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Romain Corraze Dominante Affaires Internationales IDRAC Lyon MME 4 Mémoire de fin d’étude "Comment les producteurs de vin français peuvent ils faire face à la concurrence des producteurs de vin du nouveau monde ?"

Memoire Idrac

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Romain Corraze Dominante Affaires Internationales IDRAC Lyon MME 4

Mémoire de fin d’étude

"Comment les producteurs de vin français peuvent ils faire face à la concurrence des producteurs de vin du nouveau monde ?"

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Je ne sais combien il faut, sur la colline en flamme,

De peine, de sueur et de soleil cuisant

Pour engendrer ma vie et pour me donner l’âme ;

Mais je ne serai point ingrat ni malfaisant,

Car j’éprouve une joie immense quand je tombe

Dans le gosier d’un homme usé par ses travaux,

Et sa chaude poitrine est une douce tombe

Où je me plais bien mieux que dans mes froids caveaux.

Charles Baudelaire, extrait de Les Fleurs du mal

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Remerciements

Au cours de ces cinq mois passés au sein dans la société Collin-Bourisset, plusieurs

personnes ont été particulièrement attentives quand à mon intégration parmi le personnel

et au bon déroulement de mon stage. Ces personnes ont ainsi contribué à me rendre cette

expérience très instructive, tant sur le plan humain que professionnel.

Je tiens donc ainsi à remercier chaleureusement :

Monsieur Bertrand de Cuyper, gérant de la société, pour la confiance qu’il m’a

accordé dans la réalisation de mes projets et le temps qu’il a pu me consacrer dans mes

recherches.

Madame Sabine Lecoeur, responsable marketing de Collin-Bourisset et également ma

tutrice en entreprise tout au long de ce stage, pour ses précieux conseils et sa confiance.

L’ensemble du personnel des sociétés Collin-Bourisset et Loron & Fils pour leur

accueil et leur bonne humeur, ayant contribués au déroulement de ce stage dans les

meilleures conditions

Je tiens également à remercier grandement :

Nathalie Louisgrand-Thomas, ma tutrice de stage à l’IDRAC, pour sa disponibilité et

ses conseils m’ayant permis de mener à bien la rédaction de ce mémoire.

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3

Remerciements 2

Table des matières 3

Introduction 6

Partie 1 :

La société Collin-Bourisset : Une “vieille dame” expérimentée 8

I. Collin-Bourisset au coeur du marché des vins et spiritueux 8

I.1 Présentation et organisation générale de l’entreprise 8

I.2 Une entreprise bien intégrée et en mutation 9

I.3 Présentation de la maison-mère 10

II. Analyse de l’environnement, du marché et portrait de l’environnement viticole mondial 13

II.1 Un marché globalisé 13

II.2 Environnement internedu marché des vins et spiritueux 13

II.2.1 La "déconsommation" : un constat préoccupant 13 II.2.2 Une demande hétérogène ou certains produits vedettes prédominent 16

II.2.3 Instabilité du marché et perçée du Nouveau Monde 17 II.2.4 Synthèse du marché et perspectives pour l'avenir 19

II.3 Environnement externe et appréciation du risque 22

II.3.1 Matrice PEST 22 II.3.2 Modèle de PORTER 23

Partie 2 :

Intégration au sein de Collin-Bourisset et déroulement des missions 27

I. Silk, un concept fort à lancer sur le marché 27

II. Marketing ponctuel et outils managériaux de motivation 30

III. Travaux de recherche et prospection internationale 31

IV. Un axe de développement primordial : la refonte du site internet 32

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4

Partie 3 :

Analyse théorique de la problématique 34

"Comment les producteurs de vin français peuvent ils faire face à la concurrence des

producteurs de vin du Nouveau Monde ?"

Introduction 34

I. De la différentiation à l’uniformisation : la naissance d’un nouveau consommateur 34

I.1 Le Nouveau Monde : un goût pour tous 34

I.2 Conséquences de la standardisation 36

II. La stratégie de succès des nouveaux producteurs : un exemple à suivre ? 37

II.1 Les stratégies du succès 38

II.2 Le Nouveau Monde et le marché du haut de gamme : une stratégie de diversification à redouter ? 40

II.3 La place du marketing et la vision à long terme comme moteur de croissance 41

II.4 Un jeu concurrentiel faussé ? 43

III. Enjeux et démarches de la riposte tricolore 45

III.1 Le savoir-faire français : des connaissances qui s’exportent 45

III.2 Une vision vers l’avenir 46

III.3 S’adapter et évoluer par rapport au marché : une priorité dans toutes les démarches 47

Conclusion de la partie 3 49

Partie 4, Préconisation pour l’entreprise et le secteur viticole français 50

I. Répondre aux éxigences du marché 50

I.1 Développer les notions de fiabilité et de lisibilité de l’offre 51

II. Accroître la compétitivité par l’élargissement des pratiques culturales et oenologiques 51

II.1 Vers une irrigation contrôlée 51

II.2 Assouplir la réglementation des cépages 52

II.3 Du copeau de bois dans les vins français ? 53

Page 6: Memoire Idrac

5

III. Evoluer dans l’air du temps 54

III.1 Internet : une carte de visite sur le monde 54

III.2 S’allier pour mieux contrôler 55

IV. Renforcer la dynamique du métier 57

IV.1 Innover et échanger 57

IV.2 S’adapter au présent pour mieux préparer l'avenir 59 IV.2.1 L'attrait de la marque 59 IV.2.2 Attirer une nouvelle clientèle et intensifier la concurrence 60

Conclusion générale 62

Sources 64

Ouvrages: 64

Magasines et presse quotidienne: 65

Contacts: 66

Site web: 66

Support de cours: 67 Filmographie 67

Annexes 68

Plan Annexes 68

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6

Introduction

Mondialement reconnue et véritable fer de lance de l’agriculture française, la

viticulture tricolore a depuis toujours, de par son histoire et ses traditions, jouie d’une

notoriété privilégiée. Des siècles de tradition ont permis aux grands crus et vins

d’exception de s’imposer largement sur le marché mondial. En 2002, la France a

produit 50 millions d’hectolitres de vin sur les 257,8 millions du marché mondial,

faisant d’elle le premier producteur en volume (source : VINIFLHOR)

La consommation mondiale de vin a légèrement augmenté de 1996 à 2002,

pour finalement atteindre 223 millions d’hectolitres consommés en 2003. Au dernier

salon de Joint-venture, le cabinet d’étude britannique IWSR/GDR a annoncé des

prévisions tablant sur 31,66 milliards de bouteilles commercialisées, soit 237,515

millions d’hectolitres, pour l’année 2008 : une augmentation de 6,3% depuis 2003. Des

chiffres qui laissent déjà supposer une concurrence rude entre producteurs et

négociants, sur un marché déjà très concurrentiel. Car le milieu des années 1980 a

marqué un tournant majeur et critique au cœur du marché vinicole mondial : de

nouveaux producteurs émergent d’Amérique, d’Océanie, d’Afrique, et comptent bien

rivaliser avec les productions françaises.

La hausse des prix des vins français, la baisse de leurs exportations en volume

ressenties depuis 1998, laissent petit à petit une place grandissante aux producteurs

de la partie Sud du globe. Ainsi, en 2006, l'Afrique du Sud, l'Argentine, la Bolivie, le

Brésil, le Chili, le Pérou, l'Uruguay, l'Australie et la Nouvelle-Zélande représentent

21,4 % du volume des exportations mondiales, contre 1.7% dans les années 1980

(Source : Organisation internationale de la vigne et du vin). Ils concentreraient

également un peu plus de 18% de la production mondiale. Une explosion qui amène

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7

de nombreuses incertitudes aux producteurs français, fragilisant une suprématie

longtemps concédée. Le climat concurrentiel international très fort représente alors

une problématique majeure pour l’avenir du vin français. A ce jour soucieux de leur

avenir à long terme, les producteurs tentent tant bien que mal depuis quelques années

de restructurer les fondations de leur métier. Nous verrons comment une démarche

de revalorisation des cépages français s’oriente de plus en plus vers un marketing

audacieux et la mise en place de plans promotionnels innovants.

Quelles sont les stratégies mises en place par ces pays émergents, leurs

facteurs clés de succès ? Dans quelle mesure les producteurs français souffrent ils de

cette concurrence et quelles sont les différences perceptibles entre la France et eux,

tant au niveau technologique qu’au niveau juridico-légal ? Ainsi, en d’autres termes,

comment les producteurs de vin français peuvent-ils faire face à la concurrence des

producteurs de vin des pays du Nouveau-Monde ?

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8

Partie 1 : L’entreprise Collin-Bourisset, une « vieille dame » expérimentée

I. Collin-Bourisset au cœur du marché des vins et spiritueux.

I.1 Présentation et organisation générale de l’entreprise

La société Collin-Bourisset exerce le métier de négociant en vin depuis 1821, ce

qui en fait l’une des plus anciennes maisons dans le Beaujolais, une « vieille dame » sur

le marché du Beaujolais, pour reprendre l’expression utilisée par son gérant, Monsieur

De Cuyper. Filiale de la société mère Loron & Fils et localisée à Crêches-sur-Saône, elle

est spécialisée dans la production de vins Beaujolais et de vins Mâconnais et évolue

ainsi sur le marché des vins et spiritueux. La société commercialise également une

gamme de vins génériques issus d’accords partenariaux, une sélection d’appellations

de Bourgogne, mais aussi de vins mousseux. L’entreprise emploie 13 personnes.

Monsieur De Cuyper est le gérant de la société. L’équipe commerciale « export » se

compose de trois personnes, tout comme l’équipe commercial « France ». Il y a cinq

personnes qui sont en charge de la production et de la logistique, regroupé

notamment dans les métiers de caviste et de chefs de cave.

Dotée d’un capital de 120 000 €, elle a réalisé pour l’année 2006 un chiffre

d’affaire de 3 300 000 €. Pour la même année, 30% du chiffre d’affaires a été réalisé en

Grand export (Canada, Etats-Unis, Australie, Corée, Taïwan, Japon, …) et 22% en

Europe. L’entreprise réalise donc plus de la moitié de son chiffre d’affaire à l’étranger.

En termes de répartition de ces ventes par destination, l’Europe reste le premier lieu

de commerce avec 65 % des ventes en volume, suivi des Etats-Unis avec 21% et de

l’Asie (10%). Environ 1 000 000 bouteilles sont vendues par an. L’entreprise

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9

commercialise une gamme large, véritable caractéristique du secteur d’activité : les

Beaujolais rouge, blancs et rosés, ainsi que la gamme de Mâconnais rouges et blancs

sont les plus importants, mais la société Collin-Bourisset produit également une

gamme de Bourgogne, de vins issus de la Vallée du Rhône, de vins de pays et de vins et

table. Le positionnement sur l’ensemble de ces marchés s’inscrit dans une logique de

totale maitrise de la filière viticole et d’une volonté de diversification, favorisée par la

notoriété de la société. Les vins commercialisés comportent tous un degré d’alcool

avoisinant les 12 degrés. Les « cols » sont regroupés dans des cartons de 6 ou 12

bouteilles, tous référencés par l’intermédiaire d’un Gencode (code barre) qui permet

de contrôler au mieux les sorties des produits de l’entreprise et donc d’assurer une

bonne traçabilité. Le packaging proposé reste très traditionnel et sobre.

Pour l’année 2006, le chiffre d’affaire est réparti de la sorte :

- 5,3 % du chiffre d’affaire pour les clients particuliers

- 27,8 % du chiffre d’affaire pour les grandes et moyennes surfaces

- 16 % du chiffre d’affaire sur le circuit traditionnel (cavistes, …)

- 30 % du chiffre d’affaire au grand export

- 22 % du chiffre d’affaire en export Europe

I.2 Une entreprise bien intégrée et en mutation

La stratégie de l’entreprise, et de la maison mère en général, se veut être

particulièrement orientée autour de la qualité du produit fini, d’une traçabilité sans

faille. Par ailleurs, il est important de préciser que le marketing et la communication

non jamais été le point fort de Collin-Bourisset. Cette mentalité n’a jamais réellement

fait partie intégrante de la philosophie de l’entreprise, cette dernière pérennisant

surtout son activité par l’intermédiaire des relations de confiance établies avec sa

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10

clientèle. Néanmoins, la création d’un poste dédié au marketing et le recrutement

récent d’une responsable pour ce domaine marque la volonté de l’entreprise de

changer d’optique. Mon stage s’est ainsi déroulé dans une structure en plein rodage.

L’arrivée de Monsieur De Cuyper en 2005 en tant que gérant de la société a aussi

bousculé les habitudes et tourné un peu plus la stratégie de l’entreprise vers une vision

marketing. L’entreprise Collin-Bourisset dispose d’un certain nombre de facteurs clés

de succès. Le premier est incontestablement la qualité des produits délivrés,

notamment au niveau de la fréquence des contrôles effectués dans l’élaboration du

vin, de la qualité de l’équipement qui sert à la production mais surtout de l’expérience

de la société. Cette expérience est d’ailleurs en lien direct avec le deuxième facteur clé

de succès de l’entreprise, à savoir sa longévité dans le temps. En effet, l’entreprise

Collin-Bourisset détient une place de choix dans la région, de par son ancienneté dans

la région Beaujolaise. Cela est alors perçu comme un symbole de performance et de

réputation, que ce soit localement ou par ses clients du monde entier. Enfin, la bonne

gestion financière est également un facteur déterminant dans la pérennisation des

activités de l’entreprise. Ainsi, les placements et investissements de l’entreprise sont

réalisés de façon régulière et courante, ce qui permet de minimiser les pertes et

problèmes dans les contextes de crises, qu’elles soient internes à l’entreprise ou

relatives au secteur viticole en général.

