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Les milliers de kilomètres de fronères qui lient –ou séparent- les pays de la région du Sahel, représentent un espace exceponnel d’échange et de circulaon où se côtoient, depuis des siècles, des populaons nomades, des migrants....Lire la suite P.2 Le Sahel : un espace de circulaon et d’échange Sommaire Dans un contexte marqué par une recrudescence des aaques terroristes menées par le Boko Haram et d’autres groupes qui opèrent dans la région du Sahel, les Chefs d’Etats du G5, réunis le 20 novembre 2015...Lire la suite P.11 E-Magazine trimestriel du Bureau de l’Envoyée Spéciale pour le Sahel Le Sommet des Chefs d’Etats du G5 Sahel : Pour une mutualisaon des acons L’Envoyée Spéciale pour le Sahel au Conseil de Sécurité : « près de 41 millions de jeunes âgés de moins de 25 ans sont exposés à la radicalisaon ou contraints à quier le pays en l’absence d’opportunités économiques » OSES Website: www.oses.unmissions.org M algré des efforts sans précèdent de la com- munauté internao- nale, nous assistons aujourd’hui à une multude de crises qui tendent à se propager et à s’installer. La situaon en Libye, la persistance des actes terroristes au Mali, au Nigeria, en Somalie, et en Syrie, sont autant de crises qui menacent la paix et la stabilité dans le monde. Leur règlement né- cessite une vision partagée et une persévérance dans l’engagement de tous les partenaires. Guidées par ce principe, les Naons Unies, à travers la mise en œuvre de la Stratégie Intégrée pour le Sa- hel, n’ont cessé de consolider leur engagement en soutenant les pays de la région du Sahel. Les diver- ses iniaves et projets iniés en coordinaon avec les partenaires internaonaux et régionaux, no- tamment le G5 Sahel, soulignent la déterminaon - de tous - d’avan- cer ensemble pour améliorer les condions de vie au Sahel. Il est indispensable de ne pas sous- esmer la complexité de la région du Sahel et son potenel à mena- cer la paix dans le monde. Afin de mutualiser les ressources et renforcer les synergies pour accentuer son engagement et sa collaboraon avec les pays de la région du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest, l’ONU a décidé de fusionner le Bureau de l’Envoyée Spéciale du Secrétaire Général pour le Sahel (OSES) et le Bureau des Naons Unies pour l’Afrique de l’Ouest (UNOWA). La nouvelle enté s’appellera désormais UNOWAS:Bureau des Naons Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel. En étroite collaboraon avec les partenaires régionaux et interna- onaux, UNOWAS connuera l’en- gagement entrepris par OSES et UNOWA pour mieux soutenir les pays de la région du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest. Mme. Hiroute Guebre Sellassie L’ONUDC appuie les Etats Sahéliens dans la lue contre les combaants terroristes étrangers (P. 4) OIM. La geson des fronères, un enjeu majeur au Sahel (P. 3) Entreen. M. Mario Samaja, Coordonateur Résident des Naons Unies en Mauritanie (P. 13) Portrait. Malyka Diagana, Photographe : Pour les femmes du Sahel (P. 15) Editorial: Pour mieux soutenir le Sahel et l’Afrique de l’Ouest №4 - Février 2016 Lire à la page 10 © Carsten ten Brink

Sahel focus №4 FR

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Editorial: Pour mieux soutenir le Sahel et l’Afrique de l’Ouest Malgré des efforts sans précèdent de la communauté internationale, nous assistons aujourd’hui à une multitude de crises qui tendent à se propager et à s’installer. La situation en Libye, la persistance des actes terroristes au Mali, au Nigeria, en Somalie, et en Syrie, sont autant de crises qui menacent la paix et la stabilité dans le monde. Leur règlement nécessite une vision partagée et une persévérance dans l’engagement de tous les partenaires. Guidées par ce principe, les Nations Unies, à travers la mise en œuvre de la Stratégie Intégrée pour le Sahel, n’ont cessé de consolider leur engagement en soutenant les pays de la région du Sahel. Les diverses initiatives et projets initiés en coordination avec les partenaires internationaux et régionaux, notamment le G5 Sahel, soulignent la détermination - de tous - d’avancer ensemble pour améliorer les conditions de vie au Sahel.

Citation preview

Les milliers de kilomètres de frontières qui lient –ou séparent- les pays de la région du Sahel, représentent un espace exceptionnel d’échange et de circulation où se côtoient, depuis des siècles, des populations nomades, des migrants....Lire la suite P.2

Le Sahel : un espace de circulation et d’échangeSommaire

Dans un contexte marqué par une recrudescence des attaques terroristes menées par le Boko Haram et d’autres groupes qui opèrent dans la région du Sahel, les Chefs d’Etats du G5, réunis le 20 novembre 2015...Lire la suite P.11

E-Magazine trimestriel du Bureau de l’Envoyée Spéciale pour le Sahel

Le Sommet des Chefs d’Etats du G5 Sahel : Pour une mutualisation des actions

L’Envoyée Spéciale pour le Sahel au Conseil de Sécurité : « près de 41 millions de jeunes âgés de moins de 25 ans sont exposés à la radicalisation ou contraints à quitter le pays en l’absence d’opportunités économiques »

OSES Website: www.oses.unmissions.org

Malgré des efforts sans précèdent de la com-munauté internatio-nale, nous assistons

aujourd’hui à une multitude de crises qui tendent à se propager et à s’installer. La situation en Libye, la persistance des actes terroristes au Mali, au Nigeria, en Somalie, et en Syrie, sont autant de crises qui menacent la paix et la stabilité dans le monde. Leur règlement né-cessite une vision partagée et une persévérance dans l’engagement de tous les partenaires.

Guidées par ce principe, les Nations Unies, à travers la mise en œuvre de la Stratégie Intégrée pour le Sa-hel, n’ont cessé de consolider leur engagement en soutenant les pays de la région du Sahel. Les diver-ses initiatives et projets initiés en coordination avec les partenaires internationaux et régionaux, no-tamment le G5 Sahel, soulignent la détermination - de tous - d’avan-cer ensemble pour améliorer les conditions de vie au Sahel.

Il est indispensable de ne pas sous-estimer la complexité de la région du Sahel et son potentiel à mena-cer la paix dans le monde.

Afin de mutualiser les ressources et renforcer les synergies pour accentuer son engagement et sa collaboration avec les pays de la région du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest, l’ONU a décidé de fusionner le Bureau de l’Envoyée Spéciale du Secrétaire Général pour le Sahel (OSES) et le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest (UNOWA). La nouvelle entité s’appellera désormais UNOWAS:Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel.

En étroite collaboration avec les partenaires régionaux et interna-tionaux, UNOWAS continuera l’en-gagement entrepris par OSES et UNOWA pour mieux soutenir les pays de la région du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest.

Mme. Hiroute Guebre Sellassie

L’ONUDC appuie les Etats Sahéliens dans la lutte contre les combattants terroristes étrangers (P. 4)

OIM. La gestion des frontières, un enjeu majeur au Sahel (P. 3)

Entretien. M. Mario Samaja, Coordonateur Résident des Nations Unies en Mauritanie (P. 13)

Portrait. Malyka Diagana, Photographe : Pour les femmes du Sahel (P. 15)

Editorial: Pour mieux soutenir le Sahel et l’Afrique de l’Ouest

№4 - Février 2016

Lire à la page 10

© Carsten ten Brink

La région sahélienne compte parmi les Etats les plus vas-tes du continent. Au total, la superficie des Etats du G5

Sahel est par exemple équivalente à celle des vingt-huit pays que compte l’Union Européenne pour une popu-lation environ équivalente à celle de la France. Par ailleurs, chacun des Etats sahéliens partagent plusieurs milliers de kilomètres de frontières avec ses voisins. A titre d’exemple, le Mali compte au total plus de 7.000 km de frontières et le Niger près de 6.000 km. Au sein de ces vastes espa-ces, les dynamiques démographiques et humaines allient des taux de crois-sance parmi les plus élevés au monde (supérieure à 2% par an dans la plu-part des pays), à un peuplement très peu dense et extrêmement contrasté dans sa répartition territoriale. Une des fortes spécificités des l’espace sa-hélien est, qu’au delà des frontières telles qu’elles ont été tracées par le colonisateur, la zone est quadrillé par des routes millénaires dont la trame

reste inchangée depuis des siècles1 ». Au travers des routes transsaharien-nes circulent, au delà des frontières, populations nomades, migrants, réfu-giées, commerçants et marchandises. Ainsi, le Sahel constitue avant tout un espace de circulation et d’échanges.

