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Recherche clinique Propionyl-L-Carnitine et art eriopathie des membres inf erieurs au stade II de Leriche et Fontaine Claudio Allegra, 1 Pier Luigi Antignani, 1 Ilana Schachter, 1 Aleardo Koverech, 2 Masa Messano, 2 Ashraf Virmani, 2 Pomezia, Rome, Italie La maladie occlusive art erielle p eriph erique (MOAP) des membres inf erieurs affecte 5% de la population adulte. Une art eriopathie non contro ˆl ee s’installe, due a un d eficit microcirculatoire, qui peut e ˆtre pr esent malgr e un bon index de Winsor et qui m ene a l’ epuisement de la r eserve fonctionnelle microcirculatoire. Le but de cette etude etait d’examiner l’am elioration possible de l’hom eostasie microvasculaire et tissulaire par l’administration de propionyl-L-carnitine (PLC). Un total de 26 patients ont et e inclus dans cette etude, a ˆg e de 65 ± 15 ans; deux hommes avaient une MAOP au stade IIA et 17 hommes et sept femmes une MOAP au stade IIB. Le crit ere prin- cipal d’inclusion etait la d et erioration du p erim etre de marche au cours du mois pr ec edent. Dans cette etude la dur ee du traitement etait de 33 jours. La PLC etait administr ee en perfusion conti- nue dans trois flacons, chacun contenant 300 mg dans 250 cc de solution saline. Les param etres suivants etaient mesur es avant et apr es le traitement: p erim etre de marche sans douleur et maximum (mesur e sur un tapis roulant a 3,2 km/hr avec une pente de 12%), temps de r egression de la douleur apr es p erim etre de marche maximum, index cheville-bras mesur e en Doppler, et evaluation de la microcirculation par capillaroscopie. Les r esultats ont prouv e que le traitement par PLC etait efficace pour reconstituer l’activit e du muscle squelettique dans des conditions isch emiques. En particulier, la capillaroscopie montrait l’am elioration de l’angio-architecture de la microcirculation, avec un plus grand nombre de capillaires visibles et une diminution au cours du temps de la perte du marquage par la fluoresc eine de sodium. Les donn ees cliniques montraient une augmentation du p erim etre de marche et une diminution du temps de r egression de la douleur, et l’am elioration clinique etait corr el ee avec l’am elioration de la fonction microcir- culatoire. De ces donn ees pr eliminaires a emerg e une indication de traitement par PLC pour l’art eriopathie occlusive chronique des membres inf erieurs au stade II. D’autres etudes avec des nombres plus elev es de patients et des variables plus contro ˆl ees sont pr evues. INTRODUCTION La maladie occlusive art erielle p eriph erique (MOAP) des membres inf erieurs affecte 5% de la population adulte. C’est egalement un index de risque cardio- vasculaire puisqu’elle est associ ee a la maladie coronarienne dans 50% des cas et a une st enose carotidienne dans 30% des cas. 1 La classification de Leriche-Fontaine distingue quatre stades de la maladie 2 : un stade asympto- matique, un second stade caract eris e par la claudi- cation, un troisi eme par des douleurs de repos, et un quatri eme par des troubles trophiques. 3-6 DOI of original article: 10.1016/j.avsg.2008.02.010. 1 San Giovanni Hospital, Rome, Italie. 2 Scientific and Clinical Department, Sigma Tau, Pomezia, Rome, Italie. Reprint requests to: Claudio Allegra, MD, San Giovanni Hospital, Via del Colosseo 26, 00100 Rome, Italie Correspondance: Ashraf Virmani, PhD, Medical and Scientific Affairs, R & D Sigma Tau HealthScience, Via Treviso 4, 00040 Pomezia (Rome), Italie, E-mail addresses: [email protected], ashraf.virmani@ st-hs.it Ann Vasc Surg 2008; 22 DOI: 10.1016/j.acvfr.2008.09.004 Ó Annals of Vascular Surgery Inc. Edit e par ELSEVIER MASSON SAS 599

Propionyl-L-Carnitine et artériopathie des membres inférieurs au stade II de Leriche et Fontaine

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Recherche clinique

DOI of or1San Giova2Scientific

Italie.

