Migrations et développement: l'enjeu environnemental et l'avenir des politiques migratoires

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  • 7/27/2019 Migrations et dveloppement: l'enjeu environnemental et l'avenir des politiques migratoires

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    ______________________________________________________________________

    Le Maghreb dans son environnementrgional et international

    ______________________________________________________________________

    Migrations et dveloppementLenjeu environnemental

    et lavenir des politiques migratoires

    Franois Gemenne

    Janvier 2011.

    NNootteeddeell II ffrrii

    Programme Migrations,identits, citoyennet

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    LIfri est, en France, le principal centre indpendant de recherche,dinformation et de dbat sur les grandes questions internationales. Cr en1979 par Thierry de Montbrial, lIfri est une association reconnue dutilitpublique (loi de 1901).

    Il nest soumis aucune tutelle administrative, dfinit librement ses activits etpublie rgulirement ses travaux.

    LIfri associe, au travers de ses tudes et de ses dbats, dans une dmarcheinterdisciplinaire, dcideurs politiques et experts lchelle internationale.Avec son antenne de Bruxelles (Ifri-Bruxelles), lIfri simpose comme un desrares think tanksfranais se positionner au cur mme du dbat europen.

    Les opinions exprimes dans ce texte

    nengagent que la responsabilit de lauteur.

    Avec le soutien du groupe OCP

    ISBN : 978-2-86592-826-2 Ifri2011Tous droits rservs

    Site Internet :Ifri.org

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    Sommaire

    INTRODUCTION................................................................................... 2

    LENVIRONNEMENT COMME FACTEUR DE MIGRATIONS........................... 5

    Impacts du changement climatique sur les migrations ........... 5

    UNE MENACE POUR LA SECURITE? ..................................................... 8

    Un chec de ladaptation? ...................................................... 10La rhtorique des canaris dans la mine ............................ 11

    La vulnrabilit comme discours occidental .......................... 11

    La migration comme stratgie dadaptation........................... 12

    DE NOUVEAUX ENJEUX POLITIQUES................................................... 14

    Le droit de partir ....................................................................... 15

    Le droit de choisir..................................................................... 17

    CONCLUSION .................................................................................... 20

    BIBLIOGRAPHIE................................................................................ 22

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    Introduction

    Dans le dbat sur le changement climatique, les rfugis clima-tiques tiennent souvent un rle part : celui des premires victimesdu rchauffement global, lincarnation de son visage humain. Aucours des dernires annes, les premiers cas de dplacements lisau changement climatique ont reu un large cho dans les mdias :cest le cas de latoll de Tuvalu, dans locan Pacifique sud, menacpar la monte des eaux, ou du village de Newtok, la pointe de

    lAlaska, qui repose sur un perglisol dont la fonte sacclre conti-nuellement.

    Les migrations lies lenvironnement sont pourtant loindtre un phnomne nouveau: depuis lAntiquit, de trs nombreuxrcits relatent les migrations, dplacements et exodes lis aux modi-fications de lenvironnement. Des dsastres comme le tremblementde terre qui dtruisit Lisbonne en 1755 ou le grand incendie qui rava-gea Londres en 1666 provoqurent dimportants flux de rfugis. Cesmouvements ntaient dailleurs pas uniquement le fruit de catastro-phes naturelles : des dgradations de lenvironnement, souvent com-bines dautres facteurs, ont toujours pouss les populations

    quitter leurs lieux de vie pour des milieux plus clments.Si lenvironnement a toujours t un facteur de migration,

    lintrt pour cette question est pourtant rcent : aprs quelques men-tions dans les annes 1970, il faut attendre 1985 pour que le termede rfugi environnemental apparaisse pour la premire fois dansun rapport command par le Programme des Nations unies pourlenvironnement (PNUEEl-Hinnawi 1985). Et ce nest qu partir dela fin des annes 1990 que se dveloppent les premiers travauxacadmiques sur le sujet. Ces travaux ont connu une croissanceexponentielle depuis le milieu des annes 2000, un moment quiconcide avec la mdiatisation accrue des impacts du changementclimatique sur les populations et plusieurs catastrophes naturelles

    Franois Gemenne est charg d'tudes Climat et migrations lInstitut dudveloppement durable et des relations internationales (IDDRI) et chercheur auCentre dtudes de lethnicit et des migrations (CEDEM) de l'universit de Lige.Ses recherches sont consacres aux politiques publiques qui encadrent les

    populations dplaces par des changements de leur environnement. Il enseignegalement la gopolitique du changement climatique et la gouvernanceinternationale des migrations Sciences PoParis.

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    majeures, comme louragan Katrina en aot 2005 ou le tsunami enAsie du Sud-Est en dcembre 2004.

    Les rapports entre environnement et migrations sont dsormaisdevenus un aspect incontournable des ralits migratoires, tant dans le

    champ acadmique que politique. Ce foisonnement saccompagne,dans le domaine politique, dinitiatives diverses, visant amliorer laprotection de ceux qui sont dplacs par des dgradations de leurenvironnement, et assurer une meilleure gouvernance des flux migra-toires qui en rsultent (Biermann and Boas 2010; Prieur et al.2008).

    Pour autant, ce champ dtudes en pleine expansion resteaujourdhui parcouru dides reues et de prsupposs infonds,rpts rapport aprs rapport. En particulier, les mouvements depopulations qui pourraient tre provoqus par les impacts duchangement climatique sont au centre de tous les fantasmes,gnrant des estimations et prdictions plus alarmistes les unes que

    les autres, souvent sans aucun fondement empirique. lorigine deces confusions se trouve un double problme : le long dsintrt destudes migratoires pour la question des migrations environne-mentales et labsence dun corpus dtudes empiriques syst-matiques. Ces estimations alarmistes poussent au renforcement depolitiques migratoires scuritaires : un rcent rapport remis auConseil europen mettait par exemple en garde contre un possibleaccroissement significatif des migrations dAfrique vers lEurope,recommandant la mise en place de mesures appropries pour contrerces migrations (Commission europenne et Secrtaire Gnral duConseil de l'Union europenne et Haut Reprsentant pour la politiquetrangre et de scurit commune 2008).

