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ROM III avril 2011. Rome : 1 euro - Kolomyaghi : 40 roubles - San Juan de Arama & La Gorgona : 3500 pesos les couvertures auxquelles vous avez échappé

Revue rom r o m iii

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Revue d'Optimisme Modéré n°III

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ROM III avril 2011. Rome : 1 euro - Kolomyaghi : 40 roubles - San Juan de Arama & La Gorgona : 3500 pesos

les couvertures auxquelles vous avez échappé

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La liste en est établie selon la nomenclatureen vigueur au FDD :

01.0. Paris : brûlé pour une feuille de papier01.1. Langres : Girault de Prangey01.1. Langres : Claude-Jules Ziegler01.1. Un long dimanche de 23 juillet01.2. Paris : Photographic Madness01.4. Paris : Premiers photographes de la PJ03.0. Rome : Les messes noires d’Ascanius03.2. Rome : A. de B.09.6. Leningrad : Ligovsky Prospekt09.8. Leningrad : Soviet Monkeys10.5. Tlaltizapan, Morelos11.0. La Fraga : Nicolas Federmann11.0. Sanctuaire Tayrona : Llanto Sagrado11.0. Tunja : Gregorio Vazquez13.0. Jerusalem : Akeldama13.0. Les Manichéens15.7. Mantchoukouo de Corto Maltese16.1. Kyoto : Maître Tchou-Ho-Sou-Hi16.7. Tokyo : Amnésie Japonaise19.8. Nébuleuse Andromède19.8. Raymond Loewy

Photo, cinéma, enquêtes et analysesCe numéro 3 parait avec un retard qui, nous

l’espérons, sera pardonné par nos abonnés.Nous leur proposons de prolonger les abon-nements jusqu’à la fin de l’année 2011.

Les mois passés ont permis de préciser lesactivités de Clémentine et de la société desAmis. Le Fonds de dotation va fonctionnercomme un laboratoire et une agence derecherche sur le patrimoine photographique.

Les résultats seront présentés non seulementsous forme d’articles illustrés sur papier et surnotre site www.clementine.org, mais surtoutsous la forme de courts et de moyens métragesdont le pilote a été présenté à Paris Photo enNovembre 2010.

Quelques énigmes récentes associées à desproblématiques plus traditionnelles vont con-stituer l’essentiel des premiers synopsis. Nouspouvons d’ors et déjà annoncer quelques pistessur lesquelles nos jeunes enquêteurs cinéasteset amateurs vont s’élancer, toujours à partird’épreuves photographiques ou de documentsd’époque.é

ditorial

2 éditorial

En hommage à Altiero Spinelli etUrsula Hirschmann, Clémentine conservemanuscrits et documents concernant la con-struction de l’Europe à travers l’évocation del’année la plus noire de toute son histoire,1943, quand fort peu d’Européens gardaientespoir. Voici la suite du feuilleton de l’Inconnu,d’après le manuscrit inédit d’un français volon-taire du STO, en apparence convaincu que lefutur se construit en Allemagne nazie :

“Paris laissé loin derrière. Roulons sur lesbords de Marnes. Jolis bateaux, guinguettes fleuriessans accordéons, piscines. Quelques baigneurs.Le train entier est aux portières et regarde nostal-giquement ce paysage banlieusard et dominical. Peut-être pleurent-ils ?

Moi je songe que je roule vers le pays de MeinKampf, de la SS, des Congrès de Nuremberg auxdeux cents projecteurs verticaux. Allemagne,terre de nos illusions aurait dit Vieuchange. Sije sais être fort, belle me sera la vie. Je ne saispas l’allemand, occasion unique de me prouverce que je vaux. Je ne serai que ce que je sauraime faire, que ce que je vaudrai. Ma vie serabelle parce que je la veux belle là-bas. Unpays, une civilisation m’attendent. Je les feraimiennes, je serai fort. Que m’importent lesguinguettes banlieusardes où pleure l’accordéondominical ! – je suis assis droit dans mon com-partiment.

