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REVELEZ VOS TALENTS Cartographie des outils psychométriques de développement
Introduction aux voyages et Cartographie
Histoire du monde (de la psychométrie) vue par un voyageur éclairé : Stéphane Moriou, Président, MoreHuman Partners
Carte des circuits
Circuit 1 : Personnalité (traits & types) – Comportement - Déraillement 16PF NEO PI-R Workplace Big Five
PfPI (Inventaire de Personnalité au Travail) OPQ 32 (Occupational Personality Questionnaire) CCTI-Intelligence de Soi (Cailloux-Cauvin Type Indicator) MBTI (Myers Briggs Type Indicator) Insights Discovery MBTI 2 (Myers Briggs Type Indicator) Golden (Inventaire Typologique du Golden) DiSC Success Insights
Personal Profile Analysis (Thomas) Predictive Index Dimensions de Talent Q HDS (Hogan Development Survey) Circuit 2 : Besoins/Valeurs – Motivation – Intérêts
SDI (Strength Deployment Inventory) Waves Styles Professionnel
SOSIE PAPI Birkman
Strong Interest Inventory Circuit 3 : Aptitudes –Apprentissage - Compétences - Exécution
Verify Eléments de Talents Q CTA (Watson Glaser Critical Thinking Appraisal) LJI (Leadership Judgement Indicator) Kolb Learning Styles Indicator Honey and Mumford Learning Styles Questionnaire Choices Architect ViaEdge MSCEIT (Mayer Salovey Caruso Emotional Intelligence Test) ESCI (Emotional and Social Competency Indicator) BarOn EQ-I (Inventaire du Quotient Emotionnel du BarOn)
META (Measure of Entrepreneurial Tendencies and Abilities) Circuit 4 : Relations Interpersonnelles – Conflit – Equipes – Culture organisationnelle - Interculturelle
FIRO-B (Fundamental Interpersonal Relations Orientation) TKI (Thomas Kilmann Conflict Mode Instrument) MTR-I (Management Team Roles Indicator) TMS (Team Management System) Belbin (Rôles en Equipes) LEA (Leadership Effectiveness Analysis) CTT (Cultural Transformation Tools) OCI (Organizational Culture Inventory) GMI (Global Mindset Inventory) Faire vos achats
Douze questions à se poser pour choisir un outil psychométrique Domaines d’applications des outils
Formalités d’entrée (études de validation) Vocabulaire de survie (glossaire technique) Index
INTRODUCTION AUX VOYAGES
L’objectif de ce livre est double: promouvoir l’utilisation des outils psychométriques dans le monde francophone, et révéler l’étendue de l’offre disponible aujourd’hui pour permettre aux professionnels des RH, aux coachs, aux consultants et aux formateurs de faire leur choix en bonne connaissance de cause. Pour réaliser cet objectif, nous avons choisi de mettre en œuvre une cartographie conçue pour valoriser la nature spécifique de chaque outil choisi, mais aussi pour positionner chaque outil par rapport à tous les autres, permettant ainsi de clarifier son objet, sa portée et son orientation. La cartographie est comme une mappemonde de pays et de continents séparés, où les frontières sont établies, mais ont évolué au cours de l’histoire. Ainsi, certains outils sont des « voisins » ou des « alliés » car ils sont basés ou inspirés par les même recherches en psychologie (théorie des traits, théorie des types) ou le même modèle psychométrique (DiSC…), d’autres sont simplement plus proches parce qu’ils visent à mesurer les mêmes composantes humaines (rôles dans les équipes, aptitudes, intelligence émotionnelle…). Ce sont précisément ces caractéristiques qui nous ont encouragés à proposer des regroupements cohérents où les similitudes et les différences entre les outils se révèlent. Notre objectif serait atteint si, après avoir lu ce livre, le lecteur pouvait mieux « trouver son chemin » dans le monde peu balisé des instruments psychométriques. La cartographie est présentée sous forme de quatre circuits dans les pages… Les 44 instruments que nous décrivons ont tous été choisis pour la robustesse de leurs propriétés psychométriques en termes de validité et de fidélité (voir chapitre…). Bien entendu, la liste n’est pas exhaustive – il y a plusieurs centaines d’outils disponibles sur le marché – mais la sélection a été faite selon plusieurs critères : la variété de leur finalité, leur niveau d’utilisation et leur disponibilité, et leur pertinence dans le monde du travail. Bien que les auteurs se soient efforcés de se concentrer sur les outils qui ne sauraient être mise en doute du point de vue de leur sérieux, la cartographie contient inévitablement un degré de subjectivité inhérent aux auteurs. Il est évident qu’en vulgarisant le monde de la psychométrie, les auteurs ont dû faire des choix conduisant à « prendre des raccourcis » quitte à ne pas