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Maurice Reuchlin Psychologie différentielle et psychologie sociale expérimentale (1ère partie) In: L'année psychologique. 1984 vol. 84, n°2. pp. 267-295. Citer ce document / Cite this document : Reuchlin Maurice. Psychologie différentielle et psychologie sociale expérimentale (1ère partie). In: L'année psychologique. 1984 vol. 84, n°2. pp. 267-295. doi : 10.3406/psy.1984.29022 http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/psy_0003-5033_1984_num_84_2_29022

Psychologie différentielle et psychologie sociale expérimentale

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Maurice Reuchlin

Psychologie différentielle et psychologie sociale expérimentale(1ère partie)In: L'année psychologique. 1984 vol. 84, n°2. pp. 267-295.

Citer ce document / Cite this document :

Reuchlin Maurice. Psychologie différentielle et psychologie sociale expérimentale (1ère partie). In: L'année psychologique. 1984vol. 84, n°2. pp. 267-295.

doi : 10.3406/psy.1984.29022

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/psy_0003-5033_1984_num_84_2_29022

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RésuméRésuméLes recherches différentielles se sont multipliées, ces dernières années, dans le domaine de lapsychologie sociale expérimentale. Dans ce premier article, on présente d'abord quelques étudesanciennes ou récentes sur un débat que ce type de recherches ranime : les conduites sociales sont-elles explicables par des caractéristiques personnelles ou par les caractères de la situation ? Un pointde vue interactionniste prévaut à l'heure actuelle. Dans une deuxième partie, on passe en revue desétudes consacrées aux traits de personnalité actuellement utilisés en psychologie socialeexpérimentale. Les recherches utilisant ces traits seront examinées dans un second article.Mots clés : psychologie différentielle, psychologie sociale expérimentale, interactionnisme,questionnaires de personnalité.

AbstractSummary : Differential psychology and experimental social psycho (I).Differential studies have multiplied, during the last years, in the fleld of experimental psychology. Theyhave raised up some recollections of the old debate about the determinism of social conducts,recollections which are the matter of the first part of this review. Does the conduct of an individual in asocial situation depend mostly on relatively stable individual characteristics which manifest themselvesin this individual in a rather large variety of situations (« personalism ») ? Or does it depend on thecharacteristics of the situation proper which impose themselves upon ail the individuals (« situationism») ? The answer which seems now the most frequent and the most compatible with empirical dataconsists in rejecting both terms of the alternative and to invoke an interaction between personalcharacteristics and characteristics of the situation (« interactionism »).The second part of the article bears on studies concerning the personality traits which are presentlymost often used in social psychology. These traits have been gathered in five categories : globalperception and affective coloration of social situation ; efficiency in social relations ; styles of socialrelations ; social motivations ; more general traits. Studies making use of these traits will be examined ina second article.Key-words : differential psychology, experimental social psychology, interactionism, personalityquestionary.

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L'Année Psychologique, 1984, 84, 267-295

Université René-Descartes (Paris V) Laboratoire de Psychologie différentielle1

PSYCHOLOGIE DIFFÉRENTIELLE

ET PSYCHOLOGIE SOCIALE EXPÉRIMENTALE

(PARTIE I)

par Maurice Reuchlin2

SUMMARY : Differential psychology and experimental social psychology (I).

Differential studies have multiplied, during the last years, in the field of experimental psychology. They have raised up some recollections of the old debate about the determinism of social conducts, recollections which are the matter of the first part of this review. Does the conduct of an individual in a social situation depend mostly on relatively stable individual characteristics which manifest themselves in this individual in a rather large variety of situations f« personalism r>) ? Or does it depend on the characteristics of the situation proper which impose themselves upon all the individuals (« situationism »j ? The answer which seems now the most frequent and the most compatible with empirical data consists in refecting both terms of the alternative and to invoke an interaction between personal characteristics and characteristics of the situation («. inter -actionism y>).

The second part of the article bears on studies concerning the personality traits which are presently most often used in social psychology. These traits have been gathered in five categories : global perception and affective coloration of social situation ; efficiency in social relations ; styles of social relations ; social motivations ; more general traits. Studies making use of these traits will be examined in a second article.

Key-words : differential psychology, experimental social psychology, inter actionism, personality questionary.

1. 28, rue Serpente, 75006 Paris. 2. La préparation de ce travail a bénéficié des moyens que nous devons

au cnam (inetop), à I'ephe (3e section) et au cnrs (era 79). 41, rue Gay- Lussac, 75005 Paris.

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INTRODUCTION

Depuis quelques années, l'attention accordée, en psychologie sociale expérimentale, aux différences individuelles s'est considérablement développée. La présente revue se limite à des travaux pouvant se réclamer, d'une façon plus ou moins stricte, de la méthode expérimentale, c'est-à- dire d'une utilisation de situations sociales « provoquées ». N'ont pas été retenues les publications portant sur des situations sociales « invoquées » telles que les différences entre cultures, entre classes sociales, entre sexes ; au cours de la vie familiale, de la vie des couples ; à propos de la délinquance, du fonctionnement des tribunaux, des choix scolaires et professionnels, de la satisfaction au travail, des réactions au chômage ; dans le domaine des engagements politiques ou religieux.

Le noyau documentaire de ce travail a été constitué par le dépouillement exhaustif de douze revues pour les années 1980, 1981 et 1982 et pour les premiers numéros de 1983. Les articles relevés dans ces limites ont renvoyé à un certain nombre de publications antérieures parues dans ces revues ou dans d'autres.

Les articles ou ouvrages retenus font souvent référence à un débat ancien qui s'était réanimé dans la décennie 1963-1973 et qui est étroitement lié à notre sujet. Il porte sur le déterminisme des conduites sociales et on le désigne souvent, de façon conventionnelle, par la juxtaposition de trois mots en « isme » : Personnalisme-Situationnisme- Interactionnisme. L'évocation de ce débat constituera le premier chapitre de cette revue.

Les caractéristiques individuelles susceptibles de diversifier les conduites d'individus différents placés dans la même situation sociale ont fait l'objet de définitions théoriques et de définitions opérationnelles. Celles-ci ont consisté à construire ou à emprunter des instruments (presque toujours des questionnaires) permettant de décrire ces traits de façon normalisée et sous une forme numérique. Ces instruments font souvent l'objet d'une étude psychométrique plus ou moins sophistiquée. Ils sont d'abord utilisés pour mettre à l'épreuve la définition théorique du trait considéré et pour enrichir éventuellement cette définition d'un certain « contenu additionnel » fourni par des constats empiriques. Ce genre d'études constituera le second chapitre de cette revue.

Les concepts et les instruments ainsi précisés sont utilisés dans l'étude expérimentale de situations ayant le plus souvent fait déjà l'objet d'études expérimentales générales (c'est-à-dire d'études dans lesquelles les différences individuelles ne sont pas prises en considération). Les études différentielles peuvent dans certains cas se ramener à de simples constats remettant en cause le caractère général d'études antérieures. Elles peuvent aussi tenter d'expliquer l'existence, pour certains types de situations, de théories générales concurrentes, et même proposer dans

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certains cas des données de fait permettant d'accroître la vraisemblance de l'une d'elles. Ce type de travaux constituera le troisième chapitre de la revue (à paraître dans le prochain numéro de L'Année Psychologique, Partie II).

I. — LE DÉTERMINISME DES CONDUITES SOCIALES

De nombreuses études portant sur les différences individuelles dans les conduites sociales évoquent dans leur introduction un problème qui, sous sa forme la plus générale, pourrait être énoncé ainsi : la conduite d'un individu dans une situation sociale dépend-elle surtout de caractéristiques individuelles relativement stables se manifestant chez cet individu dans une assez large variété de situations ? Ou bien de caractéristiques propres à cette situation ou à une catégorie plus ou moins étendue de situations, et s'imposant à tous les individus ? La réponse qui paraît actuellement la plus fréquente et la plus compatible avec les données de fait consiste à rejeter l'alternative et à invoquer une interaction entre les caractéristiques personnelles et celles de la situation.

