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Où est la maison de mon ami Abbas Kiarostami Iran 1987 Fiction Couleur 83mn « Le cinéaste iranien Abbas Kiarostami tourne aux confins du documentaire et de la fiction. Influence du néo-réalisme italien 1 (voir le voleur de bicyclette de Vittorio de Sica, programmé l’année dernière), certes, mais aussi parce que Kiarostami se veut pédagogue, non comme un maître d’école mais comme un fabuliste et un moraliste, l’un ne va pas sans l’autre (pas de fable sans morale.) Dans une fable, la fiction est comme un grain de sel : elle sert à faire ressortir de et dans la réalité une vérité qu’on ne voyait pas ou ne voulait pas voir.» François Niney « Plus d’acteurs, plus d’histoire, plus de mise en scène, c'est-à-dire enfin dans l’illusion esthétique parfaite de la réalité : plus de cinéma. » André Bazin à propos du néo-réalisme 1 Voir l‘exposition virtuelle très riche sur ce sujet : http://cinema.neorealisme.bifi.fr/ école et cinéma 2007/2008 1

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Où est la maison de mon ami Abbas Kiarostami

Iran 1987

Fiction Couleur

83mn

« Le cinéaste iranien Abbas Kiarostami tourne aux confins du documentaire et de la fiction. Influence du néo-réalisme italien1 (voir le voleur de bicyclette de Vittorio de Sica,

programmé l’année dernière), certes, mais aussi parce que Kiarostami se veut pédagogue,

non comme un maître d’école mais comme un fabuliste et un moraliste, l’un ne va pas sans

l’autre (pas de fable sans morale.) Dans une fable, la fiction est comme un grain de sel : elle

sert à faire ressortir de et dans la réalité une vérité qu’on ne voyait pas ou ne voulait pas

voir.» François Niney

« Plus d’acteurs, plus d’histoire, plus de mise en scène, c'est-à-dire enfin dans l’illusion

esthétique parfaite de la réalité : plus de cinéma. » André Bazin à propos du néo-réalisme

1 Voir l‘exposition virtuelle très riche sur ce sujet : http://cinema.neorealisme.bifi.fr/

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Le cinéma de Kiarostami, reconnu internationalement et représentatif du renouveau du

cinéma iranien, est d'abord un cinéma qui touche et offre des émotions réelles à ses

spectateurs.

« Je me souviens qu'après avoir fait Où est la maison de mon ami ?, quelqu'un a dit à un ami

que ce film était très politique. Quand mon ami lui a demandé pourquoi, il lui a répondu : à

cause du nom des personnages, Mohamad Reza Nematzadeh. Il a ajouté : parce que son

prénom est celui du dernier roi d'Iran (Mohamad Reza Pahlavi) et que son patronyme est

Nematzadeh - qu'on peut traduire par Cadeau de Dieu. Plus tard, j'ai appris que cet homme

travaillait à la télévision nationale d'Iran et qu'il en fut congédié après la Révolution. Un film doit être multidimensionnel, avec plusieurs couches, si bien que n'importe quel spectateur, avec n'importe quel bagage, peut s'y rattacher. Qui a le droit de dire non et

de les priver de leur compréhension du film ? » A.K

Kiarostami est non seulement cinéaste mais aussi photographe et poète et pour lui la

question de savoir qu'est-ce qu'être artiste passe par le fait de rester un artiste dans son

pays.

Le titre, la carte postale ☼ Pour aiguiser leur curiosité, avant la projection, vous pouvez leur donner le titre, leur

montrer les images de la carte postale. Pleins d’indices peuvent déjà leur permettrent de voir

quel type de film ils vont voir (personnages, décor, couleur, cadrages, etc.).

Après la projection, vous pouvez revenir sur ces images, se poser la question de

l’importance donnée au personnage de Nématzadé, que l’on voie finalement très peu dans

ce film.

☼ Le titre également déclenche un imaginaire. Il influe énormément sur la vision du film. Le

spectateur ne quitte jamais le titre pendant la projection, il en attend déjà quelque chose.

Le générique

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le titre

Le nom du réalisateur Une autre écriture, une autre culture, un autre graphisme, différent du premier trimestre.

C’est déjà le début du film, une porte qui claque, un fond sonore, sans doute bien connu des

enfants, peut-être universel ?