I.3 Présentation de la maison-mère

Au cours de ce stage, j’ai été entièrement intégré au cœur des structures de la

maison Loron et Fils, compte tenu des rapports étroits entretenus entre cette dernière

société et ses filiales. Il convient donc de la présenter. Cette société qui a vu le jour en

1821, créée par Jean-Marie Loron s’est dès le départ orientée vers le négoce de

Beaujolais et de Mâconnais et s’est bâti petit à petit une forte notoriété dans le milieu

viticole. Aujourd’hui, la commercialisation des vins du Beaujolais et du Mâconnais

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11

représente 85% de l’activité de la société. L’extension des activités de l’entreprise aux

marchés européen et américain a été rendue possible grâce au fort investissement

réalisé ainsi qu’à l’innovation qui a consisté à développer la vente en bouteilles.

Au niveau financier, le capital de la société est sous le régime à action simplifiée

et est divisé de la façon suivante : la famille Loron, la famille Barbet, ainsi qu’un

actionnaire américain, Kopf, qui intervient dans les fonds de la Maison Louis Jadot,

située en Bourgogne, et autre filiale de la Maison Loron. Entré dans le capital en 2001,

ce fond d’investissement est à ce jour l’actionnaire le plus important, détenant ainsi

près de 60% des domaines Louis Jadot. L’entreprise Loron & Fils est aujourd’hui dirigée

par la sixième génération, par l’intermédiaire de Xavier Barbet, Président Directeur

Général, ainsi que Jean-Marie Loron, Directeur Général. Elle possède sept domaines

viticoles dans le Beaujolais, le tout répartie sur une surface de 75 hectares. Son chiffre

d’affaire pour l’année 2006 a été établi à 33,4 Millions d’euros. De plus, on note que

l’export a représenté 4,5 Millions d’euros, soit environ 13,5 % du chiffre d’affaire sur

cette même période.

La Maison Loron évolue sur les mêmes domaines d’activités stratégiques que la

société Collin-Bourisset, à savoir le négoce « embouteilleur » ainsi que le négoce

« éleveur ». Cependant, sa structure lui permet d’être très actif dans d’autres

domaines. En effet, si la Maison Loron & Fils possède plusieurs domaines, elle

bénéficie donc d’une opportunité intéressante, qui consiste à commercialiser sa

propre production. Cette démarche n’est pas négligeable dans la mesure ou elle

contribue à renforcer l’image et la notoriété de la société. De plus, la société Loron et

Fils a le privilège de pouvoir compter un laboratoire très pointu dans ses locaux, qui est

dédié à l’analyse d’échantillon de vin, et de produits en cours de vinification. Il s’agit

d’un processus déterminant dans l’élaboration du produit, et cela permet de garantir

un niveau de qualité continu. Opérant dans l’espace dédié à ces tests, en plein cœur de

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12

l’entreprise, deux œnologues sont chargés de transmettre les résultats à la direction.

En période de pleine activité, comme pendant les vendanges par exemple, c’est près

de 500 échantillons qui sont analysés chaque jour. Ce laboratoire est notamment une

structure de conseils aux viticulteurs dans l’élaboration de leurs productions.

Cependant et bien évidemment, c’est l’activité de négociant « embouteilleur »

qui génère le plus de chiffre d’affaire, et qui est la plus importante de toutes. C’est

d’ailleurs ce domaine d’activité qui est le premier touché par la crise, à savoir le

phénomène de « déconsommation » de vin à travers le monde, qui sera abordé par la

suite dans ce mémoire.

La Maison Loron & Fils dispose d’une chaîne de montage très moderne qui est

utilisée en permanence par ses différentes filiales. La société Collin-Bourisset reste

dépendante de l’aide de la maison mère pour le processus d’embouteillage. Cette

chaîne est très performante et dispose d’une capacité de 7000 bouteilles par heure et

par machine. Une autre machine est également utilisée pour des demandes

particulières. De plus, la société à acquis au début de l’année 2007 une nouvelle chaîne

d’embouteillage, symbole d’un désir de renforcer la compétitivité et d’augmenter les

volumes de production. Enfin, l’entreprise Loron & Fils dispose d’une capacité de

stockage colossale, puisque 6 millions de bouteilles peuvent être entreposées.

Au travers du présent mémoire, nous tenterons de poser les bases d’une

problématique fondamentale, à savoir « Comment les producteurs de vin français

peuvent ils faire face à la concurrence des producteurs de vin du « Nouveau Monde »,

pour pouvoir par la suite mesurer l’ampleur de ses enjeux. Il est important de préciser

qu’au sein de cette étude, la problématique a été définie par rapport au secteur

d’activité qu’est la commercialisation du vin français, et non pas par rapport à

l’entreprise et au Beaujolais en particulier, pourtant produit phare de Collin-Bourisset.

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13

II. Analyse de l’environnement et du marché et portrait de l’environnement

viticole mondial

II.1 Un marché globalisé

Depuis le milieu des années quatre-vingt dix, le marché du vin est entré dans

une phase de globalisation. Ainsi, si l’offre et la demande ont pendant longtemps été

concentrées au cœur des pays ayant le statut de pays à tradition vinicole (en

particulier la France, l’Espagne et l’Italie), ces derniers ont largement délaissé la

consommation de vin ; Géographiquement parlant, l’offre et la demande se dissocient

de plus en plus l’une de l’autre. Le marché fait donc face au fil du temps à une offre

grandissante des pays du Sud ainsi qu’à une forte demande de la part des pays du

Nord.

II.2 Environnement interne du marché des vins et spiritueux

II.2.1 La « déconsommation » : un constat préoccupant

De nos jours, près de 25 % du volume total de vin bu dans le monde

proviennent de l’échange international. Ce sont ainsi près de 70 millions d’hectolitres

qui sont échangés chaque année. Au cours de l’édition 2005 du salon VINEXPO, salon

international du vin et des spiritueux, une étude présentée sur place fit part d’une

augmentation de près de 1% en volume par an de la consommation mondiale. On fait

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14

alors face à une augmentation lente mais régulière depuis quelques années. Un

constat plutôt encourageant pour les vignerons du monde entier mais qui a tendance à

se faire oublier lorsqu’on évoque une tendance bien réelle : la baisse de la

consommation d’alcool. Ayant atteint son paroxysme au début dans années 1950, la

consommation d’alcool pur s’est vue par la suite passer de 15,1 litres par habitant par

an à 10,7 entre 1979 et 1999.

Au cœur de notre problème, la consommation de vin en France est quant à elle

passée de 92,8 litres par an par habitant à 57,2 litres en ce même espace temps. Une

baisse de la consommation d’autant plus signifiante lorsque l’on sait que plus de 126

litres de vin était consommés en moyenne par habitant en 1960. La consommation ne

passe plus par le biais d’habitudes ancestrales, mais d’expériences nouvelles, et

renouvelées. Régulière et quotidienne pendant des siècles, elle est depuis devenue

occasionnelle. Une évolution donc des plus marquées en Europe puisque ce

phénomène est constaté dans une très grande majorité de pays européens (au cours

des 20 dernières années, l’Espagne a notamment observé une baisse de la

consommation de vins de 47,9% auprès de sa population, plaçant le pays au premier

rang du palmarès de cette phénomène de « déconsommation » ; La France a quant à

elle subit une chute de 38,4%). Au sein des pays dits du « Nouveau Monde », le constat

est identique. Les baisses significatives de la consommation sur vingt ans en Argentine

(-44,8%) au Chili (-33,5%) confirment l’impression perçue chez les producteurs de vin

du « Vieux Monde », et laissent alors pressentir une nouvelle tendance. Gual et Colom

démontrent en 1997 la standardisation de la consommation, qu’on retrouve dans

l’homogénéisation des modèles d’alcoolisation. Selon eux, la baisse de la

consommation globale d’alcool à chuté dans le sud de l’Europe principalement à cause

de celle du vin. Tout cela notamment au profit d’autres boissons alcoolisées comme la

bière. La baisse de la consommation de vin devient alors particulièrement spécifique

aux pays traditionnellement viticoles surtout en Europe.

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15

De plus, les facteurs de crise se sont diversifiés et ont pris de l’ampleur au fil des

ans : application de la loi Evin qui serait selon les viticulteurs responsable de la

« déconsommation » massive que l’on observe depuis les années cinquante,

surproduction mondiale qui oblige certains pieds de vigne à être arrachés. Un autre

facteur renforce le climat de crainte chez les viticulteurs du monde entier : depuis les

années 1980, les baisses de consommation enregistrées ne sont plus comblées par les

nouveaux pays qui se mettent de plus en plus à consommer du vin. (Etude menée par

l’Organisme Aigrain & Coll. pour Onivins, 1997).

Il est important de préciser que les caractéristiques de la consommation de vin

dans le monde se basent de plus en plus sur des critères géographiques. Certains pays

présentent alors depuis ces deux décennies des hausses considérables dans leurs

consommations d’alcool. Ainsi, une tendance apparue depuis plusieurs années montre

une forte hausse de la demande dans les pays du Nord : l’évolution de la

consommation de vin s’est chiffrée à +113,3% au Danemark, + 115,4% en Norvège,

+266,9% en Finlande et +703,9% en Irlande au cours des vingt dernières années.

Certaines exceptions en Amérique du Sud, ou l’on boit de moins en moins de vin, ont

été constatées au Brésil et au Paraguay, ou des hausses respectives de +236,4% et

+98,2% ont été enregistrées au cours des vingt dernières années (Source: inserm).

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16

II.2.2 Un marché hétérogène ou certains produits vedettes prédominent

Le marché des vins mondial est un marché ou la demande est avant tout très

hétérogène, chaque pays ayant une demande particulière en termes de variété et de

qualité des vins. Ainsi, la structure des exportations varie en fonction des pays. Par

exemple, les Etats-Unis, le Royaume-Uni mais aussi l’Allemagne, les 3 premiers

importateurs mondiaux de vins français, accordent une large place au champagne

(respectivement 36, 20 et 11 millions de bouteilles de champagne exportées en 2005)

vin unique et apprécié dans le monde entier. Produit vedette, symbole de l’élégance

française et du savoir faire de ses vignerons, le champagne reste de par son prestige et

son unicité le seul vin français qui ne subit pas de concurrence directe sur les marchés

étrangers (l’accent est par ailleurs férocement mis depuis quelques années sur la

protection de l’appellation « Champagne », jusque là fréquemment plagiée aux Etats-

Unis et en Russie). Pour l’année 2005, c’est près de 43% des 307 millions de bouteilles

produites qui étaient destinées à l’export. Ainsi, avec un chiffre d’affaires mondial de

3,8 Milliards d’euro, pour 1,8 Milliard à l’export en 2005 (contre 3,6 Milliards dont 1,7

à l’export en 2004) (Source : CCI Champagne Ardenne), le champagne a très

récemment franchis un pas historique en dépassant pour la première fois la barre des

4 Milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2006. De plus, au cours de la décennie entre

1995 et 2004 par exemple, le volume des exportations françaises a bénéficié d’une

hausse de +29,3% en volume et de +81,7% en valeur (Source : Rapport Onivins 2005).

Pour citer un exemple flagrant, il est judicieux d’évoquer le cas du groupe mondial

LVMH, leader incontesté du luxe et dont la branche « Vins et Spiritueux » ne cesse de

se développer. Ainsi, cette activité a enregistré pour l’année 2006 une croissance des

ventes de +13% par rapport à l’année 2005, grâce notamment à des performances

exceptionnelles au Japon et un fort développement en Chine. Un vin donc, qui semble

fait abstraction de toute crise, et qui va même jusqu’à en être aux antipodes. Cette

tendance semblerait avoir été récemment suivie par certains vins de Bordeaux qui eux

aussi recommenceraient à avoir le vent en poupe auprès des marchés extérieurs. Ainsi,

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17

les prévisions pour 2006 tablent sur une balance des exportations dépassant les 8

Milliards d’euros.

A l’intérieur de l’Europe, le Royaume Uni reste une terre de développement

stratégique certaine pour les producteurs français du monde entier. Une production

locale peu importante laisse place à une concurrence féroce. "Le marché du vin au

Royaume-Uni est un des plus concurrentiels et l’un des plus compétitifs et donc un

marché recherché et difficile". (Source: Inside Export 2002) après une baisse relative

de la demande, le consommateur britannique s’est à nouveau tourné vers la France.

II.2.3 Instabilité du marché et percée du Nouveau Monde

Dans un souci de clarté, l’offre sera étudiée à travers les deux grandes

catégories que sont les pays du Vieux Continent et ceux du Nouveau Monde.

Au cours de l’année 2006, la récolte mondiale de vin a atteint 280 millions

d’hectolitres (mhl), en hausse de 1% par rapport à l’année 2005. Cette augmentation

n’est pas sans rappeler que les producteurs de vins évoluent au cœur d’un marché

extrêmement concurrentiel de volume, sujet à de perpétuelles mutations. Rappelons

tout d’abord que les trente dernières années ont été le théâtre dans le monde entier

d’une forte chute de la consommation. La production émergente en provenance

d’Océanie et d’Amérique n’a fait qu’aggraver le déséquilibre entre l’offre et la

demande et les revenus obtenus et les prix pratiqués dans le secteur viticole sont

aujourd’hui victime d’une forte instabilité. Cette concurrence est livrée principalement

entre les pays producteurs du Sud, les principaux étant l’Argentine (12,7 mhl produits

en 2002), l’Australie (11,5mhl), l’Afrique du Sud (7,2 mhl) et le Chili (5,6mhl). Une fois

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18

incluse, la quantité de vin de vin produite pour la même période par les Etats-Unis

(20,3 mhl), permet d’établir une production totale des pays du Nouveau-Monde à 61,8

millions d’hectolitres, soit 24% de la production mondiale pour l’année 2002.

