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Rapport 2011 sur les Droits de l’homme au Sénégal
Le Sénégal est une république modérément décentralisée dominée par un pouvoir
exécutif fort. En 2007, Abdoulaye Wade a été réélu président pour un mandat de
cinq ans lors d'une élection généralement qualifiée de libre et équitable malgré des
incidents sporadiques de violence et d'intimidation. En 2007, le parti au pouvoir, le
Parti démocratique sénégalais (PDS), a également emporté la majorité des sièges
de l'Assemblée nationale suite aux élections législatives qui ont été boycottées par
les grands partis d'opposition. Les forces de sécurité relevaient des autorités civiles.
Parmi les problèmes majeurs en matière de droits de l'homme, on peut citer les cas
signalés de sévices physiques et de torture, les limites aux libertés d'expression, de
presse et d'assemblée et la corruption.
Parmi les grands autres problèmes en matière de droits de l'homme, on peut citer
les traitements inhumains et dégradants des détenus et prisonniers, notamment la
surpopulation des prisons, la garde à vue discutable et la détention préventive de
longue durée ; l’absence de pouvoir judiciaire indépendant ; le viol, la violence
conjugale, le harcèlement sexuel et la discrimination à l'encontre des femmes ; les
mutilations génitales féminines (MGF) ; la maltraitance des enfants ; le mariage
précoce ; l’infanticide ; la traite des personnes ; et le travail des enfants.
Des rebelles associés au Mouvement des forces démocratiques de la Casamance
(MFDC) ont tué des civils et des militaires, commis des braquages, combattu les
forces armées et harcelé les populations locales au cours de luttes intestines.
Les forces de sécurité et d’autres acteurs ont agi en toute impunité. Aucune
poursuite judiciaire ou enquête n’a été close sur des membres du gouvernement, y
compris ceux travaillant dans le domaine de l’application de la loi ou de la sécurité,
soupçonnés d’avoir commis des violations.
Section 1. Respect de l'intégrité de la personne, y compris la liberté de ne pas
être l'objet de:
a. Privation arbitraire ou illégale de la vie
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Le gouvernement ou ses agents n'ont commis aucun meurtre à motivation
politique. Un cas d’exécution arbitraire commise par un membre des forces de
sécurité a été cependant signalé.
Le 30 mai, le commandant d’un poste de gendarmerie de Sangalkam a tué par balle
un manifestant, Malick Ba, au cours d’une manifestation contre une décision du
gouvernement de remplacer des élus locaux par des personnes désignées par le
gouvernement. Samba Sarr, le commandant du poste de gendarmerie qui a tué Ba,
a été muté dans un autre poste ; cette affaire n’a fait l’objet d’aucune accusation.
Le gardien d’un parc national, Yaya Sonko, qui a tué par balles le pêcheur
Moustapha Sarr en juillet 2010, a été mis en liberté provisoire en février en
attendant son jugement par un tribunal militaire, lequel a démarré en octobre.
Le 11 avril, le procureur a ordonné une enquête sur la mort d’Abdoulaye Wade
Yinghou, décédé en juillet 2010 en détention policière. Une autopsie a indiqué que
Yinghou avait eu une vertèbre cervicale brisée, des blessures par objets
contondants et des lésions aux poumons.
b. Disparitions
Aucun cas de disparition politiquement motivée n'a été signalé.
c. Torture et autres traitements ou punitions cruels, inhumains ou dégradants
La constitution et la loi interdisent de telles pratiques ; cependant, il a été
occasionnellement signalé que des agents de l'État en ont fait usage.
Les groupes de défense des droits de l'homme ont relevé des exemples de sévices
physiques commis par les forces de sécurité, y compris des traitements cruels et
dégradants dans les prisons et centres de détention. Ils ont, en particulier, critiqué
la fouille à nu et autres méthodes d'interrogation. Des policiers auraient forcé des
détenus à dormir à même le sol, projeté de vives lumières sur leurs pupilles, les
auraient matraqués et enfermés dans des cellules ayant une aération extrêmement
réduite. Les autorités n'ont, pendant l'année, pris aucune mesure à l'endroit des
agents de police impliqués dans ces abus.
Les organisations de défense des droits de l'homme ont souligné le manque de
supervision et l'impunité avec lesquels les forces de sécurité traitaient les personnes
en garde à vue. Des abus ont eu lieu, certes, mais le gouvernement a fait valoir que
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de telles pratiques ne sont pas généralisées et qu’en règle générale, il diligentait des
enquêtes officielles en cas d’abus. Cependant, celles-ci étaient souvent longues et
menaient rarement à des inculpations ou des mises en examen des suspects.
Le 16 avril, trois groupes de défense des droits de l’homme ont demandé
l’ouverture d’une enquête sur la mort d’Aladji Konaté, dans la ville de Bakel. A la
suite de l’arrestation de Konaté par les Gendarmes, son corps nu présentant des
traces de torture a été trouvé sur la rive du fleuve Sénégal. A la fin de l’année,
aucune enquête officielle n’avait été ouverte.
Le 6 mai, le Rassemblement africain pour la défense des droits de l’homme
(RADDHO), une organisation locale de défense des droits de l’homme, a accusé
des policiers du Commissariat de Police Nord de Saint-Louis d’avoir torturé Yatma
Fall, arrêté avec un complice pour vol de carburant. D’après la RADDHO, les
enquêteurs ont obtenu des aveux de Fall sous la torture ; la RADDHO s’est
également appuyée sur un rapport fait par un médecin de l’Hôpital de Saint-Louis
qui a conclu que Fall avait été victime de violences physiques. En avril, le
procureur a abandonné les charges qui pesaient contre Fall, lequel a ensuite porté
plainte conte la police ; la justice n’a pas encore statué sur cette plainte.
Conditions dans les prisons et les centres de détention
Les conditions dans les prisons et les centres de détention ont été dures, en partie
parce qu'aucune nouvelle prison n'a été construite depuis 1960. L'organisation non-
gouvernementale (ONG) dénommée Organisation nationale des droits de l'homme
a qualifié la surpopulation et l'absence d'hygiène de problèmes majeurs. Il y avait
37 prisons, dont la capacité maximale prévue était de 3.000 prisonniers.
Cependant, Ci-Biti, une organisation non gouvernementale spécialisée dans les
droits des prisonniers, a noté qu'en 2010, il y avait 7.300 détenus dans les prisons,
dont 3.000 en détention préventive. Un groupe d'études onusien sur la détention
préventive a visité le pays en 2009 et a trouvé que la prison centrale de Dakar,
connue sous le nom de « Rebeuss », abritait 1.592 détenus alors qu'elle a été
conçue pour en accueillir 800. Le groupe a critiqué les longues périodes de
détention préventive, les gardes à vue prolongées au-delà des limites légales et le
manque d'accès des prévenus aux avocats pendant les 48 heures suivant leur
arrestation.
Hommes et femmes étaient détenus dans des installations séparées. Les conditions
de détention des femmes étaient généralement considérées comme supérieures à
celles des hommes. Les autorités n’ont pas permis aux prisonniers et détenus de
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soumettre sans censure leurs plaintes à la justice ou de demander une enquête sur
des allégations crédibles de conditions inhumaines de détention. Les prisonniers
avaient, en général, l'autorisation d'avoir des visites et de pratiquer leur religion.
Les ONG locales ont signalé que les règles relatives à la séparation des prisonniers
n'étaient pas toujours appliquées. Les personnes en détention provisoire étaient
occasionnellement détenues parmi les condamnés et les mineurs mis avec les
adultes.
Les prisons manquaient de médecins et de médicaments. Il y avait un matelas pour
cinq détenus. Les prisons avaient des problèmes d'évacuation des eaux et il y
faisait une chaleur étouffante ; elles étaient infestées d'insectes et la nourriture était
de mauvaise qualité. Les prisons étaient généralement reliées au réseau
hydraulique local et les prisonniers avaient accès à l'eau potable.
Au cours de l'année, l'État a permis à des groupes locaux de défense des droits de
l'homme de visiter les prisons. Des membres du Comité international de la Croix-
Rouge (CICR) ont également visité des prisons à Dakar et en Casamance, où 20
membres du MFDC étaient détenus sous divers chefs d'accusation.
En septembre 2010, Abdoulaye Babou, Président de la Commission des lois de
l'Assemblée nationale, et dix autres députés ont visité les prisons de Louga et de
Fatick. Ils ont, dans leurs déclarations, exprimé leur regret par rapport aux longues
détentions préventives et affirmé que certains membres du groupe qui sont
également des avocats représenteraient les détenus dont les dossiers ont le plus de
retard. Ils ont, en outre, fait état des mauvaises conditions de la prison de Fatick, de
son manque d'hygiène, de la vétusté des bâtiments et de la surpopulation. Ils ont
appelé le gouvernement à augmenter les budgets des prisons. A présent, les prisons
reçoivent une allocation de 500 francs CFA (1,01dollars des États-Unis) par
prisonnier par jour ; 450 francs CFA (91 cents) pour les repas quotidiens et 50
francs CFA pour l'hygiène.
La délégation parlementaire a également appelé le gouvernement à construire une
nouvelle prison à Louga pour remplacer l'ancien entrepôt qui sert de prison et qu'ils
ont qualifié d’inadapté et de surpeuplé.
Aucun effort significatif n’a été fait pour moderniser la tenue des registres pendant
l’année. En général, les efforts pour informatiser les registres ont été freinés par
l’approvisionnement irrégulier en électricité au niveau d’un grand nombre
d’infrastructures gouvernementales et par le manque de formation du personnel en
5
matière de systèmes informatiques. Le manque de fonds a freiné la modernisation
ou l’amélioration réelle des installations carcérales.
d. Arrestation ou détention arbitraire
La Constitution et la loi interdisent l'arrestation et la détention arbitraires. Le
gouvernement a généralement respecté ces interdictions, bien que les ONG et les
médias aient signalé que la police dispersait souvent par la force des marches non
autorisées, et arrêtait arbitrairement des individus pour ensuite les relâcher
quelques heures plus tard.