Des mots « clés » : in Allons z’enfants au cinéma édité par les enfants de cinéma

épreuve, amitié, désir, poésie, solitude, chemin, fleur

☼ Et vous si vous deviez dire juste un mot après avoir vu ce film, ce serait lequel ?

☼ Ce peut-être également une image, à raconter, décrire, à dessiner.

Le genre : une fiction « Ma perception du réel est toujours la source, la force motrice qui me pousse à réaliser des

films. Le réel a toujours une puissance de fiction et de poésie qui me porte et stimule une

activité créatrice. Je reste donc toujours fidèle, de cette manière, à la réalité » A.K

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Ce film raconte une histoire. Cette histoire a été écrite et inventée par le cinéaste mais avec

pour objectif de mieux nous parler de l’enfance, de l’Iran, du réel, du monde. Sa forme est

très proche de ce qu’a cherché le cinéma néo-réaliste, avec ce souci de mettre le spectateur

face à des objets parfois très comparables au documentaire. La trame narrative de ce film

est très mince et pourtant, à partir de ce voyage initiatique qu’Ahmad effectue, elle permet

d’aborder des sujets aussi fondateurs que l’enfance, la transgression, la loi, l’amitié, la

responsabilité…

Ce cinéaste se sert du cinéma et de ses possibilités de mise en scène et de fiction pour

transmettre à son spectateur des émotions universelles.

Le langage cinématographique Bien que ce film se rapproche d’un cinéma qui semble documentaire, Kiarostami maîtrise et

utilise beaucoup de paramètres de mise en scène plutôt liés au cinéma de fiction.

La Lumière Elle est naturaliste. Comme chez les néo-réalistes, il n’était pas question de sculpter le réel

avec des lumières, de créer une ambiance, très peu d’éclairages artificiels sont utilisés lors

des prises de vues.

Parfois, le système D fonctionne aussi, ainsi, pour illuminer la salle de classe, l’école a été

enveloppée d’un drap blanc, voir image p.4 du Cahier de notes.

Cette véracité de la lumière est très importante pour le cinéaste, c’est pourquoi dans la

séquence avec le menuisier, la nuit tombe d’un plan à l’autre dans la même séquence.

Le cinéma n’est pas capable d’enregistrer ces lumières intermédiaires sans les recréer de

toutes pièces. Kiarostami préfèrera l’invraisemblance de cette nuit qui tombe d’un coup dans

une même séquence comme gage de vérité au détriment d’une réalité visuelle.

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Idem pour la séquence du retour d’Ahmad, non seulement cette ellipse apporte une large

place au mystère mais il aurait été totalement impossible économiquement d’éclairer ce

retour, et la possibilité de faire une nuit américaine2 est bien loin de la position éthique du

cinéaste.

Couleur La palette de Kiarostami est très singulière, ces couleurs froides sont sans doute

représentatives des décors et des paysages d’Iran mais ici d’abord le choix du metteur en

scène. Les couleurs primaires sont totalement absentes.

A ce titre, la programmation de cette année est intéressante, à partir des cartes postales,

vous pouvez comparer les différentes palettes.

Décor Kiarostami raconte souvent l’étonnement des journalistes ou des spectateurs quand il

explique que beaucoup de décors dans ses films sont construits spécialement même si il 2 La nuit américaine est une technique cinématographique qui permet, grâce à une sous-exposition de la pellicule et/ou à l'utilisation d'un filtre, de tourner de jour des scènes, généralement en extérieur, censées se dérouler diégétiquement la nuit.

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s’attache à ce qu’ils soient le plus représentatifs possible. En tous les cas, c’est aussi par

ces décors que le spectateur occidental voyage en Iran.

Un autre pays, une autre culture La salle de classe

L’architecture des habitations

La cour

La mère y lave son linge

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La maison

Ahmad va chercher l’eau chaude au samovar, pas de cuisinière électrique ou de four à

micro-onde pour faire chauffer le biberon !

Les villages

Les paysages

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Les décors du parcours Voir cahier p.35

« Cet intervalle entre les deux villages n’est donc pas du tout le même selon qu’on le

considère du point de vue filmique (où il se réduit à quelques plans), du point de vue

psychique de Ahmad ( c’est le passage d’une frontière entre le connu et l’inconnu) et du

point de vue réel (une distance d’un quart d’heure de marche). C’est que le même segment

de monde, pour Kiarostami, relève en même temps de toutes ces perceptions :

cinématographique, imaginaire, réelle. »

Leitmotiv du parcours initiatique de Ahmad, ces séquences permettent aussi de ponctuer le

film.

