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Quelques remarques sur l'édition du Roman de Brut de Wace publiée par Ivor Arnold

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Quelques remarques surl'édition du Roman de Brut deWace publiée par Ivor ArnoldCarin FahlinPublished online: 21 Jul 2008.

To cite this article: Carin Fahlin (1938) Quelques remarques sur l'édition du Romande Brut de Wace publiée par Ivor Arnold, Studia Neophilologica, 11:1-2, 85-100, DOI:10.1080/00393273808586818

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Quelques remarques sur l'édition du Roman deBrut de Wace publiée par Ivor Arnold.

Après huit années de travail, M. Arnold a mené à bonnefin son édition du Roman de Brut, dont le premier volume aparu ce printemps sous les auspices de la Société des AnciensTextes. L'édition de Le Roux de Lincy, centenaire déjà, necorrespondait plus aux exigences modernes et M. Arnold arendu un grand service à la philologie romane en publiant cetexte si important. Le volume paru contient, outre les 9000premiers vers du poème, une excellente introduction traitant dela langue, du style et de l'influence de Wace ainsi que desmss. du Brut, de leur classement et de la méthode adoptéepour l'édition. C'est cette méthode que nous nous proposonsde discuter ici.

L'éditeur a eu à sa disposition vingt-deux manuscrits, dontil a collationné en entier quatorze mss. et quatre fragments(les deux plus courts ne sont pas cités, v. Introd., p. XXVIII).Afin d'établir un classement des manuscrits, il a fait plusieursstatistiques, dont l'une en attribuant aux variantes diverses va-leurs (1, 3 et 5 points) d'après leur importance. C'est ainsiqu'il a enfin réussi à constater l'existence de certains groupe-ments parmi les mss., mais il a aussi pu se rendre compte que,malheureusement, « il n'y a guère deux mille vers consécutifsdans tout le Brut pendant lesquels les relations des manuscritsdemeurent sans changement, et aucun groupement basé sur lesvers 1—10000 ne reste intact aux vers 8000—9000 » (pp. XXXI—XXXII). Dans ces conditions défavorables, M. Arnold aforcément dû renoncer à dresser un arbre généalogique. Ajou-tons encore que, parmi les manuscrits parvenus jusqu'à nous,les plus anciens sont écrits au moins soixante ans après la

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composition du poème (en 1155) et l'on comprend que la mé-thode à adopter pour l'édition ait été pour l'éditeur une tâchedes plus ardues.

M. Arnold rejette le principe d'édition si usité actuellement,à savoir la reproduction d'un seul manuscrit, et voici pourquoi:« Vu la tradition manuscrite étendue du Brut, dit-il, et le faitque nous possédons X Historia de Geoffroy de Monmouth, quien est la source principale, cette méthode m'a paru faire unepart trop restreinte aux probabilités. Il me semble préférabled'imprimer ce qu'on pourrait appeler la tradition « moyenne »du Brut dans les manuscrits que nous possédons » (pp. LVI—VII).

Les raisons alléguées par l'éditeur contre la reproductiond'un seul manuscrit sont-elles suffisantes pour justifier la publi-cation d'une tradition «moyenne» du Bruti — Voilà la pre-mière question que nous nous sommes posée.

Voyons d'abord ce que nous apprend M. Arnold sur lesrapports entre le Brut et VHistoria Regum Britanniae de Geoffroyde Monmouth. En général, Wace reproduit avec une grandefidélité les renseignements de XHistoria mais « il lui arrive pour-tant d'apporter au texte de Geoffroy des retouches, soit enomettant des passages, soit en intercalant des renseignementssupplémentaires qu'il a puisés à diverses sources» (p. LXXIX).« II ajoute de temps à autre au récit de Geoffroy quelques pré-cisions topographiques . . . parfois il corrige le texte de Geoffroy »(p. LXXX).

Nous voyons que déjà Wace ajoute et omet des passages deXHistoria et qu'il corrige la source latine. Et les copistes nese font pas faute de continuer. Dans le chapitre III de Xln-troduction: « Classement des manuscrits», M.Arnold compareavec grand soin les relations des mss. entre eux et leurs rapportsavec la source latine. L'étude est pleine d'intérêt, mais l'édi-teur arrive-t-il à déterminer avec certitude lequel des deuxgroupes (car il y a toujours deux groupes de manuscrits quis'opposent!) reproduit le texte de Wace? Voici ce qu'il endit lui-même. Vers 1—4000: « . . il est généralement impos-sible de décider de quel côté il y a erreur. Même la com-paraison de toutes ces variantes avec le texte de Geoffroy deMonmouth ne fournit guère l'occasion de conclure avec certi-

