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CONTRIBUTION À UNE SOCIOLOGIE DE L'ASSOCIATION Bruno Hautenne De Boeck Université | Pensée plurielle 2004/1 - no 7pages 11 à 16

ISSN 1376-0963

Article disponible en ligne à l'adresse:

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------http://www.cairn.info/revue-pensee-plurielle-2004-1-page-11.htm

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Pour citer cet article :

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Hautenne Bruno , « Contribution à une sociologie de l'association » ,

Pensée plurielle, 2004/1 no 7, p. 11-16. DOI : 10.3917/pp.007.0011

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Distribution électronique Cairn.info pour De Boeck Université.

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Contribution à une sociologie de l'association

BRUNO HAUTENNE 1

Mots clefs : associatif, travail social, économie sociale.

L'associatif, le secteur associatif, le monde associatif, les associations… Voilàtoute une liste de mots fréquemment et invariablement utilisés pour désigner uneréalité, celle de centaines d'associations actives dans des domaines aussi variésque la culture, le sport ou l'aide sociale.

Et lorsque l'on évoque l'associatif (il nous faut bien choisir un mot parmi tousceux cités précédemment), une première série de représentations vient àl'esprit : dévouement des membres de l'association, quel que soit au demeurantson projet fondateur, surinvestissement des participants à l'association en termesd'heures consacrées aux activités, valeurs communes partagées par l'ensembledes associés, etc.

À cette série de représentations s'en ajoute une autre, bien moins flatteuse :gestion financière hasardeuse, collaboration difficile entre bénévoles et salariés,manque de moyens matériels et financiers, etc.

Bien que modeste, notre ambition dans cet article est de dépasser cesreprésentations qui, certes, pour partie, renvoient à des réalités et de montrerquelles sont les dimensions de l'associatif dans le champ du travail social engénéral et au sein du secteur de l'économie sociale en particulier.

Pour y parvenir, nous construirons notre réflexion en trois étapes :

1. D'abord, nous définirons ce que l'on entend par « association » ;

2. Ensuite, nous situerons le secteur associatif au sein du champ du travail

social, notamment en regard de la sphère publique ;

3. Enfin, nous caractériserons la place prise par le monde associatif au

sein du secteur de l'économie sociale.

Il a fallu les travaux de Michel Crozier à partir du début des années 1960 pourfaire connaître dans les pays francophones ce nouveau courant de penséequ'est la sociologie des organisations, devenue depuis discipline à part entièredans le champ sociologique. Rien de comparable n'a encore jusqu'à ce jour étéfait à propos des associations qui sont notamment des structures éminemmentreprésentatives du travail social.

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________1 Assistant social, licencié en sociologie, maître assistant département social, ISC HECE, Charleroi.

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1. Définition de l'association.

Toute définition est réductrice. Toutefois, afin de s'entendre sur le sujet denotre réflexion, nous proposons de donner de l'association la définition suivante: une association regroupe plusieurs personnes qui ont décidé de s'unir pourcoopérer en vue de d'apporter une solution à un problème ou de répondre à unbesoin.

Trois caractéristiques se dégagent de cette définition, qui appelle plusieurscommentaires.

� Qui ont décidé de s'unir ?

C'est bien sur une base volontaire que des individus décident un jour defonder une association.

Comme le soulignent Jean-Louis Laville et Renaud Sainsaulieu, « deux butss'interpénètrent dans l'idée associative : celui de coopérer volontairement et

librement, celui de créer une solution à un problème précis2

» .

Notre Constitution reconnaît en son article 27 que « les Belges ont le droit des'associer ; ce droit ne peut être soumis à aucune mesure préventive ».

Il n'en a pas toujours été ainsi. Ainsi, la loi dite « loi Le Chapelier " qui date de1791 interdisait toutes formes d'associations et de coopératives. Elle ne seraabrogée qu'en 1866.

Pour Alexis de Tocqueville (1805-1859), la liberté d'association est un desfondements des sociétés démocratiques.

� Pour coopérer.Qui dit coopérer dit agir ensemble. L'idée de coopération renvoie donc à celle

d'action organisée ou collective.