Reprint reqVia del Colosse

CorrespondAffairs, R & D(Rome), Italie,st-hs.it

Ann Vasc SurgDOI: 10.1016/� Annals of V�Edit�e par ELS

Propionyl-L-Carnitine et art�eriopathiedes membres inf�erieurs au stade II deLeriche et Fontaine

Claudio Allegra,1 Pier Luigi Antignani,1 Ilana Schachter,1 Aleardo Koverech,2 Masa Messano,2

Ashraf Virmani,2 Pomezia, Rome, Italie

La maladie occlusive art�erielle p�eriph�erique (MOAP) des membres inf�erieurs affecte 5% de lapopulation adulte. Une art�eriopathie non control�ee s’installe, due �a un d�eficit microcirculatoire,qui peut etre pr�esent malgr�e un bon index de Winsor et qui m�ene �a l’�epuisement de la r�eservefonctionnelle microcirculatoire. Le but de cette �etude �etait d’examiner l’am�elioration possible del’hom�eostasie microvasculaire et tissulaire par l’administration de propionyl-L-carnitine (PLC). Untotal de 26 patients ont �et�e inclus dans cette �etude, ag�e de 65 ± 15 ans; deux hommes avaientune MAOP au stade IIA et 17 hommes et sept femmes une MOAP au stade IIB. Le crit�ere prin-cipal d’inclusion �etait la d�et�erioration du p�erim�etre de marche au cours du mois pr�ec�edent. Danscette �etude la dur�ee du traitement �etait de 33 jours. La PLC �etait administr�ee en perfusion conti-nue dans trois flacons, chacun contenant 300 mg dans 250 cc de solution saline. Les param�etressuivants �etaient mesur�es avant et apr�es le traitement: p�erim�etre de marche sans douleur etmaximum (mesur�e sur un tapis roulant �a 3,2 km/hr avec une pente de 12%), temps de r�egressionde la douleur apr�es p�erim�etre de marche maximum, index cheville-bras mesur�e en Doppler, et�evaluation de la microcirculation par capillaroscopie. Les r�esultats ont prouv�e que le traitementpar PLC �etait efficace pour reconstituer l’activit�e du muscle squelettique dans des conditionsisch�emiques. En particulier, la capillaroscopie montrait l’am�elioration de l’angio-architecture dela microcirculation, avec un plus grand nombre de capillaires visibles et une diminution au coursdu temps de la perte du marquage par la fluoresc�eine de sodium. Les donn�ees cliniquesmontraient une augmentation du p�erim�etre de marche et une diminution du temps de r�egressionde la douleur, et l’am�elioration clinique �etait corr�el�ee avec l’am�elioration de la fonction microcir-culatoire. De ces donn�ees pr�eliminaires a �emerg�e une indication de traitement par PLC pourl’art�eriopathie occlusive chronique des membres inf�erieurs au stade II. D’autres �etudes avecdes nombres plus �elev�es de patients et des variables plus control�ees sont pr�evues.

iginal article: 10.1016/j.avsg.2008.02.010.

nni Hospital, Rome, Italie.

and Clinical Department, Sigma Tau, Pomezia, Rome,

uests to: Claudio Allegra, MD, San Giovanni Hospital,o 26, 00100 Rome, Italie

ance: Ashraf Virmani, PhD, Medical and ScientificSigma Tau HealthScience, Via Treviso 4, 00040 PomeziaE-mail addresses: [email protected], ashraf.virmani@

2008; 22j.acvfr.2008.09.004ascular Surgery Inc.EVIER MASSON SAS

INTRODUCTION

La maladie occlusive art�erielle p�eriph�erique (MOAP)

des membres inf�erieurs affecte 5% de la population

adulte. C’est �egalement un index de risque cardio-

vasculaire puisqu’elle est associ�ee �a la maladie

coronarienne dans 50% des cas et �a une st�enose

carotidienne dans 30% des cas. 1

La classification de Leriche-Fontaine distingue

quatre stades de la maladie 2: un stade asympto-

matique, un second stade caract�eris�e par la claudi-

cation, un troisi�eme par des douleurs de repos, et un

quatri�eme par des troubles trophiques. 3-6

599

600 Allegra et al. Annales de chirurgie vasculaire

Le stade II de la MOAP des membres inf�erieurs est

l’expression de l’isch�emie compens�ee. Il est

caract�eris�e par des crampes douloureuses du mem-

bre inf�erieur dues �a la diminution du d�ebit art�eriel,

qui cr�ee une anomalie dans la quantit�e de l’oxyg�ene

disponible et les besoins m�etaboliques. 7

La claudication intermittente peut etre class�ee en

tant qu’initiale ou maximum (la premi�ere

caract�erise le p�erim�etre de marche sans douleur,

et la seconde refl�ete le p�erim�etre de marche maxi-

mum apr�es d�eclenchement de la douleur. Au stade

IIA le p�erim�etre de marche maximum (PMM) relatif

est de plus de 100 m, alors qu’au stade IIB le PMM

est de moins de 100 m.

