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LES ENNEMIS D’INTERNET RAPPORT 2012

Rapport Ennemis d'Internet

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Rapport Ennemis d'Internet

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  • Les ennemis dinternet rAPPOrt 2012

  • 2LES ENNEMIS D INTERNET / 12 MARS 2012 / JOURNE MONDIALE CONTRE LA CYBER-CENSURE //////////////////////

    Carte mondiale de la Cyber-Censure..............3

    introduCtion gnrale...........................................................4

    pays ennemis dinternet

    ArAbie SAoudite...................................................................................................12bAhrein....................................................................................................................14blAruS...................................................................................................................16birmAnie...................................................................................................................18Chine........................................................................................................................20Core du nord.....................................................................................................24CubA.........................................................................................................................26irAn..........................................................................................................................28ouzbkiStAn...........................................................................................................32Syrie........................................................................................................................34turkmniStAn.......................................................................................................37VietnAm...................................................................................................................39

    pays sous surveillanCe

    AuStrAlie ..............................................................................................................41Core du Sud........................................................................................................43mirAtS ArAbeS uniS.........................................................................................45gypte......................................................................................................................46rythre.................................................................................................................48FrAnCe.....................................................................................................................50inde..........................................................................................................................54kAzAhkStAn...........................................................................................................57mAlAiSie..................................................................................................................60ruSSie.......................................................................................................................62Sri lAnkA................................................................................................................65thAlAnde...............................................................................................................67tuniSie......................................................................................................................69turquie....................................................................................................................71

  • 3LES ENNEMIS D INTERNET / 12 MARS 2012 / JOURNE MONDIALE CONTRE LA CYBER-CENSURE //////////////////////

    Ennemis d'InternetPays sous surveillance

    LA CARTE MONDIALE DE LA CYBER-CENSURE

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    Ce rapport, qui dresse la nouvelle liste 2012 des pays Ennemis dInternet et sous surveillance, est une actualisation du rapport publi le 12 mars 20111. Le prcdent rapport, publi en mars 2011, soulignait la cons-cration des rseaux sociaux et du rle du Web comme outil de mobilisation et de transmission dinformations dans le contexte des mouvements de soulvements populaires dans le monde arabe. Les mois qui ont suivi ont montr la surenchre de ri-postes menes par les rgimes rpressifs ce quils consid-raient comme des tentatives inadmissibles de dstabilisation. Les net-citoyens ont t, en 2011, au cur des changements politiques qui ont affect le monde arabe. Ils ont tent de tenir le blackout en chec mais en ont, en contrepartie, pay le prix fort. Paralllement, des pays rputs dmocratiques ont continu cder aux tentations scuritaires ou prendre des mesures dis-proportionnes pour protger le droit dauteur. Les internautes des pays dits libres ont appris se mobiliser pour conserver leurs acquis. La pression saccrot sur les intermdiaires tech-niques, encourags dans certains pays jouer un rle de police du Net. Des socits de surveillance deviennent les nouveaux mercenaires dune vritable course larmement en ligne. Les hacktivistes apportent leur expertise technique aux net-citoyens pris dans les tenailles des appareils rpressifs. Les diplomates entrent galement en jeu. La libert dinformation en ligne repr-sente plus que jamais un enjeu majeur de politique extrieure et intrieure.

    Quand les nouveaux mdias Continuent de repousser les limites de la Censure Les rseaux sociaux compliquent la tche des rgimes autori-taires qui tentent dtouffer toute information gnante. Sidi Bou-zid, Khaled Sad, etc. autant de pierres angulaires des rvolu-tions arabes, autant de sujets qui ont pu sortir au grand jour

    grce la mobilisation des net-citoyens. La rvolution des micro- blogs, lagrgation dopinions et lacclration de la diffusion de linformation quils induisent, associs aux tlphones portables de plus en plus utiliss pour du livestreaming, multiplient les possibilits de librer linformation de son carcan. Le mlange des genres entre journalisme et militantisme sest accentu dans des contextes extrmes comme celui de la Syrie, o de simples citoyens, rvolts par le massacre, se sont engags dans une rcolte dinformations, avec les moyens disposition, destina-tion des mdias internationaux, afin que soit connue lampleur de la rpression sanglante. Mme en Core du Nord, le royaume ermite, le blackout com-plet est remis en cause : les tlphones portables offrent aux habitants proches de la frontire chinoise la possibilit dtre relis au reste du monde. La contrebande de linformation bn-ficie de la permabilit de la frontire par laquelle transitent tl-phones, CD, DVD, et articles sur cls USB. Au Turkmnistan, lexplosion meurtrire dun dpt darmes Abadan, dans la banlieue dAchkhabat, en juillet 2011, a mar-qu le dbut dune guerre de linformation 2.0. Pour la premire fois, des net-citoyens sont parvenus briser le mur du silence2

    impos par le rgime en postant sur Internet de simples vidos ralises grce leurs tlphones portables3. Ils en ont ensuite pay le prix fort. La censure implacable en Arabie Saoudite na pu empcher le combat des femmes pour le droit de conduire ou de voter, de trouver un relais sur la Toile, attirer lattention de la communaut internationale, et trouver un certain cho lintrieur du pays. Les dnonciations de la corruption, des problmes environne-mentaux et de la misre sociale ont beaucoup aliment la Toile, de la lutte des paysans chinois du Wukan contre lexpropriation de leurs terres par des fonctionnaires peu scrupuleux la docu-mentation des fraudes lectorales en Russie ou au traitement de limpact catastrophique sur lenvironnement de lexploitation des mines de bauxite au Vietnam4.

    1 12mars.rsf.org/2011/fr/2 http://www.rferl.org/content/citizen_journalism_scores_breakthrough_ in_turkmenistan/24266428.html

    3 http://www.fergananews.com/news.php?id=17017&mode=snews4 http://blog.mondediplo.net/2009-07-03-Le-Vietnam-la-Chine- et-la-bauxite

    entre surveillanCe et filtrage, la brChe tnue des net-Citoyens

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    banalisation des Coupures dinternet et des tlCommuniCations Les rgimes rpressifs ont retenu la leon. Pour assurer la rus-site dun blackout, il ne suffit plus dcarter la presse, dintimider les tmoins et de bloquer quelques sites dinformation et dop-position. Une mthode bien plus efficace consiste imposer un blocus sur un territoire pour empcher larrive de tmoins gnants et la sortie de tout support numrique, ainsi qu couper les communications, en ayant recours des blocages de SMS, des suspensions temporaires ou cibles de laccs au Web ou aux services de tlphonie mobile. Lgypte avait montr la voie, fin fvrier, au plus fort des ma-nifestations, en coupant laccs Internet pendant cinq jours, une premire dans le pays. Dautres pays ont suivi cette voie, en priode dlections, de troubles ou mme en amont. La Rpublique dmocratique du Congo1, le Cameroun2 et le Kazahstan3 en sont quelques exemples. La Chine a mis en place une mthode bien prouve qui consiste suspendre les communications dans les villes ou les provinces problme, quand la situation lui chappe. Le Tibet4, le Xinjiang et la rgion de Mongolie intrieure en sont les pre-mires victimes. Mais la coupure dInternet constitue une solution drastique, qui peut handicaper les autorits elles-mmes et porter prjudice lconomie des pays concerns. Le ralentissement de la bande passante est une mthode plus sournoise, mais redoutablement efficace, car elle rend impossible, de fait, le tlchargement et lenvoi de photos et de vidos. LIran est pass matre en la matire. Les censeurs syriens jouent avec le niveau de la bande passante, les fluctuations de cette dernire tmoignant, de fait, du degr de rpression dans les zones affectes. Le Bahren offre lexemple dune rpression russie, avec le blackout de linformation rendu possible par un impressionnant arsenal de mesures de censure, la fois techniques, judiciaires et humaines.

    renforCement du filtrage Les plupart des rgimes qui censurent le Net ont, ds le dbut des rvolutions tunisienne et gyptienne, renforc le filtrage pour tenter de circonvenir toute vellit de propagation de ces mouvements dans leur pays. Dautres ont intgr le filtrage comme outil de gouvernance, utile pour tendre leur emprise

    sur le pouvoir. Les sites de livestreaming et les rseaux sociaux ont souvent t parmi les plus touchs. En Ouzbkistan, le rgime a bloqu les forums de discussions dans lesquels de simples citoyens discutaient des rvolutions arabes. Les mots jasmin et occupy, suivi du nom dune ville de Chine, ont t bloqus sur lInternet dans ce pays. Le Bla-rus, confront des manifestations de masse, a rendu le rseau social Vkontakte indisponible. Mme rflexe disproportionn ct kazakhe, la plate-forme Livejournal a t bloque dans son intgralit contre quelques sites jugs extrmistes. La Turquie a mis en place un systme de filtrage du Web qui, bien que dsormais facultatif, sapparente une forme de cen-sure masque. Le nouveau gouvernement thalandais est lanc, au nom du lse-majest, dans une spirale de blocages de sites et de conte-nus, dangereuse pour la libert dexpression. Le gouvernement se targue davoir bloqu en quelques mois plus de pages que les trois annes prcdentes. La vigilance reste de mise en Tunisie. Ammar 404, surnom du systme de filtrage et de surveillance du Web mis en place sous Ben Ali, pourrait renatre de ses cendres alors que la justice exa-mine la possible mise en place dun filtrage de sites pornogra-phiques. La Core du Sud, en rponse la propagande du Nord, a dci-d daugmenter le nombre de sites bloqus.

    inflation des retraits de Contenus, pressions sur les intermdiaires teChniQues Les censeurs tentent de plus en plus denrler les entreprises prives dans la surveillance et la censure en ligne. Certaines collaborent, dautres rsistent. Sous la pression des autorits, les sites de microblogging chinois comme Sina Weibo ont d se doter de milliers de mod-rateurs, et requirent dsormais de leurs utilisateurs de senre-gistrer sous leur vritable nom. Les hbergeurs font lobjet de pressions de plus en plus fortes afin deffectuer des retraits de contenus sous la forme de la notification-retrait, une mthode qui risque daboutir des abus, comme la soulign Frank La Rue, rapporteur spcial des Nations unies pour la libert dexpression. En Thalande, la responsable du site dinformation Prachata, Jiew, risque

    1 http://fr.rsf.org/rd-congo-levee-de-la-suspension-du-service- 28-12-2011,41596.html2 http://fr.globalvoicesonline.org/2011/03/10/60668/

    3 http://fr.rsf.org/kazakhstan-livree-a-la-repression-une- region-19-12-2011,41574.html4 http://fr.rsf.org/chine-le-tibet-coupe-du-reste-du-monde- 23-02-2012,41927.html

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    vingt ans de prison pour des commentaires taxs de lse-majes-t et quil lui est reproch de ne pas avoir retir suffisamment tt aprs notification. La pression sintensifie sur les intermdiaires techniques, que les autorits, en Inde par exemple, tentent de convaincre dassurer une pr-visualisation des contenus posts sur leurs plate-formes afin de retirer ceux jugs choquants ou susceptibles de provoquer des troubles intercommunautaires.

