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Les forêts d’Europe : le cas de la France Biome TEMPÉRÉ FICHE 8 • La France, dont les forêts couvrent 29 % de sa super- ficie, arrive au troisième rang des pays d’Europe par son taux de couverture forestière, après la Suède et la Finlande. • La superficie forestière de la France est d’environ 16 millions d’hectares, soit trois fois la superficie de l’Île- du-Prince-Édouard. • La superficie forestière augmente en moyenne de 0,4 % par année, et elle a doublé depuis 1827. • 3,5 millions de personnes détiennent les trois quarts de la superficie forestière française à titre de proprié- taires privés, et 1,1 million de ceux-ci possèdent plus de un hectare de forêt. • La population française est évaluée à 65,8 millions de personnes en 2012. • Le produit intérieur brut (PIB) de la France s’élève à 2 808 milliards de dollars américains courants en 2011. • Le secteur forestier de la France génère 0,7 % du PIB du pays, soit 19,6 milliards de dollars en 2011. QUELQUES CHIFFRES 12 54 86 3 967 37 07 254 4 5907 57 Forêt résineuse du centre de la France © Franck Tuot 2008 S’étendant de l’Irlande jusqu’aux pays d’Europe de l’Est, les forêts tempérées d’Europe ont été fortement perturbées par des siècles de présence humaine. Une forêt primaire est extrêmement rare à observer dans cette région du monde. Le biome est caractérisé par une grande variété d’espèces d’arbres s’étalant de l’ouest à l’est du conti- nent. À l’ouest (Espagne, France, Belgique, Pays-Bas, Allemagne), se trouvent en abondance des feuillus tels que des chênes (Quercus sp.), des hêtres (Fagus sp.), des érables (Acer sp.), des tilleuls (Tilia sp.) et des frênes (Fraxinus sp.), alors qu’à l’est (République tchèque, Pologne, Slovaquie, Serbie, Roumanie, Hongrie, Bulgarie), ce sont les essences résineuses de la famille des pins (Pinus sp.), des sapins (Abies sp.) et des épinettes (Picea sp.) qui sont plus abon- dantes. Bien que l’Autriche et la Suisse soient d’importants pays forestiers d’Europe, ils se caractérisent plutôt par leurs forêts de mon- tagne. Aussi, cette fiche aborde plus spéci- fiquement la situation des forêts en France. Biodiversité La diversité en espèces d’arbres feuillus et résineux présentes en Europe est nettement moins riche qu’elle ne l’est en Amérique du Nord ou en Asie aux mêmes latitudes (Tableau 1). À titre d’exemple, la France abrite cinq espèces de chênes, alors que certaines régions des États-Unis en comptent jusqu’à dix-neuf. Après les grandes glaciations, plusieurs facteurs ont freiné la recolonisation des forêts en Europe : un climat de type boréal qui s’est maintenu longtemps après les périodes glaciaires ; l’existence de barrières naturelles (mer Méditerranée au sud, les Alpes et les Carpates à l’est) ; et les défrichements importants amorcés dès le néolithique. Cette diversité floristique, animale Tableau 1 Nombre d’espèces d’arbres de forêt tempérée Continent Nombre d’espèces feuillues Nombre d’espèces résineuses Europe 30 7 Amérique du Nord 110 13 Asie 150 26 ... sur le sanglier Très répandu en Europe et en Asie, le sanglier est un animal commun dans les forêts de France. Apprécié par les chasseurs, le sanglier prolifère cependant trop rapi- dement et occasionne des dégâts évalués à 50 millions d’euros par an. Ce cousin du cochon est porteur de mala- dies transmissibles aux animaux d’élevage, et fait beau- coup de ravages dans les cultures. La prolifération de cet animal est associée aux températures plus chaudes, à l’augmentation des superficies de champs de maïs et aux ouragans de 1999 et 2009 qui ont occasionné de grands chablis et restreint