Dans des �etudes effectu�ees chez des patients

affect�es par des probl�emes cardio-vasculaires, une

am�elioration de la capacit�e d’exercice a �et�e report�ee,

probablement li�ee �a la restauration des taux

diminu�es de carnitine par l’administration de

propionyl-L-carnitine (PLC). 8,9

La PLC est un analogue de la L-carnitine, que le

corps humain produit naturellement par l’inter-

m�ediaire d’une r�eaction enzymatique compl�ete-

ment r�eversible. 10,11 Des r�esultats exp�erimentaux

sugg�erent que la PLC puisse p�en�etrer dans les

mitochondries d’une facon s�elective, et puisque les

mitochondries contiennent l’enzyme carnitine

acyltransf�erase, le r�esultat final est la stimulation du

cycle de Krebs et la production d’un exc�es de

succinate. 12 Certains des effets de la PLC sont�egalement le r�esultat de son m�etabolisme en L-car-

nitine, qui agit alternativement en tant que porteur

pour le transport des acides gras �a chaıne longue

dans les mitochondries, pour la ß-oxydation, et pour

l’augmentation du niveau du coenzyme A libre

(CoA), essentiel pour le m�etabolisme des lipides et

des hydrates de carbone. 10,13 La PLC stimule la

production �energ�etique dans les muscles

isch�emiques en stimulant le cycle de l’acide citrique

et l’activit�e de d�eshydrog�enase du pyruvate, et son

activit�e anti radicaux libres peut �egalement etre

utile. 10,14

Il a �et�e sugg�er�e que la PLC pouvait etre utile chez

les patients affect�es par diverses pathologies cardio-

vasculaires. 12,15 La rationnelle du traitement avec la

PLC est bas�ee sur les divers m�ecanismes synergiques

qui agissent sur l’int�egrit�e des param�etres archi-

tecturaux, biochimiques, et fonctionnels de la

microcirculation et des fibres musculaires.

L’objectif de cette �etude �etait de mesurer les

donn�ees cliniques de la symptomatologie am�elior�ee

chez les patients affect�es par une MOAP des mem-

bres inf�erieurs stade II avec d�et�erioration du

p�erim�etre de marche au cours du mois pr�ec�edent,

en mesurant l’augmentation du p�erim�etre de

marche initial et maximum et le temps de r�egression

de la douleur. Ceci �etait �egalement corr�el�e avec

l’am�elioration de la fonction microcirculatoire en

capillaroscopie.

PATIENTS ET METHODES

Vingt six patients consultant l’unit�e d’Angiologie de

l’hopital San Giovanni (Rome, Italie) ont �et�e inclus

dans cette �etude, ag�es de 65 ± 15 ans. Deux hommes�etaient diagnostiqu�es au stade IIA et 17 hommes et

sept femmes au stade IIB de la MOAP.

Le crit�ere principal d’inclusion �etait la

d�et�erioration du p�erim�etre de marche au cours du

mois pr�ec�edent.

La PLC �etait administr�ee en trois flacons en perfu-

sion continue pendant la journ�ee, chacun conte-

nant 300 mg dans 250 cc de s�erum physiologique

selon le r�egime suivant (dur�ee totale de traitement

33 jours): perfusion intraveineuse pendant 12 jours

cons�ecutifs, suivie d’une perfusion tous les deux

jours (six fois), puis tous les 3 jours (trois fois).

Nous avons employ�e l’administration intravei-

neuse du m�edicament en raison de la nature parti-

culi�ere des patients (aggravation rapide de la

claudication) et pour l’�evaluation aigue des r�esultats

instrumentaux.