Le 19 mars, juste avant le jour où une manifestation était prévue, le ministre de la
Justice a annoncé qu’un coup d’Etat avait été déjoué et que quatre jeunes avaient
été arrêtés pour avoir planifié des actions dans la capitale « pour créer la panique et
entraîner des pertes en vies humaines ». Toutefois, le 22 mars, le gouvernement a
annoncé qu’il n’y avait pas de preuve concrète que les quatre détenus avaient
l’intention de renverser le gouvernement et ils ont été relâchés.
Rôle de la police et de l'appareil de sécurité
Les policiers et les gendarmes sont responsables du maintien de l'ordre et de la loi.
Les forces armées partagent cette responsabilité dans des situations d’exception,
telles que l'état d'urgence. La police se compose de dix divisions regroupées au
sein de la Direction générale de la sûreté nationale. Dans chacune des 14 régions
du pays, il y avait au moins un commissariat de police et une brigade mobile de
sûreté. Dakar compte 16 commissariats de police. Les forces de police ont
effectivement assuré le maintien de l'ordre et de la loi.
La gendarmerie est sous la direction du ministère de la Défense et intervient
essentiellement dans les zones rurales où la police n'est pas présente.
L'impunité et la corruption étaient généralisées. Une loi d'amnistie couvre les
policiers et autres agents de la sécurité impliqués dans des «crimes politiques»
commis entre 1983 et 2004, excepté ceux qui ont commis des assassinats de «sang-
froid».
La Division des investigations criminelles (DIC) est chargée de mener les
investigations sur les bavures de la police. Aucune enquête n’a été bouclée par la
DIC en 2011 et elle n’a pas été efficace pour s’atteler à l’impunité ou la corruption
dans la police.
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Procédures d'arrestation et traitement des personnes en détention
Même si la loi spécifie que des mandats émis par des juges sont nécessaires pour
procéder à une arrestation, dans la pratique, la police a souvent détenu des
individus sans mandat. La loi accorde à la police de larges pouvoirs pour détenir
des prisonniers pendant de longues périodes avant de formuler leur inculpation
officielle. La DIC peut détenir des personnes pendant 24 heures avant de les
libérer. De nombreux détenus n'ont pas été informés rapidement des charges qui
pesaient sur eux. Les agents de police, y compris ceux de la DIC, peuvent doubler
la garde à vue de 24 à 48 heures sans inculpation mais ils doivent obtenir
l'autorisation du parquet. La police judiciaire peut demander au parquet de porter
cette période à 96 heures. Quand il s’agit de dossiers liés à l'atteinte présumée à la
sécurité de l'État, la garde à vue peut être encore doublée. Une personne accusée de
complot pour renverser le gouvernement ou d'atteinte à la défense nationale peut
donc être mise en garde à vue pour une période allant jusqu'à 192 heures (huit
jours) sans être inculpée officiellement.
La période de détention ne commence effectivement que lorsque les autorités
déclarent officiellement qu'une personne est en détention, une pratique que les
organisations de défense des droits de l'homme critiquent parce qu'elle occasionne
des périodes de détention injustement longues. La caution est rarement une option.
Pendant les premières 48 heures de garde à vue, le prévenu n'a pas accès à un
avocat mais a droit à un examen médical et, éventuellement, à un contact avec sa
famille ; cependant, l'accès à la famille n'était pas, en règle générale, autorisé.
L'accusé a droit à un avocat et les avocats devraient, suite à la période initiale de
détention, être commis d'office pour tous les accusés de droit commun qui ne
peuvent pas se payer un avocat. Pour les délits, les accusés ne bénéficient pas
toujours d’un avocat. Un certain nombre d'ONG fournissaient également une aide
ou un conseil juridique aux personnes accusées d'une infraction criminelle.
Arrestation arbitraire : Le gouvernement s’est servi des forces de sécurité,
notamment de la DIC, pour harceler les journalistes et arrêter les opposants
politiques ainsi que les dirigeants de la société civile (voir section 2.a. et 2.b.).
Détention provisoire : L'engorgement judiciaire et l'absentéisme des juges ont
contribué aux longues périodes de détention provisoire. La loi stipule qu'une
personne accusée ne doit pas être en détention préventive pendant plus de six mois
pour des délits mineurs ; cependant, des personnes étaient fréquemment détenues
jusqu'à ce qu'un tribunal demande leur libération. Malgré la limite de six mois de
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détention pour la quasi-totalité des infractions, la durée moyenne entre
l’inculpation et le procès était de deux ans. Dans beaucoup de cas, les personnes
sont relaxées sans être inculpées. En l'occurrence, l'État n’a versé aucun
dédommagement. En 2009, un groupe d'études de l'ONU sur la détention
préventive a critiqué le pays pour son usage de la détention préventive prolongée.
En juillet, plusieurs activistes des droits de l’homme ont fait part de préoccupations
concernant la décision du gouvernement de retarder, soit disant pour des raisons
financières, les sessions concernant la détention provisoire de 41 détenus sous des
inculpations d’infractions majeures. Les activistes des droits de l’homme ont
indiqué que ce report constituait une violation du code de procédure criminelle de
2008 qui prescrit la tenue de ces sessions tous les quatre mois et que cette violation
prolongerait injustement la période de détention provisoire pour ces 41 détenus à
Dakar, Kaolack, Ziguinchor et Tambacounda.
Dans les affaires de meurtre, menaces à la sûreté de l'État et détournement de
deniers publics, il n'existe aucune limite à la durée de la détention préventive.
Les juges sont autorisés à prendre le temps qu'il faut pour instruire ces dossiers
importants mais, avec le consentement du parquet, ils peuvent ordonner la
libération du prévenu en attendant le procès. Si le parquet refuse la libération,
l'ordre est suspendu jusqu'à ce qu'une cour d'appel donne son avis sur la libération.
La loi accorde au procureur un pouvoir discrétionnaire total pour refuser la liberté
provisoire avant le procès quand il s'agit d'affaires de menaces à la sûreté de l'État,
de meurtre, et de détournement de deniers publics. Cependant, les juges n’ayant
pas suffisamment de temps pour examiner tous les dossiers, ils ont souvent signé
les ordres de prolongement de la détention sans tenir compte des faits et cela pour
éviter la libération de détenus potentiellement coupables.
e. Déni de procès public équitable
Bien que la Constitution et la loi prévoient l’indépendance du pouvoir judiciaire,
celui-ci a été soumis à la corruption et à l'influence du gouvernement.
Les magistrats ont continué à critiquer publiquement leurs conditions de travail, y
compris un volume excessif de dossiers, le manque d'espace et d'équipement de
bureau adéquats et des moyens de transports insuffisants. En outre, les magistrats
ont remis ouvertement en cause l'engagement du gouvernement envers
l'indépendance du pouvoir judiciaire.
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En dehors des juridictions civiles formelles, certains citoyens s'en remettaient aux
chefs traditionnels pour régler les litiges familiaux et communautaires.
Le Tribunal régional de Dakar comprend une chambre militaire qui est compétente
en matière d'infraction de nature militaire. Ladite chambre est composée d'un juge
civil, d'un procureur civil et de deux assistants militaires, dont l'un doit être du
même grade que l'accusé, pour conseiller le juge. Cette chambre ne peut juger des
civils que dans les cas où ces derniers ont été liés à des militaires qui ont enfreint la
loi militaire. Le tribunal militaire accorde les mêmes droits qu'un tribunal pénal
civil.
Procédures judiciaires
Un accusé est présumé innocent. Tout accusé a le droit d'avoir un procès public,
d'être présent en salle d'audience, d’être confronté aux témoins, de présenter
preuves et témoins, et d'avoir un avocat, aux frais de l'État si nécessaire, quand il
s'agit de délits graves.
Les audiences liées à la présentation des preuves peuvent être interdites au public
et à la presse. Même si l'accusé et son avocat peuvent introduire des preuves auprès
du juge d'instruction qui décide si oui ou non le dossier fera l'objet d'un procès, ils
n'ont pas toujours accès à toutes les preuves à charge présentées avant le procès.
L'accès aux preuves peut être limité par la police ou le parquet. Depuis l'adoption,
au mois de juillet, d'une loi qui a mis fin aux procès par des jurés, un collège de
juges préside aux audiences dans les juridictions civiles et criminelles ordinaires.
Le droit d'appel existe dans toutes les juridictions sauf à la Haute cour de justice.
Ces droits appartiennent à tous les citoyens.
Prisonniers et détenus politiques
Le 25 juillet, Oumar Cyrile Touré (alias Thiat), rappeur et leader du mouvement
« Y En a Marre », a été emprisonné pour avoir fait un discours lors d’un
rassemblement le 23 juillet, dans lequel il a dit qu’ « un vieillard menteur de 90 ans
ne peut diriger le pays ». Après une détention de 25 heures par la DIC, Touré a été
relâché sans être inculpé le 26 juillet (voir la section 2.b., Liberté de réunion).
Le 20 octobre, la figure de l’opposition Malick Noel Seck a été condamnée à deux
ans de prison pour outrage au tribunal et menace de mort faite dans une lettre
ouverte au Conseil constitutionnel, pour protester contre le troisième mandat
brigué par le président Wade. De nombreux groupes des droits de l’homme ont
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considéré que la condamnation de Seck obéissait à des motivations politiques et
ont contesté la légitimité des accusations.
