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Maroc N° 28- 1 er trimestre 2016 Publication officielle du Centre Antipoison du Maroc Ministère de la santé NUMÉRO SPECIAL Les intoxications par les champignons au Maroc

NUMÉRO SPECIAL - capm-sante.ma · Fax : 05 37 77 71 79 - . Toxicologie Maroc - N° 28 - 1er trimestre 2016 - 3 Mise au point introduction Les champignons supérieurs renferment un

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MarocN° 28- 1er trimestre 2016 Publication officielle du Centre Antipoison du MarocMinistère de la santé

NUMÉRO SPECIALLes intoxications par les champignons

au Maroc

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2 - Toxicologie Maroc - N° 28 - 1er trimestre 2016

Edito

Directrice de PublicationPr Rachida Soulaymani Bencheikh

Comité De RéDaCtion

Rédactrice en Chef

Dr Naima Rhalem

Secrétaire de rédaction Mme Rachida Aghandous

Rapports et alertes du CaPmDr Hanane Chaoui

Comité de lecturePr Sanae Achour

Mme Rachida Aghandous Dr Hanane Chaoui Dr Asmae Khattabi

Pr Bruno MegarbanePr Abdelghani Mokhtari

Mr Lahcen Ouammi Dr Naima Rhalem

Pr Rachida Soulaymani Bencheikh Pr Abdelmajid Soulaymani

Responsable diffusion Mme Hind Jerhalef

EDITION

Directrice de l’Edition Dr Siham Benchekroun

Directeur artistiqueChafik Aaziz

Société d’EditionSociété Empreintes EditionRés. Alia, 8, rue Essanaani.

Appt 4. Bourgogne. [email protected]

IMPRESSIONImprimerie Maarif El Jadida. Rabat

Dossier de presse : 14 /2009ISSN : 2028-4152

Dépôt légal : 2009 PE 0052

Tous les numéros sont disponibles sur le site : www.capm.ma

Les champignons : un nouvel aliment, un nouveau risque

Les champignons ont toujours attiré les hommes pour leurs propriétés co-mestibles ou hallucinogènes mais ils les ont aussi effrayés par leur toxicité. Des mentions sur les champignons ont été citées par les auteurs gréco-latins. Les Romains en nourrissaient les soldats pour leur procurer de la force. Les pharaons les associaient à une nourriture des dieux et en inter-disaient la consommation au peuple. Tout au long de l’histoire, les cham-pignons ont aussi servi à des fins meurtrières ou de sorcellerie, inspirant crainte et méfiance.On estime qu’il existe environ un million et demi de spécimens différents sur la planète. Aujourd’hui, seuls trois cent mille ont été décrits, dont une centaine sont toxiques voire parfois mortels.

La situation des intoxications diffère selon les pays, de façon corrélée au taux de consommation. Au Maroc, les champignons ne font pas partie des habitudes alimentaires de la population, mais de plus en plus d’amateurs ou de simples promeneurs se penchent sur ces habitants des forêts, plaines et jardins. D’où un risque accru d’intoxication car il s’agit de végétaux méconnus par le citoyen.Le Centre Anti Poison du Maroc souhaite, à travers ce numéro dédié aux champignons, à leur identification et à leurs risques sur la santé, attirer l’attention des consommateurs imprudents sur les risques liés à la consom-mation de champignons de cueillette sans identification préalable par des spécialistes. Dans l’impossibilité de les faire identifier, il est alors préférable d’éviter leur consommation, surtout que certains champignons vénéneux haute-ment toxiques ressemblent beaucoup aux espèces comestibles.

Pr Rachida Soulaymani-BencheikhDirectrice de Publication

Appelez, nous écoutonsNotifiez, nous agissons

N° éco : 0801 000 180Tel d’urgence : 05 37 68 64 64

Rue Lamfedel Cherkaoui , madinate al irfane, BP: 6671, Rabat 10100, maroc.

Standard : 05 37 77 71 69/ 05 37 77 71 67 Fax : 05 37 77 71 79 - www.capm.ma

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Toxicologie Maroc - N° 28 - 1er trimestre 2016 - 3

Mise au point

introduction

Les champignons supérieurs renferment un nombre important d’espèces toxiques, classés selon leur gravité: légère, sévère, très dangereuse ou mortelle [1]. Les champignons potentiellement mortels sont peu nombreux, mais font plusieurs victimes chaque année, dans différentes régions du monde, c’est le cas des amanites à toxines qui renferment de l’amanitine et de la phalloidine [2].Les intoxications phalloïdiennes, les plus terribles, sont causées par trois espèces d’Amanites, très voisines les unes des autres: Amanita phalloides, Amanita verna, Amanita virosa. Amanita phalloides est le plus meurtrier de tous les champignons, à l’origine de plus de 90% des intoxications mortelles [3].Il renferme 3 substances toxiques (phalline, phalloïdine, amanitine) dont les effets ne se font sentir que 10 à 20 heures après l’ingestion, alors qu’il est pratiquement trop tard pour intervenir efficacement [1].Pour éviter les empoisonnements par les champignons supérieurs, il n’y a qu’un seul moyen : connaitre parfaitement leurs caractères morphologiques pour pouvoir les identifier. En effet, un cueilleur peut aisément confondre un champignon comestible avec un champignon hautement toxique. Certaines amanites mortelles peuvent être confondues avec d’autres champignons appartenant à d’autres espèces, c’est le cas de l’amanite phalloïde avec les Russules verdâtres et les Tricholomes plus ou moins verdâtres [4]. En général, la détermination des champignons n’est pas facile et il n’existe aucune “recette” pour décider si un champignon est toxique à part sa détermination (principalement en ce qui concerne les Amanites mortelles), et ce, même dans les situations où leurs caractères morphologiques caractéri-

stiques sont accidentellement détruits.

Champignons Genre amanita

Ce sont des champignons terrestres, élégants, d’aspect élancé, charnus, très putrescents (leurs tissus sont en effet très riches en ferments protéolytiques du groupe des présures). Le chapeau, facilement séparable du pied, est parfois blanc, mais le plus souvent coloré (rouge vif, rouge orangé, rougeâtre, verdâtre, jaune pâle) [5]. Le pied est ordinairement long et grêle; il porte un anneau et sort d’une volve membraneuse, parfois grande et facile à voir, parfois réduite à un simple bourrelet d’observation difficile. Des fragments du péridium (enveloppe qui protège le basidiome qui est l’ensemble des basides ou organe principal de reproduction) persistent parfois sur le chapeau, formant des squames ou de petites mouchetures qui peuvent d’ailleurs être entrainées par les pluies [6]. Les lamelles, généralement blanches, sont de deux sortes : les unes viennent jusqu’au voisinage du pied sans se souder à lui; les autres, ou lamellules, partent de la périphérie et s’arrêtent environ à la moitié du chapeau ; elles se terminent obliquement, comme coupées par un coup de ciseaux [7]. Ce caractère est commun aux Amanites et aux Lépiotes; il doit suffire à faire rejeter comme suspects des champignons cueillis sans précaution, en brisant le pied par exemple [8].

Quelques caractères d’identification des Amanites

• Caractères principaux [4]:

1) volve, reste du péridium, enveloppe ou sac, qui enveloppe le jeune champignon et subsiste à l’état adulte sous différents aspects : - assez résistante, membraneuse, elle forme un sac au pied du champignon, - peu résistante, elle forme des bourrelets au pied du champignon et des flocons disséminés sur le chapeau et parfois aussi à la base du pied, 2) anneau membraneux, sur le pied du champignon, il prend différentes formes: anneau étalé, rabattu ou sans anneau, 3) Chapeau à lames, lamelles et lamellules libres.

• Caractères secondaires d’identification: exemple de la couleur : elle peut être variable d’une partie à l’autre ou uniforme, mais on ne peut pas se fier à la couleur. L’Amanite phalloïde, le plus dangereux, peut être coloré de façons très différentes: jaune verdâtre en général, mais aussi jaune ou vert ou brun ou même pratiquement blanc. Par contre, la couleur peut, dans certains cas, être un élément précieux de détermination et de différenciation. L’Amanite des Césars a toujours des lamelles colorées en jaune, bien que ce jaune puisse être plus ou moins accentué.