Devant moi se dessine la silhouette du jeunecapitaine SS qui habite deux semaines …. ?

Vallée de la Marne, tu peux dérouler tes «splendeurs », je te regarde distraitement, je roule versle national-socialisme. Je vais connaître le paysenchanté. Obligation de remettre en place les bagagesqui vont tomber. Et puis les voisins font connaissance.Tout le compartiment parle. Confiance générale.

À côté de Guy un jeune qui paraît encoreplus jeune. Lunettes à monture d’acier, tout à faitgenre séminariste de province. Pour compléter laressemblance il porte un béret enfoncé droit sur la tête.Parle peu, mais nous apprenons qu’il est charcutier deNogent-sur-Marne et rejoint l’endroit où son pèretravaille. Requis S.T.O. – face a moi, deux abrutis.

feuilleton 15

1943 : europe année zéro

"la caravane passe - par Mirka Lugosi"

Son voisin, volontaire permissionnaireretournant. Cicatrice qui lui barre le front, poil rareaussi, mais poil plus sympathique. Dégueulisinsignifiant. Sent mauvais aussi plus acide.

Celui qui est assis à droite du pachydermeau poil antipathique est un brun, 23 ou 25 ans.Complet bleu, nœud papillon. Aspect du parfaitfonctionnaire. En fait dessinateur d’aviation requisau S.T.O. en partance pour Graz. Intelligent, ditdes choses pas trop bêtes sur l’Allemagne. Jouons auxcartes ensemble...

(à suivre)

L’un gros, tout en boursouflures, graissemalsaine, comme soufflée. Le poil raz et rare, il sem-ble dégénéré, porte de lourdes bottes d’infanterie alle-mande. Ancien du travail en Allemagne, il est per-missionnaire et revient. Me semble volontaire.Il parle des bombardements qu’il a connu, il semblemettre une joie malsaine à parler de cadavres,de jambes écrasées, de torses et de têtes broyés.

À l’entendre, il était infirmier dans sonusine, qu’il dit le gars, très peur pour les maladesqui tombent en ses grosses pattes. Celles-ci qu’il acourtes, grosses et velues pétrissent sans arrêt sesrotules. J’éprouve au son de sa voix, à la vue de seshorribles menottes, de son poil clairsemé, de sa bour-souflure le sentiment de répulsion et de dégoût quem’a toujours donné l’hippopotame ou le crocodile.Sent mauvais, odeur âcre.

08.7 Gueorgui Kuzmin, Sebastopol

R.O.M. 3avril 2011

R.O.M. 3avril 2011

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petites et grandes annonces

14 annonces

sommaire du n°iii- Éditorial et mot des webmasters

- Concours lexicographique, page 4

- Actualités Gitanes, 5

- Évidences photographiques, 6-7

- L’invité : Sergey Sveshnikov

- Ligovsky Prospekt, 10-11

- Igarka, 12

- Colloque chez Rosphoto, 13

- Calendrier des salons et des ventes, 14

- Europe année zéro, feuilleton, 15

éditorial 3Ces films tous publics vont, dans un premier

temps, servir de supports aux travaux pra-tiques de formation dispensés par Clémentine.

Un projet d’aménagement des locaux du 5 ruede la Banque, présenté par deux jeunes archi-tectes, vient d’être agréé et les travaux vontcommencer.

La Bibliothèque Clémentine fonctionneracomme un laboratoire de recherche et deconsultation avec un accès particulièrementsimple. Une collection d’échantillons depapiers de toutes les époques et toutes les ori-gines constituera le centre du départementd’analyse et d’expertise.