    Lobjectif de cette note est de mettre en vidence le dcalagequi existe entre le discours dominant sur les migrations environne-mentales et la ralit empirique de ces migrations, et donc la nces-sit de proposer de nouveaux cadres danalyse. Il est certain que lesimpacts attendus du changement climatique transforment la relationancienne et complexe qui existe entre les dgradations de lenviron-nement et les flux migratoires, que ceux-ci soient forcs ou volon-taires. Bien quon sache encore peu de choses aujourdhui quant lamanire dont les populations ragissent aux dgradations de lenvi-ronnement, les migrations climatiques restent largement prsen-tes comme une des consquences les plus dramatiques du rchauf-

    fement global. Cette conception participe largement dune visiondterministe du phnomne, dans laquelle les migrants sont unique-ment prsents comme des victimes sans ressources, incapables desadapter aux changements de leur environnement immdiat.

    Dans un premier temps, cette note tentera de dfinir dansquelle mesure les dgradations de lenvironnement, et singulirementcelles lies au changement climatique, induisent des mouvements depopulations. Quelles sont les rgions du monde qui seront particuli-rement affectes, et les populations qui pourraient tre forces de sedplacer ? Comment, par exemple, lespace sahlien sera-t-il

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    affect ? Ensuite, il sagira de montrer combien les rponses poli-tiques qui sont actuellement proposes sont inadaptes, la foisparce quelles mconnaissent profondment la nature de la relationentre environnement et migration, en lancrant dans une conceptiondterministe, mais galement parce quelles traitent les questionsdenvironnement et de migration des chelles diffrentes, et par descanaux spars. De ce fait, les politiques publiques proposesrestent souvent ancres dans un agenda scuritaire, allant souvent lencontre des intrts des pays du Sud, qui seront les premiersaffects par ces mouvements migratoires. Une troisime et dernirepartie mettra en vidence deux enjeux politiques particulirementimportants dans lhypothse dun rchauffement global de +4 C,comme on sy attend dsormais. Ces deux enjeux politiques le droitde partir et le droit de choisir constituent sans doute les points lesplus saillants de la discussion sur la relation entre environnement etmigration : ils montrent comment nous pourrions envisager cette

    relation environnement/migration dune manire plus raliste et moinscentre sur les conceptions occidentales , et prendre en compte laralit empirique de ces migrations et un point de vue du Sud.

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    Lenvironnementcomme facteur de migrations

    Depuis la prise de conscience de limportance des impacts duchangement climatique sur les populations partir des annes 1990,lvocation des migrations lies des facteurs environnementauxsaccompagne souvent destimations alarmistes. Le rapport Stern surles consquences conomiques du changement climatique reprend

    le chiffre de 200 millions de rfugis potentiels dici 2050, chiffreavanc par lcologiste Norman Myers en 1995 (Stern 2007 ; Myerset Kent 1995). LInstitut pour lenvironnement et la scurit humainede luniversit des Nations unies (United Nations University-Institutefor Environment and Human Security, UNU-EHS), tabli Bonn, sentient au chiffre de 150 millions (Renaud et al.2007). En mai 2007,lorganisation non gouvernementale (ONG) Christian Aid annoncemme 1 milliard de rfugis environnementaux lhorizon 2050(Christian Aid 2007).

    En ralit, ces chiffres refltent simplement le nombre depersonnes habitant dans les rgions les plus exposes aux effets duchangement climatique, et singulirement la monte des eaux :rgions deltaques et ctires, petits tats insulaires, etc. Commenous le verrons, ils ne tiennent pas compte des efforts qui pourronttre faits pour limiter lampleur du changement climatique, ni desmcanismes dadaptation qui pourront tre dvelopps par lespopulations pour faire face ces situations nouvelles. En ce sens,sans doute servent-ils davantage attirer lattention du public sur leseffets dvastateurs du rchauffement global qu produire unemesure effective des dplacements de populations engendrs parceux-ci.

    Imp acts du changement cl imat iquesur les m igrat ions

    Les incertitudes qui entourent encore les impacts du changementclimatique compliquent galement la prvision des migrations envi-ronnementales futures. Le changement climatique nest pas un chan-gement uniforme : ses effets se traduiront par une multitude dim-pacts sur lenvironnement, aux consquences diverses. On distinguegnralement trois types dimpacts du changement climatique sus-ceptibles de provoquer des flux migratoires significatifs : lintensit

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    accrue des catastrophes naturelles, la hausse du niveau des mers etla rarfaction des ressources deau potable aussi appele stresshydrique . Ces trois types de changement ne produiront pas desmigrations similaires et nappellent pas des stratgies dadaptationidentiques. Lespace sahlien sera particulirement concern par lahausse du niveau des mers et le stress hydrique .

    En premier lieu, le changement climatique se traduira par uneaugmentation de la frquence et de lintensit des catastrophesnaturelles : les inondations seront ainsi plus nombreuses, tandis queles ouragans seront plus violents. Au cours des dernires annes, lenombre de catastrophes naturelles a dj augment significa-tivement, en premier lieu cause de la plus grande vulnrabilit despopulations exposes : une catastrophe nest jamais purementnaturelle, mais rsulte de la rencontre entre un risque naturel et unepopulation vulnrable. Alors que la vulnrabilit des populations sestaccrue au cours des dernires annes, le changement climatique

    augmentera les risques naturels. Les catastrophes naturelles affec-tent les pays du Sud de manire disproportionne, et lAsie est deloin le continent le plus touch. On a longtemps imagin que lescatastrophes naturelles ne provoquaient pas de flux migratoires proprement parler, mais plutt des dplacements temporaires depopulation. Depuis Katrina, on sait dsormais que cette affirmationest fausse : un peu moins de la moiti de la population de LaNouvelle-Orlans nest jamais revenue dans la ville. Contrairement une ide reue, les dplacements provoqus par les catastrophesnaturelles noffrent pas toujours la possibilit dun retour dans largion dorigine.

