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Banques Alimentaires, État, entreprises Un écosystème contre le gaspillage page 12 Risques alimentaires Sécurité et qualité tout au long de la chaîne page 14 1. Vous donnez 2. Nous collectons 3. Vous redistribuez B N°75 / MAI 2015 anques LE MAGAZINE DE TOUS CEUX QUI S’ENGAGENT AVEC NOUS www.banquealimentaire.org A limentaires Lutter contre le gaspillage alimentaire, oui mais pour les plus démunis Ecarts de triage Inventer BON et Bien page 10 Dossier p. 6

Dossier p. 6 Lutter contre le gaspillage alimentaire, oui ... dans le respect de la santé des personnes accueillies, ce qui suppose à la fois une bonne connais- ... Un très beau

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Banques Alimentaires, État, entreprises Un écosystème contre le gaspillagepage 12

Risques alimentaires Sécurité et qualité tout au long de la chaîne

page 14

1. Vous donnez 2. Nous collectons 3. Vous redistribuez

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anques LE MAGAZINE DE TOUS CEUX QUI S’ENGAGENT AVEC NOUS

www.banquealimentaire.orgAlimentaires

Lutter contre le gaspillage alimentaire, ouimais pour les plus démunis

Ecarts de triageInventer BON et Bien

page 10

Dossier p. 6

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N°75 / MAI 2015Banques

Alimentaires

Banques Alimentaires / Banques Alimentaires / Banques Alimentaires Banques Alimentaires / Banques Alimentaires / Banques Alimentaires

événement2

Depuis 30 ans, les Banques Alimentaires luttent contre le gaspillage alimentaire.

Alors que l’actualité s’approprie le sujet,

Jacques Bailet, président du réseau fait le point sur les idées reçues !

1- La lutte contre le gaspillage alimentaire est une évidenceVrai, bien sûr, mais à condition de la pra-

tiquer dans le respect de la santé des personnes accueillies, ce qui suppose à la fois une bonne connais-sance des règles d’hygiène alimentaire et les moyens de les observer : installations, camions, frigos… c’est-à-dire des moyens financiers.

2- Le gaspillage concerne surtout les grandes surfacesFaux. Les hypermarchés effectuent des dons depuis une trentaine d’années, c’est aujourd’hui parfaitement intégré dans leurs pratiques et leur fonctionnement, d’autant que les incitations fiscales sont efficaces. En revanche, une famille gaspillerait en moyenne 20 kg d’aliments par an ; un public de particuliers plus difficile à mobiliser.

3- La France n’est vraiment pas très engagée contre le gaspillage alimentaire Faux. Il y a une véritable culture de la lutte contre le gaspillage en France, initiée notamment par les Banques Alimentaires il y a 30 ans. Premier pays d’Eu-rope à s’être engagé dans cette voie, la France a aujourd’hui une véritable expérience, partagée par ses institutionnels comme par ses associations.

4- L’État ne s’engage pas et se décharge de ses obligations sur les associations Faux. Au-delà des mesures de défiscalisation qui se veulent une incitation aux dons pour toutes les entre-prises, l’État français a présenté en 2013 un Pacte National de lutte contre le gaspillage alimentaire dont les mesures visent à diviser par deux le gaspillage ali-mentaire d’ici à 2025. Par ailleurs, pour mieux garantir la valorisation des denrées sauvées du gaspillage et leur distribution dans de bonnes conditions, l’État a rendu obligatoire le respect de certains critères par l’attribution d’une attestation aux associations distributrices.

5- Lutter contre le gaspillage alimentaire, c’est facileFaux si on chercher l'efficacité. Cela nécessite des moyens logistiques, et de la main-d’œuvre, formée aux normes sanitaires, pour que les denrées soient très rapi-dement, et sans risque, distribuées à ceux qui en ont le plus besoin. Une problématique qui est, quotidienne-ment, au cœur de la démarche des Banques Alimentaires.

6- On peut récupérer les produits emballés qu’on trouve dans les poubelles, si les dates limites de consommation sont bonnesCela n’est satisfaisant ni en termes de dignité pour les personnes accueillies ni en termes de sécurité alimen-taire. Si certains produits présentent peu de risques, d’autres sont particulièrement sensibles aux bactéries, et ce, d’autant plus que leur date limite de consommation est proche (ou dépassée). Il faut particulièrement bien connaître la chaîne du froid et les différentes catégories de denrées pour collecter des aliments sans risquer d’al-térer la santé de ceux qui les consomment.

7- Obliger les magasins à donner, c’est la solution pour lutter contre le gaspillageFaux. L’obligation de don pourrait mettre en difficulté les associations sur le terrain, pour qui une telle loi aboutirait à une « obligation de collecte » rendue com-plexe par leurs moyens humains et logistiques parfois limités. Les Banques Alimentaires et les autres grandes associations d’aide alimentaire françaises préconisent plutôt de pérenniser et de renforcer les mesures incita-tives, comme la défiscalisation, et de renforcer la quali-té du tri et la sélection préalable des denrées par le donateur.

On le voit, il reste fort à faire sur le front du gaspillage alimentaire, en particulier pour en faire bénéficier en priorité les plus démunis. En tant qu’association d’aide alimentaire, c’est le sens de notre engagement. »

Milan 2015 : une expo à croquer !

FAIR

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SAVOIR

BA ÉVÉNEMENT

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IFFRE-CLÉ

Jacques Bailet, président de la Fédération française des Banques Alimentaires

COMMUNICATION

> EXPOSITION UNIVERSELLE édito

> 28-29 NOVEMBRE - HÖTEL DE VILLE DE PARIS

À nos donateurs :

Le Pavillon France et les Banques Alimentaires s’engagent ensemble pour répondre au défi alimentaire à l’Exposition universelle de Milan 2015. Le réseau sera présent durant toute la durée de l’événe-ment avec l’exposition « Éplu-chez-moi » qui proposera aux visiteurs de mieux comprendre les actions des Banques Alimentaires contre le gaspillage alimentaire. Avec ces photos « réalisées pour et avec les Banques Alimen-taires », la photographe, Pauline Daniel, souhaite dénoncer la « tyrannie des apparences » en montrant qu’« une fois épluchés et travaillés, les fruits et légumes noircis ou nécrosés se révèlent non seulement propres à la consom-mation mais également dignes des plus beaux mets ».