Une exposition et quatre jours de festivitéscélébreront son ouverture programmée pour lasemaine du 21 au 24 septembre 2011. ◾ �

30 avril John G Morris Photo DiaryJournal d’un «Picture Editor» B&G

22 septembre Illustrated NewsCent ans de photo-journalisme B&G

12 décembre 2011 : le cinéma primitifLes photographes témoins du cinéma B&G

ROM III 2011 (issn 2108-8179)histoire matérielle de la photographie

directeur de la publication :association des Amis de Clementine

administration : 4 galerie Vivienne, 75002 Paris

la revue est en ligne sur www.clementine.org

Contribution suggérée pour les exemplaires imprimés sur papier : 1 euro6 numéros expédiés par la poste : 30 euros

il a été tiré 55 exemplaires numérotés (1 à 55 ) en grand papier, contenant :

une épreuve argentique signée de Sveshnikovainsi qu’un CD gravé de «Ligosky Prospekt»

Photo de couverture : SveshnikovLes Barricades d’Août 1991

L'atelier d'encadrement vient de s'installerdans les locaux du 4 galerie Vivienne.

Nous proposons un seul modèle particuliè-rement facile à manipuler et qui se décline enquatre tailles. Une baguette haute en boisnaturel et deux feuille de plexiglass qui offrentl'avantage de ne pas se briser et de filtrer lalumière, les UV, complétées d’un passe-par-tout en carton non acide. Venez le découvrirau 4 de la galerie Vivienne, accès par le 5 ruede la Banque. Une réduction de 15 % estaccordée aux Amis de Clémentine◾

R.O.M. 3avril 2011

R.O.M. 3avril 2011

La Russie informatiqueL'influence de la Russie est multiple, une telle

puissance, un cinquième des terres émergées, detelles réserves naturelles ne peuvent que peser suerla planète, et l’univers virtuel n'échappe pas à larègle. L’internet russe est un iceberg informatiqueimpénétrable avec ses multiples strates. Son aspectformidable au sens poétique stupéfie le voyageurimprudent qui se hasarde et s'interroge.

Un réseau immobile et puissant, qui rassembletous les visages de la société russe, avec ses stéréo-types de magazine ou de cinéma, depuis la blondefatale, ni Nikita ni Matriochka, un fantasme dan-gereux pour le geek occidental en mal d'amour,jusqu’au hacker russe sans scrupule, nouvel avatardu bolchevik qui aurait troqué le couteau entre sesdents pour un clavier de virtuose !

Derrière ces images forcement réductrices, laréalité russe résiste encore et toujours aux ana-lystes et ne diffuse que peu de clés qui permet-traient sa compréhension. Il est malaisé de percerson permafrost même lorsqu’on se nomme HélèneCarrère d'Encausse.

Imaginez combien cela est encore plus vrai dansle monde déjà nébuleux de l'informatique, aussivaste que les plaines de Russie où s’est enlisé plusd'un envahisseur. Une explication nous sembletenir la route : la Russie serait à la fois la solutionet le problème, la maladie et le remède. La Russiedistribue hackers et virus comme elle les combatavec rudesse, dans une ambivalence toute slave,teintée d'orgueil et de générosité. Ce détache-ment, cette indifférence à dispenser aussi bien desbienfaits que des menaces fait de la Russie un paysfascinant sur Internet comme ailleurs.

Bruno et Étienne

Calendriers des foires et des ventes à venir :

27-30 avril 2011le SLAM au Grand PalaisSalon du Livre Ancien

5-6 juin 2011Foire de Bièvres200 exposants

12 juin 2011Beaussant-Lefefebvre

Collection de Pierre Marc Richard

12 juillet Benvenuti tuttiBinoche et Giquello

Cent photographes en Italie 1840-1870

(cou

vertur

e pr

ovisoire)

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4 clémentine

Les remarques récentes d’unamateur passionné au sujet de la difficultéde lire des notices rédigées en langueanglaise nous invitent à nous pencher surl’enjeu du vocabulaire descriptif dupatrimoine photographique.

Prenons le terme vintage. Même s’ilprovient à l’origine de la langue française, il n’a aujourd’hui que de rares équivalents dans lemonde viticole : millésime ou dans le domainedes frippiers de luxe : déjà porté.

En photographie on rencontre lesexpressions : épreuves originales, decollection, d’occasion, de seconde main,anciennes, d’époque, d’archives, d’artiste,autant de termes correspondant à des notionsjuridiques et fiscales précises mais distinctes,et que le mot anglais générique unifie pour lemeilleur et pour le pire.