Le chemin en z

à l’endroit à l’envers ! L'arbre en haut d'une colline ou la répétition du motif de l'arbre sont très présents dans les

miniatures persanes. Au-delà de l’aspect visuel, de la beauté de cette image en soi, ce

chemin tracé en lacet est long pour Ahmad mais aussi il permet de faire durer ce plan pour le

spectateur. Il a été dessiné comme tel dans ce paysage pour que nous sentions bien la

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frontière entre son univers familier et « l’autre côté ». Ahmad est tout petit et bien vulnérable

dans ce décor !

Ce plan va rythmer les départs et les retours dans son village.

La ligne de crête

La forêt d’oliviers

Le cimetière et son chien

La bande sonore

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A l’instar de l’image, la bande sonore a l’air réaliste alors que Kiarostami rajoute très souvent

des sons au montage, souvent d’animaux, afin de créer une ambiance particulière et souvent

inquiétante.

La séquence avec le chat qui miaule, qu’on ne verra jamais, a sans doute était rajouté qu’au

montage afin de traduire la détresse morale de Ahmad.

Très souvent Kiarostami va à l’épure et le son lui permet de créer une atmosphère sans trop

en rajouter soit dans la narration, soit dans l’image. L’utilisation des aboiements de chien, du

vent qui souffle… sont là pour traduire la détresse morale de Ahmad, apporter de

l’inquiétude à certaines scènes.

La musique Très peu présente, car assez à l’encontre de ce type de cinéma, elle accompagnera pourtant

Ahmad dans ces échappées, plutôt gaie, elle leur donnera des airs de fête.

Découpage / Montage Séquence d’ouverture, scène maîtresse de la narration

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Dès l’ouverture du film, Kiarostami impose par son découpage un point de vue qui nous met

d’emblée du côté de l’émotion. Tout le suspense qui tiendra le spectateur en haleine et la

crédibilité de la détermination d’Ahmad se joue dans cette séquence. La manière dont le

cinéaste nous raconte cette scène, le choix des plans, leur taille, leur durée, est essentielle

et fonction de la place dans laquelle le cinéaste veut asseoir son spectateur.

1 - Plan d’ensemble, l’instituteur se rapproche de nos héros.

2 et 3 Contre champ, le cinéaste se rapproche franchement des garçons et nous les

présente, l’un puis l’autre. Le spectateur va alors être de suite attentif à ce qui va leur arriver.

4 – Plan moyen de nos deux personnages, le plan dure. L’instituteur sermonne Nématzadé,

Ahmad est également présent dans l’image et le spectateur sera aussi attentif à sa réaction.

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5- L’instituteur déchire les devoirs de Nématzadé. Le gros plan ne sera jamais privilégié pour

ce personnage.

6 – Contre champ sur Ahmad et les pleures de Nématzadé en off. Par ce plan, Kiarostami

privilégie ce personnage, dont on comprendra l’enjeu plus tard. Sans doute que le spectateur

se projette aussi plus facilement dans ce personnage, spectateur également de la scène.

7- Nématzadé pleure. Ces deux plans des enfants vont s’alterner.

Nos spectateurs seront peut-être aussi attentifs à des détails comme la propreté des mains

de ce personnages !

Scène finale

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Cette séquence précède la fin du film. Elle crée une rupture dans le film, cette longue

promenade avec ce personnage hors du temps, dans ce décor féerique, fait alors basculer le

film du côté du merveilleux. On peut même se demander si la mémoire d ‘Ahmad et ses

impressions n’ont pas transformé la perception qu’il a eu du réel.

Cette ellipse permet à Kiarostami de ne pas montrer la violence de la punition. Kiarostami

explique que dès le scénario, c’était prévu comme cela, le spectateur est alors encore plus

inquiet, le plan nous montre Ahmad assis et durant ce temps le spectateur cogite sur autre

chose. Durant, la scène précédente également, lorsque l’on s’attarde sans aucune raison

narrative chez le menuisier. Kiarostami pense que c’est ainsi plus pertinent de ne pas le

montrer. « Le cinéma peut éviter de montrer la violence, ce langage permet par la mise en

scène, sans falsifier la réalité, de montrer autrement. »

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Contrechamp du père, le silence continue à donner du poids à cette scène.

