
été fabriqués avec des matériaux de basse qualité et la plupart
sont déjà inutilisables. Avec ces deux points faibles, nous trouvo-
ns qu’il y a des femmes qui, bien qu’ayant reçu des actions de
sensibilisation pour l’attention
de l’environnement, terminent
par manque de moyens par jeter
les ordures à l’océan. La reddi-
tion des comptes par le GIE
CETOM, chargé du service, n’a
pas été transparente.
“La situation s’est améliorée mais le seul
problème que nous avons est que les
charrettes ne viennent pas tous les jours
pour la collecte des ordures. Depuis qu’est
passée la Tabaski11 jusqu’à maintenant
aucune charrette n’est venu pour ramasser
les ordures. Cela n’est pas normal, parce
que normalement généralement ils devaient être de repos le dimanche,
mais devaient passer tous les jours du lundi au samedi pour la collecte
des ordures. C’est la première erreur. Second erreur, les gens du quar-
tier devaient s’interroger. Si une partie fonctionne, l’autre partie ne
11 Un mois avant ces déclarations.
fonctionne pas, nous devons poser le problème pour savoir comment
le résoudre. Si l’ONG achète beaucoup de seaux à ordures c’est pour
que les gens de Saint Louis vivent dans la propreté, pour qu’elles vivent
dans une atmosphère très sain, mais cette situation aggrave les mala-
dies, causent de nombreuses maladies, parce qu’un seau à ordures qui
reste un mois ou plusieurs jours sans être retiré peut attirer des vers, des
insectes et de temps en temps lorsque je porte mon seau à l’océan pour
y jeter les ordures, ce n’est pas bien non plus, car les gens se baigne dans
la mer et il n’est pas normal que j’y jette les ordures”.
Farma Diaw, bénéficiaire
Ces déficiences se traduisent, irrémédiablement, en démotivation et en déception. Bien que toutes les parties concernées montrent un esprit revendicatif, certains problè-mes ont persisté depuis le début des travaux de la conven-tion, ce qui a généré de la frustration et dans d’autres cas de la résignation.
“Nous avons eu des déceptions continues, par la réponse de la mairie,
par la réponse surtout du conseil de quartier et davantage encore
des femmes qui se donnaient du mal et qui disaient oui et qu’elles
allaient appuyer cette posture parce qu’elles un centre, selon ce qui
a été établi et plus tard, quand nous étions à une réunion qui était
cruciale ou importante à la mairie, elles disaient : “Nous dépendons
du conseil de quartier” et logiquement la décision que prend le con-
seil de quartier, au lieu de dire toute autre chose, elles les laissaient
faire tranquillement et que le conseil de quartier décide pour elles”.Alfonso Martínez, Architecte
Après avoir analysé les difficultés auxquelles a fait face la
convention et contrasté les opinions des personnes impliquées,
tant au niveau technique que des bénéficiaires elles-mêmes, nous
pouvons conclure que les principales nécessités qui n’ont pas été
couvertes sont relatives à la fourniture de matériel, à la deman-
de d’un nouveau centre pour les femmes qui travaillent dans la
partie maritime, une augmentation du montant des microcrédits,
faciliter le transport quotidien des femmes au centre de travail et
la médiation de l’ONG pour l’obtention de licences de pêche.
“L’ONG peut aussi intervenir pour l’obtention des licences de pêche”.Fatou Sarr, bénéficiaire
Précisément, la pénurie de licences de pêche ne provo-
que pas seulement une diminution de la capture de la matière
première, mais que beaucoup de mères sentent qu’il n’y a pas de
travail pour leurs fils pêcheurs, ces derniers se verront poussés à
l’immigration clandestine.
59
“Ces jours-ci nous souffrons parce qu’il
n’y a pas de travail, il n’y a pas d’argent.
Si cette situation perdure je suis sûre que
nos enfants se lanceront de nouveau pour
un voyage vers le suicide, comme aller en
Espagne, en Italie ou en France”.Aminata Fall, bénéficiaire
“Je sais que l’Espagne est en crise, la crise
est mondiale, mais que les Espagnols ne
partent pas, parce qu’ils partent, nos
enfants vont souffrir et vont prendre
à nouveau le chemin des calamités,
l’immigration clandestine”.Aïssatou Teuw, bénéficiaire
Ces témoignages démontrent
que les bénéficiaires sont conscientes de
l’aide et des améliorations qu’a générées
le projet, cependant elles se méfient de
ses possibilités pour assurer leur bien-être
et celui de leurs familles si ce n’est avec
l’accompagnement et l’aide extérieure.