Une prise de position « situationniste » à laquelle il est très souvent fait référence est celle de Mischel (1968). Dans son livre Personality and Assessment, Mischel reconnaît l'importance des différences individuelles observables chez des sujets placés en situation sociale (en se référant surtout aux situations « invoquées »). Mais il conteste que la conduite d'un individu soit prédictible utilement à partir de « traits » ou d' « états » personnels issus d'une tradition psychométrique ou d'une psychologie dynamique. Réanalysant des données empruntées à différents auteurs, il considère que les mesures de ces traits ou états sont en général instables pour un sujet donné, variables avec l'instrument utilisé et sans grande corrélation avec les conduites concrètement observées. Seules, les mesures de l'intelligence échappent en partie à ces critiques. Mischel propose une théorie de l'apprentissage social cognitif. Ce sont les stimulus propres à la situation qui, traités par chaque personne en fonction de ses expériences antérieures, expliquent sa conduite. Les personnes sont idiographiques (chacune relève d'une étude propre), les processus antécédents sont nomo- thétiques (ils sont régis par des lois communes). Le problème intéressant, pour Mischel, n'est pas celui de la stabilité de traits hypothétiques. Il consiste à chercher les moyens de modifier les comportements en fournissant au sujet des expériences appropriées. On reconnaîtra là sans doute l'influence de la thérapie comportementale skinérienne. Mais Mischel se sépare de Skinner lorsqu'il critique la psychologie animale non sociale et le désintérêt à l'égard des processus cognitifs sans manifestation motrice, se félicitant à propos de Neisser des progrès d'une psychologie cognitive. Dans un article de 1969 (Mischel, 1969), Mischel reprend les mêmes idées en soulignant cependant qu'il n'a jamais voulu rejeter le concept de

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personnalité, mais seulement soutenir que le changement, les discontinuités, font partie intégrante du « phénomène de personnalité ». Cette indication se précise un peu plus tard (Mischel, 1973). Mischel propose alors une « reconceptualisation de la personnalité en termes d'apprentissage social cognitif ». Il énumère un ensemble de « variables de personne », produits de l'histoire de l'individu : aptitude à construire des cognitions et des comportements, stratégies de codage, attentes relatives aux événements liés à un comportement ou à un stimulus, valeur subjective d'un stimulus, etc. Mischel précise que ces variables ne fourniront pas des pronostics meilleurs que les traits sur les différences de conduites entre individus : l'organisation idiosyncratique du comportement est un fait de nature.

On peut alors éprouver une certaine difficulté à bien comprendre la position de Mischel. Il a rejeté les traits de personnalité, en 1968, sur des bases purement empiriques : leur instabilité, leur très faible pouvoir prédictif. Pourquoi alors proposer des « variables de personne » dont on dit d'avance qu'elles se comporteront de même ? Qu'y a-t-il de « nomothé- tique » dans son système, en dehors des processus d'édification de ces caractéristiques personnelles instables, tout à fait spécifiques et donc sans valeur prédictive ? Il évoque l'interaction entre personnes et situations dans son article de 1973, pour regretter qu'elle soit négligée par ceux qui cherchent à atteindre des traits généraux. Pourquoi serait-il moins regrettable qu'elle soit négligée par ceux pour qui ce sont les situations qui paraissent déterminantes ? La contribution de Mischel, pour fréquemment citée qu'elle soit, manque au moins de cohérence. Ses propositions positives n'ont suscité aucun courant de recherche. Ses critiques ont fait l'objet de contre-critiques.

On pourrait dire que ces critiques adressées à Mischel sont un aspect d'un courant « personnaliste ». Cette expression pourrait laisser supposer que certains psychologues affirment que des caractéristiques personnelles peuvent déterminer seules les conduites sociales. Il faut souligner qu'on ne rencontre cette affirmation nulle part, pas même dans un ouvrage collectif dirigé par Eysenck et comportant un chapitre intitulé : « Personnalité et comportement social » (Wilson, 1981). Ce texte décrit la personnalité dans le cadre des traits stables, constitutionnellement et génétiquement déterminés, qu'à proposé Eysenck. Mais Wilson reconnaît dès son introduction que la situation dans laquelle l'individu se trouve contribue aussi à déterminer son comportement social. Il décide seulement de traiter cette source de variation comme une constante ou une variable d'erreur et de n'en plus parler, décision qui paraîtra aussi réductrice que celle des expérïmentalistes qui traitent de la même façon les variations interindividuelles. Les critiques de Mischel ne contestent pas davantage la contribution évidente des conditions de situation au déterminisme des conduites sociales. Certains voient dans les caractéristiques individuelles des « variables modératrices » modulant la relation situation-

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comportement. C'est le cas pour Alker (1972) critiqué à son tour par Bern (1972). Endler (1973) va plus loin encore et défend clairement une position interactionniste. Les réponses aux arguments antitraits avancés notamment par Mischel paraissent prendre dans une période plus récente un caractère plus technique. Mischel avait notamment invoqué la relative faiblesse des corrélations du même trait mesuré par des instruments différents (c'est-à-dire dans des situations différentes). La question est reprise dans le domaine des « comportements interpersonnels » à l'aide d'un type particulier d'analyse factorielle appliquée à des données concernant plusieurs variables hypothétiques (traits, dimensions) évaluée chacune par plusieurs instruments. Cette « analyse multivariables- multiméthodes » est notamment employée dans ce domaine par Golding et Knudson (1975) et par Mungas, Trontel et Winegardner (1981). Dans les deux cas, la cohérence des estimations de chaque trait apparaît comme très supérieure à celle dont Mischel notamment faisait état. Les auteurs expliquent cette divergence par des raisons méthodologiques. Une autre critique énoncée notamment par Mischel à rencontre des traits concerne la faiblesse de la corrélation entre ces traits et les conduites effectives qu'ils devraient permettre de prévoir. Cette constatation paraît contredire le sentiment de relative prédictibilité, de relative cohérence des comportements sociaux d'une personne connue observée dans la vie quotidienne. Cette cohérence pourrait n'être, d'après Mischel, qu'une construction de l'observateur. Il n'en est rien, répondent plusieurs auteurs. Les corrélations dont on souligne la faiblesse, disent-ils, ont été obtenues entre deux observations isolées. Dans la vie courante, l'observateur dispose d'une pluralité de prédicteurs et s'intéresse à des critères constitués aussi par des ensembles d'observations. Si l'on reproduit expérimentalement ces conditions, on trouve des corrélations qui croissent avec le nombre des variables composant le prédicteur d'une part, le critère d'autre part. Plusieurs expériences de ce type sont présentées (Epstein, 1977, 1979 ; Bagozzi et Burnkrant, 1979 ; Gifford, 1982 b), dans lesquelles les corrélations ainsi estimées peuvent atteindre des valeurs élevées. Mais l'utilisation de plusieurs méthodes d'estimation de la même variable ou le recueil de plusieurs données relatives au même prédicteur ou au même critère posent la question de savoir comment on jugera que ces méthodes d'estimation ou ces données concernent bien la même variable. On connaît le rôle que l'analyse factorielle joue dans la résolution de ce type de problème. On peut signaler une autre façon de l'étudier, qui utilise la notion de « prototype » proposée en psycholinguistique par Eleanor Rosch et ses collaborateurs de Berkeley (voir, par exemple, Rosch et Mervis, 1975 ; Rosch, Mervis, Gray, Johnson et Boyes-Braen, 1976). Buss et Craik (1980) demandent à des juges d'évaluer cent comportements sur une échelle en sept points selon qu'ils leur apparaissent comme plus ou moins proche de ce que l'on entend habituellement par comportement « dominateur ». Un critère constitué par des compor-

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tements proches de ce « prototype » est mieux prédit par des échelles de personnalité visant à estimer la dominance, qu'un critère constitué par des comportements plus éloignés de ce prototype.

Les mêmes auteurs répètent l'expérience avec les variables : réserve grégarisme, dominance, soumission (Buss et Craik, 1981). On peut signaler que Neisser (1979) avait également utilisé la notion de prototype à propos de la définition de l'intelligence.