Param�etres �evalu�es

Les param�etres suivants ont �et�e mesur�es avant

et apr�es le traitement:

� P�erim�etre de marche initial et maximum

(mesur�e sur un tapis roulant �a 3,2 km/hr avec

une pente de 12%)

� Temps de r�egression des douleurs apr�es auto-

nomie de marche absolue

� Index cheville-bras en Doppler

� Microcirculation, �evalu�ee par capillaroscopie

Capillaroscopie

Pour expliquer l’am�elioration clinique possible

r�esultant du traitement, les modifications de la

microcirculation ont �et�e �etudi�ees en utilisant un

capillaroscope modifi�e (Capiflow, Kista, Su�ede). Le

syst�eme Capiflow peut �evaluer la vitesse circulatoire

et l’h�ematocrite relatif en employant une vitesse

r�eduite au cours de l’examen des images. 16

L’�etude sur les patients art�eritiques a �et�e effectu�ee

en placant le microscope sur l’ongle du gros orteil. Il�etait possible d’analyser la vitesse capillaire des glo-

bules rouges, le diam�etre (en microm�etres),

100

200

300

érim

ètre d

e m

arch

e san

s d

ou

leu

rs (m

) ***

Vol. 22, No. 4, 2008 PLC et MOAP stade II 601

le nombre de capillaires par champ (densit�e capil-

laire), et le nombre de capillaires circulants et per-

m�eables. De plus, en utilisant un agent de

contraste, la fluoresc�eine de sodium (NaF) inject�ee

dans la veine du bras, le dosage d�ependant de

l’age, du sexe, et du poids du patient, il �etait possible

de mesurer et de quantifier la perm�eabilit�e des capil-

laires et le temps pris par NaF pour atteindre l’ongle

du gros orteil. De cette facon, il �etait possible

d’�evaluer les l�esions des capillaires dues �a l’isch�emie.

En raison de la complexit�e de cette m�ethode inva-

sive et de la dur�ee de l’examen, nous n’avons �etudi�eque six patients.

0Avant traitement Après traitement

P

� �

Analyse statistique

Fig. 1. Perimetre de marche chez 24 patients avant et

apr�es traitement intraveineux par PLC. Toutes les

mesures sont en m�etres. Chaque point est la moyenne

(±erreur standard) des 24 patients. ***Diff�erence sta-

tistiquement significative avec p < 0,001.

Toutes les donn�ees sont exprim�ees en termes de

moyenne et �ecart type. La comparaison statistique

a �et�e faite avant et apr�es traitement en employant

le test t de Student modifi�e. p < 0,05 a �et�econsid�er�e statistiquement significatif.

0

100

200

300

400

Avant traitement Après traitement

Périm

ètre d

e m

arch

e m

axim

um

(m

)

**

Fig. 2. P�erim�etre de marche maximum chez 21 patients

avant et apr�es traitement intraveineux par PLC. Toutes

les mesures sont en m�etres. Chaque point est la moyenne

RESULTATS

Tous les patients ont �et�e soign�es avec la PLC, qui a�et�e bien tol�er�ee. Parmi les 26 patients inclus dans

l’�etude, 24 ont accompli le programme de traite-

ment et les tests de marche; deux ont abandonn�el’�etude pou �echec de compliance. Aucun�ev�enement d�efavorable n’est survenu chez les

patients.

Les facteurs de risque des patients �etaient

control�es au moyen de m�edicaments sp�ecifiques

et grace �a l’observation d’un comportement correct.

Aucun m�edicament utilis�e n’influencait le

m�etabolisme de la carnitine. Aucune affection

r�enale ou h�epatique n’�etait pr�esente.

(±erreur standard) des 21 patients. **Diff�erence statisti-

quement significative avec p < 0,01.

P�erim�etre de marche et temps de

r�ecup�eration

Le p�erim�etre de marche initial augmentait significa-

tivement d’une moyenne de 157 m, avec une

moyenne de 140 m avant traitement et 297 m apr�es

traitement ( p < 0,001, n ¼ 24) (Fig. 1). Le PMM

augmentait de 135 m, de 224 �a 359 m apr�es traite-

ment ( p < 0,01, n ¼ 21) (Fig. 2).

Bien que l’�etude n’ait pas �et�e sp�ecifiquement

concue pour mesurer le temps de r�ecup�eration,

nous avons constat�e que celui ci diminuait d’envi-

ron 25% dans le groupe trait�e par PLC (r�esultats

non pr�esent�es).