Un concert solidaire organisé par notre mécène le groupe Pomona a eu lieu le 15 avril à la Salle Gaveau de Paris, dans le cadre des 30es Saisons de la Solidarité de l’Orchestre de l’Alliance.Un très beau concert qui, grâce à la générosité de tous, permettra de financer le projet de réalisation de plats cuisinés de la Banque Alimentaire de l’Isère !Au programme de cette belle soirée, sous la direction de Pejman Memarzadeh et en présence du violoniste Olivier Charlier : concerto pour violon, opus n° 77 de Johannes Brahms et symphonie n° 3 « Écossaise », opus n° 56 de Félix Mendelssohn-Bartholdy.

> ENTREPRISE SOLIDAIRE

Le magazine Debout est désormais distribué à plus de 57 000 personnes en situation de précarité par les associations partenaires de 15 Banques Alimentaires, plaçant le réseau comme le principal distributeur.

Saisons de la Solidarité,30e concert

7 idées reçues contre le gaspillage alimentaire

Les Banques Alimentaires ont fêté leurs 30 ans en organisant un grand événement sur le parvis de l’Hôtel de Ville à Paris, lors de leur collecte nationale des 28 et 29 novembre derniers. Près de 3 000 visiteurs s’y sont pressés, invités à aider les personnes en situation de précarité dans les 3 espaces du Village de la Solidarité Alimentaire. Plus de 2 130 cartons de denrées, soit l’équivalent de 72 000 repas, ont été confectionnés pour être distribués aux parisiens les plus fragilisés.

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N°75 / MAI 2015Banques

Alimentairesrencontre4

récolte des denrées, et des associations pour les re-distribuer aux personnes en difficulté. Soit une mis-sion concrète très différente de celle du Secours Populaire qui, en tant que généraliste de la solidarité, se destine plus largement à l’accueil et au service aux personnes en situation de fragilité.Notre complémentarité est d’autant plus utile que si les besoins sont immenses… les ressources aussi, si tant est qu’on se donne les moyens d’aller les cher-cher. Ce qui préoccupe particulièrement nos quatre associations aujourd’hui, ce sont ces « vides » dans les zones rurales que nous couvrons mal car les be-soins sont peu visibles et diffus. Nous cherchons des solutions et, par exemple, la Banque Alimentaire de l’Hérault travaille avec la Croix-Rouge, l’ADEME (agence pour la défense de l’environnement et la maîtrise de l’énergie) et le Conseil général pour créer une épicerie sociale ambulante.Jean-Louis Callens – J’ajouterai qu’être complé-mentaire plutôt que concurrent, c’est une vraie disci-pline quand on a 800 comités locaux du Secours Po-pulaire, et que nous évitons à tout prix de collecter quand il y a une opération spéciale des Banques Ali-mentaires ou des Restos du Cœur.

Pour les Banques Alimentaires, la lutte contre le gaspillage est constitutive de l’aide alimentaire. Qu’en est-il pour vous au Secours Populaire ?Jean-Louis Callens – On ne jette pas. C’est une règle qui s’impose tant qu’il y a des gens qui n’ont pas les moyens de s’acheter de quoi manger correc-tement. Et c’est notre prisme pour aborder la lutte antigaspi. Ce qui suppose deux choses : 1- ceux qui redistribuent sont responsables de la santé de ceux qu’ils soutiennent – et donc de la qualité des pro-duits. 2- la distribution ne peut se faire que dans le respect des personnes. C’est pourquoi nous propo-sons maintenant toujours de donner une petite parti-cipation financière ou un coup de main (décharger les camions, aider à la distribution) en échange des denrées. Ça a tout changé : ceux qui venaient la tête baissée et le sac ouvert il y a 30 ans, “échangent” aujourd’hui beaucoup plus facilement, aux deux sens du terme.Cela dit, les Banques Alimentaires sont beaucoup plus équipées et qualifiées que nous pour convaincre les producteurs de donner des produits, y compris fragiles… en toute sécurité alimentaire.Maurice Lony – La lutte contre le gaspillage alimen-taire faisant partie de notre ADN, nous avons effecti-vement mis en place tout un système pour sauver des denrées, avec des entrepôts, des véhicules, des équi-pements, des formations… Nous allons même, de-puis trois ou quatre ans, jusqu’à organiser la transfor-mation de certaines denrées en soupes, jus, confitures, voire plats cuisinés pour prolonger leur durée de vie. Car le réseau se retrouve régulièrement face à des quantités très importantes de produits de retrait,

Maurice Lony, directeur fédéral des Banques Alimentaires, et Jean-Louis Callens, secrétaire général du Secours Populaire français, travaillent régulièrement avec leurs homologues de la Croix-Rouge et des Restos du Cœur pour coordonner leurs actions d’aide alimentaire et inventer les solutions de demain.

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>>

Nous militons pour privilégier la notion de partenariat avec les donateurs par rapport à celle d’obligation

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Ce qu'il faut retenir pour

les BA

Lutte contre le gaspillage

Il est vital d’encadrer les dons

comme lors de l’embargo russe de 2013, ou de l’ex-ceptionnelle récolte de pommes de terre de 2014.

Et vous voilà, quatre associations d’aide alimentaire, mobilisées pour défendre l’aide alimentaire « à la française » ?Jean-Louis Callens – Nos quatre associations s’étaient déjà mobilisées en 2011 pour défendre le PEAD1. Et heureusement, car nos nombreuses propo-sitions ont joué un rôle mobilisateur qui a sauvé ce programme européen (aujourd’hui FEAD).Maurice Lony – Nous voilà aujourd’hui remobili-sées, cette fois-ci pour défendre un système très effi-cace qui nous est fort envié en Europe. En effet les Banques Alimentaires européennes nous envient beaucoup l’efficacité du dispositif d’incitation au don, car il repose en grande partie sur la défiscalisa-tion des dons2.