Dans ce sens, l’accompagnement, d’abord à travers le projet puis
des structures créées, est fondamental pour continuer de travailler
dans le changement de ces comportements.
“Oui, nous pouvons travailler seules, mais
nous voulons être toujours accompagnées”.Aminata Fall, bénéficiaire
La conscience sociale et
l’expérience leur ont démontré que
les propres habitants peuvent agir
comme des vecteurs de développe-
ment du quartier. Les actions enga-
gées leur ont montré qu’avec les res-
sources et la formation appropriées,
elles peuvent faire face à leurs néces-
sités. Elles ont adapté leur manière
de travailler à la réalité et au respect de l’environnement et elles
ont créé des instruments de gestion et d’organisation qui vont
leur permettre de poursuivre la ligne de travail qu’elles ont prises
durant ces années. Les femmes sont décidées à suivre en utilisant
les techniques et les connaissances qu’elles ont apprises au cours
des formations et aujourd’hui elles disposent d’un centre équipé
9.4 DURABILITÉAprès près de six ans d’exécution de la convention, les réus-
sites sont très présentes dans les mentalités des personnes qui en ont bénéficié et, en ce que concerne l’autonomisation des femmes bien que nous ayons observé un com-mencement de changement de com-portements et une prédisposition, nous n’avons pas pu détecter claire-ment d’autonomisation féminine au niveau psychosocial. Les femmes se sont unies et cela leur a donné plus de force, mais elles demeurent soumises aux décisions d’autres figures de l’autorité. D’autre part, le débat est concentré sur la capacité qu’a un projet de ces caractéristiques de chan-ger les rôles masculins et féminins et des comportements traditionnels, si résistants dans le contexte spécifique de Guet N’Dar. Plus que de penser à des changements à ce niveau, la question qui nous occupe est celle d’interpréter les renforcements et les impulsions qu’a mis en œuvre cette conven-tion, comme son incidence sur le comportement des femmes, leur position comme micro-entrepreneuses, l’organisation et la prise
de décisions et le respect qu’elles obtiennent de la communauté.
61
dans lequel pouvoir développer leur activité. Ces points forts
nous indiquent que les progrès atteints pourront être durables à
long terme, surtout si la Mairie et le Conseil de quartier respec-
tent leurs engagements de soutien. Nous pensons qu’il appar-
tient à ces organes en liaison avec le Service Régional de la Pêche
et l’Agence Régionale de Développement, d’effectuer le suivi et
le renforcement des activités de développement à Guet N’Dar.
“Un centre a été créé et le projet l’a équipé. Fours, matériels, ainsi que
la formation. Je pense que les femmes utiliseront ces formations pour
améliorer les ressources. Elles vont aussi utiliser les formations relatives
à l’hygiène, la salubrité et la qualité (...). Je crois que les femmes vont
utiliser toutes les techniques que nous avons mises à leur disposition
pour améliorer les conditions de travail”.Corguene Dieye, animatrice
Quant à la concession de microcrédits, l’installation de la mu-
tuelle MECPROPAS dans le quartier, à proximité des foyers et des lieux
de travail des femmes, contribue énormément à la durabilité du projet.
Après la signature de la dernière convention, qui implique le maintien
du fonds de crédit durant 5 ans de plus, avec la possibilité d’être pro-
rogé, cette mutuelle a démontré son engagement avec la poursuite des
actions et le développement socioéconomique du quartier.
