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0 I.U.F.M Elodie BOURGEY Académie de Montpellier Anne-Laure FRAUDET Site de Montpellier /$ 48(67,21 '(6 ( ( ( /(9(6 1 1 1 289(/ /(0(17 $ $ $ 55,9(6 (1 ) ) ) 5$1&( MIEUX LES COMPRENDRE POUR MIEUX LES INTEGRER Etudes des différents paramètres en jeu et apports d’outils spécifiques pour l’enseignant Tuteur : Marie-Claude LELIEVRE Assesseur : Martine DREYFUS Année : 2005-2006 Mis en forme : Bordure : Haut: (Simple, Automatique, 0,5 pt Épaisseur du trait, Par rapport au texte : 24 pt Espacement des bordures : ), Bas: (Simple, Automatique, 0,5 pt Épaisseur du trait, Par rapport au texte : 11 pt Espacement des bordures : )

Mieux les comprendre pour mieux les integrer

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I.U.F.M Académie de Montpellier Site de MontpellierElodie BOURGEYAnne-Laure FRAUDET

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Page 1: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

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I.U.F.M Elodie BOURGEY Académie de Montpellier Anne-Laure FRAUDET Site de Montpellier

MIEUX LES COMPRENDRE POUR MIEUX LES INTEGRER

Etudes des différents paramètres en jeu et

apports d’outils spécifiques pour l’enseignant Tuteur : Marie-Claude LELIEVRE Assesseur : Martine DREYFUS Année : 2005-2006

Mis en forme : Bordure :Haut: (Simple, Automatique, 0,5 pt Épaisseur du trait, Parrapport au texte : 24 ptEspacement des bordures : ),Bas: (Simple, Automatique, 0,5 pt Épaisseur du trait, Parrapport au texte : 11 ptEspacement des bordures : )

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Mention et opinion motivée du jury

Supprimé : ¶

Supprimé : ¶

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2

REMERCIEMENTS

Nous tenons à remercier

Madame Clarisse DECROIX du CASNAV de Montpellier pour ses conseils et

son soutien, notamment à travers tous les prêts bibliographiques et la documentation fournie insérée en annexe,

Monsieur Vincent LAURENCE, IMF à Montpellier pour son accueil convivial

et formateur, ainsi que ses élèves,

Madame Eliette CADENAT, membre de l’association A.V.E.C pour son accueil et les informations qu’elle a pu nous donner

sur le fonctionnement de l’association,

Madame Fatna NESSARIR pour son aide précieuse dans la traduction du turc.

Nous remercions également Madame Marie-Claude LELIEVRE, notre tutrice, pour ses aides notionnelles et méthodologiques…

… et les élèves nouvellement arrivés que nous avons rencontrés, pour leur accueil et leurs réponses.

Supprimé : s

Supprimé : .

Supprimé :

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3

RESUMÉ

Le document proposé se veut être un mémoire pratique facilitant les démarches de

l’enseignant dans le cadre de l’accueil d’enfants migrants. Il ne s’identifie pas à une étude

linguistique précise, mais a pour but de proposer une vision plus large de ce qui influe sur

l’intégration de ces enfants. Ces élèves, anciennement appelés « primo arrivants », nous ont

interpellé par un fort désir d’apprendre souvent mêlé d’une grande détresse. Le besoin s’est

fait sentir pour l’une comme pour l’autre de trouver des solutions pour ceux que l’on appelle

désormais « ENA » (Enfants Nouvellement Arrivés en France).

Comment se mettre à leur place ? Comment engager la discussion avec eux ? Que leur

propose l’institution ? Quel est le rôle de l’enseignant ? Que peut-on leur proposer pour qu’ils

puissent trouver leur place dans la classe ? Le champ de la problématique étant large mais

reflétant l’essentiel des difficultés qui se posent, nous avons choisi de travailler conjointement

de manière à approfondir l’ensemble de ces interrogations.

ABSTRACT

This document is a tool for teachers to help them favour inclusion of pupils with

community languages in their classes when they will become immigrated pupils. This

dissertation is not based on a linguistic study but is meant to include a very large view of

parameters which influence the integration of these children. They were previously named

« primo arrivants ». We are moved by their desire to learn on the one hand, and their distress

on the other hand. Thus we felt the urge to find solutions for these pupils, who are nowadays

called « ENA » (Enfants Nouvellement Arrivés en France).

If we were them, how would we react ? How can we prompt the discussion ? What

does the French institution school propose ? Which role does the teacher have ? What can we

offer them to find their place in the classroom ? We consider that the issue is very large and

raises several difficulties, that is why we decided to work together.

MOTS CLÉS

Intégration, ENA, interculturel, projet de migration, outils, CRI, turc, comparons nos langues.

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Supprimé : ,

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4

SOMMAIRE

INTRODUCTION……………………………………………………………………….. 6 PREMIERE PARTIE : « LE CHOC DE L’ARRIVÉE »

1- Contexte familial : inégalités des situations………………………………......... 7 2- Contexte personnel a- Choc culturel ……………………………………………………………….…... 7

b- Un éloignement généralisé……………………………………………………... 8

3- Contexte scolaire ……………………………………………………………....... 8

4- Contexte linguistique……………………………………………………………. 9

DEUXIÈME PARTIE : LE RÔLE SPÉCIFIQUE DE L’ÉCOLE

1- Les structures d’accueil a- La scolarisation en classe ordinaire…..………………………………………... 12 b- La scolarisation en classe ordinaire et parallèlement en classe CRI…………… 12 c- Le rôle du C.A.S.N.A.V……………………………………………………….. 17

2- Démarche personnelle de l’enseignant

a- Accueil de la famille…………………………………………………………... 19 b- Prise de contact avec l’enfant………………………………………………….. 20 c- Aménagement de la classe……………………………………………………... 20 d- Réflexion pédagogique…………………………………………………….…… 21 3- Démarche de toute une équipe pédagogique………………………………….... 21

TROISIÈME PARTIE : MISE EN PLACE DE PRATIQUES PÉDAGOGIQUES

1- Pistes de réflexion a- Outils pratiques..………………………………………………………….….…... 23 b- Activités……………………………………………………………………..…... 25

2- Mise en application a- Passation des consignes…………………………………………………….…... 26 b- Réinvestissement des apprentissages du CRI…………………………………… 27 c- La place du jeu dans les apprentissages………………………………….….…. 28 d- Utilisation des acquis culturels de l’élève…………..……………….……….…. 29

CONCLUSION…………………………………………………………………….…….. 38 BIBLIOGRAPHIE………………………………………………………………………. 39 TABLE DES ANNEXES...........................………………………………………………. 41 ANNEXES………………………………………………………………………………… 43

Mis en forme : Police :11 pt

Mis en forme : NonSurlignage

Mis en forme : NonSurlignage

Mis en forme : Tabulations :15,56 cm,Gauche

Mis en forme : Police :10 pt,Non Surlignage

Mis en forme : NonSurlignage

Mis en forme : NonSurlignage

Mis en forme : NonSurlignage

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Mis en forme : Police :10 pt

Mis en forme : Police :11 pt

Mis en forme : NonSurlignage

Supprimé : ¶

Supprimé : …………………. ..……………….…………

Supprimé : …………………

Supprimé :

Supprimé :

Supprimé : et la classe CRI…………………………………………….

Supprimé : .

Supprimé : .

Page 6: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

5

« Tout au long du siècle écoulé en effet, l'école a accueilli des enfants venus de

l'étranger et a joué un rôle essentiel dans la formation personnelle et l'intégration sociale de

nombre d'entre eux. […] Il faut l'affirmer nettement : si l'école a effectivement pu jouer ce

rôle et si elle peut et doit, aujourd'hui encore, continuer à l'assurer, ce n'est pas par une sorte

de réflexe mécanique mais par effet de volonté : parce que les professeurs croyaient et croient

toujours en la nécessité de cette intégration culturelle et sociale. »

Extrait du discours d’ouverture de Mr Jack Lang, ancien ministre de l’éducation nationale,

aux journées nationales d’étude et de réflexion sur la scolarisation des élèves nouvellement arrivés en

France - 29 mai 2001

Supprimé : ¶

Supprimé : ¶

Supprimé : France

Supprimé : -

Page 7: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

6

INTRODUCTION

Lors de nos stages respectifs, notamment celui effectué en collège, nous avons constaté

qu’un nombre important d’enfants étrangers arrive chaque année en France et donc à l’école.

Il s’est posé à nous comme une évidence de rencontrer certains de ces élèves pour mieux

comprendre leurs difficultés afin de leur venir en aide dans l’apprentissage de notre langue et

plus généralement dans leur intégration scolaire et sociale.

Ce mémoire a pour ambition de montrer les difficultés de tous ordres que peuvent

rencontrer des élèves nouvellement arrivés en France, mais aussi de proposer des pistes à tout

enseignant susceptible de les accueillir dans leur classe. Notre propos est de tenter de

répondre à la question « Comment mettre en œuvre tous les paramètres pour une intégration

réussie ? »

Nous avons, dans un premier temps, tenter d’analyser les difficultés sociales, culturelles et

scolaires qui se posent à ces enfants lors de leur arrivée. Puis, nous avons essayé de nous

confronter aux problèmes que rencontrent les enseignants, à mettre en place des

apprentissages spécifiques alors que les bases de la communication ne sont pas acquises.

Enfin, notre réflexion nous a amené à dégager des pistes de travail dont certaines ont été

mises en place en classe.

Cette étude réalisée en binôme nous a permis d’élargir nos champs d’actions et donc notre

réflexion sur ce sujet aux difficultés multiples. L’observation mutuelle a été une grande

source de motivation et nous a ainsi permis de développer l’analyse critique de pratiques

pédagogiques.

Comme nous avons réalisé ce mémoire en binôme, nous préciserons, lorsque cela est

nécessaire, qui signe tel ou tel passage en y apposant nos initiales (ALF pour Anne-Laure

Fraudet et EB pour Elodie Bourgey).

Supprimé : ¶¶¶¶¶¶¶¶

Supprimé : de façon

Supprimé : à

Supprimé : sa

Supprimé :

Supprimé : de tels élèves

Supprimé :

Supprimé :

Supprimé : qui en a découlée

Supprimé : ¶

Page 8: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

7

PREMIÈRE PARTIE : « LE CHOC DE L’ARRIVÉE »

Les composantes du projet d’immigration des familles qui arrivent de pays étrangers ont des

conséquences sur leur intégration. En effet l’origine du départ, le ressenti personnel qui en découle, la

confrontation à un nouveau système éducatif et l’éloignement de la langue du pays d’accueil sont les

premiers paramètres auxquels se confronte tout enfant arrivant sur notre sol.

1- Contexte familial : inégalités des situations

Les enfants ne sont pas tous égaux au regard des conditions famililales lors de leur arrivée

en France : certains viennent avec un réel projet familial (tous les membres de la famille sont

présents et au moins un des parents exerce une activité professionnelle sur le territoire),

d’autres sont là uniquement pour bénéficier d’un enseignement qu’ils estiment de meilleure

qualité que celui de leur pays (une partie de la famille reste souvent dans le pays d’origine).

De plus, la durée du séjour peut varier de quelques mois à l’installation définitive.

Lors de nos observations (stage collège et classe CRI), nous avons rencontré ces trois

situations différentes :

- un enfant chinois scolarisé pour un an dans le cadre d’une mutation professionnelle du père,

- une enfant marocaine venue rejoindre son père pour bénéficier d’une scolarisation française,

- deux enfants turques venues vivre en France avec toute leur famille. (ALF : j’ai eu

l’occasion de suivre en stage de pratique accompagnée l’aînée, à laquelle je ferai référence

ultérieurement.)

Ceux qui viennent en France dans le but de bénéficier d’une scolarisation française se

retrouvent souvent sous l’autorité paternelle, qui se traduit par une séparation physique de leur

mère restée au pays ; cette situation affective peut alors être très difficile à vivre.

2- Contexte personnel

a- Le choc culturel

Les cultures des pays d’origine et des pays d’accueil sont parfois très éloignées et

entraînent une perte de repères chez l’enfant.

Supprimé : ¶¶¶

Supprimé : ,

Supprimé :

Supprimé : différentes

Supprimé : :

Supprimé : profiter

Supprimé : s’installer

Supprimé :

Page 9: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

8

EB : La personne qui arrive dans un nouveau pays peut éprouver un mal être et avoir

l’impression de ne plus trouver sa place dans la société. Je me suis retrouvée dans cet état

d’esprit lors de mon stage de trois semaines au Sénégal. Le premier grand changement fut

bien évidemment la langue même si, en ce qui concerne ce pays, la langue officielle est le

français. Je reviendrai sur ce point ci-après (cf. 4 : le contexte linguistique). Une autre grande

difficulté a été de s’adapter au mode de vie sénégalais totalement différent du nôtre. Le fait de

modifier son alimentation et de vivre avec des coutumes qui vous sont encore inconnues,

marque la séparation avec son pays d’origine. Certes, il est possible de continuer à vivre

comme dans son pays mais cela rendra l’intégration plus longue et plus difficile. Un point non

négligeable en France est la laïcité de l’école et le respect des choix religieux de chacun, ce

qui n’est pas le cas au Sénégal où l’on enseigne la religion à l’école. Les libertés religieuses

sont alors compromises.

La différence physique liée à la couleur de la peau rappelle la non appartenance à la

population locale. Le regard des gens peut s’avérer déstabilisant et l’on souhaite que ces

regards cessent afin de se sentir accepté. Tous ces changements peuvent entraîner des

modifications de comportements ; pour certains cela va passer par la fuite physique ou

morale, par le repli sur soi, par la perte de moyens, et pour d’autres, par l’agressivité ou bien

encore la provocation.

