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LA FRANCE AGRICOLE 3459 - 20 - 02 NOVEMBRE 2012 L’actu de la semaine SANS FRONTIÈRES Q uinze ans après le suc- cès foudroyant du semis direct en Argentine, l’agri- culture de précision s’im- pose en région pampéenne. Elle devient même la norme parmi les exploitants propriétaires de grandes surfaces. La conduite des cultures selon le milieu, voire au niveau microparcel- laire, est vue comme un pari gagnant. C’est rentable, surtout en maïs, et certains marchés d’exportation l’exigent pour des raisons environnementales. Ce phénomène est toutefois plus lent que ne le fut l’adoption du non-labour, grandement facili- tée par la mise sur le marché en 1995 des semences de soja résistantes au glyphosate. Grands exploitants conquis Difficile d’évaluer au niveau national le degré d’adoption des technologies liées à l’agri- culture de précision mais la majorité des grands exploi- tants en seraient déjà adeptes, notamment ceux des groupes Crea (1). En revanche, les petits rechignent à s’y mettre, ne dis- posant pas des outils ou moyens nécessaires. L’agronome Santiago Liebana, 29 ans, est chargé de cultures De plus en plus d’exploitants trouvent un intérêt économique à moduler leur conduite de culture selon le milieu. dans une estancia de dix mille hectares située à Trenque Lauquen, à l’ouest de Buenos Aires. « L’imagerie satellitaire, les cartes topographiques et les indicateurs de rendement sont les trois outils de base que nous utilisons pour définir la densité de semences et les doses d’engrais les mieux adaptées au milieu, au sein d’une même par- celle, explique-t-il. Nous avons ainsi atteint des pics de ren- dements en maïs de 180 q/ha sur les parties basses, avec une densité de 75 000 plantes par hectare, et nous visons la stabilité sur les parties hautes, avec 50 000 plants par hectare. Nous modulons les doses d’en- grais azoté et de phosphore, ce dernier ayant un gros impact économique là où les déficits sont importants. Mais nous ne modulons pas les doses d’herbi- cide car les infestations varient peu selon la nature du sol. » Entre les économies d’intrants et les augmentations de rende- ment, les gains supplémentaires permis par l’agriculture de préci- sion iraient jusqu’à 80 E/ha en maïs, selon diverses sources. Un bénéfice nettement moins élevé en soja, en raison de son coût d’implantation inférieur. Les avantages sociaux et environnementaux de telles pratiques motivent les agricul- teurs. L’association argentine des producteurs en semis direct a d’ailleurs intégré l’agriculture de précision dans le cahier des charges de sa certification envi- ronnementale. Elle veut ainsi faire valoir ses bénéfices auprès des consommateurs. Marc-Henry André (1) Équivalent argentin des groupes Ceta (Centre d’études techniques agricoles). Argentine L’agriculture de précision gagne du terrain Norvège Droits de douane Alors que plus de la moitié des produits alimentaires consommés en Norvège sont importés (la plupart depuis l’Union européenne), le gouvernement a annoncé, fin septembre, sa volonté d’augmenter les droits de douane à l’importation de certains fromages (jusqu’à + 277 %) et certaines viandes. Bruxelles proteste contre ce projet, arguant que la Norvège fait partie de l’espace économique européen. Ukraine Prix plancher pour le lait Depuis septembre, Kiev a introduit un prix plancher de 21 centimes par litre pour le lait cru produit sur les petites exploitations privées, indique Ubifrance. L’objectif est de protéger les petits éleveurs, qui représentent 70 % de la col- lecte nationale. Ces derniers ne pouvaient plus survivre avec le prix payé dans certaines régions (entre 15,8 et 17,8 centimes/l). Brésil Produire des engrais Le pays est très dépendant des importations d’engrais mais plusieurs entreprises prévoient d’investir près de 19 milliards de dollars en cinq ans pour que cela change. Ainsi, le taux de couverture de la demande nationale en nutriments N, P et K pourrait passer de 28 % en 2012 à 63 % en 2017. Madagascar Abeilles malades Alors que la varroase, maladie parasitaire arrivée dans l’île en 2009, décime les populations d’abeilles, la ministre de l’Elevage évoque une « catastrophe nationale pouvant déséquilibrer [la] balance commerciale ». Sur 102 833 ruches recensées, 25 000 sont infectées et nécessiteraient une intervention urgente. « Nous récoltons des données tous les cinq mètres », souligne Santiago Gonzalez Venzano, fondateur de la start-up Solapa 4, qui propose depuis 2010 une plate-forme virtuelle géoréférencée vouée à l’agriculture de précision. « Nous uniformisons les différents procédés et langages existants pour interpréter les multiples données sur la topographie et les analyses de sols, les applications d’engrais, etc. » L’agriculteur intègre lui-même les paramètres de production (culture, date et densité de semis, doses d’engrais, analyses de sol...) dans des tableaux jouxtant une carte géoréférencée de ses champs. Il les visualise au niveau macro (50 à 500 ha) ou microparcellaire (1 ha) et intègre des données au fur et à mesure. Il peut comparer ses rendements ou ses doses d’engrais à des moyennes locales, grâce aux données fournies par d’autres usagers de la plate- forme, dans la même zone et sur le même type de sol. UNE PLATE-FORME VIRTUELLE POUR L’AGRICULTURE DE PRÉCISION Pour Santiago Liebana, chargé de cultures d’une exploitation de 10 000 ha, l’agriculture de précision a entraîné des gains de rende- ment et des économies d’intrants en maïs.