L’approche du PNUD en matière de gestion des frontières

Une nouvelle approche est néces-saire pour une gestion efficace des frontières et l’amélioration de la sé-curité humaine. Ainsi, en parallèle du renforcement des capacités des agences frontalières et de l’accrois-sement de la présence et de l’effec-tivité des services de l’Etat dans les zones frontalières, une amélioration des interactions avec les populations locales est nécessaire afin de mieux les intégrer aux lois légitimes et aux efforts de maintien de l’ordre ainsi que pour protéger et promouvoir le commerce transfrontalier informel,

1 OCDE/CSAO (2014), Un atlas du Sahara-Sahel : Géographie, économie et insécurité, Cahiers de l’Afrique de l’Ouest, Ediction OCDE

souvent essentiel pour les moyens de subsistance et de sécurité alimen-taire, au travers des frontières « sécu-risées mais ouvertes ».

Depuis l’adoption de la Stratégie Inté-grée des Nations Unies pour le Sahel (SINUS), le PNUD a élaboré un pro-gramme régional pour le Sahel afin de mieux soutenir les deux caracté-ristiques principales de la SINUS que sont «l’intégration» et la «régiona-lité». Il accorde une place particulière aux zones frontalières, comme recon-naissance de leur importance pour la région. A cet égard, le PNUD a engagé avec la Direction Exécutive du Comi-té contre le Terrorisme des Nations Unies (UN CTED) une série d’études de perceptions par les communautés locales des facteurs d’insécurité et d’extrémisme violent dans les zones frontalières de huit pays de la région, dont les pays du G5 Sahel (Burkina Faso, Niger, Mali, Mauritanie, Tchad) et trois pays voisins (Sénégal, Came-roun et Nigeria). Ces études ont pour objectif à la fois de mieux compren-

SAHEL FOCUS№ 004 - F é v r i e r 2016 - Page 2

PNUD. Le Sahel : un espace de circulation et d’échange

Les Nations Unies en action pour le Sahel

Les milliers de kilomètres de frontières qui lient –ou séparent- les pays de la région du Sahel, représentent un espace exceptionnel d’échange et de circulation où se côtoient, depuis des siècles, des populations nomades, des migrants, des refugies et des commerçants. Préserver l’échange et la circulation pour consolider le développement d’un espace géographique important est un des projets majeur du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) dans le Sahel.

SAHEL FOCUS№ 004 - F é v r i e r 2016 - Page 3

dre les dynamiques frontalières et transfrontalières du Sahel et de restaurer l’équilibre en faveur de la sécurité humaine par contraste del’approche sécuritaire tradition-nelle et dans la perspective de pouvoir faire face à l’instabilité ré-currente de la région de manière durable.

Un partenariat multiforme

Financé par le Gouvernement du Japon, le PNUD a également lancé un projet régional, «Gestion des Frontières et Communautés Fron-talières», en partenariat avec le Centre international pour le Déve-loppement des politiques migra-toires (ICMPD) et ONU Femmes, et sous l’égide du G5 Sahel. Se concentrant sur trois zones criti-ques de la région (zone de Bas-sikounou, triangle Liptako-Gour-ma, Lac Tchad), le projet propose une approche composée de trois volets complémentaires. Le pre-mier a pour objectif d’instaurer un dialogue avec les pays du G5 Sahel afin de formuler des politiques in-clusives des communautés locales dans la gestion des zones fronta-lières. Le second vise à identifier les besoins en matière de renfor-cement de capacités des agences frontalières. Enfin, le dernier volet a pour vocation de fournir un sou-tien initial et immédiat à la sécu-rité humaine des communautés locales qui vivent dans les zones frontalières à l’aide de micro réa-lisations.

Conférence internationale sur la gestion des frontières

Organisée sous les auspices du G5 Sahel et accueillie par le Gouver-nement du Mali, une conférence internationale sur la gestion des frontières se tiendra à Bamako les 10 et 11 mars 2016 à l’initiative du PNUD. Elle aura pour objectif principal de donner l’opportunité aux acteurs engagés de discuter une approche de développement à plus long terme pour la gestion des frontières, et afin de promou-voir une meilleure articulation des questions interdépendantes de gouvernance, de sécurité et de ré-silience au Sahel.

OIM. La gestion des frontières, un enjeu majeur au SahelDans un contexte sécuritaire et migratoire au Sahel marqué par des flux croissants de personnes vulnérables faisant route vers la Libye, une instabilité politique récurrente et un extrémisme violent, l’accompagnement des Etats d’Afrique de l’Ouest et du Sahel dans le renforcement des capacités de gestion des frontières devient un sujet prioritaire. Citée comme problématique clée dans les diverses stratégies régionales de l’Union Africaine, de la CEDEAO, du G5 Sahel et des Nations Unies la gestion des frontières et ses thématiques sont devenues un enjeu majeur pour la sécurité nationale et régionale, de l’intégrité des biens et des personnes dans les zones transfrontalières, mais également de la lutte régionale contre le crime transnational.

L’Organisation internationale pour les migrations (OIM) est un des acteurs essentiels de la région impliqué dans la gestion

des frontières, notamment au travers d’un ensemble de projets financés par le Gouvernement du Japon, l’Union européenne, les Etats-Unis et des fonds de développement de l’OIM au Mali, en Mauritanie, au Sénégal, en Guinée, au Nigéria, au Burkina Faso, au Niger et au Tchad.

Un cadre de coopération locale et transfrontalière

Ainsi, l’OIM appuie les gouvernements nationaux et les structures régionales dans la mise en place de cadre de coor-dination et de coopération entre les services (Police, Gendarmerie, Doua-nes, Ministère) à différentes échelles (locale, provinciale, nationale, régio-nale, internationale) pour promouvoir le dialogue, l’échange d’informations et l’institutionnalisation d’une ges-tion intégrée des frontières. Dans ce contexte, l’OIM organise de manière régulière des réunions de directeurs des forces de police aux frontières du Mali, du Niger, du Burkina Faso et de

la Mauritanie pour maintenir des liens étroits et stimuler les interactions ré-gionales pour mieux répondre aux menaces sécuritaires. Quatre rencon-tres bilatérales se sont tenues en dé-cembre 2015 pour établir un cadre de coopération locale et transfrontalière.

L’OIM appuie également le renfor-cement des capacités des gouver-nements, par la construction de 24 postes de police aux frontières et la réhabilitation de 20 autres postes dans l’ensemble de la région depuis le lancement de ses activités de gestion des frontières. Cet effort de standar-disation permet aux éléments de la Police Nationale de travailler dans de meilleures conditions, d’accueillir les voyageurs dans le respect des droits de l’Homme et de la dignité humaine. Ces travaux ont permis également à l’OIM d’outiller les Etats du Sénégal, du Mali, du Niger, du Burkina Faso, du Tchad et du Nigéria avec le Système d’information sur la migration et l’ana-lyse des données (MIDAS), développé par l’OIM qui permet de recueillir, de traiter et d’enregistrer au niveau des postes frontières les données biogra-

© IOM

Afin d’examiner les cadres législatifs et opération-nels de lutte contre les combattants terroristes

étrangers, l’ONUDC a organisé un séminaire à Dakar, au Sénégal, en-tre le 29 septembre et le 1 er oc-tobre 2015. Rendu possible grâce au soutien financier du gouverne-ment japonais, cet atelier a réuni des représentants du Burkina Faso, du Mali, de la Mauritanie, du Niger, du Sénégal et du Tchad, ainsi que de nombreux experts issus d’organisations internatio-nales, régionales et nationales. Ainsi, des membres d’INTERPOL, du Centre Africain d’Etudes et de Recherches sur le Terrorisme, du G5 Sahel et des forces de police européennes spécialisées dans le contre-terrorisme ont pu échan-ger leurs expériences et meilleu-res pratiques au cours de l’atelier.

Chacune des délégations étant constituée de personnels des Mi-

nistères de la Justice et de l’Inté-rieur, de la Police nationale, de la Gendarmerie et de la Garde nationale, ainsi que de nombreux magistrats, la lutte contre les combattants terroristes étrangers a été abordée sous un angle plu-ridisciplinaire, seul à même de favoriser une réponse cohéren-te, globale et participative à une question aussi urgente.

Procédures judiciaires adéquates

En effet, le phénomène des com-battants terroristes étrangers étant par nature transnational, une approche similaire est néces-saire afin d’envisager les moyens de l’enrayer. Des procédures judi-ciaires adéquates, accolées à une connaissance accrue de ce phéno-mène, sont nécessaires afin d’éla-borer une réponse cohérente et efficace au niveau sous-régional.

La rencontre a permis d’identifier les lacunes présentes dans les sys-

phiques et biométriques des voyageurs aux points d’entrée et de sortie du terri-toire. MIDAS contribue aussi à suivre plus systématiquement les mouvements trans-frontaliers en vue de soutenir l’élaboration de politiques migratoires.

Indissociables de ces dotations physiques, l’appui à la formation ponctuelle ou conti-nue d’experts et d’agents de première ligne constitue un pilier clé des activités de l’OIM, en étroite collaboration avec les partenaires régionaux internationaux, ainsi que les coopérations policières bilatérales (Espagne, EUCAP Sahel, France, Etats-Unis, Belgique). Ainsi, le travail conjoint avec les Ecoles Nationales de Police (ENP), les directions de formation continue où les académies de Police, permettent de déve-lopper au niveau national, des modules de formation adaptés, contextualisés et cali-brés pour les agents aux postes frontières.