On peut alors comprendre que, pour un enfant, cette situation soit encore plus dure à vivre et

nécessite un soutien de son entourage.

b- Un éloignement généralisé

Les enfants perdent non seulement leur terre d’origine mais aussi leurs amis, leur

environnement proche, leur quotidien, leur passé…

Il est plus facile pour les enfants d’accepter tous ces changements lorsqu’ils ont la

possibilité de retourner dans leur pays pendant les vacances par exemple. Ces enfants auront à

choisir à l’âge adulte entre terre d’accueil et terre d’origine.

3- Contexte scolaire

L’âge d’arrivée conditionne la vitesse d’entrée dans la langue : plus un enfant arrivera

jeune, plus vite il maîtrisera la langue française car il sera immergé dès son arrivée dans un

« bain de langage ». Supprimé : «

Supprimé : »

Page 10: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

9

Les rythmes scolaires peuvent être très différents selon les pays d’origine : dans beaucoup

d’entre eux, l’école se termine plus tôt et laisse l’après-midi libre pour d’autres activités

(Allemagne, Turquie, Angleterre). La ponctualité n’est pas soumise aux mêmes exigences.

E.B : Au Sénégal, les élèves bénéficient d’enseignements d’éducation sanitaire et morale,

d’arabe et de religion. Un enfant qui viendrait en France ne retrouverait pas ces disciplines

dans notre enseignement et rencontrerait une organisation disciplinaire totalement différente.

Les disciplines enseignées font référence à la culture d’un pays et sont donc sources de

repères pour l’élève.

Le regard porté sur les ENA conditionne également une partie de leur réussite. Il n’est pas

toujours facile pour ces enfants de se confronter aux représentations des élèves de leur classe

qui peuvent les considérer comme des enfants « anormaux ».

L’enfant doit apprendre un nouveau métier d’élève : sa place et les interactions avec

l’enseignant et les élèves peuvent être modifiés.

4- Contexte linguistique

Il existe de nombreuses définitions d’une langue. Nous avons choisi de retenir celle

proposée par Elisabeth BAUTIER, tirée de Question de Langue : « Une langue c’est une

syntaxe et c’est surtout une façon de s’en servir qui correspond à une culture, un ensemble de

valeurs et d’habitudes sociales et cognitives ».

Il est évident que la langue est la difficulté principale pour ces enfants. Sans entrer dans

l’apprentissage de la langue de scolarisation, cela pose déjà un problème du point de vue de la

communication instantanée. Les enfants se trouvent dans l’impossibilité d’exprimer leurs

besoins, leurs douleurs, leurs sentiments... Le risque non négligeable est de voir ces enfants se

renfermer sur eux-mêmes et donc de bloquer l’intégration au sens large.

E.B : Au Sénégal, bien que la langue officielle soit le français, l’ensemble de la population

parle le Wolof, dialecte le plus répandu dans le pays. En fait, les élèves n’apprennent le

français qu’à l’âge de 6 ans, dès leur entrée à l’école élémentaire. Mon incompréhension du

dialecte national a rendu les échanges difficiles et sa connaissance aurait pu s’avérer une aide

précieuse autant d’un point de vue personnel que professionnel. On ressent vite le besoin

d’apprendre des éléments fonctionnels de communication qui ne sont pas toujours ceux que

Mis en forme : Police :Italique

Supprimé : «

Supprimé : »

Supprimé :

Supprimé :

Page 11: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

10

l’on pense être les plus importants a priori. Cela revient à apprendre une langue étrangère,

bien qu’en étant sur place, les besoins ne soient pas les mêmes.

Au sein de la classe, ne pouvant pas traduire en Wolof ce que les élèves ne comprenaient

pas, j’ai adopté des stratégies telles que la répétition, la reformulation, le mime ou bien encore

le dessin. Je me suis retrouvé dans cette situation lors d’une séance de vocabulaire menée

dans une classe de CE1 à Dakar. L’objectif de la séance était d’enrichir leur répertoire de

mots en leur faisant découvrir deux mots nouveaux. Pour donner du sens à cet apprentissage,

j’ai souhaité partir de la lecture d’un texte dans lequel apparaissaient les mots à étudier. Au

moment de l’explication du texte, je me suis rendue compte que la majorité des élèves

n’avaient pas compris le texte proposé (bien que tiré d’un bibliobus pour des CP/CE1), et

qu’il m’allait être très difficile de leur expliquer les mots prévus. Deux raisons me semblent

expliquer cette situation : premièrement, la lecture magistrale de livres et d’albums ne

correspondent pas à des habitudes de travail et deuxièmement, le texte que je leur avais

proposé ne faisait pas référence à des éléments de leur quotidien (ex : toboggan, pompier). Je

me suis donc servie des illustrations présentes dans le texte pour expliquer ce que voulait dire

chaque mot et j’ai demandé lorsque c’était possible aux élèves qui avaient compris de le

reformuler en Wolof.

Cette mise en activité m’a alors montré à quel point le rôle de l’enseignant est

fondamental (cf. deuxième partie : le rôle de l’école). Il se doit de faciliter la compréhension

des élèves nouvellement arrivés, en usant de stratégies, afin qu’ils entrent au plus vite dans les

apprentissages.

L’entrée dans notre langue orale et écrite est plus ou moins facilitée selon le pays dont est

originaire l’enfant. Certains alphabets comme l’alphabet turc sont relativement proches du

nôtre, ce qui n’est pas le cas pour d’autres systèmes d’écriture comme le chinois et le

marocain qui présentent un codage de l’écrit totalement éloigné de celui du français (cf.

annexe 1). En effet, en ce qui concerne la langue orale, les difficultés viennent de phonèmes

qui n’existent pas dans la langue maternelle ; pour l’écrit il s’agit de se confronter au codage

grapho-phonologique qui s’avère complexe en français. Dans notre langue cette

correspondance n’est pas unique, un même son pouvant être transcrit par différentes graphies

(par exemple le son [o] peut s’écrire « o », « au », « eau ») et inversement (la graphie « ent »

peut se prononcer [ã] ou [ə]). Il faut donc prendre en compte le contexte et savoir s’il s’agit

d’un verbe, d’un adverbe ou d’un nom. L’italien est une langue pour laquelle cette difficulté

Supprimé : t

Supprimé : ,

Supprimé : ,

Supprimé : a

Supprimé :

Supprimé : .

Page 12: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

11

n’existe pas, du fait d’une corrélation unique entre phonies et graphies. Ceci est également

vrai pour l’espagnol mais à des degrés moindres.

En conséquence, au moment de leur arrivée, les immigrés se réfugient souvent dans une

langue de survie hybride (que l’on appelle sabir) où les deux langues sont en porte à faux, ce

qui ne favorise pas l’intégration. Il semblerait préférable pour ces enfants de continuer à parler

leur langue maternelle à la maison et d’apprendre un français correct à l’école. Ainsi aucune

des langues n’est perdue au profit de l’autre et leurs structures grammaticales restent

correctes. Cependant, certaines familles considèrent que leur intégration nécessite l’abandon

total de leur langue d’origine, ceci reste un choix très personnel.

Un autre paramètre est celui de l’existence, dans le pays d’origine d’une langue de

scolarisation, différente de la langue parlée à la maison. Le jonglage entre plusieurs langues

développe des compétences facilitantes pour l’apprentissage d’une nouvelle langue.

Le français devient pour les ENA ce que l’on appelle une langue seconde : d’une part, le

français est appris par les élèves dans le contexte de la langue du pays d’accueil, pour devenir

plus tard composante d’un plurilinguisme, voire langue principale ; d’autre part, le français

est langue d’apprentissage et de scolarisation.

En conclusion, ces différents facteurs ont un impact qu’il est nécessaire de prendre en compte dans la

nouvelle vie des ENA. Si les conditions familiales et personnelles forment un soutien stable pour l’élève,

celui-ci va pouvoir concentrer son attention sur l’apprentissage de son nouveau métier d’élève.

Supprimé : degrés

Supprimé : ,

Page 13: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

12

DEUXIÈME PARTIE : LE RÔLE DE L’ÉCOLE

L’école est un lieu déterminant pour l’intégration sociale, culturelle et à terme professionnelle des

enfants et des adolescents nouvellement arrivés en France. Les ENA sont soumis de la même manière que les

autres élèves à l’obligation scolaire quelle que soit leur situation administrative, celle-ci étant laissée à

l’observation des services compétents. Bien que l’enseignant soit directement confronté à l’ENA dans sa

classe, il s’agit d’une problématique qui concerne l’ensemble de l’équipe éducative si l’on souhaite cimenter la

réussite scolaire. Il existe différents types de structures d’accueil et de scolarisation.

1- Les structures d’accueil

a- La scolarisation en classe ordinaire

Les enfants sont constamment présents dans la classe et suivent l’enseignement prévu par

le maître. Le bain de langue est permanent, le titulaire est le seul interlocuteur de l’enfant pour

lequel il se doit d’adapter les apprentissages.

b- La scolarisation en classe ordinaire et parallèlement en classe CRI (Cour de

Rattrapage Intégré)

Les enfants peuvent prétendre à 12h hebdomadaires de suivi CRI qui viennent en

complément d’une intégration dans une classe ordinaire. Ce temps spécifique a pour but

l’apprentissage du français langue seconde et peut être diminué progressivement lorsque le

besoin s’en fait ressentir par les enseignants. Les élèves y sont accueillis pour une durée d’un

à deux ans dans certains cas car le CRI est un outil, la priorité restant l’intégration en classe

ordinaire.

La classe CRI a pour priorité de travailler des objectifs langagiers :

- maîtriser le langage et la langue française,

- se sentir chez soi dans la langue nationale,

- communiquer, maîtriser le langage de l’évocation.

Supprimé : ¶¶¶¶¶¶¶¶¶¶

Supprimé : F

Page 14: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

13

• Fonctionnement d’après l’observation d’une classe CRI (Ecole Condorcet) :

L’accueil des enfants se réalise tous les après-midi dans une classe qui leur appartient et

qu’ils personnalisent. L’emploi du temps de la classe ordinaire demande alors à l’enseignant

une adaptation et une réflexion sur les disciplines dont l’enfant peut tirer un réel bénéfice.

L’enseignant CRI dispose de toutes ses matinées pour aider ses collègues des classes

ordinaires. Cependant ceci est rendu difficile par le dispositif qui veut que la classe CRI

regroupe les ENA de plusieurs écoles plus ou moins éloignées. En ce qui concerne la classe

CRI de l’école Condorcet que nous avons visitée, il y avait dix enfants qui venaient de huit

écoles différentes issues de la même circonscription (le nombre des écoles varie en fonction

des années) : Louis Blanc, Condorcet, Sigmund Freud, Lamartine, Jean Moulin, Périclès,

Pottier, Sibelius. La zone ainsi couverte s’étend sur environ trois à cinq kilomètres, ce qui

nécessite la mise en place de transports adaptés (parents, transports en commun…), dont la

charge financière est laissée aux parents.

Un cahier de classe CRI contenant les évaluations permet de faire le lien entre les enseignants

des deux classes, la famille et l’enfant. Il doit être signé par tous chaque quinzaine.

ALF : De ce que j’ai pu voir, l’aménagement de l’emploi du temps de la classe ordinaire n’est

pas une chose facile. Quelles disciplines peuvent être de réelles sources d’apprentissage pour

ces enfants ?

Lors d’un stage de pratique accompagnée, j’ai eu la chance de rencontrer une fillette

arrivée de Turquie à la fin de l’année scolaire précédente (mai 2005). Elle avait suivi un

cursus scolaire classique dans son pays et à la suite d’évaluations réalisées par le CASNAV

elle avait pu être affectée en CM1, niveau qui correspondait à sa classe d’âge (cf. annexe 2).

Cette décision avait pu être prise grâce à l’acceptation des différents partenaires : famille,

enseignants de la classe ordinaire et de la classe CRI, sous la médiation du CASNAV qui a

notamment permis l’intervention d’une traductrice turque. Les tests d’évaluation consistaient

en exercices de mathématiques et de français et montraient de réelles compétences en langue

maternelle (turque) : 16/20 au test de lecture cycle III (cf. annexe 3) et 18/20 aux évaluations

de mathématiques (niveau fin CE2). Lors de mon stage (janvier 2006), la fillette fréquentait

une classe de CM2 organisée en cours double CM1/CM2. Elle comprenait la plupart des

énoncés oraux bien qu’elle ressentait encore des difficultés à s’exprimer en français. Elle était

prise en charge tous les après-midi dans la classe CRI où nous nous sommes rendues par la

Mis en forme : Police :NonItalique

Supprimé : ¶¶

Supprimé :

Supprimé : ,

Supprimé : Lors d’un stage de pratique accompagnée, j’ai eu la chance de rencontrer Ilknhur, une fillette arrivée de Turquie à la fin de l’année scolaire précédente

Supprimé :

Page 15: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

14

suite et suivait donc sa classe tous les matins; elle assistait également à l’étude qui se déroulait

avant la classe de 8h à 9h.

Une réflexion s’impose sur le choix des activités pouvant être suivies, de la manière la plus

riche, par cette enfant :

- La littérature et l’ORL (Observation Réfléchie de la Langue) en dispositifs aménagés

permettent à l’enfant de consolider et d’élargir les apprentissages amorcés en classe CRI.