    Un autre impact du changement climatique sera la hausse duniveau des mers, provoque la fois par lexpansion thermique desocans et la fonte des glaciers et calottes polaires. On estime ainsique le niveau des ocans montera denviron un mtre dici la fin dece sicle, mme si des variations rgionales se produiront. Lesrgions ctires et deltaques comptent, comme on le sait, parmi lesplus densment peuples : de nombreuses mtropoles y sont instal-les et seront directement menaces dinondation si des mesuresdadaptation ne sont pas prises (digues, restauration des littoraux,etc.). Les petits tats insulaires sont galement particulirementvulnrables toute hausse, mme infime, du niveau des mers.Potentiellement, si des mesures dadaptation consquentes ne sont

    pas prises rapidement, les populations des rgions de faible lvationpourraient tre contraintes, terme, de se dplacer. Parmi les paysdu Maghreb, lgypte est particulirement concerne par cephnomne : le delta du Nil est en effet considr comme une desrgions les plus vulnrables la hausse du niveau des mers. Le deltadu Nil est habit par 38 millions de personnes, soit environ la moitide la population gyptienne. On estime que dans lhypothse dunehausse dun mtre du niveau de la mer, plus de 7 millions depersonnes, soit 10 % de la population du pays, seraient affectes,tandis que 10 % des terres arables seraient perdues. Dans lensem-

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    ble du Maghreb, le delta du Nil est sans nul doute la rgion au poten-tiel migratoire le plus important li llvation du niveau de la mer.

    Enfin, le changement climatique se traduira aussi par unerarfaction des ressources en eau potable : il sagit incontestable-

    ment dun de ses impacts les moins directement visibles, mais parmiles plus dvastateurs. Cette rarfaction des ressources en eau rsul-tera de trois facteurs concomitants : dune part, les nappes phra-tiques seront affectes par la hausse du niveau des ocans, puisqueles rserves deau potable seront contamines par leau de mer;dautre part, la dsertification sintensifiera dans de nombreusesrgions ; enfin, la fonte des glaciers rsultera en une diminutionconsquente des ressources deau douce de la plante. Les effets dustress hydrique sur les mouvements migratoires sont difficiles prvoir : plusieurs tudes ont ainsi montr que les migrations avaientparfois tendance dcrotre lors des priodes de scheresse, lesfamilles prfrant alors affecter leurs ressources disponibles la

    satisfaction de besoins immdiats pour leur subsistance. Mais sur lelong terme, il est avr que des manques deau plus structurels etpermanents poussent les populations touches lexil. Ce phno-mne a dj t observ dans plusieurs rgions du Maghreb, etnotamment dans loasis du Dra au Maroc (Ait Hamza et al.2009). lavenir, cest lensemble de la rgion mditerranenne qui seraaffecte par des manques deau structurels, qui sajouteront auxstress hydriques que connat dj la rgion aujourdhui (Magnan et al.2009).

    La manire dont ces diffrents impacts affecteront lesmouvements migratoires reste pourtant profondment mconnue : il

    demeure de profondes ambiguts dans la comprhension du phno-mne, qui gnrent des rponses politiques inappropries, commeon va le voir prsent.

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    Une menace pour la scurit ?

    Migrations et conflits, lorsquils sont associs aux changementsenvironnementaux, sont souvent envisags comme les consquen-ces dune incapacit des socits grer ces changements environ-nementaux et sy adapter. Ainsi, les migrations climatiques sontsouvent prsentes comme le vhicule par lequel les impacts duchangement climatique pourraient se transformer en risques pour lascurit : les migrations accrotraient la pression dmographique sur

    des ressources dj rarfies leau, les terres, etc. , engendrantainsi une comptition pour ces ressources, qui pourrait dgnrer enconflit. Un rapport remis en 2008 au gouvernement allemand avertitnotamment que les migrations lies au changement climatiquereprsentent un risque important de conflits dans les tats fragiles(German Advisory Council on Global Change [WBGU] 2008). Demme, dans une communication prsente au Conseil europen en2008, le Haut Reprsentant pour la politique trangre et de scuritcommune de lUnion europenne (UE) prvient que lEurope doit seprparer une pression migratoire substantiellement accrue, enparticulier en provenance dAfrique (Commission europenne et Sec-rtaire Gnral du Conseil de l'Union europenne et Haut Repr-

    sentant pour la politique trangre et de scurit commune 2008).Depuis sa mise lagenda du Conseil de scurit des Nations

    unies en 2007, linitiative du Royaume-Uni et malgr lopposition despays en voie de dveloppement, qui refusaient quil soit trait comme unenjeu de scurit plutt que comme un enjeu de dveloppement, lechangement climatique a t de plus en plus rgulirement perucomme une menace pour la scurit. Lattribution du prix Nobel de lapaix au Groupe dexperts intergouvernemental sur lvolution du climat(GIEC)1et Al Gore, en 2007, tmoigne de cette tendance.

    Historiquement, les politiques migratoires ont gnralementnglig limportance des facteurs environnementaux dans la dcision

    migratoire. Les politiques environnementales, par ailleurs, tendent considrer les migrations comme un problme humanitaire rsultantdes catastrophes naturelles ou dautres dgradations de lenvironne-ment. Globalement, les dbats actuels sur les rponses politiques

    1 Le GIEC est un panel denviron 2000 scientifiques, mandats par lOrganisationdes Nations unies (ONU) pour fournir une valuation scientifique de lampleur duchangement climatique et de ses effets. Les travaux du GIEC font autorit en matirede science du climat.

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    apporter au phnomne se fondent largement sur une perceptiondterministe des rapports entre environnement et migrations. Enconsquence, la plupart des discussions politiques2sur le sujet sontconsacres des questions de protection et de scurit, pluttquaux questions de gouvernance des migrations et de mobilit.Somme toute, il sagit avant tout de protger, quil sagisse deprotger lesmigrants, ou de se protger desmigrants.