En décembre 2015 à Kombissiri près de Ouagadougou, 17 officiers de Police ont rédigé conjointement avec l’OIM et EUCAP Sahel 6 modules de formation portant sur la réglementation transfrontalière, l’ac-cueil et la communication aux frontières, la police judiciaire aux frontières, le contrôle des personnes et la collecte de renseigne-ments, en partenariat avec EUCAP Sahel au Mali et au Niger, l’Ambassade de France au Burkina Faso, et les services de police concernés.

Sensibilisation des communautés

Dans le cadre de la gestion des frontières, la résilience des communautés transfron-talières relative à leur subsistance et leur stabilisation permet de lutter contre la dé-sertification de ces zones, maintenir les in-teractions avec les autorités et développer les partenariats avec les communautés voi-sines. Partant de ce constat, l’OIM accom-pagne la sensibilisation des communautés à la notion de frontière, à la promotion des échanges économiques, sociaux et cultu-rels de part et d’autre de la frontière, et au dialogue avec les autorités, à travers des activités de plaidoyer, des réunions, des débats publics et privés, mais aussi pour faciliter l’accès à l’eau et l’électricité.

Compte tenu de la nature des défis aux-quels fait face le Sahel, il sera crucial de renforcer les efforts en matière de gestion des frontières et consolider le soutien aux gouvernements de la région. C’est une priorité.

SAHEL FOCUS№ 004 - F é v r i e r 2016 - Page 4

L’ONUDC appuie les Etats Sahéliens dans la lutte contre les combattants terroristes étrangersPlus d’une centaine d’Etats de la planète constituent aujourd’hui des pays d’origine, de destination ou de transit pour les combattants terroristes étrangers. Parmi les différents groupes terroristes, notamment l’Etat Islamique en Iraq et au Levant, ce ne sont pas moins de 25 000 combattants terroristes étrangers qui ont été recensés. Les flux particulièrement intenses constituent une menace à court et moyen terme pour l’ensemble de la communauté internationale. Avec la déstabilisation de Libye, le Sahel est identifié comme une des régions potentiellement menacée par l’expansion de ce phénomène par un rapport récent des Nations Unies.

Quatrième réunion de la Plateforme ministérielle de coordination des stratégies Sahel,le 5 Novembre 2015 à N’Djamena - © UNODC

SAHEL FOCUS№ 004 - F é v r i e r 2016 - Page 5

tèmes juridiques nationaux des Etats participants, au regard des conven-tions internationales de lutte contre le terrorisme, et notamment de la ré-solution 2178 (2014) du Conseil de sé-curité des Nations Unies, portant sur la criminalisation du phénomène des combattants terroristes étrangers. Les champs recouverts par cet exa-men ont concerné le recrutement et l’incitation au terrorisme (en accord avec les résolutions 1373 et 1624 du Conseil de sécurité), le financement du terrorisme, l’entrainement, ainsi que la criminalisation des actes pré-paratoires et le scénario d’individus agissant seuls ou en petites cellules.

A l’issue du séminaire, des axes d’efforts pratiques ont été dégagés par les participants. L’ONUDC entre autres, est appelé à soutenir plus

directement le développement de plateformes de coopération judi-ciaire, de sécurité et d’échange d’in-formation entre les pays du Sahel. En application directe des dispositions contenues dans la résolution 2178, l’ONUDC vise désormais à élaborer des programmes concrets d’assistan-ce aux Etats sahéliens, notamment en matière juridique. Une série d’ateliers se déroulera en partenariat avec les acteurs pertinents, afin de mettre en place des cadres opérationnels effi-caces de lutte contre les combattants terroristes étrangers, notamment via le partage de bonnes pratiques et des politiques de coopération régionale et internationale renforcées.

La lutte continue...

Depuis 2003, l’ONUDC fournit une as-sistance technique aux pays d’Afrique

de l’Ouest et du Centre dans la lutte contre le terrorisme, spécifiquement en matière pénale. Ces efforts se sont intensifiés depuis 2013, et s’inscrivent désormais dans la contribution de l’ONUDC à la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel (2013-2017). En tant que telles, ces activités visent à soutenir le développement des systèmes de justice pénale acces-sibles, efficaces et responsables dans les États de la région, tout en renfor-çant leurs capacités de détection et de contrôle des frontières. Le respect des conventions et protocoles inter-nationaux, ainsi que des principes des Droits de l’homme et de la primauté de l’État de droit est également inclus au sein des activités de l’ONUDC.

Rapport sur le crime et le terorrisme au Sahel 2016

Dans le cadre du Programme Sahel, l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) a récemment publié en janvier 2016 son rapport d’activité qui résume les résultats de sa contribution à la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel.

Ce rapport offre un sur-vol des résultats obte-nus depuis le début du Programme en janvier

2014. L’ONUDC a organisé un total de 186 activités ayant eu lieu dans la région du Sahel, atteignant plus de 5.700 béné-ficiaires directs. Ces efforts ont mené à d’importants résultats dans les domaines de la pré-vention du terrorisme, l’anti-corruption, le contrôle d’armes à feu, la gestion des frontières, les réformes de la justice pé-nale, l’accès à l’aide juridique, ainsi que la lutte contre la traite des personnes et le trafic illicite de migrants. Parmi ceux-ci : - Le Niger a adopté une loi contre le trafic illicite de migrants- Le Mali a saisi plus de drogues et initie davantage d’affaires ju-diciaires- Les procureurs ont renforcé l’échange d’informations- Le Burkina Faso et le Mali ont

marqué plus de 1,100 armes à feu- Le Tchad a amélioré l’échan-ge d’informations pour lutter contre le terrorisme- Le Burkina Faso a adopté deux lois anti-corruption- La Mauritanie a amélioré l’ac-cès à l’aide juridique- Le G5 Sahel a lancé la Plate-forme de Coopération en Ma-tière de Sécurité- Première condamnation pour blanchiment d’argent au Niger

Le rapport d’activité offre des statistiques sur le nombre de bénéficiaires atteints par cha-que thème du Programme, ainsi qu’une liste de toutes les activités qui se sont déroulées depuis janvier 2014.

Téléchargez le rapport sur:http://bit.ly/1nltnww Programme Sahel de l’ONUDC

Le projet au Burkina Faso, initié par le Centre des Nations Unies pour la lutte contre le terrorisme et l’UNESCO en

2015, a abouti à la traduction du Manuel de Référence sur l’Education de l’UNESCO-CEDAO (Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest) pour une Culture de la Paix, des Droits de l’Homme, de la Citoyenneté, de la Démocratie et de l’Intégration Régionale à Tamacheck, Goulmanceman, Songhraï et Fulfubé. A cette date, le Manuel de Référence a été traduit au nombre impressionnant de 31 langues locales des pays de la CEDEAO. Le projet a aussi organisé deux formations des ateliers de formateurs à Ouagadougou et Dori avec environ quarante participants composé de conseillers locaux, d’autorités locales et centrales ainsi que de chef coutumiers, chefs des organisations de la société civile, journalistes et présentateurs de radios communautaires privées. Grâce à ce projet, 50 000 hommes et femmes qui vivent dans le nord du Burkina Faso,

à Ouagadougou et ses banlieues ont été sensibilisés à la culture de la paix et à la lutte contre le terrorisme.

Autonomiser les jeunes.

Le second projet intitulé « Interventions d’urgence en éducation pour la résilience au Sahel », financé par le Gouvernement du Japon, a été mis en place au Mali entre 2014 et 2015. Cela a bénéficié aux personnes dans les régions de Mopti, Tombouctou, Gao et Kidal meurtries par le conflit. Le projet a fourni l’enseignement et la formation techniques et professionnels (EFTP) pour autonomiser les jeunes vulnérables (incluant les jeunes hors de l’école, les nomades, les réfugiés, les déplacés internes et les populations transhumantes) et a assuré l’intégration de la réduction des risques de catastrophes et de l’atténuation des conflits dans les stratégies d’enseignement et d’apprentissage tout en renforçant la capacité du système éducatif au Mali. En effet, ce projet a contribué à l’effort

global des Nations Unies pour mettre à l’échelle l’initiative de construction de la résilience particulièrement pour « l’autonomisation des jeunes » faisant partie de la Stratégie Intégrée des Nations Unies pour le Sahel que le bureau des Nations Unies de l’Envoyé Spécial pour le Sahel coordonne entre l’UNESCO, l’OIT et l’UNICEF.

Espoir.

Les projets de cette nature sont impératifs au processus de construction de communautés résilientes fortes grâce à l’éducation ainsi que la création et la sensibilisation de l’éducation à la paix. Ils fournissent en fin de compte une jeunesse vulnérable avec l’opportunité de regagner de l’espoir et d’accéder à un revenu supérieur grâce à l’amélioration des compétences professionnelles, de la connaissance et de l’éducation qui sont des facettes essentielles dans la prévention de l’extrémisme.