La fillette adorait la lecture et les histoires, et participait activement dès qu’elle le pouvait

en littérature. D’autre part, j’ai noté chez tous les ENA rencontrés un réel désir de bien

écrire et j’ai pu observer une bonne participation écrite dans des situations d’exercices

guidés (j’envisage plus loin le cas de la production d’écrit) ;

- Les mathématiques font partie d’un autre code plus universel et ne posent pas de

difficultés spécifiques. J’ai mené une séquence sur la division qui n’a pas posé plus de

difficultés pour cette enfant, au contraire, le calcul a un côté cartésien rassurant. Je savais

qu’elle n’avait pas amorcé l’apprentissage de la division dans son pays, et j’ai pu observer

qu’elle affectionnait les mises en activité de type « révision des tables de multiplications »

qui débutaient mes séances sur la division.

J’ai appris par la suite qu’elle aimait particulièrement les mathématiques et que son père

maçon l’aidait parfois dans ce domaine ;

- Les disciplines comme les arts visuels, l’éducation musicale et l’EPS sont de bons

moyens d’engager l’enfant dans des tâches où la barrière de la langue ne se matérialise

que peu. Il est alors facile de réinvestir des compétences acquises dans leur pays d’origine.

J’ai pu noté une participation active et réfléchie en situation de hand-ball, il m’a été facile

d’expliquer les consignes en joignant le geste à la parole. Les autres élèves ont pu

également plus facilement aider sa compréhension. Ces disciplines peuvent également se

révéler d’excellents supports d’apprentissage de lexique ; je détaillerai par la suite une

séance d’arts visuels entrant dans ce cadre ;

- Une langue étrangère peut paraître superflue mais son acquisition est possible car

l’enfant est entrée dans une logique d’apprentissage de la langue. Cependant, des

mélanges peuvent parasiter l’acquisition du français langue seconde ;

- Les plus grandes difficultés que j’ai rencontrées se sont manifestées en histoire (moins en

géographie), sciences et production d’écrit. En histoire, la période abordée était celle du

siècle des lumières et je travaillais plus particulièrement sur les idées des philosophes de

l’époque. Peu de textes de cette époque sont facilement accessibles et ceux proposés

Mis en forme : Avec puces +Niveau : 1 + Alignement : 0cm + Tabulation après : 0,63cm + Retrait : 0,63 cm

Supprimé : ,

Page 16: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

15

posent déjà des difficultés à tous les élèves. Il m’est désormais évident que cet apprentissage

ne présente pas d’accès pour un ENA. C’est une discipline dont les apprentissages peuvent se

faire plus tard et qui ne représente pas une priorité pour ces enfants. Ce temps peut permettre

un moment de différenciation, ou se faire lorsque l’enfant est en classe CRI. Pour les sciences,

bien que l’intérêt de la fillette était important, elle butait sans arrêt sur un vocabulaire très

spécifique difficile (ici travail sur la circulation sanguine). En matière de production d’écrit, la

difficulté est importante mais peut se contourner et s’adapter. Le dessin est un bon moyen

d’expression qui peut servir de support à une dictée à l’adulte. Le plus difficile reste la

production autonome, mais l’important est de toujours donner des moyens d’expression à ces

enfants.

Dans un second temps, il faut aussi tenir compte de la réalité de la classe (intervenants

extérieurs, emploi du temps d’occupation des locaux spécifiques en arts visuel ou en EPS et

décloisonnements). C’est ainsi que malgré une réflexion de l’enseignant titulaire sur les

activités en elles-mêmes, la fillette suivait les cours d’histoire (dépendants d’un

décloisonnement en demi groupe avec une intervenante en allemand le matin) alors qu’elle

suivait peu d’EPS, d’arts visuels ou d’éducation musicale qui semblent pourtant être de bons

moyens d’extériorisation pertinents pour ces élèves. Ils permettent de créer des liens avec les

autres enfants dans un contexte scolaire plus souple. En effet, il est alors plus facile

d’accompagner les actions par la parole (en EPS, en arts visuels et en musique) et ainsi de

créer un bain de langage en situation. L’éducation musicale et les arts visuels peuvent

favoriser des échanges culturels importants entre l’ ENA et ses camarades par le biais des

artistes et de leurs œuvres.

• Méthodes d’apprentissage :

L’enseignante que nous avons rencontrée fonde son enseignement autour de 3 axes :

- le français langue seconde,

- le français langue de scolarisation,

- les aspects culturels et interculturels.

Ces axes permettent aux enfants de trouver leur place dans le groupe, en effet, ceux-ci ont

besoin de parler d’eux (se présenter aux autres), de se repérer dans l’espace et dans le temps,

d’apprendre le code, de raconter, de donner leur avis et leur point de vue.

Supprimé :

Supprimé : ,

Page 17: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

16

L’enseignante de cette classe propose des rituels, un peu comme en maternelle, afin que

les élèves prennent des repères. Elle commence par une phase d’oralisation dans le but de

faire fonctionner le lexique et utilise des jeux de rôle qui donnent du sens. Elle a recours à des

albums accessibles pour tous, étant donné l’écart d’âge qu’il peut y avoir entre les enfants

(comme dans une classe unique) et accorde de l’importance à la prise d’indices (similitudes

des premières de couverture, mises en page spécifiques au type d’écrit) aidant à la

compréhension.

Elle sollicite les enfants pour qu’ils apportent des livres dans leur langue maternelle afin

qu’ils ne soient pas seulement que des apprenants, mais qu’ils se sentent aussi capables de

nous apprendre des choses. Ceci permet de créer des passerelles avec la classe de référence et

plus particulièrement les autres élèves, afin de changer l’image qu’ils peuvent avoir d’un

ENA.

• Outils

Plusieurs outils sont utilisés, notamment :

- des imagiers,

- des dictionnaires illustrés (ex : « Mes 100 premiers mots à lire » fichier RETZ de

Guirao et Marschal),

- des contes internationaux en plusieurs langues (ex : Le petit chaperon rouge),

- des consignes illustrées indispensables en début d’année dans les deux classes avec

un souci d’unicité du code (cf. annexe 4).

• Particularités

Les élèves se retrouvent et ont un vécu commun (la migration), leur faible nombre

(maximum 15 élèves) engendre une grande proximité entre eux et avec l’enseignant qui

favorise le climat de confiance et donc l’entrée dans les apprentissages.

Ce poste demande un réel investissement de l’enseignant : il faut faire preuve de

compréhension, de sincérité et donner envie (théâtralisation importante).

Mis en forme : Police :NonItalique

Mis en forme : Tabulations :0,95 cm,Gauche + 1,59cm,Gauche

Supprimé :

Supprimé : ¶

Supprimé :

Supprimé :

Page 18: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

17

c- Le rôle du Centre Académique pour la Scolarisation des enfants Nouveaux

Arrivants et des enfants du Voyage (CASNAV)

Il s’agit d’une structure mise en place en 1975 sous la forme de CEFISEM (Centre de

Formation et d’Information pour la Scolarisation des Enfants Migrants), devenue en 2002 des

CASNAV de manière à mieux identifier les publics concernés.

Les missions principales d’un CASNAV sont :

- de faciliter l’adaptation de ces jeunes au système français d’éducation en développant des

aides adaptées à leur arrivée ;

- d’assurer leur intégration dans le cursus ordinaire.

Pour cela, le CASNAV est chargé d’établir le dossier d’accueil et d’évaluation qui

consiste notamment en une évaluation correspondant à la classe d’âge de l’écolier, rédigée par

celui-ci dans sa langue, afin d’analyser ses compétences en mathématiques et en

lecture/littérature. Le profil scolaire établi permet d’affecter l’élève dans le niveau de classe

lui correspondant le mieux. Le dossier est alors remis à l’enseignant pour lui permettre

d’organiser les apprentissages de l’élève, une copie étant conservée par le CASNAV.

Cette structure a également un rôle d’accompagnement des enseignants et plus largement

de l’école concernée. La plupart du temps une réunion est organisée à l’issue de l’évaluation

de l’enfant, durant laquelle l’équipe enseignante, les parents et le responsable du CASNAV

accompagné le cas échéant d’un traducteur, construisent le projet d’intégration de l’élève.

C’est à ce moment là que s’établit le lien entre les différents partenaires éducatifs et

qu’intervient l’échange de documentations pédagogiques (cf. annexe 5).

ALF : En réalité, sur le terrain tout n’est pas si facile. L’enseignant de la classe dans laquelle

j’ai fait mon stage n’avait pas connaissance de l’existence de ce dossier et ne pouvait, par

conséquent, s’appuyer sur les informations spécifiques qu’il propose. C’est l’enseignante du

CRI qui possède et utilise le document. On entrevoit ici une difficulté importante,

l’enseignante du CRI n’a pas le temps matériel de rencontrer les enseignants de tous ses

élèves pour leur exposer ce qu’elle propose quotidiennement et parler plus spécifiquement de

l’enfant. Inversement, l’enseignant de la classe titulaire doit prendre en compte tous ses élèves

et leurs besoin spécifiques ce qui sous-entend souvent des réunions entre collègues et avec les

familles. Des rencontres manquent pour harmoniser et diversifier les offres faites à ces

Supprimé : ¶¶¶¶

Supprimé :

Supprimé : ,

Page 19: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

18

enfants. La mise en place d’un carnet de liaison où chacun des enseignants peut noter ce qu’il

propose à l’enfant et poser des questions semble être un bon outil. En effet, c’est par

l’information que des liens pourront se tisser entre les partenaires éducatifs mais aussi entre

les apprentissages. Il est évident que les situations vécues dans les deux classes se recoupent

parfois et que c’est justement ce cas qui semble exploitable avec l’enfant. Il lui serait sans

doute plus facile d’aborder en classe ordinaire une notion dont la trame ou le vocabulaire est

travaillé en parallèle en classe CRI, lui permettant ainsi de participer, de montrer que l’enfant

connaît des choses, qu’il apprend et qu’il progresse. Une communication quelle qu’elle soit

entre les enseignants d’un ENA m’apparaît décisive pour sa réussite. Les deux contextes

scolaires sont différents et l’enfant y évolue donc différemment avec plus ou moins de

confiance et en se dévoilant de différentes façons. Un regard sur ses comportements peut être

révélateur de besoins spécifiques, de difficultés récurrentes ou bien dépassées dans un des

deux contextes.

J’ai pu remarquer que la jeune turque d’un naturel réservé en classe ordinaire était bien plus

émancipée en classe CRI. Elle se sentait sans doute en sécurité, rassurée par l’ambiance

« cocon » de cette classe, mais aussi par le public présent : tous les enfants viennent d’arriver

en France et sont confrontés aux mêmes difficultés qu’elle. Sans la visite de cette classe, je

n’aurais jamais pu avoir ce regard sur son comportement et c’est pourtant ce qui se passe pour

les enseignants de l’enfant qui n’ont pas le temps matériel d’échanger leurs remarques. Il me

semble essentiel de créer ce contact pour mener à bien le projet d’intégration de tout ENA.

A la lumière de cette difficulté, j’ai demandé à l’enseignant de la classe ordinaire ce dont il

pensait avoir besoin, qui lui faisait actuellement défaut pour avancer avec l’enfant :

- une copie du dossier d’évaluation,

- des échanges avec l’enseignante CRI (autres que les simples résultats de ses évaluations),

- une copie de la grille des premières consignes, utilisée au CRI (par souci d’unicité).

Les concertations entre les différents partenaires éducatifs permettent d’organiser le projet scolaire de

l’élève (quota horaire de la fréquentation des deux classes). Cependant, ce projet est en constante évolution

durant l’année en fonction des besoins de l’élève et de son avancée dans les apprentissages.

Page 20: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

19

2- Démarche personnelle de l’enseignant

L’enseignant de la classe ordinaire représente pour l’enfant un référent stable de la société d’accueil.

Constituant un relais indispensable, il doit s’interroger sur une nouvelle problématique : quel rôle doit-il

jouer ?

a- Accueil de la famille

La première démarche qui semble essentielle est une prise de contact avec la famille. Il

faut alors s’interroger sur la nécessité de recourir à un interprète pour faciliter ce moment

d’échange. En effet les parents peuvent ressentir diverses appréhensions face à l’intégration

de leur enfant :

- Comment va t-il être accueilli ?

- Va t-on lui proposer un apprentissage adapté ?

- Va t-il pouvoir poursuivre son cursus scolaire comme il l’aurait fait dans son pays

d’origine ?

C’est l’occasion également de présenter aux parents le système scolaire français et les

locaux dans lesquels leur enfant va évoluer toute l’année. Cet entretien va aussi permettre de

définir un référent familial qui pourra comprendre et transmettre les informations venant de

l’école au sein de la famille. Nous avons pu remarquer que c’est souvent un grand frère ou

une grande sœur également scolarisé qui fait office d’intermédiaire, ceci étant dû à la barrière

linguistique rencontrée par les parents. Un médiateur social invité, peut alors proposer le

recours à des associations offrant différents services :

- un enseignement de la langue pour adulte (ALF : La maman de la fillette que j’ai suivie

prenait justement des cours de français et commençait à suivre les devoirs de sa fille) ;

- une aide aux devoirs, tant que les parents ne peuvent le faire. (EB : Au Sénégal ce sont les

enseignants qui proposent généralement ces aides aux devoirs, ils font cela bénévolement

après les cours de 18h à 21h) ;

- des activités culturelles (découverte de la ville, du quartier), sportives …

Nous avons rencontré un intervenant d’une de ces associations (association A.V.E.C.)

pour en savoir davantage sur ce qui est proposé aux familles nouvellement arrivées en France

(cf. annexe 6).

Supprimé : ¶¶¶¶¶

Page 21: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

20

b- Prise de contact avec l’enfant

ALF : La prise de contact avec l’enfant me semble une étape délicate dont la réussite est

fondamentale pour la suite. Il est important que l’enfant ait confiance en son enseignant, qu’il

sache qu’il sera là pour l’accompagner, en lui donnant le temps, en le guidant, mais sans

négliger les aspects scolaires.