Découpage encore à l’essentiel, la mère passe en amorce, on l’a entendu en off, Kiarostami

ne s’attarde pas sur elle.

Le spectateur comprend à ce moment là la solution qu’il a trouvée. Kiarostami n’insiste pas

visuellement, pas de gros plan sur les deux cahiers et les devoirs faits deux fois. Encore

plutôt une atmosphère pesante avec cette porte qui s’ouvre vers la nuit, du vent qui souffle et

encore un chien qui aboie.

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Seul effet du film, ce fondu enchaîné va faire la transition avec la scène finale.

Le spectateur ne sait pas encore si Ahmad et Nematzadé vont s’en sortir. Cet effet est sans

doute pour Kiarostami une manière d’apporter l’inquiétude du vent dans cette dernière scène

encore oppressante pour le spectateur qui ne connaît pas le dénouement heureux.

La fin

Une fin heureuse, et cette fleur symbole onirique de toute cette épopée, qui aura permis à

Ahmad « d’accéder à la fois au mystère du monde et au libre-arbitre » Alain Bergala in

Cahier p.14

Point de vue

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Caméra à la hauteur des enfants.

Un film qui parle de l’enfance mais aussi littéralement à hauteur d’enfant.

Une autre expérience de la durée La construction narrative de cette histoire est très proche d’un temps « réel ».

Approche technique et esthétique du cinéma présente dès son premier court métrage : Le pain et la rue (1970)

A.K. : Pendant que je travaillais pour l'Institut

pour le développement intellectuel des enfants

et des jeunes adultes, à la fin des années

1960, j'ai lu de nombreux scénarios, mais c'est

celui-ci qui a attiré mon attention. C'est sl'unité de temps qui m'attirait. Il illustrait une histoire qui se déroulait en 12 minutes, il n'y avait donc pas besoin de déconstru

le temps. Je savais que déconstruire le temps pour en montrer le passage soumet les

cinéastes à des clichés et des conventions. C'était donc un défi intéressant pour moi qud'amener le temps cinématographique et le vrai temps aussi près l'un de l'autre que possible, sans utiliser ces conventions. Le pain et la rue fut ma première expérience a

cinéma et, je dois le dire, elle fut très difficile. J'ai dû travailler avec un enfant très jeune, un

chien et une équipe non professionnelle, sauf pour le directeur de la photographie q

n'arrêtait pas de se fâcher et de critiquer. Et, dans un sens, il avait raison parce que je ne

suivais pas les conventions du cinéma avec lesquelles il était familier. Il insistait pour

découper les scènes. Par exemple, un plan éloigné de l'enfant approchant, un gros plan de

la main de l'enfant et puis, quand l'enfant entre dans la maison et ferme la porte, un plan

chien qui va se coucher sur le pallier, etc. Mais je croyais que si on pouvait les avoir tous les

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deux (l'enfant et le chien) dans un seul plan, avançant dans le cadre, l'enfant entrant da

maison et le chien décidant de dormir à la porte, l'impact serait plus profond. Je crois que

c'est le plan séquence le plus difficile que j'ai jamais tourné de ma vie. Pour ce plan-là, nous

avons dû attendre 40 jours et changer de chien trois fois, l'un deux ayant même la rage.

Malgré tous les problèmes auxquels nous avons fait face, ça c'est finalement passé, ça a

cliqué. En un sens, ce film est le résultat de mon manque de connaissance des conve

cinématographiques. Maintenant, quand j'y pense, j'en conclus que j'ai pris la bonne

décision. Je crois que découper une scène - même si cela peut contribuer au rythme du film

- peut facilement heurter la réalité et le contenu du film. »

ns la

ntions

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Quelques pistes

Mise en parole Ce film va susciter chez les enfants des discussions. Je pense que vous pouvez revenir sur

certaines scènes du film pour connaître leur point de vue, voir comment ils ont ressentis

certaines situations.

La responsabilité, …

« Mais c’est de ma faute », cette culpabilité et son enjeu (la sentence du maître) lui fera

transgresser l’autorité des adultes.