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UNESCO. Des initiatives éducatives pour promouvoir la paix et la sécurité dans la région du SahelL’UNESCO travaille activement à construire et consolider la paix, la stabilité et la prospérité ainsi qu’à engager des transformations sur le long terme pour assurer le développement durable pour tous. Ceci est principalement atteint en mobilisant une éducation de qualité pour tous, en construisant la compréhension interculturelle, en poursuivant la coopération scientifique entre les nations et sociétés et en protégeant la liberté d’expression en tant que condition essentielle pour la démocratie, le développement, et la dignité humaine. Dans le cadre de la construction de la résilience et du combat contre le terrorisme et l’instabilité dans la région du Sahel, l’UNESCO a mis en place deux projets où a été donnée la priorité à l’éducation mis en avant comme un vecteur clé.

Atelier de couture, Tombouctou, Octobre 2015 ©UNESCO-Maria Muñoz

SAHEL FOCUS№ 004 - F é v r i e r 2016 - Page 7

UNESCO. Radio Communautaire et Résilience dans la région du Sahel : l’UNESCO célèbre la Journée Mondiale de la RadioLes urgences et catastrophes humanitaires se multiplient dans le monde, avec des conséquences terribles sur les vies humaines, réduisant parfois à néant des années de développement. Dans la région du Sahel, les défis actuels liés à la sécurité et la gouvernance soulignent la nécessité permanente de renforcer les capacités régionales de résilience. Grâce à sa capacité d’informer, de relayer les messages et de contribuer au débat et à la réflexion, même en temps de crise, la radio est un allié indispensable.

Dans les décombres et face à l’urgence, la radio est sou-vent le premier média de la survie. Sa pérennité est

un atout incomparable. Elle lui per-met souvent mieux et plus vite que d’autres médias de résister aux chocs et de retransmettre des messages de protection et de prévention auprès du plus grand nombre, et de sauver des vies. Dans la région du Sahel, les radios communautaires et les centres multimédias com-munautaires, tant dans les zones ru-rales qu’urbaines, jouent un rôle cru-cial pour assurer l’accès à l’informa-tion dans les lan-gues locales néces-saire pour soutenir les efforts visant à assurer la paix et le développement du-rable dans la région du Sahel.

Radio et actions d’urgences.

Le 13 février de chaque année, date à laquelle les Nations Unies ont éta-bli la journée de la radio en 1946, le monde célèbre la journée mondiale de la radio et appelle les autorités publiques, les acteurs du dévelop-pement et de l’action humanitaire, à renforcer les liens entre la radio et l’action d’urgence, pour que les voix des hommes et des femmes, victi-mes, secouristes et journalistes, que nous entendons dans ces moments-là, à travers le transistor, le téléphone mobile ou l’ordinateur, soient les voix de la vie et de l’espoir. Le thème de cette année est « Radio en situation d’urgences et de catastrophes ».

La radio demeure le médium capable d’atteindre le plus grand nombre de personne dans le monde. Elle est éga-lement reconnue comme un puissant outil de communication et un moyen

à bas coût. Plus précisément la radio est adaptée pour atteindre les com-munautés isolées et les personnes vulnérables: les analphabètes, les handicapés, les femmes, les jeunes et les pauvres, tout en offrant une plate-forme dans le débat public, quel que soit le niveau d’éducation de la po-pulation. En outre, la radio a un rôle important et spécifique dans la com-munication d’urgence et de secours en cas de catastrophe.

Par sa proximité, sa simplicité, son bas coût, la radio est aussi un mé-dia du vivre ensemble, un moyen de resserrer le lien social, et d’assurer la participation des peuples dans les programmes humanitaires et les dis-cussions qui les nourrissent. Quanti-tés de récits de victimes témoignent de la façon dont la radio a permis à des familles séparées de se retrouver, d’établir des contacts et de repren-dre espoir. Les radios communautai-res en sont un parfait exemple, et un outil essentiel dans la réalisation des objectifs de la stratégie des Nations Unies pour le Sahel. Dans le cadre des travaux de l’Organisation pour la promotion de la liberté d’expression et l’accès à l’information, l’UNESCO continue de renforcer les capacités des radios communautaires et des journalistes dans la région du Sahel.

Un rôle important.

La croissance des radios rurales dans la région du Sahel au cours des

dernières années, reflète à la fois l’amélioration de la disponibilité de la technologie de l’information et le changement dans le paradigme de développement vers des méthodes plus participatives de l’information et le partage des connaissances. À cet égard, la radio communautaire joue un rôle important au niveau de la base pour le développement rural. Les ra-dios communautaires dans la région du Sahel / CEDEAO ont connu une

croissance phé-noménale au cours des der-nières années, avec plus de 400 stations de radio commu-nautaire dans la région capable d’atteindre plus de 5 millions de ménages en répondant aux

questions sur la santé, l’agriculture, l’égalité des sexes et l’éducation. Une étude récente montre qu’avec un meilleur accès aux nouvelles techno-logies de l’information et de la com-munication tels que les téléphones mobiles, les populations locales utili-sent de plus en plus leurs téléphones pour interagir directement avec les radios communautaires.

Pour cette journée mondiale de la ra-dio, le Bureau régional de l’UNESCO a Dakar célèbre le rôle de la radio com-munautaire, en partenariat avec les Agences des Nations Unies, la Croix Rouge et autres intervenants, pour sensibiliser davantage parmi le pu-blic et les media de l’importance de la radio et encourager les décideurs à établir et à fournir l’accès à l’informa-tion à travers la radio pour atteindre les objectifs énoncés dans la Straté-gie Intégrée des Nations Unies pour le Sahel.

Refugiés au Darfour écoutant la radio dans un camp à l’est du Chad. © UNHCR.

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UNHCR. Retour à Tombouctou

Il y a quatre ans éclatait un conflit au nord du Mali, opposant forces gouvernementales et mouvements rebelles, forçant des dizaines de milliers de personnes à trouver refuge dans les pays voisins. Aujourd’hui, si plus de 140.000 Maliens sont encore en exile au Burkina Faso, en Mauritanie et au Niger, certains réfugiés décident de rentrer dans leurs villages et villes, situés dans des zones où la sécurité a pu s’améliorer au cours des derniers mois. C’est le cas de Tony et de sa famille, qui ont récemment quitté le camp de réfugiés de Mentao au Burkina Faso.

TOMBOUCTOU, MALI, 15 jan-vier 2015. (HCR) – La fin de journée est fraîche et calme, idéale pour un thé vert en-

tre amis. Tony, jeune malien d’origi-ne touareg de 24 ans, savoure cette boisson sahélienne avec un ami dans une cour de l’un des nombreux quar-tiers périphériques. Cela fait à peine un mois qu’il a rejoint Tombouctou, aussi connue comme « la perle du désert », dans cette région aride du nord du Mali. « Je viens de la ville de Gossi, qui fait partie du cercle de Tombouctou. C’est ma région natale. J’y ai passé mon enfance avant de partir en 2008 vers Gao pour y pour-suivre mes études.

A Gao, Tony étudiait les lettres. «J’étais très à l’aise en français, c’est donc tout naturellement que j’ai voulu passer un baccalauréat en lit-térature. » Au lycée, il apprenait vite

et avait donc du temps pour d’autres activités. « A côté de mes études, j’étais chauffeur indépendant pour le compte de touristes et d’organisa-tions non-gouvernementales (ONG) de la région. Grâce à cela, je payais mes frais de scolarité et je pouvais pourvoir aux besoins de ma famille.»

« Je savais que je devais quitter le pays par tous les moyens. »

Début 2012, alors qu’il entame son année pour obtenir le baccalauréat en juin, il doit revoir ses plans à cause de la guerre qui éclate au nord du pays. « Dès que la guerre a commen-cé, je ne me suis plus senti en sécu-rité chez moi. Je savais que je devais quitter le pays par tous les moyens. » Il a alors 20 ans, et parvient à rejoin-dre Niamey, la capitale nigérienne, en voiture.

La route vers le Niger est celle qui lui parait alors la plus rapide et la plus sécurisée. Mais lorsqu’il prend des nouvelles de sa famille, Tony com-prend qu’il ne restera pas longtemps à Niamey. « Quand j’ai appelé mes parents, j’ai appris qu’ils venaient de fuir vers le Burkina Faso. Après deux semaines à Niamey, je suis parti les rejoindre ». Il prend alors un bus de Niamey pour Ouagadougou, la capi-tale burkinabè, où il arrive après dix heures de trajet.

« Le HCR a ouvert un camp à 18 ki-lomètres de Ouagadougou, pour as-sister les réfugiés maliens. Là-bas, j’ai retrouvé ma famille, et nous y som-mes restés jusqu’à sa fermeture.» Le camp de Sag-Nioniogo accueillera jusqu’à 2 813 réfugiés maliens, avant de fermer début 2015 pour des rai-sons budgétaires.

Les réfugiés maliens qui souhaitent continuer de bénéficier de l’assistan-ce du HCR sont alors relocalisés dans l’un des deux camps de leur choix situés dans la région du Sahel, au nord du Burkina Faso. « Nous avons choisi le camp de Mentao, car nous y connaissions plus de monde », ex-plique Tony.