    Dans la mesure o il nexiste pas de rgime international pourassister ceux qui sont dplacs par des dgradations de leur environ-nement, la plupart des propositions qui ont t discutes jusquici ontrecommand quune nouvelle convention soit cre pour combler cevide du droit international (Cournil 2006 ; Biermann et Boas 2010 ;Conisbee et Simms 2003). La plupart des dbats se sont attachs la question du statut lgal qui pourrait tre accord aux dplacs, denombreux auteurs regrettant que la Convention de Genve de 1951sur le statut des rfugis ne puisse sappliquer ceux qui sont dpla-

    cs cause de facteurs environnementaux. Un tel statut dans le droitinternational, nanmoins, serait inapplicable dans la plupart des casde dplacements lis lenvironnement, car ces dplacements sontessentiellement intranationaux, et donc en de des frontires dudroit international. Cela na pas empch diffrentes propositionslgislatives, notamment en Australie et en Belgique, de rclamer lacration dun statut international de rfugi climatique ou de rfugi environnemental . Ces propositions, qui ont vu le jour partir du milieu des annes 2000, visaient essentiellement attirerlattention de lopinion sur le vide juridique qui entourait les migrationsenvironnementales, et sont restes sans suite.

    Ce vocable de rfugi nest pas anodin. Il participe delide que les migrants seraient impuissants face aux dgradations deleur environnement. Ce faisant, il peut les enfermer dans un pigerelativiste et les empcher de dvelopper des stratgies dadaptationadquates (Connell 2003). Cest donc aussi notre processus decatgorisation des migrants qui doit tre interrog ici, dautant que cevocable de rfugi est souvent refus par les premiers concerns.Ce fut le cas, par exemple, la suite de louragan Katrina : les popu-lations dplaces ont refus avec force dtre qualifies de rfu-gis , un terme qui sous-entendait quelles taient des citoyens deseconde zone, envers lesquels leur gouvernement navait pas dobli-gation spcifique (Gemenne 2010). Les pays en dveloppement, par

    ailleurs, sont gnralement soucieux de ne pas apparatre commedes tats qui produisent des rfugis, cest--dire des tats dfail-lants dans lassistance leurs populations. Cette proccupation estparticulirement apparente parmi les tats asiatiques, notamment leBangladesh.

    2On pourra citer ici, par exemple, les dbats qui ont eu lieu sur le sujet au sein duForum humanitaire mondial, Genve, ou lors des ngociations internationales surle climat Poznan en 2008 ou Copenhague en 2009.

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    Le terme de rfugi a une charge symbolique trs forte, eta dailleurs rgulirement t instrumentalis des fins politiques :lors de la confrence sur le climat tenue Poznan en 2008, le gou-vernement algrien avait appel une relaxe des politiques migra-toires europennes, au motif quune partie significative des migrantsdAlgrie vers lEurope taient des rfugis climatiques , enverslesquels lEurope avait donc une responsabilit particulire, en raisondu niveau de ses missions de gaz effet de serre (GES). Les repr-sentants des petits tats insulaires, comme Tuvalu ou les Maldives,rappellent par ailleurs rgulirement quils ne veulent pas que leurpopulation devienne celle de rfugis climatiques , avec lespoirque cela pousse les pays industrialiss prendre des engagementsplus importants en matire de rduction de leurs missions de GES.

    Si les dbats politiques sur le sujet sont aujourdhui ancrsdans une perspective humanitaire et scuritaire, et donc dans unelogique de protection, cest avant tout parce quelles mconnaissent

    la relation qui existe, empiriquement, entre les dgradations delenvironnement et les migrations.

    Un chec de ladaptation?

    La migration reste aujourdhui largement assimile un chec deladaptation au changementclimatique3 : les migrants seraient ceuxqui nont pas pu sadapter aux conditions changeantes, et la migra -tion serait une solution de dernier recours, quil faudrait viter toutprix. Dans de nombreux endroits, et singulirement dans les petits

    tats insulaires, les migrations climatiques sont prsentescomme inluctables, devant la hausse du niveau des mers qui entra-nerait irrmdiablement la disparition des petites les (Farbotko2010). Il est utile de sarrter un instant sur la question des petitesles : en tant que premiers territoires touchs par les effets durchauffement global, les dbats sur les migrations qui sy produisentont une valeur heuristique gnrale. Les milieux insulaires sont eneffet souvent considrs comme des laboratoires, et on va voir que larhtorique des canaris dans la mine , qui a t dveloppe leursujet, traduit une conception plus gnrale de la migration, quiemporte dimportantes consquences politiques.

    3 La lutte contre le changement climatique comporte deux volets : lattnuation etladaptation. Lattnuation est bien connue: il sagit des politiques de rduction desmissions de GES, qui visent limiter lampleur du changement climatique.Ladaptation est moins connue et a longtemps t nglige: il sagit des politiquesqui permettront aux populations de faire face aux impacts du changementclimatique : diversification conomique, changement des structures dhabitat,protection ctire, etc.

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    La rhto ri que des canar is dans la m ine

    Pour beaucoup dobservateurs et dorganisations de la socit civile,la disparition annonce de petits tats insulaires reprsente en effet

    la preuve tangible de la ralit du changement climatique. Dans lesdiscours sur le changement climatique, les petites les et autres terri-toires vulnrables nexistent que par leur gographie particulire, etleurs habitants nexistent quen tant que rfugis climatiques .Leur fuite est cense alerter le monde sur la menace globale duchangement climatique et pousser les pays industrialiss rduiredrastiquement leurs missions de GES, sous peine de voir leurshabitants, demain, contraints leur tour de fuir devant les impacts duchangement climatique.

    Lutilit de ces territoires vulnrables, et singulirement despetites les, nexiste que dans leur disparition : de mme que les

    canaris jadis introduits dans les mines pour avertir les mineurs de laprsence de gaz dangereux, la disparition des petits tats est censealerter les autres tats du monde du danger imminent quils encou-rent. La rhtorique des canaris dans la mine est donc profond-ment occidentale et auto-centriste : si lon pousse cette logiquejusqu son terme, la fin des territoires vulnrables serait un malncessaire pour garantir la survie des autres territoires. Lexistencede rfugis climatiques doit ds lors apporter la preuve que lechangement climatique est en cours et quil est temps dagir.