l’accès aux territoires de chasse. En 2012, la population de sangliers est évaluée à deux mil- lions, soit quatre fois le nombre d’animaux de cette espèce abattus à la chasse. Comme une femelle sanglier a géné- ralement de cinq à sept marcassins (bébés sangliers) par année, les sangliers se reproduisent à un rythme effarant. QUELQUES FAITS fo info in info info inf info info in nfo info info nfo info info Gouvernance À l’Antiquité gréco-romaine, les forêts sont très abondantes en Europe. Dans les secteurs densément peuplés, les forêts sont progressivement déboisées pour y pratiquer l’agriculture (culture des céréales et des légumineuses) ou servir de lieu de pâturage pour les animaux d’élevage (bovins, chevaux, moutons, chèvres). Au Moyen Âge (du 6 e au 16 e siècle), les terres forestières sont défrichées intensivement au profit des seigneurs qui deviennent les puissants proprié- taires terriens dans une société féodale. Entre le 16 e et le 18 e siècle, deux phénomènes voient le jour dans les « vieux pays », soit la naissance d’un modèle écono- mique nouveau, le capitalisme, et le développement de colonies dans le Nouveau Monde. L’industrie mé- tallurgique croissante ainsi que la construction navale sont en plein essor et font augmenter la demande en bois partout en Europe. Bien que certains érudits de l’époque commencent à se prononcer sur la dispari- tion des espaces boisés, les récoltes de la ressource forestière s’intensifient, sans égard à sa régénération. À l’époque de la Révolution française et des guerres entre l’Angleterre et la France (18 e siècle et début du 19 e siècle), la demande en bois est vitale alors que les forêts résiduelles d’Europe sont dégradées et beau- coup moins productives. Le blocus continental de Napoléon (1806-1814), empêchant le peuple anglais de s’approvisionner sur le continent européen, amène l’Angleterre à récolter les forêts du Bas-Canada pour construire ses navires de guerre. En territoire français, malgré l’instauration d’un plan de reboisement et de limitation des coupes forestières datant du milieu du 17 e siècle, les forêts ne couvrent plus que 15 % de ce territoire, en 1825, alors qu’elles occupaient la majori- té du pays quelques siècles auparavant. À la fin du 19 e siècle, une pénurie de bois frappe tout le continent et entraîne un changement draconien des pratiques dans la majorité des pays d’Europe. C’est à cette époque que naissent les premières grandes écoles forestières de ce continent (France, Allemagne) et qui, depuis lors, poursuivent leur mission de formation et de recherche, et répondent aux enjeux économiques et environnementaux du moment. Cette période cri- tique de son histoire a permis à l’Europe de remettre en question ses façons de faire en matière d’utilisation de ses ressources forestières. Aujourd’hui, une grande partie des forêts ont été réhabilitées et présentent une valeur socioéconomique et environnementale remar- quable grâce à l’expertise et aux pratiques sylvicoles développées par les aménagistes forestiers européens. © Franck Tuot 2007 Les couleurs automnales dans une hêtraie Source 3 Chouettes hulottes ( juvéniles) Source 5 Chevreuil au repos Source 4 Renard roux Références pour photos : 1 commons.wikimedia.org/wiki/File :DunePyla.jpg 2 Collections du Louvres des Antiquaires, Paris 3 commons.wikimedia.org/wiki/File :Strix_aluco_3young.jpg 4 commons.wikimedia.org/wiki/File :Fox_study_6.jpg 5 fr.wikipedia.org/wiki/Fichier :Chevreuil_repos.jpg 6 commons.wikimedia.org/wiki/File:Napoleonalps.jpg ©Erika Mlejova Sanglier Représentation de Napoléon Bonaparte traversant les Alpes par Jacques-Louis David (1748-1825) Source 6