Ce camp, situé à quelques kilomètres de la ville de Djibo et à une cinquan-taine de kilomètres de la frontière malienne, compte aujourd’hui quel-que 13 000 réfugiés maliens. Le HCR assure leur protection légale et leur fournit un accès aux services de base (eau, éducation, santé, abri).

Depuis 2014, l’agence facilite le dé-part des réfugiés maliens qui souhai-tent retourner dans leur pays d’ori-gine. Ils reçoivent 35 000 Francs CFA (70 USD) par individu pour les aider à organiser leur transport vers le Mali, la plupart de temps par camion ou voiture.

Histoire d’exile et de retrouvailles pour les réfugiés maliens

Residents de Tombouctou au Mali. © UNPhoto

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« Ce que je retiens de ce périple ? La sécurité est tout ce qui compte »

Dans le camp de Mentao, Tony a trou-vé la sécurité mais également l’amour et l’amitié. « J’ai rencontré ma femme Zeinabou dans le camp, et nous nous y sommes mariés. C’est également ici qu’est née notre fille, Fadimata » précise –t-il. « Au moment de quitter le camp pour le Mali, j’étais angoissé. Pas seulement parce que je prenais une route inconnue, mais aussi parce que je ne voulais pas laisser derrière moi une partie de ma vie, des proches et des amis. Nous étions très soudés et la cohabitation était bonne. Mais nous voulions plus que tout retour-ner au Mali, et nous avons emmené mon neveu avec nous, Sidi, que je considère comme mon fils ».

Pour Tony et ses proches, c’est la joie qui domine à leur retour à Tombouc-tou. « Quand je suis parti du Mali, c’était le chaos. A mon retour, j’ai trouvé une ville qui a repris ses activi-tés économiques. Les forces de sécu-rité nationales et internationales sont présentes, ainsi que les humanitaires », affirme Tony, pour qui la situation qu’il découvre dans sa ville d’origine n’est pas une surprise. « J’avais des informations depuis le Burkina Faso. J’étais en contact permanent avec les membres de ma famille qui étaient restés au Mali ».

Gossi, Gao, Niamey, Ouagadougou, Sag-Nioniogo, Mentao, Tombouctou… Une aventure qui aura duré presque cinq ans, et qui aura forgé le carac-tère et la philosophie du jeune hom-me. « Ce que je retiens de ce périple ? La sécurité est tout ce qui compte. C’est l’insécurité qui nous a fait quit-ter le Mali. C’est la sécurité que nous avons cherché au Burkina Faso. Nous l’avons trouvée dans les camps de ré-fugiés. Et c’est parce que je savais que Tombouctou était à nouveau mieux sécurisée que nous avons décidé d’y retourner avec ma famille. »

Si des familles maliennes choisissent de rentrer spontanément au Mali de leur exil dans les pays avoisinants pour regagner leur région d’origine – plus de 800 rapatriés ont été vérifiés par le HCR au cours des six derniers

mois - la situation sécuritaire dans le Nord du Mali demeure néanmoins volatile. Si le conflit qui a secoué la Mali a officiellement pris fin avec la signature de l’accord de paix les 15 mai et 20 juin 2015, les attaques ter-roristes et criminelles, ainsi que les violations des droits humains persis-tent. De plus, l’accès à certaines zo-nes de retour reste ainsi un défi pour les organisations humanitaires.

Et alors que certains réfugiés, comme Tony, retournent vers leur région plus sécurisée, d’autres continuent de fuir des situations instables et de trouver refuge au Burkina Faso, en Mauritanie ou au Niger. Plus de 4 300 Maliens ont ainsi quitté le Mali depuis juillet 2015 pour trouver refuge au Niger. Plus de 3500 Maliens sont arrivés au Burkina Faso entre janvier et novembre 2015, fuyant de nouvelles violences au nord de leur pays.

Quelques 40 700 réfugiés maliens sont revenus chez eux suite à leur

exil

Tony et sa famille ont désormais réin-tégré leur communauté d’origine à Tombouctou. « J’ai retrouvé mes voi-sins sur place, tout se passe bien avec eux », se réjouit-il. « La famille com-mence à se réunifier avec le retour des parents du Burkina Faso ».

En revanche, la préoccupation ma-jeure de ce chef de famille demeure le manque d’emploi pour subvenir aux besoins du foyer. D’autant qu’il a retrouvé sa maison saccagée et dé-truite par manque d’entretien. Les biens personnels laissés lors de leur fuite ont été volés. Mais Tony a main-tenant l’esprit tourné vers l’avenir. « Nous sommes en train de la réhabili-ter petit à petit. »

L’accès limité à l’eau potable et à la nourriture dans certaines zones, le prix élevé des biens de première né-cessité, ainsi que l’accès limité aux services administratifs et sociaux de base dans certaines localités, engen-drent des retours jusqu’à présent ti-mides de réfugiés.

Selon les autorités maliennes, quel-ques 40 700 réfugiés maliens sont revenus chez eux suite à leur exil au

moment de la crise qui a secoué le Mali en 2012. Plus de 17 000 de ces retournés ont d’ores et déjà été véri-fiés par le HCR. La plupart sont ren-trés dans les régions de Gao, Mopti et Tombouctou.

Dans les zones de retour, le HCR met en œuvre des projets communautai-res de réintégration dans un certain nombre de communes prioritaires, telles que Goundam, Gossi, Léré, Sou-moundou, Tilemsi et Tombouctou. Ces projets d’appui aux infrastructu-res contribuent à améliorer l’accès à l’éducation, la santé, l’hygiène et l’eau. Ils visent aussi bien les rapa-triés que les populations qui étaient restées sur place dans un souci de coexistence pacifique.

Le HCR vient aussi de clore la phase pilote d’un projet d’assistance finan-cière aux rapatriés. Au total, en no-vembre et décembre 2015, 4 307 ra-patriés ont reçu la somme de 110 USD par adulte et 50 USD par enfant, dont 1 492 à Tombouctou. Cette assistance leur a permis de redémarrer une vie digne dans leur zone de retour et a amélioré les moyens d’existence des familles.

De retour chez lui, Tony a désormais de nombreux projets. Il souhaite pas-ser le baccalauréat en candidat libre puis intégrer l’administration malien-ne ou une ONG internationale. « Avec mon niveau du lycée et l’expérience acquise au camp, je compte travailler dans l’humanitaire. Mais je n’ai plus de contact particulier à Tombouctou, j’aurai des difficultés à trouver un em-ploi si je ne décroche pas un diplôme à la hauteur de mes compétences. En attendant, je dois couvrir nos frais. Mes deux enfants sont réinscrits à l’école, nous avons un loyer et des charges. Tout travail me conviendrait dans l’immédiat. » Un revenu régulier lui permettrait de financer également la poursuite des études d’infirmière de sa femme.

140 776 Maliens sont encore réfugiés dans les pays voisins dont 34 221 au Burkina Faso, 50 228 en Mauritanie et 56 012 au Niger. 61 920 personnes sont toujours déplacées à l’intérieur du Mali.

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L’Envoyée Spéciale pour le Sahel au Conseil de Sécurité : « près de 41 millions de jeunes âgés de moins de 25 ans sont exposés à la radicalisation ou contraints à quitter le pays en l’absence d’opportunités économiques »

L’Envoyée Spéciale du Secrétaire général des Nations Unies pour le Sahel, Mme Hiroute Guebre Sellassie a présenté, le 25 novembre 2015, le rapport du Secrétaire général des Nations Unies (http://bit.ly/1SuOJVm) sur les progrès accomplis dans la mise en œuvre de la Stratégie Intégrée des Nations Unies pour le Sahel (UNISS).

Lors de son intervention au Conseil de Sécurité, l’En-voyée spéciale a énuméré les diverses actions entreprises

par les Nations Unies dans le cadre de la mise en œuvre de la Stratégie des Nations Unies en rappelant l’im-portance de mobiliser davantage les ressources pour financer des projets phares. Elle a également souligné le renforcement de la coopération avec les partenaires régionaux com-me le G5 Sahel et a appelé à l’unité et à la solidarité des États Membres afin d’assurer un soutien indéfec-tible aux pays de la région où près de 41 millions de jeunes âgés de moins de 25 ans sont exposés à la radicalisation ou contraints à quitter le pays en l’absence d’opportunités économiques, a fait observer Mme Sellassie.

A cet égard, Mme Sellassie a ex-horté le Conseil de Sécurité à tirer parti des mécanismes existants et à « améliorer les mandats » en vue

d’assurer un contrôle renforcé des trafics de stupéfiants dans la région du Sahel. Elle a également plaidé en faveur de l’inscription sur la Liste des sanctions des individus ou enti-tés qui financent ou soutiennent des activités terroristes au Sahel.