    Lexistence de migrants climatiques , victimes impuis-santes du rchauffement global, doit amener les pays industrialiss

    une action rsolue contre le changement climatique. Dans cecontexte, et par un raccourci saisissant, volontiers effectu par lesassociations de dfense de lenvironnement, remettre en cause lanature climatique des migrations dans les territoires vulnrablesrevient volontiers nier la ralit mme du changement climatique.Pour les migrants, pourtant, une telle caractrisation de leur migrationnest pas aussi vidente.

    La vulnrab ilitcomme dis cou rs oc c idental

    Les migrations environnementales sont intimement associes desterritoires reconnus comme particulirement vulnrables, situs dansles pays du Sud. Ce constat dune grande vulnrabilit environne-mentale se traduit rgulirement par un discours de vulnrabilitsociale. Cette dmarche participe dun processus foncirement dter-ministe : les populations migrantes seraient vulnrables avant toutparce que leurs cosystmes sont vulnrables, et limage des rfu-gis climatiques est alors convoque pour incarner cette vuln-rabilit. Un tel dterminisme est problmatique car il rduit la vuln-rabilit au seul facteur environnemental, en ignorant compltementles autres facteurs, conomiques, politiques et sociaux, qui influent

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    galement sur la vulnrabilit. Les populations migrantes, en particu-lier, seront parfois en mesure de rduire leur vulnrabilit prcis-ment grce leurs dynamiques de mobilit, qui permettront dantici-per les chocs climatiques. Ce dterminisme induit une logique dim -puissance face aux alas environnementaux, qui nie la capacitdadaptation des populations.

    Jon Barnett et John Campbell, par exemple, relvent que cediscours de vulnrabilit, appliqu aux petites les, dcrit gnrale-ment les milieux insulaires comme impuissants face aux contraintesenvironnementales, alors mme que de nombreux travaux ontpourtant soulign lextraordinaire rsilience de leurs populations(Barnett 2001 ; Barnett et Adger 2003 ; Barnett et Campbell 2010). travers lhistoire, les populations insulaires ont souvent eu recours des savoirs traditionnels pour se protger des catastrophes naturelleset autres chocs environnementaux, notamment en adoptant destechniques de construction spcifiques ou en utilisant des systmes

    dalerte traditionnels. Dans la mme veine, Gregory Bankoff aremarquablement dmontr combien le discours de vulnrabilit nepouvait gnralement pas rendre compte des ralits empiriques desendroits quil entendait caractriser (Bankoff 2001).

    Le dterminisme qui conduit assimiler la vulnrabilit desterritoires celle de leurs habitants induit galement lide que ceux-ci disposeraient dune capacit dadaptation trs rduite: toute tenta-tive dadaptation sur place serait par avance voue lchec enraison dune trop grande vulnrabilit. La recherche dune terredasile devient alors la seule option possible, et lexode est prsentcomme inluctable, conditionnant la survie des habitants.

    La vulnrabilit dune communaut, pourtant, ne saurait serduire la seule exposition aux risques environnementaux. Elleinclut galement des dimensions politiques, culturelles et sociales,telles que le mode de gouvernance ou la cohsion sociale qui existeau sein de la communaut (Tubiana et al. 2010). Ds lors que cesdimensions sont occultes, la figure du rfugi climatique devientlincarnation de cette vulnrabilit et des injustices qui en dcoulent.

    La migration comme stratgie dadaptation

    Appliqu la migration, ce discours de vulnrabilit saccompagne delide que les migrants seraient impuissants face aux conditions envi-ronnementales. La ralit empirique rfute cette ide dimpuissance.Elle montre au contraire que les migrants ont rarement envisag leurmigration comme une contrainte inluctable mais plutt comme unestratgie dadaptation et de rduction des risques. contrario, unerhtorique de limpuissance, comme celle des canaris dans lamine , pourrait devenir auto-ralisatrice et rduire la capacitdadaptation. Ignorer la capacit dadaptationen se concentrant sur la

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    seule vulnrabilit peut prcisment exacerber cette dernire etpromouvoir une certaine reprsentation du futur.

    Plusieurs recherches empiriques montrent que la migrationest souvent une option parmi dautres pour les communauts qui font

    face une dgradation de lenvironnement. Parmi dautres optionsdadaptation, on pourra par exemple trouver un changement dactivitconomique ou un renforcement des structures dhabitat. Au cours dutemps, les populations ont dvelopp des stratgies traditionnelles demobilit qui leur permettent de faire face des changements environ-nementaux, particulirement quand ces changements affectent lesrcoltes agricoles ou les troupeaux de btail. Pour certaines popu-lations, la mobilit fait partie intgrante de leur mode de vie et leurpermet daugmenter, de diversifier ou dassurer leurs revenus (Black2001 ; Jonsson 2010 ; Mortreux et Barnett 2008).

    Ces stratgies dadaptation seraient pourtant compromises

    dans lhypothse dune hausse moyenne de temprature de 4C, quisemble aujourdhui lhypothse la plus raliste, au vu de linsuffisancedes efforts pour rduire les missions de GES (Gemenne 2011), Untel changement climatique affecterait la fois la magnitude desmigrations environnementales, mais galement leur nature : un grandnombre de populations seraient contraintes de migrer, sans pouvoirchoisir le moment, les conditions ou mme parfois la destination deleur dplacement. Par ailleurs, dautres populations, faute demoyens, se trouveraient dans limpossibilit de migrer. Le change-ment climatique tel quil est attendu dsormais impose donc dautrescadres danalyse, et dautres rponses politiques.

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    De nouveaux enjeux politiques

    De nombreuses tudes tendent montrer que des processus tradi-tionnels de mobilit pourraient tre gravement compromis par unchangement climatique de + 4 C, qui est loin dtre aujourdhui unesituation purement hypothtique. Kees Van der Geest observe parexemple que les processus nomadiques traditionnels habituellementmis en uvre par les bergers au Ghana pour faire face aux sche-resses ont t modifis rcemment la suite de brusques change-

    ments environnementaux et socio-conomiques (Van der Geest2009). Un phnomne similaire est observ au Bangladesh, o lesmouvements traditionnels des habitants de char encharces les desables spontanment formes dans le lit des fleuvessont perturbspar des inondations soudaines, plus frquentes et plus brutales quepar le pass (Poncelet 2010).