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tude » (p. XXXIII). — « De nouveau, il est extrêmement diffi-cile de trouver l'un ou l'autre groupe en faute, le texte latin netranchant que rarement la question » (p. XXXIV). — Vers 4000à 8000: «L'examen des variantes qui séparent CJHK (a8) d'unepart, DPNTSFGRM (b2) de l'autre, ne fournit guère l'occasionde trouver l'un ou l'autre groupe en faute » (p. XLI). —« On voit combien ces rares exemples de divergence sontpeu probants» (p. XLIII). — Vers 8000 — fin: Pour Iesvērs10163—66 « le texte de Geoffroy donne ainsi raison aux mss.DCJTSF; les autres manuscrits sont en contradiction avec eux-mêmes» (p. XLIX). C'est donc ici plutôt le texte des manu-scrits qui permet de trancher la question et non XHistoria.Quant au vers 12626, l'éditeur dit: «Les mss. DSPNT ont dumoins ici la leçon de Geoffroy de Monmouth; il semble im-possible de savoir si elle était celle de Wace» (p. LI). — Plusloin à la même page: « Le texte de Geoffroy ne fournit au-cune indication.» — Le célèbre passage: « Mult out a la curtjugleürs » (vers 10543—588) manque dans HABPNTD. « Omis-sion ou interpolation? » demande M. Arnold (p. XLIX). Il trouvesuspects les vers 12727—34, qui manquent aux mêmes mss.(et à S), et il en conclut que les vers 10543—88 le sont parconséquent aussi (p. LUI). Malgré cela, il n'a pas voulu ex-clure ces vers de l'édition. Comme nous le voyons, l'éditeurlui-même est le premier à reconnaître que la source latine nepermet que très rarement de déterminer lequel des groupesreproduit le texte de Wace. Ce qui complique encore laquestion, c'est qu'il y a des copistes qui corrigent Wace surson manuscrit. « Même avec l'appui de Geoffroy de Monmouth,dit M. Arnold (p. XXXIV), le doute est presque toujours permis,car rien n'empêchait un scribe méticuleux ou un lecteur zéléde corriger Wace sur son manuscrit, s'il le trouvait en contra-diction avec Geoffroy. »

Dans ces conditions défavorables, la comparaison entre leBrut et XHistoria de Geoffroy, quoique très intéressante enelle-même, ne peut pas, à notre avis, nous garantir que tel outel passage provienne de la plume de Wace et que tel autresoit interpolé par un copiste.

Examinons quelques passages discutés par M. Arnold et

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nous verrons que son système éclectique ne résiste pas à lacritique.

Il semble que ce soit avant tout le copiste de C qui corrigeWace d'après Geoffroy (cf. pp. XXXIV et XLVI). Voici quel-ques vers rejetés par l'éditeur pour cette raison: après 8636,GRC ajoutent Dimilioc fu appelez Le chastel u il fu ales.(Geoffroy: «Ipse vero ingressus est castellum Dimilioc », citép. XLVI). Au vers 5594, CSF donnent Colecestre (Geoffroy,:« Colecestriae », p. XLIII), mais les autres mss. Gloecestre. — Au .vers 3983, CSFJHAK donnent Esteti a Dovre od ses barons(Geoffroy: «ad Dorobellum oppidum», cité p. XXXV), leçonrejetée en faveur de: Aveit assemblé ses barons des autres mss.

On s'attendrait donc, lorsque, au vers 2195, les mêmesgroupes s'opposent, à ce que l'éditeur rejette la leçon deCSFJHAK: Cinq barons i out multpuissanz (Geoffroy: « Regnumquinqué regibus submissum est », cité p. XXXV) en faveur dela . leçon des autres mss : Quatre barons i out puissanz, car ona bien le droit de supposer que la leçon de CSFJHAK soit,ici aussi, une correction d'après Geoffroy.

Et pourquoi, si l'on veut être conséquent, ne pas rejeteraussi les vers 4559—60: Cassibellan s'ost assemblot. Siege aLunares mettre cuidot. (Geoffroy: « Interea obsidere incipiebatCassibellaunus urbem Trinovantum », cité pp. XLI—II), quifigurent seulement dans CJHAK? Il s'agit sans doute, ici aussi,d'une interpolation d'après Geoffroy et la nouvelle laisse doitcommencer par l'entrée en scène de Renumee ki par tut vole.

Nous avons déjà mentionné que l'éditeur accepte dans l'édi-tion, tout en les regardant comme suspects, les vers 10543—88,qui ne figurent que dans CJKGRS, ainsi que les vers 12727—34 qu'on trouve seulement dans CJKGR.

Il n'est pas sans intérêt de noter que, parmi les groupes demss. cités, on retrouve toujours J, qui contient, d'après l'édi-teur, beaucoup d'interpolations. Wace « aurait-il lui-même in-terpolé tous les couplets si inutiles du ms. J, qui déparent l'édi-tion de Le Roux de Lincyî » demande-t-il (p. LVII) et il ré-pond lui-même: « Tout cela est, sans doute, œuvre de copiste. »D'autre part, il est d'avis que le copiste de C, ou un scribequi le précédait, corrige quelquefois le texte de Wace d'après

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Geoffroy (p. XLVI). Dans ces circonstances, il semble naturelde regarder avec suspicion les vers qui ne figurent que dansCJ et quelques autres mss. et qui s'opposent très souvent auxgroupes dont fait partie le ms.-base.