1 PEAD : Plan européen d’aide aux plus démunis, remplacé en 2014 par le FEAD, Fonds Européen d’Aide aux plus démunis.

2 La défiscalisation permet aux donateurs de déduire 66 % de la valeur de ce qu’ils donnent dans la limite de 5 pour 1 000 de leur CA.

La qualité des denrées redistribuées est une condition sine qua non à l’action de nos associations, fondée sur le respect et la santé des personnes que nous soutenons

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Qu’est-ce que les Banques Alimentaires vous ont apporté quand elles sont nées, alors que le Secours Populaire existait depuis 1945 ?Jean-Louis Callens – Le plan d’aide alimentaire créé par Jacques Delors en 1987 a été un vrai soulage-ment. Alors que nous achetions tout, souvent dans l’urgence à l’épicerie du coin, les Banques Alimen-taires ont pris les choses en main et organisé notam-ment la ramasse dans les hypermarchés. Nous les avons ensuite, il faut bien le dire, abondamment co-piées. Ça nous a permis d’agrandir le cercle de la soli-darité à un moment où il y avait grande urgence, d’autant que nous étions très complémentaires. C’est ainsi qu’en 2014, nous sommes quatre associations agréées par l’État pour faire de l’aide alimentaire :

Secours Populaire, Banques Alimentaires, Croix-Rouge et Restos du Cœur. Et nous avons, ensemble, soutenu cette année quatre millions de personnes.

Comment les Banques Alimentaires voient-elles cette complémentarité avec le Secours Populaire ?Maurice Lony – Chaque association a son projet associatif et, de fait, les nôtres sont complémentaires. Les Banques Alimentaires ont été créées pour inter-venir dans le seul champ de l’aide alimentaire, et sur le constat très particulier que des denrées consom-mables étaient régulièrement détruites alors qu’aug-mentait le nombre de personnes qui n’avaient pas suffisamment à manger. Ainsi les Banques Alimen-taires dépendent-elles à la fois des donateurs pour la

Que préconisez-vous si vous militez contre l’obligation de don ?Jean-Louis Callens – Nous soutenons la proposition de Guillaume Garot, car c’est le fruit d’une consulta-tion qui a mis tous les acteurs autour d’une table pendant un an : il recommande non pas d’obliger les magasins à donner, mais de leur interdire de refuser de donner. Ce qui est différent car plus réaliste et plus souple.Maurice Lony – Nous sommes au cœur du sujet car les dons sont nombreux et se développent, bien que certains élus laissent entendre le contraire. Mais il est vital de mieux les encadrer par des engagements ré-ciproques, le tri préalable pour les magasins et le respect de la chaîne du froid pour les associations.Jean-Louis Callens – La défiscalisation revient quelque part, pour le distributeur, à vendre ses pro-duits, il est donc logique qu’il s’engage sur leur qua-lité. Comme il est logique que les associations s’en-gagent à ne pas les revendre. Engagement oral tacite aujourd’hui, qu’il faudrait officialiser dans le cadre d’une loi.Maurice Lony – Pour toutes ces raisons, nos quatre associations militent pour la signature de conven-tions tripartites entre le donateur, l’association et l’État. D’autant plus importante que le développe-ment de l’économie sociale et solidaire amène dans son sillage des tentations de charity business…

La lutte contre le gaspillage alimentaire constitue un levier considérable pour la pratique de l’aide alimentaire

///Maurice Lony et Jean-Louis Callens

Notre complémentarité est d'autant plus utile

que si les besoins sont immenses, les ressources aussi,... si tant est qu'on se donne les moyens d'aller les chercher ! »

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Alimentaires

oui, mais pour les plus démunisDepuis le Pacte national en 2013, les initiatives contre le gaspillage alimentaire se sont multipliées. C’est une bonne nouvelle, car le niveau de conscience augmente. Au sein des Banques Alimentaires, 30 ans après leur création, la priorité est d’augmenter les quantités sauvées, sans faire l’impasse sur la qualité.

dossier6

Lutter contre le gaspillage alimentaire :

Banques AlimentairesDenrées sauvées

du gaspillage

/// Ici, au Salon de l’Agriculture, les Banques Alimentaires font découvrir au public les confitures fabriquées à Bourges à partir de fruits sauvés de la destruction.

tonnes en 201463 000

en 2014.

+ 10 %

L’équivalent de

126 millions de repas

Des visiteurs qui s’agglutinent pour afficher leur idée « antigaspi » via un « post-it » sur le mur, d’autres venus goûter les fruits « moches » sauvés de la destruction grâce

aux « confiture solidaires » de la Banque Alimen-taire du Cher : au Salon de l’Agriculture 2015, le stand des Banques Alimentaires a fait le plein. Pour sa quatrième présence, la Fédération avait choisi le thème de la lutte contre le gaspillage. Le sujet est à la mode et suscite une floraison d’initiatives : Disco Soupe, Gars’pilleurs, Gueules cassées pour les légumes, sans compter le rapport remis mi-avril au gouvernement par le député Guillaume Garot. Pour les Banques Alimentaires, il ne s’agit pas de surfer sur la vague, mais plutôt d’approfondir le sillon qu’elles creusent depuis 30 ans pour sauver tou-jours plus de denrées alimentaires, y compris, depuis quelques années, auprès des agriculteurs.