Pour le sociologue Erhard Friedberg, l'action collective ou organisée « n'estpas un exercice gratuit. C'est toujours une coalition d'hommes contre la nature,face à des problèmes matériels pour la solution desquels ils sont obligés ou ontdécidé de coopérer » 3.

L'association n'a donc rien de naturel. Elle est un construit social, au mêmetitre que toute organisation. Elle est « un contexte d'action dans lequel se jouentet se gèrent des rapports de coopération, d'échanges et de conflits entre desacteurs aux intérêts divergents » 4.

� En vue d'apporter une solution à un problème ou de répondre à unbesoin.

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________ 2 Jean-Louis LAVILLE et Renaud SAINSAULIEU, Sociologie de l'association, Paris, Desclée deBrouwer, 1997, p.17.3 Erhard FRIEDBERG, Le pouvoir et la règle, Éditions du Seuil, 1993, p.259.4 Erhard FRIEDBERG, Le pouvoir et la règle, Éditions du Seuil, 1993, p.77.

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L'idée qui est ici sous-jacente est celle du projet qui est toujours à la base dela création d'une association.

Projet associatif, de quelque nature qu'il soit, mais aussi projet de société.

2. Secteur associatif et secteur public, frères ennemis ?

Dans le champ du travail social, il est coutumier de distinguer voire d'op-poser les services sociaux qui relèvent de la sphère publique, tels que lesCentres Publics d'Action Sociale(CPAS) par exemple, des services qui apparti-ennent au secteur privé ou associatif.

Cette dichotomie, tantôt relayée, tantôt entretenue par le monde politique, nedoit pourtant pas masquer une réalité historique.

Ainsi, comme le souligne Ivan Deschamps, l'histoire du travail social révèle àla fois l'importance jouée dans l'action sociale par l'initiative privée, mais aussi lepartage des tâches entre l'intervention publique et l'intervention privée.

À l'examen du paysage institutionnel social, il nous semble que trois cas defigure se présentent quant à la place prise par les associations :

� soit les associations occupent des espaces laissés en friche ou ignorés parles pouvoirs publics ;

� soit elles « concurrencent » des services sociaux du secteur public sur lesmêmes terrains de pratique et d'intervention ;

� soit elles œuvrent en qualité de pionnières et innovent en matière d'inter-ventions sociales dans des domaines par la suite investis par les pouvoirspublics.

Examinons chacun de ces cas.

� nous affirmons que des associations occupent des espaces délaissés parles pouvoirs publics, nous pensons tout particulièrement à des structures commeles centres d'accueil d'urgence ou comme les associations qualifiées, peut-êtreà tort de caritatives parce qu'elles (re)distribuent des vivres ou des objetsmatériels.

Ce phénomène d'occupation d'un espace social en friche est intéressant à undouble titre : comme le dit si bien Ivan Deschamps, « d'une part, il aboutit, dansun contexte de retrait ou de réorientation des interventions publiques à ne paslaisser se développer une situation anomique puisque cet espace reste investi detravailleurs, d'autre part, cette occupation illustre aussi la continuité » 5, et devrait-on ajouter, la complémentarité qui existe entre le secteur privé et le secteurpublic.

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________ 5 Ivan DESCHAMPS, Le travail social écartelé, Bruxelles, Éditions Vie Ouvrière, 1994, p. 111.

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� Parler de concurrence dans le champ du travail social peut sembler horscontexte.

Et pourtant, notre expérience professionnelle personnelle dans le domaine dela médiation de dettes au sein du secteur associatif nous confirme dans notrepropos.

Ainsi, dans ce domaine d'intervention particulier, il existe en Région Wallonnedes services de médiation de dettes agréés à la fois au sein des Centres Publicsd'Action Sociale et au sein d'associations.

L'agrément délivré par le Ministère compétent signifie, entre autres, le verse-ment annuel de subventions aux services reconnus.

Au début de l'année 2000, toute une série d'associations ont vu leurs subven-tions diminuées de façon importante alors que, dans le même temps, lesmoyens financiers octroyés aux services de médiation de dettes des CPASétaient augmentés.

Décision politique certainement, mais dure loi de la concurrence également !

� Enfin, abordons le cas des associations pionnières en matière d'interven-tions.

Un secteur comme celui de l'économie sociale, dont nous allons parler plusen détails dans la troisième partie de notre article, est, à cet égard, révélateurd'innovations.