En général, M. Arnold n'a pas trouvé d'interpolations dansle ms.-base P. Nous n'avons noté que deux passages rejetés et,dans les deux cas, il s'agit d'explications étymologiques. AinsiPNK ajoutent après le vers 1230, GRM après 1226, deux verspour expliquer l'étymologie de Kaerlu: Urbs est latins, cites ro-manz, Cestre est engleis, kaer bretanz. Il est naturel que ces versmanquent à H, qui écrit au v. 1233 cité Lu (cf. Geoffroy: « id estcivitas Lud » ') pour Kaerlu, et à T, qui omet Kaer, mais ils man-quent aussi à CSFJHAD. Le fait qu'ils ont été insérés à deux en-droits fait croire à M. Arnold « qu'il s'agirait plutôt d'une glosemarginale au mot Kaerlud» (p. XXXIX). Évidemment, il est im-possible de trancher cette question. On peut dire tout au plus queces vers sont bien du style de Wace, qui ne laisse guère échapperune occasion de faire une explication étymologique ou une tra-duction d'un nom.2 Cf. p. ex.: Thwancastre sun nun del quirprent Sil puet l'um numer altrement Chastel de cúrete en rumanz,Kaër Carreï en bretanz 6919; Bretun les suelent en bretanz Apelercarole as gaianz, Stanhenges unt nun en engleis, Pieres penduesen franceis 8175; Pendragon cist nuns, en bretanz, Chiés est dedragun en rumanz 8405. — Les vers rejetés après 1230 nesont donc pas plus suspects que d'autres insérés dans l'éditionet, puisqu'ils font partie du ms.-base, on aurait très bien pu lesaccepter aussi. — Après le vers 6924, HKPNR ajoutent: Pre-mièrement ot nun Thzvangcastre, Or l'apelent plusur LancastreQui ne sevent pas l'achaisun Dunt Thwangcastre ot primes cestnun. M. Arnold trouve « fort improbable que Wace ait pupenser que Thwangcastre fût Lancaster; il écrit lui-même auvers 13425 « Twa7icastre en Linde seie», à moins qu'il ne faillelire « Twancastre e Lindeseie » (p. XLIV). C'est en effet cette

1 Leo Waldner, Wace's Brut und seine Quellen, Karlsruhe, 1914, p. 110.2 Cf. Waldner, o. c., p. 129: «W(ace) ist, wie die mittelalterlichen Epiker

allgemein, ein grosser Freund von Etymologien: solche Namensableitungenziehen ihn offenbar an, und so verfolgt er denn mit Vorliebe die Entwick-lung britischer Länder- und Städtenamen von ihrer Entstehung an bis aufseine Zeit.»

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dernière leçon que donne l'édition de Le Roux de Lincy,basée sur le ms. H: Vancastre, et Lindesie et Kent Que otHengist premièrement 13837; il faut attendre le second volumedu Brut pour voir les variantes de ces vers. Il y a égalementdésaccord entre les manuscrits au v. 6842, où SFJK écriventE Lindeseie e gr cinz aveirs, HR ne nomment pas du toutLindeseie; dans HKR, il n'y a donc pas de contradiction entrece vers et ceux ajoutés après 6924.

En discutant ces exemples, nous avons voulu montrer queles relations entre le Brut et Y Historia d'un côté, et entre lesgroupes des manuscrits de l'autre, sont beaucoup trop com-pliquées pour que l'on puisse dire avec certitude quel est letexte de Wace. Le problème est de ceux qu'on n'arriverajamais à résoudre. Le fait que nous possédons X Historia deGeoffroy de Monmouth ne justifie donc pas, à notre avis, lapublication de « la tradition moyenne du Brut dans les manu-scrits que nous possédons». Chaque manuscrit représente déjà,à lui seul, une tradition moyenne, et il aurait été préférable des'en tenir au ms.-base, tant que celui-ci ne présente pas de la-cunes ou d'interpolations évidentes.

La seconde raison alléguée par l'éditeur contre la repro-duction d'un seul manuscrit, c'est la « tradition manuscrite éten-due du Bruti'. Certes, l'avantage d'avoir à sa disposition ungrand nombre de manuscrits est évident, si on arrive à établirun classement entre eux, mais parmi les manuscrits du Brut,on voit « tout le long du texte des groupes surgir, se main-tenir pendant un temps, croître ou diminuer de quelques unités,puis disparaître» (p. LV). Comme il n'y a pas de manuscritvraiment supérieur aux autres, M. Arnold essaye d'éviter lechoix d'un «meilleur manuscrit». «Mais quelle responsabilitéque le choix de ce meilleur manuscrit! » dit-il (p. LVI). Etpourtant, il lui a bien fallu choisir un ms.-base pour son édition.

A défaut d'un manuscrit normand, il s'est décidé à impri-mer le meilleur manuscrit anglo-normand qu'il avait à sa dis-position (le ms. D), dont les graphies sont bien plus prochesde la langue de Wace que celles des manuscrits franciens ouchampenois du XIIIe siècle. En effet, tout le monde saura gréà M. Arnold de ne pas avoir édité le Brut d'après le ms. K,

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«excellent manuscrit par son texte, peut-être celui qui repré-sente le mieux la tradition générale du Brut» (p. LXIII), maisécrit en champenois du XIIIe siècle.