Rappelons notamment qu’en 1994, la même part de marché dans les échanges

mondiaux de ces vins du Nouveau Monde représentait 10% (Cette part de marché

avait déjà doublé en 2000, atteignant 20%). La chaîne de supermarchés anglaise

Sainsbury’s a d’ailleurs fait remarqué lors de l’année 2002, que si en 1990, 94% de

leurs vins vendus provenait de France, d’Italie et d’Allemagne, les pays du Nouveau

Monde représentent aujourd’hui 45% de leurs ventes. D’autres pays comme l’Uruguay

ou le Brésil, participent également à la montée en puissance du Nouveau-Monde, mais

à quantités produites moindres (en dessous du million d’hectolitre produit à l’année).

La Nouvelle-Zélande, qui a enregistré +24% de hausse de sa production en 2006 par

rapport à 2005, jouit actuellement d’une activité viticole en plein essor et favorise

également une compétition internationale accrue. L’exemple le plus significatif de

l’expansion du secteur viticole Néo-Zélandais est sans conteste l’augmentation de la

production depuis une dizaine d’années.

En termes de produits, l’offre des pays du Nouveau Monde est assez

hétérogène et plutôt équilibrée en termes de volumes, mais diffère malgré tout en

fonction des régions de production. Ainsi, le vin rouge reste d’une part la grande

spécialité des pays d’Amérique du Sud. En revanche, l’Afrique du Sud est très présente

sur le segment des vins blancs puisque 54% de sa production y est dédié. Cette

tradition semble cependant s’équilibrer avec une production croissante de vin rouge

qui reprend le dessus depuis plusieurs années et qui montre clairement une volonté de

la part du pays à reprendre le dessus sur la concurrence Sud-Américaine. Le savoir

acquis au fil des années par les producteurs locaux permet progressivement

d’atteindre des standards de qualité très satisfaisant et surtout de se tourner vers une

connaissance plus approfondie de la vigne.

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19

L’offre des pays du Vieux Continent est très diversifiée, puisque sa position de

leader historique du marché lui permet de bénéficier d’une très grande variété de

cépage, implantés depuis toujours en ces terres. Certains pays, en particulier les pays

du sud de l’Europe, comme la France, l’Espagne et l’Italie, sont les plus ancrés

traditionnellement dans la culture de la vigne et disposent d’un savoir faire ancestral,

d’un savoir faire et de cépages encore inédits, ce qui permet l’élaboration de vins

uniques (les vins de champagne en France par exemple). Les vins du Vieux Continent

sont très appréciés à travers le monde, et bénéficient d’une image très positive sur le

critère qualitatif.

II.2.4 Synthèse du marché et perspectives pour l’avenir

La consommation mondiale a été établie à environ 240 millions d’hectolitres de

vin pour l’année 2006. Cet excédent n’est pas sans causer de lourds problèmes de

surproduction, qui sont un risque majeur pour la filière viticole. Dans ce contexte,

quelles sont les perspectives de ce marché à moyen et long terme ? Si une nouvelle

approche du vin et de sa consommation est véritablement entrain de voir le jour

auprès de la population mondiale, cela laisse pressentir de beaux jours pour la santé

du marché mondial, tout comme pour la production française. Plusieurs cabinets

d’études tablent sur une croissance de près de 10% d’ici à l’année 2010. L’ouverture de

nouveaux marchés reste bien entendu un facteur de croissance déterminant. La Chine

et la Russie par exemple, connaissent depuis peu une hausse bien réelle dans leur

consommation de vins, ce qui devrait les aider très prochainement à rentrer dans le

classement des dix premiers consommateurs de vins au monde. Si le marché des vins

représentait l’équivalent d’un peu plus de 81 Milliards en 2005, il devrait atteindre 90

Milliards (117 Milliards de dollars) au terme de l’année 2010 selon une étude

présentée au salon Joint-venture 2005. Cela représenterait alors une hausse de 9% en

cinq années seulement. Pareillement, sur dix ans, entre les années 2001 et 2010, il est

Page 21: Memoire Idrac

20

estimé que la consommation mondiale de vin aura atteint une hausse de 9%, ce qui

correspond à une hausse annuelle de près de 270 Millions de bouteilles.

La consommation française, cela a été développé précédemment, est

actuellement en baisse. Le pays conserve son statut de plus gros consommateur de vin

au monde, mais certains marchés sont en passe de le détrôner. En effet, si la

croissance est maintenue, les Etats-Unis seront vraisemblablement les plus gros

consommateurs de vins au monde en 2010. C’est donc en théorie près de 27 millions

de litres de vins qui devraient être bus. Mais la plus grosse évolution à venir est

attendue sans surprise de la part des consommateurs Chinois : avec une estimation à

+36%, l’évolution de la consommation est une opportunité majeure pour les

producteurs du monde entier. Le pays pourrait donc devenir pour l’année 2010 le

marché le plus dynamique du secteur viticole. Dans la même perspective, le marché

Russe enregistre lui aussi des performances très bénéfiques au marché, puisqu’il a été

observé une hausse de la consommation de 37% en 2001 et 2005.

En France, le marché des vins français est régulé par des appellations bien

distinctes, référant toutes à des régions de productions. Ces appellations, que l’on

compte au nombre de 450, font de la France l’ambassadeur mondial de la diversité La

réglementation en vigueur de l’Union Européenne classe les vins en deux grandes

catégories : les VQPRD (Vins de Qualité Produit dans une Région Déterminée) ainsi que

les Vins de Table. En France, ces catégories sont déclinées de façon bien précise. D’une

part, il y a les Appellations d’Origine Contrôlée (AOC) et les Vins Délimités de Qualité

Supérieure (VDQS) qui sont des VQPRD. D’autre part, les Vins de Pays qui sont des Vins

de Table. A l’opposé, la grande majorité des autres pays producteurs de vins, et

particulièrement les producteurs du Nouveau Monde, ont clairement optés pour une

simplification de leur offre dans la présentation de leurs produits, avec un nombre

limité de vins. De plus, ils disposent de législations beaucoup plus souples au niveau de

Page 22: Memoire Idrac

21

l’élevage et des techniques de vinification de ces vins, ce qui accroit les tensions entre

concurrents. Ces points seront détaillés dans ce mémoire par la suite.

D’un point de vue financier, il est intéressant de noter que le taux de change

euro-dollar, défavorable depuis quelques années aux exportations européennes vers

les pays tiers, et qui a durant une certaine période défavorisé les acheteurs américains,

ne semble plus être un problème trop handicapant pour le commerce extérieur de vins

français. En effet, à en juger la croissance enregistrée en 2006, les producteurs français

semblent avoir réussi à contourner cet obstacle. Les résultats font en effet part d’une

relance de la consommation mondiale, qui est bénéfique aux producteurs français.

Aidés par des millésimes plutôt flatteurs qu’ils ont positionnés sur le marché à prix

compétitifs, les vignerons ont ainsi pu permettre aux vins tranquilles, c'est-à-dire les

vins non pétillants, de se redresser sur le marché mondial au cours de l’année 2006, et

d’enregistrer une progression de 15,4% en valeur, l’équivalent de 1,87 Milliards

d’euros, et de 5,3% en volume, soit 67,9 Millions de caisses, le tout par rapport à

l’année 2005. Le millésime 2003 ayant fait très fortement parlé de lui au cours des

salons et des rencontres entre professionnels du vin, il a largement contribué à

relancer des exportations ternies ces dernières années. On remarque notamment

qu’un engouement particulier à été ressenti au niveau des grands crus de Bordeaux

(avec une hausse de +40,7% en valeur et 11 ,1% en volume). La demande a

particulièrement émané des Etats-Unis, ou il a été constaté une hausse de 39% en

valeur pour les exportations françaises de vins tranquilles. Concernant les marchés

Européen et Asiatique, les progressions sont certes moindres, mais tout aussi

effectives, et trouvent un certain équilibre entre valeur et volume.

La tendance actuelle du marché consiste à faire des vins simples et accessibles.

L’accent est alors mis sur la conquête du consommateur néophyte, qui devient pour

les producteurs une cible majeure. Autre tendance qui prend de plus en plus de poids :

Page 23: Memoire Idrac

22

la place consacrée au packaging dans les budgets marketing, phénomène directement

inspiré, nous le verrons, sur le modèle des pays du Nouveau Monde. En niveau du

produit, le packaging est devenu un argument de vente révolutionnaire, dans un

métier qui a pendant longtemps mis de côté toute référence à la modernité et axé

l’allure de ses produits sur un discours purement traditionnel. Ce mémoire aura

l’occasion de détailler ces deux grandes tendances par la suite.

II.3 Environnement externe et appréciation du risque

II.3.1 Matrice PEST

L’élaboration d’une matrice PEST semble être un bon moyen de synthétiser

l’environnement externe du marché des vins et spiritueux.

Environnements

Opportunités

Menaces

Politique

- Défense des AOC

- Signature d’accords

commerciaux (France-Afrique)

- Subventions en cas de

grands sinistres.

- Aide de l’Etat

- Loi Evin

- L’état d’ébriété sur la voie

publique est pun

- Limitation de la production

grâce à des quotas

- Disputes politiques France-

USA

-Organismes de contrôles

puissants (finances, sécurité,

production…).

Page 24: Memoire Idrac

23

Economique

-Fin des barrières douanières

dans l’UE

-Monnaie unique qui facilite

les échanges

- Diminution du pouvoir

d’achat

-Offre trop complexe et trop

impressionnante

-Taux de change dollars/euros

-Ce secteur en cas de crise est

bloqué car le vin n’est pas

considéré comme un produit

de grande consommation mais

plutôt comme un produit de

luxe.

Social

-Le vin est un produit de

tradition

-Le vin est un produit qui

reflète la convivialité

-Lien entre les différentes

couches sociales

-Retour aux valeurs sûres et

aux produits traditionnels,

-Lobbying anti-alcool qui ont

un pouvoir puissant

-Les jeunes ne sont pas

éduqués et consomment très

peu de vin

-Emergence de produits plus

attrayants (ready to drink)

-Poids des leaders d’opinions.

Technologique

-Amélioration de la qualité sur

tout le processus de création

et de commercialisation

-Fantaisie et différenciation

au niveau du packaging

-Mise en place des normes et

des certifications qui sont

recherchées par les clients,

gain de temps.

-Surproductivité qui entraîne

un affaissement des prix

-Importance des vins

industriels qui cassent le

marché en produisant

beaucoup

-Référencement de nouvelles

zones AOC.

Page 25: Memoire Idrac

24

II.3.2 Modèle de PORTER

Le marché des vins et spiritueux est un marché très concurrentiel,

particulièrement celui des vins. Une interprétation de ce dernier d’après le modèle

des cinq forces de l’environnement concurrentiel de Michael Porter serait

Pouvoirs des

fournisseurs :

Intégration de la filière

de production, contrôle

de la qualité

Pouvoir des clients :

Grossistes,

distributeurs qui ont

des grands pouvoirs

de négociation

Menace des produits

de substitution :

Néant

Concurrence du métier :

Beaucoup de structures de

production, concurrence très

importante , Nouveau-Monde

Pouvoir des clients

clients :

Consommateur : de plus

en plus important

CHR : pouvoir de

négociation

Menace des

nouveaux entrants :

Marché mondial : Pays

du Nouveau-Monde

Marché national :

Faible à Néant

Pouvoir institutionnel

et réglementaire:

Enormément de

contrôles

Pouvoir

socioculturel :

produit traditionnel

Page 26: Memoire Idrac

25

Menace des nouveaux entrants :

Elle est quasi inexistante au niveau national, dans la mesure où il existe des

barrières à l’entrée très importantes. En effet, cela nécessite des investissements forts

en capacité de production, de stockage, mais aussi en moyens humains. De plus, la

saturation actuelle du marché est un réel frein pour s’installer. L’entrée sur le marché

peut donc s’effectuer par le rachat d’une structure par une entreprise déjà existante et

possédant les fonds d’investissements nécessaires. Au niveau du marché mondial, la

situation est plus préoccupante, puisque la menace actuelle vient des pays du

Nouveau Monde. Disposant de contraintes moindres, notamment en terme de main

d’œuvre, ces pays du Sud du globe parviennent à produire des vins de bonne qualité à

prix très compétitif.

Pouvoir des fournisseurs :

Ce sont principalement les vignerons et caves coopératives. Peu de pouvoir de

négociation car les négociants occupent une position dominante sur le marché, ce sont

eux qui décident des prix et ils contrôlent rigoureusement la qualité des matières

avant de les acheter.

Pouvoir des clients :

L’entreprise vend principalement sa production à des négoces et à des

grossistes et est soumise à de fortes pressions dans la mesure ou le pouvoir de

négociation de ce type de client est très important. Les producteurs français sont

constamment dans l’obligation de devoir justifier un prix plus élevé par rapport à la

concurrence étrangère.