    le droit loubli, un danger pour la neutralit du net et la libert dexpression en ligne Les demandes de particuliers fondes sur un prtendu droit loubli numrique sont de plus en plus frquentes concernant les articles archivs sur Internet. La commissaire europenne Viviane Reding a suscit de nouvelles inquitudes en voquant, le 8 novembre 2011, un projet de directive destin permettre toute personne de solliciter le retrait, pour des motifs lgitimes, de donnes caractre personnel. Pourtant, un droit gnral loubli, consacr dans une loi, est difficilement conciliable avec la libert dexpression et dinformation sur Internet. Difficile mettre en uvre en pratique, il risque de mettre la charge des diteurs et hbergeurs une obligation impossible tenir sur la Toile : la disparition totale dun contenu. Une rflexion de fond doit tre mene pour dterminer si les dispositions actuelles re-latives la protection de la vie prive, aux dlits de presse, aux donnes personnelles et larbitrage du juge judiciaire ne sont pas suffisantes pour garantir les droits des individus.

    des taCtiQues de surveillanCe de plus en plus effiCaCes et intrusives Si le filtrage continue de progresser, cest surtout la surveillance qui se dveloppe. Les censeurs prfrent consulter lactivit des dissidents et de leurs contacts sur la Toile plutt que de les empcher dy accder. Les services de scurit ne demandent plus seulement un prisonnier interrog et tortur le nom de ses complices, mais son mot de passe Facebook, Skype, VKontakte, etc. Ce sc-nario sest reproduit en Iran, au Bahren, au Turkmnistan, ou encore en Syrie. Les dissidents tentent de trouver toutes sortes de parades. La parade de certains dissidents consiste crer de faux comptes ou donner ses codes daccs un proche

    pour quil prenne la main sur ses comptes en cas darrestation, et vite ainsi de mettre en danger ses contacts. La protection des sources des reporters et des rseaux de dis-sidents est lun des enjeux majeur de la lutte pour linformation. Reporters sans frontires a appel les journalistes trangers en reportage dans des pays sensibles prendre des prcau-tions particulires dans leurs communications, en fonction du contexte. Lors dun dpart en zone de guerre ou de conflit, le gilet pare-balles ne suffit plus, il faut se munir dun kit de survie numrique1, permettant le chiffrement des donnes, lanonymi-sation des communications et ventuellement le contournement de la censure. Du ct de la surveillance technique, des tentatives de hame-onnage des identifiants dutilisateurs de rseaux sociaux ont t signales en Syrie ou en Iran, ainsi que lutilisation de faux certificats de scurit. En Syrie, ces tentatives sont intervenues aprs la leve du blocage sur Facebook, qui na donc pas t dcide dans un esprit douverture, mais pour faciliter la sur-veillance. Priorit est galement donne la neutralisation des outils de chiffrement, danonymisation ou de contournement. LIran est dsormais capable de bloquer le https ou les ports utiliss par les VPN (rseaux privs virtuels). La Chine est en mesure de limiter le nombre dadresses IP capables de se connecter au mme moment au rseau international. La surveillance se renforce mesure que les rgimes rpressifs se fournissent auprs de socits spcialises en matriel et logiciels de filtrage et dcoute et de Deep Packet Inspection (DPI), toujours plus performants. Les SpyFiles publis par Wiki-Leaks sont une mine dinformations sur le sujet. Ces entreprises sont trs souvent occidentales. Elles bnficient dun march trs lucratif. Pour nen citer que quelques-unes, la firme am-ricaine BlueCoat a t pingle pour ses activits en Syrie, la socit franaise Amesys en Libye, et des poursuites ont t engages par lONG Arabic Network for Human Rights Informa-tion (ANHRI) contre Vodafone en gypte. Lentreprise italienne AreaSpa sest finalement retire de Syrie aprs une campagne internationale de dnonciation suite aux rvlations de sa colla-boration avec le rgime2. La question de la responsabilit sociale des entreprises est au cur des dbats. Les socits qui se rendent complices de violations des droits de lhomme doivent tre sanctionnes. Le Parlement europen a vot une rsolution3 en faveur du durcis-sement des rgles dexportation vers les pays qui ne respectent pas les droits de lhomme. Une proposition de loi examine par le Congrs amricain va galement dans ce sens.

    1 http://jhack.info/wiki/doku.php2 http://www.bloomberg.com/news/2011-11-09/syrian-monitoring- project-may-end-as-italy-firm-weighs-options.html

    3 http://www.europarl.europa.eu/news/fr/pressroom/content/2011092 7IPR27586/html/Contr%99ler-les-exportations-%88-double-usage

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    le rgne de la propagande La Core du Nord a port sa guerre de propagande contre son voisin du Sud sur le Net, en assurant sa prsence sur les r-seaux sociaux. La propagande cubaine ne cesse dattaquer les blogueurs critiques du rgime, accuss dtre des mercenaires au service de lEmpire amricain. La Chine a mis contribution les 50 cents, ces blogueurs pays pour diffuser les messages avaliss par le parti, suite aux troubles provoqus en Mongolie intrieure par le dcs dun leveur1. La cyberarme syrienne est passe matresse dans lart de polluer les murs Facebook des opposants et de noyer les com-mentaires critiques parmi une masse de louanges envers le r-gime de Bachar Al-Assad. Des comptes Twitter sont crs pour parasiter les informations2 fournies par le hashtag #Syria, en envoyant des centaines de tweets dont les mots-cls renvoient des rsultats sportifs ou des photos du pays. Le Bahren investit des millions pour soigner son image ltran-ger. Les autorits font leur possible pour que le Grand Prix de Formule 1 de Manama, qui aura lieu en avril 2012, donne lillu-sion dun retour la normale.

    CyberattaQues Ces cyberattaques sous la forme de dnis de services distri-bus (DDoS) se gnralise. Les gouvernements sont souvent derrire les tentatives de hacking de sites dinformation ou ind-pendants. Mme lrythre a t touche. Des sites dopposi-tion ont t rendus inaccessibles alors que lONU adoptait des sanctions contre le pays. Des sites sri-lankais en ont galement fait les frais. En Russie, la veille des lections lgislatives, une srie de cyberattaques coordonnes3 et darrestations de jour-nalistes et de blogueurs ont tent dtouffer les discussions poli-tiques qui ne peuvent se tenir librement que sur le Net. Durant les manifestations au Blarus, le fournisseur daccs BelTelecom a redirig les internautes cherchant se connecter au rseau social Vkontakte vers des sites contenant des logi-ciels malveillants. Chaque pays dispose dsormais, ct de son arme tradi-tionnelle, dune cyberarme, officielle ou non. Les cyberarmes syrienne et iranienne occupent le devant de la scne. Lanne

    2011 aura galement vu la monte en puissance de groupes de hackers comme Anonymous, qui, en rponse la cybercensure et la rpression, ont men des cyberattaques contre les rgimes tunisien, gyptien puis syrien.

    se dbarrasser des tmoins gnants 2011 aura t une anne particulirement meurtrire pour les net-citoyens, dune violence encore jamais gale depuis la g-nralisation de lusage du Net par les dissidents et dfenseurs des droits de lhomme. Plusieurs dentre eux ont perdu la vie au Bahren, au Mexique, en Inde et en Syrie. Des dizaines de cas restent probablement encore identifier et dautres viendront certainement alourdir le bilan, notamment en Syrie. Au Mexique, les cartels sen sont pris directement aux utilisa-teurs de rseaux sociaux. Trois net-citoyens et une journaliste ont ainsi t froidement abattus. Le corps dcapit dun internaute mexicain a t retrouv, le 9 novembre 2011, Nuevo Laredo. Surnomm Rascatripas (littralement le gratte-tripes) sur la Toile, linternaute contribuait activement au site de dnonciation du crime organis Nuevo Laredo en vivo, dont il tait le mod-rateur. Un message plac ct du cadavre de Rascatripas proclamait : Ceci mest arriv pour ne pas avoir compris que je ne dois pas publier des informations sur les rseaux sociaux. Le 9 avril 2011, au Bahren, le net-citoyen Zakariya Rashid Hassan est dcd en dtention4, sept jours aprs son arres-tation pour incitation la haine, publication de fausses nou-velles, promotion du sectarisme, et appel au renversement du rgime sur des forums en ligne. Au moins sept professionnels de linformation trangers et sy-riens avaient dj trouv la mort en Syrie fin fvrier 2012 en lien avec leurs activits. Des net-citoyens ont galement pay de leur vie la diffusion dinformations. Parmi eux Basil Al-Sayed5, Ferzat Jarban et Soleiman Saleh Abazaid.

    de rafles en Coups de filets De plus en plus nombreux, les net-citoyens ont aussi t de plus en plus exposs. Au moins 199 dentre eux ont t arrts en 2011 alors quils taient engags dans une action dinformation du public, soit une augmentation de 31% par rapport lanne prcdente.

    1 http://fr.rsf.org/chine-les-leaders-de-l-internet-chinois- 09-11-2011,41302.html2 http://advocacy.globalvoicesonline.org/2011/04/18/spam-bots- flooding-twitter-to-drown-info-about-syria-protests/3 http://fr.rsf.org/russie-le-debat-politique-perturbe-par- 05-12-2011,41488.html

    4 http://fr.rsf.org/bahrein-les-autorites-des-pays-en-proie-a- 11-04-2011,40004.html5 http://fr.rsf.org/syrie-un-second-journaliste-citoyen-tue- 30-12-2011,41608.html

  • 8LES ENNEMIS D INTERNET / 12 MARS 2012 / JOURNE MONDIALE CONTRE LA CYBER-CENSURE //////////////////////

    ce jour, au moins 120 net-citoyens sont emprisonns pour leurs activits dinformation en ligne. La Chine, suivie du Viet-nam et de lIran, sont nouveau, cette anne, les plus grandes prisons du monde pour les net-citoyens. Une vritable rafle1 sest produite le 16 fvrier 2012 au Centre syrien pour les mdias et la libert dexpression, comme au Turk-mnistan aprs les vnements dAbadan. LIran et le Vietnam ont trs souvent recours cette mthode. Le Vietnam sen est pris aux rseaux catholiques. La Chine arrte rgulirement net-citoyens et dissidents pour intimider leurs cercles dinfluence. Le prix Nobel de la Paix Liu Xiaobo est toujours derrire les bar-reaux. Lgypte a connu son premier prisonnier politique de lre post-Moubarak, le blogueur Maikel Nabil Sanad, condamn pour ses critiques de larme. Par ailleurs, les assignations rsidence et les fausses libra-tions se multiplient. La Chine en a fait sa spcialit. Le blogueur et dissident Hu Jia ou le militant des droits du peuple mongol Hada en ont fait les frais. Le Vietnam y a aussi recours.

    traitements inhumains, pressions et taCtiQues dloyales en tous genres De nombreux net-citoyens syriens et bahrenis ont t torturs en dtention. Les autorits iraniennes soutirent rgulirement des aveux aux dissidents sous la torture pour les diffuser en-suite la tlvision. En gypte, des blogueurs ont fait tat de traitements dgradants lors dinterrogatoires par les forces de lordre. Les UAE 5, ces cinq net-citoyens et militants emprisonns aux mirats arabes unis accuss de subversion en ligne, ont t, ainsi que leurs proches, dcrits dans les mdias miraties comme des tratres. Au Bahren, le clbre dissident Nabeel Rajab se fait rgulirement tran dans la boue par les mdias, quand il nest pas physiquement agress. Cuba, une vritable bataille range se droule entre les blogueurs pro-gouvernementaux et leurs vis--vis alternatifs, critiques du rgime. Ces derniers, et notamment Yoani Sanchez, ont t victimes de campagne dinjures et de diffamation dans les mdias dtat ou sur des sites de propagande extrieurs.