En 1933, le texte du Brut d'après le ms. D était déjà prêtpour l'impression, lorsque M. Mario Roques informa l'éditeur dela découverte d'un nouveau manuscrit anglo-normand du Brut.C'était le ms. P, dont les graphies ressemblaient beaucoup àcelles du ms. D, mais qui avait l'avantage d'être plus completpour les premiers 12000 vers, tandis que la fin était très in-exacte. Or, M. Arnold n'a pas hésité à refaire son édition enutilisant P comme ms.-base pour les premiers 12000 vers et Dpour la fin du poème. Mais qu'a donc fait M. Arnold sinonchoisi très consciencieusement, dans des conditions assez défa-vorables, le meilleur manuscrit? C'est là, nous semble-t-il, undevoir auquel un éditeur ne peut pas se soustraire.

Quels principes a-t-il suivis dans l'édition du ms. P? Voilàencore une question que nous nous sommes posée. Il en dit lui-même (p. LIX—X): «Le texte fourni par ce manuscrit, je n'en-tends pas le maintenir tel quel par respect exagéré pour cequi n'est, après tout, qu'œuvre de copiste; il est utile, néan-moins, de réduire à un minimum les corrections textuelles...»et plus loin, en parlant des leçons corrigées du ms.-base: « nousindiquons le cas échéant si ces leçons, que nous tenons pourfautives, sont appuyées par d'autres mss. » (p. LXXIV). Faut-il doncconclure que M. Arnold se soit borné à corriger les leçons fautivesdu ms. P? Pour nous en rendre compte, nous avons examinéles corrections faites au ms.-base du premier volume du Brut.Cet examen est rendu très facile au lecteur par l'excellenterépartition des variantes en deux séries distinctes, système appli-qué maintenant pour la première fois par la Société des An-ciens Textes. Immédiatement au-dessous du texte de Wace, ona noté les leçons du ms.-base qui n'ont pas été acceptées parl'éditeur, en indiquant si ces leçons sont appuyées par d'autresmanuscrits. Au-dessous de cette série, on trouve les variantesdes autres manuscrits. Il ne manque, nous semble-t-il, qu'un petitdétail pour que l'appareil des variantes soit parfait, à savoir l'indi-cation, entre parenthèses et après les leçons rejetées du ms.-base, des manuscrits qui donnent la leçon adoptée par l'éditeur.

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Les.vers fautifs sont en général corrigés. Notons pourtantque v. 139 A mal ure ensemble alerent n'a que sept syllabes, parsuite de la correction d'eiir en ure} II faut lire avec PKGNA mal eiir ensemble alerent? Cf. Combatre s'ala contre Ariur,mais nel fist mie a bon eiir 9916 (éd. Le Roux de Lincy); demême 10185.3

L'édition présente une trentaine de vers de sept syllabes(avec un tréma sur un e qui, d'après les règles de la métrique,devrait s'élider4), mais dans quelques cas ce sont des vers cor-rects, qui ont été changés en vers fautifs. L'édition donneainsi aux vv. 1569—70:

Gloïgin, cele fu lainneeE plus grande e plus senee.

Le second vers est dans PKN: E plus fu granz e p. s. et,à notre avis, cette leçon est la meilleure du point de vue ryth-mique. Cf. Locrin, cil ki esteit ainz nez, E plus fort ert e plussene z 1267; Cist f ud de merveillus esforz E mult fud granz emuli fu forz 1495; Plus forz e plus hardìz iés tu 2375; Maisplus fort furent e plus fier 3064. Dans le v. 1570, on pourraittout au plus se permettre de changer l'ordre des mots: E plusgranz fu, mais ce n'est pas nécessaire.5

1 Il faut supposer que Wace a suivi dans le Brut les mêmes règlesde versification que dans le Rou. Ci. Th. Pohl, Untersuchungen der Reimein Maistre Wace's Roman de Rou, Rom. Forsch., II, pp. 329-30: «Auchhier zwingen uns die Belege zu der Annahme, dass im Rou das auf muta+ liquida folgende e jedenfalls auch stets elidirt worden ist.»

2 Au v. 138, male ure doit être corrigé en mal eiir, leçon de F.3 Les vers 7234 (Tels ki de amies parz trenchassent) et 7414 (Se Deus,

dist ele, me aï) n'ont que sept syllabes, puisque l'e de de et de me s'élideici nécessairement. Cf. Pohl, op. cit., p. 324. — Il faut également corrigerconrees 1571, 6034 en conreees; effree 2842, 4022 en effreee; perilies 6067en periliees. — II y a une syllabe de trop au v. 4527 (N'aies tu mie su-specion), puisque le suffixe -ion est toujours dissyllabique chez Wace. Cf.Pohl, op. cit., p. 332.

4 Le tréma est pourtant superflu au v. 521: E doinst nus quanquë admestier, puisque l'élision de l'e est facultative dans que. De même au v.8608: Qu'il (= Que il) li fait huntë e vilté, où l'éditeur aurait pourtanttrès bien pu conserver la leçon de PDLCHN: huntage.

5 Avec les vers 1569-70, on peut comparer vv. 597-8 de l'édition:Eslites furent les meillurs, Les plus fortes e les greinnors. PLAT donnentpourtant forz et K a l'excellente leçon E les plus forz e les greinnors, quis'impose à cause de son rythme. Wace connaît bien les formes ana-logiques des adjectifs féminins de la IIe déclinaison, mais, du moins dansle Rou, il ne s'en sert qu'à la rime. Voir Pohl, op. cit., p. 337. — Signa-

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QUELQUES REMARQUES SUR L'ÉDITION DU ROMAN DE BRUT 93

v. 1047 Pris unt lur robe e lur preie,As nes vindrent la drette veie.