Page 27: Memoire Idrac

26

Pouvoir des clients-clients :

Ils n’ont que peu de pouvoir, car 80% des achats de vins s’effectuent en grande

surface. Cependant, la tendance actuelle est bel et bien de donner au consommateur

ce qu’il désire, ce qui a pendant longtemps été peu considéré. Ainsi, l’uniformisation

des modes de consommation permet à ces clients-clients de prendre du poids dans les

négociations, par l’intermédiaire de celles qui sont effectuées avec les grossistes. Il

existe quelques cas ou le pouvoir du consommateur est flagrant, notamment lors des

rencontres entre ces derniers et les professionnels (par exemple lors de salons comme

Joint-venture), ou le consommateur impose clairement ses préférences et terme de

goût, de packaging,…

Pouvoir socioculturel :

Le vin est ancré dans les traditions françaises, associé au plaisir de la table.

Dans le monde entier, le vin est lui aussi en général perçu comme un produit très

convivial, très souvent associé à la gastronomie, et qui est très bien intégré dans de

nombreuses cultures.

Pouvoir des produits substituts :

Les produits de substitution sont très peu nombreux ; on peut remplacer le vin

par de la bière par exemple en accompagnement de certains plats.

Pouvoir institutionnel :

La marge de manœuvre est très limitée, du fait que la législation soit très stricte

et les contrôles très nombreux, et ce à différents stades de la production.

Page 28: Memoire Idrac

27

Partie 2 : Intégration au sein de Collin-Bourisset et déroulement des missions

Le marché très concurrentiel du vin contraint de plus en plus les entreprises du

monde entier à user de nouvelles techniques de fidélisation pour conquérir une

clientèle particulièrement critique et exigeante quant à la qualité du produit fini.

Même au cœur des entreprises viticoles les moins importantes, on assiste à la

naissance de cellules marketing, destinées à accompagner, promouvoir et valoriser le

produit aux yeux du consommateur. C’est dans cette perspective que j’ai été placé aux

côtés de la responsable marketing, fraîchement recrutée dans l’entreprise. Au cours de

cette expérience, les diverses missions m’ayant été confiées ont reposé sur plusieurs

axes.

I. Silk, un concept fort à lancer sur le marché

Dans un premier temps, le travail le plus important ayant été réalisé repose sur

l’élaboration des plans promotionnels pour l’année 2007. En lien direct avec les

interrogations sur les moyens à mettre en œuvre pour devenir plus compétitif sur le

marché étranger du vin, les plans promotionnels représentent un enjeu majeur dans la

stratégie de l’entreprise. La société Collin-Bourisset m’a donc confié dans ce sens

différentes missions, une grande partie ayant été orientée sur un nouveau produit : le

vin Silk.

Arrivé au sein de l’entreprise en Octobre 2006, j’ai vécu intensément les

premières semaines de ce stage, dans la mesure ou une effervescence toute

particulière était de mise pour le lancement du Beaujolais Nouveau.

Traditionnellement planifié chaque année le 3ème Jeudi de Novembre, cet évènement

Page 29: Memoire Idrac

28

est un moment très attendu par les producteurs du Beaujolais. Epaulés par le pays

beaujolais, tout est fait pour populariser ce lancement dans le monde entier. Cette

année là a été particulièrement agitée pour la société, puisque le lancement d’une

nouvelle marque a coïncidé avec l’arrivée du Beaujolais. Le vin Silk (« soie » en

français), conçu autour d’un packaging original et « tape à l’œil » (ANNEXE Etiquette et

photo) dans une volonté claire de différenciation a ainsi vu le jour. L’objectif principal

de la marque a été dans un premier temps d’optimiser la visibilité du produit de par

ces couleurs vives. Dans un second temps, le but était concentré sur la communication

d’un certain nombre de valeurs. En effet, dans un climat de consommation morose,

tout est fait pour relancer le Beaujolais auprès des consommateurs de vin. Ces

initiatives sont tournées depuis quelques années sur la notion de qualité du produit,

sur laquelle on insiste, ainsi que l’origine du produit et les valeurs héritées de la

tradition viticole Beaujolaise : en l’occurrence, le vin Silk compte parmi ses principaux

objectifs de communiquer essentiellement sur la provenance, puisque l’accent est mis

sur la région lyonnaise, et ses références culturelles. J’ai donc tout d’abord assisté à la

conception d’un prototype, et au fur à mesure du temps échangé impressions et

propositions de modifications avec la responsable marketing. En relation directe avec

l’agence de communication travaillant sur le produit Silk, j’ai pu ainsi suivre l’ensemble

des étapes de la validation finale du packaging, mais aussi des instruments destinés à

la Publicité sur le lieu de Vente.

Ensuite, si ce packaging se voulait être assez audacieux et innovant, le

lancement du produit restait une étape qu’il fallait absolument accompagner avec la

mise en place de différentes actions. Une action-test consommateurs a été mise en

place avant le lancement du vin sur le marché, afin d’observer le comportement, les

réactions et les commentaires de la clientèle du Beaujolais et des vins en général à son

égard. Tout d’abord, j’ai consacré une partie de mon temps au communiqué de presse

destiné aux médias locaux et régionaux. Cette tâche a nécessité la conception de

plusieurs versions de communiqués, ces derniers étant également destinés à la presse

Page 30: Memoire Idrac

29

professionnelle du secteur viticole, ce qui nécessite une précision optimale. Par la suite,

il m’a été confié le soin de réaliser une présentation du vin Silk pour les différents

clients et prospects étrangers de la société Collin-Bourisset (cf Annexe). Cette tâche

s’est révélé être déterminante puisque cette présentation, réalisée à l’aide du logiciel

powerpoint, allait être le premier contact du produit avec la clientèle dite

professionnelle, qui représente la clientèle plus importante pour la société, par

l’intermédiaire des importateurs locaux, mais aussi des Cafés, Hôtels, Restaurants.

Ainsi, si l’impact médiatique d’un produit est primordial, l’entreprise a eu

l’occasion de le mettre à profit au milieu du mois de novembre. En devenant

partenaire de l’évènement « The Beaujolais Run », une course automobile pour la

charité reliant l’Angleterre à la région Beaujolaise, la société a donc émis un réel désir

par la présente d’accroître son image à l’étranger. Pour cette occasion, il m’a été

confié comme mission de contacter un certain nombre de journalistes afin de les

informer du passage des coureurs automobiles et de leurs voitures d’exception dans

les locaux de la société. Offerte en dégustation ce jour là, la cuvée Silk a été fortement

appréciée par les coureurs anglais et beaucoup d’entre eux ont quittés l’entreprise en

ayant acheté des cartons de bouteilles. J’étais présent ce jour là pour couvrir

l’évènement en terme de photographies, outil majeur de communication, et qui seront

bientôt en ligne sur le site de la société.

Par la suite, une grande partie de mon travail dans l’entreprise a été dédiée à

l’élaboration et au suivi des plans promotionnels pour l’année 2007. Cette mission a

dans un premier temps consisté à s’occuper de la publicité sur le lieu de vente, avec

tout d’abord la conception puis le suivi de la réalisation de flyers. Ces derniers

portaient sur les nouvelles offres en vigueur ainsi que sur les nouvelles gammes de

Collin-Bourisset. Ensuite, et toujours dans le contexte de la mise en place de ces plans

promotionnels, j’ai de plus pu définir les mises à jour nécessaires à effectuer

Page 31: Memoire Idrac

30

concernant les tarifs particuliers 2007, avec l’aide du gérant de la société. Enfin, cette

étape de ma mission a également été ponctuée de divers travaux concernant la

création de fiches techniques pour les vins commercialisés, la plupart du temps

destinés à l’export. Cela m’a permis de me familiariser avec le vocabulaire utilisé dans

le milieu viticole et œnologique, qu’il soit français ou anglais.

II. Marketing ponctuel et outils managériaux de motivation

Dans un autre temps et toujours dans le cadre du développement des plans

promotionnels, j’ai pu mettre en place différents supports destinés à des opérations

marketing ponctuelles. Le lancement du Beaujolais Nouveau est toujours chaque

année pour l’entreprise une période d’activité intense, que j’ai pu ressentir de mon

côté au niveau des taches confiées. La conception des outils promotionnels de vente,

qu’ils soient destinés aux professionnels ou aux particuliers, est très importante dans

la prospection d’une entreprise et j’ai donc été chargé de la mise en place de ces

supports de communication. Cela a consisté notamment à la création de documents de

présentation pour les différents vins commercialisés, et aux prises de photos

permanentes des gammes et des bouteilles séparées qu’il fallait par la suite faire

parvenir aux clients et aux prospects. D’autres opérations marketing ponctuelles ont

aussi été envisagées et par la suite finalisées. Ces dernières sont cependant à

différencier des autres, dans la mesure ou elles visaient surtout dans un premier temps

à mettre l’accent sur la motivation du personnel. Primordial dans n’importe quelle

entreprise, une bonne attitude managériale consiste avant tout à optimiser les outils

de motivation. En ce sens, des concours internes ont été lancés, afin de valoriser les

commerciaux de l’entreprise, en leur offrant la possibilité de gagner des prix. Ainsi, une

opération « Cave a vin » a été imaginée. Au cours de son déroulement, un partenariat

est né entre Collin-Bourisset et une société qui commercialise des caves à vins. Cette

opération a eu comme objectif de proposer aux clients de l’entreprise des caves à vin à

Page 32: Memoire Idrac

31

prix modique, tout en incluant un certain montant en bons d’achat à utiliser sur des

vins au choix. Ensuite, l’outil de motivation allait devenir un facteur déterminant dans

le déroulement des ventes. En effet, chaque vendeur avait le droit de bénéficier d’une

cave à vin pour dix vendues.

Une autre opération de ce type a également été imaginée, celle ci visant quant

à elle les distributeurs des vins de la société à l’étranger. Il s’agissait dans le cas présent

d’offrir un certain nombre de séjours dans la région Beaujolaise, en fonction du

volume de vin commandé. Mon rôle dans cette opération a été principalement la

valorisation du cadeau offert, ainsi que la recherche d’activités à proposer pour le

séjour offert. Enfin, dans la lignée de ces plans promotionnels, j’ai pu assister à

l’élaboration d’une opération spéciale « Saint-Valentin », au suivi de la Publicité sur le

lieu de vente réalisée, ainsi qu’a une partie des processus de communication

développés. Toutes les opérations de marketing ponctuel qui ont été établies m’ont

alors permis d’apprécier la réactivité de l’entreprise, tout en me familiarisant avec les

différents outils de promotion employés.

III. Travaux de recherche et prospection internationale

Une autre mission s’est révélé être particulièrement intéressante. Au début de

mon intégration dans l’entreprise, j’ai aussi pu effectuer un travail important de

recherche, en vue d’une prospection internationale, sur des marchés ciblés et

prédéfinis. Mes recherches se sont toutes d’abord effectuées à partir des bases de

données existantes. En l’occurrence, les informations récupérées au cours de la

dernière édition du salon des vins Joint-venture m’ont été d’une grande utilité. Mon

travail a consisté à rechercher et classer l’ensemble des informations concernant les

personnes s’étant présenté sur le stand de la société. Je me suis toutefois concentré

Page 33: Memoire Idrac

32

sur les marchés suivants : la Grande-Bretagne, la Chine et le Japon. Il a fallu aussi

établir une liste détaillée des acteurs des marchés locaux. Cela a été mené en grande

partie grâce à l’aide d’internet et de différentes missions économiques implantées sur

place. Le but de cette mission étant de compléter les informations détenues par la

société Collin-Bourisset et de leur fournir une nouvelle base de donné détaillée et plus

importante en terme de contacts. Au cours de cette activité, j’ai également adapté une

présentation du produit Silk destiné à ces marchés. Le tout a été remis au gérant de la

société. J’ai eu l’occasion d’étoffer plus tard cette présentation, d’avantage destinée

au marché britannique, ce qui m’a amené à utiliser divers réseaux d’information

réservés aux professionnels, notamment par l’intermédiaire de la fédération

professionnelle des vins et spiritueux. De même, il m’a été plus tard demandé de

compléter une autre présentation de la gamme Silk, destinée au marché Russe.

IV. Un axe de développement primordial : la refonte du site internet

La dernière mission qui m’a été confié dans l’entreprise s’est avéré être d’une

importance capitale pour la suite du développement de la société, et sa crédibilité

auprès de sa clientèle. En effet, si la technologie Internet est devenue depuis quelques

années un axe de développement commercial incontournable pour les entreprises du

monde entier, beaucoup d’entre elles, et particulièrement les petites et moyennes

entreprises, ont encore du retard à ce niveau là. Bien que disposant d’un site Internet,

la société Collin-Bourisset subit malgré tout une présentation obsolète et a du retard

sur ces concurrents. Même s’il n’est pas question pour le moment de se tourner vers

l’éventuel développement d’une plate-forme e-commerce, cette hypothèse est

toutefois envisagée de la part de la direction. Pour donner un réel coup de jeune à son

site Internet, la maison mère Loron & Fils a alors pris la décision de me confier la

refonte de celui de Collin-Bourisset, le plus ancien, réalisé il y a quelques années à

moindre coup. Après expertise, il s’est avéré que certaines mises à jours de ce dernier

Page 34: Memoire Idrac

33

étaient loin d’être récentes, datant parfois même de l’année 2002. Très simpliste au

niveau du graphisme et d’une allure un peu dépassée, il fallait donc le moderniser pour

préparer l’avenir. Dans cette optique là, j’ai du tout d’abord me rendre sur de

nombreux sites Internet d’acteurs du milieu, afin de me donner un aperçu global.

