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Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire Moctar TOUNKARA, Samba DIARRA, Ousmane MAIGA, Hadja SANGARE, Sory I DIAWARA, Fatou DIAWARA, Hamadoun SANGHO, Akory Ag IkNANE, Seydou DOUMBIA li Ma D SAI U Décembre 2019 RESEARCH TECHNICAL ASSISTANCE CENTER

Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

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Page 1: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali:

Étude Documentaire

Moctar TOUNKARA, Samba DIARRA, Ousmane MAIGA, Hadja SANGARE, Sory I DIAWARA, Fatou

DIAWARA, Hamadoun SANGHO, Akory Ag IkNANE, Seydou DOUMBIA

li M

aD

SAI

U

Décembre 2019

R E S E A R C H T E C H N I C A L A S S I S T A N C E C E N T E R

Page 2: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Remerciements

Cette étude a été menée en collaboration avec l’Université des Sciences, des Techniques et des

Technologies de Bamako, et avec le Département d’Enseignement et de Recherche en Santé Publique de

la Faculté de Médecine et d’Odontostomatologie de Bamako, en partenariat avec le Centre d’Assistance

Technique et de Recherche de NORC, de l’Université de Chicago, grâce au financement du bureau

Food For Peace de l’USAID Mali. Nous remercions toutes les participants, à savoir : le Gouvernement

du Mali (en particulier, le Ministère de l’Administration Territoriale, le Commissariat à la Sécurité

Alimentaire, le Système d’Alerte Précoce, l’Observatoire du Marché Agricole, la Direction Nationale du

Développement Social, la Direction Générale de la Santé et de l’Hygiène Publique, la Direction

Nationale de l’Agriculture, de la Pêche, de la Production et de l’Industrie Agro-Alimentaire, des

Domaines et du Cadastre, du Commerce, de la Concurrence et de la Consommation, les Directions

Régionales de la Santé, du Développement Social des régions de Mopti, Tombouctou, Gao et Ségou), les

populations des régions de Mopti, Tombouctou, Gao et Ségou.

Nous souhaitons en particulier remercier et exprimer toute notre gratitude à Gabriela Alcaraz Velasco,

Directrice de recherche, pour son travail de supervision, de suivi et d’évaluation du rapport, depuis

l’élaboration du protocole jusqu’à la rédaction finale, ainsi qu’à toute l’équipe du Centre d’Assistance

Technique et de Recherche de NORC de l’Université de Chicago. Nous remercions le bureau de Food

For Peace de l’USAID, qui a financé ce projet et qui nous a accompagnés et soutenus tout au long de ce

travail.

Research Technical Assistance Center

Le Centre d'assistance technique à la recherche (Research Technical Assistance Center) est un réseau

de chercheurs universitaires qui génèrent des données de recherche opportunes pour l'USAID afin de

promouvoir des politiques et des programmes fondés sur des données probantes. Le projet est dirigé

par NORC à l'Université de Chicago en partenariat avec l'Arizona State University, le Centro de

Investigación de la Universidad del Pacifico (à Lima, au Pérou), Davis Management Group, le

DevLab@Duke University, Forum One, l'Institute of International Education, Notre Dame Initiative for

Global Development, Population Reference Bureau, Resilient Africa Network à la Makerere University

(à Kampala, en Uganda), United Negro College Fund, l'Université de Chicago et l'Université de l'Illinois à

Chicago.

Le Centre d'assistance technique à la recherche (RTAC) a été créé grâce au soutien du peuple américain

par le biais de l'Agence des États-Unis pour le développement international (USAID) en vertu du

contrat n° 7200AA18C00057. Ce rapport a été produit par des chercheurs de l'Université des Sciences,

des Techniques et des Technologies de Bamako (USTTB), sous la seule responsabilité du RTAC et du

NORC de l'Université de Chicago, et ne reflète pas nécessairement les vues de l'USAID ou du

gouvernement américain.

Citation suggérée

Tounkara et al. 2019. Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire. Research Technical

Assistance Center: Washington, DC.