Champignons toxiques et ComestibLes Les risques de Confusion : Cas des amanites

Douira AllalLaboratoire de Botanique, Biotechnologie et de Protection des Plantes, Faculté des Sciences, Université Ibn Tofaïl, Kénitra

ATTENTION

- Les trois signes : lamelles blanches, anneau, volve blanche en sac, sont révélateurs de danger mortel.- Ne jamais consommer un basidiome (synonyme ancien de basidiocarpe ou carpophore), à lames blanches surtout, dont le bas du pied a été brisé, et ne pas manger tout champignon à volve, même s’il est comestible.

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4 - Toxicologie Maroc - N° 28 - 1er trimestre 2016

types d’amanites

Les Amanites constituent un genre très important qui renferme quelques bons comestibles mais surtout les champignons les plus toxiques : Amanita phalloïdes, A. verna et A. virosa [3. Les principales espèces sont les suivantes[2]:

1) Amanites à toxines

Ces espèces, qui renferment de l’amanitine et de la phalloidine, sont souvent mortelles [6].- présence d’anneau et volve ample à la base du pied - chapeau nu- lames blanches- anneau membraneux, espèces plus sveltesLes espèces mortelles sont à :- chapeau plus ou moins vert : Amanita phalloïdes- chapeau blanc- pied lisse : Amanita verna- pied pelucheux ou chiné : Amanita virosa

2) Amanites à principes psychotoniques

Elles se caractérisent par la présence d’anneau, l’absence de volve à la base du pied, et des verrues sur le chapeau.On observe quelques particularités :- chapeau brun, marge striée, verrues blanches, bourrelets à la base du pied : Amanita pantherina- chapeau orangé ou rouge (parfois brun rouge), verrues blanches;- chapeau rouge, verrues sur le chapeau et le bulbe : Amanita muscaria

3) Amanites à rejeter

Lorsqu’il y a une présence d’anneau et volve à la base du pied : volve circoncise (bulbe marginé) et verrues sur le chapeau- chapeau jaune, odeur de rave- verrues blanches à citrines : Amanita citrina- verrues brunes : Amanita citrina f. nappa- chapeau blanc, odeur de rave : Amanita citrina var. albaDans le tableau I, à la page ci-après sont présentées quelques Amanites citées au Maroc, avec leurs lieux de récolte et leur toxicité [5, 9, 10, 11, 12,13].

Mise au point Champignons toxiques et comestibles les risques de confusion : cas des amanites

Amanita vaginata var. grisea [14]: Œuf blanc (A), sporophore, enveloppé dans une enveloppe, péridium, qui se déchire progressivement avec le développement du pied et reste à la base du pied (B), volve (C), et sur la cuticule du chapeau sous forme de plaques (D); stipe chaussé d’une volve (E) et d’un anneau friable (F); lames libres, de couleur blanche (G).

Chapeau blanc : A. ovoïdea, A. ver-na et virosaChapeau jaune : A. citrinaChapeau vert-olive : A. phalloïdesChapeau brun rougeâtre : A. rubes-cens, A. spissa et A. pantherinaChapeau rouge : A.caesarea, A. muscaria.

*Laurent P., 2003. Regard sur les cham-pignons: connaissance, identification et cueillette. Editions SAEP, 117p

Principales espèces du genre Amanita classées d’après la

couleur du chapeau (Toxiques voire mortelles)*

Conclusion

Les erreurs de détermination des champignons, fréquentes, ne devraient pas concerner les espèces potentiellement mortelles. Le nombre de champignons toxiques étant très important, il est recommandé la plus grande prudence avant de consommer des champignons.

Références

1- Laurent P., Regard sur les champignons: connaissance, identification et cueillette. Editions SAEP 2003; 2- Romagnéisi H., Atlas des champignons d’Europe. Edition Bordas 1995; 3- Pirot P., Les champignons dits comestibles le sont-ils encore ? Mycolux 2010, 2 : 13-26. 4- Demange H., Germain G. et Notin M., Je cueille les champignons sans danger ; Edition Leson 1976; 5- Malençon G. & Bertault R., Flore des champignons supérieurs du Maroc, Tome I. Faculté des Sciences de Rabat, Maroc 1970; 6- Hertzog P., Les champignons toxiques et comestibles. Editions SNEP 1989; 7- Deysson G. et Delcourt A., Cryptogamie : Mycologie générale et appliquée. Edition CDU et SEDES 1980; 8- Joly P., Les Amanites. Revue de Mycologie 1967- Supp., TomeXXXII, Fas. 2. 9- Malençon G. & Bertault R., Flore des champignons supérieurs du Maroc, Tome II. Faculté des Sciences de Rabat, Maroc 1975; 10- Nounsi A., Outcoumit A., Selmaoui K, Ouazzani touhami A., Benkirane R. et Douira A., Inventaire des champignons ectomycorhiziens du Maroc, Journal of Applied Biosciences 2014, 79: 6826 – 6854. 11- El-Assfouri A, Biodiversité fongique du Maroc : Inventaire et étude des Basidiomycètes de la forêt de la Mamora. Thèse de Doctorat, Université Ibn Tofail, Faculté des Sciences de Kénitra, Maroc 2007; 12- Outcoumit A., Contribution à l’étude de la diversité fongique du Maroc et mise en évidence de quelques espèces fongicoles et de l’importance des espèces sécotïdes dans la systématique des Basidiomycètes. Thèse de Doctorat, Université Ibn Tofaïl, Faculté des Sciences, Kénitra, Maroc 2011; 13- Bertault R., Amanites du Maroc (troisième contribution). Bull. Soc. Myc. Fr. 1980, 96 (3): 271-287. 14- Sources photographiques : Thèses de Doctorat préparées dans Laboratoire de Botanique, Biotechnologie et de Protection des Plantes, Faculté des Sciences, Université Ibn Tofaïl, Kénitra.

a B C

e

G

F

D

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Toxicologie Maroc - N° 28 - 1er trimestre 2016 - 5

Mise au pointtableau i : Quelques amanites citées au maroc, avec leurs lieux de récolte et leur toxicité

Champignon Situation géographique Toxique/comestible

Amanita boudieri Rabat, Kénitra, Larache, Tanger, Moyen Atlas (Azrou, altitude 1500 m) Comestibilité inconnue

Amanita caesarea: Larache, région de Tanger plus rarement dans le Rif à (Chaouene, Dardara et Bab-Tariouentz), massif de Tazekka (Forêt de Bab-Azhar) Comestible

Amanita citrina Région de Rabat, la forêt de Khmis-es- Sahel et la Mamora. Douteuse à rejeter

Amanita citrina var. alba La Mamora Douteuse à rejeter

Amanita codinae Témara, Rabat, Tanger, Khénifra, Auguelmane Azigza (altitude 1800 m) et Cherf-el-Akab près de Tanger Comestible

Amanita crocea Dans la forêt de Jaaba et dans le site de Lalla Mimouna. Comestible

Amanita curtipes La Meseta littorale, dans le Rif (Bab-Tariouentz, alt. 1300 m),dans la Mamora et à Khmisses-Sahel Comestible

Amanita eliae Rare, mais constante près de Tanger, au Jbel Kbir Comestibilité inconnue

Amanita excelsa Peu fréquente, près de Tanger (Jbel Kbir) et dans le Rif (Bab-Tariouentz) Comestible

Amanita gemmata Fréquente de Tanger à Larache, plus rare dans le Rif (Ktama), le Moyen Atlas (Azrou) et le Tazekka Toxique

Amanita gilbertii Dans la région de Tanger et aux environs de Larache, et dans la Mamora Comestibilité inconnue

Amanita inaurata Dans la Mamora, près de Rabat ComestibleAmanita

lividopallescens Rif et Moyen Atlas Comestible

Amanita mairei Près de Rabat, Sidi Bettache, Ben Slimane, dans la Mesetaet à Tanger (Jbel Kébir, Perdicaris). Toxique à l’état cru, Comestible cuit

Amanita muscaria Espèce croissant sous Eucalyptus, à sidi Taibi et dans la Mamora Toxique

Amanita ovoidea Tanger et Rif Toxique

Amanita pantherina Mamora, sidi Taibi, Kasbah de Mehdia, et site de Lalla Mimouna Toxique

Amanita phalloides les chênaies de la Meseta littorale et du Plateau central,

en montagne (Rif, Tazekka, Moyen Atlas) et la Mamora

Mortelle

Amanita porphyria Une seule récolte au Jbel Kbir, près de Tanger, en mai 1957 Comestibilité inconnue

Amanita rubescens A sidi Allal El Bahraoui et sidi TaibiFréquente dans la Mamora Comestible après cuisson

Amanita spissa A Tanger, Larache et dans la Mamora.