satisfaire l’ensemble de la communauté des experts en psychométrie. Il s’agit d’un choix éditorial, les auteurs cherchant à présenter les outils psychométriques du point de vue de l’utilisateur, ou de celui d’un manager décisionnaire. En particulier, les auteurs ont dû négocier entre les antagonismes qui existent naturellement entre les différentes écoles de pensée, afin de présenter une vue d’ensemble. De plus, dans la mesure où tous les outils sont commercialisés – et se font par conséquent plus ou moins concurrence – il y a une tendance naturelle pour les éditeurs de promouvoir l’utilisation d’un outil pour un éventail d’applications plus large que celui dont il était l’objet lors de sa conception. Si beaucoup d’outils aspirent à être plus multifonction dans leur utilisation (recrutement, carrière, potentiel, cohésion d’équipe…) alors la spécificité de chacun est brouillée. Le but des auteurs a été de se concentrer sur la contribution essentielle de chaque outil (même s’il y a des applications secondaires), afin d’aider à démêler la complexité de l’offre globale. En positionnant tous les instruments, nous nous sommes efforcés de donner sa place à chaque outil. Presque tous les éditeurs des outils ont pu clarifier des faits, des points de détail, et des questions de langage concernant leurs outils, ce à quoi nous les remercions le plus sincèrement. Les auteurs ont cherché à éliminer toute promotion excessive des outils, pour garantir des règles du jeu équitables en quelque sorte, en se concentrant sur les qualités intrinsèques de chaque outil. De ce fait, les auteurs sont les seuls responsables de la sélection des instruments, de leur présentation et du contenu des différents chapitres.
Quelques 80 témoignages d’utilisateurs et praticiens indépendants ont également été intégrés. Enfin, les auteurs considèrent cette première édition comme une plate-forme “inachevée” pour alimenter les échanges autour de la psychométrie, dans le but de promouvoir l’utilisation des outils comme pratique plus avertie dans la gestion et le développement des ressources humaines.
Cartographie
(ou comment ce livre se structure comme un voyage)
Découvrir un outil psychométrique, c’est un peu comme faire un voyage dans un
nouveau pays.
Histoire du monde (de la psychométrie) par un voyageur éclairé. Stephane Moriou vous
incite à prendre goût à tous vos voyages.
Carte des Circuits. Quel pays visiter ? Dans quels buts ? Qu’attendez-vous trouver ? Tout
d’abord, vous trouverez une carte (p…) sous forme de quatre circuits comparant et
positionnant les pays – les outils – entre eux. Chaque circuit (personnalité-comportement,
relations interpersonnelles–culture) est décrit en détail et offre une progression cohérente de
découvertes et d’expériences.
Survol. Lorsque l’on arrive dans un nouveau pays choisi, on le voit d’abord d’en haut en
quelques regards, avant d’atterrir. C’est là que nous formulons nos premières impressions.
Histoire. Chaque outil, chaque pays a été fondé à un moment donné, il a ses origines, son
histoire, son identité, sa culture, ses personnages fondateurs…
Table d’orientation. Pour mieux comprendre l’outil - le pays - il faut une description
générale qui vous oriente, qui vous donne des clés de compréhension pour que vous
sachiez où vous mettez les pieds.
Questionnaire. C’est votre test de « connaissances » sur ce pays si inconnu. Ou plutôt, un
test sur votre aptitude à naviguer dans ce pays.
Photos. Lors de chaque voyage, les photos, du paysage et de vous-même, seront le
souvenir que vous garderez. Elles incarneront la présentation et l’interprétation de vos
résultats au questionnaire. Elles vous donneront une perception réelle de ce pays – de cet
outil – de sa culture profonde ainsi que de vous-même. Vous comprendrez pourquoi vous
êtes venu. Il pourrait vous changer à tout jamais…. On y découvrira également comment ce
pays ressemble à d’autres par des références croisées.
Point de vue panoramique. Ce sont les avis des voyageurs dans ce pays (praticiens,
consultants, spécialistes Ressources Humaines). Nous avons consultés un échantillon
représentatif d’utilisateurs. Ce point de vue est nécessairement subjectif, mais, nous
l’espérons, toujours instructif : on aime plus ou moins son propre voyage.
GPS (Guide Pratique Sélective). Enfin, pour bien préparer votre voyage, vous aurez besoin
de beaucoup d’informations pratiques (la langue, la certification, les contacts…).
Mérite le détour. Parfois un pays (outil) voisin très proche mérite une petite virée pour
l’intérêt de ses sites.