On voit donc que les critiques, parfois radicales, adressées à la notion de traits (ou disposition, attitude) par les tenants du « situationnisme » ont été l'un des facteurs qui ont conduit à nuancer ou renouveler dans une certaine mesure ces notions. Mais l'évolution la plus marquée et très probablement la plus significative est celle qui a concerné l'importance accordée à l'interaction, sur les conduites sociales, des variables de personne et des variables de situation. Il ne s'agit en rien d'une position moyenne, d'une solution de compromis. Cette position, les faits qu'elle met en lumière, s'opposent à l'une comme à l'autre des deux positions précédentes. Si les différences entre personnes ne sont pas les mêmes dans toutes les situations, les différences entre situations ne sont pas les mêmes pour toutes les personnes.

Ces deux énoncés sont indissociables, l'un étant nécessairement vrai si l'autre est vrai, ce qui exclut que le constat de telles interactions puisse être utilisé comme argument en faveur du situationnisme (comme Mischel,nous l'avons vu, le fait) ou en faveur d'un éventuel personnalisme. Beaucoup de recherches récentes visent à mettre de telles interactions en évidence, de façon seulement descriptive ou en vue de mettre une hypothèse à l'épreuve. Mais l'attention accordée à cet aspect des faits remonte à une dizaine d'années. On pourra consulter des articles généraux écrits par Bowers (1973) sous la forme d'une critique du situationnisme, par Ekehammer (1974) qui se place dans une perspective historique, par Magnusson et Endler (1977) qui ouvrent par une excellente mise au point l'ouvrage collectif qu'ils ont dirigé sur la « psychologie interactionnelle ».

Des indications relatives à l'importance des interactions entre personnes et situations peuvent être obtenues par l'analyse de la variance de certains ensembles de résultats. Il s'agit d'expériences dans lesquelles plusieurs sujets sont évalués sur une variable dépendante (anxiété par exemple) dans plusieurs situations (plusieurs observations, plusieurs questionnaires), chaque sujet fournissant plusieurs réponses dans chaque situation. On sait que, dans ces conditions, il est possible de déterminer les parts de variance de la variable dépendante explicables respectivement par les différences entre personnes, par les différences entre situations et par l'interaction personnes x situations. Des résultats de ce genre sont publiés notamment par Bowers (1973) et par Endler (1973). Ces auteurs constatent que, dans la majorité des cas, la fraction de variance explicable par l'interaction est supérieure à la fraction expliquée par l'un ou par l'autre des deux effets principaux. Pour

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intéressantes qu'elles soient, ces indications sont cependant difficiles à interpréter : la signification pouvant être accordée aux effets principaux s'obscurcit dès qu'une interaction entre eux est présente, surtout si elle est non ordonnée (ce qui revient à mettre en cause le caractère additif du modèle de l'analyse de la variance) ; l'importance relative des différentes fractions de la variance dépend de la façon dont on a échantillonné les personnes d'une part, les situations d'autre part (la « validité écologique » de ces échantillonnages est difficile à définir, spécialement pour les situations) ; une interaction prend un intérêt psychologique dans la mesure où elle est stable et interprétable. On trouvera une discussion plus poussée de certains des problèmes posés par cet usage de l'analyse de la variance (problèmes que l'on retrouve dans les controverses hérédité x milieu) dans Golding (1975).

Ce qui précède concerne les interactions entre caractéristiques personnelles et conditions de la situation. Gifford (1981, 1982 a) étudie les interactions se produisant sur des variables dépendantes telles que la sociabilité (évaluée par la participation à une conversation) ou la distance interpersonnelle et l'orientation choisies par des sujets ayant à travailler ensemble. Il constate que les interactions entre caractéristiques personnelles et les interactions entre conditions de la situation sont souvent plus importantes que les interactions entre variables personnelles et variables de situation.

Ce sont cependant les interactions personnes x situations qui concernent le plus fondamentalement le problème du déterminisme des conduites sociales. Elles prennent tout leur intérêt lorsqu'on recherche par quel processus elles peuvent s'expliquer. Une hypothèse intéressante à cet égard consiste à se demander si les différences entre personnes n'entraînent pas chez ces personnes des perceptions différentes d'une situation qui peut rester physiquement « la même ». Les conduites d'individus différents seraient donc affectées à la fois par les différences existant entre eux (et qui peuvent suffire à susciter des réponses différentes à des situations perçues comme identiques) et par les différences existant, pour ces individus, dans la situation perçue. Les situationnistes soulignent que « la même » personne peut exhiber des caractéristiques différentes dans des situations différentes, comme si elle n'était plus « la même » personne. On se pose ici la question symétrique, que les situationnistes ne se posent pas : « la même » situation peut susciter des réponses différentes chez des personnes différentes, comme si elle n'était plus pour elles, psychologiquement, « la même » situation. On comprend la portée que cette discussion peut avoir pour la psychologie expérimentale en général et en particulier pour la psychologie sociale expérimentale qui nous concerne ici. Elle a pu être étayée sur les résultats de certaines recherches. Golding (1977) résume celles qu'il a réalisées dans ce domaine avec Knudson. Ils fournissent 29 brèves descriptions d'échanges entre personnes à des sujets qui ont été examinés par ailleurs à l'aide de

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plusieurs échelles de personnalité. Ces sujets ont à expliquer la réponse fournie, dans chaque récit, par l'un des personnages en lui attribuant des caractéristiques telles que dominant-soumis, sociable-insociable, etc. (8 échelles au total). On constate que tous les sujets ne perçoivent pas de la même façon les récits qui leur sont présentés, chaque sujet témoignant d'un certain « style » dans la construction de sa perception, style en liaison avec les traits de personnalité manifestés par ce sujet. Dans une recherche techniquement complexe, Hirschberg et Jennings (1980) déterminent par quelles dimensions chacun de leurs sujets tend à caractériser les relations entre des personnes connues de lui. Ces auteurs constatent que ces dimensions sont celles sur lesquelles le sujet tend à s'attribuer à lui-même une position favorable. Par exemple, si un sujet caractérise d'abord les relations interpersonnelles de son entourage par la dimension amitié-hostilité, il tend à se percevoir lui-même comme plus amical que les sujets qui décriront les relations interpersonnelles sur une autre dimension (dominance-soumission par exemple). King et Sor- rentino (1983) soumettent à leurs sujets 20 brefs récits décrivant chacun une situation sociale. Les distances entre ces situations sont évaluées par chaque sujet. Des différences interindividuelles se manifestent en ce qui concerne les dimensions sous-tendant la matrice de ces distances : Bixenstine, Lowenfeld et Englehart (1981) soutiennent cependant que les différences individuelles dans la perception d'autrui ne doivent pas être expliquées par des différences entre types de personnalité mais, plus superficiellement, par le rôle momentanément assumé par le perceveur dans la situation considérée.

Les études expérimentales utilisant des interactions dans lesquelles interviennent des différences entre personnes exigent que ces différences soient décrites sur un certain nombre de dimensions définies opération- nellement par des instruments d'évaluation. Le deuxième chapitre va passer en revue un certain nombre de ces dimensions.

II. — LES CARACTÉRISTIQUES INDIVIDUELLES

Nous voudrions dans ce deuxième chapitre présenter des études portant sur des caractéristiques individuelles (traits, dispositions, attitudes) utilisées dans les recherches qui feront l'objet du troisième chapitre. Comme il arrive souvent que plusieurs de ces recherches utilisent un même trait, il a paru économique de consacrer une partie à la présentation de ces traits. Fort peu de place peut être accordée à chacun et cette enumeration prendra inévitablement la forme d'une simple source documentaire. Cette présentation très succincte risquerait cependant de créer un malentendu si elle laissait au lecteur l'impression qu'aucune étude n'a été faite sur les traits pour lesquels les auteurs cités proposent des instruments d'évaluation. En fait, dans la quasi-totalité

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des articles mentionnés, l'instrument proposé a fait l'objet d'une étude psychométrique classique : sélection des items en fonction de leur liaison avec le total de l'épreuve, fidélité dans le sens de cohérence interne et parfois aussi dans le sens de stabilité au cours de deux applications successives. La structure de l'ensemble des items fait parfois l'objet d'une analyse factorielle interne pouvant conduire à scinder l'épreuve en plusieurs sous-épreuves. Les études de validité peuvent utiliser des critères externes. Mais le plus souvent, ce sont des formes plus modernes de validation qui sont utilisées. On sait qu'elles consistent à mettre à l'épreuve certaines hypothèses déduites de la définition théorique du trait : ce trait doit présenter une corrélation élevée avec telle variable, une corrélation nulle avec telle autre (validité discriminante) ; il doit se situer de telle façon prédictible dans une structure déterminée de variables, les sujets le présentant à un degré élevé doivent se distinguer des autres de telle façon sous l'effet de telle modification du dispositif expérimental (construct validity ou validité hypothético- déductive). Ce type de validation dépasse la portée purement instrumentale de la psychométrie classique : l'étude porte ici sur la cohérence et, d'une certaine façon, sur la valeur heuristique de la notion même que l'auteur de l'instrmuent a voulu opérationnaliser. Il était tout à fait impossible d'entrer dans la présentation et la discussion des démarches de ce type mises en œuvre à des degrés divers pour les quelque 24 traits qui vont être mentionnés de façon seulement indicative au cours de cette seconde partie. Nous avons cependant voulu présenter de façon un peu plus détaillée (encore que très sommaire), à titre d'exemple, quelques travaux réalisés sur l'un des traits assez souvent utilisés actuellement en psychologie sociale : le contrôle de l'expression (self monitoring).