Procédures et recours judiciaires civils
Les citoyens peuvent demander la cessation des violations des droits de l'homme et
une réparation à cet effet auprès des tribunaux administratifs ou judiciaires
ordinaires. En outre, un recours administratif peut être engagé en portant plainte
devant le Haut-commissariat aux droits de l'homme et à la promotion de la paix, au
niveau de la Présidence. Cependant, la corruption et le manque d'indépendance ont
entravé la gestion judiciaire et administrative de ces dossiers. Parfois, les
procureurs ont refusé de poursuivre des membres des forces de sécurité et les
auteurs de violations sont souvent restés impunis. En outre, des problèmes se sont
posés dans l'application des arrêts judiciaires, dans la mesure où le gouvernement
peut faire fi des ordres des tribunaux sans aucune conséquence juridique.
f. Ingérence arbitraire dans la vie privée, la famille, la résidence ou la
correspondance des citoyens
La Constitution et la loi interdisent de telles actions et, dans la pratique, le
gouvernement a généralement respecté ces interdictions ; cependant, les
organisations de défense des droits de l'homme ont déclaré que les écoutes
téléphoniques clandestines par les services de sécurité étaient monnaie courante.
g. Usage de force excessive et autres abus dans des conflits internes
Le niveau de violence s'est accru au cours de l'année dans la région de la
Casamance. Il y a eu plusieurs affrontements aussi bien entre le MFDC et des
éléments militaires qu'entre factions au sein du MFDC. L'armée a effectué
plusieurs descentes dans la région de Sindian, dans le nord de la Casamance, près
de la frontière gambienne, autour de la capitale régionale, Ziguinchor, et dans la
région d'Oulampane, dans le nord de la Casamance. On estime à 83 le nombre de
personnes tuées dans l’année suite au conflit casamançais : 36 soldats sénégalais,
14 civils et environ 33 rebelles du MFDC.
Aucun décès de civils par mine terrestre n'a été signalé, ce qui veut dire que les
campagnes de sensibilisation anti-mines ont eu des résultats. Toutefois, certains
observateurs ont noté une augmentation de l’utilisation des mines terrestres par le
MFDC. Deux femmes civiles ont été blessées sur des mines terrestres le 27 mars à
Diankadiou, au nord de Sindian. Handicap international a continué d'œuvrer sous
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la direction et la coordination du Centre d'action contre les mines, une organisation
gouvernementale.
Plusieurs soldats ont trouvé la mort dans des accidents liés aux mines terrestres.
Les rebelles du MFDC ont commis plusieurs actes de banditisme en Casamance.
Deux civils ont trouvé la mort dans ce que l’on pense être des actes de banditisme
ou des attaques du MFDC pendant l’année.
Le 19 janvier, une Sénégalaise d’une trentaine d’années a été kidnappée, battue et
violée par des personnes soupçonnées d’être des membres du MFDC près du
village de Teidouboune. Le jour suivant, des soldats sénégalais ont trouvé son
corps sans vie portant des traces de blessures par balle.
Le 28 janvier, un motocycliste a été victime d’une embuscade et tué par des
personnes soupçonnées d’être des membres du MFDC près de Bignona.
Section 2 Respect des libertés civiles, notamment:
a. Liberté d'expression et liberté de la presse
La constitution et la loi prévoient la liberté d'expression, y compris pour la presse ;
cependant, dans la pratique, le gouvernement a limité ces droits et les forces de
sécurité et les politiciens ont intimidé ou harcelé les journalistes au cours de
l'année.
Liberté d'expression : les individus ont généralement pu critiquer le gouvernement,
en public ou en privé, sans risque de représailles.
Liberté de la presse : Il y avait un grand nombre de journaux indépendants et trois
journaux affiliés au gouvernement. Compte tenu du taux élevé d'analphabétisme, la
radio occupait le premier rang parmi les médias et sources d'informations.
Il y avait environ 80 stations de radio communautaire, radio publique et radio
privée commerciale. Bien qu'une loi administrative soit en place pour réguler la
répartition des fréquences radio, les opérateurs de radio communautaire laissaient
entendre que l'affectation des fréquences manquait de transparence. Les stations de
radio étaient occasionnellement gérées par un seul groupe religieux, politique ou
ethnique.
11
Même si le gouvernement a continué à maintenir, par l'intermédiaire de la
Radiodiffusion-Télévision sénégalaise (RTS), une solide mainmise sur les
informations et opinions télévisées, cinq chaînes de télévision privée ont
fonctionné au cours de l'année. Le gouvernement doit, de par la loi, détenir la
majorité des parts de la RTS et le président contrôlait, de manière directe ou
indirecte, la sélection des 12 membres de la direction de la RTS. Plusieurs groupes
de défense des droits de l'homme et de journalistes ont critiqué la possibilité offerte
à certains chefs religieux de diffuser gratuitement sur les antennes de la
radiotélévision étatique, alors que d'autres groupes étaient obligés de payer.
L'échec du gouvernement dans l'application des règles régissant l'établissement des
organes de presse et l'aide qu'il apporte aux médias ont contribué à la montée de
médias non-professionnels et politisés. Des journalistes et des groupes de défense
des droits de l'homme ont noté que certains organes, tels que le quotidien Le
Messager, ainsi que les stations de radio Anur FM et la Radio Municipale de
Dakar, avaient été créés exclusivement pour réfuter les critiques
antigouvernementales.
La presse internationale a été active et a exprimé sans restriction une grande variété
de points de vue.
Violence et harcèlement : Le gouvernement a continué de considérer certains
organes de presse comme une menace et, au cours de l'année, des journalistes ont
été détenus pendant plusieurs heures par la DIC. La police a souvent fait pression
sur des journalistes qui publiaient des reportages sur les scandales, le gaspillage ou
la fraude au sein de l'administration pour les pousser à révéler leurs sources. La loi
permet à la police d'arrêter et d'emprisonner les journalistes et les citoyens privés
pour diffamation.
A titre d’exemple, le 13 juillet, quatre journalistes affiliés au réseau indépendant de
Wal Fadjiri (Abdourahmane Camara, Charles Gaiky Diene, Yakhya Massaly et
Mohamed Mboyo) ont été détenus par la DIC suite à la publication dans le journal
Wal Fadjiri d’un article intitulé « Menteurs, agresseurs, détourneurs : les voyous
de la République ». Ils ont été relâchés sans être inculpés au bout de plusieurs
heures.
Le 25 septembre, trois journalistes du nouveau quotidien privé La Tribune ont été
relâchés après avoir passé la nuit en détention policière. Félix Nzale, directeur de la
publication, Ahmet Bachir Ndiaye, reporteur, et Mamadou Diop, photojournaliste,
ont été accusés de discréditer la police avec la publication en première page, le 23
12
septembre, d’une histoire accompagnée de photos, qui accusait la police d’usage
disproportionné de la force dans la répression d’une manifestation. La police a dit
que les photos étaient truquées et les journalistes ont affirmé qu’elles étaient
authentiques.
Censure ou restrictions sur le contenu : les journalistes ont pratiqué l’autocensure
et il est apparu que l’aide aux médias fournie par le gouvernement de façon
sélective a avantagé les médias favorables à l’administration en place.
Les efforts du gouvernement pour contrôler le contenu des médias, en accordant ou
pas des subventions de l’Etat, qui sont données de façon routinière aux médias
affiliés au gouvernement et aux médias indépendants privés, ont préoccupé les
journalistes. Le gouvernement a fréquemment utilisé les subventions, et dans
quelques cas la menace et l’intimidation, pour faire pression sur les médias afin
qu’ils ne publient pas certaines choses.
Lois sur la diffamation/la sécurité nationale : la loi criminalise la diffamation et
elle est utilisée à des fins de harcèlement et pour décourager les reportages
d’enquête.
L’ONG Reporteurs sans frontières a indiqué que le 14 avril, Abdou Latif Coulibaly
s’est vu infliger une peine de prison de trois mois avec sursis et une amende de dix
millions de francs CFA (20.000 dollars) pour son journalisme d’investigation
accusant un homme d’affaires proche du président de transactions frauduleuses
avec le gouvernement. Il s’agissait de la deuxième condamnation avec sursis et
amende pour Coulibaly depuis 2010, lorsqu’une accusation de diffamation a été
portée contre lui par un conseiller présidentiel.
Liberté d’accès à Internet
Le gouvernement n'a imposé aucune restriction sur l'accès à Internet et il n'y a pas
eu de rapports faisant état de surveillance des courriels ou des forums de discussion
sur le Net. Les individus et les groupes ont pu pacifiquement exprimer leurs points
de vue sur Internet, notamment par courriel.
Liberté académique et manifestations culturelles
L'État n'a imposé aucune restriction sur la liberté académique ou les manifestations
culturelles.
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b. Liberté de réunion pacifique et d'association
Liberté de réunion
Bien que la Constitution et la loi prévoient la liberté de réunion, le gouvernement
a, dans la pratique, entravé ce droit. Au cours de l'année, à plusieurs reprises, le
gouvernement a refusé d'octroyer des autorisations publiques à la société civile et
aux manifestations de l'opposition politique. L'opposition s'est plainte des périodes
d'attente excessive que le gouvernement lui fait subir avant de donner réponse à ses
demandes d'autorisation.
Le 26 mai, la police a fait usage de gaz lacrymogène pour disperser une réunion du
syndicat des travailleurs de la Poste (SNTPT), au siège de la Médina.
Le 5 juin, la police a arrêté quatre leaders du mouvement « Y En a Marre » et leur
coordinateur local à Mbacké. Le groupe de rappeurs et des journalistes étaient en
tournée dans le pays pour promouvoir l’inscription sur les listes électorales, tout
particulièrement auprès des jeunes. La demande initiale d’autorisation du groupe
pour organiser un concert et une campagne de sensibilisation a été refusée. Suite à
une interview radio du groupe, quatre leaders du mouvement ont été arrêtés par la
police, mais ils ont été relâchés plusieurs heures plus tard sans avoir été inculpés
(voir section 1.e., Prisonniers et détenus politiques).
Les 23 et 27 juin, des manifestations et des émeutes de grande ampleur ont eu lieu
pour protester contre les changements constitutionnels et les coupures d’électricité.
Le 23 juin, la police a fait usage de gaz lacrymogène et de grenades à concussion
pour contrôler une foule importante qui s’était rassemblée en centre ville, devant
l’Assemblée nationale. Le 27 juin, les émeutes se sont répandues dans Dakar et ses
environs. Des milliers d’émeutiers ont bloqué les grands axes routiers, mis à sac les
domiciles de certains membres du gouvernement et mis le feu à des dizaines de
véhicules. La police a tenté de disperser la foule à Dakar et Mbour avec des gaz
lacrymogènes, mais les émeutes n’ont pas été maîtrisées dans l’ensemble. Pour la
première fois depuis plus de 20 ans, les militaires ont été déployés pour une
éventuelle maîtrise de la foule, mais il n’y a pas eu d’engagement direct avec les
manifestants le 27 juin.