Page 3: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Synthèse Cette revue documentaire sur la sécurité alimentaire donne un aperçu de la situation de la sécurité

alimentaire dans le centre et le nord du Mali en termes de disponibilité, d'accès et d'utilisation des aliments.

La revue est centrée sur les régions de Gao, Mopti, Ségou et Tombouctou, et présente les facteurs qui

peuvent avoir un impact sur les programmes de sécurité alimentaire.

L'économie malienne est principalement basée sur l'agriculture, l'élevage, la pêche et la foresterie.

L'agriculture représente 33 pour cent du PIB et emploie près de 80 pour cent de la population. Au cours

des dernières années, les ménages maliens ont été exposés à une série de chocs et de stress, tels que des

pluies irrégulières, des sécheresses, des crues soudaines, une incidence de ravageurs, et de mauvaises

récoltes. Ces chocs, couplés aux effets des conflits et de l'insécurité qui ne cessent de ravagés le pays, ont

accru la vulnérabilité des ménages à la pauvreté et à l'insécurité alimentaire.

Depuis 2012, l'insécurité, les groupes rebelles, les groupes djihadistes, ainsi que les conflits

intercommunautaires ont exacerbé le problème de l’insécurité alimentaire. La présence des groupes armés

a entraîné une diminution des activités commerciales et de commercialisation dans les zones touchées,

une réduction de la production agricole, et un accès limité aux services de base (tels que les services de

santé et l'éducation) en raison de la fermeture des installations, du manque de personnel et de provisions,

et du manque de sécurité sur les routes reliant les différents sites.

Dans ce contexte, ces régions enregistrent des niveaux d'insécurité alimentaire et de malnutrition

supérieurs à la moyenne nationale, et ce qui représente un véritable sujet de préoccupation compte tenu

de la multiplication des facteurs déjà existants qui augmentent la vulnérabilité des ménages. Cette revue

donne une image de cette situation complexe, sur la base des nombreux documents existants sur le sujet

et d’informations collectées lors d'entretiens avec des informateurs clés.

Page 4: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Table des Matières Remerciements ................................................................................................................................................................................... ii

Research Technical Assistance Center......................................................................................................................................... ii

Synthèse .............................................................................................................................................. iii

Table des Matières ............................................................................................................................. iv

Table des Chiffres clés ....................................................................................................................... vi

Table des Graphiques ........................................................................................................................ vi

Liste d’acronymes ............................................................................................................................ viii

Glossaire ............................................................................................................................................... 1

1. Introduction .................................................................................................................................. 4

Objectifs ............................................................................................................................................................................................... 4

Méthodologie ...................................................................................................................................................................................... 5

2. Situation de la Sécurité Alimentaire ........................................................................................... 6

Contexte politique et réglementaire ............................................................................................................................................ 7

Disponibilité alimentaire ................................................................................................................................................................... 7

Production alimentaire ............................................................................................................................................ 8

Stocks ......................................................................................................................................................................... 11

Commerce alimentaire .......................................................................................................................................... 12

Accès aux denrées alimentaires ................................................................................................................................................... 13

Utilisation des denrées alimentaires............................................................................................................................................ 14

La Malnutrition Infantile chez les enfants de moins de cinq ans et les femmes enceintes .................... 14

Statut Nutritionnel des Femmes ......................................................................................................................... 15

3. Facteurs liés à la Sécurité Alimentaire ..................................................................................... 16

Facteurs socio-économiques ......................................................................................................................................................... 16

Démographie............................................................................................................................................................ 16

Page 5: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Moyens d’existence ................................................................................................................................................ 20

Les Services Sociaux de Base ............................................................................................................................... 21

Accès à l’aide humanitaire.............................................................................................................................................................. 28

Conflit et insécurité ......................................................................................................................................................................... 29

Facteurs environnementaux - Climat.......................................................................................................................................... 30

Accès à la terre et aux autres ressources naturelles.............................................................................................................. 32

Gestion de la terre ................................................................................................................................................. 32