Comestible, mais à éviter en raison de sa forte ressemblance avec l’Amanite panthère.

Amanita umbrinolutea (Amanita battarrae) A Akarrate, face à Chaouene. Comestibilité inconnue

Amanita vaginata Dans le site Dardara (région Taza-Al Hoceima-Taounate) Comestible

Amanita vaginata var. grisea A Khmis-es- Sahel (Région de Larache.). Comestible

Amanita verna et Amanita virosa La Mamora Espèces à toxines, mortelles.

Amanita vittadinii Azrou, Rabat et Kénitra, dans la vallée de l’Oued Korifla

et dans les jachères et labour en sol lourd légèrement humide à Tanger (Daya Daïdate)

Comestible

Champignons toxiques et comestibles les risques de confusion : cas des amanites

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intoxiCations par Les Champignons,Cas CLiniques déCLarés au Capm

Aoued Leila 1, Windy Maria 1, Chaoui Hanane 1, Rhalem Naima 1, Soulaymani-Bencheikh Rachida 1,2

1-Centre Ant poison et de Pharmacovigilance du Maroc 2-Faculté de Médecine et de Pharmacie, Université Mohammed V, Rabat

introduction

Les maladies dues à l’ingestion de champignons toxiques sont rares au Maroc et ne représentent pas un motif régulier de consultation dans les structures sanitaires. Les tableaux cliniques en rapport avec ces intoxications sont mal connus par les cliniciens. La symptomatologie peut aller de signes bénins nécessitant un traitement symptomatique jusqu’à des atteintes sévères mettant en jeu le pronostic vital.

matériel et méthodes

Il s’agit d’une étude des cas d’intoxications reçus au CAPM entre octobre 2015 et janvier 2016. Les cas ont été collectés à partir des dossiers de l’information toxicologique remplis par le médecin répondeur du CAPM pour chaque appel téléphonique.

Résultats

Durant les 4 mois de l’étude, le CAPM a reçu 3 cas d’intoxication aux champignons présentés ci-dessous.

CaS CLiniQUe 1 Il s’agit d’un appel reçu le 27/10/2015, d’une maman de Casablanca (Dar Bouazza), dont l’enfant de 2 ans, a consommé accidentellement un champignon ayant poussé pour la première fois dans le jardin de la maison. Cliniquement l’enfant était asymp-tomatique. Le médecin répondeur du CAPM a conseillé à la maman une surveillance des signes digestifs et neurologiques. L’évolution était favorable ; l’enfant est resté asymptomatique.

L’identification a été faite sur des photos par un mycologue, malgré la difficulté, car elle nécessite la présence du matériel botanique et se fait selon des critères très précis. Il s’agissait d’Agaricus xanthodermus ou Agaricus sarvensis, un champignon comestible (Figure 1).

CaS CLiniQUe 2 Le CAPM a reçu un appel le 08/11/2015 du CHU de Rabat, pour une intoxication concernant deux filles âgées respectivement de 2 ans et 12 ans, originaires de Kenitra. La famille faisait un pique-nique en forêt où ils ont cueilli et consommé des champignons. Mais 1h 30 après, la fille de 12 ans a présenté des céphalées et des vertiges alors que celle âgée de 2 ans a présenté des troubles de conscience et des convulsions à répétition qui ont nécessité une hospitalisation en réanimation.La conduite à tenir comportait un traitement symptomatique, une surveillance des signes digestifs et neurologiques, des bilans biologiques (hépatique et rénal qui se sont révélés normaux) et un bilan toxicologique (dans les limites des analyses que fait le laboratoire du CAPM) dont les résultats étaient négatifs. L’évolution a été favorable après 2 jours d’hospitalisation. Le champignon a été identifié sur des photos comme étant une Amanita pantherina, champignon toxique (Figure 2).

CaS CLiniQUe 3 Le CAPM a reçu le 27/01/2016, un appel à propos d’une patiente de 30 ans de Kenitra qui a présenté, 30 mn après ingestion de truffes blanches, des vomissements et des diarrhées. L’évolution était favorable après traitement symptomatique.

Discussion

Il existe plus de 5000 espèces de champignons supérieurs, dont 200 à 300 sont comestibles et 50 à 100 sont toxiques pour l’être humain [1]. Les circonstances d’intoxication peuvent être alimentaires, accidentelles ou volontaires. L’identification des espèces dangereuses est souvent peu évidente. La confusion entre champignon toxique et champignon comestible est une des premières causes d’intoxication. Les intoxications aux champignons sont rarement fatales [2] mais elles peuvent être sévères avec des conséquences graves voire mortelles. Chaque champignon a ses toxines spécifiques et cause un syndrome particulier. Certains contiennent plusieurs toxines pouvant compliquer la prise en charge (par exemple : Amanita muscaria ou l’amanite tue-mouches [1]).On distingue 2 grands groupes de syndromes, selon le délai d’apparition des signes après l’ingestion; précoces, avant 6 heures, en général bénignes, ou tardifs, après 6 heures. Les prises en charge sont différentes (Tableau I).

Cas Cliniques

Figure 1 : Agaricus xanthodermus

Figure 2 : Amanita pantherina

intoxications par les champignons,Cas cliniques déclarés au Capm

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Toxicologie Maroc - N° 28 - 1er trimestre 2016 - 7

Comme dans toute intoxication, l’anamnèse est fondamentale et généralement suffisamment évocatrice. Parfois l’intoxication n’est pas due au champignon lui-même, mais à une contamination microbienne, la présence de pesticides (cueillette à proximité de zones de culture) ou celle de métaux lourds (notamment à proximité des routes). Parfois aussi, une mauvaise préparation de champignons comestibles peut provoquer des symptômes gastro-intestinaux. Il arrive encore que plusieurs types de champignons soient ingérés, ce qui peut entraîner la survenue de syndromes combinés et compliquer le diagnostic.Chez un patient présentant une atteinte hépatique, une insuffisance rénale aiguë ou une rhabdomyolyse d’origine indéterminée, le clinicien ne doit pas oublier d’interroger le patient et son entourage sur une éventuelle consommation de champignons dans les jours précédant l’apparition des symptômes [1].

Conclusion

La consommation de cham-pignons n’est pas une habitude marocaine, mais elle s’installe avec le changement des prati-ques culinaires. L’identification de l’espèce en cause (restes de repas, épluchures, etc.) devrait être systématique afin d’orienter le traitement et d’évaluer le risque de complications. En son absence, la clinique permet en général une orientation.

Remerciements au Pr Douira Allal pour l’identification en urgence des champignons.

Cas Cliniquesintoxications par les champignons,Cas cliniques déclarés au Capm

1-Trueb L, Carron P, Saviuc P. Intoxication par les champignons. Rev Med Suisse. 2013; 9: 1465-72.2- Gussow L. The optimal management of mushroom poisoning remains undetermined. West J Med. 2000 Nov; 173(5): 317–318.

Références

tableau i : toxidrômes des intoxications par différents champignons

Syndromes Symptômes Délais Exemples

Délai des symptômes de moins de 6 heures

Gastro-intestinal (syndrome résinoïdien)

Troubles digestifs isolés15 minutes à 3

heures (rarement jusqu’à 8 heures)

- Agaric jaunissant (Agaricus xanthoderma)

- Bolet Satan (Boletus santanas )

MuscarinienTroubles digestifs, hypersécrétions

salivaire et bronchique, sueurs profuses, troubles cardiovasculaires,

myosis

15 minutes à 2 heures

- Clitocybes (Clitocybe dealbata Clitocybe rivulosa, Clitocybe

cerussata)- Inocybes (Inocybe patouillardii,

Inocybe fastigiata, Inocybe geophylla)

Panthérinien

Troubles digestifs, troubles cardiovasculaires, troubles

neurologiques: agitation, ébriété, confusion, délire, hallucinations,

mydriase, convulsions, coma

30 minutes à 3 heures

- Amanite tue-mouches (Amanita muscaria)- Amanite panthère

(Amanita pantherina)

CoprinienRougeur de la face, du cou et du thorax, sueurs, nausées,

vomissements , troubles du rythme cardiaque

30 à 60 minutes (jusqu’à 3 jours si associé à la consommation

d’alcool)

Coprin noir d’encre (Coprinus atramentarius)

Narcotinien(psilocybien)

Au début : anxiété, nausées, asthénie, vertiges, troubles cardiovasculaires , troubles de l’humeur, hallucinations visuelles et auditives, désorientation

spatio-temporelle

15 à 30 minutes- Psilocybes (Psilocybe

semilanceata, Psilocybe bohemica, Psilocybe cyanescens)

- Panéoles (Paneolus subalteatus

Paxillien Troubles digestifs, anémie hémolytique

Paxille enroulée (Paxillus involutus)

Délai des symptômes de plus de 6 heures

Phalloïdien

- Formes bénignes : une gastro-entérite

- Formes moyennes : un tableau d’hépatite aiguë.