A) Un exemple : le contrôle de l'expression

La notion et l'instrument qui l'opérationnalise ont été proposés par Snyder (1974). L'expression complète désignant la notion est : Self monitoring of expressive behavior and self-presentation (contrôle par le sujet de son comportement expressif et de sa présentation personnelle). Les individus sont inégalement sensibles aux indications fournies par la situation et inégalement capables de choisir les formes d'expression les mieux appropriées à cette situation. Ce contrôle de l'expression en fonction de la situation peut avoir différents objectifs : communiquer efficacement un état émotionnel réel ou feint, dissimuler un état émotionnel inopportun soit en restant inexpressif, soit en feignant d'éprouver un autre état émotionnel, manifester un certain état émotionnel alors qu'on n'en éprouve aucun. L'art du comédien utilise un tel contrôle. Il s'agit d'un contrôle « de l'extérieur » par les exigences de la situation. Il s'oppose à un contrôle « de l'intérieur », c'est-à-dire

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à une détermination de l'expression par les états émotionnels intimement éprouvés par le sujet.

Les larges différences individuelles dans ce domaine peuvent être évalués à l'aide d'une Echelle de contrôle de l'expression (Self monitoring scale). Elle est composée de 25 affirmations pour chacune desquelles le sujet doit dire si elle lui paraît vraie ou fausse en ce qui le concerne. Les réponses correspondant à un degré élevé de contrôle sont 12 fois « Faux » (ex. : Je trouve difficile d'imiter le comportement des autres) et 13 fois « Vrai » (ex. : Je peux paraître amical à l'égard de gens que je n'aime pas). L'étude de cet instrument a d'abord été effectuée par son auteur (Snyder, 1974 et 1979).

L'application à différents groupes de sujets a permis d'estimer, pour chaque question : la proportion de réponses considérées comme indiquant un degré faible de contrôle ; la capacité de chaque item à discriminer les sujets se situant, pour l'épreuve entière, dans le tiers supérieur ou le tiers inférieur ; la corrélation de chaque item avec le total. Les notes de 51 sujets examinés deux fois à un mois d'intervalle présentent entre elles une corrélation de .83. La validation utilise d'abord différents critères, notamment : le jugement de pairs sur la capacité du sujet à contrôler son expression ; les différences de moyennes attendues entre un groupe d'élèves-comédiens et un groupe d'autres étudiants, entre un groupe de malades psychiatriques et un groupe d'étudiants ; la capacité à énoncer une phrase en exprimant sept émotions différentes (que des juges naïfs doivent reconnaître sur des enregistrements vidéo), etc. Les résultats de ces expériences sont en général favorables. Une autre utilisation d'évaluations par des « juges » conduit cependant à des résultats négatifs. On demande à ces « juges » de décrire la personnalité de sujets ayant répondu au questionnaire de Snyder. Chacun de ces « juges » a coutume de voir le sujet dans un certain type de situation (à la maison ou bien dans ses relations de travail universitaire ou bien dans ses relations de camaraderie estudiantine, etc.). On s'attendrait donc à ce que la variabilité de ces descriptions d'un juge à l'autre soit plus grande pour les sujets ayant obtenu des notes élevées au questionnaire. Il n'en est rien (Tunnell, 1980). Bern et Allen (1974) avaient cependant montré que les sujets étaient variables à des degrés différents en fonction des exigences des situations et qu'ils pouvaient auto-évaluer dans une certaine mesure leur variabilité. La validité discriminante de l'échelle, c'est-à-dire sa spécificité, est d'abord éprouvée par rapport aux traits suivants : recherche de l'approbation, extraversion, machiavélisme. Ces traits n'ont pas de valeur prédictive à l'égard des critères ci-dessus. De plus, on constate que l'Echelle de contrôle de l'expression ne présente pas de corrélation significative avec une longue série de mesures portant sur d'autres traits de personnalité. Deux analyses factorielles de l'échelle, réalisées par des chercheurs indépendants de Snyder, nuancent un peu les résultats très

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positifs fournis par celui-ci. Briggs, Cheek et Buss (1980) ont répété leur analyse sur deux échantillons et obtiennent des résultats cohérents : un facteur d'activité (parler, animer), un facteur d'orientation vers autrui (désir de modifier son comportement en fonction de celui d'autrui) et un facteur extraversion. Deux de ces facteurs présentent des corrélations opposées avec certains traits de personnalité pris comme références. Les auteurs recommandent l'emploi de trois sous-échelles et mettent en doute l'adéquation de l'instrument à la notion théorique. Furnham et Capon (1983), après une analyse techniquement moins satisfaisante, interprètent aussi trois facteurs se rapprochant partiellement de ceux de Briggs et al. (1980). L'unidimensionalité du questionnaire est donc douteuse, ainsi que l'indépendance du trait vis-à-vis de l'extraversion.

Certaines corrélations entre le contrôle de l'expression et d'autres traits de personnalité ont déjà été fournies dans le cadre de l'étude de la validité discriminante de l'échelle proposée. D'autres auteurs ont calculé des corrélations de ce type qui aident à situer la nouvelle échelle par rapport aux échelles déjà connues. C'est ainsi que Rim (1982 a) montre utilement que les sujets contrôlant bien leur expression adoptent plus souvent sur une échelle de « positions éthiques », des positions relativistes que des positions idéalistes ; qu'ils sont plus extravertis. On comprend moins bien pourquoi il met aussi en relation avec le contrôle de l'expression des épreuves de perception des formes et de compréhension mécanique. Furnham et Capon (1983) mettent en corrélation le contrôle de l'expression avec trois échelles différentes évaluant la capacité à assumer les relations sociales, et cela sur différents groupes de sujets. Dans tous les cas, cette capacité est liée au contrôle de l'expression, de façon plus ou moins étroite selon les groupes. Snyder (1979) rapporte plusieurs études montrant que des sujets différant quant au contrôle de l'expression, diffèrent aussi quant à leur façon de se percevoir et de percevoir les autres. Il montre que ces différences cognitives paraissent cohérentes avec la définition théorique du contrôle de l'expression mais s'en autorise pour suggérer abusivement une relation causale en intitulant son chapitre : « Les conséquences cognitives du contrôle de l'expression ». Cette association fait l'objet d'un travail expérimental de Snyder et Cantor (1980) : les sujets contrôlant aisément leur expression décrivent mieux un trait de personnalité chez des personnes extérieures, les sujets contrôlant difficilement leur expression le décrivent mieux chez eux-mêmes. Des travaux expérimentaux de Lippa (1976, 1978) ont cherché à établir dans quelle mesure des sujets contrôlant aisément leur expression pouvaient altérer mieux que les autres les manifestations de leur personnalité « vraie » (en l'occurrence, telle que la décrit le questionnaire d'Eysenck). Quatre groupes de sujets (1976) sont constitués d'après leurs notes (faibles ou élevées) en contrôle de l'expression d'une part, en extraversion d'autre part. Tous ces sujets doivent jouer trois fois le rôle d'un professeur de mathématique : d'après