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Les forêts d’Europe : le cas de la France

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• La France, dont les forêts couvrent 29 % de sa super-ficie, arrive au troisième rang des pays d’Europe par son taux de couverture forestière, après la Suède et la Finlande.

• La superficie forestière de la France est d’environ 16 millions d’hectares, soit trois fois la superficie de l’Île-du-Prince-Édouard.

• La superficie forestière augmente en moyenne de 0,4 % par année, et elle a doublé depuis 1827.

• 3,5 millions de personnes détiennent les trois quarts de la superficie forestière française à titre de proprié-taires privés, et 1,1 million de ceux-ci possèdent plus de un hectare de forêt.

• La population française est évaluée à 65,8 millions de personnes en 2012.

• Le produit intérieur brut (PIB) de la France s’élève à 2 808 milliards de dollars américains courants en 2011.

• Le secteur forestier de la France génère 0,7 % du PIB du pays, soit 19,6 milliards de dollars en 2011.

QUELQUES CHIFFRES 12 54 867 3 967 37 07 254 46 5907 57

Forêt résineuse du centre de la France

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S’étendant de l’Irlande jusqu’aux pays d’Europe de l’Est, les forêts tempérées d’Europe ont été fortement perturbées par des siècles de présence humaine. Une forêt primaire est extrêmement rare à observer dans cette région du monde. Le biome est caractérisé par une grande variété d’espèces d’arbres s’étalant de l’ouest à l’est du conti-nent. À l’ouest (Espagne, France, Belgique, Pays-Bas, Allemagne), se trouvent en abondance des feuillus tels que des chênes (Quercus sp.), des hêtres (Fagus sp.), des érables (Acer sp.), des tilleuls (Tilia sp.) et des frênes (Fraxinus sp.), alors qu’à l’est (République tchèque, Pologne, Slovaquie, Serbie, Roumanie, Hongrie, Bulgarie), ce sont les essences résineuses de la famille des pins (Pinus sp.), des sapins (Abies sp.) et des épinettes (Picea sp.) qui sont plus abon-dantes. Bien que l’Autriche et la Suisse soient d’importants pays forestiers d’Europe, ils se caractérisent plutôt par leurs forêts de mon-tagne. Aussi, cette fiche aborde plus spéci-fiquement la situation des forêts en France.

BiodiversitéLa diversité en espèces d’arbres feuillus et résineux présentes en Europe est nettement moins riche qu’elle ne l’est en Amérique du Nord ou en Asie aux mêmes latitudes (Tableau 1). À titre d’exemple, la France abrite cinq espèces de chênes, alors que certaines régions des États-Unis en comptent jusqu’à dix-neuf. Après les grandes glaciations, plusieurs facteurs ont freiné la recolonisation des forêts en Europe : un climat de type boréal qui s’est maintenu longtemps après les périodes glaciaires ; l’existence de barrières naturelles (mer Méditerranée au sud, les Alpes et les Carpates à l’est) ; et les défrichements importants amorcés dès le néolithique. Cette diversité floristique, animale

Tableau 1Nombre d’espèces d’arbres de forêt tempérée

ContinentNombre d’espèces feuillues

Nombre d’espèces résineuses

Europe 30 7

Amérique du Nord 110 13

Asie 150 26

... sur le sanglierTrès répandu en Europe et en Asie, le sanglier est un animal commun dans les forêts de France. Apprécié par les chasseurs, le sanglier prolifère cependant trop rapi-dement et occasionne des dégâts évalués à 50 millions d’euros par an. Ce cousin du cochon est porteur de mala-dies transmissibles aux animaux d’élevage, et fait beau-coup de ravages dans les cultures. La prolifération de cet animal est associée aux températures plus chaudes, à l’augmentation des superficies de champs de maïs et aux ouragans de 1999 et 2009 qui ont occasionné de grands chablis et restreint l’accès aux territoires de chasse. En 2012, la population de sangliers est évaluée à deux mil-lions, soit quatre fois le nombre d’animaux de cette espèce abattus à la chasse. Comme une femelle sanglier a géné-ralement de cinq à sept marcassins (bébés sangliers) par année, les sangliers se reproduisent à un rythme effarant.