“Nous avons signé la dernière convention pour cinq ans, je pense
qu’il n’y aura pas de grands changements. Sauf si la mutuelle estime
vraiment que les femmes veulent changer la méthodologie, nous en
parlerons avec les femmes, la mutuelle et peut-être aussi avec les con-
treparties financières, s’il est intéressant de faire un changement dans
cette convention, nous pouvons le faire. Il n’y a aucun problème”.Sow Toly Kelly, Gérante MECPROPAS
En raison des caractéristiques particulières de cette Conven-tion, l’intervention proposée a été un point de rencontre pour des nombreux intérêts, quelques fois opposés et d’autres fois en accord dans le cadre d’un territoire spécialement limité. L’intervention dans le quartier de Guet Ndar a eu des effets en même temps sur les condi-tions de vie du quartier, sur les conditions de travail des femmes trans-formatrices de poisson (bénéficiaires du projet); sur l’aménagement du territoire de l’espace et sur le système de valeurs traditionnelles du quartier. Dans ce contexte complexe et hiérarchisé, la nécessaire implication des autorités locales; bien qu’indispensable, elle a causé à certains moments plus d’inconvénients que d’avantages. Hormis les intérêts crées parmi les différents acteurs locaux notamment autour de l’activité de la construction du centre de transformation de pois-son; appui des autorités aux autres groupes de voisins comme les jeunes, par-dessous des bénéficiaires de la convention; retard dans la prise de décisions et le respect des compromis; des changements d’opinion sur des questions déjà accordées, etc.
63
CONCLUSIONSComme cela a été défendu dans ce
document, la Convention pour le
Développement Intégral de Guet
N’Dar a eu des points clés qui ont
marqué son développement. Les po-
ints forts et les points faibles ont été
présents durant les près de six ans d’exécution du projet.
PROBLÉMATIQUES ET FAIBLESSES
Nos informatrices ont considéré que la base sur laquelle a
été dressé le projet a souffert parfois du manque de conditions
idéales, de temps et de moyens pour effectuer un diagnostic qui
permette d’approfondir la réelle implication des acteurs locaux.
Dès le lancement de la convention, il aurait fallu la reformu-
ler pour l’adapter à la réalité du quartier et des capacités de
l’ONAS. Il est néanmoins certain qu’une action aussi prolongée
dans le temps requiert en général, et même il est recommandé
de la faire, des révisions en ce qui concerne les questions initiales
pour ajuster les actions aux diverses réalités, problématiques et
opportunités que l’environnement offre.
L’intervention des pouvoirs publics locaux12, bien
qu’indispensable dans le contexte social du Sénégal, dans lequel
existent une tendance et une obligation morale d’être en accord
avec eux pour qu’ils facilitent le travail et voient reconnue leur
autorité, a créé plus d’inconvénients que d’avantages. Accusation
d’intérêts créés entre les acteurs locaux en particulier dans la
construction du centre de transformation de poissons; davanta-
ge de soutien à d’autres groupes d’habitants, comme les jeunes13,
au-dessus des bénéficiaires de la convention; retard dans la prise
de décisions et respect des engagements; changements d’opinion
sur les questions convenues, etc.
POINTS FORTS ET RÉUSSITES
En ce que concerne les impacts sur les femmes bénéficiai-
res, bien qu’il n’ait pas été apprécié chez elles une autonomi-
sation au niveau communautaire, étant donné que la tradition
exerce une forte influence sur cet aspect, nous avons relevé que
commencent à apparaître des discours identitaires, des femmes
qui se regroupent en vue d’améliorer leur travail, qui mettent
en pratique des modèles de gestion et d’organisation fondés sur
l’union de groupe et qui défendent leurs droits tout en ayant
conscience de ce que personne d’autre ne le fera pour elles. Grâce
aux pratiques mises en œuvre qui ont encouragé le renforcement
12 Surtout Mairie et Conseil de quartier. 13 Durant un conflit sur l’extension du centre de transformation de poissons et l’invasion d’un terrain de football avoisinant.
de leurs capacités et le soutien économique, il a été constaté une
augmentation de l’autoestime et du respect, propre et d’autrui,
des femmes et de leur travail. Aussi bien à l’intérieur du foyer
qu’au niveau communautaire, on commence à observer une re-
connaissance de l’importance du travail de ces femmes et de leur
contribution au bien-être de la famille.