- Formes graves: des signes sévères d’hépatite aiguë, confusion, hémorragies digestives, insuffisance rénale, coma, décès

6 à 24 heures

- Amanite phalloïde (Amanita phalloides) - Amanite printanière

(Amanita verna) - Amanite vireuse (Amanita virosa)

OrellanienTroubles digestifs, douleurs

musculaires, asthénie physique, atteinte rénale

24 à 36 heures Cortinaire des montagnes (Cortinarius orellanus)

Gyromitrien

Troubles digestifs , hépatite dans 36 à 48 heures après consommation, troubles neurologiques: somnolence,

confusion, délire, tremblements, insuffisance rénale

6-24 heures Gyromitre (Gyromitra esculenta)

Proximien Troubles digestifs, cytolyse hépatique et insuffisance rénale

8 à 14 heures (1 à 4 jours pour l’atteinte hépato-

rénale)

- Amanite à volve rousse (Amanita proxima) - Amanite de Smith (Amanita smithiana)

Acromélalgien Fourmillements et brûlures des extrémités 24 heures

Clitocybe à bonne odeur (Clitocybe amoenolens)

Poison des Sasa, Champignon aux brûlures (Clitocybe acromelalga)

Rhabdomyolyse Rhabdomyolyse 1-3 jours Tricholome équestre (Tricholoma auratum)

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8 - Toxicologie Maroc - N° 28 - 1er trimestre 2016

intoxiCation phaLLoÏdienne : a propos d’un Cas admis au Chu d’oran

introduction

La cueillette et la consommation de champignons sauvages auxquels s’adon-nent saisonnièrement certains amateurs n’est pas sans risques. Si les champignons ne sont pas tous comestibles, certains sont toxiques voire mortels.

Les intoxications par les champignons ne constituent qu’une faible minorité des cas reçus au centre hospitalier universitaire d’Oran. Elles sont principalement liées soit à une confusion entre une espèce toxique et une espèce comestible, soit à une méconnaissance totale du risque toxique.

observation

Il s’agit d’un enfant de trois ans et demi, sans antécédents pathologiques personnels ou familiaux notables, habitant dans une localité rurale à quelques 70 Km au nord-est de Tiaret, ville de l’ouest algérien. Dix-huit heures après la consommation d’un repas contenant des champignons sauvages fraîchement cueillis lors d’une promenade en forêt avec son père, l’enfant est pris d’une gastro-entérite avec vomissements, diarrhée verdâtre, fièvre, fatigabilité et anorexie.L’enfant est amené en consultation le lendemain chez un médecin généraliste qui instaure un traitement associant dompéridone, paracétamol, trimébutine et céphalexine. Devant la persistance de la dysenterie aiguë de plus de deux jours, compliquée d’une altération de l’état général avec convulsions généralisées et signes d’atteinte hépatique, l’enfant est orienté vers un établissement public de santé. Une première échographie abdominale a objectivé une hépatomégalie

à 10,5 cm de la flèche hépatique sans splénomégalie. Le bilan biologique est revenu perturbé avec des transaminases élevées (SGOT/SGPT : 61/51 UI/L), une hypoglycémie à 0,53 g/L et un taux de prothrombine (TP) incoagulable signant la cytolyse hépatique. L’enfant a reçu une perfusion de sérum glucosé avec une ampoule de diazépam et a été évacué d’urgence au centre hospitalier universitaire d’Oran.

A son arrivée au service de pédiatrie, l’enfant présentait un tableau de coma hépatique : coma vigil avec œdème généralisé, une cholestase (ictère cutanéo-muqueux, selle blanche, urine foncée) et une hématémèse. Vu la dégradation rapide de son état neurologique, l’enfant est tout de suite transféré au service de réanimation-pédiatrique dans un état de coma stade II avec convulsions et hypertonie des membres supérieurs, des yeux en coucher de soleil, une tachycardie à 150 bpm, une polypnée à 44 cpm avec râles d’encombrement bronchique à l’auscultation, un œdème des paupières et du visage et un ictère surtout conjonctival. La sérologie lancée a éliminé l’hépatite A et la syphilis. Au vu de toutes les données anam-nestiques, clinico-biologiques et d’un avis de toxicologie, le diagnostic d’une intoxication phalloïdienne était le plus probable. L’enfant a donc été mis sous sérum glucosé avec équilibration hydro-électrolytique, transfusion de sang, vitamine K, ranitidine, albumine (hypo-albuminémie à 23,62 g/L à J3), lactulose, antibiothérapie (Néomycine, Pénicilline G) ainsi que de la N-acétylcystéine.Il a émergé du coma, progressivement, à partir de J3, avec disparition des convulsions et stabilisation sur le plan hémodynamique et respiratoire.

L’hépatomégalie et une cytolyse hépatique importante (SGOT/SGPT > 6000 UI/L, facteur V à 47%, temps de Quick à 20%, phosphatases alcalines à 226 UI/L, bilirubine totale à 56 mg/L, γ-GT : 23 UI/L) font discuter une transplantation hépatique. L’évolution est marquée par une amélioration de l’état de conscience avec régression de l’ictère cutanéomuqueux à partir de J5, régression des transaminases (SGOT/SGPT : 83/79 UI/L au dernier contrôle) et normalisation progressive du TP (19% à J3, 38% à J4, 59% à J5 et 100% à J8). Au bout de 9 jours d’hospitalisation, l’enfant est mis sortant en bon état général.

Discussion

La consommation de champignons cueillis ne fait pas tant partie des habitudes alimentaires de l’ouest algérien ce qui explique la rareté de ce type d’intoxication et justifie l’originalité de notre observation. Ce cas appartient en effet à une série exceptionnelle d’intoxications aux champignons notifiées en début d’automne 2008. Une importante pluviométrie enregistrée durant cette période a entraîné l’apparition dans différentes forêts du pays, de plusieurs sortes de champignons, dont la plupart étaient non comestibles. Les premiers cas d’intoxications sont apparus début octobre dans les villes de l’est du pays, en particulier Oum El Bouaghi, pour s’étendre vers d’autres villes de l’est ainsi que les villes du centre et de l’ouest. Au total, il y a eu 195 cas d’intoxication dont 16 décès [1].

Chefirat Bilel, Rezk-kallah HacibaService de Pharmacologie Toxicologie, Centre Hospitalier Universitaire d’Oran, Algérie

Département de Pharmacie, Faculté de Médecine, Université d’Oran, AlgérieLaboratoire de Recherche en Santé Environnement, Université d’Oran, Algérie

Cas Clinique intoxication phalloïdienne : a propos d’un cas admis au Chu d’oran

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Toxicologie Maroc - N° 28 - 1er trimestre 2016 - 9

Cas CliniqueL’intoxication phalloïdienne fait partie des syndromes à durée d’incubation longue qualifiés de syndromes majeurs et caractérisés par un temps de latence entre l’ingestion du champignon et l’apparition des symptômes [2]. La latence clinique dans notre observation a duré 18 heures.

Les champignons responsables du syndrome phalloïdien appartiennent prin-cipalement à trois genres (Tableau I). La reconnaissance des espèces dangereuses de champignons est souvent peu évidente pour le profane et la confusion entre un champignon toxique et un champignon comestible est l’une des premières causes d’intoxication comme c’est le cas de notre observation. A noter qu’il peut s’agir également d’une consommation d’un mélange d’espèces.