Lors de mon stage je me suis rendue compte que le temps et la confiance sont des alliés non

négligeables. J’ai choisi de discuter avec la fillette tout d’abord à l’étude du matin, pour

prendre contact en douceur. De façon très brève au début, il n’y a eu qu’un « bonjour » mais

qui à moi me semblait important ; en effet j’intervenais dans cette classe pour 15 jours

seulement, elle ne m’avait jamais vue et je ne voulais pas qu’elle se sente observée à la loupe.

Petit à petit nous avons discuté plus longuement, je lui ai proposé de lui expliquer ce que nous

avions fait avec ses camarades lorsqu’elle était au CRI les après-midi. Ceci m’a confronté à la

difficulté du choix des mots justes pour qu’elle comprenne le plus aisément possible.

J’accordais beaucoup d’importance au fait de ne pas lui imposer mon aide lorsqu’elle ne la

souhaitait pas, mais je m’assurais qu’elle puisse participer sans trop de problèmes aux séances

que je menais, soit en lui proposant une explication différente avec un dessin par exemple,

soit en lui proposant l’aide d’un camarade. Je me suis rapidement rendue compte qu’elle

venait me solliciter spontanément pour avoir des précisions de consigne ou tout autre

demande d’ailleurs, ce qu’elle faisait beaucoup moins au contact d’une autre stagiaire

présente en même temps que moi dans la classe. A la fin du stage, j’ai pu lui demander

facilement de répondre à quelques questions sur son ressenti dans la classe et elle y a répondu

sans gêne (cf. annexe 7).

Je pense vraiment qu’une relation de confiance doit s’établir avec l’ENA pour qu’il puisse

s’intégrer et s’épanouir dans sa classe. L’enseignant doit avoir confiance en ses capacités,

même s’il ne les mesure pas au début, pour que ce dernier puisse se sentir suffisamment en

sécurité et s’autoriser toutes les questions et les remarques dont il a besoin.

c- Aménagement de la classe

Il faut réfléchir au placement de l’élève dans la classe (devant, derrière, au milieu, seul,

avec un tuteur, proche de l’enseignant).

Supprimé :

Supprimé : assez

Page 22: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

21

Dans le cadre de tutorat, il est important de mettre en place un système de rotation basé sur un

calendrier négocié avec la classe, afin de ne lasser personne. Les enfants peuvent alors

s’impliquer davantage dans leur rôle.

Un emploi du temps clair et explicité (code couleur, par exemple) doit être remis à l’élève

pour faciliter son quotidien dans la classe.

d- Réflexion pédagogique

Il nous semble évident de ne pas avoir les mêmes exigences en matière de connaissances

pour ces élèves. Une progression thématique et disciplinaire est possible et doit être adaptée

(lexique, syntaxe, contenus, niveau de formulation). Il est important que l’enfant acquière des

compétences de difficultés croissantes en fonction de ses acquis et tire donc un réel bénéfice

de l’école.

L’adaptation de tous les enseignements semble irréaliste et se traduit essentiellement par une

différenciation des évaluations en terme de contenus et d’exigences.

L’enseignant a donc inévitablement un rôle très important à jouer en proposant une démarche

pédagogique spécifique, mais surtout en s’impliquant personnellement dans l’accueil et l’écoute attentive de

ce nouveau venu.

3- Démarche de toute une équipe pédagogique

Un enseignant n’est pas seul face aux difficultés rencontrées lors de l’accueil d’un ENA.

En début d’année, les écoles reçoivent une lettre d’information concernant l’accueil et la

scolarisation des ENA. Cette dernière fait référence à différentes circulaires précisant : les

modalités d’inscription et de scolarisation des élèves de nationalité étrangère (circulaire 2002-

063 du 20/03/02), l’organisation de la scolarité des élèves nouvellement arrivés en France

sans maîtrise suffisante de la langue française ou des apprentissages (circulaire 2002-100 du

25/04/02) et sur les missions des Centres Académiques pour la Scolarisation des Nouveaux

Arrivants et des enfants du Voyage ou CASNAV (circulaire 2002-102 du 25/04/02). Les

directeurs des écoles concernées ont pour mission de renseigner et de transmettre au

CASNAV, à chaque début d’année, une fiche récapitulative « recensement des ENA »

permettant de dénombrer les enfants arrivés depuis le début de l’année civile (réalisation

Page 23: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

22

d’une enquête départementale). Pour toute inscription réalisée après ce recensement, les

directeurs doivent envoyer au CASNAV une fiche de liaison individuelle de manière à

régulariser les statistiques (cf. annexe 8).

Rapidement, le directeur de l’école peut proposer à la demande de l’enseignant de la classe,

un bilan médical réalisé par le médecin scolaire afin de déceler d’éventuels troubles auditifs

ou visuels, mais aussi de s’assurer des vaccinations effectuées.

Il est important que toute l’équipe pédagogique participe à l’intégration de ces élèves.

Cette démarche facilitera le passage de l’élève dans les différentes classes de l’école. Les

heures de concertation des conseils sont des moments privilégiés pour aborder les

aménagements possibles et nécessaires au sein de l’école ainsi que les difficultés rencontrées

par les enseignants des classes d’accueil. Lorsque l’école accueille plusieurs ENA il est

possible et même souhaitable que les enseignants travaillent de concert à leur intégration, en

proposant notamment un décloisonnement de certaines activités souvent inabordables au sein

du grand groupe (histoire, sciences, ou production d’écrit par exemple) et des moments de

travail plus spécifique aux apprentissages du FLS.

La répartition des lieux spécifiques (BCD, salle informatique, plateau sportif…) doit être

pensée en relation avec la présence de ces enfants dans l’école (cf. adaptation de l’emploi du

temps).

Tous ces partenaires ont pour mission commune la réussite de l’intégration de l’enfant, ce qui nécessite

donc concertations, implications et échanges professionnels dont le but ultime est l’épanouissement

personnel et scolaire de l’enfant.

Supprimé :

Page 24: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

23

TROISIÈME PARTIE : MISE EN PLACE DE PRATIQUES PÉDAGOGIQUES Cette partie a pour objectif de proposer des outils pratiques pouvant être mis en place dans la classe afin

d’accueillir un ENA, ainsi que des pistes de travail permettant une adaptation des apprentissages à

différents moments de l’année.

1- Pistes de réflexion

a- Outils pratiques

Le premier axe de travail consiste en la mise en place d’éléments fonctionnels de

communication. Il faut faciliter son entrée dans la vie de la classe et dans les apprentissages

dès son arrivée. Nous avons vu lors de notre visite de la classe CRI, l’utilisation d’une grille

de premières consignes (mots, en vis-à-vis de pictogrammes), qui permet à l’enfant d’entrer

facilement dans les tâches scolaires. Plus particulièrement, c’est une aide à la lecture et à la

mémorisation qui disparaîtra au fil du temps.

Il nous semble intéressant d’étendre ce dispositif aux situations quotidiennes de vie de la

classe et de proposer ainsi un moyen de « parler de soi ». En effet, nous avons remarqué un

manque, au niveau des besoins d’ordre plus généraux (avoir soif, faim, mal quelque part). De

plus, il s’agit d’un autre mode d’apprentissage du lexique qui pourra aisément être réinvesti

en dehors de la classe et qui correspond à l’essentiel des besoins de communication

instantanée.

Supprimé : ¶¶¶¶¶¶¶¶¶¶

Supprimé : ,

Supprimé : ,

Page 25: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

24

Suite à ce constat, nous avons imaginé une grille répondant à ces besoins :

Un second axe de travail peut consister en l’utilisation du logiciel « ATOUTCRI » diffusé

par le CASNAV. Ce support multimédia propose à la fois des évaluations de compétences en

mathématiques et en français mais aussi des parcours progressifs vers l’apprentissage de la

langue. Il se base notamment sur des supports sonores qui permettent un travail de l’oral en

autonomie. Cet outil va permettre à l’enseignant de placer l’enfant, dès son arrivée, sur des

activités adaptées ayant fait l’objet d’une recherche approfondie.

Je suis content(e)

Je suis triste

Je suis malade

J’ai compris

Je ne comprends pas

Je me suis disputé(e)

J’ai faim/soif

Je voudrais aller aux toilettes

Je suis fatigué(e)

?

Supprimé : ¶¶¶¶¶¶¶¶¶¶

Page 26: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

25

b- Activités

Un travail concernant la conception que l’on peut avoir de l’outil « manuel » est

envisageable. Nous avons parfois le tort de considérer comme acquises la connaissance et

l’utilisation de cet outil. Dans certains pays les manuels sont peu présents. E.B : C’est le cas

au Sénégal, les livres sont peu utilisés au quotidien ; ils ne font pas partie du matériel de base

de l’élève. Leur fonctionnement nécessite un apprentissage :

- organisation en double page,

- sens de lecture,

- sommaire,

- 1° et 4° de couverture,

- type d’écrit et sélection de l’information.

Une activité qui nous a semblé intéressante (proposé par Danielle BOYSON-FRADET

dans Question de Langue) consiste en l’étude approfondie de l’objet « manuel scolaire ».

Comme l’écrit Danielle BOYSON-FRADET : « une double page de manuel se présente

toujours sous forme d’un écrit pluricodé, éclaté, dont la lecture ne peut s’effectuer de manière

linéaire ».

Il n’est pas inutile de travailler la méthodologie du manuel, sachant qu’elle reste souvent

identique tout au long de celui-ci et qu’elle présentera nécessairement des similitudes de

structure avec tout autre manuel. Une activité peut donc consister en la reconstitution d’une

double page « puzzle » sur un thème précis, de manière à inventorier les relations existantes

entre les éléments de la page (photos, textes, enquêtes, reportages, documentaires…). Ce type

d’activité peut être prolongé par la création d’une double page de manière plus autonome,

pour rendre compte de recherches ou pour servir de support à un exposé oral. Ce travail peut

également représenter une aide importante pour certains élèves en difficultés, notamment

lorsque la lecture reste coûteuse. Il sera ainsi possible de développer des stratégies de lecture,

correspondant à ce type d’écrit, qu’ils seront amenés à rencontrer tout au long de l’année.

Toute la classe pourra alors en tirer un réel bénéfice, y compris l’enseignant qui gagnera un

temps précieux par la suite lorsqu’il choisira d’utiliser un manuel.

Lors de séances de production d’écrit en début d’année, nous pensons possible d’utiliser

des « cartes images » comme aide à la communication. Ces cartes peuvent être de plusieurs

types (personnages, lieux, actions, moyens) en lien avec une histoire lue en classe. Ce support

peut permettre l’écriture en dictée à l’adulte de la suite du texte, en diminuant les opérations

Supprimé : ¶

Supprimé : e dit

Supprimé :

Supprimé : Il est donc possible que t

Supprimé : ,

Supprimé : ,

Page 27: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

26

cognitives effectuées par l’enfant. Il est aussi possible de travailler sur la structure du récit

(schéma narratif).

Il peut être intéressant de construire avec l’enfant un dictionnaire illustré lui permettant de

stocker les mots nouveaux qu’il rencontre quotidiennement, ainsi que de demander du

vocabulaire par l’intermédiaire du dessin. Une structuration par thème ou par ordre

alphabétique peut apparaître. Cet outil constitue à la fois un élément rassurant, mais aussi une

trace du parcours et des progrès réalisés.

Il est possible d’inviter les parents de l’enfant à suivre une demi-journée de classe de

manière à renforcer le lien avec la famille. Parents et enfant pourront ensuite discuter dans

leur langue de la vie de la classe. Les parents comprendront sans doute mieux ce que vit leur

enfant et auront une autre vision de ces moments, traditionnellement racontés par l’enfant.

La journée doit être ponctuée de moments calmes où l’enfant se ressource et prend du

temps pour « souffler ». En effet, ces temps de classe demandent à l’enfant une concentration

soutenue, notamment par l’effort de compréhension dû à la langue. Toutes les activités qui lui

sont proposées génèrent une fatigue intellectuelle qu’il est nécessaire de prendre en compte.

2- Mise en application

a- Passation des consignes

EB : L’enseignant peut au moment de formuler ses consignes, utiliser le mime ou le dessin

pour faciliter la compréhension de l’ENA. Cette démarche peut ainsi être bénéfique à d’autres

élèves de la classe qui seraient en difficultés au moment de l’énoncé des consignes orales.

L’enseignant peut s’assurer de plusieurs façons que l’enfant ait bien compris le travail

demandé ; il peut lui demander de reformuler la tâche avec ses propres mots, ou bien encore

lui proposer de montrer les principales actions à travers un imagier dont il aurait l’habitude de

se servir.

Page 28: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

27

b- Réinvestissement des apprentissages du CRI

ALF : Lors de mon stage, j’ai mené une séance d’arts plastiques qui a permis, sans le savoir,

un réinvestissement des activités de la classe CRI et qui a facilité l’appropriation de l’activité

par la fillette turque. Il s’agissait d’une séquence sur le portrait en lien avec le livre de

littérature qui venait d’être lu par la classe. Les premières séances avaient permis de travailler

la notion même de portrait et la représentation des sentiments à travers différentes techniques.

La séance proposée partait d’œuvres d’artistes qui avaient travaillé le portrait « autrement ». Il

y avait trois techniques à explorer : le minimalisme (de simples traits noirs sobres pour créer

un portrait minimal mais expressif), le portrait paysage (des éléments de paysages utilisés

pour créer un portrait) et le détournement du visage (ré agencer les parties d’un visage pour

créer un portrait où plus rien n’est à sa place, où la structure du visage est repensée). Les

enfants choisissaient l’atelier qu’ils souhaitaient et réalisaient, par découpage collage, un

portrait en utilisant la technique de l’artiste de référence. La fillette s’est spontanément

tournée vers le ré agencement du visage et est entrée dans l’activité sans aucune difficulté.