Sauver plus de denrées sur toute la chaîneQuand on pense « gâchis alimentaire », le réflexe est de regarder immédiatement vers les grandes surfaces qui sont la source principale d’approvision-nement des Banques Alimentaires, et en progres-sion grâce aux ramasses quotidiennes réalisées par leurs bénévoles. Il existe d’autres sources de gaspil-lage comme l’industrie agroalimentaire ou le monde agricole. Défauts de calibrage ou de formes, erreurs d’étiquettes, surproductions, ces grains de sable se traduisent par des tonnes transférées en alimentation animale quand elles ne sont pas pure-ment et simplement jetées. Pour diminuer ce gâchis, les Banques Alimentaires se sont rapprochées du monde agroalimentaire. « Nous développons une approche systématique par filière, et notre présence sur le stand de la FNSEA au Salon de l’Agriculture y

/// « Trois étoiles solidaires » : fabriquer des plats cuisinés pour prolonger la durée de vie de la viande collectée, c’est aussi lutter contre le gaspillage (voir page 9).

Sauver les denrées n’est

pas seulement un geste citoyen : c’est aussi une activité très technique. »

Maurice Lony, directeur fédéral

du réseau des Banques Alimentaires

participe », explique le directeur fédéral de la Fédé-ration française des Banques Alimentaires, Maurice Lony. Des conventions ont été signées avec de grands groupes, par exemple pour le lait et les œufs. Aidé par les nouvelles incitations fiscales, ce chan-tier va continuer. Il complète les ouvertures d’an-tennes.

Plus d’antennes pour plus de collectes14 avril 2015, à Saint-Amand-Montrond. C’est jour d’inauguration pour la première « antenne » créée par la Banque Alimentaire du Cher, installée à Bourges. Satisfaction : elle permettra de « booster » la ramasse, en allant piocher dans 20 nouveaux magasins soit, à terme, 240 tonnes de denrées supplémentaires qui pourront être sauvées (équivalent à 480 000 repas). Sur le territoire national, plusieurs ouvertures ont eu lieu ces dernières années. Ce sont autant d’extensions qui augmentent les quantités collectées, et qui témoignent de la vitalité du réseau. Chaque ouverture est le fruit d’un travail minutieux, qui nécessite des moyens humains et techniques adaptés (voir témoignage ci-contre).Dans les Banques Alimentaires, l’antigaspi est

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N°75 / MAI 2015Banques

Alimentaires

Ils témoignent…

À Bourges, un atelier de confitures et plats cuisinés

La nouvelle cuisine fonctionne depuis février, deux fois par semaine. Quand nous recevons des

palettes de fraises, nous faisons des confitures de fraises. Hier, par exemple, nous avons testé un mélange papaye-banane… Comme nous ne décidons pas des fruits et légumes collectés, nous inventons. Nous avons déjà testé une vingtaine de recettes ! Très bientôt, nous allons également produire des plats cuisinés salés. Il y aura des purées de légumes, du bœuf bourguignon et d’autres plats carnés, qui permettront de sauver la viande dont la date de péremption tombe le jour de la ramasse.Tout est parti de la volonté de ne pas gâcher les produits collectés, trop abîmés pour être à nouveau transportés et distribués. Des étudiants de l’IUT de Bourges nous ont aidés en faisant une étude sur le potentiel récupérable. Rien que pour la confiture, nous tablons sur 9 000 pots de 370 grammes par an.Pour installer la nouvelle cuisine, nous n’avons engagé aucune dépense d’investissement sur fonds propres, grâce à quatre partenaires : l’Ademe, la Direction régionale de l’alimentation et de la forêt (DRAAF), GRDF et la Caisse d’Épargne nous ont apporté 56 000 euros. Les pots et les couvercles sont donnés par les entreprises Verallia et Massily, il n’y a donc que le sucre que nous devons acheter, mais nous cherchons un partenaire. Beaucoup de Banques Alimentaires sont en train de suivre, à commencer par Nancy, et c’est très bien. »

Quatre nouvelles antennes pour gaspiller moins

Depuis 2014 trois antennes ont été ouvertes à Vesoul, Saint-Amand-Montrond et Gennevilliers, quatre si on compte

l’extension de Bergerac. Mais il y a encore beaucoup de zones et de magasins inexploités. En Île-de-France, par exemple, le nouvel entrepôt de Gennevilliers (2 000 m²) est la première pièce d’un puzzle beaucoup plus vaste. L’entrepôt historique d’Arcueil était trop à l’étroit. La Banque Alimentaire d’Île-de-France voudrait créer d’autres antennes, au nord et à l’est de Paris pour mieux couvrir la grande distribution. Gennevilliers est donc un premier pas.Chaque ouverture implique un effort important. Il faut à la fois trouver une équipe bénévole et être en capacité de financer les chambres froides et le camion frigorifique qui fait la ramasse quotidienne. C’est là qu’intervient la fondation Fonreal. À partir des dons de personnes physiques, elle investit dans les projets de développement. Avec une règle : accepter des projets qui multiplient par huit l’investissement. Les ouvertures d’antennes répondent bien à cet objectif. Fonreal est déjà une belle réussite. »

Jacques Laffitte, président de la Banque Alimentaire du Cher (18)

Bernard Perry,président de la

Banque Alimentaire de l’Isère (38)

Maurice Lony, directeur fédéral du réseau des Banques Alimentaires

dossier8

À Grenoble, « Trois étoiles solidaires » pour sauver la viande

L’idée du projet « Trois étoiles solidaires » est de transformer en plats cuisinés la viande dont la date de péremption arrive le jour de la

collecte, et de lui donner une durée de vie de cinq jours en plus. La production débutera en septembre, mais cela n’a pas été facile de trouver une cuisine ! Le déclic est arrivé à l’été 2014, quand le conseil général nous a proposé de récupérer une partie de la cuisine du collège Marc Sangnier de Seyssins. Il allait passer en liaison froide avec une cuisine centrale, et sa cuisine serait en partie inutilisée. Une convention tripartite a donc été signée et les travaux ont pu commencer cet avril.Nous avons deux partenaires depuis le départ : Pierre Pavy, un restaurateur « militant » et l’une de nos associations partenaires, celle de la rue du Vieux-Temple à Grenoble. D’où les trois étoiles solidaires ! Nos aides-cuisiniers bénévoles et notre chef salarié s’appuieront sur des élèves de l’Institut des Métiers et des Techniques de Grenoble. Dans le collège nous ne serons pas en vase clos, des actions pédagogiques sont prévues.Financièrement, nous avons bouclé jusqu’à fin 2016, mais si j’avais l’assurance de tenir trois ans, cela serait mieux. L’investissement, de l’ordre de 120 000 euros, a été possible grâce à des subventions et au concert de soutien organisé grâce au soutien du groupe Pomona le 15 avril dernier à la salle Gaveau à Paris. Nous préparons d’autres actions pour financer la suite, notamment avec Pierre Pavy. »