Faire vos achats. Avant de partir … pour être sûr que vous achetez le bon voyage par
rapport à ce que vous recherchez (tableau récapitulatif d’applications).
Formalités d’entrée. Ce qui faut comprendre au pays pour être reconnu (les fondements
scientifiques des outils). Vous aurez un minimum de formalités d’immigration ou de douane.
Vocabulaire de survie. Pour « parler psychométrie » et vous faire comprendre par les
locaux (glossaire de termes techniques)
Bon voyage à tous !
Christopher James Antoine Tirard José Miguel Sepulveda
REMERCIEMENTS Nous tenons à remercier tout celles et ceux qui nous ont consacré du temps pour contribuer à la réalisation de cet ouvrage. Nous en sommes très reconnaissants. Tout d’abord, des remerciements tout particuliers à Stéphane Moriou, pour avoir accepté d’écrire une riche, succincte et éclairante introduction à l’histoire de la psychométrie. Les éditeurs d’outils psychométriques, ainsi que leurs représentants en France, ont relu et commenté les chapitres concernant leurs propres outils, et nous les en remercions très sincèrement : Antony Erb (OPP), Cécile Pannetier (Pearson France-ECPA), Isabelle Gillet (Hogrefe), Sandra Martin (SHL), Yves-Marie Beaujouan (Saville Consulting), Thomas Eymond-Daru (Cubiks), Béatrice Dewandre (Sensing, pour Barrett Values Centre), Tony Miles (Belbin), Lisa Struckmeyer et David Hudnut (CentACS), Frédérique Lavanant (Hay Group), Valere Cauwenberg, Benoit Fedry (Human Synergistics), Shona Kane (Insights Discovery), Michel Tobelem (Korn/Ferry), Stéphane Moriou (MoreHuman Partners), Betty Mangos (MHS), Rob Kabacoff (Management Research Group), Pierre Cauvin (Osiris), Julie Jenkins (Pearson), Joseph Machiah (PI Europe), Patrick Leconte (Success Insights), Lionel Pradines (Talent Q), Roy Childs (Teamfocus), Joy McGovern (Thunderbird School of Global Management), Olivier Wyler (TMS Development International). Les coordonnées de ces éditeurs ou leurs représentants y figurent à la fin des chapitres. Qu’ils poursuivent avec la même diligence - pour encore de longues années - leurs contributions au développement humain. Un seul éditeur – Hermann International Europe, qui distribue le HBDI (Hermann Brain Dominance Inventory) - n’a pas souhaité répondre favorablement à notre invitation de figurer dans le livre. Ses raisons demeurent impénétrables pour les auteurs, et nous le regrettons. Nous nous excusons vivement auprès des trois praticiens qui ont bien voulu témoigner sur cet outil, une fois terminée la rédaction du chapitre. Nous avons été contraints de le supprimer. 76 praticiens ou utilisateurs de 14 pays (France, Allemagne, Belgique, Canada, Etats-Unis, Italie, Luxembourg, Nouvelle Zélande, Portugal, Roumanie, Royaume-Uni, Slovaquie, Suède, Suisse) ont bien voulu accepter de donner leurs témoignages sur un ou plusieurs outils. Dans tous les cas, leurs expériences apportent un regard opérationnel, ce qui a très fortement enrichi le contenu du livre. Un certain nombre de témoignages sont issus du contexte international et notamment du monde anglo-saxon, où la pratique des instruments psychométriques est plus répandue qu’en France. Un grand merci à tous nos témoins: Caroline Allain, Mihaela Andronic, Paul Ayo, Jane Beausire, Nicolas Bontron, Victoria Bouix, Cathy Brown, Valérie Brunel, Didier Burgaud, Greg Burns, Aida Camiça, Coralie Cedelle, Nicolas Champenois, Jérôme Champetier de Ribes, Jeanne-Marie de Chanville, Laurent Choain, Catherine Conti, Patrice Couillet, Laurent Criou, Nathalie Cronjäger, Odile Crouigneau, Thècle Crouzet, Fabrice Deschamps, Maria Diaz, Ellen Dotts, Véronique Doux, Brigitte Dubreucq, Hélène Dusendschön, Carine Even, Helen Farrow, Crawford Flint, Tiphaine Foucaud, Marie-France Fourrier, Pierre-Yves Gagneret, Mara Laura Garofalo, Jennifer Gianni, Vincent Giolito, Christophe Grosjean, Jo Haworth, Juliette Hua, Christine Jacquinot, Pascal Jouvin, Yves Kerbiriou, David Lange, Claire Lustig-Rochet, Dr Karen Manby, Laetitia Mazauric, Mark Mercer, Joelle Méric, Gwendolyn Monnot, Michel Moral, Stéphane Moriou, Kate Ng, Juraj Ondrejkovic, Stephanie Parry, Julie Pelych, Chris Pether, Mirya Pollmann, Marc Potvin, Olivier Raynal-Benoit, Clotilde Renard, Gilbert Renel, Amanda Rippon, Carole Roberts, Anne Marie Ronayne, Hervé Saint-Aubert, Charles de Saint-Martin, Jean-Boris Samuel, Dominique Soum Vergez,
Lisa Spitzer, Orit Sulleyman Abehsera, Danièle Testolin, Monika Thiel, Benjamin Thierry, Dr Cindy Wahler, Barrie Zucal.