Liberté d'association
La Constitution et la loi prévoient la liberté d'association et, dans la pratique, le
gouvernement a généralement respecté ce droit.
14
c. Liberté de religion
Pour une description de la liberté de religion, veuillez consulter le Rapport du
Département d'État sur la liberté de religion internationale à l'adresse suivante :
www.state.gov/g/drl/irf/rpt.
d. Liberté de mouvement, personnes déplacées à l'intérieur de leur pays,
protection des réfugiés et apatrides
La Constitution et la loi prévoient la liberté de mouvement à l'intérieur du pays, les
voyages à l'étranger, l'émigration et le rapatriement et, dans la pratique, l'État a
généralement respecté ces droits.
L'État a généralement coopéré avec le Haut-commissariat des Nations Unies pour
les réfugiés (UNHCR) et d'autres organisations humanitaires en fournissant
protection et assistance aux personnes déplacées à l’intérieur de leur pays (PDIP),
aux réfugiés, aux demandeurs d'asile et aux apatrides.
Déplacements hors du pays : La loi exige de certains fonctionnaires, notamment
des enseignants, l’obtention d’une autorisation du gouvernement avant de sortir du
pays ; cependant, cette loi n'a pas été appliquée dans l’ensemble.
Personnes déplacées à l’intérieur de leur pays (PDIP)
Pendant les 29 ans du conflit casamançais, des dizaines de milliers de personnes
ont quitté les villages de la région en raison des combats, des évacuations forcées
et des mines terrestres. De nombreuses personnes sont devenues des PDIP au cours
de l'année. Le gouvernement estimait qu'il y avait encore environ 10.000 PDIP en
Casamance, même si ce chiffre avait tendance à fluctuer en fonction de l’évolution
du conflit. Selon certains organismes internationaux d'aide humanitaire, le nombre
de PDIP pourrait atteindre 40.000. Certaines PDIP qui tentaient de rentrer dans
leurs villages dans les communautés rurales au sud de Ziguinchor se sont heurtées
à l’hostilité des combattants du MFDC qui survivaient sur les mêmes ressources
naturelles que les PDIP de retour.
Au cours de l’année, le gouvernement a donné de la nourriture aux enfants des
PDIP et les a inscrits dans les écoles locales de Ziguinchor.
Protection des réfugiés
15
Droit d’asile : La loi du pays prévoit l'octroi du droit d'asile ou du statut de réfugié
et le gouvernement a établi un système pour assurer la protection des réfugiés.
Comme le président doit donner son approbation sur chaque dossier, des retards
d'un à deux ans avant que le statut de réfugié ne soit accordé posaient encore
problème. Le gouvernement a généralement accordé le statut de réfugié ou le droit
d'asile et fourni aux réfugiés une aide alimentaire et non alimentaire.
Le gouvernement a violé les droits de certains demandeurs d'asile en ne leur
proposant pas de droits à la défense, ou à la sécurité, du fait que les appels
interjetés par les demandeurs d'asile refusés étaient examinés par le même comité
qui avait examiné le premier dossier ; et que le demandeur refusé peut être arrêté
pour séjour irrégulier dans le pays. Ceux qui étaient arrêtés pouvaient passer
jusqu'à trois mois en « détention administrative » avant d'être expulsés. Selon le
HCR, il y avait, en janvier, 2.177 demandeurs d'asile dans le pays.
Non refoulement : Dans la pratique, le gouvernement a accordé une certaine
protection contre l’expulsion ou le rapatriement des réfugiés dans les pays où leur
vie ou leur liberté serait menacée en raison de leur race, nationalité, appartenance à
un groupe social précis, ou de leur opinion politique.
Solutions durables : Depuis 1989, le pays offre une protection temporaire aux
réfugiés mauritaniens qui vivaient généralement dans diverses localités de la vallée
du fleuve, le long de la frontière mauritanienne, et jouissaient d'une liberté de
mouvement à l'intérieur du pays. Cependant, la majorité des réfugiés n'ont pas été
en mesure d'obtenir leurs documents de réfugiés auprès des autorités, et se sont
souvent heurtés à des difficultés administratives quand ils présentaient les
récépissés périmés de leur demande de statut de réfugié. Suite à des entretiens avec
le HCR, le gouvernement a convenu de délivrer des cartes d'identité. Le
gouvernement et le HCR ont terminé le processus d’enregistrement et les cartes
d’identification ont été délivrées.
En 2008, l’UNHCR a commencé un programme de rapatriement des Afro-
Mauritaniens vers la Mauritanie. Selon le HCR, environ 34.000 Afro-Mauritaniens
étaient inscrits pour un rapatriement volontaire et, au mois de décembre 2009,
20.500 avaient été rapatriés. Les rapatriements ont été provisoirement suspendus
en janvier 2010 à cause de la situation sociopolitique interne en Mauritanie, mais
ils ont repris en octobre 2010. Environ 380 réfugiés ont été rapatriés dans le
courant de l’année.
16
L'État a continué à autoriser le rapatriement, généralement non contrôlé et
essentiellement informel, de réfugiés casamançais.
Section 3. Respect des droits politiques : le droit des citoyens à changer leur
gouvernement
La Constitution et la loi accordent aux citoyens le droit de changer leur
gouvernement et les citoyens ont généralement usé de ce droit, dans la pratique,
par l'intermédiaire d'élections périodiques, libres et équitables fondées sur le
suffrage universel.
Élections et participation politique
Les récentes élections : En 2007, le président Wade a été réélu à un second mandat
avec environ 55 % des voix. Les observateurs internationaux ont qualifié les
élections de généralement libres et équitables ; cependant, il y a eu des violences et
des irrégularités pré-électorales, notamment par rapport à la délivrance des cartes
d'électeurs, et de nombreux partis d'opposition n'avaient pas accepté les résultats et
présenté en vain une pétition au Conseil Constitutionnel pour l'invalidation du
scrutin.
Lors des élections législatives de 2007, la coalition PDS du président Wade a
remporté 131 des 150 sièges de l'Assemblée nationale. Les observateurs
internationaux ont qualifié les élections de généralement libres et équitables.
Comme l'opposition, organisée sous la bannière d'une coalition unitaire, le «Front
Siggil Sénégal », a boycotté les élections, le taux de participation de 34,7 % était
historiquement faible. Lors des élections indirectes du Sénat en 2007, les
responsables locaux et les députés ont sélectionné des candidats PDS pour 34 des
35 sièges en lice. Les 65 sièges de sénateurs restants ont été pourvus par le
président. Les grands partis d'opposition ont boycotté les élections sénatoriales, du
fait que le président nomme la majorité des sénateurs.
Partis politiques : Les 150 partis politiques enregistrés ont évolué sans restriction
ni ingérence extérieure.
Participation des femmes et des minorités : en mai 2010, l’Assemblée nationale a
adopté une loi sur l’égalité des genres, prévoyant l’égalité d’accès pour les femmes
à toutes les assemblées élues et les conseils d’administration des entreprises
appartenant en totalité ou en partie au gouvernement. A la fin de l'année, il y avait
37 femmes parmi les 150 députés à l'Assemblée nationale et 9 femmes parmi les
17
40 membres du gouvernement. Sur les 100 membres du Sénat, 40 étaient des
femmes.
Section 4. Corruption et transparence au sein des pouvoirs publics
Bien que la loi prévoie des sanctions pénales contre la corruption officielle, le
gouvernement n'a pas procédé à une application effective de ces dispositions, et
des responsables ont commis, en toute impunité, des actes de corruption. Les lois
de déclaration des biens ne s’appliquaient aux hauts responsables de l’État que
dans le cadre des enquêtes. Le président est le seul haut responsable qui soit tenu,
juridiquement, de déclarer ses biens au début de son mandat.
Les indices de la gouvernance mondiale de 2009 de la Banque mondiale reflétaient
la gravité du problème de la corruption et une perception généralisée de corruption
publique. Le fait que, dans les années précédentes, les autorités s'octroyaient, pour
elles-mêmes, et pour les députés et fonctionnaires, augmentations de salaire,
véhicules et terrains, a exacerbé cette perception.
L'impunité et la corruption au niveau de la police étaient des problèmes
généralisés. Selon les groupes des droits de l'homme, les avocats et les victimes,
les forces de sécurité extorquaient régulièrement de l'argent aux détenus en
échange de leur libération, et aux prostituées dans le but de fermer les yeux sur la
non-observation des règles régissant la prostitution.
La Commission nationale de lutte contre la non-transparence, la corruption et la
concussion n'avait aucun pouvoir d'investigation ou de poursuites. Elle est restée
inefficace dans sa lutte contre la corruption et n'a poursuivi aucun agent du
gouvernement pour acte de corruption. Malgré de multiples accusations de
corruption dans la presse, ni la commission ni la justice n'ont mené d’investigation.
Plusieurs réunions ont eu lieu à huis clos et sans la participation ni l’accès aux
procédures des parties prenantes ou de la société civile, pour prendre des décisions
de grande importance pour le peuple sénégalais. L’ONG Article 19 a indiqué le 15
novembre que les groupes publics et les groupes de la société civile ont été exclus
de la participation au processus décisionnaire concernant la privatisation des
ressources hydrauliques.
Au cours de l'année, l'Agence de régulation des marchés publics (ARMP) a publié
sur Internet ses enquêtes sur les violations du code des marchés publics qui se sont
18
produites en 2009. Les rapports d’enquête étaient longs et détaillés, mais ils n’ont
abouti à aucune poursuite judiciaire. L’ARMP dispose d’un mandat pour publier
ses conclusions sur les rapports d’enquête indépendamment de l’accord du
gouvernement.
La Constitution et la loi accordent aux citoyens le droit d'accéder librement aux
informations de l'État; cependant, dans la pratique, l'État a rarement accordé cet
accès.
Section 5. Attitude de l'État envers les investigations internationales et non
gouvernementales sur les violations présumées des droits de l'homme
Une grande variété d'associations nationales et internationales de défense des droits
de l'homme ont évolué généralement sans restriction du gouvernement, menant
leurs enquêtes et publiant leurs conclusions sur des dossiers de droits de l'homme.