Dans sa déclaration Présidentielle, le Conseil de Sécurité a noté avec satis-faction les efforts déployés par l’En-voyée spéciale afin de mobiliser des ressources et de renforcer le dialo-gue avec les organisations et les pays donateurs dans l’objectif d’accélérer l’exécution, en coordination avec les pays de la région, de certains projets régionaux.

Le Conseil de Sécurité a également demandé à l’Envoyée spéciale de poursuivre ses efforts et de conti-nuer d’user de ses bons offices en vue de renforcer la coopération ré-gionale et interrégionale et d’accroi-tre l’assistance internationale aux pays de la région du Sahel.

Hiroute Guebre Sellassie, l’Envoyée Spéciale du Sécretaire Général des Nations Unies pour le Sahel lors de son briefing au Conseil de Sécurité, New York - le 25 Novembre 2015. © UN Photo

Partenariats

Plateforme Ministérielle de Coordination des Stratégies Sahel : Le Mali passe le témoin au Tchad

Après deux ans de bons et loyaux services fournis en sa qualité de président de la PMC, le Mali cède son

siège au Tchad et ce conformément au dispositif mis en place pour as-surer une présidence tournante à la tête de la PMC (Conclusions).

Le Tchad, à travers l’intervention de son Ministre des Affaires Etran-gères, M. Moussa Faki Mahamat, a tenu à remercier le travail accompli par le Mali et s’est engagé, avec le soutien des divers partenaires, à redoubler d’efforts pour améliorer la coordination, notamment par le partage des informations et le ren-forcement de la coopération opéra-tionnelle entre les partenaires.

De son côté, dans le message lu par l’Envoyée spéciale, Mme Hiroute Guebre Sellassie, le Secrétaire gé-néral des Nations Unies s’est féli-cité du rôle déterminant joué par le Mali dans le lancement de la PMC et les efforts de coordination en-trepris pour assurer une meilleure cohérence et synergie entre les par-tenaires.

Le 5 Novembre 2015 s’est tenue la quatrième et dernière réunion de la Plateforme Ministérielle de Coordination des Stratégies Sahel (PMC) sous la présidence Malienne.

Quatriéme Réunion de la Plateforme de Coordination des stratégies Sahel, le 5 Novembre 2015 à Bamako. © OSES

Ils ont dit

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Les Chefs d’Etats du G5 Sahel appellent à une mutualisation des actionsDans un contexte marqué par une recrudescence des attaques terroristes menées par le Boko Haram et d’autres groupes qui opèrent dans la région du Sahel, les Chefs d’Etats du G5, réunis le 20 novembre dernier à N’Djamena lors d’un sommet ordinaire ont fait le bilan de leur action commune et pris des mesures phares.

Dans un contexte mar-qué par une recrudes-cence des attaques terroristes menées par

le Boko Haram et d’autres grou-pes qui opèrent dans la région du Sahel, les Chefs d’Etats du G5, réunis le 20 novembre dernier à N’Djamena lors d’un sommet or-dinaire, ont souligné la nécessité de la coordination dans la lutte anti-terroriste et l’urgence d’agir en synergie avec les partenaires pour améliorer les conditions de vie des populations au Sahel.

Les Chefs d’Etats du G5, ont éga-lement réitéré leur volonté de continuer à renforcer leur coor-dination et accentuer leur par-tenariat avec les divers acteurs régionaux et internationaux.

A cet égard, une réunion des par-tenaires techniques et financiers avec les Ministres de tutelle du G5 s’est tenue le 19 novembre en marge du sommet du G5 pour examiner les domaines prioritai-res de coopération et articuler un plan d’action conjoint

Tout en exprimant leur grati-tude à l’endroit des partenaires de coopération pour leur enga-

gement ferme aux côtés du G5 Sahel et en les encourageant à les traduire en acte dans les plus brefs délais, les chefs d’Etat ont lancé un appel à la communau-té internationale pour soutenir les efforts du G5 Sahel dans son combat pour la sécurisation de son espace et la promotion de son développement.

Le sommet s’est aussi félicité de l’adoption d’une feuille de route définissant le cadre de coopéra-tion entre le G5 Sahel et les Na-tions unies.

Faisant écho à l’engagement du G5 à plus de solidarité, de cohé-sion et à une mutualisation des efforts dans l’action, le Secré-taire général des Nations Unies, Mr.Ban Ki-moon, à travers un message lu par son Secrétaire Adjoint aux Affaires Politiques, M. Jeffrey Feltman, à saluer la dé-termination du G5 à œuvrer pour les Sahel. Il a également renou-veler l’engagement des Nations Unies à continuer à soutenir les pays du G5 à travers une mise en œuvre rapide et audacieuse de la Stratégie Intégrée des Nations Unies pour le Sahel.

Les Présidents du Mali, de la Mauritanie, du Tchad, du Niger et du Burkina Faso, le 20 novembre 2015 à N’Djamena lors du 2éme sommet du G5 Sahel. © bayiri

UN Radio : http://bit.ly/1PJR50j

La protection des citoyens devrait être un défi majeur pour les Nations Unies en 2016, selon un haut respon-sable de l’ONU. Hervé Ladsous, chef des Opérations de maintien de la paix de l’ONU affirme qu’environ 80 pour cent des casques bleus en uniforme servent aujourd’hui dans des missions en Afrique. Une grande partie de leur tra-vail porte sur la sécurité des personnes. Matthew Wells s’est entretenu avec M. Ladsous sur ses attentes en matière de maintien de la paix sur le continent dans le courant de l’année.

Hervé Ladsous

Abdoulaye BathilyAvec plusieurs pays d’Afrique centrale en année d’élections en 2016, la néces-sité de processus électoraux «libres et équitables»est soulignée. Les responsa-bles de l’ONU dans la région ont mis en garde contre la possibilité de conflit si les élections prévues en République démocra-tique du Congo, en République du Congo et au Burundi ne se déroulent pas bien. Veronica Reeves a parlé avec Abdoulaye Bathily, le Chef du bureau régional de l’ONU pour l’Afrique centrale sur ses priori-tés pour la prochaine année.

Toby LanzerPour des millions de personnes vivant dans la région du Sahel en Afrique, 2016 semble être une année char-nière. Les pays qui composent le Sahel sont parmi les plus pauvres du monde. En décembre, l’ONU a lancé un appel à l’aide humanitaire de 2 milliards de dollars US en faveur de la ré-gion, arguant que jusqu’à 600.000 enfants risquent d’y mourir de malnutrition dans l’année à venir. Daniel Dickinson s’est en-tretenu avec Toby Lanzer, le Coordinateur humanitaire de l’ONU pour le Sahel et l’a interrogé sur ses attentes au cours des 12 prochains mois.

Le Projet régional d’autonomi-sation des femmes et le di-vidende démographique au Sahel procède d’une réponse

conjointe des Nations Unies et du Groupe de la Banque mondiale (BM) à l’appel lancé par les Présidents de six pays du Sahel, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Mali, Mauritanie, Niger et Tchad.

Comme l’a indiqué M. Rafini, le temps d’agir en faveur de la population du Sahel pour renverser la tendance et relever les défis est arrivé. Car, « au-delà du discours, il y a ce désir inten-se de joindre l’acte à la parole », a-t-il souligné, assurant par la même occa-sion que ce projet aura des résultats positifs pour la région.

Se succédant à la tribune, les minis-tres du Burkina Faso, du Mali, de la Mauritanie, du Niger, du Tchad et la représentante du Gouvernement ivoirien, ont tous évoqué la situation difficile du Sahel.

Ils ont rappelé l’opportunité de déve-loppement qu’offre la mise en œuvre d’un tel projet au profit des popula-tions.

«C’est un signal fort pour améliorer la santé des mères et des enfants», a fait savoir le Directeur général adjoint de l’Organisation ouest-africaine de la santé (OOAS), Dr Laurent Assogba.

Appropriation régionale

«L’engagement des équipes des gou-vernements des six pays impliqués dans le projet relatif à l’autonomisa-tion des femmes et de dividende dé-mographique au Sahel est remarqua-ble. Ils reconnaissent que son succès dépend non seulement de la direc-tion des ministères de la Santé et de la Population, mais aussi la participa-tion active des ministères de l’Educa-tion, de l’Emploi, de la Jeunesse, de la Communication, des Affaires socia-les et de la Promotion des femmes

», a dit Soji Adeyi, Directeur Santé, Nutrition et Population à la Banque mondiale.

«La Banque mondiale est fière d’ap-puyer cette approche multisecto-rielle, multipartenaire, ambitieuse et unique pour améliorer l’autono-misation des femmes et des filles et leur accès aux services de santé. Cela aidera à créer plus d’opportunités économiques et de prospérité pour les femmes, les filles et leurs familles », a poursuivi M. Adeyi.

Une action collective pour un avenir des peuples du Sahel

Le Directeur régional de l’UNFPA, le Fonds des Nations Unies pour la po-pulation, pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre, M. Mabingué Ngom, a indiqué que le Fonds «réitère sa sa-tisfaction et sa profonde gratitude à l’endroit des Chefs d’Etat des pays concernés pour leur engagement fort et leur appui politique conséquent à la mise en œuvre de ce projet qui, en n’en point douter, contribuera à l’amélioration des conditions de vies des femmes, des enfants, des jeunes et des adolescents dans pays respec-tifs».