Ensuite, c’est le plan du site Internet qu’il a fallu revoir, pour rendre possible un accès

simple et efficace a ses visiteurs. Cette refonte s’est ainsi matérialisée par l’élaboration

d’un briefing de recommandations sur les différentes actions à mettre en place, le tout

établi autours d’un budget plafonné. Une fois terminé et validé, ce briefing a été

présenté à deux agences de création de sites Internet, afin qu’elles puissent présenter

chacune leur devis à la société. Cette mission s’est interrompue à ce stade là, et la

suite du dossier a été transmise à la responsable marketing, dans la mesure où mon

stage est arrivé à terme au cours de la mission.

Page 35: Memoire Idrac

34

Partie 3 : Analyse théorique de la problématique

"Comment les producteurs de vin français peuvent ils faire face à la concurrence des

producteurs de vin du Nouveau Monde ?"

Introduction

Les cinquante dernières années ont marqué un tournant considérable sur le

marché mondial des vins. Baisse de la consommation flagrante, apparition de

nouveaux acteurs très compétitifs et donc d’une concurrence accrue…Mais depuis dix

ans, la naissance d’un nouveau type de consommateur bouscule le marché. En effet,

un phénomène bien particulier a pris une ampleur toute particulière : la demande,

depuis toujours divergente et très hétérogène, se tourne de plus en plus vers un

processus d’uniformisation. La diversification des modes de consommation est un

facteur déterminant dans la hausse de la consommation du vin, et les gouts recherchés

par les consommateurs de vin occupent à présent une place croissante dans la

stratégie d’une grande partie des producteurs du monde entier.

I. De la différenciation à l’uniformisation : la naissance d’un nouveau

consommateur

I.1 Le Nouveau Monde : un goût pour tous

La pénétration des vins du Nouveau Monde sur le marché, qu’ils soient Chiliens,

Sud- Africains, Californiens ou encore Australiens, on Ainsi, si l’uniformisation du goût

des vins du Nouveau Monde est indispensable pour qu’ils puissent être vendus au

Page 36: Memoire Idrac

35

grand public. En effet, c’est un fait incontestable, les vins du Nouveau-Monde ont

favorisés l’apparition d’une nouvelle focalisation sur les attentes du consommateur en

termes de goût. Il faut donner au consommateur ce qu’il désire, et cette revendication

a d’ailleurs fait l’objet de remarques très fortes de la part de Jacques Berthomeau. A

l’époque contrôleur général des offices pour le compte du Ministère, celui-ci a rédigé

en 2001 un rapport intitulé « Cap 2010, le Défi des Vins Français » pour le compte du

ministre de l’agriculture. Il déclare notamment dans ce rapport : « Nous voulons dire à

l’ensemble des viticulteurs de France que l’expansion et le développement de nos

vignobles passe par l’absolue nécessité d’être à l’écoute des attentes de nos

consommateurs qu’ils soient chez eux, en famille, entre amis, à la terrasse d’un café, à

déjeuner au restaurant, le soir à l’heure de l’apéritif, les jours de fête ; qu’ils soient en

train de pousser leur caddie dans une grande surface, chez un caviste, dans la cave d’un

producteur, dans le caveau d’une cave coopérative, sous les voutes prestigieuses d’un

château ou les poutres d’un domaine de renom ; qu’ils soient à Lille, à Marseille, à Brest,

à Londres, à Londres, Tokyo, New York ; qu’ils soient dans un avion, en TGV, sur un ferry,

un paquebot de croisière ou un village de vacances.» Dans un premier temps, si

l’aspect multiculturel de cette revendication semble insister sur la diversité de l’offre à

fournir, pourquoi ne pas tenter de produire un type de vin, qui par sa typicité serait

capable de séduire l’ensemble des consommateurs ?

Dans une certaine mesure, l’offre des vins du Nouveau Monde vise à répondre

à cette problématique. Pour comprendre comment ces marques du Nouveau Monde

sont parvenues petit à petit à séduire le monde entier, il faut tout d’abord se référer à

la typicité de ces vins. Leur grande majorité est dotée d’une saveur boisée qui en fait

une des typicités du produit, d’un gout fruité très prononcé, qui plait aux

consommateurs. Le vin, facile à boire, devient très vite appréciable aussi bien pour le

nouveau consommateur sans expérience que pour le consommateur averti et amateur

de bon vin ou encore l’expert. A notre époque, les consommateurs recherchent des

vins dociles et veulent boire plus rapidement. Certains œnologues très réputés, dont le

Page 37: Memoire Idrac

36

magnat de la critique des vins Robert Parker, confirment la qualité des vins produits en

accordant chaque années des excellentes notes aux meilleurs productions issus de ces

pays. Un tournant a ainsi été marqué depuis le milieu des années 1990 et les vins du

Nouveau Monde ont commencé à s’ouvrir aux consommateurs, tout en progressant au

niveau qualitatif.

I.2 Conséquences de la standardisation

La pression du marché au niveau de l’offre et la demande a progressivement

conduit à la sélection de quelques grands cépages (Cabernet-Sauvignon, Shiraz,

Chardonnay,Pinot…) dans l’élaboration des vins de grande consommation. Les grandes

marques du Nouveau Monde envahissent le marché en imposant ces cépages, plus

vendeurs, et contribuent alors pleinement à un processus de standardisation de la

consommation. Un phénomène qui a contribué à la négligence des certains cépages-

locaux, voir même dans certains cas à l’abandon total de cultures. Certains pays,

comme la Bulgarie par exemple, se retrouvent alors dans des situations incertaines,

puisqu’ayant été contraintes à l’arrachage de leurs vignes pour planter de nouveaux

cépages correspondants aux attentes du marché, ils sont ensuite concurrencé de façon

virulente par les vins du Nouveau Monde. L’arrêt de toute production de cépages

locaux dans certains pays constitue ainsi une preuve irréfutable que les standards de

consommation évoluent et que la demande se tourne de plus en plus vers une certaine

uniformité.

Il convient malgré tout de relativiser cette uniformisation du gout. Les modes

de consommation évoluent, c’est certain. Dans certains pays comme les Etats-Unis et

le Royaume-Uni par exemple, une grande partie de la consommation du vin s’effectue

en dehors des repas (80% du vin est bu en dehors des repas au Royaume-Uni par

Page 38: Memoire Idrac

37

exemple). Dans ce contexte là, la demande en terme du goût du vin n’est pas la même :

le consommateur va alors rechercher des vins ayant un potentiel de séduction rapide

par le goût et les arômes qu’il dégage. Il ne cherche plus un vin pour accompagner un

plat, et favorise les vins moins complexes. Et réciproquement lorsque le

consommateur recherche un vin en accordance avec un met, il privilégiera un vin de

caractère et plus complexe, caractérisé par l’offre du des pays de la vieille Europe.

II. La stratégie du succès des nouveaux producteurs : un exemple à suivre ?

Sur les marchés des pays qui n’ont jamais été historiquement des producteurs

de vin, les parts de marché des pays producteurs du Nouveau Monde ont franchement

augmenté, au détriment de celles des pays européen. Notons ainsi l’exemple du

marché britannique, ou la part de marché des vins de ces pays là a progressé de 15% à

37% entre 1995 et 2000 (en volume). Dans le même espace-temps, les producteurs

Français, Espagnols, Italiens et Allemands ont vus leur part de marché chuter de 75% à

55%. Dans la même optique, en ce qui concerne les positions françaises sur les

marchés nordiques, là ou la demande est la plus forte, le dilemme est grandissant : la

Suède, est le cas le plus flagrant, permettant aux vins Chiliens et Australiens de

progresser respectivement de 29 % et 17% en parts de marché, tandis que de fortes

baisses sont subits par le groupe France-Espagne-Italie. Autre constatation de ce type

en Hollande, pourtant client et amateur de longue date des vins Français : fière

d’importer un peu plus de 50% du nombre totales de bouteilles de vin en 1996, la

France ne représentait plus que 38 % en 2000, et 30% en 2006. Il est à présent crucial

d’essayer de déterminer et de comprendre comment les producteurs du Nouveau

Monde arrivent à progresser autant, afin par la suite de pouvoir apporter des

préconisations aux vignobles français. Quelles stratégies ces pays là mettent-ils en

place ?

Page 39: Memoire Idrac

38

II.1 Les stratégies du succès

La grande force des vins du Nouveau Monde, c’est avant tout un

positionnement spécifique : produire des vins de qualité à bon prix. Ce rapport qualité-

prix inédit séduit de plus en plus un nouveau type de clientèle, et principalement les

nouveaux consommateurs chez les femmes et les jeunes, qui ont longtemps délaissé le

vin. La comparaison du rapport qualité-prix de ces vins avec ceux issus du segment

moyenne gamme en France est décevante : les producteurs français ne sont pas

capables de produire des vins de qualité à bas prix. La stratégie de ces pays de

positionnement sur le segment entrée de gamme a été une excellente approche du

marché par ces pays producteurs.

Une autre force considérable repose véritablement sur la facilité d’accès de ces

vins. La grande majorité des vins du Nouveau Monde sont élaborés à partir d’une seule

variété de raisin, le cépage. Les vins produits sont alors très faciles à « comprendre »,

et facilitent l’éducation du consommateur débutant. Ce dernier favorise avant tout

une mémorisation simple du produit qu’il déguste, et apprécie de pouvoir se repérer

facilement parmi un produit disposant d’une offre extrêmement large. En comparaison,

il est important de revenir sur un point paradoxal qui handicape l’offre française sur ce

segment des nouveaux consommateurs. En effet, il existe aujourd’hui en France près

de 450 appellations différentes sur son marché viticole. Ces appellations sont toutes

directement liées à une région scrupuleusement définie, au type de raisin utilisé

(cépage unique ou assemblage de diverses variétés de raisin), et encore par rapport

aux techniques de vinification employées. Si un nombre est tout à fait représentatif de

la diversité de l’offre française, et offre un choix formidable à n’importe quel expert en

vins, il en est autrement pour le consommateur néophyte, qui se retrouve vite dépassé

par la multitude des vins proposés. Le choix devient difficile, et ce consommateur

débutant va très vite se sentir exclu, pour ensuite se tourner vers des vins moins

Page 40: Memoire Idrac

39

complexes à déchiffrer. Par exemple, un producteur Sud-Africain exportant un

Chardonnay 2003 en Europe sous une marque (et mettant principalement en avant le

cépage au niveau du produit), aura plus de chance de séduire une clientèle peu

renseignée, qu’un producteur Français proposant un Chablis de la même année, et

pourtant issus du même cépage.

Si séduire de nouveaux consommateurs est un enjeu majeur en terme de gain

de parts de marché, un des principaux facteurs clés de succès des vins du Nouveau

Monde réside dans la parfaite assimilation que leurs pays producteurs ont eu des

attentes du consommateur. La mise en place d’une offre simplifiée, par l’intermédiaire

d’une classification par cépage, permet d’avoir une vertu éducatrice, un rôle

pédagogique très fort pour le consommateur néophyte. Patrice Bourdier, qui occupe le

poste de responsable des ventes du célèbre caviste Nicolas, a très bien mis ce

phénomène en évidence : « Les vins du Nouveau Monde ont un rôle pédagogique. Ils

aident les gens à entrer dans l’univers du vin. Les consommateurs peuvent ensuite

monter en gamme et évoluer en fonction de leurs connaissances ». Un positionnement

qui peut s’avérer être très profitable aux grandes marques étrangères, comme Long

Mountain en Afrique du Sud ou encore Jacob’s Creek en Australie par exemple (Jacob’s

Creek étant la marque de vin Australiens la plus vendue au monde avec 7,5 millions de

caisses par an), qui font de ces vins de « formation » à la culture œnologique un outil

de fidélisation formidable. En effet, n’oublions pas qu’un consommateur satisfait a de

grandes possibilités d’acheter à nouveau. En l’occurrence, un consommateur

Hollandais qui aura été séduit par un Lui donner les moyens de se forger une

connaissance du vin, c’est également pour beaucoup d’entreprises le moyen d’en faire

un consommateur averti, capable par la suite de se tourner vers des produits plus

onéreux.

Page 41: Memoire Idrac

40

II.2 Le Nouveau Monde et le marché du haut de gamme : une stratégie de

diversification à redouter ?

On constate alors sans surprise une tendance récente dans la stratégie du

Nouveau Monde, à savoir le développement avec succès de nouveaux produits sur le

segment haut de gamme, c'est-à-dire sur les segments premium (bouteille dont le prix

est au dessus de 5 euros) , semi-premium et même ultra-premium. Le président la

firme australienne Orlando Wyndham, qui produit le vin Jacob’s Creek, affirme

même : « La consommation mondiale des vins de qualité a augmenté de 4 à 5%. Or le

marché regorge de vins de qualité médiocre. Mais nous ne sommes pas sur ce segment

et ne sommes pas intéressés à y entrer. Sur les segments des vins premium et semi-

premium, il y a une large demande encore insatisfaite, et en particulier pour les vins du

Nouveau Monde. » L’enjeu de cette diversification est donc double, avec une première

phase critique que l’ont retrouve dans le processus de fidélisation, puis une seconde

étape dans la découverte pour le consommateur d’une gamme plus travaillée.