Un concours est ouvert, pour tenter detrouver les expressions et les mots les plusjustes pour lever les ambiguïtés, convenir dupatrimoine à sauvegarder.

En Angleterre, Talbot photogenic drawingssont baptisés calotype, tandis que le termePhotography est suggéré par Sir CharlesWheatstone dès janvier 1839, dans une lettreà WHF Talbot précédant d’un mois une com-munication de Sir Hershel.

Dans la France partagée entre parti-sans de Nièpce et de Daguerre, les amateursraffinés, adeptes de procédés sur papier,préférent au terme calotype celui d’héliogra-phie proposé par Nicéphore, et ils décriventcomme des héliographies sur métal les produc-tions de l’autre camp. Les émules de Daguerrene vantent que leurs daguerréotypes. On ren-contre quelques rares utilisations du termedaguerréotype pour des épreuves sur papier audébut des années 1840.

Le terme photographie semble adoptéen France seulement après le coup d’état du 2décembre 1851 qui entraîne, parmi de nom-breuses transformations de la sociétéfrançaise, celle du nom de la SociétéHéliographique en Société Française dePhotographie. Les amateurs esthètes sont rem-placés par les entrepreneurs et marchands dematériel. La revue La Lumière change de con-tenu, et dorénavant utilise de manière systé-matique le terme photographie.

concours lexicographiqueRetrouvons une richesse de vocabulaire pour

désigner ce que nous appellions hier une“photographie” et qui n’a rien de communavec les milliards d’images numériquesproduites chaque jour.

La protection du patrimoine photographiquemérite certainement la création d’un vocabu-laire en langue française. L’institutionnationale du quai Conti a accordé deux siègesaux photographes en élisant Lucien Clergue etYann Artus-Bertrand dans sa classe del’Académie des Beaux-arts en 2006. Peut-onproposer d’intégrer quelques termes del’histoire de la photographie au dictionnairede l’académie ? Un abonnement de deux ansau grand papier recompensera l’éventuellauréat. Vous êtes invités à envoyer vospropositions à [email protected] ◾�

journaldeClémentinejournal de clémentine 13

quand la photographie entre au musée

Les soirées de Saint Pétersbourg,Octobre 2010. Les Amis de Clémentine avaitrépondu à l’appel de Zakhar Kolovski,directeur de l’agence russe Rosphoto, BolchaiaMorskaia 35, SPb, organisatrice d’un premierseminaire sur la conservation et l’expositiondes épreuves photographiques muséales. Sixintervenants avaient donc fait le voyage depuisParis. Ils avaient été précédés par 40 épreuvesdes années 1848-1870 de la collectionClémentine formant une exposition inscrite auprogramme de l’année France-Russie. Voici unrésumé du colloque :

mercredi 13 octobre

ZAKHAR KOLOVSKI, ouverture du colloqueMICHEL FRIZOT (PARIS). Genèse et choix desépreuves de la Nouvelle Histoire de la photograpohieFRANCESCA BONETTI (ROME)Constitution des collections photographiques romainessous le Pape Pie IX

Sensible à la lumière : Nicéphore Nièpce et la photogra-phie, Film écrit par Michel frizot, réalisé par Jean-Michel Sanchez, projeté et commenté par l’auteur

jeudi 14 octobre

SERGE PLANTUREUX (PARIS). Proposition d’unrepère systématique en 9 périodes et 19 zones pour organ-iser une collection générale de photographiesSERGE KAKOU (PARIS) La photographie de voyageau XIXème siècle, l’exemple de l’Océanie

Atelier pratique, analyse matérielle des épreuves vendredi 15 octobre

VALERY VALRANOROV (ST-PB) Histoire dumouvement Underground de Leningrad, les deuxBoris, Smelov et Koudryaokov

MODÉRATEUR : ZAKHAR KOLOVSKIDébat : Quelles photographies pour quels musées?