Aucun élément d’orientation n’a pu être obtenu sur la cueillette. De plus, le reste de cette dernière n’a pas été apporté par les parents pour un diagnostic mycologique qui reste le seul moyen pour reconnaitre l’espèce toxique [3].

Le syndrome phalloïdien est princi-palement lié à des toxines dites amatoxines qui sont résistantes à la cuisson, aux ferments digestifs et au vieillissement [3]. Elles exercent leur action cytotoxique par

inhibition de l’acide ribonucléique (ARN) polymérase II, avec, pour conséquence un blocage de la transcription, puis de la traduction. La mort cellulaire survient dans les 24 heures après épuisement du contenu intracellulaire en ARN messager [12, 13]. Les cellules hépatique et rénale et celles de l’épithélium intestinal sont les plus touchées, d’une part parce qu’elles sont particulièrement exposées au poison par la circulation entéro-hépatique et l’élimination rénale et d’autre part parce qu’elles disposent d’un système de transport actif qui véhicule le poison dans la cellule [13].

La littérature décrit le plus souvent, des intoxications collectives touchant tous les membres d’une même famille ou l’ensemble des consommateurs du repas toxique. Dans notre observation, l’enfant, très content de sa cueillette de la journée, est le seul à en avoir consommé.

Le syndrome phalloïdien a le pronostic le plus sévère parmi toutes les intoxications aux champignons [2]. Le taux de mortalité s’élève à 5-20% [14]. Chez notre patient, l’intoxication a évolué de façon classique en trois phases après une latence clinique : phase digestive, phase oligosymptomatique et enfin une phase d’hépatite clinique.

L’évolution a été favorable suite à une prise en charge thérapeutique avant tout symptomatique, en particulier la correction des troubles hydro-électrolytiques. La diarrhée, riche en toxines, a été respectée avec l’administration de lactulose [2].

De nombreux traitements “antidotiques” sont proposés dans la littérature dont deux ont été recommandés par l’équipe de toxicologie. La pénicilline G, connue pour inhiber la fixation des amanitines dans les hépatocytes [15], a été administrée à la dose de 5 MUI toutes les 6 heures de J1 à J6. La n-acétylcystéine a été employée pour son action antitoxique par inhibition de l’absorption intestinale et un effet protecteur des hépatocytes [15]. La néomycine a été également utilisée par les médecins durant toute l’hospitalisation de l’enfant et tient à ce qu’on appelle le protocole Bastien associant la néomycine à la vitamine C, au nifuroxazide et à un antiémétique pour le traitement des intoxications à l’amanite phalloïde [16]. Un autre “antidote” est recommandé par certains auteurs mais ne figure pas dans la nomenclature nationale des produits pharmaceutiques à usage de la médecine humaine en Algérie. Il s’agit de la silibinine extraite des graines de chardon-Marie (Silybum marianum).

tableau i : Principaux champignons responsables du syndrome phalloïdien et exemples de confusions possibles avec des espèces comestibles [4-11]

Espèces responsables du syndrome phalloïdien Espèces comestibles confondues

Amanita phalloides (amanite phalloïde)

Agarics : Agaricus campestris (rosé des prés)Amanites : Amanita vaginata (amanite vaginée)Russules à chapeau vert : Russula heterophylla (russule hétérophylle), Russula virescens (russule verdoyante), Russula cyanoxantha (russule charbonnière)Tricholomes : Tricholoma portentosum (tricholome prétentieux)Volvaires : Volvopluteus gloiocephalus (volvaire visqueuse)

Amanita verna (amanite printanière), Amanita virosa (amanite vireuse),

Amanita phalloides var. alba (amanite phalloïde variété blanche), Amanita decipiens (amanite trompeuse)

Agaricus silvicola (agaric des bois), Amanita ovoidea (amanite ovoïde), Tricholoma columbetta (tricholome colombette)

Lépiotes : Lepiota brunneoincarnata (lépiote brun rose), Lepiota brunneolilacina (lépiote brun lilas),

Lepiota helveola (lépiote brune), Lepiota helveoloides,

Lepiota subincarnata (lépiote incarnate)

Macrolepiota spp. (lépiotes comestibles), Marasmius oreades (mousseron d’automne)

Galères : Galerina marginata (galère marginée), Galerina venenata (galère vénéneuse) Kuehneromyces mutabilis (pholiote changeante)

intoxication phalloïdienne : a propos d’un cas admis au Chu d’oran

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Cas Clinique

1-Institut National de Santé Publique (INSP)-Algérie. Situation épidémiologique de l’année 2008 sur la base des cas déclarés à l’INSP. Relevé Epidémiologique Annuel 2008 ; 19,5. Consultable à l’URL : [http://www.sante.dz/insp/rem2008_annuel.pdf], [consulté le 08/07/16]. 2- Flesch F, Saviuc P. Intoxications par les champignons: principaux syndromes et traitement. In: Médecine d’urgence. Encyclopédie médico-chirurgicale 25-030-B-40. Paris: Elsevier Masson 2007. 3- Fathi M. Intoxication par l’amanite phalloïde. Labmed. 2004;31,9:317-320. 4- Base de données de la Société Mycologique du Nord de la France. Consultable à l’URL : [http://www.smnf.fr/] , [consulté le 10/07/16]. 5- Base de données des champignons du Québec. Mycoquébec Consultable à l’URL : [http://www.mycoquebec.org/] , [consulté le 10/07/16]. 6- Base de données mycologiques. MycoDB. Consultable à l’URL : [http://www.mycodb.fr/] (consulté le 10/07/16). 7- Henry M, Lectard P. Atlas des champignons toxiques. In: Toxicologie-Pathologie professionnelle. Encyclopédie médico-chirurgicale 16-075-A-10. Paris: Elsevier SAS; 1999. 8 p. 8- Saviuc P, Flesch F, Danel V. Intoxications par les champignons : syndromes majeurs. In: Toxicologie-Pathologie professionnelle. Encyclopédie médico-chirurgicale 16-077-A-10. Paris: Elsevier SAS; 2003. 9- Pulse C. Fiche technique de toxicovigilance : intoxications par les champignons supérieurs.

VIGItox 2003;22. Consultable à l’URL : [http://vigitox.cap-lyon.fr/system/revues/pdfs/000/000/022/original/Vigitox_22.pdf?1407245573] [consulté le 08/07/16]. 10- Ripert C. Mycologie médicale. Paris: Lavoisier / Tec & Doc; 2013. 11- Base de données Index Fungorum. Consultable à l’URL : [http://www.indexfungorum.org/ ]. [ Consulté le 10/07/16]. 12- Kahloul N, Mabrouk S, Rouatbi H, Amri F. Intoxication phalloïdienne : à propos d’un cas. Journal de pédiatrie et de puériculture. 2010;23:20-2. 13- Misselwitz B, Müllhaupt B, Maggiorini M, Kupferschmidt H, Seebach D-J. L’intoxication à Amanita phalloides : une indication de la transplantation hépatique?. Forum Médical Suisse. 2007;7:49-54. 14- Köppel C. Clinical symptomatology and management of mushroom poisoning. Toxicon. 1993;31,12: 1513-40. 15- Escudié L, Francoz C, Vinel JP, Moucari R, Cournot M, Paradis V et al. Amanita phalloides poisoning : reassessment of prognostic factors and indications for emergency liver transplantation. Journal of Hepatology. 2007;46:466-73. 16- Dumont AM, Chennebault JM, Alquier P, Jardel H. Management of Amanita phalloides poisoning by Bastien’s regimen. Lancet. 1981;1,8222:722. 17- Jaeger A, Jehl F, Flesch F, Sauder P, Kopferschmitt J. Kinetics of amatoxins in human poisoning : therapeutic implications. Journal of Toxicology-Clinical Toxicology. 1993;31:63-80.

Références

Après une discussion interdisciplinaire, l’indication d’une transplantation hépatique a été envisagée. Toutefois, avec l’amélioration de l’état neurologique, du bilan hépatique et des paramètres de la coagulation, elle n’a pas été retenue. D’après une étude française, une réévaluation des critères de décision d’une transplantation hépatique chez 27 cas d’intoxications phalloïdiennes indique que celle-ci doit être fortement envisagée chez les patients avec un intervalle entre l’ingestion et la diarrhée inférieur à 8 heures ; l’encéphalopathie n’en devrait pas être une condition préalable absolue. Un taux de prothrombine inférieur à 10% à J4 d’ingestion est à lui seul un outil fiable pour décider d’une transplantation d’urgence [15].