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leur propre personnalité ; comme s'ils étaient introvertis ; comme s'ils étaient extravertis. Des juges naïfs ont à juger Pextraversion apparente de chaque sujet dans chacune de ses prestations en observant les enregistrements vidéo. Les sujets « réellement » extravertis apparaissent toujours plus extravertis. Mais les sujets ayant des notes élevées en contrôle de l'expression modifient davantage leur comportement d'une situation à l'autre. L'auteur considère le contrôle de l'expression comme une variable modératrice modulant la relation entre comportement et personnalité. Ajzen, Timko et White (1982) mettent aussi en évidence le rôle de variable modératrice du contrôle de l'expression. Dans deux circonstances (vote dans l'élection du Président, consommation de marijuana) ils relèvent chez 155 étudiants les attitudes, les intentions et le comportement effectif. Ils constatent, conformément aux hypothèses générales, que les sujets ayant des notes faibles en contrôle de l'expression manifestent une cohérence plus grande entre attitude et comportement. Mais ils peuvent préciser que l'interaction intervient seulement dans la relation intentions-comportement. Elle n'intervient pas dans la relation attitude-intention. Dabbs, Evans, Hopper et Purvis (1980) analysent les échanges verbaux au sein de paires de sujets composées de deux interlocuteurs ayant tous deux dans le questionnaire de Snyder des notes élevées, ou tous deux des notes basses, ou de deux interlocuteurs ayant des notes opposées. Les différences observées entre sujets à notes élevées et sujets à notes basses ne confirment que partiellement les hypothèses de Snyder : on constate bien que les sujets à notes élevées parlent plus facilement, mais ils ne modifient pas plus que les autres leur comportement en fonction des changements de partenaire. Snyder et Gangestad (1982), Snyder et Kendzierski (1982) expérimentent sur les facteurs qui ont une influence sur le choix d'une certaine situation sociale par des sujets dont les uns ont une note élevée et les autres une note faible en contrôle de l'expression. Une définition claire de la situation, facilitant l'adoption d'un comportement adapté, a plus d'importance pour les premiers. L'accord entre la situation et leur propre personnalité a plus d'importance pour les seconds (par exemple, un sujet extraverti préférera une situation dans laquelle il doit s'exprimer en public de façon verbale et non verbale).

B) Autres traits de personnalité utilisés en psychologie sociale

Nous passerons beaucoup plus vite sur chacun des traits suivants. Tous n'ont pas fait l'objet d'études aussi nombreuses que le contrôle de l'expression ; la place manque pour résumer et éventuellement critiquer celles qu'ils ont suscitées. La présentation a été organisée en cinq catégories qui se justifient seulement ici par l'intention de faciliter la consultation de cette liste.

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LA PERCEPTION ET LA COLORATION AFFECTIVE GLOBALES DES SITUATIONS SOCIALES

Attirance à l'égard d'autrui

Filsinger (1981) : Liking people scale (Echelle d'affection pour les autres) ; 15 affirmations à l'égard de chacune desquelles le sujet exprime son degré d'accord. Exemple : « Quelquefois, lorsque des gens me parlent, j'en viens à souhaiter qu'ils me laissent seul. »

Swap et Rubin (1983) : Interpersonal orientation scale (Echelle d'orientation interpersonnelle) ; 29 affirmations à l'égard de chacune desquelles le sujet exprime son degré d'accord. Exemple : « Je préférerais réfléchir seul à un problème personnel plutôt qu'en parler avec d'autres. »

Confiance à Végard d'autrui

Johnson-George et Swap (1982) : Specific interpersonal trust scale (Echelle de confiance à l'égard d'une autre personne). Deux échelles différentes, l'une pour les hommes et l'autre pour les femmes. Les sujets sont invités à penser à une personne pour laquelle ils éprouvent une grande confiance et à exprimer leur degré d'accord à l'égard d'affirmations telles que : « Si X me fait un compliment, je me demande si X pense réellement ce qu'il a dit. » L'analyse factorielle des items fournit un certain nombre de sous-échelles.

Stack (1978) signale deux échelles plus anciennes : la Philosophies of human nature scale de Wrightsman et V Interpersonal trust scale de Rotter.

Soutien social perçu

Les individus éprouvent à un degré plus ou moins élevé l'impression qu'ils connaissent des gens avec qui ils peuvent s'associer, sur qui ils peuvent compter, qui se soucient d'eux, qui les estiment ou les aiment.

Sarason, Levine, Basham et Sarason (1983) : Social support questionnaire (Questionnaire de soutien social) ; 27 questions telles que : « Sur qui pouvez-vous réellement compter pour vous écouter lorsque vous avez envie de parler ? » Le sujet peut donner plusieurs noms. Il doit indiquer dans quelle mesure il est satisfait par le soutien offert.

Sarason (1981) met en évidence le rôle du soutien social dans l'adaptation à l'anxiété ou aux préoccupations personnelles. Mais l'expression s'applique ici à la situation elle-même, et non à la perception du sujet. De même, Sarason et Sarason (1982) mettent en relation le soutien social dont bénéficient les sujets avec les attitudes et les traits de personnalité de ces mêmes sujets.

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Isolement social perçu (loneliness)

Russell, Peplau et Cutrona (1980) : UCLA Loneliness scale (Echelle d'isolement de l'Université de Californie à Los Angeles). Les individus éprouvent à des degrés différents l'impression que leurs relations sociales sont moins nombreuses et moins étroites qu'ils ne le souhaiteraient. Les sujets doivent dire s'ils éprouvent : Jamais, Rarement, Quelquefois, Souvent, 20 impressions telles que « J'ai beaucoup en commun avec les gens qui m'entourent ».

Deux articles décrivent les liaisons entre le sentiment d'isolement et différentes autres caractéristiques des sujets considérées comme des déterminants de ce sentiment : Jones, Freemon et Goswick (1981) ; Jones, Hobbs et Hockenbury (1982).

Conscience de soi (self-consciousness)

Les individus ont à des degrés différents une tendance stable à diriger leur attention vers eux-mêmes.

Fenigstein, Scheier, Buss (1975) : Echelle de conscience de soi (Self-consciousness scale) ; 23 affirmations. Le sujet doit dire pour chacune dans quelle mesure elle le caractérise, sur une échelle en cinq points. L'analyse factorielle des items fournit de façon répétée trois facteurs : conscience de soi « privée » (ex. : « Je réfléchis beaucoup sur moi-même ») ; conscience de soi « publique » : Je me préoccupe de ce que les autres pensent de moi ») ; anxiété sociale (ex. : « Je suis perturbé dans mon travail si quelqu'un me regarde »). L'anxiété sociale est conçue comme une réaction au processus de focalisation sur soi de l'attention du sujet.

Ghristensen (1982). Echelle de conscience de soi comme comportement social inadapté (SCONS). Une conscience de soi intense en présence d'autrui perturbe l'activité ou le comportement. Les sujets évaluent sur une échelle en cinq points le degré d'apparition de cet état dans 24 situations qui leur sont proposées (ex. : « Vous essayez d'obtenir des renseignements sur un produit auprès d'un vendeur »).

Timidité

L'isolement perçu, une excessive conscience de soi peuvent être considérés comme des composantes d'une caractéristique personnelle plus globale, la timidité. Certains auteurs ont construit des inventaires portant sur la timidité et les ont utilisés pour étudier ce trait.

Jones et Russell (1982) proposent une échelle de 22 items, la Social reticence scale, non reproduite dans l'article. Une analyse factorielle de ces items aboutit à quatre facteurs : difficultés pour rencontrer des gens et nouer des amitiés ; problèmes de communication ; conscience de soi ; isolement perçu.

Cheek et Buss (1981) construisent une échelle comportant 9 items

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de timidité (ex. : « Je suis gêné pour regarder quelqu'un dans les yeux ») et 5 items de sociabilité (ex. : « J'aime me retrouver avec les gens »). L'analyse factorielle révèle deux facteurs distincts (timidité et sociabilité) en corrélation négative modérée. Les comportements de quatre groupes de sujets (Timides ou non x Sociables ou non) dans une situation contrôlée sont comparés.

l'efficacité dans les relations sociales

Les différences entre personnes quant à l'efficacité (effectiveness) dont elles font preuve dans leurs relations sociales peuvent être évaluées sur des critères différents, selon le contenu que l'on assigne à la notion d'efficacité. On peut examiner leurs différences quant à leurs capacités de comprendre autrui, de résoudre les problèmes interpersonnels, de parvenir à s'exprimer, de s'exprimer et d'agir habilement pour atteindre un certain objectif (ce qui peut conduire à considérer aussi leurs différences quant à leur sens moral). Plusieurs des traits déjà examinés peuvent être compris comme des facteurs d'efficacité ou d'inefficacité dans les relations sociales. Les traits suivants sont plus souvent encore considérés sous cet angle.