    Chanes de solidarit Des passerelles se sont cres entre blogosphres. Des ci-toyens du monde entier ont commenc relayer les appels solidarit, les images les plus choquantes, les informations les

    plus sidrantes. Global Voices a jou un rle important dans le dialogue entre communauts en ligne, ainsi que diverses ONG de dfense de la libert dexpression. Pour contrer des censeurs qui ont clairement amlior leur ex-pertise, des hacktivistes, ces hackers militants, ont apport une aide technique des net-citoyens vulnrables face la censure gnralise, pour les aider faire circuler linformation. La campagne autour du blogueur gyptien Maikel Nabil Sanad, ou de la Syrienne Razan Ghazzawi, ont clairement dpass les frontires. L#OpSyria, lance par Telecomix, a permis daider les Syriens transmettre des vidos de la rpression. Lanne 2011 a vu le dveloppement doutils de contournement de la censure ou du blocage du Net, comme Internet in a suitcase ou les Freedom Box. Les dfenseurs des liberts nu-mriques travaillent darrache-pied pour rpondre des outils de censure de plus en plus efficaces.

    Quand les diplomates entrent en jeu La libert dexpression sur Internet nest plus le domaine rserv des seuls dissidents, geeks et censeurs. Les diplomates leur ont embot le pas. Les dclarations et textes communs dor-ganisation internationales et de coalition de pays sur la libert dInternet se multiplient, du rapport de Frank La Rue, rapporteur spcial pour la libert dexpression des Nations unies, qui, en juin 2011, reconnat laccs Internet comme un droit fonda-mental, larrt de la Cour europenne de Justice condamnant le filtrage et ses effets pervers sur la libert dexpression. La Haut-commissaire des Nations unies aux droits de lhomme, Navi Pillay, a pour sa part dnonc les restrictions dInternet dans certains pays et les arrestations de blogueurs, lors dune runion du Conseil des droits de lhomme, fin fvrier 2012, tout en soulignant : Internet a transform les mouvements des droits de lhomme. Les tats nont plus le monopole de linformation. La secrtaire dtat amricaine Hilary Clinton a appel lOrga-nisation pour la scurit et la coopration en Europe (OSCE) adopter une dclaration garantissant les liberts en ligne, estimant que les droits exercs dans le cyberespace mritent autant de protection que ceux exercs dans lespace rel. De leur ct, la Chine, la Russie, le Tadjikistan et lOuzbkistan ont dfendu, aux Nations unies, le principe dun code de bonne conduite sur Internet. Une proposition qui vise, en fait, lgiti-mer la censure.

    1 http://fr.rsf.org/syrie-liberation-de-six-militantes-du-16-02-2012,41895.html

  • 9LES ENNEMIS D INTERNET / 12 MARS 2012 / JOURNE MONDIALE CONTRE LA CYBER-CENSURE //////////////////////

    le bilan peu glorieux de Certaines dmoCraties Les pratiques des dmocraties sont loin dtre vertueuses. La libert de circulation de linformation en ligne ne fait parfois pas le poids face la scurit intrieure, la lutte contre le terrorisme ou le cybercrime, ou encore la protection de la proprit intel-lectuelle. La surveillance du Net sintensifie en Inde depuis les attentats de Bombay en 2008. La Russie tend caractriser comme extrmistes des sites tout simplement critiques du Kremlin pour mieux les fermer. Sous couvert de la lutte lgitime contre la pdophilie, le Canada a adopt une loi liberticide pour le Net1. Le Royaume-Uni, dont le Digital Rights Bill, destin protger le droit dauteur, a t pingl par Frank La Rue, a connu une p-riode difficile pendant les meutes du mois daot 2011. La mise disposition, par RIM, le fabricant de BlackBerry, des donnes personnelles de certains de ses utilisateurs la police, sans ordre judiciaire pralable, constitue un prcdent inquitant. Malgr les condamnations internationales, et le fait que ses lois sont dpasses, la France continue dappliquer la Loppsi, qui met en place un filtrage administratif du Web et la loi Hadopi, qui prvoit la coupure de laccs Internet pour lutter contre le tlchargement illgal. Des dcrets dapplications dautres lois montrent que le rflexe des autorits est de recourir au filtrage. LAustralie na toujours pas renonc son systme de filtrage national, mme si les soutiens srodent et que le type de conte-nus concern pourrait tre restreint. Le discours des officiels amricains sur limportance de la lutte contre la cybercensure et leur financement doutils de contour-nement de la censure est contredit par le traitement rserv WikiLeaks (lire le rapport de RSF sur les tats-unis et Internet2). Le blocage de ses sources de financement notamment Visa et MasterCard, a handicap le fonctionnement du site. Bradley Manning, soupconn dtre lun des informateurs de WikiLeaks, a t dtenu dans des conditions dplorables pendant plu-sieurs mois. Julien Assange, le fondateur de WikiLeaks, est, lui, sous le coup dune inculpation secrte que Reporters sans frontires demande aux autorits amricaines de clarifier.

    la raCtion des internautes et Citoyens du monde libre Les internautes des pays occidentaux ont fait leurs armes sur les mouvements Occupy Wall Street. Ils ont t encore plus nom-breux descendre dans la rue pour dnoncer les projets de loi amricains liberticides SOPA et PIPA3, qui sacrifiaient la libert

    dexpression en ligne la protection du droit dauteur. Lopra-tion Stop SOPA et le blackout mis en place pendant 24 heures par de nombreux sites, dont Wikipedia, ont permis de mobiliser comme jamais les internautes du monde entier, potentiellement affects par ces lois. Cette mobilisation a rebondi et permis une nouvelle vague de mobilisation contre le trait anti-contrefaon ACTA, qui jusquici laissait le grand public relativement indiffrent. Les net-citoyens de tous bords ont ralis que ces textes internationaux pou-vaient avoir des incidences sur leurs activits quotidiennes. Le fer de lance de la mobilisation a t lEurope de lEst. Plu-sieurs gouvernements ont recul et suspendu la ratification. La rsistance lACTA na jamais t aussi forte et le trait pourrait connatre bientt ses derniers jours. La vigilance doit maintenant rester de mise. La prochaine cible des internautes pourrait tre la directive europenne anti-partage Ipred4 qui pourrait poten-tiellement mettre en place un filtrage massif du Web. Un coup de plus port la neutralit du Net.

    la souverainet dinternet et le morCellement du Web La souverainet dInternet est une notion qui fait de plus en plus de chemin dans les esprits des dirigeants de pays plus ou moins rpressifs. La plateforme nationale instaure en Birmanie en 2010 a fait des mules. Mahmoud Ahmadinejad, fidle sa politique nationaliste, a annonc plusieurs reprises en 2011 le lancement dun Internet national, avec son propre moteur de recherche et service de messagerie. Quitte mettre en place deux formes daccs diffrents, lune pour les autorits, lautre pour le reste de la population, comme le permet par exemple aujourdhui la structure de lInternet birman. Le Blarus impose dsormais aux socits commerciales denregistrer leurs sites web dans le pays. Les sites dinformation ne semblent pas concerns. Pour le moment. Dans les faits, certains pays, comme la Core du Nord, le Turk-mnistan, lOuzbekistan ou Cuba, mais aussi lIran, censurent si bien laccs Internet quils cantonnent leur population des Intranets locaux sans commune mesure avec la Toile internatio-nale. La dcision de Twitter, notamment, dappliquer une cen-sure golocalise confirme cette tendance au repli sur des Web nationaux. En 2011, la partition du Web sest renforce. Les internautes ac-cdent des informations diffrentes en fonction de leur lieu de connexion. La sgrgation digitale se rpand. La solidarit entre dfenseurs dun Internet libre et accessible tous est plus que jamais vitale pour btir ou prserver des passerelles entre les net-citoyens et faire en sorte que linformation continue circuler.

    1 http://fr.rsf.org/canada-projet-de-loi-c-30-sur-l-acces- 21-02-2012,41913.html 2 http://fr.rsf.org/etats-unis-la-liberte-d-expression-sur- 02-11-2011,41323.html

    3 http://fr.rsf.org/etats-unis-reporters-sans-frontieres-ferme- 17-01-2012,41696.html4 http://www.laquadrature.net/fr/directive-anti-partage-ipred

  • 10LES ENNEMIS D INTERNET / 12 MARS 2012 / JOURNE MONDIALE CONTRE LA CYBER-CENSURE //////////////////////

    Deux pays, le Bahren et le Blarus, passent de la catgorie pays sous surveillance celle des Ennemis dInternet. Le Venezuela et la Libye quittent la liste des pays sous surveillance, lInde et le Kazakhstan y font leur entre.

    la liste des ennemis dinternet sallongeLe Bahren et le Blarus rejoignent lArabie Saoudite, la Birma-nie, la Chine, la Core du Nord, Cuba, lIran, lOuzbkistan, la Syrie, le Turkmnistan et le Vietnam, dans la liste des Ennemis dInternet. Ils conjuguent souvent problme daccs, filtrage s-vre, traque des cyberdissidents et propagande en ligne. LIran et la Chine ont particulirement renforc leurs capacits tech-niques en 2011 et la Chine accentue sa pression sur les acteurs privs du Net, afin de les mettre son service. LIran a annonc le lancement dun Internet national. LIran et le Vietnam ont lanc de nouvelles vagues darrestations, tandis que le massacre en Syrie touche les net-citoyens de plein fouet et permet au rgime, avec laide iranienne, de perfectionner sa matrise de la surveil-lance de la Toile. Le Turkmnistan a connu sa premire guerre de linformation 2.0, tandis que la Core du Nord, qui dveloppe sa prsence en ligne des fins de propagande, est confronte la croissance de la contrebande du matriel de communica-tions, la frontire chinoise. Cuba, blogueurs critiques et pro-gouvernementaux saffrontent en ligne. LArabie Saoudite conti-nue dappliquer une censure implacable, touffant la couverture dune rvolte provinciale. LOuzbkistan a pris des mesures pr-ventives pour empcher que UzNet, du nom donn lInternet ouzbke, soit un lieu de dbat sur les printemps arabes. Une lueur despoir : la situation samliore en Birmanie, o la junte a permis la libration de journalistes et de blogueurs et le dblo-cage de sites dinformation, mais il reste encore se dbarras-ser des outils, notamment lgislatifs et techniques, de contrle et de surveillance de la Toile.

    Le Bahren offre lexemple dune rpression russie grce au blackout de linformation rendu possible par un impressionnant arsenal de mesures rpressives : mise lcart des mdias tran-gers ; harclement des dfenseurs des droits de lhomme ; arres-tations de blogueurs et net-citoyens (dont lun est mort en dten-tion) ; poursuites judiciaires et campagne de diffamation contre des militants de la libert dexpression ; perturbations des com-munications, notamment pendant les grandes manifestations.