C’est pourquoi M. Ngom s’est dit convaincu que cela contribuera de façon efficace «à la mise en œuvre et à la réalisation de l’agenda 2030 pour le développement durable et surtout de l’agenda 2063 de l’Union africaine en phase avec ses six objectifs qui consistent à bâtir un continent où le potentiel des femmes et des jeunes est réalisé». «Nous y parviendrons par l’action, notre action collective», a conclu M. Ngom.

Le lancement a été suivi par la mise en place du Comité de pilotage du pro-jet, présidé par le Niger, et de quatre jours d’atelier durant lesquels les ex-perts des pays concernés et ceux de l’OOAS, de la Banque mondiale et de

l’UNFPA échangeront sur les procé-dures et modalités pratiques de mise en œuvre immédiate du SWEDD.

Conçu grâce à un partenariat avec l’OOAS, le Comité permanent inter-Etats de lutte contre la sécheresse dans le Sahel (CILSS), le Centre d’étu-des et de recherche sur la population pour le développement (CERPOD) et la Fondation Bill et Melinda Gates, le SWEDD sera mis en œuvre avec l’as-sistance technique de l’UNFPA et le financement de la Banque mondiale pour un montant de 205 millions de dollars US sur une période de quatre ans.

Banque Mondial. Améliorer la santé reproductive et l’éducation pour les filles et les femmes au Sahel : une opportunité pour tous.

Niamey, 4 novembre 2015. Le « Projet régional d’Autonomisation des femmes et de dividende démographique au Sahel (SWEDD) » a été officiellement lancé le 2 novembre 2015, sous le haut patronage de son Excellence, Monsieur Brigi Rafini, Premier Ministre du Niger, au Palais des Congrès de Niamey.

« Autonomisation des femmes et dividende démographique au Sahel »

A découvrir

Un fonds d’affectation spéciale de l’Union Européenne pour l’Afrique.

La Commission européenne a alloué 1.8 milliards d’euros provenant de moyens financiers européens pour mettre en place un «Fonds d’affectation spéciale d’urgence pour la stabilité et pour lutter contre les causes profondes de migration illégale en Afrique»....

Pour plus d’information, cliquez sur:http://bit.ly/1gmd8LV

SAHEL FOCUS№ 004 - F é v r i e r 2016 - Page 12

№ 004 - F é v r i e r 2016 - Page 13 SAHEL FOCUS

Interview

M. Mario Samaja, Coordonateur Résident des Nations Unies en MauritanieLe Coordonnateur résident des Nations Unies en Mauritanie, Mr. Mario Samaja, est, depuis janvier 2015, activement engagé auprès du Gouvernement mauritanien et soutient les priorités nationales de développement, coopère avec les ONG, la société civile et autres partenaires majeurs. Sahel Focus a voulu connaitre ses vues sur les réalisations des Nations Unies, les problèmes et les perspectives futures dans l’une des régions les plus complexes du monde. Entretien

En tant que Coordonnateur Rési-dent du système des Nations-Unies en Mauritanie depuis le début de 2015, quel regard portez-vous sur la Mauritanie ?

La Mauritanie est à la fois captivante et complexe. Elle est située à la croi-sée du Sahel et du Maghreb, une position particulièrement unique qui offre à la Mauritanie de nombreuses opportunités de jouer un rôle crucial entre ces deux sous-régions. Le pays a été relativement stable pendant les cinq ou six dernières années. En ter-mes de PIB réel, l’économie a enregis-tré une croissance de plus de 4% par an en moyenne pendant les cinq der-nières années, bien qu’en 2015, elle ait ralenti à 3.1%. Les efforts de ré-duction de la pauvreté ont porté des fruits, avec une baisse remarquable de 26% depuis 1990. Pourtant malgré l’excellent travail et les efforts du gou-vernement, les problèmes demeurent : la lutte contre la radicalisation et le terrorisme doit être une action de tous les jours ; la pauvreté, bien que réduite de manière significative, est toujours élevée, à 31%, et des désé-quilibres existent ; des couches de la société mauritanienne sont toujours à la traine. La croissance doit devenir

plus inclusive pour réduire les inégali-tés et jeter les bases d’un développe-ment durable pour tous. La jeunesse et la génération d’emplois requièrent une attention et des efforts spéciaux. Une approche durable est également nécessaire dans la gestion des res-sources naturelles et l’environnement terrestre et marin.

Que pensez-vous du travail accompli par le système des Nations Unies et que doit faire l’ONU pour soutenir davantage la Mauritanie ?

Le Système des Nations Unies jouit d’une présence consolidée en Mau-ritanie et y joue un rôle charnière porté sur le soutien des priorités de développement nationales et du gou-vernement mauritanien, et collabore étroitement avec les autres partenai-res, les ONG et la société civile. Plus de 15 agences, fonds et programmes contribuent de diverses manières à la réalisation du Plan cadre des Nations Unies pour le développement (PCAD), un document-programme entre le gouvernement mauritanien et l’équi-pe des Nations Unies dans le pays qui décrit les actions et stratégies collec-tives des Nations Unies pour le déve-loppement national. Plusieurs agen-ces des Nations Unies sont également très impliquées dans l’action humani-taire, apportant aide aux segments les plus vulnérables de la population à travers un plan triennal de riposte stratégique ou PRS, coordonné avec les acteurs de l’humanitaire dans le pays ainsi qu’au niveau régional avec d’autres pays du Sahel. La Mauritanie entre dans une année cruciale en ter-mes de planification stratégique du développement ; le gouvernement vient d’entamer le processus de for-mulation de la Stratégie de croissance accélérée et de prospérité partagée ou SCAPP. Elle constituera le cadre

stratégique des 15 prochaines an-nées et est composée de plans quin-quennaux. Sur la base des priorités nationales identifiées dans la SCAPP, le Système des Nations Unies et le gouvernement planifieront ensem-ble des actions conjointes à travers un nouveau PCAD, qui est également en discussion en 2016. Ces proces-sus attirent une attention toute par-ticulière car ils arrivent juste après l’adoption de l’Agenda 2030 et des objectifs de développement durable. Ils fournissent d’excellentes opportu-nités de consolidation des résultats des actions passées et une meilleure manière d’aborder des domaines tou-jours faibles. L’attention du Système des Nations Unies, cette année, se portera donc sur le soutien au Gou-vernement dans la formulation de la SCAPP, et par conséquent, la finalisa-tion d’un nouveau PCAD. Le soutien des Nations Unies sera multiforme et articulé, mais un élément clé sera l’alignement local et l’appropriation de l’Agenda 2030 et des objectifs de développement durable, aux niveaux national et décentralisé. A travers les objectifs de développement durable, l’ONU offre son soutien dans tous les domaines qui pourraient alimen-ter une stratégie de développement vraiment inclusive et durable. La ré-duction de l’exclusion et de la discri-mination, la consolidation des droits humains et de la cohésion sociale se-ront de grands thèmes transversaux, entre autres. Une attention spéciale sera portée aux vulnérabilités et si-tuations humanitaires aigües, et en particulier sur la formulation de solu-tions novatrices pour les vulnérabili-tés chroniques. En même temps que l’Agenda 2030, d’autres processus mondiaux fourniront d’importants soutiens sur des préoccupations spé-cifiques comme la COP21 sur le chan-gement climatique tenue dernière-

M. Mario Samaja, Coordonateur Résident des Nations Unies en Mauritanie. © irena.org

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ment à Paris, le prochain sommet humanitaire mondial (qui se tiendra en Turquie dans quelques mois), et des discussions mondiales sur le fi-nancement du développement.

La Stratégie Intégrée des Nations pour le Sahel est une réponse aux défis multiple que connait la région du Sahel. Pensez-vous que sa mise en œuvre est efficace ?

La Stratégie intégrée des Nations Unies au Sahel (SINUS) a considéra-blement progressé en 2015; l’appro-priation locale a augmenté, particuliè-rement dans sa dimension régionale et les rapports de travail entre le Sys-tème des Nations Unies et le G5 Sa-hel se sont développés rapidement et avec succès. Des initiatives pilotes ont été identifiées et réalisées d’une ma-nière effective et collaborative. Des options nouvelles et passionnantes de financement de la Stratégie sont également disponibles ; bien qu’en-core à leurs balbutiements, elles sont prometteuses et mèneront sûrement à des résultats positifs. Nombre des enjeux confrontant le Sahel ne sont spécifiquement pas circonscrits à un seul pays, et une approche stratégi-que régionale est donc essentielle ; la SINU est bien outillée pour contri-

buer à des solutions régionales dans chacun des éléments stratégiques. La consolidation continue de l’appro-priation locale des liens entre acteurs nationaux et régionaux est primor-diale ; les avancées dans la construc-tion d’excellentes relations avec le G5 Sahel est un clair exemple et pourrait fournir une direction pour d’autres zones de la région. Des éléments es-sentiels supplémentaires ayant une grande importance dans la pleine réalisation de la SINU reposent sur le succès des efforts de financement et dans l’optimisation de l’articulation entre les initiatives régionales et le travail entrepris au niveau des pays.