Empathie

Les différences individuelles dans les réactions suscitées par l'observation des conduites d'autrui sont un très ancien thème de recherche dont il n'est pas question de faire ici l'historique. Ces réactions constituent un moyen de comprendre autrui. On distingue au moins deux aspects de cette compréhension : un aspect cognitif fondé sur une capacité à percevoir les problèmes du point de vue d'autrui ; un aspect émotionnel, fondé sur la capacité à partager émotionnellement les expériences émotionnelles d'autrui. Mehrabian et Epstein (1972) présentent un questionnaire destiné à évaluer ce second aspect. Le sujet doit exprimer son degré d'accord avec chacune des 33 affirmations du questionnaire (ex. : « Voir pleurer quelqu'un me bouleverse »). En utilisant notamment les résultats d'analyses factorielles portant sur des ensembles d'items plus étendus, les auteurs subdivisent l'échelle en sept sous- échelles.

Cette tendance à mettre en lumière une pluralité de dimensions de la notion se retrouve chez Davis (1983). Cet auteur a élaboré un Interpersonal reactivity index (IR1 ) de 28 items subdivisé en 4 sous-échelles : tendance à adopter le point de vue d'autrui ; tendance à se projeter dans l'action des livres, films ou pièces ; tendance à éprouver des sentiments à l'égard d'autrui ; tendance à se sentir mal à l'aise devant les émotions d'autrui. Les corrélations de ces quatre échelles avec 18 autres épreuves sont fournies.

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Capacité à résoudre des problèmes interpersonnels

Getter et Nowinski (1981) se réclament des recherches antérieures sur la théorie de l'apprentissage social de Rotter, sur la résolution de problèmes et sur l'affirmation de soi en présentant leur Interpersonal Problem Solving Assessment Technique (I PS AT) destiné à évaluer les composantes de 1' « efficacité interpersonnelle » d'un sujet. On présente aux sujets 46 situations sociales (ex. : « Votre patron ou votre professeur vient de critiquer un travail que vous avez fait, et vous pensez que cette critique n'est pas justifiée ni équitable. Que faites-vous ? »). Les réponses sont libres. Le manuel fournit une grille de correction permettant de les classer en réponses efficaces, d'évitement, inappropriées, dépendantes.

Capacités d'expression

Assez curieusement, les épreuves verbales classiques ne sont pas utilisées dans les articles examinés comme variables différentielles susceptibles de présenter des liaisons avec les conduites sociales. Signalons un test visant à évaluer les capacités d'expression non verbale des émotions : Affective Communication Test ou ACT (Friedman, Prince, Riggio et Dimatteo, 1980). Exemple de question : « Lorsque j'entends une bonne musique de danse, je peux difficilement rester tranquille. »

Habileté en situation sociale

Nous avons signalé plus haut d'assez nombreuses études portant sur la capacité de contrôler son expression verbale ou non verbale (self- monitoring) en fonction des exigences sociales de la situation dans laquelle on se trouve.

Une variable qui est elle aussi d'un usage assez fréquent est le machiavélisme (machiavellianism) dont l'étude par R. Christie et F. L. Geis date de 1970 (Geis, 1978). Il s'agit d'une aptitude à manipuler autrui et d'une tendance à le faire. Les auteurs ont proposé deux échelles de machiavélisme. Dans la première, les sujets expriment leur degré d'accord (de 1 à 7) avec 20 affirmations (ex. : « Ne dites jamais à personne la véritable raison pour laquelle vous avez fait quelque chose, à moins que le dire soit utile »). Dans la seconde, on propose aux sujets des triades d'affirmations. Ils doivent choisir celle qui est la plus proche et celle qui est la plus éloignée de leurs opinions. L'une seulement de ces affirmations caractérise le machiavélisme (positivement ou négativement). L'une des deux autres présente la même désirabilité sociale que la première. La troisième présente une désirabilité sociale très différente, en plus ou en moins (ex. : A : Les personnes qui parlent de problèmes abstraits ne connaissent pas en général ce dont elles parlent ; B : Toute personne qui accorde complètement sa confiance à quelque autre personne que ce soit se cherche des ennuis ; C : II est essentiel au fonctionnement de la démocratie que tout le monde vote). Geis et Tae

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Hyun Moon (1981) montrent expérimentalement que les sujets très machiavéliques d'après le questionnaire ci-dessus mentent plus efficacement que les sujets peu machiavéliques.

Jugement moral S'inspirant des travaux anciens de Piaget sur le jugement moral chez

Venfant (1932), Kohlberg (1963) avait proposé une théorie du développement moral et une échelle d'évaluation (Moral Judgment Scale) distinguant six types de réponses, regroupées en trois niveaux, au cours d'un entretien libre à propos d'une histoire présentant un dilemme moral. On a reproché à cette échelle de comporter des biais politiques et de constituer un test projectif plutôt qu'une épreuve de développement cognitif. Hogan (1970) a construit un Survey of Ethical Attitudes ou SEA qui distingue deux idéaux éthiques : une éthique de la conscience personnelle et une éthique de la responsabilité sociale. L'épreuve se propose de situer chaque sujet sur le continuum reliant ces deux idéaux. Deux formes de l'épreuve contiennent chacune deux types de questions : des items du type échelle d'attitude (ex. : « On ne doit pas obéir à une loi injuste ») et de petites histoires présentant un dilemme moral à l'égard duquel les sujets doivent prendre position. Johnson, Hogan, Zonderman, Callens et Rogolsky (1981) montrent que les sujets plus proches d'une éthique de responsabilité sociale adoptent une attitude plus favorable à l'égard des autorités. Forsyth (1980) propose d'évaluer les perspectives éthiques adoptées par un individu en utilisant un Ethics Position Questionnaire ou EPQ. L'épreuve fournit un score « Idéalisme » et un score « Relativisme ». Elle est composée de vingt questions (ex. : « On ne doit jamais faire du mal, psychologiquement ou physiquement, à une autre personne. » « Ce qui est moral varie d'une situation à une autre et d'une société à une autre »).

LES STYLES DE RELATION SOCIALE

Nous regrouperons sous ce titre des études portant sur certaines tonalités générales de relations à autrui, certains climats pouvant être préférés et recherchés dans ces relations. Il peut s'agir à la fois d'une certaine tonalité émotionnelle et d'une certaine modalité de communication et d'action. C'est pourquoi l'expression « style de relation sociale » nous a semblé appropriée.

Tendance à la coopération ou à la compétition Cohen (1982) ne présente pas de questionnaire destiné à évaluer

cette tendance. Elle distingue ses sujets selon qu'ils choisissent, pour accomplir une certaine tâche, une modalité de travail fondée sur la compétition ou sur la coopération. Elle étudie alors le comportement des uns et des autres dans des situations de coopération, de compétition ou de tutelle, ainsi que leurs attitudes à l'égard de leurs pairs.

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Hostilité Russell (1981) procède à l'analyse factorielle de plusieurs mesures

d'hostilité : association de mots, auto-évaluation par le sujet de son degré d'agressivité, peines proposées par le sujet pour différents délits, trois questionnaires d'agressivité, une échelle de besoin d'approbation. Il trouve notamment les trois facteurs suivants : désirabilité sociale, expression directe ou indirecte de l'hostilité, tendance à châtier.

Affirmation de soi (Assertiveness) Ray (1981) s'efforce de distinguer les définitions de l'autoritarisme

(dominance agressive) et de l'affirmation de soi (dominance non agressive). Il propose une échelle de dominance qu'il compare à un inventaire d'autoritarisme antérieur. Leurs corrélations avec des évaluations faites par des pairs sont compatibles avec la distinction proposée. (Exemple de question : « Préférez- vous recevoir des ordres ou en donner ? »)

Lobel (1981) étudie les relations entre affirmation de soi, extroversion et besoin d'approbation. Ces relations paraissent n'être pas les mêmes chez les hommes et chez les femmes.