J’ai su par la suite, que cette semaine-là, le vocabulaire du visage avait été travaillé en classe

CRI et il est vrai que je n’avais pas rencontré de problème de compréhension en lui disant que

les oreilles pouvaient devenir des yeux, la bouche une moustache…, pourtant cette activité

demandait une capacité de déconstruction non négligeable. A la suite du travail de production,

j’avais demandé aux élèves de donner un titre à leurs portraits et je me suis rendue compte,

par la pertinence du titre choisi par la fillette, du degré d’appropriation atteint.

Supprimé : ¶¶¶¶

Supprimé : ,

Page 29: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

28

Je pense que ceci est largement dû au travail mené en amont au CRI, ce qui nous montre

ainsi à quel point une communication entre les enseignants des ENA est essentielle. Il me

semble que la classe CRI peut préparer l’enfant à certaines séquences d’apprentissages en

abordant le vocabulaire, le contexte et tout ce qui s’y prête, de manière à faciliter la

compréhension du travail en classe ordinaire. Cette première sensibilisation permet ainsi à

l’enfant de développer des compétences plus spécifiques (niveau disciplinaire) et d’être un

peu plus « comme les autres » face à une nouvelle notion.

c- La place du jeu dans les apprentissages

L’utilisation de supports plus ludiques, comme les jeux de loto, de mémory, et plus

généralement tous les jeux de société, est l’occasion d’apprendre du lexique, des nombres, des

règles de jeu. Ces situations peuvent également permettre une mise en comparaison des jeux

traditionnels des deux pays. De premiers échanges interculturels se développent.

ALF : Dans la classe de CM1/CM2 que j’ai suivie en stage de pratique accompagnée,

l’enseignant utilisait des défis pour motiver ses élèves. Ces défis pouvaient concerner

différentes disciplines à partir du moment où la notion travaillée se prêtait à ce type

d’exercice.

Les enfants sont répartis en 4 équipes de cinq à six élèves, et gagnent des points au gré de la

réussite des défis, ils peuvent en perdre lorsque leur travail est parasité par des bavardages,

des somnolences. A la fin de chaque période, un bilan est fait, et l’équipe gagnante « reçoit la

gloire » d’être celle qui a le mieux travaillé durant toute la période. Pour l’enseignant, ce

dispositif a un double objectif, motiver les élèves par le jeu et évaluer individuellement ceux

qui participent au défi.

A titre d’exemple je vais détailler un défi auquel la fillette turque a accepté de participer et

qui lui a permis non seulement de rapporter des points à son équipe, mais surtout de montrer

qu’elle savait des choses et qu’elle était capable d’appartenir réellement au groupe.

Il s’agissait d’une séquence sur la division et le défi prenait place en fin de séance, séance

durant laquelle les élèves avaient travaillé sur la potence (technique opératoire de la division)

comme outil d’écriture d’un partage équitable.

Un élève de chaque équipe est invité au tableau pour participer au défi final qui consiste en la

résolution d’une division. Les quatre élèves sélectionnés doivent résoudre l’opération

individuellement le plus rapidement possible, le premier ayant fini pouvant rapporter le plus

Page 30: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

29

haut score à son équipe (les élèves sont ordonnés selon leur rapidité d’exécution). Pendant ce

temps, les autres élèves de la classe résolvent la même opération sur le cahier de brouillon, de

manière à participer à la validation de ce qui a été produit au tableau. Lorsque les quatre

participants ont terminé, les opérations sont observées, seules celles qui sont réussies

rapportent des points : 3 points pour le plus rapide, 2 points pour le second, 1 point pour le

troisième et 0 point pour le dernier.

Cette situation motivait beaucoup les élèves mais leurs réactions variaient suivant l’élève

choisi pour participer au défi. En effet l’enseignant désignait parfois les « joueurs » de

manière à ce que tous passent mais aussi à équilibrer les niveaux. Lorsque la fillette turque est

passée, peu d’élèves s’attendaient à ce qu’elle réussisse l’opération et encore moins à ce

qu’elle apporte des points, pourtant ce fut le cas (elle remporta 2 points) et cette activité a

réellement légitimé sa place dans le groupe et dans la classe, à cet instant. Même si la plupart

des élèves s’entendent bien avec cette camarade, ils ne la considèrent pas encore tous comme

« un pair » et là est toute la difficulté : il faut prendre en compte ses spécificités, ses besoins

particuliers et en même temps lui donner une place aussi ordinaire que celle des autres élèves.

Je pense que ce type d’activité pour des notions bien comprises peut participer à l’intégration

d’un enfant nouvellement arrivé en France.

d- Utilisation des acquis culturels de l’élève

Contexte :

Nous avons choisi de travailler autour des acquis culturels de l’ENA à travers la mise en

place de deux séances faisant appel à ses connaissances en langue maternelle. Notre objectif

principal était de montrer aux autres élèves les difficultés que pouvait rencontrer chaque jour

l’ENA. Comprendre un langage oral différent du sien nécessite une grande concentration et

est source de fatigue ; entrer dans le langage écrit demande une mise en hypothèse constante.

Notre hypothèse de travail passait par l’utilisation de la culture de l’ENA de manière à la

valoriser vis-à-vis de ses camarades pour lui donner confiance en elle. Les aboutissements

d’une telle activité doivent permettre :

⋅ d’enrichir la classe,

⋅ d’intégrer l’élève par sa différence,

Page 31: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

30

⋅ de parler et d’accepter la différence,

⋅ de s’ouvrir au monde et à sa diversité,

⋅ de motiver l’élève à communiquer et à faire passer ses propres connaissances.

Dans ce but, nous avons choisi de proposer deux séances (cf. annexe 9) qui permettaient

d’inverser les rôles, les élèves étaient face à un écrit en langue étrangère inconnue, alors que

l’ENA se retrouvait face à sa langue maternelle. Le support utilisé était un poème turc

d’Üzeyir Lokman ÇAYCI , intitulé « LE SOLEIL EST NE POUR LA TRISTESSE » (cf. annexe 10).

Le dispositif choisi visait plusieurs objectifs, à savoir :

- en littérature (lire, dire, écrire) : étudier un poème pour « écrire à la manière de »

collectivement ;

- en ORL : comparer des systèmes linguistiques en établissant des correspondances entre

les mots des deux langues ;

- en éducation civique : réaliser une production interculturelle en français et en turc de

manière à mélanger nos cultures et nos connaissances.

La langue turque actuelle a fait l’objet d’une réforme importante sous l’impulsion d’une

politique de laïcisation menée par son dirigeant Mustafa Kemal Atatürk, dans les années 1920

(cf. annexe 11). C’est ainsi qu’un nouvel alphabet, dérivé de l’alphabet latin, a remplacé le

codage arabe. Cette réforme s’est accompagnée d’autres mesures visant à moderniser et

entretenir la langue turque originelle. La grammaire turque présente certaines ressemblances

avec la grammaire allemande : elle fonctionne avec un système de déclinaisons et renvoie le

verbe en fin de phrase ; les compléments sont en début de phrase et les prépositions sont

essentiellement en dernières positions dans la phrase. Certaines autres spécificités sont mises

en évidence lorsqu’on compare une phrase turque et sa traduction française :

- l’emploi des pronoms personnels n’est pas nécessaire, ils sont parfois utilisés pour

préciser le sujet ;

- la négation, la possession et les conjugaisons sont marquées par des suffixes

spécifiques sur les noms ou les verbes ;

- il n’y a pas de genre et donc pas de déterminant.

Page 32: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

31

Cette analyse permet de se rendre compte des difficultés pouvant être rencontrées par un

enfant turc devant apprendre le français ; les principaux écueils viennent de l’ordre des mots,

totalement inversé, et de l’absence de genre.

Remarques personnelles sur le déroulement de la séance 1 :

ALF : Lors de la distribution du texte, les enfants étaient plutôt intrigués et leur première

réflexion fut : « on ne peut pas répondre aux questions, on ne comprend pas ». Il a fallu

expliquer qu’il s’agissait d’une énigme et qu’il y avait pleins d’indices dans le texte, pour que

les enfants s’engagent dans la tâche. J’avais volontairement choisi de passer par une phase

écrite de recherche, de manière à canaliser les élèves de cette classe relativement vivante.

Certains enfants ont cru qu’il s’agissait d’un texte allemand - il est vrai que c’est la langue

étrangère étudiée par la classe - ils ont pu y voir les ressemblances de sonorités de certains

suffixes (on trouve beaucoup de « den » en allemand et il y en avait dans le texte).

Tout au long de la séance il y a eu beaucoup d’interactions entre l’enfant turque et ses

camarades, des questions, des remarques. Le recours constant aux connaissances de l’ENA,

pour la validation des hypothèses, lui a donné envie de participer activement à l’oral, ce qui

n’est pas la chose la plus facile pour elle. Au début de la recherche d’autres traductions, les

enfants n’ont pas pensé directement à leurs langues maternelles (les enfants de cette classe

sont de différentes origines et certains ont un de leurs parents d’origine étrangère). Habitués à

évoluer dans un contexte scolaire, il semble qu’ils pensaient à des langues plus

traditionnellement étudiées à l’école, comme l’anglais ou l’allemand.

A un moment, un enfant m’a timidement demandé : « vous le voulez bien en arabe ? », et

l’écriture de cette traduction a déclenché tout le reste de l’activité. Tous avaient envie de

proposer une langue et ceux qui ne pouvaient proposer que quelques mots ont vraiment eu

besoin que je les note aussi au tableau.

Mis en forme : Couleur depolice : Violet

Mis en forme : Couleur depolice : Violet

Mis en forme : Couleur depolice : Violet

Mis en forme : Couleur depolice : Violet

Supprimé :

Supprimé : 1:

Supprimé : ,

Supprimé : ,

Supprimé : ,

Page 33: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

32

C’est ainsi que j’ai obtenu 3 langues supplémentaires à comparer et que j’ai réalisé une

affiche bilan :

Comparons nos langues

Français : J’aimerais changer la place des choses.

Turc : Yerlerini dégistirmeyi seviyorum.

Arabe (sons) : Ana bari nbédil elblassa ndiel lahouayige.

Wolof : Bege ma changer se balle bie.

Guinéen : Bè gnala ni bola djain na la djain.

Nos langues ne fonctionnent pas de la même manière :

1) En ce qui concerne l’ordre des mots dans la phrase : en turc le verbe est à la fin, alors

que dans les autres langues il est au début. Dans certaines langues (arabe et guinéen) il y a

des mots supplémentaires pour préciser le sens de la phrase ;

2) En ce qui concerne la longueur des phrases : en turc les phrases sont plus courtes qu’en

français, wolof et guinéen, alors qu’en arabe elles sont plus longues ;

3) En ce qui concerne les déterminants : en turc et en guinéen il n’y a pas de déterminant,

mais en guinéen, le genre est marqué par des suffixes alors qu’en turc il n’y a pas de

genre.

Analyse de la séance :

La séance s’est avérée être très enrichissante tant du point de vue linguistique que du point

de vue culturel. Les élèves sont entrés avec enthousiasme dans l’activité et ont montré une

réelle écoute à l’égard de l’ENA.

Dès la distribution du poème il y a eu une véritable mise en hypothèse motivée par l’enjeu

énigmatique du support, ils avaient perçu qu’il s’agissait d’une autre langue sans pour autant

l’identifier et la comprendre. L’identification de la langue est cependant rapidement apparue

au sein de l’îlot auquel appartenait l’ENA, pour peu à peu se propager au reste de la classe.

Mis en forme : Police :10 pt

Supprimé : ¶¶¶¶¶¶¶

Supprimé :

Supprimé :

Supprimé :

Page 34: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

33

Cette anticipation n’a pas réduit la motivation des élèves, au contraire ils étaient friands de

questions sur la langue.

La prise d’indices du début de la séance (« qu’est ce que ce texte ? ») a montré un

réinvestissement des connaissances des élèves en poésie et a facilité leur entrée dans le texte

permettant ainsi l’étude plus spécifique des aspects linguistiques. Après la distribution du

texte en français, lorsqu’il a été question d’établir des correspondances entre les deux langues,

les élèves se sont appuyés sur le fonctionnement du français pour identifier les différents

éléments de la phrase de référence. Par exemple, en ce qui concerne le verbe, les enfants

restaient sur les premiers mots de la phrase turque, ils essayaient de découper le premier mot

(cas possible de fusion entre le pronom personnel et le verbe) mais ils ne pensaient pas à

proposer le dernier.

Phrase de référence :

J’aimerais changer la place des choses. verbe conj.

Yerlerini dégistirmeyi seviyorum. verbe conj.

De cette analyse syntaxique ont découlé plusieurs observations : l’ordre des mots est

différent dans les deux langues, il n’y a pas de déterminant devant les noms communs en turc

ce qui diminue le nombre de mots et donc la longueur des phrases en général.