Les autorités ont été plutôt coopératives mais rarement réactives par rapport à ces
conclusions. Certaines organisations des droits de l'homme ont laissé entendre que
leurs téléphones étaient régulièrement sous écoute au cours de l'année et des
violences ont été perpétrées contre des figures de la défense des droits de l'homme
(voir section 1.c.).
Des menaces de mort à l'encontre de dirigeants de partis d'opposition, de syndicats
et d'ONG ainsi que de journalistes et d'autres hauts responsables étaient courantes
et généralement estimées provenir du parti au pouvoir.
A titre d’exemple, Alioune Tine, qui est à la tête du RADDHO, a été attaqué et
passé à tabac par des individus que l’on pense avoir été payés par le gouvernement.
Tine affirme que son agression a été organisée par Farba Senghor, un proche du
président Wade, et que Senghor a participé à son agression. Tine a été hospitalisé à
la suite de son agression et est resté dans le coma pendant plusieurs jours.
Organes des Nations Unies et autres organes internationaux : En 2008, la
Constitution a été amendée pour autoriser des poursuites rétroactives en matière de
génocide et de crimes contre l'humanité contre Hissène Habré, qui vit en exil dans
le pays depuis 1990. Les bailleurs de fonds ont collaboré avec le gouvernement
pour arrêter un budget approprié et, en novembre 2010, promis environ 11.350.000
de dollars pour financer le procès. Dans le même temps, la Cour de justice de la
Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) a rendu un
jugement en accord avec les accusations portées par les avocats de Habré contre le
Sénégal. Ces derniers ont fait valoir que le Sénégal a introduit la rétroactivité dans
19
ses lois pénales uniquement pour traduire Habré en justice et, partant, a violé les
droits de celui-ci. L'UA et l'UE ont préconisé la tenue du procès malgré la décision
de la CEDEAO.
Dans une interview accordée à un journal français en date du 7 février, le président
Wade a exprimé son opposition au jugement de Habré au Sénégal en se disant
« dessaisi » du dossier, suite à la décision de la cour de Justice de la CEDEAO. Le
8 juillet, le bureau du président Wade a annoncé l’expulsion de Habré vers le
Tchad le 11 juillet. Toutefois, le 10 juillet, le ministère des Affaires étrangères a
déclaré que l’expulsion de Habré avait été « suspendue » sur demande du Haut
commissaire aux droits de l’homme des Nations Unies.
Organes gouvernementaux des droits de l’homme : Le Comité sénégalais des droits
de l'homme du gouvernement (CSDH) comprend des représentants du
gouvernement, d'associations de la société civile et d'organisations indépendantes
des droits de l'homme. Le CSDH a autorité pour enquêter sur les abus; cependant,
il manquait de crédibilité puisqu'il avait un niveau de financement extrêmement
bas, ne se réunissait pas régulièrement, ne menait pas d'investigations et a publié
son dernier rapport annuel en 2001.
Selon le CSDH, les autorités ont régulièrement rencontré les ONG de la société
civile et des droits de l'homme pour discuter de questions comme la discrimination
(raciale, sexuelle et religieuse), la migration et les violences conjugales. Le
gouvernement a montré une certaine réactivité aux enquêtes des ONG et a tenu des
réunions avec celles-ci pour discuter des questions de droits de l'homme comme la
torture, les violences conjugales et l'affaire Hissène Habré.
Section 6. Discrimination, abus sociétaux et traite des personnes
La Constitution prévoit l'égalité des hommes et des femmes devant la loi et interdit
toute forme de discrimination basée sur la race, le genre, le handicap, la langue ou
le statut social. Cependant, la discrimination sexuelle était généralisée dans la
pratique et les lois anti-discrimination, notamment en ce qui concerne la violence
faite aux femmes et aux enfants, très rarement appliquées.
Les femmes
Le viol et la violence domestique. Le viol était courant. Le viol conjugal était
toujours difficile à quantifier dans la mesure où il s'agit d'un sujet tabou dont il est
rarement fait état. La loi interdit le viol, mais pas le viol entre époux ; cependant, le
20
gouvernement a rarement fait appliquer la loi. Les sanctions contre le viol peuvent
aller de cinq à dix ans de prison. Une ONG de défense des droits de la femme a
critiqué l'absence de lois de protection des victimes de viol ; la loi autorise, à
présent, la pratique courante qui consiste à invoquer les antécédents sexuels d'une
femme pour défendre un homme accusé de viol. Les poursuites en matière de viol
étaient minimales puisque les juges disposaient rarement de preuves suffisantes
attestant qu'il y avait eu viol, surtout quand cela s'est produit au sein de la famille.
Il était d'usage que les affaires de viol soient réglées à l'amiable pour éviter la
publicité et les frais judiciaires. Le ministère de la Justice a estimé qu’en 2009, 47
% des violeurs accusés sont restés impunis et ont été libérés sans être jugés, mais il
n’a pas été en mesure de fournir des estimations plus récentes.
Le 8 août, une quinzaine d’organisations locales des droits de l’homme ont
demandé publiquement l’arrêt des viols en réunion et la fin de l’impunité pour ces
crimes. Elles ont dénoncé le fait que, lors des protestations violentes du 27 juin, un
groupe d’hommes avaient profité des coupures d’électricité et des émeutes pour
violer plusieurs femmes dans un bar/restaurant de Dieuppeul, dans la banlieue de
Dakar. Elles ont également condamné un autre incident, qui a eu lieu le 31 juillet
dans la banlieue dakaroise de Guédiawaye. A l’issue d’un combat de lutte et
profitant d’une coupure d’électricité, un groupe d’hommes auraient violé un certain
nombre de fans de sexe féminin qui s’étaient rassemblées devant le domicile du
lutteur Balla Gaye pour fêter sa victoire. A la fin de l’année, aucune arrestation
n’avait eu lieu dans le cadre de ces deux incidents.
La violence domestique, notamment conjugale, était un problème généralisé. Le
ministère de la Justice est responsable de la lutte contre la violence conjugale.
Plusieurs associations féminines ainsi que l'ONG CLVF (Comité de lutte contre les
violences faites aux femmes et aux filles) ont fait état d'un accroissement des actes
de violence sur les femmes au cours de l'année. Le CLVF a signalé que les actes de
violence conjugale représentaient 65 % de tous les cas signalés de violence faite
aux femmes en 2009.
La loi interdit les actes de violence sur les femmes, mais la législation n'a pas été
appliquée. La loi criminalise les agressions et prévoit une peine de prison d’un à
cinq ans assortie d'une amende. Si la victime est une femme, la peine de prison et
l'amende augmentent. Les actes de violence conjugale causant des blessures
durables sont passibles d'une peine de prison de 10 à 20 ans ; si un acte de violence
conjugale entraîne la mort, la loi prescrit la prison à vie. Le CLVF a critiqué la
non-application de la loi par certains juges et a cité des dossiers pour lesquels les
juges ont argué d'un manque de preuves suffisantes pour justifier la légèreté des
21
peines qu’ils prononçaient. Le CLVF a également noté que le gouvernement a
permis aux organisations de la société civile de représenter, au civil, des victimes
de traite, mais a continué de leur nier ce droit dans les affaires de viol. La presse a
fait état de nombreux cas d'inceste. La violence conjugale sur les femmes est
passible d'une peine d'un à dix ans de prison et d'amendes allant de 30.000 francs
CFA (60 dollars) à 500.000 francs CFA (1.000 dollars) en fonction du niveau de
maltraitance. Quand la violence entraîne la mort, les auteurs sont condamnés aux
travaux forcés à perpétuité. En général, la police n'est pas intervenue dans les
disputes conjugales et la quasi-totalité des victimes hésitaient à sortir du cadre
familial pour obtenir réparation. Il n'y avait pas de statistiques disponibles sur le
nombre d'auteurs de sévices poursuivis en justice. Les actes de viol et de
pédophilie ont souvent été commis par des parents proches et plus âgés, et les
victimes ont par conséquent eu du mal à intenter un procès.
Les organisations de lutte contre la violence ont critiqué le refus de l'État
d'autoriser les associations à engager des procédures au nom des victimes. Le
ministère de la Femme, de la Famille, du Développement social et de
l'Entreprenariat féminin état chargé de veiller aux droits des femmes.
Selon la presse, le centre Ginddi, administré par les pouvoirs publics, a hébergé des
femmes et des filles victimes de viol ou de mariage précoce, outre des enfants des
rues.
Les Mutilations génitales féminines (MGF) : Selon la loi, les MGF sont un délit
passible d’une peine de prison de six mois à cinq ans pour ceux qui la pratiquent
directement ou qui ordonnent qu’elles soient pratiquées sur une tierce personne.
Cependant, de nombreuses personnes ont continué à pratiquer les MGF
ouvertement et en toute impunité. La prévalence de cette pratique sur les filles de
plus de 10 ans est estimée à moins de 6 pour cent (voir la rubrique « Enfants » dans
cette section).
Harcèlement sexuel : La loi prévoit une peine de prison de cinq mois à trois ans et
des amendes de 50.000 à 500.000 francs CFA (100 à 1.000 dollars) pour le
harcèlement sexuel ; cependant, la pratique était courante. Les pouvoirs publics
n'ont pas fait effectivement appliquer la loi et les organisations de défense des
droits des femmes faisaient valoir que les victimes de harcèlement sexuel
trouvaient qu'il était difficile, voire impossible, de présenter suffisamment de
preuves pour engager des poursuites.
22
Tourisme sexuel : des cas de tourisme sexuel ont été rapportés. A titre d’exemple,
il y a eu des cas de touristes européens qui ont eu recours à des services sexuels,
dans la région de Saly, près de Mbour.
Droits en matière de reproduction : La loi accorde à tout individu le droit d'être
informé et de choisir des méthodes d'espacement des naissances. Elle prévoit
également, pour toute femme enceinte, le droit aux soins médicaux et à un
accouchement sans danger. La loi considère le droit à la santé reproductive comme
«un droit fondamental et universel garanti à tout individu sans discrimination. » La
loi stipule également que «tout couple et tout individu ont le droit de décider
librement d’avoir des enfants, d'en déterminer le nombre désiré et l'espacement».