    Il apparat donc que si les impacts du changement climatiquesont effectivement plus svres que ceux qui avaient t initialementprvus par le GIEC (ce qui serait le cas avec laugmentation probablede temprature de 4 C), ces impacts pourraient mettre mal lesprocessus traditionnels de mobilit, conduisant les populations quitter dfinitivement leurs lieux de rsidence. Les options migratoiresdeviendraient ds lors plus limites : les migrations lies aux dgra-dations de lenvironnement pourraient alors devenirdes migrations delong terme, plutt que des mouvements temporaires. Cette tendancea dj t observe dans le cadre du projet Environmental Changeand Forced Migration Scenarios (EACH-FOR), notamment dans despays du Maghreb, dAsie du Sud-Est et dAfrique subsaharienne(Jger et al.2009). Au Vietnam, par exemple, les cultivateurs de rizentreprennent gnralement des migrations de travail saisonniresvers les villes durant la saison des pluies, de manire augmenter et diversifier leurs revenus. Des inondations rgulires et successives,nanmoins, ont dtruit les rcoltes et ont forc les agriculteurs

    quitter dfinitivement leurs terres pour un environnement plusclment (Dun 2009).

    Un rchauffement moyen de 4 C, qui est dsormais lerchauffement attendu, mettrait donc mal les capacits dadaptationde nombreuses rgions du monde, en particulier dans les pays envoie de dveloppement. Les rponses politiques seront donc cru-ciales pour permettre aux populations touches par les effets duchangement climatique dy chapper, notamment en leur permettantde migrer vers dautres rgions. Telles quelles sont discutes actuel-lement, les rponses politiques restent inappropries pour traiter la

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    question des migrations environnementales, notamment parcequelles poursuivent essentiellement les intrts des pays du Nord,sans considrer le point de vue des migrants eux-mmes, ni celui despays dans lesquels ils se dplacent. La question des migrations envi-ronnementales reste ancre, politiquement, dans un agenda scuri-taire et/ou humanitaire. La ralit impose pourtant de dpasser cetagenda scuritaire et humanitaire, pour placer la question dans uneperspective de gouvernance, de justice et de dveloppement. Deuxdroits fondamentaux et indissociables peuvent fournir les fondationsdun tel agenda.

    Le droi t d e part ir

    Un enjeu politique fondamental va consister permettre aux popula-tions les plus vulnrables de migrer, de manire pouvoir se mettre labri des dgradations de leur environnement. ct de ceux quisont forcs de partir suite aux changements environnementaux, denombreux autres, parmi les plus vulnrables, sont forcs de rester.

    Si la migration peut constituer une stratgie dadaptationefficace face aux changements environnementaux, les processustraditionnels de migration risquent dtre profondment perturbsdans lavenir, du fait des consquences prvisibles du changementclimatique. Dans certains cas, il sagira donc de faciliter cette migra -tion, de manire ce que les populations les plus vulnrables puis-sent chapper aux dgradations de lenvironnement et se mettredurablement labri. Ceci implique une volution politique impor-

    tante : la mise en uvre effective du droit de partir pour les popula -tions vulnrables, cest--dire du droit qui est au fondement du droitdasile.

    Aux origines du droit dasile, la paix de Westphalie de 1648reconnat la souverainet des tats comme principe structurant desrelations internationales. Si lon reconnat aux souverains le droitdexercer un contrle absolu sur leur territoire, on reconnat gale-ment, en contrepartie, le droit de quitter ce territoire pour ceux qui nepartagent pas la religion impose par leur souverain. La paix deWestphalie est gnralement considre comme le point de dpartdu droit dasile que nous connaissons aujourdhui, dans sa reconnais-

    sance du droit de partir.Lorsque ldit de Nantes est rvoqu en 1685, ce principe

    trouve sa premire application denvergure, et les huguenots devien-nent les premiers rfugis modernes , accueillis en Allemagne, auRoyaume-Uni et aux Pays-Bas notamment. Cest bien le droit departir qui est mis en uvre: trouver un pays dasile nest gure unproblme, et ces pays sont gnralement heureux de voir ainsiarriver un supplment de main-duvre et de talents. lpoque, ilnest pas jug ncessaire de mettre en place un rgime internationalde lasile, chaque pays restant libre daccepter ou non des rfugis.

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    Au cours du XIXe sicle, ce droit de partir va pourtant se trouver ltroit : Emmerich de Vattel plaide ainsi, en 1852, pour que le droitsoit tendu des motifs conomiques et politiques, et non plusseulement religieux. Dans le sillage de la Seconde Guerre mondiale,la Dclaration universelle des droits de lHomme de 1948 consacrerace droit de partir, reconnu dsormais comme un droit fondamental,quelles quen soient les raisons. Le droit dasile, quant lui, dpendencore du pays daccueil, jusqu ce que la Convention de Genvede 1951, et surtout son protocole additionnel de 1967, rigent le non-refoulement en principe gnral du droit.

    Le dbat actuel sur les rponses politiques aux migrationsenvironnementales est fond sur les questions de protection. Celasuppose que les populations touches puissent migrer. Or, cepostulat nest pas toujours vrifi dans la ralit : trs souvent, lesplus vulnrables ne partent pas, faute de moyens mais aussi de poli-tiques adquates. Ceci implique que leur vie, leur sant et leurs biens

    sont directement exposs aux dgradations de leur environnement.Trois raisons principales expliquent cette impossibilit pour les

    populations les plus vulnrables de migrer lors dun changement brutal ou progressifde leur environnement. Dabord, des politiquesdmographiques et damnagement du territoire les ont souventconfines dans des zones dangereuses, fort risque environne-mental. Une forme de racisme environnemental a rserv leszones dhabitat les plus dangereuses aux populations les plusdfavorises, et pas uniquement dans les pays du Sud. Ces zones risques, principalement des zones ctires et deltaques, connaissentaujourdhui une croissance dmographique soutenue. Ensuite, des

    politiques migratoires et de mobilit restrictives ou peu adaptes,notamment sur le plan des dplacements internes, ont rendu lemouvement difficile, voire impossible. Enfin, ces populationsmanquent gnralement de ressources, et lon sait que la migrationdemande des moyens importants, et reste donc souvent rserve des couches plus favorises de la population.