Capillaroscopie

Les donn�ees de capillaroscopie pour six patients,

avant et apr�es traitement, �etaient comme suit. Une

augmentation de la vitesse des globules rouges �etait

not�ee, avec des valeurs de base de 0,15 ± 0,05 mm/

sec et 0,23± 0,07 apr�es traitement, une augmenta-

tion de 53,3% ( p < 0,05) (Fig. 3). Une l�eg�ere

augmentation non significative du nombre

de capillaires par champ, de 15 ± 6 �a 16 ± 7, �etait

observ�ee. Cependant, le nombre r�eel de capillaires

ouverts augmentait sensiblement de 4,0 ± 2,3 �a 13

0

0.05

0.1

0.15

0.2

0.25

0.3

Avant traitement Après traitement

Vélo

cité d

es g

lo

bu

les ro

ug

es (m

m/sec)

*

Fig. 3. V�elocit�e des globules rouges mesur�ee par capil-

laroscopie avant et apr�es traitement intraveineux par

PLC. Toutes les mesures sont en millim�etres par seconde,

et chaque point est la moyenne (±erreur standard) de six

patients. *Diff�erence statistiquement significative avec p

< 0,05.

0

5

10

15

Avant traitement Après traitement

No

mb

re d

e cap

illaires o

uverts

*

Fig. 4. Nombre de capillaires ouverts en capillaroscopie

avant et apr�es traitement intraveineux par PLC. Chaque

point est la moyenne (±erreur standard) de six patients.

*Diff�erence statistiquement significative avec p < 0,05.

60

80

N

aF

(sec)

602 Allegra et al. Annales de chirurgie vasculaire

± 7,1 ( p < 0,05) (Fig. 4). Le temps d’apparition du

marqueur de contraste NaF �etait �egalement sensi-

blement r�eduit, de 65 ± 18 �a 35 ± 15 sec ( p < 0,05)

(Figs. 5, 6).

0

20

40

Avant traitement Après traitement

Délai d

'ap

paritio

n d

e

*

Fig. 5. D�elai d’apparition du marqueur de contraste NaF

en capillaroscopie avant et apr�es traitement intraveineux

par PLC. Chaque point est la moyenne (±erreur standard)

de six patients. *Diff�erence statistiquement significative

avec p < 0,05.

DISCUSSION

L’art�eriopathie occlusive chronique des membres

inf�erieurs stade II peut �evoluer de deux mani�eres:

en tant qu’art�eriopathie compens�ee avec une symp-

tomatologie am�elior�ee ou en tant qu’art�eriopathie

non control�ee, avec l’�evolution vers un stade III

avec des douleurs de repos. L’�evolution d�epend

d’interventions multidisciplinaires: revascularisation

chirurgicale, traitement m�edical, et r�eadaptation

physique.

L’am�elioration de la MOAP par traitement phar-

macologique est li�ee �a la r�egression des symptomes

cliniques, principalement due aux effets sur la

microcirculation; l’adaptation �a la charge de travail

dans l’isch�emie est compens�ee au niveau des lits

pr�eterminal et terminal. Dans la premi�ere phase

les m�ecanismes de d�efense physiologiques sont

activ�es, ayant pour r�esultat la vasodilatation et l’uti-

lisation de la r�eserve microcirculatoire p�eriph�erique.

L’art�eriopathie non control�ee, comme dans notre

rapport de cas, �etait due �a un d�eficit microcircula-

toire qui am�ene l’�epuisement de la r�eserve fonction-

nelle microcirculatoire. Par cons�equent, la cible du

traitement m�edical consiste �a am�eliorer

l’hom�eostasie microvasculaire des tissus, et dans la

pr�esente �etude ce m�ecanisme �etait vis�e par l’admi-

nistration de PLC.

La microcirculation se compose ide diff�erentes

structures qui ont diff�erentes fonctions: capillaires

nourriciers (10-15% du flux sanguin) et syst�eme

para-microvasculaire (90% du flux microcircula-

toire), qui forment la r�eserve fonctionnelle, compre-

nant les art�erioles sensibles �a la variation de pression,

les veinules et les veinules post-capillaires qui ont

des p�ericytes contractiles et des micro-valves, les

m�eta-art�erioles (avec une lamina discontinue de

myocytes), les anastomoses art�erioveineuses, et la

matrice extracellulaire. Dans la MOAP il y a une

Fig. 6. Images repr�esentatives de vid�eo-capillaroscopie

avant (a) et apr�es (b) traitement par PLC. Augmentation

des capillaires ouverts avec un flux. Les capillaires sont

les tubes sombres irr�eguliers. La zone claire est la base de

tissu conjonctif.