indissociable d’une exigence de qualité. Celle-ci est liée au respect de la personne accueillie : pas question de se contenter de denrées trop abîmées, ou qui présenteraient un risque pour la santé. Les personnes accueillies ont droit à des produits fiables et de qualité. C’est dans cette optique que les Banques Alimentaires déploient une panoplie d’outils. La formation « Tous acteurs de la sécurité alimentaire », par exemple, a été construite pour les bénévoles qui ne sont pas experts en logistique alimentaire (voir encadré p.14). Elle permet de garantir le strict respect des règles d’hygiène et de sécurité alimentaire. La formation complète les outils techniques nécessaires au respect de la chaîne du froid. Ainsi les Banques Alimentaires utilisent une flotte des 270 camions frigorifiques et 102 entrepôts à température adaptée. Autre point clé, la traçabilité des aliments : les Banques Alimentaires sont équipées depuis cinq ans d’un système informatique qui trace chaque denrée alimentaire, depuis le magasin donateur jusqu’à l’association bénéficiaire. Chaque lot sauvé se voit attribuer un numéro. En cas d’alerte sanitaire, il pourra être retiré du circuit au plus vite.

La qualité n’est pas seulement technique, elle est aussi gustative et visuelle. Question de respect là aussi, et gisement d’inventivité. Un fruit trop « amoché » est-il retiré de la barquette ? Pour éviter de le jeter, les Banques Alimentaires innovent. Ateliers de confitures, de plats cuisinés ou pressage de pommes permettront de diminuer la part des déchets en bout de chaîne. Ces inventions augmentent aussi la variété des produits et le plaisir de bien manger. Tout est lié.

/// Dans la nouvelle cuisine de la Banque Alimentaire du Cher : atelier confiture deux fois

par semaine avec les fruits collectés…et recettes surprise en fonction des arrivages.

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N°75 / MAI 2015Banques

Alimentaires

Dominique LambertResponsable des ressources alimentaires à la FFBA

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En octobre 2013, 45 personnes sont employées pen-dant trois semaines pour glaner dans les champs mis à disposition par la ferme de Monsieur Leprince, à Behagnies. Les pommes de terre ainsi ramassées sont ensuite transformées en flocons à l’usine McCain de Béthune. La famille Pocher, propriétaire de trois hypermarchés Leclerc dans la région, les commer-cialise à prix coûtant pour assurer une partie de la rémunération des employés.

13 tonnes récupérées, et après ?« Lorsque les glaneurs remercient chaleureusement le responsable du chantier et que nous sauvons du gaspillage 13 tonnes de pommes de terre, nous sommes satisfaits bien sûr. Mais cela nous incite surtout à aller plus loin », raconte Gaspard Lathoud, chef de projet RSE chez McCain. En effet, le bud-get de l’opération n’est pas équilibré, la vente de flocons n’étant pas assez rentable pour compenser les salaires des glaneurs en insertion. Il faut innover pour créer un modèle économiquement autonome. Les différents acteurs se réunissent à nouveau pour élaborer une solution plus durable. Cette fois-ci, vont être pris en compte non seulement les légumes lais-sés dans les champs, mais aussi tous ceux écartés des circuits industriels ou de distribution : les écarts de triage. Dans la ferme pilote, nous en retrouvons par exemple 20 tonnes par semaine. Ces légumes, propres à la consommation humaine, sont d’ordi-naire détruits ou donnés aux porcs. Les partenaires décident alors de les utiliser pour fabriquer des soupes à valeur ajoutée et de monter pour cela une entreprise, BON et Bien.

Une entreprise bientôt autonomeCelle-ci voit le jour en mars 2015. Les actionnaires en sont McCain, la famille Pocher et Randstad, spé-cialiste du travail temporaire. BON et Bien collecte les écarts de triage chez les producteurs. Un espace de l’hypermarché Leclerc de Templeuve est mis à dis-position de la jeune SAS pour la transformation et une ligne de production soupes est installée. Celles-ci sont achetées et commercialisées dans les hypermar-chés de Templeuve, Wattrelos et Villeneuve-d’Ascq depuis le 18 mai, sous la marque BON et Bien. Enfin, Randstad intervient sur le recrutement et la forma-tion des employés pour faciliter leur réinsertion au terme de leur contrat de six à dix-huit mois. BON et Bien reçoit, lors de la phase de création, une sub-vention du ministère de l’Agriculture, mais l’objectif est qu’elle devienne indépendante en remboursant à terme le capital de ses trois actionnaires. Une pre-mière analyse des ventes est prévue dans quelques semaines.

Un business model duplicableL’histoire ne s’arrête pas là : en effet, les Banques Alimentaires, membres du Comité d’Éthique de BON et Bien, assurent toujours un rôle de conseil sur le sujet et sont les garants de sa mission sociale. Par ailleurs, un groupe de travail a été créé pour aller plus loin. Enfin, « C’est une expérience très intéressante pour nous, assure Dominique Lambert, car elle peut être déclinée sur plusieurs petits ateliers locaux. On peut fabriquer selon les régions de la compote ou des salades de fruits. C’est pour nous une façon d’aller jusqu’au bout de notre démarche, qui consiste à aider les gens à “sortir la tête de l’eau” ». Une démarche partenariale et innovante désormais reconnue, puisque BON et Bien a reçu le prix spécial européen du jury Convergences fin 2014.