    Plusieurs exemples illustrent cette ralit. Dans les cas descheresse, plusieurs tudes ont montr que les mouvements migra-toires diminuent au lieu daugmenter. La migration demande en effetla mobilisation de ressources importantes. Au plus fort de la sche-resse, lorsque les ressources des familles sont particulirement

    rduites, elles ne sont gnralement pas suffisantes pour permettrela migration.

    Aprs louragan Katrina, les 60000 personnes qui sontrestes coinces La Nouvelle-Orlans faisaient partie, dans leurimmense majorit, des couches les plus vulnrables de la population.Pauvres, minorits raciales et habitants des quartiers dfavoriss, ilsnont pas quitt la ville parce quils navaient pas dargent, pas devoiture ou pas dendroit o aller. Beaucoup de familles nont pasvacu simplement parce quelles taient trop pauvres pour suppor-ter le cot dune vacuation.

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    Au Bangladesh, les populations vulnrables, qui ne peuventpas migrer lors des crues et des inondations, courent le risque dedevenir la proie de trafiquants et dtre livres au travail forc ou lexploitation sexuelle. Dans cette mme rgion, si le cyclone Nargis,qui a frapp la Birmanie en mai 2008, a fait infiniment plus devictimes que le cyclone Sidr, qui avait frapp le Bangladesh six moisplus tt, cest avant tout parce que les populations bangladaisesavaient pu vacuer lapproche du cyclone, contrairement auxpopulations birmanes. Si les catastrophes naturelles sont bien plusmeurtrires au Sud quau Nord, cest aussi parce que les populationstouches disposent de moindres ressources pour fuir.

    Celles-ci sont donc incapables de mettre en uvre des strat-gies migratoires pour se mettre labri dun environnement hostile.Ce que la crise cologique remet en cause aujourdhui nest sansdoute pas tant le droit dasile que le droit de partir. Il sagit pourtant icidu droit fondamental, premier, qui conditionne tous les autres. Tant

    que ce droit de partir ne sera pas restaur, le dbat pourtantncessairesur les questions de protection des migrants environne-mentaux restera vain et biais. Sil importe de protger ceux qui sontcontraints de quitter leurs terres cause de la crise cologique, ilimporte aussi, et avant tout, de restaurer le droit de partir pour lespopulations qui sont les plus durement touches.

    Le dro i t de cho is i r

    Il importe donc de ne pas se concentrer exclusivement sur ceux qui

    sont forcs de partir, mais daccorder une gale attention ceux quisont forcs de rester. Dans les deux cas, pourtant, se trouve prsentun lment de contrainte, que ce soit celle de partir ou celle de rester.Cest llimination de cette contrainte qui est vise par le droit dechoisir.

    Le droit de choisir doit tre envisag comme le corollairencessaire du droit de partir. Si le droit de partir touchait en premierlieu aux politiques migratoires, le droit de choisir mobilise surtout lespolitiques dadaptation. Cest bien ladaptation qui sera, en effet, lavariable dterminante de limpact des facteurs environnementaux surles mouvements migratoires. Le nombre de migrants pousss quit-

    ter leur lieu de vie par les dgradations de lenvironnement dpendratrs largement des politiques dadaptation qui seront dveloppespour faire face aux impacts du changement climatique : ces politiquespourront concerner, par exemple, le renforcement des protectionsctires, la mise en place de systmes dirrigation ou, un niveaucommunautaire, la cration de mcanismes de micro-assurancecontre les alas climatiques. La relation entre migration et adaptationcomporte trois dimensions : elle concerne la fois les rgionsdorigine et de destination, mais galement les migrations elles-mmes.

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    En premier lieu, pour une perturbation environnementaledonne, le dveloppement de stratgies dadaptation dans lesrgions dorigine permettra souvent de limiter lampleur des fluxmigratoires. Dans certains cas, la migration sera loption ultime, quine sera envisage que si les diffrentes stratgies dadaptation ontchou. Limpact rel du changement climatique sur les populationsdpendra largement du succs de ces stratgies dadaptation. Cesstratgies dadaptation, aujourdhui, visent principalement les rgionsdorigine des migrants, cest--dire les rgions considres commeparticulirement vulnrables. Elles peuvent concerner la fois devastes projets dinfrastructures, comme des digues ou des systmesdirrigation, qui demandent une intervention de ltat et des investis-sements publics substantiels, mais galement des processus demoindre chelle, qui pourront tre mis en uvre directement par lescommunauts locales. Cest par exemple le cas de systmes demicro-assurance dvelopps par des villages dagriculteurs pour se

    prmunir contre de mauvaises rcoltes. Ces stratgies dadaptationsont autant de processus qui viseront permettre aux populations dedemeurer dans leur lieu de vie habituel et de ne pas tre contraintesde migrer.

    En second lieu, si ladaptation reste largement conue commeun moyen dempcher la migration dans la rgion dorigine, elle nesaurait nanmoins tre rserve exclusivement cette seule rgiondorigine: les migrations, surtout dans le cas o elles sont soudaineset massives, entranent une pression dmographique accrue sur lesressources de la rgion de destination. Ces ressources ne concer-nent pas uniquement laccs la nourriture ou leau potable, maisgalement les possibilits demploi ou de logement. Les rgions dedestination sont gnralement pauvres, situes faible distance de largion affecte par des dgradations de lenvironnement, et souventincapables de faire face des afflux soudains de migrants.

    De surcrot, les migrants se concentrent souvent en milieuurbain. La migration est aujourdhui le principal facteur de la croissanceurbaine dans les pays en dveloppement. De nombreuses mgapoles,comme Dacca ou Nairobi, concentrent aujourdhui des poches depauvret trs importantes et ne peuvent plus faire face lafflux demigrants, dont beaucoup proviennent des rgions rurales. Les effetsdu changement climatique devraient amplifier ces migrations.