Lors de la recherche d’autres traductions, trois langues étrangères ont été proposées par

les élèves (l’arabe, le wolof et le guinéen), ces langues étant essentiellement « parlées » au

sein du foyer familial. Les enfants étant arrivés en France avant l’âge de 5 ans, l’écriture de la

phrase en arabe n’a pu s’effectuer que phonétiquement alors que pour les deux autres

traductions, l’alphabet étant le même, le codage en a été facilité. Lorsqu’il a été question de

mettre par écrit la phrase arabe, des conventions ont dû être adoptées : la phrase a été écrite de

gauche à droite et les mots ont été écrits « comme on les entendait ». A ce moment là, les

enfants se sont rendus compte de mes difficultés à écrire des sons que je n’avais pas

l’habitude d’entendre. Ce fut l’occasion de parler avec les élèves du « crible phonologique »,

sans pour autant le nommer : les nouveaux-nés ont la capacité d’entendre la totalité des sons

de toutes les langues du monde mais peu à peu un crible se met en place du fait de l’écoute

exclusive de la langue maternelle ; ce qui explique que par la suite, nous n’entendions plus

que les sons de notre langue. « Mais si [nous] entendons parler une autre langue, nous

employons involontairement pour l’analyse…le « crible phonologique » de notre langue

maternelle qui nous est familier. Et comme ce crible ne convient pas pour la langue étrangère

Page 35: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

34

entendue, il se produit de nombreuses erreurs et incompréhensions. Les sons de la langue

étrangère reçoivent une interprétation phonologique inexacte, puisqu’on les fait passer par le

« crible phonologique » de sa propre langue », (d’après TROUBETZKOY dans Principes de

Phonologie).

Dans un premier temps, l’élève qui dictait ne comprenait pas pourquoi je ne transcrivais pas

exactement ce qu’il disait malgré le soin qu’il apportait à son articulation ; dans un second

temps ils en ont conclu que cela venait du manque d’habitude à entendre ces sonorités. Les

élèves ont compris les difficultés que rencontrait l’ENA dans le choix du genre des noms car

pour elle les déterminants sont absents de sa grammaire.

A l’issue de cette séance, les élèves ont mieux cerné toutes les difficultés de

l’apprentissage d’une langue avec tout ce que cela peut comporter comme codage spécifique,

ils ont également vu que l’ENA avait des compétences dans sa langue maternelle en lecture

mais aussi en écriture. Des frustrations se sont fait sentir chez certains élèves qui n’ont pu

proposer une traduction complète, bien qu’un de leurs parents parle une seconde langue à la

maison (italien, espagnol et allemand). Des mots ont dû être traduits pour permettre à ses

élèves d’assouvir leur désir de faire partager leurs connaissances.

Remarques personnelles sur le déroulement de la séance 2 :

E.B : Pour commencer, j’ai demandé aux enfants ce qu’ils avaient retenu de la dernière

séance. Plusieurs élèves ont pris la parole spontanément : « on a écrit une phrase dans

plusieurs langues », « on a appris des mots dans différentes langues », « on a lu un poème

turc »… C’est à ce moment-là, que des élèves qui s’étaient renseignés auprès de leur famille,

ont voulu modifier des éléments dans les phrases qui avaient été inscrites au tableau.

J’ai proposé ensuite, à certains de lire le poème turc. Plusieurs élèves se sont prêtés au jeu,

la lecture du poème s’est faite entièrement sans véritablement poser de problème. Cette

situation les a fait cependant beaucoup rire car ils se doutaient, après les quelques mots lus par

l’ENA lors de la première séance, que leur prononciation n’était pas exacte. Ceci a été

confirmé lorsque cette dernière a effectué ensuite une lecture magistrale du poème.

Cette activité autour d’une autre langue s’est finalisée par l’élaboration collective d’un

poème traduit en turc. Après l’analyse du poème initial, les élèves rassemblés en quatre

groupes ont dû élaborer une strophe du nouveau poème. Chaque strophe devait reprendre la

structure répétitive du poème de départ, et pour faciliter leur mise en activité, étant donné que

nous n’avions que deux séances pour mener à bien notre projet, j’ai imposé l’amorce des trois

Mis en forme : Retrait :Première ligne : 0 cm

Supprimé :

Supprimé : 2:

Page 36: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

35

vers. Ils étaient cependant libres de choisir le nombre de pieds par vers et la présence ou non

de rimes. Un élève de chaque groupe est venu au tableau lire ce qui avait été écrit. Après

chaque passage, les autres élèves de la classe donnaient leurs avis sur la cohérence du texte et

sur le respect des consignes. Le choix de l’ordre des strophes s’est fait collectivement en

fonction du contenu et de leur ressenti.

Pour voir la vie en rose

Ah si l’on pouvait

Changer

La place de certaines choses…

Comme les fleurs moroses

En parfum de roses

Pour que la vie soit plus rose.

Ah si l’on pouvait

Changer

La place de certaines choses…

Comme la guerre dévastatrice et tueuse

En parfum d’amour

Pour un monde meilleur et plein de paix.

Ah si l’on pouvait

Changer

La place de certaines choses…

Comme les animaux maltraités

En animaux heureux

Pour qu’ils soient libres de se promener dans la forêt.

Ah si l’on pouvait

Changer

La place de certaines choses…

Comme les visages pleins de haine

En pétales de roses

Pour rendre les gens plus gais.

Les élèves de la classe de CM1/CM2

Solmuş çok çiçek için

Keşke yerini

Değiştire bilseydik

Bazi şeylerin

Solmuş çiçekler gibi

Gül kokulu

Solmuş çok çiçek için.

Keşke yerini

Değiştire bilseydik

Bazi şeylerin

Yikici ve öldürücü savaşlar gibi

Sevgi kokulu

Güzel bir dünya ve bariş için

Keşke yerini

Değiştire bilseydik

Bazi şeylerin

Bakimsiz hayvanlar gibi

Mutlu hayvanlar

Özgürce ormanda dolaşmak gibi

Keşke yerini

Değiştire bilseydik

Bazi şeylerin

Sevimsiz yüzler gibi

Yapraksiz gül gibi

Insalara mutluluğu gerivermek için

Page 37: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

36

Pendant ce temps, l’ENA est partie avec Anne-Laure traduire le début du poème en turc. Il

a été difficile de lui expliquer certains mots en français et il a fallu recourir à l’utilisation d’un

imagier ainsi que d’un traducteur de mots turc en ligne, rendu possible par la présence d’un

ordinateur relié à Internet dans la classe.

L’ENA a pratiquement pu traduire le poème dans sa globalité et l’a lu à ses camarades.

Pour finir de compléter le poème ainsi obtenu et s’assurer de l’exactitude de son contenu,

nous avons fait appel à une traductrice turque.

Je leur ai ensuite distribué un questionnaire écrit (cf. annexe 12), de manière à voir ce que

les enfants avaient retenu de ces deux séances, et afin qu’ils évoquent pour certains, et

s’interrogent pour d’autres, sur les difficultés que pouvait vivre un élève arrivant sur notre sol.

Pour finir, un rappel sur les spécificités de cette langue a été fait, avec l’appui de l’affiche

récapitulative élaborée lors de la séance précédente.

Analyse de la séance 2 :

La seconde séance qui s’est déroulée une semaine plus tard, a été l’occasion de demander

aux élèves ce qu’ils avaient retenu de leurs découvertes. Aussitôt, des élèves sont intervenus

pour dire qu’ils s’étaient renseignés auprès de leurs parents, sur l’écriture ou la traduction de

certains de mots. Ainsi, des corrections ont pu être apportées dans l’écriture du verbe

conjugué en Wolof et de nouvelles traductions, comme l’italien, sont apparues. Nous avons

pris conscience, à travers cette attitude, de l’impact qu’avait engendré l’activité proposée et de

l’enthousiasme qu’elle avait suscité chez les élèves.

Les tentatives de lecture du poème turc par différents élèves de la classe leur ont permis

de se confronter aux difficultés de cette tâche. Bien que le turc possède le même système

alphabétique que le nôtre, les élèves ont vite constaté qu’il contenait des signes absents de

notre alphabet ou présents sur d’autres lettres. C’est le cas des trémas sur le « u », que l’on ne

retrouve pas sur cette lettre dans notre langue et qui vont permettre en turc, de distinguer le

son [u] du son [y]. Par exemple le mot « kuslarin », qui signifie « oiseau » doit se lire

« kouslarin ». Après avoir mis en évidence quelques erreurs, l’ENA a proposé une lecture du

poème qui fut l’occasion d’écouter les sonorités spécifiques à cette langue. Ce moment a été

marqué par une grande qualité d’écoute de la part de ses pairs.

L’écriture des strophes du poème s’est bien déroulée et a permis de mener à bien le projet

d’écriture collective. L’envie s’est fait ressentir dans les différents groupes, de parler des

valeurs universelles de paix et d’espoir. Le contenu du poème de départ et l’étude d’une autre

Page 38: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

37

langue et donc d’une autre culture ont certainement contribué à cette rédaction. Les enfants se

sont rassemblés à travers des idées, quelles que soient leurs origines.

Le questionnaire distribué en fin de séance, a été l’occasion pour les enfants de mettre en

mots leur ressenti face à l’activité mais également de se projeter plus loin, en se mettant à la

place de l’ENA. Les élèves ont estimé que l’apprentissage du français (parler et comprendre)

et le fait de devoir quitter ses proches seraient particulièrement difficiles pour eux. L’ENA a

précisé dans son questionnaire qu’elle avait emporté des livres turcs, ce qui laisse penser

qu’ils répondent à un réel besoin d’y retrouver sa langue et sa culture.

La volonté des élèves d’apprendre le poème réalisé en turc, a traduit leur enthousiasme

face à l’activité et a confirmé notre hypothèse qui consistait à mettre en avant les compétences

de l’élève nouvellement arrivée en France, par la découverte d’une langue étrangère.

Synthèse :

Les objectifs visés par ces séances ont pu être atteints, les élèves ont développé une réelle

empathie vis-à-vis de leur camarade. A travers plusieurs activités (lecture du poème,

traduction des phrases, création des strophes), ils ont touché du doigt les efforts que doit

fournir chaque jour l’ENA pour participer à la classe et se faire accepter. Ce dispositif a été

d’autant plus enrichissant du fait de la multiplicité des cultures en présence dans cette classe

et son impact en a été d’autant plus fort, beaucoup d’élèves avaient vécu cette situation

(anciens ENA) et se sentaient concernés.

Prolongements possibles :

Il aurait été possible de poursuivre le travail débuté par différentes activités :

- traduire le poème dans d’autres langues, - s’enregistrer en lisant dans une langue différente de la sienne, - écouter des poèmes dits dans d’autres langues, - réaliser une exposition sur différents pays en travaillant autour de leurs spécificités

culturelles (langue, gastronomie, situation géographique, système scolaire, art…).

Toutes ces pistes de travail ne constituent en aucun cas une liste exhaustive de ce qu’il est possible de

mettre en place lorsqu’on accueille un ENA, cependant elles montrent les éléments essentiels qui doivent être

pris en compte pour faciliter son intégration dans la classe. Les maîtres mots sont « jeu », « échanges »,

« interculturalité » et « passerelles dans les apprentissages ».

Supprimé : ’Ilknhur

Supprimé :

Page 39: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

38

CONCLUSION

A travers ce mémoire, nous avons souhaité analyser tous les paramètres pouvant

intervenir dans l’intégration scolaire et sociale d’un élève nouvellement arrivé en France. Il

nous semble avéré que le futur de ces enfants soit conditionné par l’ensemble de ces facteurs.

Pour entrer dans les apprentissages un enfant doit être « libéré » des soucis extérieurs liés à sa

migration, c’est pourquoi il faut tenir compte de son vécu personnel, de manière à lui offrir un

espace de confiance, d’acceptation et d’individualité adapté.

Le rôle de l’enseignant et le regard qu’il porte sur cet enfant sont primordiaux. Bien que

toute l’équipe éducative soit impliquée, il reste la personne de référence au contact de laquelle

l’enfant progresse. Il n’est pas surprenant que les enseignants éprouvent des inquiétudes et se

sentent démunis face à l’accueil de ces enfants, cependant il existe de la documentation

pédagogique permettant d’organiser rapidement une première structuration des

apprentissages.

De plus, tout ce qui est mis en place en classe va être source de multiples interactions

intenses et riches. Cette arrivée inopinée va apporter un épanouissement de grande qualité à

l’ensemble de la classe, aussi bien aux élèves qu’à l’enseignant. Des valeurs essentielles de

notre école et de notre citoyenneté prennent place dans la classe : tolérance, acceptation de la

différence, entraide, échanges culturels…Il se développe ainsi une curiosité et une ouverture

aux autres qui permettent aux enfants d’apprendre à vivre ensemble.