Quelles sont vos recommandations pour que la Mauritanie/la région en coordination avec les NU puissent résoudre ces défis ?

Les problèmes actuels au Sahel sont d’envergure. Ils vont de la sécurité et la radicalisation à la gouvernance, de la construction de la résilience à la gestion durable des ressources natu-relles, de la réduction de la pauvreté à la cohésion sociale, de l’insécurité alimentaire et la malnutrition au fi-nancement du développement, pour en citer quelques-uns. Ils nécessitent tous d’être étudiés en profondeur

pour la formulation de recomman-dations spécifiques. Il peut être pro-posé un principe fondamental qui est d’aborder ces problèmes de ma-nière efficace : les ripostes devraient être solidement inter reliées, bien coordonnées et se renforcer mutuel-lement. Prendre à bras le corps ces problèmes multiples et multiformes requiert une approche globale qui maximise les synergies et n’est pas bloquée par des barrières sectoriel-les spécifiques ou par des frontières internationales. De ce point de vue, la SINU offre d’importantes opportu-nités de renforcement de la dimen-sion régionale de l’action des Nations Unies dans les pays, et dans l’intégra-tion des différents piliers stratégiques de la SINU.

Quelle est votre priorité/s en tant que RC ?

Pour 2016, une des grandes priorités sera de veiller à un soutien cohésif et coordonné à la Mauritanie dans la formulation de la nouvelle stratégie pour un développement inclusif et durable. La Stratégie pour une crois-sance accélérée et la prospérité parta-gée offre une formidable opportunité de jeter des bases solides d’un déve-loppement inclusif dans les 15 pro-chaines années. La contribution des Nations Unies portera, entre autres éléments, sur le soutien aux liens en-tre la SCAPP et l’Agenda 2030 et les objectifs de développement durable. Elle permettra également de porter sur le devant de la scène un éven-tail de questions critiques, nombre d’entre elles transversales et jugées essentielles pour le succès de la Stra-tégie. Le Système des Nations Unies jouera un rôle clé dans le maintien de la cohérence et la coordination entre un large éventail de partenaires, pour lesquels l’ONU peut, d’une certaine manière, servir de catalyseur. Finale-ment, les efforts stratégiques du Sys-tème des Nations Unies iront vers la formulation, conjointement avec le gouvernement, du nouveau PNUAD, qui sera étroitement lié aux priorités nationales découlant de la SCAPP.

Le Niger, le Tchad, le Burkina Faso et le Mali restent collés au bas de l’indice de développement humain des Nations unies, le Niger étant classé dernier (188ème), suivi par le Tchad (185ème), le Burkina Faso (183ème), le Mali (179ème) et la Mauritanie (156ème) ; les cinq pays sont classés comme à faible développement humain.

Sur les 156 pays de l’Indice d’inégalités de genre des Nations unies, le Niger se classe 154ème, le Tchad est 153ème, le Mali 150ème, le Burkina Faso 144ème et la Mauritanie 139ème, ce qui démontre le peu de progrès enregistrés en matière de droits des femmes dans la région du Sahel.

Les taux d’alphabétisation dans la région sont beaucoup plus bas pour les femmes que pour les hommes. Au Niger, l’alphabétisation des 15-24 ans est de 35% pour les hommes contre 15% pour les femmes, au Tchad, il est de 54% pour les hommes contre 44% pour les femmes, au Burkina Faso 47% contre 33%, au Mali 56% contre 39% et en Mauritanie, 66% contre 48%.

Le saviez-vous ?

SAHEL FOCUS№ 004 - F é v r i e r 2016 - Page 15

Votre dernière exposition photogra-phique est consacree aux femmes du Sahel, pourquoi ce choix ?

Avant, mon regard n’était porté sur rien de précis.Je regardais au travers l’objectif de mon appareil photo le monde qui m’entourait en essayant de mieux le comprendre. Aussi, j’ai com mencé par traiter la problématique de l’enfance avant d’aborder celle des femmes au Sahel. Mon choix de ce su-jet était naturel. D’abord, parce que je suis une femme, et que nous sommes, d’une manière ou d’une autre, liées a tous les problèmes dits de : « sous dé-veloppement.»

J’ai donc oriente mon appareil photo sur les femmes du Sahel, car de leurs vie en découle un combat de tous les jours. En temps qu’être humain, nous devons tenir compte de notre existence et du rôle que nous avons comme véhicule ou vecteur pour nos enfants et pour une jeunesse naissan-te. L’apport des femmes est essentiel au développement social et économi-que d’un pays. Aussi, j’ai voulu rendre hommage aux femmes à travers ces

portraits, à leur diversité, leurs com-bat, leurs engagements, leur sdou-ceurs, leurs parcours, ainsi que leurs forces et leurs conditions.

Vous êtes jeune Mauritanienne, quel regard portez-vous sur le rôle de la femme dans le Sahel aujourd’hui ?

Le regard que je pose sur la femme du Sahel est celui d’une femme qui serait plus impliquée sur le plan politique, économique et social, car cela consti-tue une donnee essentielle à la sta-bilisation et au développement d’un pays. Les femmes sont les premières victimes dans les zones de conflit et doivent être associées à toutes les problématiques liées au maintien de la paix et a l’éducation afin d’aider a apporter des solutions novatrices.

Pour moi, la femme du sahel a tout de cette combattante «Amazon» qui

serait là pour préserver et imposer sa vision constructive de la société et se battrait sur tous les fronts pour la pré-servation de celle ci.

Que doivent ou peuvent faire les états de la région pour renforcer le rôle des femmes au Sahel ?

Les Etats doivent les impliquer davan-tage dans la prise de décision, leur donner la chance de pouvoir être in-dépendantes économiquement pour développer leur Leadership, leur per-mettre aussi de mieux s’instruire pour mieux éduquer leurs enfants.

Les Etats doivent investir davantage dans l’éducation des jeunes filles et des femmes, lesquelles, souvent, ne finissent pas leur cursus scolaire a cause d’un manque d’infrastructures ou parce que certaines mentalités veulent que la femme soit devouée à d’autres tâches dites ménagères... mais l’un n’empêche pas l’autre.(sou-rire)

En tant que femme sahélienne, quel serait pour vous un avenir radieux au Sahel ?

Un avenir radieux-au Sahel-pour moi passe par l’éducation de notre jeu-nesse, car aucune nation ne peut se construire sans sa jeunesse. Le man-que d’infrastructures educatives a un

Pour les femmes du SahelEntre sourire chaleureux et soupires songeurs, Malyka Diagana, jeune photographe mauritanienne, scrute le Sahel dans sa complexite et ses promesses. Les portraits qu’elle tire des femmes du Sahel sont autant un hymne à la beauté qu’un appel à plus de consideration du rôle des femmes au Sahel. Entretien.

Malyka Diagana, © Leslie Rabine.

Portrait / Malyka Diagana, Photographe

“ Pour moi, la femme du sahel a tout de cette combattante “ Amazon ” qui serait là pour préserver et imposer sa vision constructive de la société et se battrait sur tous les fronts pour la préservation de celle ci.”

“ Les Etats doivent investir davantage dans l’éducation des jeunes filles et des femmes ”

impact negatif sur des générations de jeunes et affaibli leurs chances de réussite professionelle. Quand je parle d’éducation, il ne s’agit pas seu-lement des livres, mais aussi d’une éducation culturelle et artistique qui à mon humble avis pourrait aider à la formation d’une jeunesse dynamique et rayonnante.

Je déplore que dans le système édu-catif de base en Afrique et au Sahel en particulier, les arts et la culture en general, ne sont pas mis en avant et ne sont pas intégrés dans les pro-grammes scolaires au même titre que l’histoire, la géographie ou les ma-thématiques, car ils pourraient aider un enfant ou un jeune au Sahel a for-ger une vision positive et constructive de l’avanir.

Quels sont vos projets après le suc-cès de votre travail sur les portraits des femmes du Sahel ?

Pour 2016, je suis a la recherche en-core de quelque chose de nouveau que j’espère trouver. Quelques idées sont encore à l’état embryonnaire, mais j’espère qu’elles verront le jour. Je pense a un film documentaire et une série de portrait sur des thé-matiques diverses qui touche notre monde.

Urban woman. © : Malyka Diagana

Light and soul. © Malyka Diagana

“ Un avenir radieux-au Sahel-pour moi passe par l’éducation de notre jeunesse, car aucune nation ne se construit sans sa jeunesse. ”

Pour plus d’information sur la photographe: www.linguereart.comfacebook.com/malyka.diaganalinguereartwork - twitter.com/Linguereartwork

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Soul. © Malyka DiaganaBureau de l’Envoyée Spéciale pour le Sahel

(OSES)

BP: 23851, Dakar Ponty, Senegal

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