Nous en prendrons pour preuve la Municipalité de Charleroi qui a créé unÉchevinat de l'Économie Sociale et une Maison de l'Économie Sociale aprèsavoir constaté l'émergence d'initiatives associatives sur son territoire.

C'est ce que nous appelons l'institutionnalisation des initiatives privées etqu'Ivan Deschamps qualifie de récupération objective des innovations.

« Devancier et palliatif de l'intervention publique, le secteur privé légitime sontravail précisément par la carence du public qu'il critique pour mieux le faireévoluer » 6.

3. Associatif et économie sociale.

Cela fait de nombreuses années que des associations collectent et trient desvêtements, des papiers ou des meubles. Que l'on songe à des structures comme« Emmaüs » ou « Terre ».

L'idée d'un recyclage et d'une redistribution dans le circuit économique desobjets collectés a, petit à petit, fait son chemin dans les esprits. Cette façon depenser les échanges économiques autrement qu'en termes de productivité ou deplus value a donné naissance à des initiatives dans des domaines aussi variésque le nettoyage des locaux, l'entretien des parcs et jardins, l'imprimerie ou lablanchisserie.

Cet autre regard économique a pour nom « économie sociale ».

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________ 6 Ivan DESCHAMPS, Le travail social écartelé, Bruxelles, Éditions Vie Ouvrière, 1994, p. 118-119.

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Qu'est-ce que l'économie sociale ?

En 1990, le Conseil Wallon de l'économie sociale en a donné la définitionsuivante : « l'économie sociale regroupe les activités économiques exercées pardes sociétés, principalement des coopératives, des mutualités et des associa-tions dont l'éthique se caractérise par la finalité de service aux membres ou à lacollectivité plutôt que de profit, l'autonomie de gestion, le processus de décisiondémocratique et la primauté des personnes et du travail sur le capital dans larépartition de revenus ».

Quatre principes se dégagent de cette définition, qui se situent tant au niveaudes finalités qu'à celui des modes d'organisation.

1er principe : la finalité de service aux membres ou à la collectivité plutôt quele profit.

C'est le service rendu qui motive l'activité.

2e principe : l'autonomie de gestion.

Il s'agit ici d'une particularité qui distingue l'économie sociale de la productiondes biens et de services par les pouvoirs publics.

3e principe : le processus de décision démocratique.

Le principe central est « un homme/une voix »

Et non pas « une action/une voix »

4e principe : la primauté des personnes et du travail sur le capital dans larépartition des revenus.

Ce principe général renvoie à plusieurs réalités : répartition des excédentsentre les travailleurs ou entre les usagers, constitution de réserves pour de futursinvestissements, etc.

À proximité de Charleroi, sur le site de Monceau - Fontaines entièrementdédié à l'économie sociale, se regroupent une quinzaine d'entreprises.

Toutes n'ont pas le statut d'association.

En effet, une contradiction pouvait surgir entre la poursuite d'activitéséconomiques et commerciales et l'organisation statuaire de l'entreprise sansforme d'association sans but lucratif.

C'est pourquoi le législateur a créé le 13 avril 1995 la société à finalité socialeafin de répondre aux besoins de l'économie sociale.

Preuve s'il en est d'une récupération objective par les pouvoirs publics desinnovations.

Rue Puissant, 13 6000 CharleroiTél. : 0032(0) 71/202280Fax : 0032(0) 71/202282Courriel : [email protected]

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Bibliographie.

Joëlle DEGLIN, L'économie sociale ou le troisième secteur, in Dialogue, n°11, Ministère de laRégion Wallonne, septembre 2001.

Ivan DESCHAMPS, Le travail social écartelé, Pour un chemin praticable entre l'aide et lecontrôle, Bruxelles, Éditions Vie Ouvrière, 1994.

Erhard FRIEDBERG, Le pouvoir et la règle, Dynamiques de l'action organisée, Paris, Éditionsdu Seuil, 1993.

Jean-Louis LAVILLE et Renaud SAINSAULIEU, Sociologie de l'association, Des organisationsà l'épreuve du changement social, Paris, Desclée de Brouwer, 1997.

Constitution belge, Ministère de la Justice, 2002.

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