    Au Blarus, mesure que le pays senferre dans lisolement poli-tique et le marasme conomique, le rgime du prsident Lou-kachenko tente de placer le Web sous coupe rgle. Internet, espace de mobilisation et dinformation, a subi de plein fouet la violente raction des autorits la rvolution par les mdias sociaux. La liste noire des sites bloqus sest allonge, Internet a t partiellement bloqu au cours des protestations silen-cieuses. Des internautes et blogueurs ont t arrts, dautres invits par la police des conversations prventives afin de les inciter renoncer manifester ou couvrir les manifestations. Le gouvernement a, dautre part, utilis Twitter pour envoyer des messages dintimidation aux manifestants ou relay les visi-teurs du rseau social Vkontakte vers des sites contenant des logiciels malveillants. Enfin, la loi n317-31, entre en vigueur le 6 janvier 2012 au Blarus, a entrin la surveillance du Net2 et renforc le dispositif de contrle du Web au Blarus, en y ajou-tant un arsenal rpressif.

    du mouvement dans la liste des pays sous surveillanCeFigurent toujours dans la liste des pays sous surveillance lAustralie, dont les autorits nont pas lintention de renoncer un dangereux systme de filtrage du Net ; la Core du Sud, qui renforce la censure de la propagande de son voisin du Nord et conserve un arsenal lgislatif rpressif ; les mirats arabes unis, o la surveillance samplifie en raction aux soulvements populaires dans le monde, par esprit de prvention ; lgypte, o les autorits nont tir aucune leon de la rvolution et ont renou avec des pratiques passes en sen prenant directement aux blogueurs les plus critiques ; lrythre, rgime policier qui maintient ses citoyens lcart du Web et sinquite de la nou-velle mobilisation de sa diaspora sur le Web et dans les rues du monde entier ; la France, qui poursuit sa politique de lutte contre le tlchargement illgal via la risposte gradue, et o le recours un filtrage administratif du Web se banalise ; la Ma-laisie, o les blogueurs, plus crdibles que les mdias tradition-nels, sont maintenus sous pression lapproche des lections gnrales ; la Russie, qui a eu recours des cyberattaques et des arrestations de blogueurs et net-citoyens pour empcher un vritable dbat politique de se drouler en ligne, en priode lectorale ; le Sri Lanka, o les journalistes et mdias en ligne continuent dtre victimes de violences et de blocages ; la Tha-lande, o le nouveau gouvernement condamne des blogueurs

    1 http://pravo.by/main.aspx?guid=713932 http://fr.rsf.org/belarus-internet-belarusse-les-autorites- 05-01-2012,41625.html

    la nouvelle liste 2012 des ennemis dinternet

  • 11LES ENNEMIS D INTERNET / 12 MARS 2012 / JOURNE MONDIALE CONTRE LA CYBER-CENSURE //////////////////////

    de la prison et renforce le filtrage au nom du crime de lse-majest ; la Tunisie, o, loin dtre acquise, la libert dexpres-sion demeure fragile et toute vllit de filtrer Internet na pas disparu ; la Turquie, o plusieurs milliers de sites restent inac-cessibles, les autorits ont dploy des initiatives inquitantes autour du filtrage, et les poursuites judiciaires contre des net-citoyens et journalistes en ligne continuent.

    le venezuela et la libye Quittent la liste des pays sous surveillanCeEn Libye, les dfis restent nombreux mais la disparition du colo-nel Kadhafi et la chute de son rgime ont mis fin une re de censure. Avant sa chute, lex-prdateur de la libert de la presse avait tent de mettre en place un blackout de linformation, en coupant laccs au Net.

    Au Venezuela, laccs au Web reste libre. Lautocensure est certes difficile valuer, mais ladoption, en 2011, de lgisla-tions potentiellement liberticides pour le Net na pour le moment pas t suivie deffet particulirement nfaste. Reporters sans frontires reste cependant vigilante, alors que les relations entre le pouvoir et les mdias critiques sont tendues.

    linde et le KazaKhstan Depuis les attentats de Bombay en 2008, les autorits indiennes ont renforc leur surveillance du Web et la pression sur les inter-mdiaires techniques, tout en rejetant publiquement les accu-sations de censure. La politique de scurit nationale de la plus grande dmocratie du monde fragilise la libert dexpression en ligne et la protection des donnes personnelles des internautes.

    Le Kazakhstan, qui se veut un modle rgional aprs avoir as-sum la prsidence tournante de lOrganisation pour la scurit et la coopration en Europe (OSCE) en 2010, semble mettre de ct ses belles promesses pour sengager rsolument sur le chemin de la cybercensure. En 2011, un mouvement social indit prolong par une violente meute, une vague dattentats et les ennuis de sant du chef de ltat ont contribu crisper les autorits encore davantage et renforcer le contrle de lin-formation, notamment en ligne : blocage de sites dinformation, coupure des communications dans la rgion autour de Janao-zen au moment de troubles, nouvelles rgulations liberticides pour le Net.

    la thalande et la birmanie aux portes des ennemis dinternetLa Thalande, si elle continue cette pente de la surenchre du fil-trage et de condamnations de net-citoyens au nom du crime de lse-majest, pourrait rejoindre le clan des pays les plus liberti-cides envers le Web.

    linverse, la Birmanie pourrait prochainement quitter la liste des Ennemis dInternet si elle prend les mesures ncessaires. Le pays est engag dans une priode douverture encoura-geante, qui sest caractrise par la libration de journalistes et de blogueurs et la leve du blocage de sites dinformations. Il doit dsormais concrtiser les rformes, abandonner compl-tement la censure, librer les journalistes et blogueurs toujours dtenus, dmanteler lappareil de surveillance dvelopp autour de la plate-forme nationale, et abroger lElectronic Act.

    autres sujets dinQuitudesDautres pays ont emprisonn des net-citoyens ou assur une forme de censure du Net. Mme sils ne figurent pas sur ces listes, Reporters sans frontires reste vigilante quant la situa-tion de la libert dinformation en ligne, notamment dans des pays comme lAzerbadjan, le Maroc, le Tadjikistan.

    lheure o nous bouclons ce rapport, le Pakistan a lanc, le 2 mars 2012, un appel doffres1 destin au dploiement dun systme national de filtrage et blocage du Net2 particulirement inquitant. Reporters sans frontires a demand aux autorits dabandonner un projet aussi liberticide, qui crerait une Grande muraille lectronique. Dans le cas contraire, le Pakistan pourrait faire son entre dans le rapport 2013 des Ennemis dInternet.

    1 http://ictrdf.org.pk/RFP-%20URL%20Filtering%20%26% 20Blocking.pdf

    2 http://fr.rsf.org/pakistan-le-gouvernement-cherche-a-mettre- 02-03-2012,41975.html

  • 12LES ENNEMIS D INTERNET / 12 MARS 2012 / JOURNE MONDIALE CONTRE LA CYBER-CENSURE //////////////////////

    arabie saouditepays ENNEMI dINtErNEtEn 2011, le rgime a tout fait pour dissuader la population dtre informe des soulvements populaires dans les autres pays arabes. Inflexible face au bouillonnement du Web, il sest ap-pliqu verrouiller encore davantage Internet afin de limiter la circulation de linformation et dtouffer toute revendication poli-tique et sociale.

    Censure implaCableNe tolrant aucune critique, le gouvernement applique depuis plusieurs annes une censure implacable, sous la forme dun systme de filtrage tendu, assorti de rgulations liberticides1, et dune surveillance en ligne gnralise (lire le chapitre Arabie Saoudite2 du rapport 2011 des Ennemis dInternet).

    Les autorits ont eu recours au blocage de sites, crs dans le sillage des manifestations en Tunisie et en gypte, qui relaient les revendications des manifestants, comme Dawlaty.info3 et http://www.saudireform.com4. Une ptition5 a circul en ligne pour rclamer directement au roi des rformes politiques, reprise sur Twitter grce au hashtag #saudimataleb. Malgr la censure, elle a t signe par plusieurs centaines de personnes6, des militants, des crivains mais aussi des universitaires.

    Les forums et les rseaux sociaux ont fait lobjet dune surveil-lance renforce de la part des autorits, anticipant des manifes-tations7 organises dans plusieurs villes du royaume, le 11 mars 2011, renomm Jour de la Colre. La page Facebook Revo-lutionary nostalgia, cho des appels aux rformes, a rejoint la longue liste des URL rendues inaccessibles dans le pays. Le site de lONG Amnesty International a t bloqu suite la pu-blication dun projet de loi antiterroriste destin rprimer plus durement les critiques8 de la famille royale.

    tentative de blaCKout sur les troubles dans lest du paysLes autorits ont tent dimposer un vritable blackout sur les manifestations dans le gouvernorat dAl-Qatif, lest du pays, majorit chiite. Elles ont agit le spectre de troubles confessionnels pour justifier la rpression. Plusieurs manifes-tants ont t tus par balle. Les journalistes trangers, pour-tant munis de visa, ont t interpells alors quils tentaient de couvrir les manifestations dans la ville de Houfouf, toujours lest. Ce sont les net-citoyens qui ont diffus des informations sur ces vnements en ligne9, parfois leurs risques et prils. Connus pour leurs activits sur la Toile, les blogueurs Mustafa Al-Mubarak et Hussein Al-Hashim ont t arrts en avril 2011 et leurs ordinateurs confisqus. Ils ont t librs par la suite. En revanche, lcrivain Nazir Al-Majid qui avait publi, en avril, un article intitul Je proteste, donc je suis un tre humain sur le site dinformations Rashid.com, est toujours emprisonn. Tout comme Fadil Al-Manasef et Hussein Al-Youssef, ainsi que lcrivain et rformateur Sheikh Mekhlef bin Dahham Al-Shammari10. Dtenu depuis juin 2010, il pourrait tre poursuivi pour terrorisme11. Son tat de sant sest considrablement dgrad.

    viter tout risQue de dstabilisation soCialeDes mesures dexception ont t prises pour viter tout risque de dstabilisation sociale dans un contexte rgional agit et ce, paralllement aux promesses faites par le roi, en mars 2011, daccorder des milliards de dollars de subvention pour amlio-rer les conditions de travail et de logement des Saoudiens, ainsi que leur couverture sant. Trois journalistes dune tlvision en ligne ont t arrts en octobre 201112 et dtenus pendant plu-sieurs jours la suite de la diffusion, dans lmission Malub Aleyna, dun sujet sur les conditions de vie des plus dmu-nis dans la capitale saoudienne. La vido13 a t vue plus de 500 000 fois en ligne. Le site Internet de Radio Nederland a t bloqu14 suite la publication dun article traitant de la maltrai-tance des immigrs en Arabie Saoudite.

    1 http://fr.rsf.org/arabie-saoudite-nouvelles-regulations- liberticides-08-01-2011,39244.html2 http://fr.rsf.org/internet-enemie-arabie-saoudite,39703.html3 http://www.37dc.net/vb/37dc-t82713.html4 http://www.saudireform.com/5 http://ar-ar.facebook.com/dawlaty6 http://fr.globalvoicesonline.org/2011/03/07/60232/7 https://www.youtube.com/watch?v=eqydZqvgLdE&feature=player_ embedded8 http://fr.globalvoicesonline.org/2011/07/27/74989/

    9 http://globalvoicesonline.org/2011/12/05/saudi-arabia-netizens- turn-to-online-activism-to-draw-attention-to-qatif-protests/10 http://fr.rsf.org/arabie-saoudite-un-defenseur-des-droits-de- l-homme-22-07-2010,37999.html11 http://abna.ir/data.asp?lang=3&id=23945012 http://fr.rsf.org/arabie-saoudite-trois-journalistes-d-une- 31-10-2011,41250.html13 http://www.youtube.com/watch?v=SlSBqgW5xx0&feature=player_ embedded14 http://www.rnw.nl/afrique/article/censure-les-saoudiens- priv%C3%A9s-de-radio-nederland

  • 13LES ENNEMIS D INTERNET / 12 MARS 2012 / JOURNE MONDIALE CONTRE LA CYBER-CENSURE //////////////////////

    Preuve de limplacable intolrance des autorits lgard de la libert dexpression : le journaliste Hamza Kashgari est empri-sonn et poursuivi pour avoir partag une opinion personnelle en ligne1. Il risque la peine de mort pour des tweets jugs blas-phmatoires par les autorits.