Une échelle d'affirmation de soi construite par S. A. Rathus est signalée par Kremer, Bringle et Cave (1980) qui confirment l'indépendance entre affirmation de soi et agressivité.

Autoritarisme Les recherches sur ce trait ont leur origine dans les travaux de

T. W. Adorno et de son groupe, à partir de 1950. Dillehay (1978) les résume et reproduit notamment l'échelle d'autoritarisme (F Scale) proposée par Adorno. L'autoritarisme est conçu comme un syndrome consistant théoriquement en 9 variables et c'est par référence à elles qu'ont été choisies les 30 affirmations composant l'échelle (ex. : « L'obéissance et le respect de l'autorité sont les plus importantes des vertus que les enfants doivent apprendre. » Question se référant à la variable « soumission à l'autorité » définie ainsi : « Attitude soumise, non critique à l'égard d'autorités morales idéalisées »).

Certains travaux récents tendent à présenter l'autoritarisme comme un trait de personnalité relativement indépendant des prises de position à l'égard des autorités institutionnelles et des attitudes politiques (Rigby et Rump, 1982 ; Ray, 1982).

Dogmatisme, ouverture et fermeture d'esprit Milton Rokeach a présenté en 1954 une théorie cognitive de la per

sonnalité dont Ehrlich (1978) fournit une analyse illustrée par de nombreux travaux qui l'ont utilisée. Pour Rokeach, toutes les croyances, attentes, hypothèses tenues pour vraies par un sujet forment un système psychologique, et toutes celles qu'il tient pour fausses un autre

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système. Ces systèmes peuvent être plus ou moins « ouverts » ou « clos », selon qu'ils acceptent plus ou moins les acquisitions et les changements. Rokeach a proposé une échelle de dogmatisme composée de 40 propositions avec chacune desquelles le sujet doit exprimer son degré d'accord (ex. : « Parmi toutes les philosophies il n'en est probablement qu'une seule qui soit vraie ».)

LES MOTIVATIONS SOCIALES

On trouvera dans 1' Annual Review of Psychology deux revues récentes sur la motivation sociale : Brody (1980) ; Reykowski (1982). Les travaux récents en psychologie sociale différentielle font référence à des études sur les motivations sociales dont certaines au moins sont plus anciennes et qui vont être brièvement signalées.

Sécurité ou estime Wilson et Aronoff (1973) adoptent la distinction proposée par

A. H. Maslow entre sujets motivés par une recherche de la sécurité et sujets motivés par une recherche de l'estime. Ils présentent une validation hypothético-déductive (construct validity) d'un test de phrases à compléter (Sentence Completion Test ou SCT ) construit pour permettre cette distinction : ils vérifient que, conformément à la théorie, les sujets surtout motivés par la recherche de la sécurité sont plus anxieux, plus dépendants et moins dominants que les sujets surtout motivés par la recherche de l'estime. Une autre validation de ce type du même questionnaire est présentée dans Wilson et Petruska (1982).

Approbation Dans leur ouvrage sur la motivation suscitée par la recherche de

l'approbation, Crowne et Marlowe (1964) reprennent le questionnaire de désirabilité sociale qu'ils avaient publié quelques années avant (Crowne et Marlowe, 1960). Pour eux, l'émission de réponses socialement désirables manifeste le besoin d'être approuvé. Ce besoin s'expliquerait aussi par un mécanisme de défense : obtenir l'approbation d'autrui est un moyen de se défendre des menaces qui pourraient émaner de lui ; c'est aussi un moyen de défendre son estime de soi. L'échelle comprend 33 affirmations dont le sujet doit dire si elles sont, en ce qui le concerne, vraies ou fausses (ex. : « Avant de voter, j'étudie soigneusement les compétences de tous les candidats. »)

Réussite, pouvoir La motivation suscitée par la recherche de la réussite a fait l'objet

d'un très grand nombre d'études depuis 1950, notamment de la part de D. C. McClelland, de J. W. Atkinson et de leurs associés respectifs. On trouvera une revue de ces travaux dans Wiener (1978). A une date

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plus récente, il semble que certains auteurs soient à la recherche d'un instrument d'évaluation plus objectif que le TAT. Ray (1980 b) valide différentes épreuves par rapport à des jugements portés par des pairs. Un test projectif fournit des notes sans liaison avec ces jugements alors que des inventaires de comportement sont significativement corrélés avec eux. On trouvera dans la revue de Brody (1980) déjà citée des articles sur cette comparaison entre épreuves projectives et questionnaires, non seulement en ce qui concerne la recherche de la réussite mais aussi la recherche du pouvoir (sur ce dernier point, voir également Winter et Stewart, 1978).

DES TRAITS DE PERSONNALITÉ PLUS GÉNÉRAUX

Les traits de personnalité qui viennent d'être passés en revue sont conçus pour la plupart comme assez spécifiques aux situations sociales, qu'ils décrivent les conduites en de telles situations ou qu'ils aient l'ambition de contribuer à expliquer ces conduites. Les recherches différentielles en psychologie sociale utilisent aussi des traits de personnalité plus généraux : l'explication de certaines conduites sociales peut faire intervenir des traits susceptibles d'être définis sans référence exclusive à ces situations et susceptibles aussi de se manifester en dehors d'elles. Voici quelques-uns de ces traits.

Mécanismes de défense On peut penser que des mécanismes de défense, compris dans un

sens inspiré de la métapsychologie freudienne, interviennent notamment dans les situations sociales. Mais tous les individus n'utilisent pas les mêmes mécanismes de défense. Gleser et Ihilevitch (1969) ont construit l'un des instruments proposés pour préciser les différences individuelles dans ce domaine, le Defense Mechanism Inventory ou DM I ; dix histoires sont présentées au sujet, suivies chacune de quatre questions. Pour chaque question cinq réponses sont proposées, correspondant chacune à un type de défense. La validité de ce questionnaire, étudiée d'abord par ses auteurs, a fait l'objet d'un article modérément critique (Blacha et Fancher, 1977).

D. Byrne a publié en 1961 une échelle visant à repérer les mécanismes de défense d'un sujet sur un continuum allant de la répression (échapper à l'anxiété en évitant de percevoir la menace et d'évoquer ses conséquences possibles) à la sensibilisation (penser à la menace, analyser ses conséquences possibles, en parler, etc.). Cette échelle, dénommée Repression- Sensitization- Scale, est composée de certains items du MMPI. Certains des travaux la concernant sont présentés par Bell et Byrne (1978).

Les mécanismes de défense au sens freudien ne sont pour certains auteurs (comme Lazarus, 1966) que l'un des processus permettant au

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sujet de réagir aux menaces et aux attaques. L'action effectuée sur le milieu, la recherche et le traitement d'informations, peuvent constituer d'autres processus susceptibles d'entrer en jeu dans ces circonstances. Les individus diffèrent quant à ceux de ces processus qu'ils utilisent le plus souvent, et l'on emploie à ce sujet la notion de Coping styles (Baum, Galesnick, Davis et Gatchel, 1982), pouvant se traduire par « façons de faire face ».