Histoire du monde (de la Psychométrie)
… vue par un voyageur éclairé
Stéphane Moriou, Président, MoreHuman Partners
Psychométrie: branche de la psychologie qui élabore et étudie des théories, méthodes et techniques
pour évaluer et mesurer les capacités psychiques d’un individu à partir de tests, inventaires et autres
techniques validés statistiquement.
Il est toujours délicat de définir précisément les origines d’une méthode, d’une discipline. La
psychométrie n’échappe pas à la règle. Pourtant, le sujet n’est pas neutre : en introduisant la
notion de mesure dans l’étude de l’esprit humain, la psychométrie permet à la psychologie
de se différencier de la philosophie dont elle est issue. La question des origines permet donc
de dater la bifurcation des deux disciplines.
1573 - 1904 : les origines de la discipline
Plusieurs auteurs se sont opposés sur la question des origines. Grèce, Chine, Egypte... ?
Des pratiques d’évaluation et de classement des candidats ou ouvriers ont émergé dans
différents foyers et à différentes époques. Peut-on pour autant déjà parler de psychométrie ?
Juan Huarte de San Juan, médecin et philosophe espagnol (vers 1530-1588) marque un vrai
départ. Il publie en 1573 son Examen de ingenios para las ciencias (Examen des esprits
pour les sciences) qui se diffuse progressivement à travers toute l’Europe. Il s’agit du
premier traité établissant une relation entre la psychologie et physiologie. Mais c’est le
philosophe et mathématicien allemand Christian Von Wolff (1679-1754) qui est reconnu
comme le premier à utiliser le terme de psychométrie. Il écrit en 1732 dans son ouvrage
Psychologia empirica (note du paragraphe 522) : Dans la double façon que nous avons de
poser le fondement des degrés des plaisirs et des peines, la psycheometria vient à notre
secours. En elle on doit apprendre comment on peut mesurer la grandeur de la perfection et
de l’imperfection ainsi que le degré de certitude d’un jugement, de façon à constituer la
mesure de la perfection et de l’imperfection, comme le degré de certitude des jugements.
(traduit du latin par l’auteur)
En Angleterre, Francis Galton (1822-1911), cousin de Charles Darwin, s’intéresse à la
transmission héréditaire des capacités intellectuelles. En 1869, dans Hereditary Genius (Le
génie héréditaire), il propose de mesurer le génie d’un individu par la fréquence des sujets
qui, dans un groupe d’individus donnés, parviennent à le dépasser. Il conceptualise plus tard
le calcul du coefficient de corrélation qui sera ensuite perfectionné par l’un de ses disciples,
Karl Pearson (1857-1936) et conduira à la formalisation par Charles Spearman (1863-1945)
de la notion d’analyse factorielle (1904). Francis Galton présente en 1884 à Londres son
laboratoire anthropométrique où les visiteurs sont soumis à des séries de mesures
applicables à de larges groupes. Il utilise alors des tables de centiles et donne naissance à la
notion d’étalonnage des tests.
Mais l’Allemagne constitue le terreau de la croissance de la psychométrie comme discipline
à part entière. A la suite de Gustav Theodor Fechner (1801-1887) qui dessine la route
permettant à la psychologie de s’affirmer comme une véritable science (Elemente der
Psychophysik, 1860), son compatriote Wilhelm Wundt (1832-1920) peut être reconnu
comme le premier psychologue moderne et le père de la psychologie expérimentale. Il crée
formellement en 1879 le premier laboratoire de psychologie à l’Université de Leipzig. En
1886, la première thèse dans le domaine de la psychologie est soutenue en Allemagne sous
la supervision de Wilhelm Wundt par un américain nommé James McKeen Cattell (1860-
1944). Son sujet est annonciateur : Psychometrische Untersuchungen (Investigation
psychométrique). En 1890, de retour aux Etats-Unis, James McKeen Cattell introduit le
concept de test mental dans un article publié dans la revue Mind et intitulé Mental Tests and
Measurements. Il fut l’un des psychologues américains les plus influents du XXème siècle. A
partir de là, la psychométrie connaît un essor qui croitra sans discontinuer.