    Ces derniers mois, la bataille pour les droits des femmes sest joue en grande partie en ligne, seul espace dinformation et de mobilisation sur ces problmatiques. De la campagne Women2Drive pour le droit des femmes conduire, lance sur Facebook2, Twitter3 et YouTube4 (lune des organisatrices a t arrte pour stre filme en train de conduire5), la campagne Baladi6 pour le droit de vote des femmes. Cette dernire sest solde par une victoire : lobtention du droit de vote des femmes aux lections de 2015, dautant plus cruciale quelle intervient dans un contexte marqu par un recul gnral des liberts.

    1 http://fr.rsf.org/arabie-saoudite-un-journaliste-poursuivi- pour-des-23-02-2012,41917.html2 https://www.facebook.com/events/194855947226879/3 https://twitter.com/#!/search?q=%23Women2Drive4 http://www.youtube.com/user/SaudiWomen2Drive?ob=05 http://www.youtube.com/watch?v=sowNSH_W2r0&feature=player_ embedded6 https://www.facebook.com/home.php?sk=group_126901933994463

  • 14LES ENNEMIS D INTERNET / 12 MARS 2012 / JOURNE MONDIALE CONTRE LA CYBER-CENSURE //////////////////////

    bahrenpays ENNEMI dINtErNEtLe Bahren offre lexemple dune rpression russie grce au blackout de linformation rendu possible par un impressionnant arsenal de mesures rpressives : mise lcart des mdias trangers ; harclement des dfenseurs des droits de lhomme ; arrestations de blogueurs et net-citoyens (dont lun est mort en dtention) ; poursuites judiciaires et campagne de diffamation contre des militants de la libert dexpression.

    plus de filtrage en rponse aux troubles politiQuesUn filtrage cibl est de fait exerc dans le pays depuis plu-sieurs annes, visant les contenus politiques et religieux (lire le chapitre Bahren1 du rapport 2011 sur les Ennemis dInternet). Depuis le 14 fvrier 2011, date du dbut des manifestations pro-dmocratiques, la censure sest largie tous les sujets lis aux contestations populaires qui agitent le monde arabe.

    Selon la socit Arbor Networks, la mi-fvrier 2011, le trafic vers et depuis le Bahren aurait diminu de 20%2, en compa-raison des trois semaines prcdentes, ce qui est rvlateur dune augmentation du filtrage3 en rponse aux vnements dans le pays. LInternet haut dbit a t ralenti en vue dentraver le tlchargement de vidos et la diffusion en direct dimages des manifestations et de la rpression. Dans le collimateur des autorits, des comptes de plateformes de streaming comme Bambuser et les rseaux sociaux. Des pages YouTube ou Fa-cebook contenant des vidos sur les vnements ont t blo-ques. Quelques mois plus tard, ctait au tour de PalTalk, un service de discussion en ligne par chat, audio et vido, dont le chatroom communautaire, Bahrain Nation4, tait utilis par les opposants pour communiquer. Le site twitcam.livestream.com5, qui permet aux internautes de diffuser en temps rel de linfor-mation sur Twitter, a lui aussi t rendu inaccessible.

    la veille du premier anniversaire du soulvement au Bahren, en fvrier 2012, les autorits ont lanc une nouvelle vague de blocages de sites dinformation indpendants6, et notamment

    des sites de streaming, couple un nouveau ralentissement de la bande passante. Le site Live973.info7, qui diffusait en direct des images dune manifestation de groupes de lopposition, a t bloqu, ainsi que la page Wefaq live du site de strea-ming audio Mixlr.com. Lapplication iphone/ipad app du site Live Station8, lui-mme bloqu, a t rendue inaccessible depuis le Bahren. Elle permet de diffuser des chanes de tlvision, telles que Lualua TV, brouille depuis son lancement le 17 juillet 2011. Le 11 fvrier dernier, le site Witnessbahrain.org9, qui dnonce les exactions, a t bloqu et ses militants arrts. Les quelques dblocages, dbut 2012, des sites de socits politiques enre-gistres10, Aldemokrati.org11, Alwefaq.org12 et Amal-islami.net13, ne sont que de la poudre aux yeux.

    La surveillance sest galement renforce et gnralise aux militants des droits de lhomme et leurs proches. Lentreprise Nokia Siemens Network (NSN) a t accuse davoir fourni des donnes prives dinternautes aux autorits14.

    vagues darrestations, dCs en dtention et parodie de justiCeAux mesures techniques se sont greffes les arrestations de net-citoyens et de cyberdissidents15, qui se sont multiplies depuis fvrier 2011. Le ministre de lIntrieur a, en septembre 2011, pr-venu que quiconque postant des messages en ligne appelant manifester ou commettre des actes de dissidence pourrait finir en prison. Il a tenu parole. Parmi les net-citoyens arrts puis relchs ces derniers mois : les blogueurs Abbas Al-Murshid, Mohamed Al-Maskati16 et Ali Omid, ainsi que les administra-teurs et modrateurs de forums Fadel Al-Marzouk, Hossein Abdalsjad Abdul Hossein Al-Abbas, Jaffar Abdalsjad Abdul Hossein Al-Abbas, Hamza Ahmed Youssef Al-Dairi, Ahmed Youssef Al-Dairi, Fadhel Abdulla Ali Al-Marzooq, Hani Mus-lim Mohamed Al-Taif, et Ali Hassan Salman Al-Satrawi. ga-lement sur la liste des net-citoyens arrts, Hussein Ali Makki, administrateur des pages Facebook et Twitter de Rasad News, une importante source dinformations sur les violations des droits de lhomme au Bahren, arrt le 9 juin 2011. Ainsi que la blogueuse et activiste Zainab Al-Khawaja17 (@angryarabiya18). Le blogueur19 et militant des droits de lhomme, Sayid Yousif Al-Muhafdah, est galement port disparu depuis le 19 mars.

    1 http://fr.rsf.org/surveillance-bahrein,39708.html2 http://www.computerworld.com/s/article/9210099/Bahrain_clamps_ down_on_Web_traffic_as_violence_escalates3 http://www.bahrainrights.org/en/node/41014 http://bahrainmirror.com/5 http://fr.rsf.org/bahrein-la-couverture-des-revolutions- 01-09-2011,40885.html6 http://fr.rsf.org/bahrein-a-la-veille-du-premier-10-02-2012,41836.html7 http://live973.info/live.php?ch=18 http://www.livestation.com/9 http://witnessbahrain.org/

    10 http://www.bahrainrights.org/en/node/341611 http://www.aldemokrati.org/12 http://alwefaq.org/13 http://amal-islami.net/14 http://www.bloomberg.com/news/2011-08-22/torture-in-bahrain- becomes-routine-with-help-from-nokia-siemens-networking.html15 http://fr.rsf.org/bahrein-une-inquietante-vague-de-30-06- 2011,40555.html16https://twitter.com/#!/MohdMaskati17 http://www.youtube.com/watch?v=XOQgvw7TGjk&sns=fb18 https://twitter.com/#!/angryarabiya19 http://saidyousif.blogspot.com/

  • 15LES ENNEMIS D INTERNET / 12 MARS 2012 / JOURNE MONDIALE CONTRE LA CYBER-CENSURE //////////////////////

    Le 22 juin 2011, 21 militants des droits de lhomme et membres de lopposition ont t condamns, par un tribunal militaire, de lourdes peines de prison1, confirmes le 27 septembre par la justice, lissue dun procs collectif cens faire exemple et mar-quer les esprits. Parmi eux, le blogueur Abduljalil Al-Singace, directeur du bureau des droits de lhomme du mouvement Al-Haq, a t condamn la prison perptuit. Ali Abdulemam, blogueur rput, considr comme lun des pionniers dInternet dans le pays, a t condamn par contumace quinze ans de prison ferme.

    Une srie de pressions et dagressions contre des journalistes, blogueurs et activistes a contribu renforcer lautocensure. Fait anecdotique mais rvlateur du climat actuel : plusieurs dizaines dtudiants ont t expulss dune grande cole pour un like sur Facebook2. Plus grave, une campagne dintimidation3 a t mene contre des blogueurs et militants des droits de lhomme bahrenis. Leurs photos ont circul sur Internet avec la men-tion tratres la patrie. Nabeel Rajab, le directeur du Bahrain Center for Human Rights4, est en premire ligne. Poursuivi, agress plusieurs reprises, subissant dintenses pressions, il continue de dnoncer, auprs des mdias internationaux, la rpression qui svit dans le pays.

    Lun des cyberdissidents y a laiss la vie. Le 9 avril 2011, le net-citoyen Zakariya Rashid Hassan est dcd en dtention5, sept jours aprs son arrestation pour incitation la haine, pu-blication de fausses nouvelles, promotion du sectarisme, et appel au renversement du rgime sur des forums en ligne. Les autorits avaient dabord ni leurs responsabilits, voquant une drpanocytose. Depuis, un procs sest ouvert, dbut janvier 20126. Deux officiers accuss de lavoir battu mort risquent jusqu sept ans de prison.

    Cynisme des autorits et de la Communaut internationaleLa gestion de cette crise montre le profond cynisme des auto-rits, qui appellent au dialogue national, prtendent accepter les conclusions critiques dune commission denqute indpen-dante fin novembre 2011, mais continuent rprimer les mani-festations quasi quotidiennes qui agitent le royaume. Reporters sans frontires a exhort la communaut internationale ra-gir, en envoyant notamment un rapporteur spcial des Nations unies au Bahren.

    Les sommes dpenses par le royaume pour soigner son image et la complaisance des tats-Unis lgard ce pays dans lequel est base leur principale base militaire au Moyen-Orient ont contribu ce que les vnements soient passs sous silence. Le Grand Prix de Formule 1 du Bahren7, qui doit se tenir en avril 2012, devrait tre le point dorgue de la campagne de commu-nication offensive lance par les autorits. Une occasion en or pour le rgime de redorer son blason et de faire croire un illu-soire retour la normale.

    1 http://fr.rsf.org/bahrein-un-blogueur-condamne-a-la-prison-a- 22-06-2011,40506.html 2 http://www.indexoncensorship.org/2011/10/bahrain-where- a-facebook-like-gets-you-expelled/3 http://fr.rsf.org/bahrein-volonte-des-autorites-bahreinies- 04-04-2011,39943.html

    4 http://bahrainrights.hopto.org/en/node/38255 http://fr.rsf.org/bahrein-les-autorites-des-pays-en-proie-a- 11-04-2011,40004.html6 http://www.bbc.co.uk/news/world-middle-east-165116857 http://www.bahraingp.com/Pages/default.aspx

  • 16LES ENNEMIS D INTERNET / 12 MARS 2012 / JOURNE MONDIALE CONTRE LA CYBER-CENSURE //////////////////////

    blaruspays ENNEMI dINtErNEt mesure que le pays senferre dans lisolement politique et le marasme conomique, le rgime du prsident Loukachenko montre son vrai visage. Internet, espace de mobilisation et din-formation, a subi de plein fouet la violente raction des autorits la rvolution travers les rseaux sociaux.