Il fallait garder la leçon de PJRN: e pris Lp. La forme prisest également répétée dans FGM. Cf. Pur la erteme de Vor-tiger Unt pris Aurele e pris Uther 6679.

v- 2355 Qui porta tei, si porta lui,E d'un pere' estes andui.

Nous ne comprenons pas que l'éditeur ait rejeté la leçonde PKN: estes vus andui.

Au v. 574 (A tuz ensemble ad otrié) Franchise', e dealercongié, l'éditeur a coupé deux syllabes au lieu d'une. PSJAKGMdonnent De f. et P continue e de Valer congiez. Si l'on sup-prime De, on a un vers octosyllabique parfait: Franchise e deValer congié. Cette construction est d'ailleurs confirmée par lev. 565: Se de Valer congied nen unt. On sait combien était fré-quent, en ancien français, cet emploi de l'infinitif substantivé1;par conséquent il est également inutile de changer Chescuns delbien ferir s argue 970 (leçon de PDSJ) en de b.f.; Tuz delcombatre apparaillez 4602 (leçon de P) en de c. Cf. E delveintre mult desirus 2246; Si sunt al ferir aturné. Assez tostvindrent al ferir 3138—39; Des que veneit al corocier 3375."

lons encore le v. 3385 de l'édition: Le vis aveit bel e cors gent, (E granzdons dunout e sovent). Le manque dans PCTGANRM (AN E vis, MBiau vis). SFJ donnent Le v. out b. e le c. g. et G : Vis aveit bel e le c. g., leçonqui s'impose du point de vue rythmique. Cf. Cors ad mult gent e le vis fier eeler Roland 895; Cors ad mult gent, le vis eler e riant ibid. 1159; Cors adgaillard, el vis gente color ibid. 3763. Dans le Brut, la quatrième syllabeporte très souvent l'accent, par ex.: Si amenerent Genuïs, Gente de cors,bele de vis 5063 ; Ronwen ot nun, si ert pucele, A grant merveille ert gentee bele 6931; Curteise esteit e bele e sage E mult esteit de grant parage 8575.

1 Cf. C. Schaefer, Der substantivierte Infinitiv im Französischen, Rom.Forsch., XXIX, p. 155 ss.

2 D'autres vers de sept syllabes sont si faciles à corriger qu'on s'étonneque l'éditeur, après avoir corrigé environ 350 vers fautifs avec l'aide desautres mss., les ait négligés. En voici quelques exemples (Le ms. Koffre souvent de très bonnes leçons): Kar sols ne s'en osë eissir 421. KRN:Car ne s'en ose suls e. — Vus lo jo mettrë a la veie 557. K.: jo toz m.— Al rei de Francë ad mandé 1808. GRMNT a remandé. Cf. Par sunmessage ad remandé 4538. — Ki te tornë a deshonur 2363. KR: a grant d.— Mais il n'ad mië oblié 2695. HAM nen a m. Au v. 1383, on trouve

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Examinons à présent quelques corrections, à notre avis inu-tiles, qui n'ont rien à voir avec la mesure du vers.

v. 940 Mais, si corn mes leu avian

II faut garder la leçon de P: Mais si corne nus lit avum.1 Lepart, passé lit est également dans GNSFJ. Cf. Si escripture ne.fust f eite E puis par ders litte e retraite Rou III, 7—8.'

v. 4073 Mais la force Nennie crutE Androgius i corutE grant compainne des Kenteis.

Au v. 4074, il faut conserver la leçon de PDLN: Androgius iacorut; on évite ainsi les deux E au début des vers 4074—75.Cf. Corineüs i acorut des que il s eut que lutier dut 1105; MaisEngleis furent tost creü, Qui de partot sunt acoru Rou III, 4671 ;id. 5232, 8278, 9276, 11075, 11137.

L'accumulation des E est également inutile aux vers 4688—90:dans PCSJ exactement la même leçon qu'au v. 2695, mais cette fois l'édi-teur a corrigé n'ad en nen ad. Cf. encore Nen a mie encor oblié 4651 —Vers Francë unt la mer passée 2841. SKGMN: trespassee, excellente leçon.Cf. Mainte grant iner out trespassee 31 ; L'eue de Tambre ad trespassee 8642.H donne Devers F., leçon également bonne. Cf. Devers France la merpassa 2564. — Ki tant durë e tant luin vait 3906. K: d. e qui t. — CumëEldadus li loa 7958. JHKGR: Si com E. — Quierë e face que il l'ait8688. K: Q. e si face; J H Q. et porchace.

1 M. Vising a montré (Quomodo in den romanischen Sprachen, Ab-handlungen Herrn Prof. A. Tabler. . . dargebracht, Halle, 1895, p. 113 ss.)que, dans les plus anciens textes, come ne s'emploie que pour introduire uneproposition elliptique. Il n'a pas examiné les œuvres de Wace, mais sup-pose que celui-ci distingue aussi entre com et come. M. Walberg con-state que, dans St. Thomas, on ne trouve qu'une seule fois cume introdui-sant une proposition complète (Vie de St. Thomas, p. CXLIII), et ons'étonne donc de trouver dans le Brut aussi bien que dans le Rou ungrand nombre d'exemples de cume introduisant des propositions complètes,à côté de cum. Nous avons relevé, sauf erreur, 19 exemples de cume + propo-sition complète dans le Rou (IIIe partie) et 36 dans le Brut, souvent avecla variante si com. Dans son édition, M. Arnold a utilisé la forme postuléepar la mesure, et ces changements ne sont pas signalés parmi les variantesdu ms.-base. On trouve neuf fois (763, 946, 1621, 1751, 3543, 4210, 4343,5238) si come + proposition complète, et la leçon du ms. P au v. 940 estdonc parfaitement justifiée.