… la loi et ses figures (Voir Cahier p.9), la désobéissance, la dette morale, la solitude, la

quête, les adultes, l’injustice, la ténacité, la peur, …

… autant de thèmes traités dans ce film, portés par ce petit garçon de 8 ans dans lequel nos

spectateurs vont facilement se projeter.

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L’Iran et son milieu rural traditionnel Un film contemporain mais qui décrit un univers qui semblera sans doute à nos spectateurs

d’un autre temps.

Les générations vivent sous le même toit. La cour de récréation

Les enfants qui aident leurs parents après l’école.

Les femmes portent le foulard et se mélangent rarement aux hommes.

Ces personnages secondaires, ces figurants, donnent à ce film cette forme documentaire.

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Cela dit cette scène n’a pu être filmé en un seul plan, faute de recul, car cette maison était

entourée d’immeuble moderne. Le cinéaste a donc sélectionné son décor pour nous montrer

uniquement cet aspect pauvre et rural de l’Iran.

Miniature persane Difficile de ne pas voir l’influence de sa culture dans la construction plastique de ses images. Caractéristique de la miniature :

- Importance de la lumière. Absence d’ombres.

- Pas de perspective. Juxtaposition d’événements. Les apparences du monde deviennent

des signes qui mènent à la vérité.

- Figures du jardin, de l’arbre, du ruisseau.

- Importance du dehors. L’espace s’ouvre et efface les frontières entre le dedans et le

dehors jusqu’à engendrer un univers unique.

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Le Cahier Enjeu central du film, il est aussi l’objet symbolique de l’éducation. Toujours d’actualité « ce

cahier » est de nouveau à l’affiche dans une autre fiction réalisée par la fille d’un autre

réalisateur iranien de renom, HANA MAKHMALBAF.

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Abbas Kiarostami entre orient et occident Extrait de la Conférence-débat avec Alain Bergala

dans le cadre des séminaires des cahiers du Cinéma, du Café des images et du CDN

L'art en Iran

L'Invasion arabe date de 642. La Perse, à la grande et longue culture, adopte alors l'islam

mais lui donne un caractère propre. L'Islam interdit l'imitation des créatures animées ce qui

n'interdit par la figuration de personnage.

Ce qui est interdit c'est la figure comme le double d'un être vivant ainsi sont interdits l'art du

portrait et la mimesis. Cet interdit ne figure pas dans le Coran où parle le prophète mais

seulement dans l'un des textes qui rapporte les paroles du prophète.

Le but de l'art n'étant pas l'imitation, il y a refus de la perspective qui imite la perception

humaine, de cette illusion optique qui voudrait imiter la perception du réel. L'art islamique

supprime aussi les effets d'ombre et de lumière et le modelé, toutes techniques qui génèrent

des formes ayant pour but d'imiter le monde. L'art islamique privilégie les aplats et génère un

monde autonome de formes et de couleurs qui répond à des règles mathématiques, à des

compositions secrètes que, seuls, les initiés remarqueront

L'art abstrait, géométrique, est une réponse plus radicale au danger qu'il y a à braver

l'interdit de l'imitation. Dans l'islam, religion du livre elle aussi, écrire le mot dieu c'est déjà le

représenter. La calligraphie devient un art, l'écriture étant à la fois signe et formule

mathématique. La calligraphie est figurative : elle va d'un point à un autre pour dire quelque

chose. Les formes circulaires, en spirale ou en miroir, répétitions infinies d'une même unité

avec variation géométrique les arabesques avec leurs variations calculées sont un moyen

d'échapper à l'imitation.

Les Perses, en acceptant l'art de l'imitation réaliste, sont en accord avec leur philosophie

platonicienne : le monde que l'on voit n'est que le double d'un monde absolu. Il convient

donc de, représenter vers l'absolu et non ce que l'on croit voir

Kiarostami ne valide toutefois pas cette interprétation : il veut bien parler des ses méthodes,

d'esthétique mais refuse de parler de la religion : " Je suis désolé cela ne vous regarde pas"

répond-il lorsque l'on l'interroge sur ce domaine aussi bien en privé avec des amis qu'en

public lorsqu'il est interpellé par la salle.

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Pourtant Kiarostami est bien ce cinéaste sensible de la captation des choses et le cinéaste

de la géométrie et de l'organisation secrète.

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