Prochains colloques en préparation :

octobre 2011 : Dohajanvier 2012 : TorontoMars 2012 : MexicoJanvier 2013 : MoscouMars 2013 : Kyoto ◾

Serge Kakou et Serge Plantureux.Giorgio Sommer, Si traduce il francese, 1860

R.O.M. 3avril 2011

R.O.M. 3avril 2011

Valery Valran, historien russe

Francesca Bonetti avec la même

Michel Frizot, avec notre aimable traductrice

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actualités gitanes

actualités gitanes 5

La collection Clémentine vient derecevoir un don anonyme de trois épreuvesdes années 1929-1930. Alors qu’elle travail-lait pour une commande de l’éditeur Firmin-Didot sur un ouvrage illustré intitulé la routede Paris à la Méditerrannée, Germaine Krullqui voyageait accompagnée du chef de servicephotographique Florent Fels, documentaplusieurs campement de Gitans rencontrés lelong de la nationale 7.

12 publications

En 1929, alors que l’Occident est plongédans une crise financière, Staline engagel’URSS dans la conquête du Grand Nord.La route maritime sevmorput ouvre sur la merBlanche la voie commerciale de la Sibérie.L’entreprise est bientôt supportée par la mul-titude des condamnés politiques créés par laloi de terreur de décembe 1934.

Igarka est l’une de ces villes neuves fondéesen marge des camps de travail. Les photogra-phies prises par la secrétaire du comité exécu-tif d’Igarka, Agnia Krasnopevkova, témoi-gnent de la vie des prisonniers. On peut lesrapprocher de l’article publié par H. P. Smolkaen avril 1937 dans The Geographical Journal :“à cette époque, les journaux parlaient souvent detravail forcé. Je ne peux pas dire quelles étaient lesconditions à ce moment-là (...) Les (koulaks) (...)peuvent difficilement être distingués des travailleurslibres. Il n’y a pas de garde”.

Aujourd’hui, le musée du Goulag au milieudes boutiques de luxe de Moscou a pris le partid’une reconstitution terrifiante, spectaculaire,fils barbelés et miradors.

Face à cela, les modestes épreuvesd’époque semble plutôt donner raison àSmolka. Il s’agit d’apprécier le non-dit, lacontradiction, voire l’euphémisme, résumépar Soljenitstyne dans une définition descamps invisibles, “ lorsque le camp est implantédans le corps même d’une grande ville, au sein-mêmede Moscou, il est rendu invisible par le monde quil’entoure, qui l’enveloppe ”◾

Sorana et Annabel, étudiantes Master II

l’album d’igarka nationale 7

01.6 Germaine Krull

01.6 Florent Fels

R.O.M. 3avril 2011

R.O.M. 3avril 2011

Par ailleurs, on annonce la sortie immi-nente, presqu’un an jour pour jour après unemalencontreuse directive de l’administrationfrançaise visant les Roms, d’un ouvragecoédité par les Amis de Clémentine et AMC,(Archive of Modern Conflict), consacré aux por-traits de gitans rencontrés par des soldats dela Wehrmacht ou de la waffen-SS, sur le frontde l’est, entre 1941 et 1944 ◾

Chaque numéro de ROM accueille unpoème ou une histoire sur la perceptionqu’ont les gitans de la valeur des choses etleur transmission du patrimoine.“Elonga. Elle ne voulait pas vivre ailleurs que

dans une caravane. Elle avertit son mari : “si tuachète une maison, je casse tout.” Il achète une maison.

Dès qu’il est parti, elle prend un marteau etcasse tout à l’intérieur de la maison: les fenêtres,les portes, elle arrache le papier à mur. Quandson mari revient, il ne comprend pas. Elonga : Je t’avais prévenu. Maintenant, la

prochaine fois que tu sors, je la brûle.”◾Alexandre Bouglione

Un peuple de promeneurs, 1998

la valeur des choses

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6 évidences photographiques

évidences photographiques

du monde entier 11

Le panorama de Ligovsky Prospekt estcomposé d’une centaines d’épreuves assemblées en1933 sur 23,80 mètres par l’architecte sovietiqueNikolay Khomoutetski (1905-1973).