    Internet a jou un rle crucial dans un contexte de renforce-ment de la censure et de chasse aux journalistes1. Les repor-ters trangers, en particulier russes, sont devenus person non grat. Une centaine de journalistes blarusses ont t interpel-ls pour la seule anne 2011 et plus de trente ont t condam-ns des peines demprisonnement, limage dIrina Khalip, correspondante du journal russe indpendant Novaya Gazeta, et de Natalia Radzina du site Charter97.org, force sexiler en Lituanie. Les pressions sur les net-citoyens et les cyberattaques contre les mdias en ligne se sont multiplies. La surveillance constante est devenue la norme.

    Le filtrage du Net, prvu par le dcret n60 (voir le chapitre Blarus2 du rapport 2011 sur les Ennemis dInternet), sest accentu. La liste noire des sites bloqus na cess de sallon-ger depuis les troubles de dcembre 2010. Elle inclut dsormais notamment le site dinformation Charter97.org3, le site dopposi-tion belaruspartisan.org4, celui de lONG de dfense des droits de lhomme Viasna5, ou bien le blog de lhumoriste Yauhen Lipkovich6 sur LiveJournal.

    renforCer le blaCKout en priode dinstabilitEn dcembre 2010, les manifestations contre la rlection de Loukachenko avaient pouss le rgime durcir la rpression. Une nouvelle srie dvnements dstabilisateurs lont conduit vouloir imposer un vritable blackout de la couverture des at-tentats du mtro de Minsk7 en avril 2011. Les journalistes jugs trop mobiliss par cette affaire, qualifis de sclrats et crimi-nels, ont t accuss de diffusion de fausses informations et de diffamation. Les sites Charter97.org et belaruspartisan.org,

    connus pour tre critiques envers la politique gouvernementale, ont t victimes de cyberattaques. Le 12 avril 2011, le procu-reur gnral Grigori Vassilievitch avait donn le ton en dclarant ouvertement vouloir mettre de lordre sur la toile.

    En juin et en juillet 2011, des manifestations pacifiques contre le rgime ont t violemment rprimes8 : des centaines de per-sonnes ont t arrtes, dont des dizaines de journalistes, et Internet a t partiellement bloqu au cours des protestations silencieuses, sans slogans ni banderoles, qui se sont droules dans tout le pays. Les participants dnonaient, outre le rgime lui-mme, la dgradation des conditions de vie et la dvaluation de leur monnaie. La rvolution travers les rseaux sociaux, largement relaye sur Twitter via le hashtag #2206v1900, et sur lquivalent russophone de Facebook, Vkontakte, a fait tache dhuile.

    Conversations prventives et menaCes de reprsailles sur tWitterFace lampleur de la mobilisation, les autorits sont passes loffensive sur Internet. Le groupe Rvolution travers les rseaux sociaux, qui comptait 216 000 membres, a t ferm par Vkontakte la veille des manifestations le 3 juillet 2011, avant de rouvrir le lendemain une nouvelle adresse9, per-dant de nombreux participants dans cette manuvre. Le site Vkontakte a t rendu inaccessible durant plusieurs heures, le 13 juillet 2011, par certains fournisseurs daccs Internet, comme ByFly. Le 3 juillet, le site10 du service blarusse de Radio Free Europe/ Radio Liberty a t lobjet dune attaque par dni de service (DDoS), qui la rendu hors dusage pendant plusieurs heures.

    Sur le modle des invitations la chinoise prendre le th, certains internautes ont t invits par la police des conver-sations prventives afin de les inciter renoncer manifester. Malgr les pressions, de nombreux blogs et mdias en ligne, comme euroradio.by11, Babruiski Rehiyanalny Portal ( Babruisk), Silnye Novosti12 ( Homyel), Ximik.info13 ( Novopolodosk) ont couvert les manifestations. Youtube a t largement utilis pour diffuser les vidos des vnements.

    1 http://fr.rsf.org/belarus-renforcement-de-la-pression-sur- 25-03-2011,39887.html2 http://fr.rsf.org/surveillance-belarus,39710.html3 http://charter97.org/4 http://belaruspartisan.org/bp-forte/5 http://spring96.org/6 http://lipkovichea.livejournal.com/7 http://fr.rsf.org/belarus-les-journalistes-belarusses-dans- 21-04-2011,40079.html

    8 http://fr.rsf.org/belarus-recit-des-violations-de-la-liberte- 08-07-2011,40576.html9 http://vk.com/futuremovement10 http://www.svaboda.org/11 http://euroradio.by/report/aktsyya-pratestu-w-minsku-fotarepartazh12 odsgomel.org13 http://ximik.info/

  • 17LES ENNEMIS D INTERNET / 12 MARS 2012 / JOURNE MONDIALE CONTRE LA CYBER-CENSURE //////////////////////

    Censurant dune part les contestations sur Internet, le gouver-nement a, dautre part, utilis le Web pour intimider les mani-festants : ainsi, le ministre de lIntrieur, qui a cr son compte Twitter (@mvd_by1) en avril 2011, suivi du Dpartement de la police de Minsk (@GUVD_Minsk2), na pas hsit tweeter des messages davertissement lors des manifestations : tous ceux qui se rendent au square (...) : vous aurez en rpondre. Le fournisseur daccs blarusse BelTelecom a, quant lui, re-dirig les internautes cherchant se connecter Vkontakte vers des sites contenant des logiciels malveillants. Entre dbut mai et dbut juin 2011, au moins sept sites ont t ferms sur demande de la police, qui sest vu attribuer de nouvelles prrogatives par la loi du 1er mars 2011.

    poursuivre la lgalisation du Contrle et de la surveillanCeLes autorits ont poursuivi loffensive sur le terrain lgal. Suite au dcret n60 de fvrier 2010, la loi n317-33, entre en vigueur le 6 janvier 2012 au Blarus, a entrin la surveillance du Net4 et renforc le dispositif de contrle du Web au Blarus, en y ajou-tant un arsenal rpressif. Lenrlement forc des fournisseurs daccs Internet (FAI) et des cybercafs, chargs de rcolter les donnes personnelles des internautes, la surveillance des citoyens, ainsi que la possibilit pour les autorits dordonner le blocage de tout site jug extrmiste (une dfinition vague qui conduit aisment un surblocage et la fermeture de sites dopposition) figuraient parmi les principales caractristiques du dcret n60 de fvrier 20105. La nouvelle loi envisage des sanc-tions pour ceux qui violeraient ces dispositions. La loi impose aux sites de socits blarusses dtre hbergs ou dment enregistrs dans le pays. Si les entits non commerciales ne semblent pas directement concernes pour le moment, les autorits restent libres dtablir une liste de sites interdits, contr-le par des organismes dtat.

    LUnion europenne a renforc, en janvier 2012, ses sanctions contre des individus et des entits blarusses, touchs par des restrictions de voyage et un gel de leurs avoirs. Le rgime ne trouvera pas le salut en sombrant dans une hystrie rpressive qui ne fait quexacerber les tensions. Il est urgent quil entende les appels la raison de la communaut internationale et mette un terme la rpression aveugle ainsi qu la guerre de linfor-mation.

    1 http://twitter.com/#!/mvd_by2 http://twitter.com/#!/GUVD_Minsk3 http://pravo.by/main.aspx?guid=713934 http://fr.rsf.org/belarus-internet-belarusse-les-autorites- 05-01-2012,41625.html5 http://fr.rsf.org/belarus-les-autorites-multiplient-les- 06-07-2010,37868.html

  • 18LES ENNEMIS D INTERNET / 12 MARS 2012 / JOURNE MONDIALE CONTRE LA CYBER-CENSURE //////////////////////

    birmaniepays ENNEMI dINtErNEtLassouplissement du rgime se traduit par une amlioration de la situation de linformation sur Internet, mme si la surveillance reste troite. La communaut internationale et les dfenseurs birmans des droits de lhomme doivent rester vigilants et conti-nuer de faire progresser les liberts. Lune des priorits est de revoir le cadre lgislatif, liberticide. Le chemin parcourir est encore long mais les rformes engages semblent difficilement rversibles.

    les dbuts de lre thein sein inQuitants pour la libert sur internetEn mars 2011, le prsident Thein Sein avait dclar, dans son discours inaugural, que le rle des mdias devait tre respec-t. Pourtant, les restrictions concernant les cybercafs1, dj svres (lire le chapitre Birmanie2 du rapport 2011 sur les Enne-mis dInternet) ont t renforces en mai 2011. Lutilisation de disques durs externes, cls USB et CD avait alors t interdite, tout comme lutilisation des services de tlphonie sur Internet (VoIP) pour appeler ltranger, une mesure interprte comme destine isoler davantage les dissidents.

    librations de journalistes et blogueurs et dbloCages de sitesUne srie damnisties a permis, ces derniers mois, la libration de milliers de prisonniers, dont des centaines de prisonniers dopinion. Parmi eux des journalistes et des blogueurs. Tous les journalistes de la Democratic Voice of Burma3 (DVB), y compris Hla Hla Win, Ngwe Soe Lin, Win Maw, Sithu Zeya et son pre U Zeya, mais aussi deux journalistes indpendants, Thant Zin Aung, Zaw Thet Htwe et le blogueur Nay Phone Latt, ont t librs, les derniers en janvier 20124. Le blogueur et comdien Zarganar5 avait t relch en octobre 2011.

    Plusieurs sites internet dinformation, dont Youtube, BBC, Reuters, The Bangkok Post, Straits Times, Radio Free Asia, Irrawaddy, Democratic Voice of Burma, et la version birmane de Voice of America ont t dbloqus6 au lendemain de la visite du rapporteur spcial des Nations unies sur la situation des droits de lhomme au Myanmar, au moment de la Journe inter-nationale de la dmocratie.

    entre optimisme et vigilanCeEn novembre 2011, Reporters sans frontires a interrog la clbre dissidente Aung San Suu Kyi7, loccasion dune vido-confrence organise par le Council on Foreign Relations aux tats-unis, sur la situation de la libert de la presse en Birmanie. Selon elle, il y a eu une amlioration progressive de la situa-tion. Les autorits commencent lcher du lest. Je pense que cette dtente sapplique tout le monde en gnral, a-t-elle estim. Depuis septembre 2011, son nom est autoris la publication dans les mdias.

    Nay Phone Latt, laurat du Prix du blogueur de Reporters sans frontires avec Zarganar, a estim, dans une interview8 accor-de, en janvier 2012, aprs sa libration, Reporters sans fron-tires, que les nouveaux mdias et les blogueurs avaient contri-bu au changement politique en Birmanie tout en prvenant que Nous ne sommes pas encore libres. (..) La rpression est encore l. Dans un entretien avec la chane France 249, il avait confi : Je ne peux mempcher de trouver la rapidit de ces changements inquitante. Et de rappeler : Utiliser Gmail, lire des blogs, aller sur Facebook ainsi que visiter des sites dinfor-mation sont dsormais possibles. Mais les textes sur les restric-tions et les sites autoriss existent toujours. Il faut les abroger. (...) Nous ne serons pas entirement en scurit tant quil ny a pas de loi protgeant la libert dexpression.