2 D'autres exemples: Sor lui furent li brief trové'; Tost furent lit econeü Rom. de Troie 27730; Airus que toz seit liz n'achevez ibid. 28070;Dune, fu lit li eseriz, oiant tut le tropel Vie de St. Thomas 1006. Cf.Meyer-Lübke, Gramm. des langues rom., II, § 342; Schwan-Behrens, Gramm,de l'anc. franç., § 419.

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QUELQUES REMARQUES SUR L'ÉDITION DU ROMAN DE BRUT 95

(Si nad par quei il se combate)E la grant f aim ses homes mate;E de Cesar crient la manateE la grant faim forment Vestitale.

v. 4689 est dans PHN: De Cesar crient mult la m., leçon quidoit être maintenue. Du reste, E manque dans tous les mss.sauf CJR.

Au v. 44: Estre le gré a la reïne, par contre, l'éditeur au-rait très bien pu garder la leçon avec E, donnée par PCARN:E estre le gré la reïne. La prép. a manque également dans LST.1

v. 5921 Vei quels terres, vei quels rivieres,Vei quels forez, cum sunt p ¡enteres.

Au lieu de Vei . . . vei. . . Vei... de l'édition, P donne lestrois fois Vez, forme abrégée de l'impératif qui est parfaite-ment correcte. Elle est aussi confirmée par les formes Veezde LGT, Veiez de CSJ et Veis de R. On la rencontre déjàdans le Pèlerinage de Charlemagyte: Vez com gentes compaignesde pèlerins erranz 95. Elle est assez fréquente dans plusieurstextes, p. ex. dans le Rom. de Troie: Vez la Eton: ou il Vontpris 9253; Vez le venir: ja est moût pris 29415, etc., et dansla Chronique des Ducs de Normandie (éd. Michel): Vez mei tutprest de Vobéir 4587; Vez les ostages que j'ai prises 4759, etc.;on la retrouve encore dans le Roman de la Rose (éd. Langlois):Vez qu'a ma dame robe faut 13727; Vez de queus fers H lass'enferge 19238.2

v. 4393 Ses messages H ad tramisSi H ad p r eie d e requisQue ses terres ne li guastasi.

PAKGRT donnent au v. 4394: Si Fad p., si Vad r., leçonsupérieure du point de vue rythmique. Cf. Mult le preia, multle requisì 8021. Les constructions prêter qn. et prêter à qn.

1 Pour des exemples analogues du cas régime exprimant le complé-ment déterminatif, cf. Foulet, Petite syntaxe de l'ancien français, § 21, 2°.

2 Cf. K. Voretzsch, Einführung in das Studium der altfranz. Sprache,Halle, 1932, p. 234.

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sont également fréquentes dans le Brut et nous avons fini parnous demander si prêter qjt. n'est pas la plus usitée, p. ex.Prêta veisins, prist soldeiers 2700; Prêté Pad e merci crié 8684.Il est donc également inutile de changer les prêta (leçon de P)en lur preta au v. 5324-*

v. 5193 De Bretainne-femes requistrent,Mais li Bretun lur escundistrent.

Il faut garder les escundistrent, leçon de PFAKGRM. On re-trouve la même construction au v. 2531: Tut plainnemeni Vadescondit.

Les contractions kil, kis, jal, sin, etc. sont un trait carac-téristique de la langue de Wace.a II ne faut donc pas éloignerces contractions, quand elles se trouvent dans le ms.-base.

v. 623 Tut unt trové le pàïs guastKe n't av eit ki gaainnast.

Il faut conserver kil gaainnast, leçon de PST. Cf. Muli truvaH rets pats guast, Vit que n'i ot quii guaainast 7671.

v. 6447 A Wincestre le fist nurrir,La le fist muine devenir.

DLSAN donnent E la lef.; P écrit E lal f, leçon quiaurait dû figurer dans l'édition. Cf. Ki jal quident tenir asmains 4686; id. 74S9, 8968.

v- 7475 Pw menteurs ferai tenir,Si tu faiz devant mei venir,Tuz cels qui de mun sane sortirent

Au v. 7476, P donne Si tus faiz, leçon préférable, car la su-bordonnée conditionnelle doit avoir un objet direct bien à elle.Aussi trouve-t-on dans LCSAT tu les f.; FJ Se devant met lesfais v.; R Fai les tus d.

1 Cf. Elsa Landin, Étude sur les constructions de certains verbes ex-primant la prière, la hâte et la nécessité en français, Uppsala, 1938, pp. 12-13.