Cette fresque est chargée d'histoire et fait le lienentre l’actuelle Russie et l’URSS des années 1930au moment où celle-ci basculait de l'utopie com-muniste à la terreur stalinienne, document inéditd’un boulevard de Leningrad, témoin de l'histoirede l’urbanisme soviétique.

Le documentaire sur ce panorama de Ligovsky Prospekt conservé dans les collections de AMCa été inauguré au salon Paris-Photo en novembre 2010. Un CD numéroté et signé par les deuxauteurs est joint aux 50 exemplaires du Grand Papier de ROM 3. La vidéo est consultable sur

www.clementine.org ou www.youtube.com/watch?v=17A5JF3zn18.

Une enquête passionnante a commencé. Le laboratoire en création de Clémentine a été saisi d’une demande d’analyse sur un lot de calotypes néga-tifs représentant des arbres et des futaies. Ces négatifs sont visiblement sur des papiers anciens et selondes procédés publiés à la fin des années 1840. Aucun doute que les puissantes machines à infra-rouge ourayons-X confirmeront ce que l’oeil nu perçoit déjà. Voici la première interrogation soumise aux débats :

De manière générale, les altérations et les saletés de certains négatifs sont les stygmates du temps.

Dans le cas précis du négatif papier reproduit ci-contre, plusieurs dépots de saleté ont généré des disquesou des auréoles blanches autour des dépots. Ces impuretés ont donc contrarié la réaction chimique. Ce quipermet d’affirmer qu’elles étaient présentes sur la feuille se papier avant la succession des opérations quil’ont transformée en calotype négatif. La révélation de l’image négative en a été altérée. Quelles pouvaient donc être la motivation et l’intention d’un photographe qui a ainsi priviliégé l’utilisa-tion d’une feuille impropre et souillée ?

image positive créée sous photoshop

R.O.M. 3avril 2011

R.O.M. 3avril 2011

Cette partie de la ville a été en grande par-tie épargnée lors du blocus et ce qui était audépart un document de travail est devenu letémoin du rêve des projets de création d'un avenirmeilleur ◾

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10 du monde entier évidences photographiques 7

ligovsky prospekt

des yeux au chromatisme vague, bleu, gris, doré ou toutà la fois. Il m’inquiète, je le fuis en marchant une cen-taine de mètres en direction du prestigieux Hôtel Octobre.

C’est de là que je débute mon sacerdoce au serv-ice du son et des images. Prendre, comprendre puisretranscire l’essence de cette mythique artère pétersbour-geoise. Je pense au jeune peintre Pisakriov et au lieu-tenant Pirogov dont les aventures sur la toute procheNevski Prospekt dans la nouvelle de Gogol sont pleinesde détails qui, ici, semblent avoir traversé les siècles et lapostérité littéraire. Dans cette lutte qu’est la création, lesavancées technologiques telles que le microphoned’Alexander Graham Bell ou la camera Pathé Baby mesemblent constituer des alliers de taille.

Un temps d’observation, une attention partic-ulière portée aux va-et-viens louches et incessants de lapolice locale et je peux enfin shooter en plans fixes, lesnombreux immeubles qui bordent Ligovsky. Mon impres-sion était la bonne, la lumière crépusculaire, caractéris-tique des fins d’après midi de l’automne russe illuminel’avenue ainsi que les facades des lourds batîments, par-fois largement décrépis. Des silhouettes de passants, desvisages intrigués ou moqueurs obstruent épisodiquementmon objectif. Lorsque ma mission fut menée à terme aprèsquelques heures de travail et des jambes raidies par lefroid, je décide enfin de quitter les lieux en me dirigeantpéniblement vers mon hotel, à l’autre bout de la ville» ◾

(de Guillaume Ingert, envoyé spécial)

du monde entier

Le premier court-métrage produit parClémentine a été réalisé par deux jeunes étu-diants de l’école des Beaux Arts de Paris,Romain Renault et Lyes Hammadouche avecl’aide d’Anastasia Chapovalova et de GuillaumeIngert. Voici quelques extrait du Making-of :

“Le travail d’animation d’un documenthistorique nous a demandé une étude du contextedans lequel il a été commandé et réalisé. Il s’agissaiten effet pour nous de faire ressortir les traits origi-naux et les mettre le doigt sur les différents stigmatesafin de les rendre visibles.