    Ce nest quen dveloppant des mesures dadaptation que lesrgions daccueil des migrants pourront faire face une pression dmo-graphique accrue. Cest donc ici un autre type dadaptation qui doit trevis : il ne sagit plus de faire face aux impacts du changement clima-tique eux-mmes mais aux consquences socio-conomiques de cesimpacts. Laide humanitaire durgence sera incapable de rpondre cedfi : il importe donc de dpasser lagenda humanitaire pour replacer laquestion dans une perspective de dveloppement.

    Enfin, comme nous lavons montr, la migration elle-mme,loin de reprsenter un chec de ladaptation, peut aussi, dans

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    certains cas, tre envisage comme une stratgie dadaptation partentire. Dans ce cas, le choix migratoire sera pour les migrants unchoix dlibr, qui leur permettra de rduire leur vulnrabilit auximpacts du changement climatique, tout en relchant la pressiondmographique dans leur rgion dorigine. De telles stratgies sontaujourdhui mises en uvre par les migrants, notamment dans lespays du Maghreb affects par des scheresses rcurrentes. Parfoistemporaire ou saisonnire, la migration permet notamment lafamille de diversifier ses revenus, et constitue une forme dassurancecontre le risque environnemental. Pour comprendre la migrationcomme une stratgie de prvention et de rduction des risques, il fautdonc considrer que les migrations climatiques ne constituent pasune catgorie spcifique de migrations, mais une des formes dunprocessus migratoire qui a toujours exist.

    Ces stratgies peuvent tre particulirement efficaces dansles cas de dgradations progressives de lenvironnement, notamment

    dans des situations de dsertification, car les changements progres-sifs permettent souvent une planification de la migration. Pourlinstant, nanmoins, ces migrations restent compromises par despolitiques publiques peu adaptes et labsence de ressources desmigrants. Lenjeu politique sera alors de faciliter la migration, p luttque dessayer de lempcher. Cet objectif ncessitera une prise encharge des cots de la migration, mais galement une plus grandeintgration des politiques migratoires et environnementales, tant auNord quau Sud. Pour linstant, ces deux sphres restent largementsourdes lune lautre. Cet tat de fait est particulirement probl-matique pour les pays du Maghreb : les politiques migratoires euro-pennes, dont on sait limportance pour tous les pays du pourtourmditerranen, ne font aucun cas des questions environnementaleset dadaptation. Au niveau de la Commission europenne, la questiondes migrations environnementales est du strict ressort de la directiongnrale Justice, libert, scurit.

    Si lon veut que la migration puisse devenir une vritablestratgie dadaptation, il faudra pourtant que les politiques migratoiresintgrent la variable environnementale, et vice versa. Cest l lenjeudu droit de choisir, complment indispensable au droit de partir.

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    Conclusion

    Beaucoup dincertitudes subsistent aujourdhui quant la maniredont les comportements migratoires volueront suite aux dgrada-tions de lenvironnement. Quoique les migrations associes auxchangements environnementaux aient toujours exist, aucune thoriedes migrations ne prend vritablement en compte lampleur desfacteurs environnementaux, et trop peu dtudes empiriques syst-matiques existent ce jour.

    En labsence de modles explicatifs et dtudes empiriques,les migrations environnementales restent largement considrescomme une catgorie part, lcart des dynamiques migratoiresglobales, qui serait davantage du ressort des politiques environne-mentales que des politiques migratoires. Ces deux sphres politiquesvoluent pourtant dans des directions largement diffrentes et parfoiscontradictoires. Pour les rconcilier, il importe de considrer que lesmigrations lies lenvironnement ne sont pas une catgorie migra-toire part, mais font au contraire partie de dynamiques migratoiresglobales.

    Les impacts du changement climatique invitent pourtant

    considrer ces migrations sous un angle nouveau : bien quelles aienttoujours exist, ces migrations mobilisent dsormais des enjeux dejustice et dquit. Ces migrations se produisent essentiellement dansles pays en dveloppement, qui sont la fois les plus touchs par lesimpacts du changement climatique et les moins responsables decelui-ci.

    En considrant ces migrations comme une catgorie part,nous supposons aussi quelles sont rgies par des lois particulires.Les rapports entre environnement et migration restent conceptualissdans une perspective dterministe, profondment occidentaliste, quina gure voir avec la ralit de ces migrations dans les pays du

    Sud. Cette perspective caractrise ces migrations comme le signedune incapacit sadapter aux changements environnementaux,une catastrophe humanitaire venir. Cet article a tent de montrer ledcalage qui existe entre les discours occidentaux sur les migrationsenvironnementales et le point de vue des pays du Sud. Ds lors, lesoptions politiques considres refltent bien souvent ce dcalage : enconsidrant les migrations environnementales comme un problme,elles servent davantage les intrts des pays industrialiss que ceuxdes pays en dveloppement.

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    La relation entre environnement et migration ne peut serduire une simple relation causale. Elle dpend de nombreusesvariables et du contexte dans lequel elle prend place. Les impacts duchangement climatique naffecteront sans doute pas seulement lamagnitude des flux migratoires mais galement leur nature. Or, pourlheure, les dbats sur les rponses politiques apporter demeurentancrs dans une perspective dterministe, qui sera incapable defournir un cadre adquat.

    Tant les politiques migratoires que les politiques dadaptationdevront voluer significativement et dpasser les cadres scuritaireset humanitaires dans lesquels elles sont inscrites pour le moment.Les migrations environnementales ne doivent pas tre considresdans le seul cadre du changement climatique, mais galement danscelui de la gouvernance globale des migrations. Dans bien des cas,elles ne reprsenteraient pas une catastrophe humanitaire en deve-nir, mais permettraient aux populations de se reloger dans des lieux

    plus srs, et de mieux faire face aux dgradations environnemen-tales. Cela impliquera de mettre en uvre le droit de partir et le droitde choisir, mais surtout de remettre fondamentalement en cause lamanire dont nous envisageons aujourdhui les migrations lies auxchangements de lenvironnement, pour prendre davantage en comptele point de vue du Sud, et considrer que les migrations ne sont pasncessairement un problme, mais parfois une solution ce serapeut-tre l le plus difficile.

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