Un des points forts et parmi les plus relevants de ce
projet et qui suppose une opportunité de continuation a été la
constitution de l’Union des Femmes Transformatrices, qui re-
groupe les deux GIE auxquels appartiennent les 1 200 femmes
bénéficiaires. Cette union a permis de mettre fin aux querelles
et aux problèmes historiques entre les groupes de femmes du
quartier et a donné plus de force à leur travail. Grâce au travail
en commun et les formations reçues, ces femmes se considèrent
plus préparées et plus fortes pour développer leur travail et se
faire entendre parmi leurs camarades et au sein du tissu asso-
ciatif de la communauté. Elles ont constitué une commission
directive, dont les charges sont renouvelables périodiquement et
les participantes ont reconnu l’appui qu’elles reçoivent de leurs
représentants, mais elles ne considèrent pas que les unes soient
plus importantes.
La dotation d’infrastructures, de matériels, la concession
de microcrédits et les formations ont été les grandes forces de la
convention. Bien qu’il soit souhaitable d’établir des mécanismes
de leur suivi et de leur maintenance, il a été créé une base per-
mettant la poursuite de ce travail. Sans l’aide de la convention,
il convient d’attendre que les parties concernées respectent leurs
engagements et que puissent être établis des comités qui travai-
llent de manière autonome.
Des améliorations dans la commercialisation et la
qualité du produit peuvent être observées par une observation
directe, mais le Service de la pêche doit fixer par une analyse et
par les caractéristiques déterminées l’amélioration de la qualité
du produit.
Accès au microcrédit et indépendance économique des
femmes, capacité pour améliorer l’activité de transformation
sans intermédiaires, etc.
L’installation du système de collecte des ordures
communautaire porte à porte dans l’un des quartiers à la
plus haute densité de population du Sénégal a été un autre
65
point fort à relever du projet
parce que l’amélioration
notable de l’accumulation
des ordures du quartier a des
répercussions sur la santé des
personnes. Les moyens et la
formation nécessaires pour le
maintien du système de co-
llecte sont consolidés mais il
faudrait plus de volonté de la
part du GIE CETOM.
Après les diffé-
rentes phases de collecte
d’information primaire, nous
avons le sentiment de travai-
ller avec un quartier qui com-
mence à se réveiller.
En dépit de la com-
plication de la situation con-
joncturelle, les habitants de
Guet N’Dar sont réalistes et
conscients de leurs nécessités
ainsi que de leur potentiel.
OINTS FAIBLESCommunication entre acteurs locauxParticipation à l’identification
Transfert au nouveau centre
Sustème de collecte des orduresFaible suivi de l’accomplissement des responsabilités de chaque contraparte
ENACES Excès de pouvoir des autoriés
Intérêts paralèllesNon respect des accords par
les pouvoirs publics
OINTS FORTS Capital humain Participation vicinale
Reformulation à temps Identification des nécessités Formations et actions de sensibilization
Techniques locales
PPORTUNITÉS Système de microcrédits Mutuelle MECPROPAS Système de commercialisation
UFT
ANALYSE DAFO DE LA CONVENTION POUR LE DÉVELOPPEMENT INTÉGRAL DE GUET N’DAR (tableau 7):
67
Ils continuent en pensant qu’ils ont besoin de la coopé-
ration pour progresser, mais cela suppose une reconnaissance
des avantages du projet et une prise de conscience d’une autre
manière de travailler pour atteindre leurs objectifs. Bien qu’ils
donnent une valeur primordiale au composant économique,
dont ils disent manquer, ils ont compris que le capital humain
est essentiel pour le développement du quartier et qu’ils ne
doivent pas toujours attendre l’aide externe, mais que le chan-
gement commence par eux-mêmes.
Nous considérons que, malgré des difficultés auxquelles
a dû faire face le projet, et au-delà de l’héritage matériel, il a été
transmis des valeurs et des connaissances qui sont le véritable
apport et la garantie de continuité.
“Le projet a permis aux femmes d’être un peu plus auto-
nomes. Elles sont habituées à prendre les bénéfices et à les
donner à leurs maris, prendre les bénéfices et les prêter à un
commerçant ou à une amie. Avec le microcrédit tout cela
a commencé à se niveler, il les a aidées à être indépendan-
tes économiquement et à commencer à être conscientes de
l’autonomie dans leurs activités”.Sow Toly Kelly, Gérante MECPROPAS
“Ma vie a beaucoup changé parce que l’ONG avant de nous attri-
buer le crédit nous a montré le chemin que nous devons suivre pour
réussir et un chemin que si nous le suivons, nous allons réussir”.Astou Gueye, bénéficiaire
Nous pouvons recueillir les points faibles et forts, menaces et opportunités dans une analyse DAFO
(tableau 7).