Dans la pratique, la mauvaise qualité des services médicaux a limité ces droits,
notamment en milieu rural et dans certaines zones urbaines où le manque de fonds
a entraîné la fermeture de maternités et de salles d’opérations. Selon des enquêtes
démographiques et sanitaires, environ 65 pour cent des naissances bénéficiaient de
la présence de personnel qualifié et des soins prénataux ont été dispensés dans 93
pour cent des cas. Selon l’UNICEF, le ratio de mortalité maternelle (le nombre de
décès maternels pour 100.000 naissances vivantes) était de 410 en 2008. Le
ministère de la Santé estimait qu’une grande partie des décès des mères au moment
de l’accouchement pourrait être évitée avec l’aide de personnel qualifié et la
disponibilité de services obstétriques d’urgence. Les pressions socioculturelles
pour avoir de grandes familles auraient poussé certains maris à demander aux
agents de santé d’interrompre l’usage de contraceptifs par leurs épouses. De telles
demandes auraient obligé les femmes à faire preuve de discrétion en matière de
contraception. Selon le FNUAP, 12 % des filles et femmes âgées de 15 à 45 ans,
employaient une méthode de contraception. Hommes et femmes ont été, de façon
égale, diagnostiqués et traités pour les maladies sexuellement transmissibles.
Le 3 février, le ministère de la Santé a annoncé que, dans le cadre d’efforts pour
diminuer les taux de mortalité maternelle et infantile, les coûts des interventions
des césariennes dans Dakar et ses environs seraient pris en charge par le
gouvernement.
Discrimination : Les femmes ont fait face à une discrimination constante, surtout
en milieu rural où les coutumes, notamment la polygamie et les règles
discriminatoires en matière d’héritage, étaient les plus enracinées. La loi exige
l’accord de la femme pour un régime polygame mais, une fois dans une telle union,
l’homme n’avait plus besoin de notifier sa femme ni d’obtenir son consentement
avant de prendre une autre épouse. Environ 50 % des mariages étaient sous le
23
régime polygame. Bien que protégés par la loi, les droits matrimoniaux n’ont pas
été respectés à cause des pesanteurs socioculturelles et de la réticence des juges à
appliquer la loi.
La définition des droits paternels dans le code de la famille continuait de
représenter un obstacle à l’égalité homme-femme, dans la mesure où l’homme est
considéré comme chef de famille et la femme ne peut pas assumer la responsabilité
juridique de ses enfants. La femme ne peut juridiquement devenir chef de famille
que lorsque le père renonce officiellement à son autorité devant l’administration.
En revanche, il était possible aux femmes de prendre en charge leurs enfants et leur
mari si celui-ci souffrait d’une incapacité médicale qui l’en empêchait. En outre,
des problèmes liés aux pratiques traditionnelles ont rendu difficile l’achat par les
femmes de biens fonciers en milieu rural.
L’homme et la femme ont les mêmes droits de postuler pour un emploi. Les
femmes représentaient 52 % de la population mais accomplissaient 90 % des
travaux domestiques et 85 % du travail agricole.
Les enfants
Déclaration des naissances : La nationalité s’acquiert par naissance ou
naturalisation ; seul le père peut transmettre automatiquement la nationalité ; une
femme ne peut le faire que si son mari est apatride. Les enfants légitimes nés de
mère sénégalaise et de père étranger ont le choix de prendre la nationalité
sénégalaise entre 18 et 25 ans. Les enfants illégitimes prennent la nationalité du
premier parent qui déclare sa naissance. Les enfants ne sont pas déclarés à la
naissance sauf si un parent en fait la demande, mais la non-déclaration ne veut pas
dire que l’enfant n’aura pas accès aux services publics. Dans beaucoup de zones
rurales, les parents ont rarement déclaré les naissances. Le processus de déclaration
des naissances consistait seulement pour le juge local à rendre une décision en
fonction des témoignages verbaux.
Education : La loi prévoit la scolarité gratuite et obligatoire des enfants, de 6 à 16
ans ; cependant, beaucoup d’enfants ne sont pas allés à l’école par manque de
moyens ou d’installations. Les élèves doivent prendre en charge l’achat des
manuels, des uniformes et d’autres fournitures scolaires. Le fossé historique qui
existait entre les taux de scolarisation des garçons et des filles a été comblé et, au
cours de l’année, il y avait plus de filles que de garçons à l’école primaire.
24
En revanche, les filles ont rencontré plus de difficultés à poursuivre leurs études.
Quand les familles ne pouvaient plus se permettre d’envoyer tous leurs enfants à
l’école, les parents avaient tendance à déscolariser les filles plutôt que les garçons.
Le harcèlement sexuel de la part du personnel de l’école et les grossesses précoces
ont en outre été une cause d’abandon scolaire par les jeunes filles. Selon les
données les plus récentes de l’UNICEF, seulement 45 % des filles et des femmes
de 15 à 24 ans savaient lire et écrire, contre 58 % des garçons et des hommes. Si le
nombre de garçons et de filles inscrits dans l’enseignement primaire était
sensiblement le même, l’UNICEF a indiqué que 28 % des garçons fréquentaient
l’école secondaire, contre à 22 % des filles.
La maltraitance des enfants : La maltraitance des enfants a été monnaie courante.
Des garçons mal vêtus, pieds-nus, connus sous le nom de « talibés », ont mendié
au coin des rues de la nourriture ou de l’argent pour eux-mêmes et leurs maîtres
coraniques appelés marabouts. Beaucoup de ces enfants étaient exploités par leurs
enseignants et étaient exposés à des dangers. De nombreux cas de sévices
physiques sur ces talibés ont été signalés. Une étude conjointement menée en 2008
par l’UNICEF, l’Organisation internationale du travail, la Banque mondiale et
l’ONG « Partenariat pour le retrait et la réinsertion des enfants des rues », a
dénombré environ 7.800 enfants mendiants dans la région de Dakar. Selon un
rapport de Human Rights Watch, publié en avril 2010, le pays comptait 50.000
enfants mendiants. La quasi-totalité d’entre eux avaient une dizaine d’années, mais
des cas de talibés âgés de seulement deux ans ont été rapportés. Ils étaient en
général sous-alimentés et exposés aux maladies. Comme ils mendiaient à plein
temps, ils n’avaient guère de temps à consacrer aux études coraniques. Ils étaient
forcés de verser leurs aumônes aux maîtres. Chaque enfant était censé rapporter en
moyenne 400 francs CFA (0,80 cents) par jour.
Les mariages précoces : des fonctionnaires du ministère de la Femme, de la
Famille, du Développement social et de l’Entreprenariat féminin, et des groupes de
défense des droits des femmes ont indiqué que le mariage précoce était un
problème significatif dans certaines parties du pays, plus particulièrement dans les
zones rurales, bien que ce soit illégal. Des filles, âgées parfois de seulement neuf
ans, ont été mariées à des hommes plus âgés.
La loi nationale permet aux femmes de choisir quand et avec qui se marier, mais
les pratiques traditionnelles ont limité ces choix. La loi interdit le mariage des
jeunes filles de moins de 16 ans, mais cette loi n’a généralement pas été appliquée
dans la plupart des localités où les mariages sont arrangés. Dans certaines
conditions, un juge peut accorder une dérogation spéciale pour le mariage d’une
25
personne n’ayant pas atteint l’âge de consentement. Selon les données de
l’UNICEF, 39 pour cent des femmes entre 20 et 24 ans se sont mariées avant l’âge
de 18 ans.
Pratiques traditionnelles préjudiciables : Presque toutes les femmes dans la région
du Fouta, au nord du pays, ont été victimes de MGF avant l’âge adulte, tout
comme 60 à 70 % des femmes au Sud et au Sud-Est du pays. L’infibulation, une
des formes de MGF les plus extrêmes et les plus dangereuses, était parfois
pratiquée par les Toucouleurs, les Mandingues, les Soninkés, les Peuls et les
Bambaras, plus particulièrement en milieu rural et dans certaines zones urbaines.
Selon une récente enquête sur la santé et la démographie de l’Institut national des
Statistiques, cette pratique des MGF a légèrement diminué, passant de 28 pour cent
en 2005 à environ 26 pour cent en 2011.
Le gouvernement a collaboré avec l’ONG Tostan et d’autres groupes pour
informer les gens des dangers inhérents aux MGF. Tostan n’a rapporté aucune
amélioration réelle par rapport à 2010, avec 817 communautés qui pratiquaient
encore les MGF. Tostan a travaillé auprès de 522 villages.
Exploitation sexuelle des enfants : La loi prévoit une peine de cinq à dix ans de
prison pour les auteurs de sévices sexuels sur des enfants. Si l’auteur des faits est
un membre de la famille, la peine maximale est appliquée. Tout attentat à la pudeur
envers un enfant est passible d’une peine de deux à cinq ans de prison et, dans
certaines circonstances aggravantes, jusqu’à dix ans. Le proxénétisme des mineurs
est passible d’une peine de prison de deux à cinq ans et d’une amende de 300.000 à
4 millions de francs CFA (600 à 8.000 dollars). Si l’infraction porte sur une
victime de moins de 13 ans, la peine maximale s’applique. Cependant, la loi n’a
généralement pas été effectivement appliquée.
Le viol des enfants était toujours un problème. Le directeur chargé de la protection
des droits des enfants a fait état d’environ 400 cas de viol entre 2008 et 2009 ;
cependant, ce chiffre sous-estime considérablement la réalité. Aucune donnée plus
récente n’était disponible.
Le 9 mai, un Français de 72 ans, Jean Delhoune, a été arrêté à Mbour et inculpé de
pédophilie, après avoir été pris en flagrant délit d’agression sur trois mineures dans
une villa. Les médias ont indiqué que Delhoune avait été attrapé dans le cadre
d’une enquête plus vaste sur un réseau de prostitution de mineurs.