Ces critères ne sont pas remplis dans notre observation puisque la latence clinique a duré 18 heures et le TP à J4 était à 38%. Finalement, les troubles du patient se sont amendés assez rapidement et celui-ci a pu sortir de l’hôpital quelques jours plus tard.

Le dosage des amatoxines n’est pas de pratique courante. Il est considéré comme inutile dans la conduite du traitement [2]. Les études cinétiques réalisées chez l’homme ont montré que les amatoxines étaient présentes dans le plasma à de faibles concentrations et seulement pendant 24 à 48 heures suivant l’ingestion, et à de fortes concentrations dans les urines et les selles [17].

Conclusion

L’intoxication phalloïdienne est potentiellement grave mais peut être évitée en amont par une bonne connaissance des espèces comestibles de champignons. L’anamnèse est décisive pour le diagnostic de l’intoxication orienté par les trois phases cliniques caractéristiques après une période de latence. L’évolution de cette intoxication est conditionnée par une prise en charge thérapeutique précoce et en concertation pluridisciplinaire.

Déclaration d’intérêts : Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits

d’intérêts en relation avec cet article.

intoxications par les champignons,Cas cliniques déclarés au Capm

6ème CongRèS InTERnATIonAL DE ToxICoLogIE & LE 10ème CongRèS nATIonAL DE PHARMACoVIgILAnCE

toxiCoviGiLanCe-PhaRmaCoviGiLanCe : mUtUaLiSation DeS méthoDeS, oUtiLS et ConCePtS

14 décembre 2016: Pré-meeting “Health Vigilance: Definitions, Concepts, methods and tools”15 Décembre 2016: Médicament, en dehors des sentiers battus (mésusage, erreurs médicamenteuses, intoxications médicamenteuses, toxicomanie, phar-macodépendance)16 décembre 2016: -Toxicologie environnementale

-Intoxications par pesticides/armes chimiques-Envenimations-Intoxications par les gaz -Thèmes libres

Coordinatrice : Dr Naima [email protected] Tel : 06 82 30 26 15 www.smtca.ma www.smpv.ma

Hôtel Palm Plazza-Marrakech, du 14 au 17 Décembre 2016

La Société Marocaine de toxicologie clinique et analytique, la Société Marocaine de pharmacovigilance

organisent en collaboration avec le CAPM, la STC et la SFTA, le :

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Toxicologie Maroc - N° 28 - 1er trimestre 2016 - 11

Comment prévenir Les intoxiCations par Les Champignons

Prévention

Douira AllalLaboratoire de Botanique, Biotechnologie et de Protection des Plantes, Faculté des Sciences, Université Ibn Tofaïl, Kénitra

Lors de la cueillette des champignons, il est important de rappeler qu’il faut :- ne ramasser que les champignons que l’on est capable d’identifier avec précision aux différents stades de leur développement;- cueillir uniquement les spécimens en bon état et prélever la totalité du champignon (pied et chapeau), afin de permettre l’identification. Des exemplaires véreux de champignons habituellement comestibles peuvent devenir toxiques une fois vieillis (décomposition de la chair du champi-gnon);- éviter les sites pollués (bords de routes, friches industrielles, décharges) car les champignons concentrent les polluants, au moindre doute, jeter le champignon; - séparer les champignons récoltés, par espèce, et les déposer dans une caisse en carton mais jamais dans un sac en plastique qui accélère leur pourrissement. Examiner les spécimens un par un. En effet, la présence d’un seul spécimen toxique, égaré dans un panier de comestibles, pourra entraîner une intoxication ;

- bien se laver les mains après la récolte;- ne pas consommer la récolte avant de l’avoir fait contrôler par un connaisseur en la matière;- conserver à la maison les champignons dans un endroit frais et aéré sans les entasser et les garder pendant 2 jours au maximum après la cueillette;- bien nettoyer les champignons: enlever éventuellement la peau du chapeau, couper le bas du pied, rejeter tout le pied s’il est dur ou coriace (lépiote élevée, faux mousseron...) ;- savoir que les champignons sont en général difficiles à digérer : il est souhaitable de les découper finement, de bien les cuire (10 minutes au moins, 30 minutes pour les espèces à ne pas consommer crues) et de bien les mâcher. - ne jamais consommer de grandes quantités, de façon rapprochée dans le temps.- ne jamais consommer les champignons crus, certaines espèces sont comestibles cuites mais sont toxiques quand elles sont consommées crues (morille, amanite rougissante...) ;

- respecter les espèces vénéneuses lorsque l’on cueille des champignons comestibles : elles ont toutes leur rôle à jouer dans la nature ;

en cas d’intoxication :- En cas d’apparition d’un ou de plusieurs symptômes associés à une consommation de champignons de cueillette (tremblements, vertiges, troubles de la vue, nausées, vomissements…), il faut :- appeler immédiatement le CAPM ou conduire le malade aux urgences de l’hôpital.Il est utile de noter les heures du ou des derniers repas et si possible, récupérer des restes des champignons consommés pour l’identification et surtout ne rien donner à boire, ni eau, ni lait, ni alcool. Les symptômes peuvent apparaître le plus fréquemment dans les 12 heures après la consommation, mais dans certains cas, l’intoxication peut apparaître plus tard.

Le Centre Anti Poison et de Pharmacovigilance du Maroc a organisé, le 15 Mars 2016, la première réunion du Comité technique de toxicovigilance sur le thème : “Champignons et risques d’intoxications alimentaires au Maroc”. L’objectif étant de valider le signal déclenché par le CAPM concernant l’intoxication par les champignons.Au cours de cette réunion, le Pr Douira allal, professeur d’enseignement supérieur à la faculté des sciences (Université Ibn Tofail, Kénitra) a présenté la distribution des champignons toxiques et comestibles au Maroc en se basant sur sa grande expérience dans le domaine. Par la suite, Dr aoued Leila, médecin au CAPM, a présenté les cas cliniques d’intoxications par les cham-pignons déclarés au CAPM. Une longue discussion a été couronnée par la proposition d’un ensemble de recommandations dont, principalement, la sensibilisation et l’éducation de la population aux risques liés à la consommation de champignons de cueillette.

Comité teChnique de toxiCovigilanCe

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12 - Toxicologie Maroc - N° 28 - 1er trimestre 2016

tableau i : intoxication aiguë par l’éthanol : évolution de la symptomatologie en fonction de l’alcoolémie.

Alcoolémie (g /l) Stade Symptômes (% de sujet atteints)

0,1- 0,3 Infraclinique Pas de symptômes cliniques nets, ni d’effets mesurables objectivement

0,3- 1,0 Euphorie

Griserie. Levée des inhibitions psychiques. Augmentation de la confiance en soi. Légère incoordination motrice. Baisse de l’attention

25%

0,9- 2,0 Ebriété

Ivresse simple. Augmentation du temps de réaction. Troubles visuels. Surestimation des capacités, anxiolyse., Incoordination motrice, excitation

70%

1,5-3,0 Ivresse

Intoxication sévère, Troubles neurosensoriels nets, analgésie, Démarche ébrieuse, désorientation, Exacerbations des réactions émotionnelles, Troubles visuels très nets, apathie, léthargie, Propos incohérents, confusion mentale

90%

2,5- 4,0 Stupeur

Intoxication très sévère, Inertie, perte des fonctions motrices, Impossibilité de se tenir debout, Vomissements, incontinence, sommeil, Hypoglycémie, hypothermie, Décès possible, enfants très sensibles

95%

3,5- 5,0 Coma

Inconscience, coma, hypothermie, Hyporéflexie, bradypnée, mydriase, Incontinence, dépression respiratoire, Décès possible

100%

> 5,0 Mort Mort par arrêt respiratoire

dosage des aLCooLs au Laboratoire de toxiCoLogie et de pharmaCoLogie du CapmAit Daoud Naima 1,2, Badrane Narjis 1,2, Ghandi Mohamed 1,3, Elbouazzi Omaima 1,2, Benali Doha 1, Soulaymani-Bencheikh Rachida 1,4

1-Laboratoire de Toxicologie et de Pharmacologie, Centre Anti Poison et de Pharmacovigilance du Maroc, 2-Faculté des Sciences Ibn Tofail de Kenitra,