1905-1974 : l’essor d’une nouvelle discipline
En 1905, deux Français, Alfred Binet (1857-1911) et Théodore Simon (1873-1961) marquent
l’univers de la psychométrie. A la demande du Ministère de l’Education qui souhaite repérer
les enfants susceptibles de rencontrer les plus grandes difficultés scolaires, ils conçoivent la
première échelle métrique de l’intelligence et présentent leur épreuve diagnostic au
Congrès International de Psychologie de Rome. Le test de Binet-Simon a un retentissement
mondial et intéresse de nombreux psychologues américains, parmi lesquels Lewis Terman
(1877-1956), professeur à l’Université de Stanford et qui l’adapte et le rebaptise Stanford-
Binet (1916). Les mesures des aptitudes intellectuelles se développent rapidement dans une
Amérique soucieuse de trouver des critères objectifs d’évaluation. La première guerre
mondiale fournit l’occasion à Robert Yerkes (1876-1956) d’administrer ses tests
d’intelligence verbale et non-verbale (Army Alpha et Army Beta) à plus d’un million sept cent
mille soldats américains. David Wechsler (1896-1981) participe alors à l’évaluation des
recrues de l’armée à l’aide du test alpha. Sa pratique l’amène à constater que la vision de
l’intelligence n’est pas applicable à la vie courante. En 1938, il développe une batterie de
tests d’intelligence connue sous le nom de Wechsler-Bellevue Intelligence Scale (WBIS). Il
reprend les idées du psychologue allemand William Stern (1871-1938) qui introduit en 1912
dans Die Psychologischen Methoden der Intelligenzprüfung und deren Anwendung an
Schulkindern (Les méthodes psychologiques de la mesure de l’intelligence) la méthode de
calcul du quotient intellectuel. David Wechsler révise son test qui devient progressivement
le plus utilisé aux Etats- Unis, puis lance successivement le Wechsler Intelligence Scale for
Children (WISC) en 1949, le Wechsler Adult Intelligence Scale (WAIS) en 1955 et enfin le
Wechsler Preschool and Primary Scale of Intelligence (WPPSI) en 1967. L’idée initiale des
Français Binet et Simon a permis à l’industrie américaine du test de connaître un succès
commercial retentissant.
Parallèlement à la montée en puissance des mesures de l’intelligence, le champ de
l’évaluation de la personnalité se développe, mais à un rythme plus modéré. Durant la
première guerre mondiale, Robert Woodworth (1869-1962) invente le Woodworth Personal
Data Sheet, reconnu pour être le premier test de personnalité au sens moderne du terme.
Composé de 116 questions avec un format de réponses oui/non, le WPDS est construit pour
pronostiquer des risques de désordre émotionnel de soldats au combat. Il a un impact
important, tant au niveau du modèle de construction du questionnaire, que de l’échelle
mesurée qui donnera plus tard naissance au facteur «neuroticisme» du modèle dit «Big
Five». En 1937, Gordon Allport (1897-1967) introduit dans son ouvrage Personality: A
Psychological Interpretation (Personnalité : une interprétation psychologique) le modèle
théorique des traits de personnalité. Ses travaux sont fondés sur une approche lexicale et
l’étude systématique dans les dictionnaires anglais de l’époque de près de 18.000 adjectifs
et noms permettant de décrire une personnalité ou un état mental. En 1938, Henry Murray
(1893-1988) publie Explorations in Personality (Exploration de la personnalité), un ouvrage
référence dans lequel il définit précisément une liste exhaustive de traits de personnalité, qui
servira d’inspiration à plusieurs auteurs d’inventaires (George Stern avec l’Activity Index en
1958, Allen Edwards avec l’Edwards Personal Preference Schedule en 1959, Douglas
Jackson avec le Personality Research Form en 1967, etc.). Dans les années 40, Raymond
Cattell (1905-1998) travaille sur les recherches lexicales d’Allport et d’Odbert et publie en
1949 la première version de son célèbre inventaire, le 16PF. Raymond Cattell, en dépit des
controverses qu’il suscitera (The Cattell Controversy: Race, Science, and Ideology, par
William Tucker, 2009), est également à l’origine du concept d’intelligence fluide et
d’intelligence cristallisée.