C’est à Bruxelles, à l’initiative de McCain, qu’est née en décembre 2012 l’idée de récupérer les légumes écartés de la chaîne de production pour les valoriser au sein d’une structure sociale. Une idée que les Banques Alimentaires et de précieux partenariats locaux ont contribué à faire germer. Aujourd’hui, BON et Bien en est l’aboutissement. Récit.

1. Vous donnez

Inventer BON et Bien !

Écarts de triage

«Lorsque je demande à Éric Delacour, président du Gappi (groupement de producteurs McCain), combien de pommes de terre il reste dans le champ après la

récolte, je suis interpellé par sa réponse : entre deux et cinq tonnes par hectare suivant les saisons, soit environ 5 %. C’est là que débute l’aventure BON et Bien », raconte Dominique Lambert, responsable des ressources à la Fédération française des Banques Alimentaires. La scène se déroule à Bruxelles, en décembre 2012, lors d’une rencontre organisée par McCain avec ses parties prenantes : ses principaux clients, les représentants du Gappi, des acteurs du secteur associatif comme les Banques Alimentaires ou Ashoka… À l’ordre du jour : une réflexion commune sur la politique RSE du groupe. La question de Dominique Lambert est prise très au sérieux. À tel point que McCain nomme rapidement un chef de projet pour mettre en œuvre un premier chantier pilote.

6 semaines de glanage« Dès le départ, nous avons souhaité que ce chantier soit à la fois une manière de lutter contre le gaspil-lage et une occasion de participer à la réinsertion de chômeurs en fin de droits, en leur proposant un emploi saisonnier », rappelle Dominique Lambert. En effet, deux des trois usines McCain françaises sont implantées dans le Nord Pas-de-Calais, une région fortement touchée par le chômage qui produit la majorité des légumes achetés par le groupe. Une association de réinsertion locale, Le coin Familial, et la mairie de Bapaume sont alors mises à contribution.

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>>

« McCain est une entreprise familiale et nous comprenons très bien l’importance d’être proche des communautés locales au sein des-quelles nous opérons. », aime à dire Jean Bernou, son PDG. Un engagement qui se tra-duit par une politique RSE adaptée à chaque pays ou région comme le rappelle François Tasmowski, directeur RSE pour McCain Europe :« Nous avons lancé en Colombie un social business en appui aux petits producteurs. En Europe, après nous être concentrés sur la

McCain UNE ENTREPRISE MOBILISÉE À L’ÉCHELON LOCAL

question du traitement des déchets, nous avons développé BON et Bien. Une initiative similaire est en train de voir le jour en Grèce. Nous avons peu communiqué lors de la phase pilote du projet, mais aujourd’hui, nous lan-çons une campagne de mobilisation interne et entendons bien continuer à stimuler l’en-trepreneuriat et l’ancrage local. Nos salariés sont sensibles aux finalités sociales, socié-tales et environnementales de cette initiative dans leur région. »

BON et Bien en quelques chiffres

• 5 partenaires : McCain, Randstad,

Leclerc, les Banques Alimentaires,

le Gappi

• 5 employés recrutés pour

les premiers mois d’activité

• Une récolte de 40 tonnes de pommes

de terre, mais aussi 20 tonnes

d’endives, d’oignons et de carottes

en prévision

• Une capacité de production de

300 litres de soupe par jour

fiche d’identité

LA SOCIÉTÉ DAVIGEL a remis 180 palettes (soit 50 tonnes) de tartes surgelées aux Banques Alimentaires.

FONREAL, la Fondation pour le renforcement de l’aide alimentaire, a soutenu le financement de 8 projets de Banques Alimentaires en 2013 et 2014, d’une valeur de 400 000€ (ouverture d’antennes, camions, chambres froides …).

La convention de partenariat signée avec l’AMOMA (Association des Membres de l‘Ordre du Mérite Agricole) a très vite trouvé des applications opérationnelles sur le terrain par la mise en contact des réseaux respectifs : nouveaux donateurs, soutien pour la collecte…

LA 34E ÉDITION DE LA COURSE « LES FOULÉES 18 » des Sapeurs Pompiers de Paris s’est déroulée au profit des Banques Alimentaires, avec le soutien de GrDF.

Pour la 2e année consécutive, l’organisation interprofessionnelle de la filière GIBIER DE CHASSE « INTERPROCHASSE » a offert aux Banques Alimentaires 5 000 faisans qui ont été cuisinés par des chefs ou des étudiants en lycées hôteliers pour offrir des repas festifs aux personnes accueillies.

> MERCI !

N°75 / MAI 2015Banques

Alimentaires2. Nous collectons

L’indignation fondatrice 1/3 des denrées alimentaires produites sont gaspillées quand 3,5 millions de Français demandent de l’aide alimentaire (chiffres 2015)

Contre le gaspillage alimentaire

C’est pour lutter contre la précarité alimentaire que les Banques Alimentaires ont construit tout un écosystème de lutte contre le gaspillage alimentaire.

1984 création de la 1ère Banque Alimentaire en France par 5 associations (L’Armée du Salut, Emmaüs, Le Secours Catholique, le Centre d’action sociale protestant et l’association L’Entraide d’Auteuil)

2015 102 entrepôts des Banques Alimentaires dont 23 antennes en métropole, aux Antilles et à la Réunion

• LA DÉFISCALISATION : un outil puissant pour inciter les producteurs et les distributeurs à lutter contre le gaspillage alimentaire

• UN PACTE NATIONAL de lutte contre le gaspillage alimentaire signé en juin 2013

La part des Banques Alimentaires

La part de l'État

5 234 BÉNÉVOLES

et 476 salariés dont 243 en contrats aidés

UN TRAVAIL CONTINUEL DE RECHERCHE DE L’ÉQUILIBRE NUTRITIONNEL

Un camembert nutritionnel mis au point par les Banques Alimentaires(1) définit le panier d’aide alimentaire idéal

Aujourd'hui la part des fruits et légumes est de 24,5 % de l’approvisionnement

100 RHYSA(2), spécialistes de l’hygiène alimentaire, dûment formés et cadrés par le “Guide des bonnes pratiques d’hygiène”

UN ÉQUIPEMENT LOGISTIQUE PERFORMANT :

RÉSULTATS :

UNE POLITIQUE SANITAIRE

104 000 m2

d’entrepôts

409 véhicules dont 272 frigorifiques

22 509 m3 de chambres froides dont 9 742 m3 à température négative

Gestion des stocks et traçabilité : 2 interfaces informatiques entre les associations redistributrices, les Banques Alimentaires et l’État : Passerelle et Vif.