Vol. 22, No. 4, 2008 PLC et MOAP stade II 603

hyperstomie permanente, relative et absolue, du

segment interm�ediaire avec un d�ebit accru.

C’est le dysfonctionnement endoth�elial qui

d�eclenche la pathologie de l’organe en amorcant

le d�eveloppement du processus inflammatoire de

r�eparation-prolif�eration, qui peut se manifester

comme de l’ath�eroscl�erose, de l’art�erioscl�erose,

une hypertension, ou une isch�emie avec pour

cons�equence une reperfusion. 17 Ces facteurs peu-

vent etre encore aggrav�es par les toxicit�es

m�etaboliques et tout autre facteur de risque. 18-20

L’hom�eostasie micro-vasculaire des tissus est

r�egl�ee par des m�ecanismes syst�emiques et

h�emodynamiques et bio-histochimiques locaux,

corr�el�es avec divers facteurs. 21-23 Le premier est la

« vasomotion, » qui r�egle la distribution du d�ebit

microcirculatoire sur la base de la n�ecessit�em�etabolique locale au moyen du r�eflexe myog�ene

local du sphincter pr�e-capillaire et de la tonicit�e des

myocytes art�eriolaires. Les myocytes en pr�esence du

triphosphate d’ad�enosine (ATP) et du Ca ionique

produisent de l’actinomyosine, indispensable �a son

activit�e. La seconde est l’organe endoth�elial, qui

a un m�etabolisme li�e �a sa fonction, avec des pro-

pri�et�es sp�ecifiques selon le si�ege, c.-�a-d., au niveau

des art�eres, des veines, et des vaisseaux c�er�ebraux.

La perte d’int�egrit�e lance l’activation de substan-

ces prothrombotiques et du glycosaminoglycan, par

l’interm�ediaire de l’inhibiteur de la coagulation

associ�e aux lipoprot�eines, avec formation de throm-

bine et de microthrombus locaux. En outre, le labo-

ratoire endoth�elial isch�emique, pour r�epondre aux

exigences fonctionnelles essentielles, convertit son

m�etabolisme a�erobie en a�ero-ana�erobie, ce qui

cr�ee un autre dysfonctionnement endoth�elial, une

augmentation de l’acidose locale, et l’aggravation

de la symptomatologie.

Dans la MOAP, la formation de L-carnitine

et d’acyle carnitine dans le muscle au repos r�ealise

une situation semblable �a la force sous-maximale

dans le muscle. 24-26 Des �episodes isch�emiques

r�ep�et�es provoquent un �epuisement en L-carnitine,

des r�epercussions n�egatives dans la fonction des

myocytes et l’endoth�elium, un œd�eme vasog�ene

et interstitiel, une perte de vasomotricit�e et de dis-

tribution du d�ebit microcirculatoire, et une micro-

thrombose locale. En conclusion, l’isch�emie

provoque davantage d’isch�emie, �etablissant une

adaptation du muscle squelettique au travail en

l’hypoxie.

La rationnelle du traitement par PLC est une

restauration de l’hom�eostasie microcirculatoire,

qu’il r�ealise probablement par au moins cinq

actions, dont les deux premi�eres sont corr�el�ees

et agissent en se renforcant:

1 Action h�emodynamique25

2 Action m�etabolique26

3 Action directe sur la fibre musculaire, proba-

blement au niveau nucl�eaire (le d�eficit en

carnitine est associ�e �a l’atrophie des fibres

musculaires de type 1, caract�eris�ee par des taux�elev�es des enzymes oxydantes) 27

4 Action h�emo-rh�eologique pour la restauration

de la stabilit�e normale et de la fluidit�e de la

membrane des globules rouges28

5 Modulation du m�etabolisme de glucose, qui en

cas de diminution de la carnitine, augmente

l’ac�etyl-CoA des mitochondries; 29 les sucres ne

peuvent alors pas p�en�etrer dans la cellule, avec

une non-utilisation du glucose. Ceci repr�esente

une sorte de r�esistance �a l’insuline de la

cellule.30

604 Allegra et al. Annales de chirurgie vasculaire

Les m�ecanismes �a la base des deux premi�eres

actions de la PLC sont li�es �a ses propri�et�es

h�emodynamiques et m�etaboliques uniques.