Mis en forme : NonSurlignage

Supprimé : ,

Supprimé : b

Supprimé : ,

Page 40: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

39

BIBLIOGRAPHIE 1. Extraits - BOYZON-FRADET Danielle, mars 1997, « Enseigner-apprendre la langue scolaire, un enjeu fondamental pour les enfants issus de l’immigration » dans Question de langue n° 108, Centre National de Documentation Pédagogique, p.70 à 73. - BAUTIER Elisabeth, mars 1997, « Usage identitaires du langage et apprentissage, quel rapport au langage, quel rapport à l’écrit ? » dans Question de langue n° 108, Centre National de Documentation Pédagogique, p.7. - DERUGUINE Nathalie et RAFONI Jean-Charles, 2003, « Evaluation-lecture en langue d’origine cycle II et III » dans Passerelles en quinze langues, Les cahiers Ville Ecole Intégration, SCEREN, Centre National de Documentation Pédagogique, p.105. - LAZARIDIS Marie, juin 2001, « La scolarisation des enfants de migrants : entre intégration républicaine et mesures spécifiques » dans Accueillir les migrants n°125, Centre National de Documentation Pédagogique, p.198. - TROUBETZKOY N.S, 1986, dans Principes de Phonologie, Klincksieck, Paris, p.54. 2. Ouvrages - Bulletin Officiel France. Ministère de l’Education Nationale, « Scolarisation des nouveaux arrivants et des enfants du voyage », 25.04.2002. Bulletin Officiel du Ministère de l’Education Nationale n°10 spécial du 25.04.2002. - CHARPENTIER Monique, (IA de Strasbourg) 1995, « Comparaison des systèmes France/Turquie » dans Mieux connaître pour mieux scolariser, ONISEP Alsace. 3. Documents électroniques, extraits de site Internet - LECLERC Jacques, 15 novembre 2005, « Turquie » dans L’aménagement linguistique dans le monde [en ligne], Québec, TLFQ, Université Laval. Le 25.01.2006. Disponible sur Internet : http://www.tlfq.ulaval.ca/axl/asie/turquie-alphabet.htm - LECLERC Jacques, 15 novembre 2005, «La révolution linguistique de Mustafa Kemal Atatürk » dans L’aménagement linguistique dans le monde [en ligne], Québec, TLFQ, Université Laval. Le 25.04.2006. Disponible sur Internet : http://www.tlfq.ulaval.ca/axl/asie/turquie-alphabet.htm - NEGRE Xavier, 3 décembre 2002, « L’alphabet arabe » dans Lexilogos, mots et merveilles des langues d’ici et d’ailleurs [en ligne], France, près de la Vieille Chapelle de la cité phocéenne Massalia. Le 24.01.2006. Disponible sur Internet : http://www.lexilogos.com/arabe_alphabet.htm

Mis en forme : NonSurlignage

Mis en forme : Soulignement

Supprimé :

Supprimé : date

Supprimé : ¶

Page 41: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

40

- Association Chinois.org, dirigée par Danièle THERY, 16.01.2006. « Sinogrammes » dans Des clés pour la chine [en ligne], Biarritz, France. Le 25.01.2006. Disponible sur Internet : http://perso.numericable.fr/~jtheryjean37/dt.chine/public/pages/ideo.htm 4. Support multimédia - AUGER Nathalie, 2005, « Démarche d’apprentissage du français auprès d’enfants nouvellement arrivés (ENA) » dans Comparons nos langues [DVD], Montpellier, France SCEREN.

Supprimé : e

Supprimé : ¶

Supprimé :

Supprimé :

Page 42: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

41

TABLE DES ANNEXES

Annexe 1 : Alphabets de différentes langues

Illustration 1° partie « Le choc de l’arrivée », contexte linguistique (4)

- Alphabet chinois

- Alphabet turc

- Alphabet arabe

Annexe 2 : Correspondance des classes en France et en Turquie

Illustration 2° partie « Le rôle de l’école », les structures d’accueils (1 b)

Annexe 3 : Evaluation de compétences en lecture en langue d’origine, cycle 3

Illustration 2° partie « Le rôle de l’école », les structures d’accueils (1 b)

Annexe 4 : Tableau des premières consignes

Illustration 2° partie « Le rôle de l’école », les structures d’accueils (1 b)

Annexe 5 : Documentation pédagogique fournie par le CASNAV

Illustration 2° partie « Le rôle de l’école », les structures d’accueils (1 c)

Annexe 6 : Rencontre avec un membre de l’association A.V.E.C.

Illustration 2° partie « Le rôle de l’école », démarche personnelle de l’enseignant (2 a)

Annexe 7 : Questionnaire « prise de contact » avec l’ENA

Illustration 2° partie « Le rôle de l’école », démarche personnelle de l’enseignant (2 b)

Annexe 8 : Fiche de liaison 2005/2006

Illustration 2° partie « Le rôle de l’école », démarche de toute une équipe pédagogique (3)

Annexe 9 : Poème turc traduit en français Illustration 3° partie « Mise en place de pratiques pédagogiques », mise en application (2 d)

Page 43: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

42

Annexe 10 : Fiches de préparation

Illustration 3° partie « Mise en place de pratiques pédagogiques », mise en application (2 d)

Annexe 11 : La réforme de l’alphabet turc

Illustration 3° partie « Mise en place de pratiques pédagogiques », mise en application (2 d)

Annexe 12 : Questionnaire donné aux élèves à l’issue des séances interculturelles

Illustration 3° partie « Mise en place de pratiques pédagogiques », mise en application (2 d)

Page 44: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

43

ANNEXE 1 : Alphabets de différentes langues

L’alphabet chinois

L’alphabet chinois n’est pas un alphabet au sens où nous l’entendons. L’écriture de la langue se fait à l’aide de signes que l’on appelle des sinogrammes, et dont la signification ne change pas, même si la prononciation peut varier suivant les régions. Il existe 50 000 sinogrammes qui s’écrivent à l’aide de 8 traits de base; ils sont répartis en 3 groupes :

-Les pictogrammes

Ce sont des dessins stylisés de la réalité.

Par exemple, le pictogramme « MU » évoque un arbre et ses branches, il signifie arbre.

Ils peuvent entrer dans la composition de signes plus complexes formant ainsi des clés ou

des radicaux, à la base de toutes les écritures et donnant des indications sur la « famille de mots ».

Par exemple, les mots liés aux arbres ou au bois comprendront en général cette clé : « LI » = Prunier « BAN » = Planche

- Les idéogrammes

Ils sont composés de plusieurs pictogrammes et traduisent une idée, un concept. « LIN » qui signifie Forêt s’écrit

-Les idéophonogrammes

Ils donnent une indication graphique du son.

Par exemple « Se laver les cheveux » qui n’a qu’un très lointain rapport avec les arbres, se prononce aussi « MU » et s’écrit

Un élève chinois arrivant en France doit donc faire face à un nouveau codage écrit très différent tant du point de vue du geste graphique, que du point de vue du concept lui-même. La notion de combinatoire de notre système n’est donc pas acquise auparavant. (Bibliographie : association Chinois.org, 16.01.2006)

Page 45: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

44

L’alphabet turc L’alphabet Turc est composé de 29 lettres dont 6 voyelles avec un codage graphique identique au nôtre. Il présente de nombreuses correspondances avec l’alphabet français, il s’écrit cependant plus simplement, la plupart du temps comme il se prononce. Il existe quelques différences : - certaines lettres ne se prononcent pas comme la lettre homologue française ; - trois lettres françaises n’existent pas (q, w, x) leur phonie est assurée par d’autres lettres (k, v, ks) ; - certaines lettres possèdent un signe diacritique (tréma, cédille, « vague ») qui modifie leur prononciation classique.

Lettre turque Prononciation française Exemple Prononciation

a b c ç d

[a] [b] [dj] [tch] [d]

araba bir cicim çam doktor

araba bir djidjim tcham doctor

e f g ğ h

[é] [f] [g] allonge la voyelle précédente[h]

televizyon Fakir galip sağol lahana

télévisionn(e) fakir galip sa:aol lahana

i ι (i sans point) j k l

[i] [ë] dans peur[j] [k] [l]

iki rakι Jale topkapi lavabo

iki rake Jalé topkapeu lavabo

m n o ö p

[m] [n] [o] [eu] dans peu[p]

mimare nema otel döner pamuk

mimaré néma hôtel deunèr pamouk

r s ş t

[r] [s] [ch] [t]

radar sarik şişe tuz

radar sarik chiché touz

u ü v y z

[ou] [ü] dans flûte[v] [ill] [z]

pul Ürgüp vapur kuyum Zürafa

poul Urgup vapour kouilloum Zurafa

Un enfant Turc arrivant en France aura des facilités à entrer dans la lecture (aspect

combinatoire) et l’écrit (geste graphique, codage oral) mais aura plus de difficultés lors de l’oralisation à cause des différences de prononciations à mémoriser. Cependant de nombreuses compétences en lecture et écriture pourront être directement transférées de la langue maternelle. (Bibliographie : Leclerc Jacques, 15.11.2005)

Tableau mis en forme

Supprimé : .

Supprimé : .

Page 46: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

45

L’alphabet arabe L’alphabet arabe comporte 28 lettres, mais il ne dispose, en réalité, que de quinze caractères. Il possède treize consonnes et trois voyelles différentes : les voyelles brèves, les voyelles doubles et les voyelles longues. Les principales différences avec le français: - l’arabe s’écrit de droite à gauche, - sept lettres n’existent pas (o, p, u, v, w, x, y),

- une même lettre peut s’écrire de différente façon selon sa place dans le mot :

Par exemple : la lettre ( a )

toute seule

au début du mot

au milieu du mot

à la fin du mot

Un enfant arabe, arrivant en France, aura des facilités à entrer dans la lecture (aspect

combinatoire, plusieurs graphèmes pour un phonème) mais il rencontrera des difficultés liées au sens de l’écriture et de la lecture (de la droite vers la gauche) et à l’absence de correspondance exacte entre les phonétiques romanes et arabes.

Lettre ر ذ د خ ح ج ث ت ب ا

Appellation Alif Baa’ Taa’ Thaa’ Jiim Haa’ Khaa’ Daal Dhaal Raa’

Phonétique [A] [B] [T] [Th] [J] [H] [Kh] [D] [Dh] [R]

Lettre ف غ ع ظ ط ض ص ش س ز

Appellation Zaay Siine Chiine Saad Daad Taa’ Dhaa’ ‘Aïn Ghaïn Faa’

Phonétique [Z] [S] [Ch] [Ss] [Dd] [Tt] [Dh] [‘A] [Gh] [F]

Lettre ء ي و ه ن م ل ك ق

Appellation Qaaf Kaaf Laam Miim Noun Haa’ Waawe Yaa’ Hamza

Phonétique [Q] [K] [L] [M] [N] [H] [W] [Y] [A] Mis en forme : Couleur depolice : Automatique

Supprimé : :

Page 47: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

46

ANNEXE 2 : Correspondance des classes en France et en Turquie

Page 48: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

47

ANNEXE 3 : Evaluation de compétences en lecture en langue d’origine, cycle 3

Page 49: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

48

ANNEXE 4 : Tableau des premières consignes

Page 50: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

49

ANNEXE 5 : Documentation pédagogique fournie par le CASNAV

Page 51: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

50

Page 52: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

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Page 53: Mieux les comprendre pour mieux les integrer

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ANNEXE 6 : RENCONTRE AVEC UN MEMBRE DE L’ASSOCIATION A.V.E.C (Association Vivre Ensemble dans le quartier des Cévennes)

L’association A.V.E.C. du quartier des Cévennes, propose différentes aides aux

familles arrivant de l’étranger et qui ont donc des besoins spécifiques et immédiats. Nous avons rencontré Mme Eliette CADENAT, travaillant au sein de cette association.

Quels sont les types de prestations proposés par l’association ? Il existe plusieurs aides diversifiées, destinées aux adultes et aux enfants : - accompagnement scolaire, - activités de loisirs type « centre aéré » les mercredi, samedi et vacances scolaires, - alphabétisation, - français langue étrangère (F.L.E.), - accueil au sens large : aide aux démarches administratives (remplissage des

formulaires), accompagnement dans les diverses administrations concernées (mairie, préfecture, sécurité sociale), accompagnement auprès de professionnels (assistantes sociales, avocats).

Par quel biais les familles sont-elles informées de l’existence de l’association ?

Lors de l’arrivée des familles sur le sol français, il existe un centre d’accueil qui informe les migrants des associations proches de leur domicile ; il existe plusieurs associations disséminées au sein des quartiers de la ville. Cependant, A.V.E.C. se fait essentiellement connaître par des affiches publicitaires et « le bouche à oreille ». Quelles sont les principales attentes des personnes qui viennent à l’association ?

La principale aide concerne l’apprentissage de la langue française, mais beaucoup de familles demandent également l’aide aux élèves en difficulté : elles ne sont pas capables de suivre la scolarité (aide aux devoirs) de leurs enfants en français. Y a-t-il un lien entre l’association et l’école des enfants qui suivent l’accompagnement scolaire ?

Oui, un membre de l’association accompagné des parents peut être amené à rencontrer le ou les enseignants d’un enfant en difficulté, de manière à comprendre ses besoins et à savoir comment l’aider au mieux. Ce fut le cas, il y a peu de temps, pour un collégien dont la rencontre avec le principal de son établissement a permis de débloquer une situation. Quels sont les tarifs de ces prestations ?

L’association fonctionne en partie grâce aux subventions de la mairie et du département et en partie grâce aux montants des adhésions. La participation individuelle est versée pour l’année ; à titre d’exemple, la cotisation annuelle pour les cours d’alphabétisation est de 20 euros ; pour le français langue étrangère, elle est de 30 euros et pour l’accompagnement scolaire, il faut compter 8 euros par enfant. Les sorties proposées dans le cadre des vacances scolaires sont soumises à une participation effective. Qui fréquente les différentes activités ?

Les cours d’alphabétisation sont donnés exclusivement aux femmes qui ne souhaitent pas la présence des hommes pour cet apprentissage. Les cours de F.L.E sont quant à eux mixtes.

Supprimé : €00

Supprimé : , celle

Supprimé :

Supprimé : de

Supprimé : €00

Supprimé : celle

Supprimé : de

Supprimé : €00

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ANNEXE 7 : Questionnaire « prise de contact » avec l’ENA

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ANNEXE 8 : Fiche de liaison 2005/2006

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ANNEXE 9 : Fiches de préparation

Comparons nos langues Place dans les Instructions Officielles : Deux domaines sont concernés :

- Littérature : écrire un texte poétique à partir de la littérature (dire, lire, écrire), - Education civique : s’ouvrir au monde en apprenant l’existence d’une communauté de

langues et de cultures.