    En effet, pour enraciner les rformes et viter un retour en ar-rire, cest tout le cadre lgislatif qui doit tre revu. Un signe positif : les autorits ont promis ladoption, en 2012, dune loi sur les mdias qui mettra fin la censure10. Elles devront ensuite satteler la rvision ou labrogation de lElectronic Act et de la loi sur ltat durgence. Des individus se font encore arrter en vertu de la loi sur les associations illgales ou pour des accusa-tions de trahison.

    1 http://fr.rsf.org/birmanie-renforcement-de-la-surveillance- 17-05-2011,40295.html2 http://fr.rsf.org/internet-enemie-birmanie,39722.html3 http://www.dvb.no/4 http://fr.rsf.org/birmanie-amnistie-pour-des-video-13-01-2012, 41673.html5 http://fr.rsf.org/birmanie-interview-du-comedien-et-dissident- 17-10-2011,41214.html6 http://fr.rsf.org/birmanie-plusieurs-sites-internet-debloques- 20-09-2011,41020.html

    7 http://fr.rsf.org/birmanie-aung-san-suu-kyi-sur-la-liberte-de- 07-12-2011,41520.html8 http://fr.rsf.org/birmanie-interviews-de-deux-journalistes-de- 23-01-2012,41705.html9 http://observers.france24.com/fr/content/20120125-quatre-annees- prison-blogueur-liberation-nouvelle-birmanie-nay-phone-latt-lnd- rangoon10 http://www.google.com/hostednews/afp/article/ALeqM5iF5rZz5hm xNs4_1cpfogu7iJExzg?docId=CNG.1872a9273d52d8377655877ef d638db6.491

  • 19LES ENNEMIS D INTERNET / 12 MARS 2012 / JOURNE MONDIALE CONTRE LA CYBER-CENSURE //////////////////////

    Si certaines figures majeures de lopposition, comme Min Ko Naing et Ashin Gambira, ont t relches, le blogueur Kaung Myat Hlaing (Nat Soe)1, emprisonn depuis avril 2010, et quatre autres journalistes, restent derrire les barreaux. Tout comme plus de 450 prisonniers politiques selon les estimations de la Ligue nationale pour la dmocratie. Dautres, comme le journaliste de la DVB Sithu Zeya, ont bnfici dune libration conditionnelle et peuvent potentiellement retourner en prison nimporte quel moment, par exemple sils envoient une photo la DVB. Certains considrent que ces amnisties nont pas t assez loin, que le gouvernement utilise les prisonniers restants comme des otages dans leurs ngociations avec la commu-naut internationale.

    La structure mme du nouvel Internet birman, telle que modifie en 2010, octroie davantage de possibilits de surveillance aux autorits, tout en rservant les bnfices dun accs plus ra-pide et de meilleure qualit aux membres du rgime, daprs un rapport exclusif2 publi par Reporters sans frontires et la Bur-ma Media Association. Des mouchards indtectables peuvent tre placs sur le serveur destin la population civile, afin de rcuprer diffrentes donnes confidentielles. Les autorits doivent faire preuve de transparence et autoriser un audit ind-pendant de linfrastructure qui dterminerait les changements apporter pour rassurer les utilisateurs et nettoyer la plateforme doutils de surveillance abusifs. Elles doivent aussi sexpliquer sur le futur des fournisseurs daccs Internet (FAI) Myanmar Post and Telecommunication (MPT) et de Yatanarpon, lemprise que ltat conserve sur ces deux structures et les potentialits et condition de privatisation. Lutilisation de technologies de lentre-prise Blue Coat en Birmanie, observe sur FAI Yatanarpon Tele-port, soulve des questions quant la politique de filtrage de la compagnie et ses possibilits de surveillance du Net.

    Plusieurs rapports signalent une vitesse trs lente de la bande passante. Si bien que le groupe Eleven Media a rcemment lanc un systme denvoi dinformations par SMS pour mieux rpondre aux besoins de ses lecteurs.

    Le rgime doit aussi dvelopper laccs Internet la popu-lation. Seul 1% de la population a accs Internet, et le pays ne dispose que denviron 500 cybercafs, situs principalement dans les grandes villes.

    La normalisation des relations notamment commerciales avec lOccident reste un lment cl qui explique lvolution r-cente du rgime birman, soucieux de sortir du marasme cono-mique et de contre-balancer linfluence hgmonique chinoise.

    La Birmanie convoitait depuis longtemps la prsidence de lAssociation des Nations de lAsie du Sud-Est (ASEAN). Les rformes engages la lui garantissent pour lanne 2014. Un assouplissement des sanctions amricaines pourraient inter-venir prochainement mais le Congrs continue de se montrer trs critique envers le rgime pour le pousser davantage de rformes et une vritable transition dmocratique. Les yeux du monde seront rivs sur la Birmanie au moment des lections partielles davril 2012.

    1 http://fr.rsf.org/birmanie-dix-jours-de-supplices-pour-le- 08-02-2011,39497.html

    2 http://fr.rsf.org/birmanie-reorganisation-et-modernisation- de-10-11-2010,38785.html

  • 20LES ENNEMIS D INTERNET / 12 MARS 2012 / JOURNE MONDIALE CONTRE LA CYBER-CENSURE //////////////////////

    Chinepays ENNEMI dINtErNEtLa croissance fulgurante du web participatif, et ses effets sur les dbats sociaux et politiques, complique chaque jour davantage la tche des censeurs. Lintensification du contrle et de la r-pression lencontre des net-citoyens et de leurs outils en ligne est symptomatique de la nervosit du rgime face au Printemps arabe et du rle de caisse de rsonance jou par Internet et les rseaux sociaux.

    obsession du Contrle depuis le printemps arabeLe systme de filtrage et de surveillance chinois, lun des plus aboutis au monde, a t utilis pour viter tout risque de conta-gion des mouvements de contestation, notamment en retirant la majeure partie des rfrences au Printemps arabe et aux mouvements Occupy Wall Street de lInternet chinois. (lire le chapitre Chine1 du rapport 2011 sur les Ennemis dInternet). Des blogs et microblogs ont t ferms, des mots cls2 comme jas-min3 ou gypte ont t interdits. Il est impossible de combiner le mot occuper suivi dune ville chinoise (ex : Occupy Beijing () pour effectuer une recherche web.

    Le plnum du Parti communiste chinois (PCC), en octobre 2011, officiellement consacr aux rformes culturelles, a t loccasion pour le gouvernement de lgifrer nouveau sur le contrle du web4. Une directive visant prserver la scurit et largir linfluence de la culture chinoise a t adopte. Les mesures rpressives sont justifies par la ncessit de prser-ver un Internet sain5 pour les gnrations futures. La loi inter-disant la divulgation de rumeurs6 sert en ralit de prtexte au gouvernement chinois pour faire taire les voix dissidentes et procder des arrestations arbitraires.

    Le gouvernement a galement impos aux fournisseurs daccs de rseaux publics Wi-Fi dinstaller un logiciel, particulirement

    onreux, de traage des internautes. Non contentes de renfor-cer le contrle du trafic Internet, les autorits mettent dsormais en place une censure conomique, en forant des cybercafs renoncer leur offre Wi-Fi, faute de fonds pour implanter les nouvelles mesures.

    invits boire le th...Il sagit dun euphmisme utilis pour signifier une convocation au poste de police. la censure se sont conjugues des vagues darrestations de blogueurs et net-citoyens7. Dtentions arbi-traires, procs inquitables, rgulations liberticides et lourdes condamnations se sont rcemment multiplis et les cyberdissi-dents ont t particulirement cibls. Soixante-huit dentre eux restent emprisonns pour leurs activits dinformation en ligne, faisant de la Chine la plus grande prison au monde pour les net-citoyens. Parmi eux :

    - le prix Nobel de la paix Liu Xiaobo8 (), toujours empri-sonn.

    - les cyberdissidents Chen Xi9 () et Chen Wei10 () condamns respectivement onze et neuf ans de prison pour subversion.

    - le cyberdissident Li Tie11 () condamn 10 ans de prison pour subversion.

    - Liu Xianbin12 () condamn dix ans de prison pour incitation la subversion de ltat.

    - la militante des droits de lhomme et cyberdissidente Govruud Huuchinhuu13, passe tabac en dtention.

    - lavocate Ni Yulan14 () et son poux Dong Jiqin (), en attente de leur verdict.

    - le net-citoyen Hu Di15 (), intern de force.

    1 http://fr.rsf.org/internet-enemie-chine,39714.html2 http://chinadigitaltimes.net/2004/08/the-words-you-never-see-in- chinese-cyberspace/3 http://breningstall.typepad.com/breningstall-on-typepad/2011/03/ what-a-beautiful-jasmine-by-hu-jintao-and-the-confucius-institute.html4 http://fr.rsf.org/chine-les-leaders-de-l-internet-chinois- 09-11-2011,41302.html5 http://fr.rsf.org/chine-comment-la-chine-persiste-dans-son- 31-08-2011,40883.html6 http://chinadigitaltimes.net/2011/10/rumors-are-a-cancer-that- threatens-the-internet-and-society/

    7 http://fr.rsf.org/chine-pas-de-repit-pour-les-dissidents- 04-01-2012,39917.html8 http://fr.rsf.org/chine-liu-xiaobo-prix-nobel-de-la-paix- 07-10-2011,41149.html9 http://blog.boxun.com/hero/chenxiwenji/10 http://blog.boxun.com/hero/chenwei/11 http://www.loc.gov/lawweb/servlet/lloc_news?disp3_l205402982_text12 http://fr.rsf.org/chine-un-dissident-condamne-a-une-lourde- 25-03-2011,39883.html13 http://fr.rsf.org/chine-la-cyberdissidente-govruud- 03-10-2011,41096.html14 http://niyulan.blogspot.com/15 http://twitter.com/#!/iamhudi

  • 21LES ENNEMIS D INTERNET / 12 MARS 2012 / JOURNE MONDIALE CONTRE LA CYBER-CENSURE //////////////////////

    Ceux librs, comme Ai Wei wei1 (), Wang Lihong2 (), Zheng Yichun3 (), Ding Mao (), Ran Yunfei (), Wang Yi, Chen Guangcheng4 () et Hu Jia5 () sont souvent victimes de perscution, soumis une surveil-lance constante, voire assigns rsidence6.

    Le blog de lactiviste Wen Yu Chao, bas Hong-Kong, et qui prend des positions courageuses en faveur de la libert dex-pression7 sur le rseau internet chinois, est rgulirement atta-qu. Son compte Gmail a t pirat plusieurs reprises et des photomontages participant son lynchage mdiatique ont t diffuss sur Internet.

    La famille de lavocat et militant des droits de lhomme Gao Zhisheng (), port disparu depuis avril 2010, craint le pire8. Dbut janvier 2012, son frre Gao Zhiyi avait t inform par un courrier de la justice de sa dtention dans une prison dans louest du Xinjiang. Mais ses proches, qui se sont rendus sur place, nont pas t autoriss le voir.

    lexplosion des sites de miCrobloggingDaprs des chiffres officiels9, la Chine compterait, la fin 2011, 513 millions dinternautes, soit un taux de pntration dInternet de 38,3 %. 356 millions accderaient Internet via leur portable, et la moiti, soit plus de 250 millions, tiendrait des microblogs. Le blog Techrice10 publie quant lui une liste des 15 rseaux sociaux les plus populaires ainsi que leur nombre dutilisateurs annoncs et probables.