3-Faculté des Sciences de Rabat, Université Mohammed V Souissi, 4-Faculté de Médecine et de Pharmacie de Rabat, Université Mohammed V Soussi

Le Laboratoire de Toxicologie et de Pharmacologie du Centre Antipoison et de Pharmacovigilance du Maroc (CAPM-Lab) contribue à l’orientation du médecin clinicien dans les différentes situations d’intoxication auxquelles il est confronté à travers l’élaboration de protocoles de détection et de dosage de xénobiotiques. Parmi ces protocoles, figure celui du dosage plasmatique de l’éthanol et du méthanol.Les deux méthodes de dosage de l’éthanol et du méthanol ont été validées au niveau du CAPM-Lab sur le sang total humain en utilisant la chromatographie en phase gazeuse CPG (Agilent 6890N) avec un injecteur espace de tête “Headspace” (7694E) couplé au détecteur à ionisation de flamme (FID). La colonne capillaire utilisée est de type HP5 (30m*0.32 ID 0.25um). Le système d’acquisition et de traitement de données est obtenu grâce au logiciel Chemstation (REV A.10.02) [1,2].Selon les données du CAPM- Lab de janvier 2014 au Mars 2016, les analyses ont concerné 21 patients dont 40% des cas provenaient de l’hôpital Ibn Sina. La moyenne d’âge des cas était de 38,33± 16,86 ans. La tranche d’âge la plus représentée était celle de l’adulte avec un sex- ratio (M/F) de 1,62 (13/8). Un seul dosage d’éthanol était au-dessus de la limite de détection (0,1g/L).En effet, l’interprétation des dosages de l’éthanol est fonction du tableau clinique, du délai de l’intoxication et des variations intra- et inter- individuelles (Tableau I) [3].

1-1) Badrane N, Amri F, Khaya M, Ghandi M, Elmrabeh S, Ait Daoud N et al. Mise au point et validation d’une méthode de dosage du Méthanol dans le sang par Chromatographie en Phase Gazeuse avec injecteur « Headspace » couplée à un Détecteur à Ionisation de Flamme. IJIAS. 2014 ;7(3): 1038-1044. 2) Khaya M, Idrissi M, Soulaymani-Bencheikh R, Ghandi M, Ait Daoud N et al. Development and validation of a quantitative determination method of ethanol in Human Plasma: Experience of Laboratory of Toxicology and Pharmacology, Moroccan Poison Control and pharmacovigilance center. IJIAS. 2014 ; 7(2) : 655-661 .3) Kintz P. Toxicologie et pharmacologie médicolégales. Paris : Elsevier Masson 1998

Références

Laboratoire

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Toxicologie Maroc - N° 28 - 1er trimestre 2016 - 13

Journées régionaLes de sensibiLisation à La Lutte Contre Les envenimations

sCorpioniques et vépirinesrégion de beni mellal-Khénifra, avril 2016

Semlali Ilham Centre Anti Poison et de Pharmacovigilance du Maroc

Le Centre Anti Poison et de Pharmacovigilance du Maroc (CAPM) a organisé les 26 et 27 avril 2016 à Beni Mellal, la 4ème édition des journées régionales de sensibilisation à la lutte contre les envenimations scorpioniques et vépirines, en collaboration avec la Direction Régionale de Beni Mellal-Khénifra, la société Marocaine de Toxicologie Clinique et Analytique (SMTCA) et l’Association ARRAW BIN, sous le thème : “Pour une meilleure prise en charge des envenimations scorpioniques et vipérines”; et ce dans le but de renforcer la Stratégie Nationale de lutte contre les envenimations scorpioniques et vépirines.

Ont assisté à cette manifestation des participants de la Direction Régionale, des délégués du Ministère de la Santé, des directeurs des d’hôpitaux et des chefs de services de pédiatrie, des urgences et des services de la

réanimation, des médecins et infirmiers et certains médecins et pharmaciens du secteur privé de la région, ainsi que des représentants d’autres secteurs (Académie régionale de l’éducation et

de la formation, Faculté des Sciences et de la Technologie à Beni Mellal, Direction Régionale du Ministère de la Culture, des représentants du conseil des Oulémas, des représentants des communes locales, et des journalistes pour la couverture médiatique).

Cette manifestation s’est étalée sur deux jours: - La première journée a été consacrée à un symposium scientifique au profit des professionnels de santé autour de la stratégie nationale de lutte contre les envenimations, les caractérisations vénomiques des espèces de vipères marocaines, la situation épidémiologique des Piqures et Envenimations Scorpioniques (PES) au niveau de la région, les facteurs pronostiques des PES, caractéristiques des espèces de scorpion dangereuses au Maroc et caractéristiques cliniques et thérapeutique des PES et des envenimations ophidiennes.

Journée scientifique, Béni Mellal, 26 avril 2016

Atelier de formation pour les agents communautaires, Bin-Elouidane, 27 avril 2016

Rapport

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14 - Toxicologie Maroc - N° 28 - 1er trimestre 2016

LanCement de La Campagne nationaLe de Lutte Contre Les envenimations seCondaires

aux piqures de sCorpionsmarrakech, mai 2016

Rhalem Naima Centre Anti Poison et de Pharmacovigilance du Maroc

Monsieur le Ministre de la santé a donné le coup d’envoi de la campagne de lutte contre les piqures et envenimations scorpioniques (PES) pour l’année en cours à Marrakech, le 13 mai 2016, sous le thème : “Protégeons nous contre les piqures du scorpion”. Dans le cadre de cette campagne et ayant pour objectif d’arriver à zéro décès, le Ministère de la Santé continue sa lutte en appuyant les différents axes de la stratégie coordonnée par le Centre Anti Poison et de Pharmacovigilance du Maroc (CAPM), à savoir :- le renforcement de la formation des professionnels de santé, - l’implantation d’agents communautaires au niveau des zones à haut risque ; - l’organisation des différents niveaux de prise en charge en adéquation avec la hiérarchisation des patients ;- l’amélioration du transport médicalisé des patients envenimés ; - l’amélioration de la gestion des “Kits des médicaments pour la PEC des PES”, délivrés par le CAPM;- l’élaboration d’un programme Information Education Communication (IEC) soutenu afin de diminuer le nombre de piqures et d’éviter les moyens traditionnels dangereux

- et enfin la coordination multisectorielle et avec les ONG.Par ailleurs, il est à noter que, depuis 20 ans, le Ministère de la Santé déploie ses efforts pour lutter contre les piqures et envenimations scorpioniques grâce à une stratégie nationale mise en place en 1999. Cette stratégie a permis de maitriser l’épidémiologie des piqures et envenimations scorpioniques, de réduire les décès par cette pathologie qui sont passés de 400 décès en 1989 à 56 en

2015 et de maitriser les dépenses en santé engagées pour la prise en charge des patients.

Dans le cadre de cette campagne, Monsieur le Ministre a tenu à remercier les professionnels de santé qui jouent un rôle important dans la lutte contre les PES en la personne d’un certain nombre de médecins aussi bien du CAPM que de la région de Marrakech-Safi.

Rapport

Monsieur le Ministre de la santé lors du lancement de la campagne contre les PES

Enfin, l’expérience de l’association “ARRAW BIN” dans le cadre de la lutte multisectorielle contre les PES au niveau de la commune Bin Elouidane a été présentée.

Des recommandations ont été retenues:- Sensibilisation et éducation du grandpublic dans le cadre des activitésmultisectorielles,- Formation continue pour les profession-nels de santé au niveau de la région,- Renforcement du système de déclarationdes cas,

- Renforcement de la dotation des hôpitaux en sérum anti-vipérin en quantité suffisante et distribution du matériel IEC.

- La deuxième journée a été consacrée à un atelier de formation : “Rôle d’un agent référent dans la lutte contre les piqûres et envenimations scopioniques”, animé par Dr Rhizlane El Oufir du CAPM, pour l’encadrement des volontaires communautaires de Bin Elouidane.

Cette journée a débuté par la signature d’une convention de coopération entre le CaPm et l’association aRRaW Bin.

Les principes de la coopération ont été définis sur quatre plans principaux: - informer la population, - former les agents communautaires et le personnel médical, - distribuer les outils nécessaires - et mobiliser les autorités.