Séance 1

Objectifs :

- L : dégager la structure récurrente du poème, - EC : comparer des langues pour découvrir l’existence de différents systèmes

linguistiques. → Compétences : - s’appuyer sur ses connaissances en français pour reconnaître un type d’écrit (ici un

poème à partir de la mise en page, du titre, de l’auteur et de la structure répétitive) écrit dans une autre langue,

- associer des mots qui veulent dire la même chose dans différentes langues (français, turc et arabe),

- utiliser ses observations pour analyser la syntaxe spécifique aux trois langues : utilisation des déterminants et genre des noms, place du verbe dans la phrase.

Déroulement :

1. Rôle de l’enseignante : distribution du texte turc ► Activités des élèves : les élèves lisent individuellement et silencieusement le document. 2. Observation des questions écrites au tableau : - Qu’est ce que ce texte ? (ex : une recette de cuisine ? un conte ?...) - A quoi le vois-tu ? - Comment est-il écrit ? (code, signes, langue ?) - Que raconte-t-il ? (seule l’ENA aura la réponse attendue) ► Ils répondent au questionnaire individuellement sur le cahier de brouillon. 3. Mise en commun, réponse aux questions 4. Distribution de la traduction française

- validation des hypothèses de lecture « Retrouvez la traduction française d’un mot turc qui revient plusieurs fois dans le texte. » ► Comparer les textes pour établir des correspondances et dégager la structure répétitive.

15 min

10 min

Mis en forme : Non souligné

Mis en forme : Non souligné

Mis en forme : Non souligné

Supprimé : :

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5. Ecriture d’une phrase relativement simple du poème (sujet/verbe/complément) au

tableau en français et en turc. ► Venir entourer au tableau d’une même couleur les couples de mots identiques Se rendre compte de certaines différences :

− position des mots dans la phrase. − absence de déterminant.

6. Demander si quelqu’un est capable de venir nous proposer une traduction dans une

autre langue (l’arabe est attendu étant donné l’origine des élèves de la classe) ► Ecriture de la phrase de référence en arabe au tableau Poursuite de la comparaison. 7. Synthèse : réalisation d’une affiche commune de classe contenant les points communs

et les différences des trois langues. ► Proposer ses idées, discuter. Matériel : - 23 photocopies du poème turc et traduit en français. - 1 transparent pour projeter au tableau. - questionnaire écrit au tableau. - une affiche pour la synthèse. ► cahier de brouillon. cahier de littérature (pour coller les poèmes). Support utilisé : - Poème turc d’Üzeyir Lokman ÇAYCI , traduit en français par Yakup YURT : « LE SOLEIL EST NÉ POUR LA TRISTESSE » Observations : - Hypothèses émises par les enfants : poésie ou chanson - Question orale posée spontanément par un enfant de la classe à l’ENA : « Est-ce qu’on lit le turc de droite à gauche, ou de gauche à droite ? » - Un silence total survient lorsque l’ENA écrit la phrase de référence au tableau. - D’autres enfants ont spontanément proposé la traduction dans leurs langues maternelles : l’arabe (transcrit phonétiquement à l’aide de notre alphabet), le wolof (dialecte sénégalais) et le guinéen (Nouvelle Guinée).

20 min

15 min

Mis en forme : Non souligné

Mis en forme : Non souligné

Mis en forme : Non souligné

Supprimé : p

Supprimé : :

Supprimé : Ilknhur

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Séance 2 Objectifs :

- L : Ecriture collective d’un poème « à la manière de », en 2 langues, - EC : Participer à l’élaboration d’une production interculturelle.

Partager nos cultures, échanger nos connaissances.

→ Compétences : - s’engager dans une production collective - être capable de réinvestir les connaissances liées au type d’écrit (poème) - apporter ses connaissances en langue maternelle (ENA), pour traduire le poème construit

Déroulement : 1. Rappel : « De quoi vous souvenez-vous à propos du poème de la dernière fois ? Qu’avait-il de particulier ? » « Qu’aviez-vous fait lors de la dernière séance ? » ► Rappel de la structure répétitive, du nom de l’auteur, du titre du poème, de la langue. Rappel de la phrase qui a été traduite dans différentes langues (en turc, en arabe de manière phonétique, en wolof et en guinéen). 2. Lecture silencieuse puis à haute voix du poème turc. ► Des élèves s’essaient à la lecture pour se rendre compte des difficultés liées à la prononciation. ► L’ENA valide (car elle est la seule à connaître le turc) et lit le poème.

3. Contenu du poème « De quoi parle t-il ? » L’explication du contenu n’ayant pas été évoquée lors de la première séance, elle est abordée ici car nécessaire pour la suite du travail. ► Le message transmis par l’auteur: changer les choses pour améliorer la vision du monde. 4. Lancement du projet de la production collective Présentation de la structure répétitive commune à chaque strophe : Ah si l’on pouvait Changer La place des choses et de l’amorce imposée sur 3 vers : Comme…………. En ……………… Pour ……………. Le choix du nombre de pieds par vers est libre. ► Ils peuvent collectivement proposer des exemples. 5. Ecriture du poème ► Par groupes de 4, les élèves élaborent une strophe du poème sur leur cahier de brouillon. élèves en difficultés : proposer des aides à l’écriture construites en amont.

10 min

25 min

10 min

Mis en forme : Non souligné

Mis en forme : Non souligné

Mis en forme : Non souligné

Supprimé : ¶¶¶

Supprimé : ?

Supprimé : :

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6. Mise en commun Acceptation des productions des différents groupes (présence de la structure répétitive, respect de l’amorce, cohérence du texte). 7. Synthèse : distribution d’un questionnaire écrit :

- « Qu’avons-nous appris depuis le début du travail ? » - « Si tu étais à la place de l’ENA, qu’est-ce qui serait pour toi le plus difficile ? » - « Qu’est-ce que tu aimerais emporter avec toi, si tu devais quitter ton pays origine ? »

► Les élèves s’interrogent sur les difficultés d’arriver dans un nouveau pays et d’être confronté à l’apprentissage d’une nouvelle langue. ► En parallèle, l’ENA commence déjà la traduction du poème. 8. Conclusion collective Rappel des similitudes et des différences entre langue orale et langue écrite. ► l’ ENA nous donne son ressenti sur ses difficultés.

Pour terminer notre travail, nous ferons parvenir le poème dactylographié et traduit en turc à la classe.

Matériel : - 23 questionnaires écrits - 1 transparent pour projeter au tableau les deux poèmes ► cahier de brouillon

Observations :

- Les enfants étaient très demandeurs d’une lecture orale du poème turc par l’ENA, d’ailleurs cet instant a été marqué par un silence important et une totale écoute.

- Certains enfants s’étaient renseignés auprès de leurs parents pour avoir d’autres traductions, notamment en italien.

10 min

5 min

Mis en forme : Non souligné

Mis en forme : Non souligné

Supprimé : ?

Supprimé : ?

Supprimé : ?

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ANNEXE 10 : Poème turc traduit en français

GÜNES ACILARA DOGDU

Keske yerini Degistirebilseydik Bazi seylerin... Karanfil tasiyan Bakislar gibi,

Kaynagindan akarak...

El degmeden Tüylerine Kuslarin.

Huzur dolu Sabahlara kosarak.

GUI kokularini

Tasisavdik Her yere... Gül yüzlü

Insanlardan ta~arak...

Keske yerini Degistirebilseydik Bazi seylerin...

Üzeyir Lokman ÇAYCI

LE SOLEIL EST NÉ POUR LA TRISTESSE

Ah si l'on pouvait

Changer La place de certaines choses...

Comme les regards Porteurs d'oeillets,

En coulant de source...

Sans toucher de la main Le plumage

Des oiseaux... En courant vers les matins

Pleins de paix.

Ah si l'on pouvait Diffuser partout

Les parfums de roses... En débordant des gens

A visages en rose...

Ah si l'on pouvait Changer

La place de certaines choses...

Üzeyir Lokman ÇAYCI Traduit par Yakup YURT

Supprimé : ¶¶¶¶¶¶¶¶¶¶¶¶¶¶¶

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ANNEXE 11 : La réforme de l’alphabet turc

Après l'effondrement de l'Empire ottoman en 1918, Mustafa Kemal Atatürk prit le pouvoir

en Turquie en 1920 […] et entreprit une politique de modernisation et de laïcisation de l'État

[…]. L'un des volets de la politique de modernisation porta le nom turc de Dil Devrimi, c'est-

à-dire la « révolution linguistique ». Farouchement moderniste, Atatürk considérait comme

révolu l'époque des empires fondés sur une base religieuse et refusait la magistrature suprême

de l'islam sur son pays [...]. Mustafa Kemal considérait également que la réorganisation de

l'État turc devait passer par un changement linguistique radical. Or, l'histoire compte peu

d'exemples de ce genre où un gouvernement a entrepris des changements linguistiques d'une

aussi grande envergure dans un délai aussi court et, il faut le reconnaître, avec autant de

succès. Durant l'Empire ottoman, la langue turque avait subi l'influence massive de l'arabe

classique et du persan. L'élite dirigeante conduisait les affaires de l'Empire dans une langue

turque savante et envahie de mots arabes et persans, appelée «turc ottoman». L'arabe était

resté la principale langue de la religion et de la loi coranique, le persan était la langue des arts,

de la littérature (la Dîvan) et de la diplomatie. Le turc parlé par le peuple, synonyme de

«grossièreté» et de «rusticité», n'était réservé qu'à des fins administratives locales […].

Soulignons aussi que l'alphabet utilisé jusque là transcrivait assez mal la langue turque dans la

mesure où, par exemple, l'alphabet arabe ne permettait de noter que trois voyelles, alors que le

turc comptait huit voyelles brèves et trois longues. La plupart des lettrés étaient conscients de

la situation, mais il leur semblait impossible de pouvoir modifier un système graphique qui

avait servi à transcrire le Coran. Jusqu'en 1927, des discussions eurent lieu afin d'adapter

l'alphabet arabe à la langue du quotidien des Turcs (le turc) en lui ajoutant quelques signes

pour les voyelles.

En 1928, Mustafa Kemal mit tout son poids dans la balance et créa une «commission

linguistique» dont le mandat fut d'élaborer un alphabet turc adapté de l'alphabet latin et de

«purifier» le vocabulaire […]. Le but visé était d'élaborer un système d'écriture qui serait plus

turc et moins arabe (ou persan). Il fallait en faire une langue plus moderne et plus précise,

pratique et moins difficile à apprendre. En réalité, l'adoption de l'alphabet latin avait

également comme objectif d'insister sur le caractère moderne et de minimiser l'influence des

conservateurs religieux, responsables pour Atatürk, de la décadence de la Turquie.

Le 1er novembre 1928, […] la loi entrait immédiatement en vigueur dans toutes les écoles. Le

1er décembre de la même année, les journaux, revues, affiches, enseignes, cinémas, etc.,

Supprimé : ¶¶¶¶¶

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62

devaient utiliser le nouvel alphabet. Devaient suivre dès le 1er janvier 1929 la correspondance

dans toute l'administration publique, les banques, les sociétés commerciales, les livres, etc.

Enfin, au 1er juin 1929, il ne restait plus que les actes de l'état civil, les documents du cadastre

[…]. Pendant ce temps, avec une craie et un tableau portatif, Mustafa Kemal parcourut tout le

pays en donnant lui-même des leçons d'écriture de l'alphabet latin moderne dans les écoles,

les places publiques… L'ancien alphabet disparut d'autant plus vite que l'enseignement de

l'arabe et du persan dans les écoles fut tout simplement interdit […].

Parallèlement, Mustafa Kemal procéda à une grande épuration des tournures arabo-

persanes et surtout du lexique envahi de mots arabes et persans […]. Il s'agissait de remplacer

le vocabulaire arabo-persan, d'une part (prioritairement), par un vocabulaire d'origine turque,

d'autre part, d'intégrer des mots provenant des langues occidentales […]. Le Parlement avait

adopté une loi obligeant les citoyens à prendre un nom d'origine turque: c'est alors que

Mustafa Kemal, afin de donner l'exemple, prit le patronyme d'Atatürk, le «Père des

Turcs». Le mot ottoman fut banni du vocabulaire officiel et fut remplacé par le mot turc

jusqu'alors dévalué et synonyme de «paysan» […]. Le turcologue Louis Bazin résume ainsi

ces modifications:

1) Suppression de mots anciens arabo-persans sortis de l'usage […]. 2) Création de néologismes par dérivation de mots turcs […]. 3) Création de néologismes par composition […]. 4) Emprunts aux langues occidentales […].

Les questions linguistiques continuent encore aujourd'hui de faire partie des «actualités

politiques» en Turquie. Depuis la mort d'Atatürk en 1938, chaque décennie amène ses

discussions, à savoir s'il faut favoriser un lexique plus traditionnel ou plus moderne. La

société d'études de la langue turque a perdu son statut semi-officiel en 1950 et plusieurs mots

arabes et persans ont recommencé à réapparaître dans les publications gouvernementales.

D'ailleurs, le domaine religieux n'a jamais été réellement affecté par la réforme linguistique.

Les publications religieuses ont continué d'employer un discours qui est encore aujourd'hui

lourdement arabe ou persan dans le vocabulaire et très persan dans la syntaxe. Depuis 1990,

l'apparition de mouvements religieux populaires a abouti à la réintroduction de nombreux

termes islamistes utilisés dans la langue turque […]. Toutefois, il faut admettre que cette

réforme linguistique a favorisé un rapprochement indéniable de l'oral et de l'écrit et, par voie

de conséquence, à l'élimination de l'analphabétisme. (Bibliographie: Leclerc Jacques, 15.11.2005)

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ANNEXE 12 : Questionnaire donné aux élèves à l’issue des séances interculturelles

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Supprimé : ¶¶¶¶¶¶¶¶

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Mis en forme : Gauche

Supprimé : ¶

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Supprimé : ¶