Nous nous sommes replongés dans la Russierévolutionnaire et bolchévique pour nous inspirer dugraphisme, des slogans et affiches de la propagandepour marquer les bouleversements que Ligovsky tra-versait. Dès le début du projet il paraissait évidentque le script devait avoir comme trailer la rue elle-même, elle est ainsi devenue une pellicule de cinema.Les bâtiments sont devenus des acteurs, celui qui ademandé le plus de travail est l’église qui devait êtrerasée pour laisser place à une station de métro.L’accord le plus difficile fut de donner le rythme audéfilement tout en préservant celui de la lecture, ilfallait préserver les suspsens et les respirations, celanous a donné l’idée de la tache de sang sur Kirov parexemple, un visuel qui soulignait le sens du texte”.

Pour aider nos contemporains à serepérer, Clémentine avait dépêché un envoyéspécial sur le boulevard actuel, il raconte :«Du retard, je m’engouffre furtivement dans la bouchede métro la plus proche. Un trajet bref puis une sortielongue et douloureuse vers le froid, l’agitation deLigovsky Prospekt. Un rendez-vous inopiné, et finale-ment annulé, la rencontre d’un indigent Ouzbeck auregard pesant, insistant…

Un accent personnel dans une voix roquailleuse,

R.O.M. 3avril 2011

R.O.M. 3avril 2011

Présence d’auréoles blanches autour des impuretés :Les dépôts de saleté étaientdéjà présents au momentde la sensibilisation de lafeuille de papier.

Négatif papier étudié

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СергейСвешников

Мне очень нравились фотографии

Карла Блоссфельда и Марии Панич.

Блоссфельд создавал очень резкие и

отчетливые - так сказать, портреты

растений. Панич - нерезкие, мерцающие

листы, где все сливается в стелящийся

ковер.

Если говорить о портрете, то мне

интересны пожилые люди, на лицах

которых запечатлены все их душевные

движения за прожитую жизнь.

Когда делаешь портрет, раздваива-

ешься. Один человек общается с героем,

шутит - я ведь не из-за угла снимаю. А

другой отстраненно и цинично

наблюдает за светом, тенью, ракурсами.

Вначале раздваиваться трудно, а потом

очень увлекательно”.

Сергей Свешников

фотограф из Санкт-Петербурга

l’invité 9R.O.M 3.avril 2011

R.O.M. 3avril 20118 l’invité

“Analog photography interests me muchmore than digital because it has a much wider rangeof possibilities. Analog photography, made usingfilm, starts with choosing a subject. First of all, aclear plan, a story appears in photographer's head.

As far as portraits are concerned, I am mostinterested in elderly people whose faces bear traces ofthe life-long workings of their hearts.

Shooting a portrait splits you into twopersons. One is in contact with the sitter, jokingwith him: after all, I am not shooting behind hisback. The second person is laid-back and cynical inwatching the light, the shadows, the angles. It isdifficult at first to be two people at the same time,but eventually it absorbs you.”

Sergey Sveshnikov

Cергей Cвешников

Sur les traces de Raskolnikov et de Boris Smelov, toits de Saint-Pétersbourg, septembre 1985

Sur les barricades devant la Maison Blancheà Moscou, nuit du 20 août 1991. Le 19 août 1991, un jour avant queGorbatchev et un groupe de dirigeants desRépubliques signent le nouveau traité d'union,un groupe se faisant appeler le Comité d'Étatpour l'état d'urgence essaya de prendre lepouvoir à Moscou. Des manifestations contre les dirigeants ducoup d'État se déroulèrent à à Leningrad et àMoscou devant la Maison blanche, leparlement russe.