2 Cf. pour la langue du Rou, Pohl, op. cit., p. 337.

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QUELQUES REMARQUES SUR L'ÉDITION DU ROMAN DE BRUT 97

v. 5061 Li messagier lur veie tindrentE a l'entrant d'esté revindrent;Si amenèrent Gemas

Au v. 5063, P donne Sin et KRN S'en. Pour la construction«amener qn de», cf. Tant lur premist, tant lur preia Que grantnavie en amena 5324; D'Engleterre fist ame?ier . . . Cent milvilains 5973. Pour d'autres exemples de sin, cf. 5658, 6538.Nous aurions également conservé Sin, leçon de PDL (KM S'en)au v. 2168: (Ele aveit le mort plus amé) Si ad cuilli le vifen hé.

Il est inutile aussi de corriger del sane, leçon de PFARM,en de s. au v. 4033: Tute ert de sane l'erbe vermeille- E çon'esteit mìe merveille. Cf. Sin deit kom perdre del sane e de lachar Roland 1119; Del sane luat sun cors e sun visage ibid. 2276.*

A côté du pronom relatif sujet qui, on trouve dans l'éditionune douzaine de fois que (596, 1684, 1956, 1957, 2035, 2362,4292, 5004, 5882, 6452, 7631, 8820, 8868); malgré cela, lepronom relatif sujet que du ms.-base a été changé une dou-zaine de fois en qui [1293, 1320, 1536, 1592, 1939, 1962, 2697,3242, 5189, 5701 (Ke = Kari), 5838, 8322, 8386 (X^Äzr? ) ] ,ce qui semble un peu inconséquent.

v. 2567 Quant H mort furent enterré,Quinze mile furent numbré,Ne nul n'en sunt mie eschapéQui ne seient a mort nafré

Au v. 2569, la leçon de P Mil n'en sunt, quoique grammaticale-ment correcte, a sans doute été influencée par mile au versprécédent. A notre avis, il fallait corriger Mil en Ne nuls etmettre le verbe au singulier. Du moins, c'est la constructionqu'on trouve dans Roland, Troie, Rou, la Chronique des Ducs deNormandie et St. Thomas. Nous avons en vain cherché un exempleavec nul comme sujet et le verbe au pluriel. C'est pourquoi

1 Les corrections aux vv. 3025 et 6107 nous semblent contradictoires:3025 Tant cum de vifs s'en eschaperent Es valees se trestomerent. PCHAGRMécrivent des vifs. — v. 6107 Tant cum il i out des baruns Tindrent lesturs e les dunjuns. PHT donnent de barons. Nous aurions préféré desau v. 3025 aussi.

7—38496. Studia ncophilologica 1938—1939.

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nous supposons qu'il y a eu, au v. 2569, un croisement entremil n'en sunt et nuls n en est. Quatre mss. (GRAJ) ont ici leverbe au singulier de même que cinq (CAGRJ) au v. 2570. Nousproposons de lire: Ne nuls nen est mie eschapez Que il ne seit (leç.de CAGR) a mort nafrez. Que est ici = sans que. Cf. Ja unstoz sous n'en eschapast Que morz ne fust, s'il ne l'ostasi Troie26827.1

Signalons pour finir quelques changements inutiles du voca-bulaire du ms.-base.

v. 5909 Maximien les parsiweit,Ki a merveille en oa'eit

PFRNT donnent Ki merveilles en 0., expression très fréquentedans le Brut: Kar merveilles li ert loee 1818; E merveilless'en effrea 8306; Qui merveilles Fad esgardee 6986; id. 6745,8582; Rou III, 10355, 10356.

v. 2019 Li reis I'ad mult bel receii,Qui unkes mais ne F out veil.

PSFT donnent Qui u. ainz ne Fout v., excellente leçon. Cf.En sum unt f ait un chastelet, Une ainz n'i out eil recēt 937 ; Cistfunda Bade e fist les bainz, Unches n'i ourent esté ainz 1631;Ço esteit marine belue, Une ainz ne fu si granz veile 3423 ; id.3576, 3826, etc.

1 Signalons en passant une autre correction qui nous semble peu heu-reuse; vv. 2297-9 sont dans l'édition: Puis establi que pais eüssent, Nepur nul home adesez fussent Cil ki as charues serreient.... Le v. 2298est dans PJT: Ne par home a. f. et il s'agit d'ajouter une huitièmesyllabe. L'éditeur l'a trouvée dans nul qui manque pourtant dans 12 mss.(PJTAGRMNSKHF). A notre avis, il fallait avant tout introduire un ne,exigé par la structure de la phrase et qu'on trouve du reste dans onzemss. Ainsi AGRMNT donnent Ne pur home adesez ne fussent; SJK Nep. h. encombré ne f.; H Et par h. tocié ne f. Le Ne du début du vers estle latin nec, qui relie les deux propositions subordonnées. En général,les deux propositions sont négatives, mais la première peut aussi être affir-mative (cf. Foulet, op. cit., § 425 et Roland 963-4, 1933-4). On trouve,dans le Brut, une phrase analogue à celle dont nous nous occupons: Silur duna preceps e leis Ke pais e concorde tenissent Ne pur rien ne semesfeïssent 1254. Il est évident que home, aussi bien que rien, a besoin dene pour être négatif. Cf. Si nus volum nus efforcier Que nus par hume neperdon 3952; Unches un suls n'en eschapa Ne home a Fost nel renoncia439 ; Ne il a home ne parla, Ne hoem a lui parler n'osa Rou III, 5885.Au v. 2298, il faut donc lire Ne par home adesez ne fussent.