Durant la deuxième guerre mondiale, Katharine Briggs et sa fille Isabel Briggs Myers
travaillent sur le modèle typologique de Carl Jung (1875-1961) afin de faciliter l’entrée de
personnel féminin de l’industrie de guerre. Elles créent en 1942 la première version du
renommé Myers-Briggs Type Indicator (MBTI) qui ne prendra son nom définitif qu’en 1956. Il
serait ici impossible de lister tous les grands psychologues qui ont contribué à la
psychométrie des traits de personnalité, mais il serait injuste de ne pas citer Ernest Tupes
and Raymond Christal qui ont en 1961 conceptualisé le Five Factors Model (FFM ou modèle
en cinq facteurs), Hans Eysenck (1916-1997) avec son modèle à trois facteurs PEN et ses
inventaires EPI (Eysenck Personality Inventory, 1968) et EPQ (Eysenck Personality
Questionnaire, 1975) et enfin Paul Costa et Robert McCrae qui, en reprenant les travaux de
Tupes et Christal, ont donné naissance au NEO-PI (1985), l’inventaire de personnalité le
plus utilisé dans les recherches universitaires au niveau mondial.
Dans l’univers de la psychologie clinique, l’évaluation de la personnalité suit deux chemins
distincts : les tests projectifs et les inventaires cliniques. En 1921 en Suisse, Hermann
Rorschach publie son emblématique test projectif des tâches d’encre. En 1935, deux
américains, Henry Murray et Christiana Morgan (1897-1967) élaborent un autre test projectif
réputé, le Thematic Apperception Test (TAT). Ces épreuves, difficiles à interpréter, sont
administrées pour l’essentiel en milieu psychiatrique. Certaines tentatives plus hasardeuses
conduisent à concevoir des tests rapidement contestés. C’est le cas du Szondi créé par
médecin hongrois, Léopold Szondi (1893-1986). Ce test rassemble des photographies de
personnes diagnostiquées comme porteuses d’un trouble psychologique. Léopold Szondi
pensait que le choix des visages révèlerait la pathologie du répondant. Les qualités
psychométriques du Szondi se sont révélées désastreuses. Parallèlement aux tests
projectifs, des inventaires de personnalité pathologique sont développés sous la forme de
questionnaires à choix multiples. En 1939, Starke Hathaway et J. McKinley publient le
Minnesota Multiphasic Personality Inventory (MMPI). En 1956, Harrison Gough lance l’un
des principaux concurrents du MMPI, le California Psychological Inventory (CPI).
En 1968, Walter Mischel (1930- ) publie son fameux livre Personality and Assessment (La
personnalité et l’évaluation) dans lequel il affirme que la personnalité ne peut prédire le
comportement et la performance au-delà d’un coefficient de corrélation de .30. Le dogme
behavioriste va à partir de là se développer pendant plus de 20 ans outre Atlantique et
limiter considérablement l’ouverture d’esprit de la communauté scientifique mondiale. Surfant
sur la mode comportementaliste, l’étude longitudinale sur les assessment centers réalisée
par Douglas Bray (1918-2006) chez AT&T à partir de 1956 devient le point de départ d’une
nouvelle approche de l’évaluation en entreprise. S’inspirant des travaux précurseurs de
Henry Murray au sein de l’Office of Strategic Services (OSS qui deviendra en 1947 la CIA),
Douglas Bray conçoit et met en œuvre le premier assessment center dans une entreprise.
Les principes d’évaluation et les outils créés par son équipe sont publiés en 1974 (Formative
years in business: A long-term AT&T study of managerial lives, Douglas Bray, Richard
Campbell et Donald Grant). Ils sont encore largement utilisés par un très grand nombre
d’entreprises et de cabinets de conseil à travers le monde.
1974-2000 : la révolution informatique
L’invention des premiers ordinateurs date de 1946 (ENIAC de Presper Eckert et John
Mauchly). En 1962, le premier programme capable d’interpréter des données d’évaluation
informatisées issues du MMPI est créé à la clinique Mayo (Symposium on automation
techniques in personality assessment). En 1969, c’est encore le MMPI qui sert de base à la
réalisation du premier rapport narratif informatisé (Automated interpretation of personality
test data, Raymond Fowler, 1969). A la fin des années 60, le Roche Psychiatric Service
Institute (RPSI) commercialise le système de Fowler auprès des psychologues et
psychiatres américains. En 1985, on estime que 1,5 millions de protocoles informatisés du
MMPI ont été administrés. Raymond Fowler considère alors que près d’un quart des
psychologues américains ont eu recours à ce service (1986). En 1987, rien qu’aux Etats-
Unis, 72 éditeurs commercialisent plus de 300 tests informatisés. Près de la moitié d’entre
eux concernent des inventaires de personnalité.