26
Le 17 mai, des médias ont rapporté qu’Oumar Gallo Ba, responsable de l’une des
organisations de jeunes du parti au pouvoir, a été arrêté dans la ville de
Tambacounda, dans l’est du pays, pour le viol d’une élève mineure, qui s’est
retrouvée enceinte suite à ce viol. Après son arrestation, Ba a accepté d’épouser la
jeune fille après son accouchement et de lui verser une pension mensuelle. Le
procureur a recommandé que l’affaire soit traduite en justice et elle n’avait pas été
tranchée à la fin de l’année.
En raison des pressions sociales et de la crainte de la honte, l’inceste est resté tabou
et souvent ni signalé ni puni.
Bien que la prostitution soit légale, le proxénétisme des mineurs est passible d’une
peine de prison de deux à cinq ans et d’une amende de 300.000 à 4 millions de
francs CFA (600 à 8.000 dollars).
La pornographie est interdite et la pornographie impliquant des mineurs de moins
de 16 ans est qualifiée de pédophilie.
L’infanticide : Les associations de défense des droits des femmes ont souligné que
l’infanticide, souvent causé par la pauvreté ou la honte, continuait d’être un
problème. Les domestiques ou les villageoises travaillant en ville qui tombaient
enceintes tuaient quelquefois leurs bébés parce qu’elles ne pouvaient pas s’en
occuper. D’autres, mariées à des hommes qui travaillaient en dehors du pays,
tuaient leurs nouveau-nés par honte. Dans certains cas, la famille même de la
femme la couvrait de honte jusqu’à ce qu’elle tue son propre enfant. Dans les cas
où l’identité de la mère était connue, la police l’arrêtait et la déférait au parquet.
Enfants déplacés : De nombreux enfants déplacés par le conflit en Casamance
vivaient souvent avec des parents éloignés, des voisins, dans des foyers pour
enfants ou dans la rue. Le gouvernement n’est pas subvenu aux besoins de ces
enfants efficacement. Selon les ONG en Casamance, les enfants déplacés
souffraient des effets psychologiques du conflit, de malnutrition et étaient en
mauvaise santé.
Enlèvement international d’enfants : Le pays n’est pas partie à la Convention de la
Haye de 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants.
Antisémitisme
27
Il y avait une centaine de Juifs résidant dans le pays ; aucun acte antisémite n’a été
signalé.
Traite des personnes
Pour de plus amples renseignements sur la traite des personnes, veuillez consulter
le rapport annuel du Département d’État Trafficking in Persons Report (Rapport
sur la traite de personnes) à l’adresse suivante : www.state.gov/g/tip.
Personnes handicapées
La loi interdit la discrimination à l’endroit des personnes handicapées en matière
d’emploi, d’éducation, d’accès aux soins de santé et autres services publics et le
gouvernement a fait appliquer la loi de manière relativement efficace. La loi
prévoit également l’accessibilité pour les personnes handicapées ; cependant, le
manque d’infrastructures n’a pas permis de les aider, notamment pour avoir accès
aux sites de vote de façon appropriée. Le ministère de la Solidarité nationale est en
charge de la protection des droits des personnes handicapées.
La loi réserve 15 % des nouveaux postes de la fonction publique aux personnes
handicapées. Cependant, selon l’Association nationale des personnes handicapées
du Sénégal, le gouvernement n’avait pas encore, en fin d’année, émis le décret
requis pour promulguer la loi. Le gouvernement administrait des écoles pour
enfants handicapés, accordait des subventions aux personnes handicapées pour
qu’elles puissent suivre une formation professionnelle et gérait des centres
régionaux pour les personnes handicapées dans le but de les former et de les
financer pour créer des entreprises.
Plusieurs programmes gouvernementaux qui semblaient être exclusivement
réservés aux personnes handicapées offraient des services à d’autres groupes
vulnérables, ce qui réduisait les ressources destinées aux handicapés. En raison du
manque de formation en éducation spécialisée des enseignants et d’installations
accessibles aux enfants handicapés, 40 % seulement de ces derniers fréquentaient
l’école primaire.
La prise en charge des maladies mentales n’a généralement pas été disponible et
les incidents avec mauvais traitements des personnes handicapées mentales ont été
monnaie courante.
Minorités nationales/raciales/ethniques
28
Même si les multiples ethnies du pays ont cohabité relativement en paix, les
tensions interethniques entre Wolofs et ethnies du Sud ont joué un rôle important
dans la longue rébellion casamançaise marquée par de graves violations des droits
de l’homme.
Abus sociétaux, discrimination et actes de violence basés sur l’orientation et
l’identité sexuelles
L’activité homosexuelle consensuelle, à laquelle la loi fait indirectement référence
en la qualifiant « de rapport sexuel contre nature » est une infraction pénale.
Récemment, lesbiennes, gays, bisexuels et transsexuels (LGBT) ont souvent fait
l’objet de poursuites en justice et de discrimination généralisée, d’intolérance
sociale et de violences.
Les médias n’ont pas fait état d’actes de haine ou de violence envers les LGBT. En
novembre 2010, Human Rights Watch a publié un rapport intitulé Fear of Life:
Violence against Gay Men and Men Perceived as Gay in Senegal (Craindre pour
sa vie: Violences contre les hommes gays et les hommes perçus comme tels au
Sénégal). Le rapport évoquait des cas de violence envers les hommes homosexuels
et le milieu juridique et culturel qui suscite une telle violence. Même si les affaires
citées dans le rapport remontaient à 2009 ou avant, les observateurs des ONG ont
spéculé que la baisse, pendant l’année, du nombre de ces incidents relevait de
plusieurs facteurs. Premièrement, la violence passée envers les hommes et les
femmes homosexuels peut avoir poussé les hommes homosexuels à évoluer dans la
clandestinité. Deuxièmement, l’attention internationale accrue a pu pousser le
gouvernement à réduire les poursuites et autres formes de discrimination officielle.
Un rapport de l’Institut Panos pour l’Afrique de l’Ouest, publié le 20 juillet, a
conclu que les médias locaux ont contribué aux attitudes sociétales négatives
envers les LGBT. Enfin, des recours judiciaires réussis contre la loi qui servait à
réprimer l’homosexualité ont pu contribuer à réduire son invocation par les
procureurs.
Autres formes de violence ou discrimination sociétale
Grâce aux campagnes de sensibilisation menées par le gouvernement aussi bien
que par les ONG au sujet du VIH/SIDA, les personnes vivant avec le VIH ou le
SIDA étaient de plus en plus acceptées par la société.
29
La loi protège les personnes atteintes de VIH/SIDA contre toute forme de
discrimination. La loi autorise également les médecins à informer les conjoints des
personnes atteintes de VIH/SIDA du statut de leurs partenaires si ces derniers
manquent de les en informer dans des délais raisonnables.
Section 7. Droits des travailleurs
a. Droit d’association et droit de négociation collective
La loi autorise tous les travailleurs, à l’exception des forces de sécurité, notamment
les policiers et les gendarmes, les douaniers et les juges, à former des syndicats et à
en être membres. Le Code du travail exige que le ministère de l’Intérieur donne
une autorisation préalable avant qu’un syndicat ne puisse légalement s’établir. Le
gouvernement peut également dissoudre et démanteler un syndicat par arrêté
administratif. La discrimination antisyndicale est interdite par la loi.
La loi prévoit le droit de grève ; dans la pratique, cependant, certaines règles
limitent ce droit et la loi n’a pas été effectivement appliquée. La Constitution
fragilise sérieusement le droit de grève en stipulant qu’une grève ne doit pas
empiéter sur la liberté de travailler ou mettre en péril une entreprise. La loi stipule
que les lieux de travail ne doivent pas être occupés pendant une grève. Les
syndicats de fonctionnaires doivent donner un préavis de grève d’au moins un mois
aux pouvoirs publics ; les syndicats du privé doivent notifier les autorités trois
jours à l’avance. Ce droit est encore davantage limité par le pouvoir des autorités à
réquisitionner des travailleurs pour remplacer les grévistes. Le code du travail ne
s’applique pas aux secteurs informels, ce qui exclut la majorité de la population
active, notamment les personnes travaillant dans l’agriculture de subsistance et les
personnes employées dans les nombreuses entreprises familiales.
La loi permet aux syndicats de mener leurs activités sans ingérence et les
travailleurs ont exercé le droit de former des syndicats et d’y adhérer dans la
pratique. Toutefois, le sentiment anti-syndicaliste est très fort au sein du
gouvernement.
La loi prévoit également le droit aux négociations collectives. Cependant, les
conventions collectives ne s’appliquaient qu’à 44 % environ des travailleurs
syndiqués. Les syndicats sont organisés par secteurs industriels, de façon très
similaire au système syndical français. Les syndicalistes auraient fréquemment fait
l’objet de harcèlement. De plus, l’OIT a soulevé des interrogations par rapport à
30
l’adhésion pleine et entière que le pays observe en matière de droits des
travailleurs, notamment en ce qui concerne le droit d’association. Toutefois, aucun
rapport établi confirmant des activités de discrimination antisyndicale n’a été fait
au cours de l’année. Certains journaux ont fait état de procédures judiciaires à
l’encontre de leaders syndicalistes, par exemple dans l’industrie des
télécommunications, mais il n’y a pas de rapport faisant état de personnes victimes
de harcèlement pour leur appartenance à un syndicat. Les travailleurs des secteurs
des transports, de la santé, les avocats, les employés des télécommunications, les
éboueurs et les pêcheurs ont organisé plusieurs mouvements de grève au cours de
l’année.
b. Interdiction du travail forcé ou obligatoire
Bien que la loi interdise le travail forcé ou obligatoire, y compris celui des enfants,
de telles pratiques ont eu lieu. La principale forme de travail forcé a été la
mendicité forcée des talibés, ces jeunes garçons forcés de mendier de la
nourriture/de l’argent par les enseignants des écoles islamiques. Les parents vivant
dans les villages ont envoyé leurs enfants dans ces écoles pour qu’ils y reçoivent
un enseignement islamique, au lieu de quoi, dans un cruel jeu de leurre, les enfants
se retrouvent réduits à la mendicité. De nombreux maîtres coraniques ont fait venir
des jeunes garçons des villages aux centres urbains et les ont détenus dans des
conditions de servitude, les forçant à mendier au quotidien dans des conditions
malsaines et dangereuses ou à travailler dans l’agriculture sous la menace de
châtiment corporel. Les talibés ont occasionnellement travaillé dans la petite
agriculture et ont été employés pour la récolte du cajou, des mangues et des
oranges. En Casamance, les talibés qui travaillaient dans les champs ont été
exposés aux mines terrestres apportées là par la guerre.