Premi�erement, son action micro-h�emodynamique

et la modulation de la motilit�e vasculaire sur

la base du besoin fonctionnel augmentent le

substrat �energique (ATP) en d�epit de l’hypoxie.

Ce m�ecanisme d’anapl�erose a �et�e �etudi�e par Taylor

et coll. en 1996. 31 Ces auteurs ont employ�ela spectroscopie en r�esonance magn�etique nucl�eaire

au 30P pour montrer des changements compatibles

avec l’am�elioration de m�etabolisme musculaire

apr�es administration de PLC: une diminution de

30% du demi-temps de r�eaction �a la phos-

phocr�eatine (PCr), une diminution de 43% du

demi-temps de r�eaction �a l’ad�enosine diphosphate

(ADP), et une augmentation de 33% de la vitesse

maximale (Vmax) de la synth�ese de l’ad�enosine tri-

phosphate oxydante. Les changements du p�erim�etre

de marche �etaient franchement corr�el�es avec des

changements de Vmax et avec une reconstitution

plus rapide de PCr et d’ADP. En 1997, Thompson et

coll. 32 ont prouv�e que chez les patients trait�es avec

2 g de PLC par jour, des taux normaux d’ad�enosine

triphosphate et de PCr �etaient atteints. Dans l’�etude

de Di Marzo et coll., 33 les patients trait�es avec la PLC

avaient une restauration plus rapide de PCr et une

moindre diminution du pH tissulaire pendant

l’exercice. La plus grande production d’ad�enosine

triphosphate a des effets positifs: elle r�e�equilibre

la vasomotricit�e, le maintien du tonus art�eriolaire

est facilit�e avec une consommation minime

d’oxyg�ene par l’endoth�elium et le sphincter pr�e-

capillaire, le maintien de la pression de perfusion,

et la restauration de l’�equilibre entre l’endoth�eline

et l’oxyde nitrique produits par l’endoth�elium.

La vasodilatation art�eriolaire en r�esultant constitue

la premi�ere r�eponse �a l’isch�emie.

Deuxi�emement, la PLC transforme probablement

les organes dynamiques endoth�eliaux et la matrice

extracellulaire. La perfusion tissulaire, intermittente

pour la vasomotricit�e art�eriolaire, permet en p�eriode

de non-perfusion la r�eabsorption des substances

interstitielles du secteur interstitiel et la pr�evention

physiologique de l’œd�eme. La PLC est un extracteur

des radicaux libres par l’interm�ediaire d’un

m�ecanisme de ch�elation des ions ferreux et de dimi-

nution du calcium intracellulaire, avec un effet pro-

tecteur sur l’endoth�elium du �a la diminution des

mol�ecules d’adh�esion des leucocytes. Ceci est

d�emontr�e par la chute de l’expression de la

L-s�electine endoth�eliale, un marqueur des

mol�ecules d’adh�erence qui sont produites pendant

l’isch�emie et la reperfusion apr�es la formation

de radicaux libres. 34 Ceci reconstitue l’int�egrit�e

endoth�eliale avec un effet r�e�equilibrant sur la per-

m�eabilit�e et l’�echange des nutriments, des catabo-

lites, des gaz, et des liquides intra- et extracellulaires

(pression trans-murale) et un r�e�equilibrage entre les

substances pro-thrombotiques, pro-fibrinolytiques,

vasodilatatrices, et vaso-constrictrices produites par

l’endoth�elium. La PLC a �egalement un effet

vasoactif vasodilatateur par l’interm�ediaire d’un

m�ecanisme li�e aux prostaglandines. 35

CONCLUSION

En conclusion, le traitement par PLC restaure

l’activit�e du muscle squelettique en cas isch�emiques

comme d�emontr�e par la capillaroscopie avec

am�elioration de l’angio-architecture microcircula-

toire, se traduisant par un plus grands nombre de

capillaires visibles et la diminution de NaF au cours

du temps. Les donn�ees cliniques refl�etent cette

am�elioration de la fonction microcirculatoire avec

un p�erim�etre de marche accru et une diminution

du temps de r�egression de la douleur. Ces donn�ees

pr�eliminaires soutiennent le traitement par PLC

pour « aggravation » de la MOAP au stade II. Nous

pensons qu’il serait utile de mener d’autres �etudes

des m�ecanismes de la MAOP et de l’efficacit�e th�era-

peutique de la PLC.

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