La psychométrie va également rapidement se servir des nouvelles possibilités offertes par
ces nouvelles technologies. En 1974, Mark Reckase est l’un des tous premiers à utiliser la
méthode dite de computerized adaptative testing (CAT ou test adaptatif informatisé). Ce
modèle s’appuie sur les travaux de Louis Thurstone (1927), Richardson (1936), Ferguson
(1943), Fred Lord (1952), Georg Rash (1960), Darrell Bock (1972), etc. L’informatique grand
public naissante permet à Mark Reckase de développer un système de test où les réponses
d’un candidat conditionnent le choix des questions suivantes afin de maximiser la précision
de l’évaluation.
A partir des années 1990, tous les grands tests et inventaires psychométriques sont
progressivement informatisés, permettant ainsi l’administration à distance de questionnaires
traduits et validés dans un grand nombre de langues. Parallèlement, l’édition de rapports
narratifs se démocratise. Trois grands débats s’engagent dans certains cercles de
psychométriciens. Tout d’abord, la prolifération d’échelles d’évaluation sur le web se fait
dans une très grande majorité de cas en dépit de toute validation statistique. Dans ces
contextes, les pseudo-mesures créées n’ont guère plus de valeur que la phrénologie de
Franz Joseph Gall (1757-1828). Ensuite, la diffusion de rapports automatisés engendre la
crainte que la qualité d’interprétation des psychologues ou des praticiens ne baisse dans la
durée. Enfin, l’informatisation n’est pas nécessairement innovation : depuis les années 80,
aucune grande invention psychométrique n’a vu le jour.
2000 à nos jours : nouvelles orientations
De nouvelles pratiques émergent notamment par l’exploration des dimensions
fondamentales de l’homme non encore abordées dans la psychométrie, par le
développement de solutions sur-mesure qui intègrent les nouveaux moyens de
communication web 2.0, et par le souci de répondre aux de grands enjeux générationnels et
sociétaux.
A partir des années 90, l’émergence de la notion d’intelligence émotionnelle et son impact
sur la performance d’un manager a enrichi la panoplie de compétences que l’on cherche à
mesurer (BarOn EQ-i, ESCI et MSCEIT). De nouvelles approches de la personnalité
viennent casser le schéma habituel selon lequel la personnalité dite « normale » se distingue
de la personnalité envisagée sous l’angle des troubles de la personnalité. Les concepts de
« derailers » ou de « dark side » (HDS de Robert Hogan) ou de tendances
dysfonctionnelles (TD12 de Jean-Pierre Rolland) sont apparus et laissent davantage
penser qu’il existe un continuum entre la normalité et le pathologique.
En 2010, Cubiks met en place en partenariat avec L’Oréal « Reveal by L’Oréal », le premier
business game (jeu d’entreprise) multi-métiers révélateur de talents. De son côté, en 2012,
SHL propose en vue du recrutement une solution d’évaluation en 3D sous le nom de
« Graduate Talent Simulation ». Dans la même logique, la dernière décennie a vu se
développer les tests de jugement situationnel (Leadership Judgement Indicator de Michael
Lock et Rob Wheeler). Ces derniers se présentent sous la forme de mises en situation
proches de ce que pourrait rencontrer le candidat et bénéficient d’une forte validité
apparente. La tendance d’outils toujours plus adaptatifs s’exprime également par le
développement de la notion de banque d’items (item bank). Le principe est de pouvoir
disposer d’un système de gestion des items qui permet de pouvoir élaborer des tests
uniques pour chaque candidat mais de niveau équivalent (Verify, TalentQ). Les items sont
alors générés automatiquement à partir de la banque d’items. Cette technique permet de
mettre en place des processus d’auto-administration, voire même, de e-sélection.
Plus récemment, on constate un regain d’intérêt autour de la notion de bien-être (well
being), de psychologie positive, de bonheur, de spiritualité, etc. D’une certaine manière,
l’approche traditionnelle d’évaluation de la personnalité, des préférences, des aptitudes ou
des compétences au service exclusif de l’organisation est dépassée, pour s’orienter
d’avantage vers l’individu dans sa plénitude, sa quête de bonheur, et sa contribution plus
large à la société (Spiritual Intelligence Assessment de Danah Zohar). Ceci est au fond dans
l’ère du temps en cette époque où les questions de responsabilité sociale, d’épanouissement
personnel, et de quête de sens occupent une place centrale dans nos sociétés.