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LA FRANCE AGRICOLE 3459 - 20 - 02 NOvEmbRE 2012

L’actu de la semaine

sans frontières

Quinze ans après le suc-cès foudroyant du semis direct en Argentine, l’agri-culture de précision s’im-

pose en région pampéenne. Elle devient même la norme parmi les exploitants propriétaires de grandes surfaces. La conduite des cultures selon le milieu, voire au niveau microparcel-laire, est vue comme un pari gagnant. C’est rentable, surtout en maïs, et certains marchés d’exportation l’exigent pour des raisons environnementales. Ce phénomène est toutefois plus lent que ne le fut l’adoption du non-labour, grandement facili-tée par la mise sur le marché en 1995 des semences de soja résistantes au glyphosate.

Grands exploitants conquisDifficile d’évaluer au niveau national le degré d’adoption des technologies liées à l’agri-culture de précision mais la majorité des grands exploi-tants en seraient déjà adeptes, notamment ceux des groupes Crea (1). En revanche, les petits rechignent à s’y mettre, ne dis-posant pas des outils ou moyens nécessaires.L’agronome Santiago Liebana, 29 ans, est chargé de cultures

De plus en plus d’exploitants trouvent un intérêt économique à moduler leur conduite de culture selon le milieu.

dans une estancia de dix mille hectares située à Trenque Lauquen, à l’ouest de Buenos Aires. « L’imagerie satellitaire, les cartes topographiques et les indicateurs de rendement sont les trois outils de base que nous utilisons pour définir la densité de semences et les doses d’engrais les mieux adaptées au milieu, au sein d’une même par-celle, explique-t-il. Nous avons ainsi atteint des pics de ren-dements en maïs de 180 q/ha sur les parties basses, avec une densité de 75 000 plantes par hectare, et nous visons la stabilité sur les parties hautes, avec 50 000 plants par hectare. Nous modulons les doses d’en-grais azoté et de phosphore, ce dernier ayant un gros impact économique là où les déficits sont importants. Mais nous ne modulons pas les doses d’herbi-

cide car les infestations varient peu selon la nature du sol. »Entre les économies d’intrants et les augmentations de rende-ment, les gains supplémentaires permis par l’agriculture de préci-sion iraient jusqu’à 80 E/ha en maïs, selon diverses sources. Un bénéfice nettement moins élevé en soja, en raison de son coût d’implantation inférieur.Les avantages sociaux et environnementaux de telles pratiques motivent les agricul-teurs. L’association argentine des producteurs en semis direct a d’ailleurs intégré l’agriculture de précision dans le cahier des charges de sa certification envi-ronnementale. Elle veut ainsi faire valoir ses bénéfices auprès des consommateurs. Marc-Henry André(1) Équivalent argentin des groupes Ceta (Centre d’études techniques agricoles).

argentine L’agriculture de précision gagne du terrainnorvège Droits de douane

Alors que plus de la moitié des produits alimentaires consommés en Norvège sont importés (la plupart depuis l’Union européenne), le gouvernement a annoncé, fin septembre, sa volonté d’augmenter les droits de douane à l’importation de certains fromages (jusqu’à + 277 %) et certaines viandes. Bruxelles proteste contre ce projet, arguant que la Norvège fait partie de l’espace économique européen.

Ukraine Prix plancher pour le laitDepuis septembre, Kiev a introduit un prix plancher de 21 centimes par litre pour le lait cru produit sur les petites exploitations privées, indique Ubifrance. L’objectif est de protéger les petits éleveurs, qui représentent 70 % de la col-lecte nationale. Ces derniers ne pouvaient plus survivre avec le prix payé dans certaines régions (entre 15,8 et 17,8 centimes/l).

Brésil Produire des engraisLe pays est très dépendant des importations d’engrais mais plusieurs entreprises prévoient d’investir près de 19 milliards de dollars en cinq ans pour que cela change. Ainsi, le taux de couverture de la demande nationale en nutriments N, P et K pourrait passer de 28 % en 2012 à 63 % en 2017.

Madagascar abeilles maladesAlors que la varroase, maladie parasitaire arrivée dans l’île en 2009, décime les populations d’abeilles, la ministre de l’Elevage évoque une « catastrophe nationale pouvant déséquilibrer [la] balance commerciale ». Sur 102 833 ruches recensées, 25 000 sont infectées et nécessiteraient une intervention urgente.

« Nous récoltons des données tous les cinq mètres », souligne Santiago Gonzalez Venzano, fondateur de la start-up Solapa 4, qui propose depuis 2010 une plate-forme virtuelle géoréférencée vouée à l’agriculture de précision. « Nous uniformisons les différents procédés et langages existants

pour interpréter les multiples données sur la topographie et les analyses de sols, les applications d’engrais, etc. » L’agriculteur intègre lui-même les paramètres de production (culture, date et densité de semis, doses d’engrais, analyses de sol...) dans des tableaux jouxtant une carte géoréférencée de ses champs. Il

les visualise au niveau macro (50 à 500 ha) ou microparcellaire (1 ha) et intègre des données au fur et à mesure. Il peut comparer ses rendements ou ses doses d’engrais à des moyennes locales, grâce aux données fournies par d’autres usagers de la plate-forme, dans la même zone et sur le même type de sol.

Une Plate-forMe virtUelle PoUr l’agricUltUre De Précision

Pour santiago liebana, chargé de cultures d’une exploitation de 10 000 ha, l’agriculture de précision a entraîné des gains de rende-ment et des économies d’intrants en maïs.