QUELQUES FAITS

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GouvernanceÀ l’Antiquité gréco-romaine, les forêts sont très abondantes en Europe. Dans les secteurs densément peuplés, les forêts sont progressivement déboisées pour y pratiquer l’agriculture (culture des céréales et des légumineuses) ou servir de lieu de pâturage pour les animaux d’élevage (bovins, chevaux, moutons, chèvres). Au Moyen Âge (du 6e au 16e siècle), les terres forestières sont défrichées intensivement au profit des seigneurs qui deviennent les puissants proprié-taires terriens dans une société féodale. Entre le 16e et le 18e siècle, deux phénomènes voient le jour dans les « vieux pays », soit la naissance d’un modèle écono-mique nouveau, le capitalisme, et le développement de colonies dans le Nouveau Monde. L’industrie mé-tallurgique croissante ainsi que la construction navale sont en plein essor et font augmenter la demande en bois partout en Europe. Bien que certains érudits de l’époque commencent à se prononcer sur la dispari-tion des espaces boisés, les récoltes de la ressource forestière s’intensifient, sans égard à sa régénération. À l’époque de la Révolution française et des guerres entre l’Angleterre et la France (18e siècle et début du 19e siècle), la demande en bois est vitale alors que les forêts résiduelles d’Europe sont dégradées et beau-coup moins productives. Le blocus continental de Napoléon (1806-1814), empêchant le peuple anglais de s’approvisionner sur le continent européen, amène l’Angleterre à récolter les forêts du Bas-Canada pour construire ses navires de guerre. En territoire français, malgré l’instauration d’un plan de reboisement et de limitation des coupes forestières datant du milieu du 17e siècle, les forêts ne couvrent plus que 15 % de ce territoire, en 1825, alors qu’elles occupaient la majori-té du pays quelques siècles auparavant. À la fin du 19e siècle, une pénurie de bois frappe tout le continent et entraîne un changement draconien des pratiques dans la majorité des pays d’Europe. C’est à cette époque que naissent les premières grandes écoles forestières de ce continent (France, Allemagne) et qui, depuis lors, poursuivent leur mission de formation et de recherche, et répondent aux enjeux économiques et environnementaux du moment. Cette période cri-tique de son histoire a permis à l’Europe de remettre en question ses façons de faire en matière d’utilisation de ses ressources forestières. Aujourd’hui, une grande partie des forêts ont été réhabilitées et présentent une valeur socioéconomique et environnementale remar-quable grâce à l’expertise et aux pratiques sylvicoles développées par les aménagistes forestiers européens.

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Références pour photos :1 commons.wikimedia.org/wiki/File :DunePyla.jpg2 Collections du Louvres des Antiquaires, Paris3 commons.wikimedia.org/wiki/File :Strix_aluco_3young.jpg4 commons.wikimedia.org/wiki/File :Fox_study_6.jpg5 fr.wikipedia.org/wiki/Fichier :Chevreuil_repos.jpg6 commons.wikimedia.org/wiki/File:Napoleonalps.jpg

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QUELQUES CHIFFRES...sur la biodiversité forestière en France

NOMBRE D’ESPÈCES EN FORÊT

Plantes 3 880

Arbres 136

Mammifères 73

Oiseaux 120

Reptiles 11

Amphibiens 13

Insectes Autour de 10 000

Présidée par les druides, cérémonie gauloise dans les boisés mystérieux

Plantation de pins sylvestres dans le centre de la France

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Cueilleur de champignons forestiers et sa récolte

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et forestière faible par rapport à celle des autres régions du monde est toujours menacée par les activités anthropiques. Les aménagements sylvicoles intensifs pratiqués, comme les plantations monospécifiques, rendent artificiels les écosys-tèmes et maintiennent les forêts dans un état de déséquilibre perpétuel qui ne favorise pas la recolonisation par les espèces forestières indigènes. Ainsi, la transformation ou la disparition des habitats entraîne la migration, voire l’extinction de nom-breuses espèces animales et floristiques.

Les animaux et les plantes forestières subissent, par ailleurs, les effets du morcellement du paysage induits par la présence d’infrastructures humaines (routes, lignes de transport d’éner-gie, étalement urbain) et les multiples usages du territoire (agriculture, sylviculture, extraction des ressources minières, etc.). Le pouvoir de dispersion des espèces est un des facteurs clés du maintien de la diversité biologique dans l’ensemble du territoire. Cependant, la fragmentation de ce dernier entre directement en conflit avec la dispersion, et constitue aujourd’hui la principale cause de la perte de biodiversité en Europe, devançant ainsi les effets de la pollution.