Cette orientation stratégique marque une nouvelle escalade dans la

concurrence entre ces pays et ceux du Vieux Continent, en particulier la France, leader

mondial sur le marché des grands crus. Mais le plus intéressant reste la stratégie de

distribution développée par certains producteurs pour leurs vins les plus rares et les

plus onéreux. La réputée marque australienne Penfolds Grange a ainsi mis en place

une remarquable stratégie de distribution sélective, visant à répartir un nombre limité

de bouteilles dans certains grands restaurants New-Yorkais, afin d’accroître la

notoriété et ainsi concurrencer les grands crus déjà disponibles sur les cartes. La

communication à joué un rôle important, et le groupe n’a pas hésité à faire publier la

liste de ces restaurants dans la presse locale. Notons également que la marque

australienne Penfolds Grange reste une des rares marques issues du Nouveau Monde

à détenir une aussi forte notoriété sur le segment haut de gamme. Afin de mieux se

Page 42: Memoire Idrac

41

positionner sur le marché mondial, l'Afrique du Sud a investi dans la production de vin

haut de gamme. Connu sous le nom de "Projet Winetech Vision 2020", ce programme

semble porter ses fruits : les exportations atteignent 2,8 millions d'hectolitres en 2005,

contre 1,4 million en 2000. Le Nouveau Monde doit cependant faire face à une

concurrence très forte sur ce segment ci et la stratégie d’élargissement de gamme

s’avère malgré tout être un pari audacieux.

II.3 La place du marketing et la vision à long terme comme moteur de

croissance

Il est important de souligner d’ailleurs que la communication joue un rôle

primordial dans le succès de ces vins. En effet, l’accent est mis par les grands groupes

étrangers sur la volonté de faire du vin du produit à la mode. Dans ce contexte, le

déblocage de budgets marketing forts ont permis le développement d’une image

particulière, véhiculée par un packaging remarquable. En effet, si un peu plus de 50%

des acheteurs de vins jugent que l’esthétique est importante dans le choix d’une

bouteille, elle joue également le rôle d’un outil de différenciation non négligeable par

rapport à la concurrence. Si en France, on mise depuis toujours sur l’aspect

traditionnel et très conservateur, le développement d’un packaging décalé et moderne

au sein de l’offre des pays du Sud est une révolution qui porte ses fruits sur les

marchés étrangers. Lecture simplifiée de l’étiquette, formes des bouteilles repensées

et standards des étiquettes bouleversés, tout est fait pour attirer l’œil du

consommateur. Une étude menée au cours de l’année 2004 par la société Sparflex,

entreprise spécialisée dans les solutions de packaging du vin, a démontré que

l’étiquette ressortait comme l’élément le plus important dans le repérage d’une

bouteille en rayon. Selon Jérôme Boutang, consultant au sein de l’entreprise JB

Marketing, « l’étiquette et la contre-étiquette doivent être traitées comme un média

et non comme une contrainte technique ». Alain Courbière est quand à lui responsable

Page 43: Memoire Idrac

42

de la division étiquette du groupe Autajon, spécialisé notamment dans l’impression, et

selon lui « le vin à un pouvoir unique dans la chaîne agroalimentaire, il est le seul

produit à arriver dans son habillage d’origine sur toutes les tables du monde *…+

Systématiquement, quand une bouteille de vin est présente sur une table, son

étiquette est vue puis elle est lue par le consommateur. En cela, l’étiquette est un

pouvoir de communication phénoménal ». C’est en ce sens que la communication par

l’habillage est devenue un sujet de réflexion incontournable pour tous les producteurs

du monde entier. Pionniers dans l’utilisation du packaging comme outil de vente, les

producteurs Australiens, Chiliens et Sud-Africains, entre autres, continuent sans cesse

d’innover, accordant une importante toujours croissante. De nombreux marchés, en

particulier les Etats-Unis et le Royaume-Uni, sont friands de ce genre d’innovation et

les politiques Marketing d’envergure des nouveaux pays producteurs parviennent vite

à trouver retour sur investissement.

Le succès de ces vins a également été rendu possible par une volonté hors

norme de la part du Nouveau Monde d’étendre leurs productions au monde entier. Le

cas le plus marquant semble être celui de l’Australie : le pays a mis en place, en 1996,

un plan de développement, appelé "Strategy 2025", qui a pour objectif de faire de ce

pays, en trente ans, l'un des plus grands pays viticoles au monde en termes de

production. Quelque temps après le lancement de ce plan, un deuxième projet a été

conçu, celui-ci visant directement l’aspect marketing de la filière viticole Australienne.

Baptisé « The Marketing Decade », il a été conçu par Paul Van der Lee, a à eu comme

ambition d’axer le développement des vins Australiens autour du marketing.

L’ouverture de nouveaux marchés, le renforcement de la qualité, le développement

d’outil de différenciations pour les marques sont les grands travaux qui doivent être

menés à terme sur le territoire d’outre mer. Selon Paul Van der Lee, « les responsables

professionnels ont compris que le marketing serait au cœur *…+ du développement du

secteur du vin australien. » Une pensée qui se révèle être aujourd’hui intégrée par

l’ensemble du mon de viticole. Une question portant sur l’importance du « marketing

Page 44: Memoire Idrac

43

du vin », au cours de l’interview m’ayant été accordée par Monsieur De Cuyper, gérant

de la société Collin-Bourisset, permet de constater une vision globale de l’aspect

marketing dans le secteur viticole : « On ne peut vendre du vin sans support marketing.

Il faut bien mettre en évidence que le marketing est présent partout, à tout les niveaux,

même aux plus basiques. Quand on commercialise un vin, il faut savoir ou et comment

pouvoir le vendre ».

Un autre facteur clé de succès dans la stratégie de ces nouveaux producteurs

concerne le développement de zones de production proches des régions de

consommation lorsque les conditions le permettent (l’exemple le plus flagrant étant la

Californie pour les Etats-Unis). S’ensuit le développement de leurs exportations dans

un second temps, alors que d'autres zones se sont développées principalement sur les

productions pour exporter en priorité (comme par exemple en Afrique du Sud et en

Australie).

II.4 Un jeu concurrentiel faussé ?

Mais le point qui génère le plus de tension sur le marché viticole reste sans

conteste les méthodes de production, et la législation qui y est liée. Depuis une dizaine

d’années, les producteurs du Nouveau Monde utilisent une technique assez

particulière dans leurs processus de vinification, à savoir le remplacement du

vieillissement naturel en barriques par l’ajout de copeaux de bois dans le vin. Cette

pratique, interdite en France, cause des ravages sur le marché de la concurrence. En

effet, la technique permet d’éviter dans un premier temps d’avoir recours à des

barriques, très onéreuses (une barrique de qualité coute en moyenne 500 € Hors Taxe)

pour le producteur par l’ajout des copeaux dans le vin pendant le processus de

vinification. Un sachet de copeaux de bois coutant jusqu’à cent fois moins cher qu’une

Page 45: Memoire Idrac

44

barrique de vin, comment le producteur français peut-il espérer être compétitif sur les

marchés étrangers ? Dans la mesure ou l’offre actuelle sur le marché se distingue par

60% de bouteilles à moins de 4 euros, négliger le recours aux copeaux de bois dans

l’élaboration du vin ne peut permettre de faire baisser les prix et donc d’accroitre la

productivité. Pour les producteurs français de vins de qualité, qui pour la quasi

majorité sont des grands défenseurs des Appellations d’Origines Contrôlées (AOC), les

copeaux de bois sont même une hérésie. De plus, précisons que le dilemme s’attaque

à l’ensemble de la filière viticole, les tonneliers s’inquiétant également de ces

techniques en vogue. Il s’agit de ces copeaux qui sont responsables du goût boisé que

l’on peut trouver dans les vins du Nouveau Monde, ce même goût qui plait tant au

nouveau consommateur.

D’autre part, en plus de la législation souple qu’il dispose sur les copeaux de

bois, le Nouveau Monde bénéficie d’autres d’avantages majeurs : les taxes amoindries

et la main d’œuvre bon marché que l’on peut trouver sur place permet de tirer les prix

vers le bas et d’augmenter de façon colossale la compétitivité des vins produits sur

place. Par ailleurs, ces pays disposent de surfaces cultivables beaucoup plus grandes

que celles que l’on peut trouver en France, et les économies d’échelle réalisées ont

également un poids considérable sur le prix final d’une bouteille de vin.

Enfin, l’interdiction d’irriguer les espaces viticoles depuis le début des années

1960 en France apparaît être en total décalage avec les techniques du Nouveau Monde,

qui assurent une meilleure régularité au niveau de la qualité du produit et accroissent

la maitrise de leurs productions.

Page 46: Memoire Idrac

45

III. Enjeux et démarches de la riposte tricolore

Dans une certaine mesure, il convient de rappeler que certains pays comme la

France, l’Espagne ou encore l’Italie restent des marchés difficiles d’accès pour les pays

du Nouveau Monde (respectivement 2,19%, 10,49% et 1,99% des importations locales

en 2002). En effet, ces territoires du Vieux Continent, traditionnellement ancrés dans

la culture viticole, sont par-dessus tout des pays très chauvins. Sur place, la

consommation est fortement tournée vers la production locale, avec une connaissance

limitée concernant les vins étrangers. En Europe, le constat n’est, dans une certaine

mesure, pas si alarmant qu’il puisse le paraître, le Vieux Continent s’identifiant

davantage aux vins français plutôt qu’à ceux émanant de la concurrence des pays du

Sud. Mais à terme, quelles solutions apporter ? Pour quel futur ?

III.1 Le savoir-faire français : des connaissances qui s’exportent

Au fil des siècles, la vigne s’est déplacée de continents en continents, formant à

son fruit de nombreuses mains de vignerons et d’amateurs passionnés. De nos jours, le

raisin continue plus que jamais à générer un échange de connaissances colossal à

travers le monde. Nous avons cité précédemment les deux grandes marques Jacob’s

Creek (Australie) et Long Mountain (Afrique du Sud). Détenues par le groupe Français

Pernod-Ricard, elles sont le symbole de cet échange à travers la présence française à

l’étranger, et viennent rappeler que si les vignes ne sont pas situées en France, de

nombreux œnologues français sont courtisés dans le monde entier (un des plus connu

étant Michel Rolland, consultant en vins pour plus de cent propriétés dans le monde

entier). Ils sont à l’origine de l’élaboration des vins, tout comme de grands groupes

français sont investit dans leur commercialisation. Cette « délocalisation

immatérielle », illustrée par les services fournis à l’international par les spécialistes

Page 47: Memoire Idrac

46

français en la matière, permet de revenir sur un point historique. En effet, rappelons

que c’est l’importation de grandes quantités de cépages français au cours de l’histoire

par les pays du Nouveau Monde qui leur ont permis de commencer à fabriquer, pour la

plupart, du vin. On retrouve de nos jours ces cépages aux quatre coins du globe.

III.2 Une vision vers l’avenir

L’élaboration de plan de développement à long terme est une priorité pour les

acteurs du marché. Ainsi, tout comme les pays du Nouveau Monde ont mis en place

des stratégies de développement à long terme, la contre attaque des producteurs

français passe également par des objectifs planifiés. Ainsi, à l’image des plans de

développement proposés par l’Australie par exemple, la restructuration de la filière

viticole est soutenue en France par les préconisations des spécialistes du domaine. La

note d’orientation stratégique proposée par Jacques Berthomeau en 2001 intitulé

« Cap 2010 : le Défi des vins français » rentre dans ce contexte et marque une réelle

prise de conscience de l’ensemble du secteur Français de réagir.

Si le développement des vins du Nouveau Monde s’est en grande majorité

appuyé sur des fortes politiques de marque (Mondavi pour les Etats-Unis, Jacob’s

Creek en Australie, Concho Y Toro au Chili…). Une image bien différente de la

communion avec le vigneron, de l’échange avec la « terre ». La France ne partage

absolument pas cette vision stratégique. Pendant longtemps, le pays a batî sa

réputation sur la diversité de sa production, la mise en valeur de ses « atouts terroir ».

D’après René Renou, président de l'Institut National des Appellations d'Origine (INAO),

« Jusqu'en 1985, les Français pouvaient imposer leur mode de lecture du vin au reste

du monde. Il était lié à un terroir *…+ Petit à petit, le cépage est devenu plus important

que le terroir ». Hubert De Montille, propriétaire de domaines en Bourgogne, est un

fervent défenseur de ce patrimoine. D’après lui, « la marque fait partie de la culture

Page 48: Memoire Idrac

47

anglo-saxonne. Elle se cultive *…+ En France, on cultive l’appellation d’origine. Et on

s’aperçoit au bout de 50 ans que c’est l’appellation d’origine qui prime sur la marque ».

La vigne française est très attachée à ses appellations et les valeurs culturelles

incontestables qu’elles ont pu véhiculer dans le temps (et qu’elles continuent à

véhiculer, au travers d’appellations renommées comme Chablis ou Puligny-Montrachet

en Bourgogne, ou encore Pauillac et Margaux à Bordeaux) mais l’évolution du marché

et de la demande face à la complexité de l’offre française s’apparente désormais à un

handicap vis-à-vis de celle de la concurrence. Concernant la complexité de cette offre,

d’après le gérant de la société Collin-Bourisset, « il ne faut pas tuer les appellations qui

ont fait la force de la France, mais renforcer celles qui ont su se démarquer à l’étranger,

et trouver des solutions pour celles qui sont au point mort et en perte de vitesse ».