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QUELQUES REMARQUES SUR L'ÉDITION DU ROMAN DE BRUT 99

v. 1957 Ke m'amoent sur tute rienTant cum jo oi algues de bien.

PKGN donnent a. del mien, expression fréquente Hans le Brutet ailleurs; cf. Le plus del suen doner vuleit A cele que plus[amereit 1683; Tut le suen, ço dit, H toldra 4385; Mult i aija del mien guaste 7468; Del suen li durra se il vuelt 8689.

v. 5833 Si sera sa filie reineE tut a ltd la terre encline.

PJH donnent adine. Cf. Unques ne pout aveir repos Dessi queil out ses veisins A sun comand tus faiz aclins 5680; Por çoquii fist a la reine Fu eie muli a lui acline Rou III, 10699.*

L'éditeur échange un substantif contre un autre [dolur, leç.de PCJKN, contre tristur 6149; fei, leç. de PHAN, contre lei6374), un adjectif contre un autre {riche, leç. de PKN, contrechier 610; coveitus, leç. de PN, contre desirus 2246; hardis,leç. de PAN, contre curiéis 2641 ; fiere, leç. de PDGMN, contrefort 2708), un verbe contre un autre {rodèrent, leç. de PHN,contre guasterent 2228; de ferir, leç. de PDLN, contre dadeser4051; aiiner, leç. de PSFGRMNT, contre aporter 4216), un tempsdu verbe contre un autre {enorouent, leç. de PDHGM, contreenorerent 165; out, leç. de PKN, contre ad 1424; regnout, leç.de PKRM, contre regna 1622; fait, leç. de PLN, contre _/fr/2200; ert, leç. de PDLHM, contre fu 3600; demenout, leç. dePN, contre demetta 5897 s), etc.

Il est inutile d'allonger encore cette liste; les exemplescités montrent que beaucoup de leçons du ms.-base ont étéchangées, bien qu'elles ne soient nullement fautives. M. Arnoldn'a donc pas suivi la méthode rigoureuse dont il reconnaîtpourtant l'utilité (p. LX), et l'on se demande pourquoi. Nous

1 Dans le vocabulaire du Rom. de Troie, on trouve enclins 4743 (Quedel tot sui enclins a vos), mais, ici aussi, le ms.-base donne aclins, leçonrejetée à tort par l'éditeur.

2 Notons les vv. 2261-62 : As dous reis ad les suens jostez, Pus lurcrie: «Ferez, jerez!». Au v. 2262, PDLGRMNT portent P. lur ad dit,

' leçon préférable du point de vue rythmique. Cf. Puis lur ad dist: « Odmei vendrez » 2253. D'ailleurs, du v. 2253 au v. 2268, il y a dix passésindéfinis mais pas un seul présent.

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croyons avoir trouvé la réponse dans la phrase citée plus haut1,où il parle de « respect exagéré pour ce qui n'est, après tout,qu'œuvre de copiste ». Les manuscrits sont œuvres de copistes,c'est vrai, mais ils sont aussi, en général, œuvres de Français,qui — avouons-le — connaissaient mieux leur langue mater-nelle que ne le font les érudits du XXe siècle, si savants qu'ilssoient. Il y a, dans tous les manuscrits, des fautes de négli-gence qu'il est nécessaire de corriger, mais, d'autre part, il nefaut pas oublier que presque toute la littérature du moyen âgeest œuvre de copistes, à commencer par la Chatison de Roland,et tout le monde sait pourtant avec quel respect et quelle déli-catesse le ms. d'Oxford a été traité par le regretté Joseph Bé-dier. Nous nous rappellerons toujours avec reconnaissance etadmiration les cours qu'il donnait, en 1935, au Collège deFrance, consacrés en grande partie à une comparaison entrel'édition du Roland par M. Bertoni et la sienne. Il y a montréà son auditoire quelles recherches patientes et minutieuses ilétait souvent obligé de faire pour se rendre compte si la leçondu ms. d'Oxford était acceptable ou non. Bien entendu, šaméthode rigoureuse n'a pas plu à tout le monde; ainsi M.Hilka, dans son édition du Perceval, parle (p. IX) d'une « über-triebene Verbeugung vor Kopistenwerk » et plus loin (p. XXII) :« ich bringe keinen der verpönten « textes composites », verschliessemich aber keineswegs der Tatsache, dass Kopistenverk keinerleiübertriebene Verehrung erfordert». Et maintenant que M. Arnoldvient aussi nous parler de « respect exagéré pour ce qui n'estaprès tout qu'œuvre de copiste », nous avons voulu prendre ladéfense des principes de Joseph Bédier et en même temps celledes copistes du moyen âge, en démontrant que tout au moinscelui du ms. P du Roman de Brut mérite d'être traité avecplus de respect que ne lui en témoigne son éditeur.

Ceci dit, nous sommes toute prête à reconnaître l'excellencede l'édition prise dans son ensemble, et c'est avec impatienceque nous attendons la parution du second volume de ce chef-d'œuvre de Wace.

1 Voir p. 91. CARIN FAHLIN.

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