Attitude relative à Vorigine des renforcements (locus of control) La cause d'un événement agréable ou désagréable peut être recher

chée surtout, par certains sujets, à l'extérieur d'eux-mêmes (sujets « externes »), par d'autres, surtout en eux-mêmes (sujets « internes »). Un continuum existe entre ces deux attitudes, sur lequel chaque sujet peut être localisé. Cette notion est due à J. B. Rotter (1966). Elle a été utilisée dans de très nombreuses recherches portant ou non sur des situations sociales, recherches dont on trouvera des revues notamment dans Reid (1977) ou Phares (1978). L'échelle proposée par Rotter (I-E Scale) contient 29 items dont 23 sont utilisés pour l'évaluation. Il s'agit de choisir entre deux affirmations telles que : « a) Beaucoup de gens peuvent être considérés comme des victimes des circonstances ; b) Ce qui arrive aux gens leur est assez largement imputable. » Plusieurs autres échelles concernant le même trait ont été publiées depuis. On peut citer celles de Nowicki et Strickland (1973), de Nowicki et Marshall (1974), de Levenson (1974). Les contributions récentes à l'étude de ce trait sont constituées par des analyses factorielles mettant en évidence la multidimensionalité de la notion. Lange et Tiggeman (1981) analysent l'échelle de Rotter et distinguent le contrôle des événements politiques du contrôle des événements personnels. Finch, Kendall, Spirito et Mikulka (1981) analysent en cinq facteurs l'échelle de Nowicki-Strickland, les deux premiers paraissant recouper ceux de Lange et Tiggeman. Levenson (1974) avait trouvé elle-même trois facteurs dans son échelle (contrôle par des gens puissants ; contrôle interne ; chance). Lindbloch et Faw (1982) utilisent ensemble les trois échelles citées ci-dessus. Ils retrouvent dans l'échelle de Levenson les facteurs que cet auteur avait mentionnés et fournissent les corrélations entre les échelles. Barling (1980), Barling et Bolon (1980) fournissent d'autres références sur le sujet et montrent pour leur part que la structure factorielle d'une autre échelle (celle de B. E. Collins) varie quelque peu avec le milieu culturel.

Extraversion, névrotisme, psychotisme Les traits de personnalité proposés par Eysenck peuvent être utilisés

pour étudier en particulier les différences des conduites individuelles en situation sociale et Wilson (1981) présente, nous l'avons dit, une revue sur ce sujet. On remarquera sans doute que les items du questionnaire d'Eysenck qui constituent la définition opérationnelle de ces traits

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portent déjà pour une part sur des situations sociales : par exemple, la sociabilité est l'un des types de conduites définissant l'extraversion. Il paraît y avoir quelque circularité à constater ensuite, par exemple, que les extravertis sont plus sociables. Wilson lui-même évoque l'objection possible et la discute (p. 212). Les liaisons entre les traits de personnalité proposés par Eysenck et certaines attitudes sociales ont fait l'objet de plusieurs études. Citons celle de Ray (1980 a) qui critique les relations affirmées par Eysenck entre extraversion et autoritarisme et celle de Hernandez et Mauger (1980) qui trouvent des relations cohérentes entre les trois facteurs de personnalité d'Eysenck d'une part et, d'autre part, l'affirmation de soi et l'agressivité.

Tendance à manifester une conduite de type A

Cette notion de « Type A » se rencontre relativement souvent dans les études différentielles récentes, en particulier dans celles qui portent sur des situations sociales. On en trouvera de bonnes présentations d'ensemble dans le livre de Glass (1977) et dans l'article de Matthews (1982) centré sur les perspectives psychologiques. La notion se réfère à un pattern de comportements qui a été isolé par des médecins cherchant des signes fiables leur permettant de détecter les sujets particulièrement susceptibles d'être atteints par une maladie cardio-vasculaire (spécialement une affection des artères coronaires). Déçus par le cholestérol, l'hypertension et le tabagisme, M. Friedman et R. H. Rosenman se sont tournés vers les conduites de leurs malades et ont empiriquement constaté que ceux-ci présentaient souvent le tableau comportemental suivant : ils s'impliquent agressivement dans un combat incessant pour en faire de plus en plus dans un temps de plus en plus court en entrant éventuellement en conflit avec les personnes qui leur font obstacle. Ils parlent et agissent vite, ils s'impatientent aisément, ils font plus d'une chose à la fois, ils sont facilement préoccupés d'eux-mêmes, insatisfaits de la vie, évaluent numériquement ce qu'ils font, entrent en compétition avec d'autres à tout propos, sont facilement hostiles. La présence extrême de ces conduites définit un « type A », leur absence totale un « type B », et l'on suppose que tous les sujets peuvent être localisés sur un continuum A-B. Cette localisation peut s'effectuer grâce à différents instruments : un entretien structuré permettant de classer les sujets en quatre catégories ; un inventaire de C. D. Jenkins, le Jenkins Activity survey composé de 50 questions validées par rapport à l'entretien structuré ; une échelle de 10 items, la Framingham Type A Scale ; une batterie de tests cognitifs et psychomoteurs étudiée par R. W. Bortner. En utilisant ces instruments et en comparant la fréquence d'apparition des troubles cardio-vasculaires chez les A et chez les B, on obtient des résultats très favorables à la valeur prédictive de cette distinction. Ces recherches d'orientation médicale ont commencé vers 1950. A partir de 1970 environ, des psychologues se sont intéressés à ce syndrome

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comportemental. Ils en ont proposé différentes interprétations psychologiques. Par exemple, Glass (1977) suggère que les comportements de type A traduisent un effort pour acquérir et conserver le contrôle d'événements incontrôlés perçus par le sujet comme potentiellement dangereux. Dans cette interprétation la conduite de type A apparaît comme un coping style, une façon de faire face. Cette interprétation est présentée comme une hypothèse dont on tire un certain nombre de conséquences soumises à la vérification expérimentale.

Parmi les études plus récentes portant sur cette dimension, signalons celle de Ovcharchyn, Johnson et Petzel (1981) montrant que les étudiants de type A sont impliqués dans des activités plus nombreuses, accordent plus d'importance à leur réussite, obtiennent de meilleurs résultats. Humphries, Carver et Neumann (1983) comparent expérimentalement certaines caractéristiques cognitives des A et des B. Les A focalisent davantage leur attention sur les tâches définies comme centrales ; ils sont plus attentifs que les B aux attributs les plus fréquents des stimulus qui leur sont présentés. Ces différences apparaissent dans les situations expérimentales dans lesquelles les sujets sont personnellement impliqués.

Tendance à rechercher les sensations (sensation seeking)

Zuckerman (1978) s'est d'abord intéressé aux différences individuelles observées dans les expériences de privation sensorielle montées dans le laboratoire de D. O. Hebb dans les années 50. Chaque individu paraît avoir un niveau optimum d'activation et recherche, pour le maintenir, un niveau optimum de stimulation. Une échelle fut construite pour évaluer la tendance de chaque individu à rechercher les stimulations : l'Echelle de recherche des sensations (Sensation Seeking Scale ou SSS). Elle est composée sous sa forme IV de 72 paires d'affirmations. Le sujet doit choisir, dans chaque paire, l'affirmation qui décrit le mieux ses préférences. L'échelle a fait l'objet de nombreux travaux psychométriques dans les années 60 et notamment d'analyses facto- rielles qui ont permis de regrouper les items en quatre facteurs :

1) Recherche du frisson et de l'aventure (ex. : J'aime parfois faire des choses un peu effrayantes : V-Une personne sensible évite les activités dangereuses).

2) Recherche d'expériences (ex. : J'aime avoir des expériences nouvelles et excitantes, même si elles sont quelque peu effrayantes, non conventionnelles ou illégales : V- Je ne suis pas intéressé par une expérience en tant que telle).

3) Désinhibition (ex. : Presque toutes les choses intéressantes sont illégales ou immorales : V - Les choses les plus intéressantes sont parfaitement morales et légales).

4) Sensibilité à l'ennui (ex. : Cela m'ennuie de voir toujours les mêmes figures : V- J'aime la familiarité confortable des amis de chaque jour).

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II reste à voir quel usage est fait, dans les recherches récentes en psychologie sociale expérimentale, de ces variables différentielles. Ce sera l'objet de la Troisième Partie de cette revue, qui paraîtra dans le prochain numéro de L'Année Psychologique.

RÉSUMÉ

Les recherches différentielles se sont multipliées, ces dernières années, dans le domaine de la psychologie sociale expérimentale. Dans ce premier article, on présente d'abord quelques études anciennes ou récentes sur un débat que ce type de recherches ranime : les conduites sociales sont-elles explicables par des caractéristiques personnelles ou par les caractères de la situation ? Un point de vue interactionniste prévaut à Vheure actuelle. Dans une deuxième partie, on passe en revue des études consacrées aux traits de personnalité actuellement utilisés en psychologie sociale expérimentale. Les recherches utilisant ces traits seront examinées dans un second article.

Mots clés : psychologie différentielle, psychologie sociale expérimentale, interactionnisme, questionnaires de personnalité.

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