Implication des pauvres et des femmes dans la prise de décision et l'utilisation des ressources

naturelles ................................................................................................................................................................... 34

Mécanismes de distribution des ressources naturelles .................................................................................. 36

Gestion des bourgoutières ................................................................................................................................... 36

Eau .............................................................................................................................................................................. 37

Gestion des conflits liés aux ressources naturelles ........................................................................................ 37

4. Insécurité Alimentaire et Moyens d’Adaptation des Communautés ................................... 38

5. Assistance Alimentaire ................................................................................................................ 40

USAID ................................................................................................................................................................................................. 40

6. Leçons tirées des Programmes de Sécurité Alimentaire ...................................................... 41

Références .......................................................................................................................................... 44

Annexe I. Méthodologie ................................................................................................................... 48

Annexe 2. Tableaux .......................................................................................................................... 51

Page 6: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Table des Chiffres clés

Tableau 1. Répartition des femmes de 15 à 49 ans par région en fonction du statut nutritionnel (%) ...... 15

Tableau 2. Situation des écoles en Octobre 2019 ................................................................................................... 22

Tableau 3. Couverture vaccinale, par région. ........................................................................................................... 23

Tableau 4. Indicateurs d’accessibilité aux services de santé dans l’ensemble des régions du Mali .............. 24

Tableau 5. Pratiques d’hygiène et Installations sanitaires ....................................................................................... 26

Tableau 6. Pourcentage des principales sources des céréales par région, 2018 .............................................. 51

Tableau 7. Groupe de consommation alimentaire par région en Septembre 2018. ....................................... 52

Tableau 8. Indicateurs de la malnutrition chez les enfants par région, 2018 ..................................................... 52

Tableau 9. Niveau des dépenses alimentaires mensuelles par région, 2018 (FCFA) ....................................... 53

Tableau 10. Taux de fréquentation scolaire dans l’ensemble des régions du Mali, 2018 ............................... 53

Tableau 11. Situation des écoles au Mali en janvier 2018 ...................................................................................... 54

Tableau 12. Estimation du revenu total (en cash - FCFA) des ménages en septembre 2018 et 2017 par

Zone de Moyens d’Existence (ZME) ........................................................................................................................... 55

Tableau 13. Indicateurs de santé maternelle par région au Mali, 2018 ............................................................... 56

Tableau 14. Sources d’eau potable par région, 2018 .............................................................................................. 56

Table des Graphiques

Graphique 1. Régions ciblées .......................................................................................................................................... 5

Graphique 2. Population en phase de crise de 2013 à 2019 en Mali..................................................................... 6

Graphique 3. Production céréalière nationale, 2012-2018. ..................................................................................... 8

Graphique 4. Production céréalière (Millier de Tonnes), par cercle 2014-2018 ............................................... 9

Graphique 5. Pourcentage des stocks céréaliers des ménages provenant de l’achat ..................................... 11

Graphique 6. Prévalence de la malnutrition chronique chez les enfants de moins de 5 ans ......................... 14

Page 7: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Graphique 7. Zones de Moyens d’Existence ............................................................................................................. 20

Graphique 8. Pourcentage de la population utilisant un source améliorée d’eau de boisson ....................... 25

Graphique 9. Evolution du nombre de PDI 2012 a 2019 ....................................................................................... 29

Graphique 10. Indice des stratégies de survies des ménages Septembre 2014 - Septembre 2018 ........... 38

Page 8: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 viii

Liste d’acronymes

AMM Association des Municipalités

AMO Assurance Maladie Obligatoire

CREDD Cadre Stratégique pour la Relance et Développement Durable

CCN Cellule de Coordination Nationale

CSA Commissariat à la Sécurité Alimentaire

DFSA Activités de Sécurité Alimentaire en Développement

DNP Direction Nationale de la Population

DCPND Document Cadre de Politique Nationale de Décentralisation

EEI Engins Explosifs Improvisés

EHA Eau Hygiène et Assainissement

ENP Étude Nationale Prospective

ENSAN Enquête Nationale sur la Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle

FCFA Franc de la Communauté Financière Africaine

FEWS NET Famine Early Warning Systems Network

FFP Food for Peace

GdM Gouvernement du Mali

GFSS Global Food Security Strategy

GIE Groupements d’Intérêt Économiques

GRAT Groupe de Recherche et d'Application Technique

HKI Helen Keller International

ICRAF Centre mondial d'agroforesterie

PDI Personnes Déplacées Internes

IMRAP Institut Malien de Recherche-Action pour la Paix

INSTAT Institut National de la Statistique

LOA Loi d’Orientation Agricole

MAM Malnutrition Aigüe Modérée

MAS Malnutrition Aigüe Sévère

OCHA Bureau de la coordination des affaires humanitaires

OMA Observatoire du Marché Agricole

OMS Organisation Mondiale de la Santé

ONG Organisation Non Gouvernementale

OP Organisations Paysannes

OPAM Office des Produits Agricoles du Mali

Page 9: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire ix

PAM Programme Alimentaire Mondial

PBSG Planification et Budgétisation Sensible au Genre

PDIs Populations Déplacées Internes

PDSEC Plan de Développement Économique et Social

PIB Produit Intérieur Brut

PIO Organisations Internationales Publiques

PolNSAN Politique Nationale de Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle

PRP Priorités Résilience du Mali

RAMED Régime d'Assistance Médicale

SAP Système d’Alerte Précoce

SC Save the Children

SOMAGEP Société Malienne de Gestion d’Eau Potable

UNHCR Agence des Nations Unies pour les Réfugiés

UNICEF Fond des Nations Unies pour l’Enfance

USAID Agence Américaine pour le Développement International

YA-G-TU Organisation pour la promotion de la femme

Page 10: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire 1

Glossaire Agriculture : la science et les activités liées à la production, à la transformation, à l'emballage, au

transport, au commerce, à la commercialisation, à la consommation et à l'utilisation des denrées

alimentaires, des aliments pour animaux et des végétaux, y compris l'aquaculture, l'agriculture, la pêche,

la sylviculture et l’élevage.

Approches sensibles à la nutrition : interventions qui s'attaquent aux déterminants sous-jacents et

fondamentaux de la malnutrition et intègrent des objectifs et des actions spécifiques en matière de

nutrition.

Développement durable : la capacité d'un pays, d'une communauté, d'un partenaire de mise en

œuvre ou d'un bénéficiaire prévu de maintenir, au fil du temps, les programmes autorisés et les résultats

obtenus, d'un point de vue institutionnel et programmatique. La durabilité implique le renforcement des

compétences, des connaissances, des institutions et des incitations qui peuvent rendre les processus de

développement autosuffisants.

Équitable : traiter de manière juste et égale avec toutes les personnes concernées, indépendamment

de leur statut économique, de leur situation géographique, de leur sexe, de leur race, de leur âge ou de

toute autre caractéristique sociale.

Extrême pauvreté : l'incapacité de répondre durablement aux besoins de consommation de base. Les

personnes qui vivent dans l'extrême pauvreté manquent à la fois de revenus et de biens. Ils souffrent

généralement de privations chroniques et interdépendantes, notamment la faim et la malnutrition, une

mauvaise santé, une éducation limitée et la marginalisation ou l'exclusion.

Fragilité : la mesure dans laquelle les relations entre l'État et la Société ne produisent pas de résultats

considérés comme efficaces et légitimes. L'efficacité fait référence à la capacité du gouvernement de

travailler avec la société pour assurer le maintien de l'ordre et la fourniture de biens et services publics.

La légitimité renvoie à la perception par des segments importants de la société du fait que le

gouvernement exerce le pouvoir de l'état de manière raisonnable, équitable, et dans l'intérêt de la nation

dans son ensemble.

Genre : l'ensemble des rôles, des droits, des responsabilités, des avantages et des obligations des

femmes et des hommes tels que définis par la norme sociale. La définitions socio-culturelle de la notion

d’homme ou de femme varie selon les cultures et change avec le temps.