En France, la forêt abrite la moitié de la biodiversité présente sur son territoire, soit plus précisément 72 % des espèces flo-ristiques, 42 % des oiseaux nicheurs et 60 % des mammifères. En 2008, 36 % des mammifères et 16 % des oiseaux nicheurs forestiers sont menacés d’extinction en France métropolitaine. Entre 20 % et 50 % des espèces qui dépendent du bois mort pour leur cycle de vie, appelées saproxyliques (insectes, cham-pignons, mousses, etc.), seraient aussi menacées. Leur dispa-rition pourrait avoir un effet négatif majeur sur la production d’humus et la fertilité des sols forestiers. Ainsi, malgré la pro-gression constante des forêts sur son territoire, la France doit être vigilante et mettre en place des mesures appropriées pour maintenir, conserver et améliorer la diversité biologique de ses écosystèmes forestiers.

PerturbationsÀ grande échelle, presque toutes les forêts du continent européen ont été perturbées par l’homme, et la plupart des forêts actuelles en portent les traces à divers plans (aména-gement forestier extensif, jardinage par pied d’arbre, plan-tations monospécifiques, etc.). Cette particularité devrait persister, car la superficie forestière européenne ne cesse d’augmenter, essentiellement grâce aux nouvelles planta-tions (afforestation). C’est dans le sud-ouest de la France, plus précisément en Aquitaine, que se trouve le plus grand massif de forêt plantée d’Europe occidentale, la forêt des Landes. Environ un million d’hectares de pins maritimes (Pinus pinaster) ont été plantés pour, d’une part, réduire l’avancée des dunes qui bordent la côte ouest du pays et, d’autre part, pour la production et la récolte d’arbres. Le pin est en effet une essence aux multiples usages (parquets, lambris, contreplaqués, meubles, carton, papier, etc.). Cepen-dant, l’élagage, un traitement sylvicole systématiquement effectué pour empêcher la formation de nœuds, favorise la création de corridors de vent dans les plantations et rend les arbres vulnérables aux chablis. En dix ans, ce massif forestier a été atteint par deux ouragans majeurs. Le 27 décembre 1999, la tempête Martin a amputé la forêt de 27 millions de mètres cubes de bois, tandis que la tempête Klaus, du 24 janvier 2009, a eu des répercussions sur près de 600 000 hectares de forêts et touché 37 millions de mètres cubes de pins maritimes correspondant au tiers du volume de bois sur pied, soit six années de récolte normale. Le bois endommagé est néanmoins utilisable par l’industrie s’il est récolté rapide-ment avant d’être attaqué par les insectes qui en déprécient sa valeur commerciale.

Services environnementauxLe peuple français fréquente beaucoup ses forêts pour y pra-tiquer diverses activités de détente, de loisirs et de tourisme. La nature permet aux gens des grandes villes de s’évader, et la forêt est un bel endroit de ressourcement. Une des activi-tés préférées du peuple français est la cueillette de champi-gnons forestiers, et cette passion se transmet de génération en génération. Les forêts domaniales regorgent d’une mul-titude de champignons comestibles (girolles, cèpes, morilles, etc.) et la cueillette est libre de droits pour le plus grand plai-sir des mycologues amateurs et gastronomes. Cependant, dans les forêts privées, tout un chacun ainsi que les profes-sionnelles et professionnels doivent détenir un permis de cueillette de champignons pour accéder aux talles (zones de dimensions très variables où poussent des champignons).

En France, les pharmaciennes et pharmaciens sont formés à l’identification des champignons et les gens peuvent s’informer auprès d’eux pour valider la comestibilité des champignons ramassés. Tout comme les espèces de plantes et d’arbres présentes dans l’écosystème, les champignons jouent un rôle important dans la dynamique forestière. Cer-tains d’entre eux facilitent la décomposition de la matière ligneuse et contribuent à l’enrichissement de l’humus du sol ainsi qu’à la redistribution des éléments nutritifs.