63 000 tonnes de nourriture sauvées du gaspillage, équivalant à 126 millions de repas soit 62,6 % des denrées ainsi collectées

1 850 000 personnes soutenues en 2014

Merci à nos 5 300 associations redistributrices

Tout un ecosystème

1

2

3

(1) Le camembert nutritionnel des Banques Alimetntaires a été élaboré en collaboration avec Nicole Darmon, Directrice de Recherche à l’INRA au sein de l’UMR NORT à Marseille. Il a été validé par le PNNS en 2006(2) Rhysa : responsable hygiène et sécurité alimentaire

La part des 13 “entreprises solidaires” qui, engagées sur 3 ans, soutiennent les Banques Alimentaires par des dons de denrées et en nature, mais aussi par du mécénat financier, de solidarité et de compétence

UNE RAMASSE QUOTIDIENNE DANS LES GRANDES SURFACES ALIMENTAIRES

1 870 MAGASINS COLLECTÉS tout au long de l’année

30 A

NS

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IEN

CE

1312

1514

N°75 / MAI 2015Banques

Alimentaires

> POINT DE VUE

« L’association dont j’ai pris la présidence il y a huit ans vient en aide aux plus défavorisés, par des coups de pouce financiers, une vente de vêtements

(fripes et invendus donnés par des commerçants) ainsi que des colis alimentaires fournis par la Banque Alimentaire. Pour assurer la sécurité sanitaire de ces produits, nous nous sommes équipés de réfrigérateurs et congélateurs professionnels neufs il y a deux ans.

Tous les bénévoles qui manipulent les aliments ont reçu une formation TASA. Ils sont très demandeurs de savoir comment bien faire les choses. Nous avons aussi mis en place un plan de maîtrise sanitaire. Toutes les procédures sont affichées dans nos locaux : comment se laver les mains, nettoyer les surfaces et les frigos, reconditionner et étiqueter les produits (quand on divise des pots de fromage blanc de 5 kg en petites portions, par exemple), faire des mesures de température… Tout s’appuie sur le « Guide de bonnes pratiques ». C’est notre Bible !

Nous fournissons aux familles un sac isotherme réutilisable. Nous transvasons ainsi les produits réfrigérés de nos frigos dans des bacs isothermes puis dans leur sac. Certains ont eu du mal à comprendre leur utilité, mais nous leur avons expliqué que c’était pour leur santé. Depuis, ils oublient rarement leur sac et nous remercient. Assurer la sécurité sanitaire des denrées que nous distribuons est une manière de prendre soin des personnes accueillies. »

Santa Hateau, présidente de l’association Action sociale

enfance jeunesse famille, en Savoie

3. Vous redistribuez

«En termes de sécurité sanitaire, le sujet le plus sensible est la ramasse, indique d’emblée Joël Duc, respon-sable hygiène et sécurité des aliments

et développement durable à la Fédération. Ces invendus, récupérés chaque matin par les camions des Banques Alimentaires auprès des grandes surfaces, représentent plus de 30 % des denrées collectées et redistribuées. Ce sont des aliments en fin de cycle de commercialisation, explique le spécialiste. Moins les produits ont de durée de vie devant eux, plus il faut être vigilant. Sinon, les

Sécurité et qualité tout au long de la chaîne

Les personnes en situation de fagilité doivent recevoir des denrées alimentaires aussi sûres et saines que possible. Les Banques Alimentaires mettent en œuvre leurs compétences et leur savoir-faire historique pour remplir cette mission avec les associations, mission d’autant plus essentielle avec des produits en fin de vie « sauvés » du gaspillage.

Gestion des risques alimentaires

(RHYSA), présents dans chaque Banque Ali-mentaire, ont suivi des stages de cinq jours, très structurés. Ils comprennent des apprentissages théoriques, mais il s’agit surtout d’une formation à l’organisation et au management de l’hygiène : quels documents sont nécessaires, comment piloter les opérations, comment accompagner les changements de pratique… « 40 à 45 nouveaux RHYSA sont ainsi formés chaque année et nous encourageons la présence et la formation de tels responsables dans les associations », note Joël Duc.

Les bénévoles et salariés des associations distri-butrices peuvent aussi suivre, par l’intermédiaire des Banques Alimentaires, une formation TASA pour « Tous Acteurs de la Sécurité des Aliments » (lire encadré). « Et pour les décideurs dans les associations, nous avons mis en place un autre module intitulé “100 % bonnes pratiques” », ajoute le responsable. Il s’agit d’une formation de 4 à 6 heures pour les aider à auto-évaluer leur degré de mise en pratique du guide.« Il y a dix ans, les associations étaient moins conscientes de l’importance de maîtriser la chaîne du froid. On en voyait qui utilisaient des couvertures de survie pour protéger les aliments ou qui sortaient les aliments des frigos et les laissaient dehors tout le temps de la distribution. Aujourd’hui, elles ont énormément amélioré leurs pratiques », se félicite-t-il.

microbes pourraient se multiplier et les denrées s’altérer très rapidement voire devenir dange-reuses. »Pour que les aliments soient récupérés, trans-portés, stockés, répartis entre les associations et distribués aux bénéficiaires en toute sécurité, chaque maillon de la chaîne logistique a donc un rôle à jouer. « On commence par s’assurer que les grandes et moyennes surfaces, qui nous font des dons, stockent les denrées alimentaires dans les meilleures conditions jusqu’à notre passage. Ensuite, nous avons une bonne maîtrise des étapes : 270 camions réfrigérés, 100 000 m2 d’entrepôts et 22 000 m3 de froid. Nous sommes aussi rodés à un tri et une distribution rapides des denrées… », détaille Joël Duc.