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Toxicologie Maroc - N° 28 - 1er trimestre 2016 - 15

Alertes du CAPM

attention au poisson lapin Aoued Leila

Le CAPM a reçu un appel d’un citoyen de la ville d’Al-Hoceima, qui a trouvé accidentellement sur la plage un poisson venimeux, le “poisson lapin”. Il s’agit du “Lagocephalus sceleratus”, ayant plusieurs appella-tions : poisson coffre, poisson ballon, “Bouchkara”… C’est un poisson osseux de la famille des tétrao-dontidés. Il mesure environ 40 cm, pèse 3,4 kg en moyenne, a 4 dents, un dos gris ou brun à points fon-cés, un ventre blanc avec bande large argentée, une nageoire caudale symétrique et un appareil vénéneux. L’intoxication se produit le plus souvent suite à l’inges-tion du poisson car la peau et les viscères renferment la tétrodotoxine qui est un poison puissant, résistant à la chaleur [1]. Il peut être également toxique suite à une piqure par les rayons des nageoires dorsales. Les premiers signes d’intoxication apparaissent entre 5 à 45 mn après la consommation, et la plupart des signes clinique se développent dans les 6 heures post-ingestion [2]. Le tableau clinique est composé schématiquement de 4 grades selon la gravité [3] :Grade 1 : picotement de la langue et des lèvres, pares-thésies buccales, parfois nausées et vomissements.Grade 2 : engourdissement du visage, troubles de l’élo-cution, paralysie motrice précoce, incoordination des doigts et des membres, vertiges, sueurs et céphalées. Grade 3 : paralysie généralisée, troubles digestifs inconstants, dysphonie, hypersialorhée, dyspnée, cyanose, douleurs précordiales, hypotension, myosis au début puis mydriase avec perte du reflexe cornéen. Grade 4 : en deux heures, installation de bradycardie, arythmies cardiaques, insuffisance respiratoire sévère avec hypoxie. En absence de ventilation assistée, la mort peut survenir suite à un arrêt respiratoire.La prise en charge repose sur un traitement sympto-matique avec le maintien d’une bonne diurèse pouraccélérer l’élimination de la toxine. Les patients asymptomatiques doivent être observés pendant 8 heures après l’ingestion. Le CAPM attire l’attention des professionnels de la mer et de la population pour ne pas pêcher ni consommer ce poisson dangereux

1- http://www.ncbi.nlm.nih.gov/entrez/query.fcgi?cmd=Retrieve&db=pubmed&dopt=Abstract&list_uids=12463990» \t «_blank» Isbister GK et coll. Puffer fish poisoning: a potentially life-threatening condition. Med J Aust 2002 Dec 2-16; 177 (11-12): 650-3.2- Liao SC, Yang CC, Deng JF. Tetrodotoxin poisoning in Taiwan – ten years’ review of the PCC data [abstract]. J Toxicol Clin Toxicol 1995; 33: 534.3- Kaku N, Meier J. Clinical toxicology of fugu poisoning. In: Meier J, White J, editors. Handbook of Clinical Toxicology of Animal Venoms and Poisons. New York: CRC Press; 1995. p

Sécurité d’emploi du CorossolSkalli Souad

Le CAPM a reçu deux demandes de renseignements quant à la sécurité d’emploi d’un fruit appelé coros-sol, ou graviola, chez des patients cancéreux. Ces fruits seraient importés de l’Afrique subsaha-rienne et les produits à base de corossol, le seraient des Etats Unis, via le e-commerce. Ils sont recom-mandés sur le net et les réseaux sociaux comme étant “des anticancéreux puissants”.Il s’agit des fruits des corossoliers, arbres du genre Annona (Annona muricata, de la famille des Annonaceae), qui poussent en Afrique, Amérique et Asie.L’analyse phytochimique des extraits du corossol a révélé qu’ils sont riches en composés de métabo-lites secondaires : alcaloïdes, saponines, terpènes, flavonoïdes, coumarines, lactones, anthraquinones, tanins, glycosides cardiaques, phénols et des phy-tostérols [1], lesquels sont pharmacologiquement actifs et ont un potentiel toxique. Les compléments alimentaires à base d’espèces d’Annonaceae (Annona muricata, A. squamosa, A. muqueuse) ont été analysés in vitro sur les neurones mésencéphaliques humains. L’extrait de pulpe de fruits d’A. muricata a l’effet le plus neuro-toxique, avec 67% de mort cellulaire à une concen-tration de 1 pg/ml. Une forte réduction de la viabilité cellulaire associée à la mort cellulaire prononcée a été également trouvée à 0,1 pg/ml pour un extrait de pépins. Ces résultats démontrent que la consomma-tion de ces compléments alimentaires peut être dan-gereuse pour la santé en termes de neurotoxicité [2]. Des interactions probables entre ces produits et le traitement de chimiothérapie sont aussi à prendre en considération. L’usage de ces produits semble être fréquent au Maroc mais reste non quantifié. Le CAPM a jugé utile d’attirer l’attention des patients cancéreux et des oncologues sur cet usage et ces effets neu-rotoxiques. Cet usage reste en effet non fondé sur des études scientifiques qui prouveraient l’efficacité de ces produits contre le cancer.

1- Gavamukulya Y et al. Asian Pac J Trop Med.2014;7S1: S355-63. Phytochemical screening, anti-oxidant activity and in vitro anticancer potential of ethanolic and water leaves extracts of Annona muricata (Graviola)2- Höllerhage M et al. Neurotoxicity of Dietary Supplements from Anno-naceae Species. Int J Toxicol. 2015;34(6):543-50.

addad (chardon à glu), une plante mortelle

Skalli Souad

Le CAPM a reçu un cas de décès suite à l’usage à but thérapeutique du chardon à glu ou “Addad”.Il s’agit de la plante Atractylis gummifera (famille des Asté-racées) qu’une maman a appliqué à son enfant de 7 ans pour le traiter des brûlures sur son corps. Vingt-quatre heures après l’application de la plante sur toutes les par-ties brulées, l’enfant a présenté des vomissements, une hypothermie, une mydriase bilatérale, une impulsivité, un coma avec un Glasgow à 3 puis il est décédé. Toutes les parties de la plante contiennent les principes toxiques du chardon à glu qui sont l’atractyloside et la carboxyatractyloside ou gummiférine. Ce sont des poisons mitochondriaux qui bloquent les phénomènes d’oxydoréduction intervenant dans la formation de l’ATP. Ils sont à l’origine de l’augmentation de la consommation du glucose, de l’épuisement du stock hépatique et mus-culaire en glycogène et de l’inhibition de la genèse du glycogène [1]. Des tableaux cliniques plus complets ont été décrits pour l’intoxication au chardon à glu, associant des troubles digestifs (nausées, vomissements, sensa-tion d’âcreté dans la bouche, selles diarrhéiques, noi-râtres et fétides), neurologiques pouvant aller jusqu’au coma qui s’accompagne de contractures, rigidité de dé-cérébration, trismus, collapsus, encombrement, hyper-salivation avec apnée au stade final et avec des signes hématologiques (purpura et hémorragies digestives, bronchiques, pulmonaires et urinaires). Des troubles neurovégétatifs sont souvent notés et sont représentés par l’hypothermie. Dans les cas plus graves, s’ajoutent des complications respiratoires, cardiovasculaires et hépato-rénales [2]. Au Maroc, l’ingestion du chardon à glu, à la suite d’une erreur chez des enfants du milieu rural, est la plus fréquente et détermine des accidents graves qui conduisent à une issue fatale dans un grand nombre de cas. Le décès lié à l’usage de cette plante à but théra-peutique en application externe reste rare mais justifie d’attirer l’attention sur ce mésusage mortel. L’utilisation d’Addad comme anti-brûlure n’est même pas rapportée dans la médecine populaire marocaine et l’application de la plante sur une peau brulée entraine une administration systémique directe du principe toxique de la plante.

1- Georgiou M, Sianidou L, Hatzis T, Papadatos J & Koutselinis A. Hepatotoxicity due to Atractylis gummifera L. Clin Toxicol, 1988, 26, 487-493.2- Skalli S, Alaoui I, Pineau A, Zaid A, Soulaymani R. L’intoxication par le chardon à glu (Atractylis gummifera L.) ; à propos d’un cas cli-nique. Bull Soc Pathol Exot, 2002, 95, 4, 284-286.

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