Et pour l’avenir ? L’article « You, By the Numbers » de H. James Wilson (Harvard Business
Review, septembre 2012) offre des pistes de réflexion intéressantes. L’auteur introduit la
notion d’auto-analytics, pratique émergente consistant à volontairement collecter et
analyser de l’information (data) sur soi-même de manière à s’améliorer. Des outils aux noms
évocateurs de trackers ou nudgers sont désormais disponibles sur des applications mobiles
pour analyser et interpréter des données auto-collectées en continu et proposer des
remèdes afin de rendre sa vie personnelle ou professionnelle plus productive et
satisfaisante. Ces innovations marquent peut-être une évolution vers l’utilisation d’une
psychométrie d’un type radicalement nouveau : désintermédiée (sans l’intervention d’un
praticien), juste-à-temps et plus holistique… avec toutefois un risque pour le sujet de ne
penser à aucune autre réalité que la sienne.
Les éditeurs : organisation de la profession
Les pays anglo-saxons ont déjà une certaine maturité quant à la diffusion et à l’utilisation des
outils psychométriques. De nombreuses associations regroupant les professionnels et les
chercheurs existent aux Etats-Unis (APA, SIOP) et au Royaume-Unis (BPS). Sur le plan
international, la commission ITC (International Test Commission) s’est mise en place en
1978. Sa vocation est de pouvoir définir des normes, des standards par rapport à la validité
des outils psychométriques, leur mode de diffusion (via des qualifications) et leur utilisation
éthique et déontologique.
Au Royaume-Uni, des formations qualifiantes standards permettent aux professionnels
d’utiliser les tests d’aptitudes (Level A) et les tests de personnalité (Level B) sont proposées.
Chaque éditeur de test dispense également les formations qualifiantes à ses outils.
En France, à l’origine, le marché des tests psychométriques était principalement détenu par
les ECPA et les EAP dans les années 70. C’est à partir de la fin des années 80 qu’ont
commencé à s’implanter des éditeurs anglo-saxons tels que SHL ou PA Consulting, devenu
plus tard Cubiks. Dans les années 2000, plusieurs acteurs ont vu le jour mettant beaucoup
l’accent sur l’accessibilité et le marketing de leurs outils.
Afin de s’assurer que les standards de validation des outils et de qualification des utilisateurs
soient respectées, les principaux éditeurs disposant de cellules R&D et de publications
scientifiques se sont fédérées autour de la charte des éditeurs crée en 2009
(http://www.charte-des-editeurs.org). Les éditeurs membres de cette charte sont les ECPA,
SHL, Cubiks, OPP Ltd, Hogrefe et Saville. Trois experts universitaires indépendants font
également partie de la charte pour juger de la qualité des outils qui l’intègrent. La vocation de
cette charte n’est pas de sanctionner les distributeurs ou éditeurs qui proposent des outils
aux qualités psychométriques médiocres ou qui proposent leurs outils sans réunir de bonnes
conditions de transfert. La finalité est surtout de permettre aux futurs praticiens de faire
davantage la part des choses entre des outils fiables et des outils dont les standards de
qualité sont plus douteux.
Après un marché très ouvert et hétérogène en termes de qualité et de déontologie
d’utilisation, de nouveaux acteurs susceptibles d’être de bons candidats pour intégrer la
charte des éditeurs viennent s’implanter en France tels que l’éditeur canadien EPSI,
l’américain Hogan Assessments ou l’allemand cut-e.
Dans ce contexte dynamique, on peut imaginer que le paysage français de la psychométrie
connaitra une nouvelle étape dans son développement vers plus de maturité.
Carte des Circuits
INTERETS
EXECUTION
COMPORTEMENT
DERAILLEMENT
APTITUDES
INTERETS
TRAITS DE
PERSONNALITE
TYPES DE
PERSONNALITE
APPRENTISSAGE
BESOINS /
VALEURS
CULTURE
ORGANISATIONNELLE
RELATIONS
INTERPERSONNELLES
CONFLIT
INTERCULTUREL
Predictive Index
Insights Discovery
Personal Profile Analysis
DiSC Golden MBTI 2 Workplace Big Five
NEO PI-R 16PF
Belbin
Team Management
System
MTR-i
Thomas-Kilmann Instrument
FIRO-B
SOSIE
Wave Styles Professionnels
PAPI
Strength Deployment Inventory
Birkman
Strong Interest Inventory
Choices Architect
Honey & Mumford
Kolb
MBTI 1 CCTI
META
BarOn EQ-i
MSCEIT Emotional Intelligence
Leadership Judgement Indicator
Watson-Glaser Critical Thinking
Emotional & Social Competency Inventory
Hogan Development
Survey
Organizational Culture Inventory
PFPI
Global Mindset Inventory
Cultural Transformation Tools
HBDI OPQ 32
TalentQ Elements
TalentQ Dimensions
Verify
Leadership Effectiveness Analysis
COMPETENCES
Success Insights
EQUIPES
Via EDGE