Des bonnes pratiques partagéesEn 2010, les pouvoirs publics ont eu la volonté de moderniser et sécuriser encore plus la distri-bution des aliments par les organismes caritatifs. Ils ont donc réuni les « têtes de réseau » que sont le Secours Populaire français, la Croix-Rouge, les Restos du Cœur et les Banques Alimentaires, pour élaborer un « Guide des bonnes pratiques d’hy-giène », publié en 2011. 130 pages, 17 fiches pra-tiques qui font référence pour toutes les étapes : ramasse, stockage, nettoyage… Depuis 2014, tous les organismes caritatifs impliqués dans la distribution alimentaire doivent également recevoir une habilitation exigeant de remplir un certain nombre de critères d’hygiène.Pour permettre une mise en pratique de ce guide, les Banques Alimentaires proposent plusieurs types de formation à leurs bénévoles comme à ceux des associations.Les responsables hygiène et sécurité des aliments

Formation TASA200 sessions par anDans les Banques Alimentaires comme dans les associations redistributrices, tous les bénévoles ou salariés qui manipulent des denrées doivent avoir suivi la formation TASA (Tous Acteurs de la Sécurité des Aliments). Sur une journée, les participants apprennent ainsi les bases de l’hygiène alimentaire : risque microbiologique, chaîne du froid, nettoyage… et des projets d’amélioration de leurs pratiques.La Fédération française des Banques Alimentaires est organisme formateur dans ce domaine. 19 personnes y sont chargées d’assurer ces formations. 200 sessions ont lieu tout au long de l’année et c’est ainsi 3 500 personnes par an qui en bénéficient.

Maîtriser le risque sanitaire, c’est prendre soin

des familles que nous accueillons. »

Joël Duc, responsable hygiène et Sécurité alimentaire

à la FFBA

Moins les produits ont de durée de vie devant eux, plus il faut être vigilant. »

/// 1 et 2. Mesure de la température de la chambre froide et des containers de transport pour éviter toute rupture de la chaîne du froid. 3. Guide des bonnes pratiques mis à disposition des associations4. Nettoyage réguliers des véhicules utilisés pour le transport des denrées

2

4

3

1

moiLes Banques

&Alimentaires

Bernard Dandrel a été l’un des fondateurs de la première Banque

Alimentaire de France et d’Europe. Aujourd’hui, il porte un regard

enthousiaste et lucide sur le développement et le professionnalisme

du réseau, et sur la nécessité de poursuivre son action.

1re rencontre« J’étais responsable du Secours Catholique de Paris, en mars 1984, lorsque Sœur Louise Bigo, religieuse dans le 18e arrondissement, a fait paraître dans La Croix un article dénonçant le scandale de la grande pauvreté, qui cohabitait avec un véritable gaspillage alimentaire. Francis Lopez, fondateur de la Banque Alimentaire d’Edmonton au Canada, et de passage à Paris, a lu cet article par hasard et lui a adressé cette réponse : « créez donc une food bank ! ». J’ai fait partie de l’équipe de représentants du Secours Catholique, d’Emmaüs, de l’Armée du Salut, de l’Entraide d’Auteuil et de l’Entraide Protestante, qui s’est alors constituée pour créer la première Banque Alimentaire de France.

Le plusSon principe fondateur : la gratuité des denrées qu’elle distribuait aux

associations. Malgré les difficultés des débuts, j’étais persuadé que si cela fonctionnait aux États-Unis, cela pouvait fonctionner chez nous. La lutte contre le gaspillage alimentaire était une évidence. J’ai porté ces convictions en tant que président de la Fédération française, mais aussi à l’étranger, en partageant notre expérience et en œuvrant au développement d’un réseau européen de Banques Alimentaires.

Aujourd'hui « Je suis enthousiasmé par le grand professionnalisme acquis par les équipes, par la qualité de leur action et leur fidélité à l’esprit des débuts. J’apprécie l’engagement des bénévoles. Celui de retraités qualifiés, rejoignant le réseau après une carrière en entreprise, a permis de faire des Banques Alimentaires un interlocuteur légitime auprès des pouvoirs publics en matière d’aide alimentaire et de lutte contre le gaspillage. »

témoignage16

Bernard Dandrel, président d’honneur du réseau et président de la Fédération

française des Banques Alimentaires de 1984 à 2002

« Il y a dans ce réseau

une belle mutualisation des

compétences. Je souhaite,

parce que hélas les besoins

sont toujours plus importants,

que son action perdure avec

la même générosité, la même

qualité et la même énergie

collaborative. »

Banques

Alimentaires

RepèreAujourd’hui, les Banques Alimentaires,

c’est 79 Banques Alimentaires et

23 antennes sur le territoire français,

mais aussi une Fédération européenne

comptant 22 pays.

Mon message

Publication semestrielle de la Fédération française des Banques Alimentaires - Directeur de la publication : Jacques Bailet - Rédaction en chef : Laurence Champier - Comité de rédaction : Maurice Lony, Solène Job, Elise Faltot, Gaëtan Lassale - Conception-réalisation : - Crédits photo : DR - Tirage : 5 500 exemplaires - ISSN : 2110 - 7157. Imprimé par Grafik Plus, imprimerie certifiée PEFC et Imprim'Vert. La certification PEFC garantit que le bois utilisé dans la fabrication du papier provient de forêts gérées durablement. Imprim'Vert écarte l'utilisation de tout produit toxique dans l'ensemble du processus d'impression. Contact : Fédération française des Banques Alimentaires - Service Communication 15 rue du Val de Marne - 94257 Gentilly CEDEX - Tél . : 01 49 08 04 70 - Courriel : [email protected] - Site : www.banquealimentaire.org