Parce qu’il est hors de question pour les productions tricolores de migrer vers une

stratégie de banalisation, qui signifierait la mort de la spécificité française, un juste

milieu doit être trouvé. Tout d’abord, insistons sur le fait que l’offre doit être

compréhensible : il faut donner au consommateur la possibilité de se retrouver parmi

la complexité de l’offre. Un grand pas a récemment été franchi dans cette démarche

de simplification, avec l’adoption du décret d’application de l’appellation « Vin de pays

de France ». Regroupant plusieurs catégories de vins, et surtout permettant de réaliser

l’assemblage de plusieurs vins de France (pratique jusque là interdite), cette

appellation offre un espace de liberté supplémentaire et accroit la compétitivité des

vins français face aux Nouveau Monde, déjà familiarisé avec cette pratique.

III.3 S’adapter et évoluer par rapport au marché : une priorité dans toutes les

démarches

La prise de conscience de la nécessité de changement et de restructuration de

la filière agricole s’est petit à petit illustrée par la naissance de nouveaux packaging.

Destinés à séduire le consommateur, ils concernent particulièrement celui qui choisit

son vin en moins de 3 secondes. L’accent est prioritairement mis sur l’identité

Page 49: Memoire Idrac

48

française, que cela soit ressenti dans les illustrations des étiquettes (présence de la

Tour Effeil et de stéréotypes comme le citoyen français avec une baguette de pain sur

un vélo) ou encore dans le nom (« French Rabbit » du producteur Bourguignon Boisset

ou encore « French Folies » de Terra Ventoux par exemple). L’objectif est ainsi

d’insister sur l’image qualitative du produit. On note même une nouvelle tendance

plus extravagante chez certains producteurs qui vont même jusqu’à tenter des noms

de produits en anglais (« Red Bicycle », « You », et même « Fat Bastard » !). Dans un

second temps, une autre tendance tout aussi fantaisiste est remarquée au niveau de

l’habillage des bouteilles. En ce sens, les producteurs misent sur la couleur pour attirer

l’œil du consommateur qui choisit son vin en moins de trois secondes.

Comme il l’a été démontré antérieurement, l’évolution de la demande tend à

rappeler que les vins Français ont un retard certain au niveau de la présentation du

produit, de son packaging et des politiques marketing mises en place. Certains

producteurs renversent peu à peu la tendance en apportant des changements radicaux

dans leurs stratégies. Fait étonnant, même les plus anciennes et les plus prestigieuses

maisons françaises se modernisent et se mettent au goût du jour : le Château Mouton-

Rothschild, comptant parmi les neufs plus prestigieux châteaux viticoles de Bordeaux

et véritable mythe dans le monde entier de par son rang de Premier Cru Classé s’est

lancé dans un pari audacieux. En effet, la création en 1980 du joint-venture Opus One

entre le château Français et le groupe Mondavi a montré fièrement et très tôt la

volonté d’évoluer sur le segment haut de gamme principalement aux Etats-Unis. Le

mariage Franco-Américain résultant de cette alliance bénéficie d’un support

performant en termes de packaging, lié à l’expérience acquise par Mondavi sur le

marché américain et donc directement en accord avec les attentes du consommateur

sur place. La maitrise extrême dans l’élaboration du vin et la renommée de la marque

Mouton-Rothschild, véritable ambassadeur du luxe Français sur les marchés étrangers,

sont ensuite apparues comme la complémentarité à la connaissance du marché par

Mondavi.

Page 50: Memoire Idrac

49

Conclusion de la partie 3

En conclusion, il semblerait que la concurrence croissante des producteurs de

vins du Nouveau Monde soit en partie responsable de la profonde mutation que l’on

constate au cœur du marché viticole. Les producteurs français se trouvent alors ancrés

au cœur d’un dilemme fort, irrémédiablement lié aux incertitudes du marché.

Manquant d’innovation, et s’étant visiblement trop longtemps « reposée sur

ses lauriers », la viticulture française est aujourd’hui en proie au changement. En effet,

l’intégration grandissante des techniques de marketing, même au sein des entreprises

les plus modestes, devient un enjeu majeur qui, une fois maitrisé en amont comme en

aval, devrait donner un nouveau visage à l’offre française de par le monde.

Il faut également prendre conscience qu’apporter des solutions aux

producteurs français passe avant tout par l’adoption de réformes fortes sur un plan

législatif. Donner plus de liberté aux vignerons, c’est donner une chance aux vins

français d’accroître leur compétitivité au sein des marchés internationaux, et de faire

face à une concurrence plus souple en terme de restrictions.

Page 51: Memoire Idrac

50

Partie 4 : Préconisations pour l’entreprise et le secteur viticole français

I. Répondre aux exigences du marché

L’offre française sur les marchés d’exportation n’est pas adaptée. Cette réalité,

que l’on retrouve dans la complexité de l’offre, devient alors le point central d’une

stratégie qu’il est urgent de développer, pour le secteur viticole, comme pour

l’entreprise.

I.1 Développer les notions de fiabilité et de lisibilité de l’offre

Dans un premier temps, il convient de rappeler que si la France bénéficie

depuis longtemps d’un statut de prestige sur le marché viticole mondial, cette

notoriété s’est acquise au fil du temps par l’intermédiaire de contrôles poussés de la

qualité mais aussi par le biais d’exigences fortes.

Pour conserver ce statut, le contrôle de la qualité doit être permanent et même

renforcé. La création de structures de contrôle (comme le laboratoire œnologique de

la société Collin-Bourisset) est une affirmation forte de vouloir évoluer dans ce sens.

Nous avons précédemment évoqué la difficulté de compréhension et de

perception de l’offre française par le consommateur en général. Ce constat est

responsable d’une perte d’intérêt certain pour ces vins par les consommateurs

étrangers, au profit des vins moins complexes du nouveau-monde. Il convient de réagir

Page 52: Memoire Idrac

51

très fortement pour les producteurs et les institutions. En effet, le phénomène

d’atomisation de la production accentue les problèmes rencontrés à l’export, de

nombreux vins étant complètement inconnus au détriment de quelques appellations

prestigieuses.

Développer la lisibilité de l’offre par l’intermédiaire d’une nouvelle

segmentation est d’une importance capitale. Le choix du consommateur doit devenir

plus évident et le repérage en terme de produits optimisé. Les initiatives de regrouper

l’offre sous des appellations simplifiées et plus larges doivent être développées.

L’accent doit être mis dans ce sens sur la notion d’identité dont une appellation est

porteuse.

II. Accroître la compétitivité par l’élargissement des pratiques culturales

La souplesse des législations concernant la production de vin dans les pays du

nouveau-monde tend à souligner que les producteurs du monde entier ne concourent

pas à armes égales face à la demande en vins.

II.1 Vers une irrigation contrôlée

L’emploi de l’irrigation dans le processus d’élevage de la vigne fait partie des

mesures toujours interdites en France et dérèglementées pour les pays nouveaux

producteurs. La France, de par son histoire et ses traditions, a toujours employé des

réglementations très strictes pour les vins bénéficiant de l’appellation d’origine

contrôlée, dans le but revendiqué de disposer de standards qualitatifs forts. Le recours

Page 53: Memoire Idrac

52

à l’arrosage des vignes ne doit être effectué qu’en cas de grande sécheresse, dans le

but de préserver la spécificité de chaque millésime. Mais cette tendance semble de

plus en plus susciter la colère et l’incompréhension chez les vignerons français,

malmené par la régularité consternante des producteurs Californiens ou Australiens.

Ces producteurs sont actuellement en voie d’obtenir un certain assouplissement de

cette réglementation, les autorisant ainsi à arroser leurs pieds à une période donnée

de l’année (avec des restrictions plus importantes pour les vignes destinées à la

production de vins AOC).

II.2 Assouplir la réglementation des cépages

La répartition contrôlée des cépages en France pose aujourd’hui un problème

au marché viticole français. Très strictement réglementé pour les vins AOC, ces

cépages sont classés en deux catégories : les cépages recommandés et les cépages

autorisés (la culture est déconseillée et des sanctions sont prises à l’encontre du

vigneron en cas de persistance dans la culture).

Autre caractéristique française donc, la notion d’exclusivité géographique à

l’utilisation des cépages. L’ensemble du monde viticole s’accorde à dire que la

réglementation draconienne en terme d’utilisation de cépages est nuisible à la

compétitivité française sur les marchés d’exportation. En effet, certaines régions

productrices manquent de réactivité par rapport à la demande du marché, du fait de

se voir interdire la culture de certains cépages. Cantonnés sur certains types de vins,

leurs perspectives d’évolutions sont réduites en cas de désir de produire un vin

d’assemblage par exemple (vin élaboré à partir de plusieurs cépages).

Page 54: Memoire Idrac

53

Il conviendrait alors d’établir un certain assouplissement de cette classification

par zones géographiques et proposant par exemple un nombre de cépages définis

pouvant être exploités dans l’ensemble du pays, afin dans un premier temps de

réduire les inégalités entre les régions et de permettre une meilleure compétitivité

internationale.

II.3 Du copeau de bois dans les vins français ?

L’utilisation des copeaux de bois dans le processus de vinification doit-il être

envisagée ? Considéré par les vignerons puristes comme une honte par rapport aux

méthodes traditionnelles, le recours à cette utilisation dispose malgré tout d’avantages

majeurs qu’il convient de mettre en avant.

Bien évidemment, l’objectif principal de cette utilisation est la réduction des

coûts imposés en matière de futs de vieillissement du vin. Ces derniers étant onéreux

et ayant une durée de vie limitée (3 ans), ils représentent des investissements

colossaux que les producteurs du nouveau-monde contournent. Par cet intermédiaire,

ils peuvent ensuite tirer les prix vers le bas et profiter d’un gain en compétitivité très

important. Cette démarche est toute à fait légale dans ces pays, contrairement à

l’Europe.

Autre avantage certain, les copeaux de bois permettent par ailleurs de réduire

les risques dans l’élaboration du vin et d’éviter quelques défaillances dans ce

processus. Les risques majeurs d’une barrique classique se concentrent dans une

mauvaise étanchéité et une possible prolifération de bactéries en provenance du chai

ou elle est stockée.

Page 55: Memoire Idrac

54

Cependant, rappelons que l’utilisation massive de ces copeaux outre-mer au

travers de la concurrence des nouveaux producteurs est responsable du phénomène

de standardisation du goût évoqué précédemment. Dans cette mesure, les

préconisations sur ce point seraient les suivantes :

- Favoriser l’usage des copeaux de bois dans le processus de vinification, mais

exclusivement pour les vins de pays moyens et bas de gamme. Cela dans l’objectif de

valoriser et rendre plus compétitive l’offre française en les positionnant face aux vins

du Nouveau Monde.

-Bannir le recours aux copeaux de bois pour les vins AOC, afin de préserver leur

spécificité, et renforcer la valeur ajoutée du terroir sur ce segment là. Ce refus

intervient également dans le but d’échapper à toute uniformisation du gout.

III. Evoluer dans l’air du temps

III.1 Internet : une carte de visite sur le monde

L’utilisation d’Internet comme vecteur de communication est incontournable.

Dans un premier temps, la réactualisation du site internet de l’entreprise apparaît

comme urgente. La refonte de celui-ci a par ailleurs comme objectif de le moderniser

et d’accroitre la visibilité de l’entreprise par ses clients dans le monde entier, en

offrant une image qualitative élevée. Le e-commerce, ou la vente en ligne, représente

depuis l’explosion d’internet une opportunité phénoménale de développement

commercial pour les entreprises. Le secteur viticole n’est pas épargné, et de

nombreuses sociétés proposent désormais aux consommateurs d’éviter les

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intermédiaires et d’acheter directement leur vin sur internet. Par ailleurs, cette

technique de vente profite également à des négociants indépendants ainsi qu’à des

courtiers en vins, qui bénéficient de cette façon d’un accès direct au monde entier à

coût moindre. La société Collin-Bourisset ne vend pas le vin qu’elle produit par

l’intermédiaire du e-commerce. Même si le réseau de distribution de la société est

surtout établi auprès des professionnels, le développement d’une plateforme de vente

en ligne serait un atout non-négligeable pour stimuler les ventes auprès des clients

particuliers. En l’occurrence, lors des travaux de refonte du site internet, la possibilité

pour ce dernier d’évoluer vers un site marchand a été placée en tant qu’impératif

technique. Si actuellement la philosophie de la société s’éloigne un peu de cette vision

« online », elle pourrait devenir d’ici quelques années effective. En termes de moyens

à mettre en place dans le cas d’un éventuel développement, il est important de

préciser qu’une parfaite maitrise de la logistique est un facteur clé de succès majeur.

III.2 S’allier pour mieux contrôler.

Dans un premier temps, et au niveau national, la prise de conscience doit être

commune. En ce sens, le gouvernement doit jouer un rôle essentiel dans le soutien des

vignerons et de la production française, et continuer d’encourager la production

nationale. Cela passe avant tout dans le développement d’un effort de solidarité. Une

mesure spéciale a été mise en place au mois de Décembre 2006 afin d’étaler dans le

temps le règlement des cotisations sociales des vignerons en difficulté. Toujours dans

cet esprit de solidarité commune, il peut être intéressant de souligner l’initiative de

collaboration mise en place par les producteurs de la région Beaujolaise. En effet, en

s’unissant au sein d’une alliance (l’Union Viticole du Beaujolais), l’entreprise accentue

une stratégie de conquête des pays émergents.