69
LEÇONS APPRISESL’objectif de cette capitalisation est d’offrir des pistes qui peuvent être utiles à d’autres acteurs pour des interventions dans l’avenir. La longue expérience de cette Con-
vention nous a permis de réaffirmer la pertinence de quelques lignes de travail que la Fondation Habitafrica a entrepris
depuis longtemps dans plusieurs pays africains; de détecter des points a améliorer quand à la manière dans laquelle le projet a été exécuté; et d’identifier des obstacles, des difficultés et des barrières à éviter dans une future intervention de coopération au développement. La prétention n’est pas autre que celle de par-tager, de transmettre et d’apprendre partant de ce qui a été déjà réalisé, mais en écoutant la voix des acteurs les plus importants dans chaque projet: celle des bénéficiaires.
Pertinence des lignes de travail:
RENFORCEMENT DE CAPACITÉSLe renforcement de l’alphabétisation doit faire partie de
l’agenda politique nationale et locale et des plans de développe-ment régional, de façon à permettre de fixer les bases des conditio-ns minimes pour un bon développement et garantir un plus grand
impact des actions entreprises pour le développement dans un
territoire déterminé. Renforcer la composante d’alphabétisation peut non seulement améliorer la qualité du travail individuel et du groupe mais contribuer également à promouvoir la capacité d’agir (empowerment) des bénéficiaires des projets. Etant don-
né que la convention est déjà finie et que l’alphabétisation est une
composante essentielle aussi bien de la vie privée que de la vie
professionnelle, nous considérons que son renforcement ne doit
pas être la responsabilité exclusive de la coopération internationa-
le, mais également des acteurs nationaux qui doivent appuyer en tant qu’élément de garantie de développement du pays.
SOLUTIONS D’HABITAT ADAPTEES ET
INTEGRESS AU DÉVELOPPEMENT LOCAL
Le travail conjoint avec la population bénéficiaire sur
l’amélioration de leur habitat (ou comme c’est le cas de la con-
vention) de son environnement de travail a un impact considé-rable dans l’amélioration des conditions de vie des populations vulnérables. Pour garantir la durabilité de ces infrastructures il est
important que les autorités locales s’impliquent depuis le début du
projet et qui participent activement en à la stratégie de retrait de
l’ONG pour permettre une bonne transmission et appropriation
de l’immeuble de la part des autorités et de la part de la population
bénéficiaire. L’ONG qui intervient doit accompagner ce processus. Rester “à l’écoute” des bénéficiaires et adapter l’offre des infras-tructures selon sa propre conception de l’activité qui y est menée est un autre facteur qui contribue à l’appropriation postérieure de
l’infrastructure.
MICROCRÉDITS
Inclure des lignes de microcrédit adaptées aux besoins de la
population dans les projets de développement, encadrés par des
modalités de gestion efficaces, permet de dynamiser l’activité économique d’une zone, de positiver la perception d’un groupe vulnérable ou marginalisé face à son entourage social et améliorer sa qualité de vie a travers l’accès aux ressources
pour réaliser des activités génératrices de revenus.
STRATEGIE DE SENSIBILISATION TERRITORIALE ET PARTICIPATIVE
Malgré les difficultés qui peuvent subvenir lors de
l’intervention dans un quartier déterminé, adapter et trans-mettre les objectifs du projet de manière proche dans tout le territoire d’intervention permet de débloquer les oppositions et retro alimenter la stratégie de l’intervention tenant compte des nécessités de la population bénéficiaire de manière rapprochée.
Aspects à améliorer et sur lesquels il faut insister:Amélioration des mécanismes d’accompagnement dans
le processus d’appropriation des infrastructures dans le cadre d’un projet surtout quand il s’agit de appuyer les autorités locales dans leurs offres de services a la population pour la promotion d’un développement endogène.