    La rvolution des microblogs, lagrgation dopinions et laccl-ration de la diffusion de linformation quils induisent ont amen le rgime prendre des mesures. Le Twitter chinois (Weibo) a t accus par la police davoir une influence nfaste sur la socit11. Les leaders du Net chinois12, dont Sina Corp (qui dtient le site de microblogging Sina Weibo), Baidu (moteur de recherche) et Tencent (propritaire du service de messa-gerie QQ), se sont engags, en novembre 2011, appliquer les directives du gouvernement en matire de surveillance

    dInternet. Les entreprises ont promis de lutter contre la porno-graphie en ligne, la fraude sur Internet et la diffusion de rumeurs et de fausses informations. Les microblogs avaient dj d se doter de modrateurs, mais cela ne semble pas avoir suffi.tape suivante : les autorits chinoises se sont attaques lanonymat sur les sites de microblogging13. partir du 16 mars, les internautes chinois inscrits sur les sites de microblogging hbergs en Chine devront utiliser leur vrai nom, et non plus un pseudonyme. Sans quoi ils ne pourront que consulter les micro-blogs des autres contributeurs mais toute participation active leur sera impossible. Les modalits dimplmentation de ce sys-tme didentification (14, shimingzhi) pour toutes les plate-formes concernes, demeurent encore incertaines.

    des bloCus de linformation mis en CheC par les rseaux soCiauxLappareil de censure chinois a tout fait pour touffer les informa-tions sur la rbellion dans la petite ville de Wukan15, dans la pro-vince de Canton. Les autorits locales ont violemment rprim des manifestations contre les saisies de terre, et suite au dcs de leur leader, les citoyens sont descendus par milliers dans la rue pour dnoncer les expropriations et rclamer justice, tout en utilisant les rseaux sociaux pour faire connatre leur cause. Les autorits ont impos un vritable blocus de la ville offline et online. Ils ont bloqu le mot-cl Wukan sur Internet, surveill de prs les hot tweets et appliqu une censure sur les sites de microblogging Sina et Tencent Weibo16 de toutes les images et vidos montrant des rassemblements de la population17. Celle-ci a russi faire entendre sa colre et mobiliser lopinion publique grce Internet et Pkin a d se rsoudre ngocier avec elle. Lin Zulian, chef de file des insurgs, a t nomm chef du Parti communiste local, le 16 janvier 2012.

    En juillet 2011, le Dpartement de la propagande a tent dim-poser de graves restrictions linformation18 en relation avec la couverture de la catastrophe ferroviaire du 23 juillet 2011, Wenzhou, qui a cot la vie une quarantaine de personnes.

    1 http://fr.rsf.org/chine-ai-weiwei-relache-par-les-22-06-2011,40512.html2 http://fr.rsf.org/chine-les-leaders-de-l-internet-chinois- 09-11-2011,41302.html3 http://fr.rsf.org/chine-la-peine-de-prison-du-30-12-2005,15122.html4 http://fr.rsf.org/chine-chen-guangcheng-passe-a-tabac-pour- 11-02-2011,39532.html5 http://fr.rsf.org/chine-le-militant-des-droits-de-l-homme- 27-06-2011,40524.html6 fr.rsf.org/chine-les-autorites-chinoises-decidees-a- 03-03-2011,39666.html7 http://shanghaiist.com/2012/02/03/wen_yunchao_on_what_hong_ kongers_ne.php8 http://www.liberation.fr/depeches/01012389876-chine-la-femme-du- dissident-gao-zhisheng-craint-pour-la-vie-de-son-epoux9 http://www.linformaticien.com/actualites/direct-afp/id/23108/chine- 513-millions-d-internautes-les-microblogs-se-developpent- massivement.aspx

    10 http://techrice.com/2011/03/08/chinas-top-15-social-networks/11 http://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2011/06/16/le-twitter- chinois-accuse-par-la-police-d-avoir-une-influence-nefaste-sur-la- societe_1536740_3216.html12 http://fr.rsf.org/chine-les-leaders-de-l-internet-chinois- 09-11-2011,41302.html13 http://www.ecrans.fr/La-Chine-met-fin-a-l-anonymat-sur,14040.html14 http://hktv.cc/cd/hanyupinyin/?q=%E5%88%B615 http://fr.rsf.org/chine-les-autorites-imposent-le-blocus- 16-12-2011,41565.html16 http://research.jmsc.hku.hk/social/index.py/singleSinaWeibo?id= 339226037862741817 http://www.youtube.com/watch?v=QUk-QFFnOoY&feature=player_ embedded18 http://fr.rsf.org/chine-la-presse-interdite-de-faire-son- 03-08-2011,40735.html

  • 22LES ENNEMIS D INTERNET / 12 MARS 2012 / JOURNE MONDIALE CONTRE LA CYBER-CENSURE //////////////////////

    Il a ordonn tous les mdias, y compris les journaux, revues et sites Web de privilgier les rapports provenant des autorits sur les consquences positives de la catastrophe ferroviaire. En raction, les critiques ont fus sur le Web, des millions de commentaires ont rclam, sur Weibo, des explications aux autorits sur la scurit ferroviaire en Chine.

    les mobilisations en ligne Continuent - QuelQues exemplesDans la ville de Dalian, des dizaines de milliers de manifestants se sont mobiliss grce des messages diffuss sur Weibo contre une usine de produits chimiques1. Celle-ci a fini par tre dlocalise.

    Wu Lihong2 (), surnomm le gardien du lac Tai, a t arrt cause de son activisme, notamment en ligne, contre la pollution. Il reste sous troite surveillance. Sa connexion Internet a t coupe.

    Mais les autorits ont d prendre des mesures pour amliorer la qualit de leau du lac.

    Pendant la dtention de Ran Yunfei (), des utilisateurs de Twitter ont cr un blog pour diffuser les crits du cyberdissi-dent, traduits en anglais.

    Une formidable mobilisation pour Ai Weiwei sest forme en ligne pour laider payer le montant de 15,22 millions de yuan (soit environ 1,8 millions deuros) rclam par les autorits pour fraude fiscale. Il a russi rassembler la moiti de la somme grce un Internet fundraising3 auquel plus de 20 000 per-sonnes ont contribu. Par ailleurs, de nombreux internautes se sont dnuds en ligne4 lorsquAi Weiwei a t accus de por-nographie pour une photo.

    disCriminations rgionales : Censure goloCaliseLe rgime a choisi la manire forte pour rpondre aux troubles en Mongolie intrieure et au Tibet. la fin janvier 2012, un blackout des communications5 a t mis en place pour emp-cher la couverture mdiatique de la rpression de mouvements de protestations au Tibet. Les mdias indpendants et tran-gers ont t tenus lcart, la dsinformation a rgn afin de cacher aux yeux du monde lampleur du soulvement. Inter-net est une victime collatrale de la rpression : coupures de la connexion6, renforcement du blocage et retraits de contenus lis aux troubles. Les plate-formes collaboratives locales7 ont particulirement t vises afin de couper court toute tentative de mobilisation en ligne. Les sites internet de mdias tibtains exils sont inaccessibles, ainsi que des forums ou des blogs en langue tibtaine8, telles que Sangdhor.com9 et Rangdrol.net.

    La stratgie des autorits chinoises disoler mdiatiquement et virtuellement certaines provinces ou rgions, pour mieux rpri-mer en silence, nest pas nouvelle. Le Tibet a dj fait lobjet de restrictions de communications particulirement svres10. Le Xinjiang avait t coup du monde pendant plusieurs mois11 en 2009 suite des meutes interethniques.

    En mai 2011, Internet avait galement essuy les pltres de la rpression des manifestations en Mongolie intrieure12. Les au-torits ont nouveau accentu leur contrle du Net en Mongolie intrieure suite aux protestations conscutives au dcs dun leveur mongol13 le 20 octobre 2011. De nombreux sites mon-gols avaient appel manifester contre les tentatives du gou-vernement dtouffer laffaire, et plusieurs ont t bloqus ds le 27 octobre 2011, comme Boljoo, Mongolian BBS et Medege. Le cyberdissident Hada et sa famille sont toujours emprisonns, leurs proches harcels14.

    1 http://www.bbc.co.uk/news/world-asia-pacific-145204382 http://www.nytimes.com/2007/10/14/world/asia/14china.html? pagewanted=all3 http://www.bbc.co.uk/news/world-asia-156941014 http://www.rue89.com/rue69/2011/11/21/tous-nus-pour-soutenir- lartiste-chinois-ai-weiwei-2267495 http://fr.rsf.org/chine-le-tibet-coupe-du-reste-du-monde- 23-02-2012,41927.html6 http://www.guardian.co.uk/world/2012/feb/03/china-internet-links- tibetan-unrest7 http://cmp.hku.hk/2012/02/03/18575/8 http://globalvoicesonline.org/2012/02/01/china-several-tibetan- language-blogsites-shut-down/

    9 http://sangdhor.com/404.htm10 http://fr.rsf.org/tibet-recherche-du-controle-total-d-10-08-2010, 38107.html11 http://fr.rsf.org/chine-le-xinjiang-n-est-toujours-pas- 29-01-2010,36237.html12 http://fr.rsf.org/chine-internet-victime-collaterale-de-la- 31-05-2011,40378.html13 http://fr.rsf.org/chine-les-leaders-de-l-internet-chinois- 09-11-2011,41302.html14 http://fr.rsf.org/chine-la-femme-et-le-fils-de-hada-10-05-2011, 40252.html

  • 23LES ENNEMIS D INTERNET / 12 MARS 2012 / JOURNE MONDIALE CONTRE LA CYBER-CENSURE //////////////////////

    la stratgie offiCielle : propagande, Cyberguerre et refus dingrenCeLes autorits tentent doccuper le terrain : elles affirment dispo-ser de 40 000 microblogs1 pour publier des informations autori-ses et recueillir les commentaires des internautes.

    Suite aux troubles provoqus en Mongolie par le dcs dun leveur2, des messages de propagande, provenant probable-ment des 50 cents, ces blogueurs pays par le gouvernement, ont fleuri sur Internet. Un post annonce notamment : chers tu-diants et amis, ce ntait quun accident de la route. Certaines personnes mal intentionnes linterprtent comme un conflit ethnique, ou en lien avec le ptrole ou le gaz. Le gouvernement prend ce cas trs au srieux. (....). Nous esprons que les tu-diants ne croiront pas les rumeurs (...).

    Larme chinoise sest dote dune unit dlite3 charge de djouer des cyberattaques daprs le quotidien Global Times, cit par lAgence France-Presse. En aot 2011, les experts en scurit de McAfee ont rvl une srie de cyberattaques de grande ampleur4, en cours depuis 2006. La Chine est encore une fois fortement suspecte. Elle serait notamment derrire les attaques contre Google5. Mi-aot 2011, suite limmolation dun jeune moine, les autorits chinoises auraient galement men une vague de cyberattaques contre les mdias tibtains.

    Le rgime a lanc une offensive contre les logiciels de contour-nement de la censure, de plus en plus utiliss en Chine, comme le signale Global Voices6. La Grande muraille lectronique serait dsormais en mesure de contrler les flux de donnes des adresses Internet (IP) locales et de restreindre le nombre dIP autorises se connecter au rseau international7 au mme moment. Les entreprises multinationales auraient fait passer en interne le message leurs employs de ne pas utiliser