Pour réduire l’incidence de l’exploitation par la mendicité, le ministère de la
Femme, de la Famille, du Développement social et de l’Entreprenariat féminin a
mis en œuvre un programme pour soutenir 48 écoles coraniques dont les maîtres ne
forcent pas leurs élèves à mendier. Le ministère de l’Éducation nationale a octroyé
des fonds à des écoles gérées par des institutions religieuses qui répondent aux
normes nationales en matière d’éducation. Au cours de l’année, 40 nouvelles
écoles primaires ont été ouvertes sur l’ensemble du pays ; 10 collèges ont été
également établis. Il s’agissait d’écoles bilingues qui dispensaient des cours en
français et en arabe. Ce programme a permis à des milliers d’enfants d’échapper à
la mendicité des rues et à l’exploitation. Le ministère de l’Éducation a également
œuvré à l’élaboration d’un programme laïc à l’usage des écoles coraniques. Les
écoles existantes ont continué à recevoir un financement, mais celui-ci était
31
insuffisant pour permettre l’ouverture d’écoles supplémentaires, même si le budget
du ministère de l’Enseignement préscolaire, de l’Enseignement primaire, de
l’Enseignement moyen Secondaire et des Langues nationales a augmenté ces trois
dernières années.
Voir également le rapport annuel du Département d’État sur la traite des personnes
à l’adresse suivante : www.state.gov/g/tip.
c. Interdiction du travail des enfants et âge minimum d’admission à l’emploi
La loi interdit de nombreuses formes d’exploitation du travail des enfants.
Toutefois, la loi prévoit des exceptions. Par exemple, elle peut autoriser un enfant
de 12 ans à travailler dans un environnement familial tant que cela reste
moralement acceptable, et elle autorise également tous les garçons de moins de 16
ans à travailler dans des mines et des carrières, pour y faire des « travaux légers ».
Etant donné la nature des dangers liés au travail dans les mines, des activités
considérées comme « des travaux légers » n’empêchent pas l’exposition aux
risques. Les règlements liés au travail des enfants fixent l’âge minimum d’emploi,
les heures et les conditions de travail et interdisent que les enfants exécutent des
travaux particulièrement dangereux.
L’âge minimal pour travailler est de 15 ans. Dans l’ensemble, le nombre d’heures
effectuées est de 40 heures par semaine ou 2080 par an. Les heures effectuées entre
22 heures et 5 heures du matin sont considérées comme travail de nuit et doivent
être rémunérées à un tarif plus élevé. Il existe un grand nombre de textes sur la
santé au travail et les réglementations en matière de sécurité au travail dans les
textes législatifs relatifs au travail. Les inspecteurs du ministère du Travail sont
chargés d’enquêter et de lancer des procédures judiciaires sur les affaires
impliquant le travail des enfants. Les inspecteurs peuvent se rendre dans n’importe
quelle institution pendant les heures de travail pour vérifier le respect des lois
applicables au travail et enquêter, et ils peuvent agir sur signalement des syndicats
ou de citoyens ordinaires.
La législation du travail interdisant le travail des enfants n’a pas du tout été
appliquée dans l’ensemble. Ainsi, le ministère du Travail a envoyé des inspecteurs
enquêter sur les lieux de travail dans le secteur formel. Toutefois, ces inspecteurs
n’ont pas reçu de formation pour traiter les problèmes liés au travail des enfants et
de nombreuses violations en matière de travail des enfants se produisent dans le
secteur informel, où aucune inspection n’a lieu. La Division du travail des enfants,
au sein du ministère du Travail, a été supprimée en mai. Les inspecteurs n’ont
32
entrepris aucune visite pour enquêter sur le travail des enfants en raison du manque
de financement adéquat et de compétences pour traiter les affaires liées au travail
des enfants. Il n’y avait pas de système spécifique mis en place pour rendre compte
des violations sur le travail des enfants, essentiellement pour cause de manque de
fonds au niveau de la Division du travail des enfants et du ministère du Travail. Le
ministère s’est plutôt appuyé sur les syndicats pour signaler les contrevenants.
Par l’intermédiaire de séminaires avec les responsables locaux, les ONG et la
société civile, le gouvernement a sensibilisé le public sur les dangers du travail des
enfants et de l’exploitation par la mendicité. Le gouvernement a également pris
part à un projet de l’OIT pour combattre le travail des enfants. Le gouvernement
était en train de mettre en œuvre le Plan sur le travail des enfants qui est axé sur
une meilleure gestion de cette problématique. Si cette sensibilisation a permis de
sensibiliser à la question du travail des enfants au sein des communautés locales,
cela n’a pas débouché sur d’autres résultats.
En août 2010, le ministère de la Justice a annoncé la création d’un bureau chargé
de lutter contre la maltraitance des femmes et des enfants. Cependant, le bureau n’a
reçu aucun financement pour l’année 2011 et a été supprimé en mai.
Le travail des enfants constituait un problème, notamment dans le secteur de
l’exploitation de l’or, et la plupart des incidents se sont produits dans le secteur
informel de l’économie où la législation sur le travail n’est pas appliquée. Les
pressions économiques et l’insuffisance de programmes de formation ont souvent
poussé les familles en milieu rural à privilégier le travail au détriment de
l’éducation de leurs enfants. Le travail des enfants était particulièrement courant
dans les régions de Tambacounda, Louga et Fatick. Le travail des enfants était
prévalent dans beaucoup de secteurs informels et familiaux tels que l’agriculture
(c’est à dire la culture du mil, du maïs et de l’arachide), la pêche, l’orpaillage, les
garages, les décharges publiques, les abattoirs, la production de sel, ainsi que les
tôleries et menuiseries. Il y a également eu des rapports faisant état d’enfants
travaillant dans des exploitations agricoles familiales ou comme bergers. Les
enfants travaillaient également comme domestiques, dans des ateliers de tailleurs,
dans des garages en tant que mécaniciens, dans des ateliers de tôlerie et de
menuiserie, ainsi que dans d’autres secteurs de l’économie informelle comme la
vente à l’étalage de fruits et légumes.
En août 2008 (dernière année pour laquelle de telles données étaient disponibles),
une enquête nationale sur le travail des enfants, publiée par l’Agence nationale de
la démographie et de la statistique, a mesuré les activités économiques des enfants
33
dans les 12 mois précédents. Selon l’étude, 1.378.724 des 3.759. 074 (37 pour
cent) des enfants du pays entre 5 et 17 ans travaillaient.
L’une des pires situations de travail des enfants existait dans le secteur des mines
et des carrières. Les enfants orpailleurs, la plupart âgés de 10 à 14 ans, travaillaient
environ huit heures par jour sans formation ni équipement de protection. Les
enfants passaient de longues heures dans des carrières à écraser des roches et à
porter de lourdes charges sans protection. Dans les deux cas, le travail des enfants
a entraîné de sérieux accidents et de longues maladies. L’ONG La Lumière a fait
état d’une augmentation du travail des enfants au cours de l’année dans les mines
d’or de la zone de Kédougou à cause de la hausse du prix de l’or.
Selon une enquête menée par les pouvoirs publics en 2007, 90 % des enfants de
Kaolack, Fatick et Ziguinchor exécutent des tâches dont les effets sont néfastes à
leur santé et leur éducation. L’étude a également trouvé que 75 % des filles étaient
chargées des corvées domestiques, ce qui poussait une bonne partie d’entre elles à
abandonner les études.
Voir également le rapport du département du Travail intitulé Findings on the Worst
Forms of Child Labor (Rapport sur les Pires formes de travail des enfants) à
l’adresse suivante : www.dol.gov/ilab/programs/ocft/PDF/2010TDA.pdf.
e. Conditions de travail acceptables
Le salaire minimum national était de 209 francs CFA (42 cents) de l’heure et 183
francs CFA (37 cents) pour les travailleurs agricoles. Dans ses discours de
campagne, le président Wade a placé le niveau de revenu considéré comme le seuil
de pauvreté à 100.000 francs CFA (200 dollars) par an. L’application du salaire
minimum est du ressort du ministère du Travail. Les syndicats ont également eu un
rôle de garde-fou et ont contribué à l’application effective du salaire minimum
dans le secteur formel. Les dispositions relatives au salaire minimum s’appliquent
également aux travailleurs étrangers et aux migrants.
Au niveau du secteur formel, la loi exige, pour la quasi-totalité des catégories, une
semaine de travail de 40 à 48 heures avec, au minimum, une période de repos de
24 heures, un mois de congé annuel, la participation à la sécurité sociale et aux
plans de retraite offerts par l’État, des normes de sûreté et d’autres mesures. Le
paiement des heures supplémentaires était exigé dans le secteur formel. La loi ne
couvre pas le secteur informel. Il existe des textes juridiques sur la santé et la
sécurité au travail et le gouvernement fixe ces normes. Il n’y a aucune protection
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juridique explicite des travailleurs qui portent plainte pour conditions de travail
dangereuses. Les travailleurs, y compris les étrangers ou les migrants, avaient en
principe le droit de se soustraire, sans porter préjudice à leur emploi, de situations
mettant en péril leur santé ou leur sécurité. Le ministère du Travail, par
l’intermédiaire de l’Inspection du travail, faisait appliquer les normes en matière de
travail. Le salaire minimum n’a pas été respecté dans le secteur informel, tout
particulièrement pour les travailleurs domestiques. L’application de la semaine
normale de travail a été irrégulière. Les inspecteurs du travail travaillaient dans de
très mauvaises conditions et ne disposaient pas de moyens de transport pour mener
à bien leur mission.
Les travailleurs ont rarement exercé leur droit théorique à se soustraire aux
situations qui mettaient en danger leur santé et leur sécurité, en raison des taux de
chômage très élevés et de la lenteur du système judiciaire.