Approfondir l’approche genre dans la stratégie d’intervention dans des interventions à l’avenir, de manière qu’une véritable dynamique de changement endogène puisse être générée pour réduire la brèche de genre.
Amélioration des mécanismes de communication que per-mettent un plus grand appui et implication des autorités locales.
Obstacles, difficultés et barrières à éviter pour une future inter-vention de coopération au développement:
L’ONG qui intervient et appui un fonds de microcré-dits doit mettre à la disposition de la mutuelle des outils per-mettant à celle-ci de connaître ses propores limites de gestion. Etant donné que les résultats et l’impact des programmes de microcredits sont plus probants à moyen terme, nous devons
considérer la nécessité et l’opportunité de créer un comité de
71
suivi interne promu par les propres agents sociaux du quartier. Il
est souhaitable la mise en place de ce système le plus tôt possible
et de développer des outils qui fournissent les informations né-
cessaire afin de rendre le suivi possible et de qualité, permettant
également de connaître
et d’analyser les erreurs
et de proposer des solu-
tions à temps.
Las ac t i v i t é s qu’implique l’appui à un service qui doit être garanti par l’autorité local (comme peut être le ramassage des ordures), doivent faire l’objet d’accords précis dans lesquels des ga-ranties pour le respect des engagements et la délimitation des responsabilités de chaque acteur soient claire-ment exposées, prévoyant la révision et la rescision des accords en cas de non respect de ceux-ci.
Du aux limitations dans le temps et des moyens dont fait l’objet toute action de développement dans un territoire donné, dans certains cas, il n’est pas accordé assez d’espace aux processus dont les changements sociaux auraient besoin. Afin d‘éviter des éventuels
problèmes de commu-nication et assomption de fonctions, il est re-commandé que dans des interventions dans le future tous les acteurs impliqués dans un pro-cessus de développement prennent conscience de l’importance de la phase de diagnostique pour disposer d’une étude la plus approfondie pos-sible de la situation de l’entourage et des per-sonnes impliquées. Pour
qu’une intervention démarre sur des bases objectives et fiables : les ongs doivent renforcer la phase de diagnostic participatif, les bailleu-rs de fonds doivent définir plus clairement les profils des situations
de référence et des plans de suivi-évaluation qui permettront de
faire une évaluation continue des projets et des processus qui y sont
menés. Dans la mesure du possible, et tenant compte des capacités et
des ressource existantes dans le pays d’intervention des consultations
doivent être réalisées avec l’implication de organismes de recherche
pour mener de la recherche-action, travailler à la construction
de mécanismes de participation et communication entre
les acteurs impliqués dans un processus de
développement conjointement facilitant
un dialogue entre les acteurs avec un même
niveau de décision et d’engagement.
Las autorités locales doivent renforcer leurs systèmes d’évaluation interna permettant d’accroitre l’efficacité des actions de développement entreprises dans un territoire dé-terminé et un système de reddition mutuelle de comptes pour garantir la transparence et le suivi des actions entreprises. En Afrique de l’Ouest l’application
des principes de la gouvernance au niveau local est en
train d’être promue, à commencer par la constitution
d’un budget participatif qui garantisse la prise en compte des
priorités en développement local. De cette manière, les priorités
de développement clairement définis seront moins vulnerables
aux tentations du clientélisme politique.
L’ONG qui veut mettre en place un processus de développement doit garantir des conditions
minimes de transparence et de reddition mutuelle de comptes à travers des méca-
nismes d’évaluation et de retro alimen-
tation de l’information.
Le travail de ces six dernières années dans le quartier de Guet N’Dar a
été une grande leçon pour tous ceux qui et avons travaillé. Un grand défi de-
puis le début jusqu’à la fin dans un contexte compliqué, où la multiplicité d’acteurs, d’intérêts
politiques et économiques divergents ont révélé encore une fois la forcé des fem-
mes africaine et le rôle extrêmement important que celles-ci jouent pour le développement de leurs pays.
73
RÉDACTIONSoledad Gutierrez Pastor
Boursière de recherche MAEC-AECID dans l’Université Gaston Berger de Saint Louis, Senegal.
COORDINATIONRocío Alonso Rocafort,
Cristina Follana Kerfant etIsabel Iparraguirre
Équipe technique de projets Habitáfrica