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Dans un monde qui évolue dans la diversité, le mélange des cultures prend une

dimension croissante dans le monde des affaires. La création d’un partenariat entre

des sociétés de pays différents s’oriente toujours à travers la volonté de pérenniser

une activité et de lui donner une carrure plus importante. A l’image de la formidable

« sucess story » du partenariat entre le Château Mouton-Rothschild et le géant

Américain Mondavi dans le lancement du vin haut de gamme Opus One, il peut être

intéressant pour l’entreprise d’étudier la possibilité de créer une joint-venture sur un

marché défini. La Russie ou encore la Chine disposent de fortes perspectives

d’évolution. En revanche, et ce en raison de la faible culture du vin dans ces deux pays,

il faudra mettre l’accent sur le choix d’un partenaire expérimenté sur place. Ainsi, la

disposition sur place d’un partenaire local permet d’assurer une meilleure

connaissance du marché, des attentes, et en conséquence d’être à terme plus

performant. Le groupement de producteurs du Sud Ouest précédemment cité est un

autre exemple de réussite en termes de joint-venture. Pour l’instant, l’entreprise

Collin-Bourisset évolue uniquement à l’étranger par l’intermédiaire de distributeurs.

Cette stratégie de joint-venture permet une meilleure répartition du risque, tout en

permettant d’anticiper la concurrence à long terme.

L’alliance interprofessionnelle forte est également une opportunité de

concentrer les moyens de promotion, notamment en termes de contrôles qualitatifs et

de plans promotionnels (pour le cas de la région du Beaujolais, aide au lancement du

Beaujolais Nouveau par exemple) bénéfiques à l’ensemble des producteurs. Les

« organismes interprofessionnels d’appellation d’origine viticole » regroupant en son

sein tous les acteurs de la filière viticole de la région concernée favorisent le

développement de la notoriété et de l’image des productions locales sur les marchés

étrangers, et consolide l’image de la France. Les producteurs français ne devront pas

oublier que l’aide de ces organismes est primordial dans la conquête des marchés

étrangers.

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Le développement d’accords entre entreprises, la recherche d’alliances et de

partenariats est un point sur lequel il convient d’insister. Dans son ouvrage

L’entreprise audacieuse à la conquête des marchés de demain, Philippe Villemus a

également accordé une part de ses travaux sur ce point : « Les entreprises gagnantes

seront celles qui auront su lier les alliances les plus pertinentes pour le développement

de leurs produits ou de leurs marchés. Car un seul homme, une seule équipe ou une

seule entreprise ne peut se targuer de maitriser la complexité et les compétences

nécessaires à l’innovation »

IV. Renforcer la dynamique du métier

IV.1 Innover et échanger

Si le commerce du vin est un domaine on l’échange entre le producteur et le

consommateur reste primordial, il faut que tout soit mis en œuvre par l’entreprise

pour renforcer cette relation, qui génère confiance et profits. Le marketing relationnel

doit intervenir dans la stratégie de l’entreprise comme un support à la vente et au

démarchage de nouveaux clients. L’exemple le plus parlant qu’il convient de citer

pourrait être les mises en place fréquentes de dégustations dans le réseau de

distribution, voire même dans le circuit de la restauration, en présence d’une

délégation de la société. L’innovation doit dans ce cas là s’orienter autour du concept

de marketing relationnel, à savoir entre autre optimiser la fidélité du client par

l’intermédiaire d’évènements ponctuels. Mis sur le devant de la scène par Don

Peppers et Martha Rogers dans leur ouvrage The one to one future, le programme

marketing « One to One » démontre comment traiter des milliers de consommateurs

tout en renforçant l’aspect d’individualité. De plus , les démarches marketing opérées

par l’entreprise doivent être compétitive face aux grands projets de pays comme

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l’Australie par exemple (« The Marketing Decade »). L’accent doit être mis sur

l’innovation tout en conservant une part de tradition. Selon Philippe Villemus, toujours

dans l’œuvre L’entreprise audacieuse à la conquête des marchés de demain, « *…+

innover est une nécessité. Dans un environnement qui bouge, où la croissance

économique est modérée, l’innovation est capitale dans le développement des

entreprises ».

Au cœur du métier, une attention particulière doit être menée quand au

développement des relations entretenues entre les entreprises qui produisent et celles

qui commercialisent le vin. L’objectif reste à terme une meilleure connaissance des

marchés ainsi qu’un marché plus stable.

De plus, le démarchage permanent de nouveaux agents et distributeurs à

l’étranger est une tâche majeure, en particulier sur les marchés émergeants. Les vins

Collin-Bourisset doivent accroître leur visibilité sur ces marchés et renforcer l’échange

international.

Enfin, et toujours dans le processus de redynamisation du marché, il peut être

intéressant de souligner la théorie du philosophe et sociologue Georg Simmel telle

qu’elle a été énoncée en 1992 dans l’ouvrage Le Conflit : « L’expression latente des

rapports de force est transformée en affrontement effectif afin d’expérimenter les

possibilités offertes par le marché, et ainsi repositionner la firme, son dessein

stratégique et ses engagements sur le marché »

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En décalage total avec l’idée d’alliance précédemment évoquée, elle peut

malgré tout être une bonne alternative pour générer « artificiellement » une

concurrence bénéfique aux stratégies des entreprises. Ces dernières ont alors la

possibilité d’apprécier au mieux les actions à entreprendre.

IV.2 S’adapter au présent pour mieux préparer l’avenir

IV.2.1 L’attrait de la marque

Dans cette lignée, et si les fortes politiques de marques perçues à l’étranger

génèrent un succès incontestable, pourquoi ne pas orienter les producteurs français en

ce sens ? En d’autres termes, les producteurs français peuvent ils espérer prospérer

sans la revendication d’une identité forte ? L’objectif d’accroître la visibilité du produit

atours de marques fortes, d’offrir un produit de qualité et que cette qualité

deviennent ainsi le symbole de cette marque. La société Collin-Bourisset, par

l’introduction sur le marché de la marque Silk, semble avoir bien assimilé ce concept,

et devra consacrer une place importante au développement et au suivi de la marque à

court terme sur les marchés étrangers.

De plus, l’intégration réussie de nombreuses « entreprises du vin » vers un

modèle industriel renforce cette notion de marque et la nécessité de s’en servir

comme atout commercial. La marque doit résumer l’identité de la société, son esprit

et devenir le pilier fondateur de l’ensemble du processus de commercialisation. Le cas

du négociant Georges Duboeuf, le développement et le succès de sa marque de

Beaujolais à travers le monde en font un des exemples les plus parlant.

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Enfin, préparer le futur au sein du marché viticole équivaut à faire des choix.

Rappelons que l’uniformisation des gouts recherchés entraine une sélection critique

des vins mis sur le marché. Les entreprises françaises doivent elles aussi pénétrer le

marché de ces vins si plaisants à boire ? Que penser de « l’atout terroir » français dans

tout ça ? Selon Pfeffer et Salancik, « la gestion des demandes environnementales

n’implique pas forcément que l’organisation doive se précipiter à s’y conformer. Il y a

des moments ou la conformité, bien qu’importante pour maintenir une relation

d’échange critique, n’est pas dans les intérêts à long terme de l’organisation ». (The

External Control of Organizations, 1978) .Cette théorie correspond particulièrement

bien au dilemme de la viticulture française : le conformisme pour vendre plus ou le

maintien d’une différentiation qui cours à sa perte.

IV.2.2 Attirer une nouvelle clientèle et intensifier la concurrence

Parce que les vins bas et moyenne gamme sont les plus touchés par la

concurrence des vins du Nouveau Monde, les producteurs français ont un effort tout

particulier à réaliser sur la commercialisation au niveau de ce segment là Cet effort

pourrait se traduire par exemple par une meilleure maitrise de la chaîne, des coûts

pour ensuite pouvoir mettre en valeur l’offre sur le marché. Par ailleurs, la

restructuration du secteur viticole permet à la grande distribution, au négoce, et

même à des groupements de producteurs de tirer les prix vers le bas, et de devenir de

plus en plus compétitif à l’export.

Au niveau de la cible sur ce segment, une attention toute particulière devra

être apportée aux jeunes consommateurs néophytes. Pourtant de moins en moins à se

laisser séduire par le vin, leur éducation reste très importante, dans la mesure ou eux-

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mêmes auront en charge un jour celle des générations à venir. En ce sens, l’accent

devra être mis lors des prochaines campagnes promotionnelles sur une cible jeune,

dans l’espoir de redonner un second souffle au secteur viticole français.

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Conclusion

Au travers de ce mémoire, nous avons pu réaliser l’impact qu’on eu les vins du

Nouveau Monde sur la viticulture française et européenne. Dans un second temps, il

nous a été donné l’opportunité de mesurer l’ampleur du changement à effectuer pour

les producteurs du Vieux Continent.

Ainsi, c’est un fait, l’avenir du vin mondial est peuplé d’incertitudes. Malgré la

tendance qui prévoit une hausse de la consommation d’ici 2010, les producteurs

assistent impuissants à un effondrement de la demande depuis les années cinquante.

Par ailleurs, l’uniformisation des gouts et l’émergence de nouveaux pays producteurs

ne laissent à première vue pas non plus présager de beaux jours pour l’environnement

viticole mondial. La concurrence risque même de s’intensifier. Beaucoup

d’interrogations vont à présent aux pays de l’Est : pourront-ils apporter une nouvelle

dynamique au marché ?

En effet, les vins du Nouveau Monde qui tendent de plus en plus à s’orienter

vers une démarche haut de gamme, risquent à long terme de laisser une place de

choix sur le segment avec lequel ils ont pourtant débuté, à savoir l’entrée de gamme.

Les pays de l’Est, qui pourraient apporter une réponse concrète au marché dans le

futur, font donc pleinement partie de ce climat incertain pour les producteurs français.

Le vin est il pour autant « mort » ? Une telle affirmation semble bien loin de la

vérité. En effet, tout porte à croire que le vin s’apprête à vivre une seconde jeunesse.

Les efforts considérables réalisés dans les politiques marketing, pour combler le retard

accumulé sur le Nouveau Monde, est représentatif d’une prise de conscience

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commune non négligeable. Capable d’apporter une nouvelle dynamique au marché à

l’exportation, cette conscience collective de la problématique française est génératrice

d’une grande solidarité entre les producteurs du pays, et stimule les démarches.

D’autre part, et au vu des travaux réalisés au sein de la société Collin-Bourisset, j’ai pu

constater l’ampleur de ces démarches marketing. Axé sur une meilleure adaptation de

l’offre aux marchés, et surtout un regard sur l’avenir dans un but anticipatif de la

demande, le renforcement de la vision marketing française pourrait bien à terme

profiter aux producteurs, et redonner au blason tricolore la dorure de jadis.

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64

Sources

Ouvrages

- Marty, Alain, Ils vont tuer le vin français, Editions Ramsay, 2004

- Rousset-Rouard, Yver ; Desseauve, Thierry, La France face aux vins du nouveau monde,

Editions Albin-Michel, 2002

- Clarke, Oz ; Rand, Margaret , Guide des cépages , Editions Gallimard, 2005

- Villemus, Philippe, L’entreprise audacieuse à la conquête des marchés de demain,

Editions d’Organisation, 2001

- Baumard, Philippe, Analyse stratégique : mouvements, signaux concurrentiels et

interdépendance, Dunod, 2000

- Kotler, Philip; Dubois, Bernard « Marketing & Management », 11ème Edition,

Pearson Education, 2003

- Exporter, Pratique du commerce international, 18ème Edition, Editions Foucher, 2004

- Deroudille, Jean-Pierre, Le vin face à la mondialisation, Hachette, 2003

Rapports

- L’avenir de la viticulture française : entre tradition et défi du nouveau monde,

Rapport d'information du Sénat n° 349, 2002

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- Marsh, Ian; Shaw, Brendan, Australia's Wine, Industry: Collaboration and Learning

as Causes of Competitive Success”, Report Commissioned by Australian Business

Foundation, 2000

- Berthomeau, Jacques, Cap 2010, le défi des vins français, 2001

- Williamson, K. and Wood, E., The Basics of the South African Wine Industry

Cluster: a Basis for Innovation and Competitiveness ?, Graduate School of

Business : University of Cape Town, 2004

- Visser, Evert-Jan, A Chilean wine cluster ? The quality and importance of local

governance in a fast growing and internationalizing industry, Report to the United

Nations Commission for Latin America and the Caribbean, Department of

Entrepreneurship and Productivity Development, 2004

Magasines et presse quotidienne

- The Economist, « The globe in a glass », 18th December 1999

- Le Monde, « Un propriétaire de grand cru classé de saint-émilion se met au vin de

table », 28 Novembre 2004

- Le Monde, « Le vin français retrouve un peu de couleur à l’étranger », 18 Aout

2006

- Le Monde, « Des étiquettes pour mieux séduire », 15 Novembre 2006

- Petites Affiches Lyonnaises, « Europe du Vin : le choix de la compétitivité », 26

Février 2007

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66

Presse spécialisée

- La Revue Viticole Internationale

- La Journée Vinicole

- La Revue du Vin de France

Contacts

- Chambre de Commerce et d’Industrie Française en Chine

- Chambre de Commerce et d’Industrie Française au Japon

- Union Interprofessionnelle du Beaujolais

Sites web

http://www.beaujolais.net : Site web de l’Union Interprofessionnelle des vins du

Beaujolais

http://www.collinbourisset.com : Site web de l’entreprise Collin-Bourisset

http://www.netvs.org :Site web de la Fédération des Exportateurs de Vins et

Spiritueux de France

http://www.vitisphere.com : Portail d’information et de données économiques

http://www.viti-net.fr : Portail d’information et de données économiques

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Support de cours

- Stratégie de développement international

Filmographie

- Mondovino, Film réalisé par Jonathan Nossiter, Editions TF1 Vidéo, 2004