SociétéLa perception de la forêt par la société a évolué au fil des siècles. Il y a 2 000 ans en France, le peuple gaulois fut le premier à utiliser les forêts pour ses rites religieux. Les druides, prêtres gaulois, se réunissaient en forêt pour discuter de religion et de politique, et pour entrer en contact avec les esprits réincarnés en arbres sacrés. À l’époque féodale (du 10e au 15e siècle), les forêts prennent une tout autre signification puisque, dans l’imaginaire populaire, elles sont perçues comme étant dangereuses. Les légendes racontent qu’elles renferment des monstres, des brigands et des bêtes sauvages. Elles sont aussi la source de nombreuses histoires de fées, de lutins, de licornes et de démons. Néanmoins, la quiétude de ces lieux attire nombre de personnes qui créent les premiers mouvements monastiques. À la Renaissance, les idées terrifiantes attribuées ancienne-ment à la forêt laissent place à la rationalité, et c’est grâce à Jean-Baptiste Colbert, ministre sous Louis XIV, que sont établis les premiers principes de gestion de la ressource forestière. Il instaure un plan de restructura-tion de la forêt du Tronçais à des fins de construction navale. Aux 18e et 19e siècles, l’image de la forêt est redorée, car ses nombreuses res-sources sont à la base de l’essor économique du pays et constituent le moteur de développement de la société. Finalement, de nos jours, le milieu forestier est perçu de différentes manières ; pour les citadines et citadins, c’est un lieu paisible de villégiature et de tourisme, tandis qu’en région, la forêt est également source de revenus et d’emplois.

ÉconomieL’économie forestière en France est très variée, allant de la plantation d’espèces à croissance rapide pour faire de la pâte à papier et du bois d’énergie (bois utilisé pour le chauffage), à la culture d’essences fores-tières nobles de grande valeur financière. Ce pays est reconnu interna-tionalement pour la qualité de ses produits forestiers. Contrairement aux modes de gestion qu’impliquent les grands massifs naturels des forêts boréales du Canada et de la Russie, les aménagistes forestiers français sont en mesure de connaître chaque arbre qu’ils cultivent et de lui appliquer les soins adéquats, au moment opportun. Les chênaies françaises sont un exemple de forêts composées d’essences forestières de grande valeur. Bien que seulement trois millions de mètres cubes par an soient coupés, les bénéfices associés à la récolte de cette es-sence s’élèvent au tiers de tous les bénéfices forestiers du pays. Gran-dement utilisé en tonnellerie, le chêne est une essence très convoitée. La France est responsable des trois quarts de la production mondiale de tonneaux et en exporte 80 %, surtout vers les États-Unis, premier producteur mondial de vin de qualité et premier marché mondial.

Néanmoins, la France est reconnue pour ce que certaines personnes appellent « le paradoxe de la forêt française ». D’une part, les superficies forestières ne cessent d’augmenter, plaçant la France au troisième rang des pays d’Europe en matière de ressources forestières, mais d’autre part, cette ressource est sous exploitée, et la France souffre même d’un déficit de sa balance commerciale de la filière bois. La forêt française se caractérise par une grande hétérogénéité de ses essences forestières et par un morcellement élevé de ses exploitations (beaucoup de proprié-taires de petites superficies). Par ailleurs, les acteurs de la transformation du bois sont eux aussi très hétérogènes, tant par la taille des entreprises que par leurs activités. La France a engagé un grand chantier de struc-turation de sa filière bois d’ici 2020, et elle mise sur le développement de nouveaux produits issus du bois pour répondre aux enjeux socio-économiques et environnementaux des sociétés de l’après-pétrole. Chênaie dans le centre de la France

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Plantation de noyers en Dordogne (France)

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Multiples usages du territoire dans les montagnes en France

La plus haute dune se trouve en France. À proximité de la ville de Bordeaux, la dune du Pyla est haute de 115  mètres, longue de 2,5 kilomètres et s’étend sur une largeur de 500 mètres. Constamment déplacé par le vent, le sable fait progresser la dune, qui empiète sur la forêt de trois à quatre mètres chaque année.

SAVIEZ-VOUS QUE ...

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Dune du Pyla et la forêt plantée de pins maritimes dans le sud-ouest de la France

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