Malnutrition : mauvais état nutritionnel causé par une carence ou un excès nutritionnel. La

malnutrition est un état qui survient lorsque l'alimentation d'une personne ne fournit pas suffisamment

d'éléments nutritifs pour la croissance et le maintien en vie, ou si elle est incapable d'utiliser pleinement

la nourriture qu'elle consomme en raison d'une maladie ; elle peut provenir d’une sous-alimentation

(insuffisance) ou d’une suralimentation (excès).

Malnutrition aiguë : terme courant pour désigner la dénutrition aiguë et qui reflète une évolution

récente et sévère, qui a entraîné une perte de poids importante et une carence en nutriments,

généralement associées à des privations et/ou à des maladies graves. Elle comprend l’émaciation mais

aussi l'œdème nutritionnel, dans lequel les carences nutritionnelles entraînent un gonflement des

Page 11: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 2

membres (pieds, mains) dû à la rétention d'eau. Souvent utilisée pour évaluer la gravité des urgences

parce qu'elle peut entraîner la mort.

Pensée systémique : désigne un ensemble d'approches analytiques, et d'outils associés, qui cherchent

à comprendre comment les systèmes se comportent, interagissent avec leur environnement et

s'influencent mutuellement.

Petit producteur : le terme « petit producteur » désigne les agriculteurs, les pasteurs, les forestiers et

les pêcheurs qui ont peu d'actifs et des ressources limitées, y compris en terre, en capital, en

compétences et en main-d'œuvre, et, dans le cas des agriculteurs, cultivent généralement moins de 5

hectares de terre.

Populations vulnérables : les populations les plus à risque de souffrir d'insécurité alimentaire en

raison de leur statut physiologique ou socioéconomique, de leur situation géographique ou de leur

niveau de sécurité physique.

Protection sociale : Une série d’interventions publiques visant à soutenir les membres les plus

pauvres et les plus vulnérables de la société, ainsi qu'à aider les individus, les familles et les communautés

à gérer les risques. La protection sociale comprend les filets de sécurité (assistance sociale), l'assurance

sociale, les lois du travail, les fonds sociaux et les services sociaux.

Résilience : la capacité des personnes, des ménages, des communautés, des pays et des systèmes à

atténuer les chocs, à s'y adapter et à s'en remettre d'une manière qui réduit la vulnérabilité chronique et

facilite une croissance inclusive.

Responsabilité sociale : la responsabilité sociale fait partie intégrante de la bonne gouvernance. Il

s'agit de l'environnement favorable qui permet aux citoyens, aux utilisateurs des services publics et aux

bénéficiaires des programmes d'exiger des décideurs ou des responsables, la mise en œuvre des

programmes et des prestations de services publics, une meilleure réactivité et une meilleure

responsabilisation. Les quatre piliers de la responsabilité sociale, PITR, sont : la participation, l'inclusion,

la transparence et la responsabilité.

Retard de croissance : un état qui se mesure par le rapport entre la taille et l’âge, lorsque ce dernier

est inférieur de plus de deux écarts-types par rapport à la médiane des normes OMS de croissance de

l'enfant. Le retard de croissance est le résultat d'un apport alimentaire et nutritionnel insuffisant, de

soins de santé préventifs insuffisants et d'un environnement insalubre. Une mauvaise nutrition

maternelle, une alimentation et des soins inappropriés des nourrissons et des jeunes enfants par les

mères (ou par les autres membres de la famille et de la communauté) pendant les périodes les plus

critiques de leur croissance et de leur développement peuvent contribuer au retard de croissance. Au

niveau de la population, le retard de croissance est associé à une mauvaise santé à long terme, à un

développement moteur retardé, à une fonction cognitive altérée et à une immunité réduite.

Sécurité alimentaire et nutritionnelle : la sécurité alimentaire et nutritionnelle est atteinte lorsque

des aliments adéquats, sains et nutritifs sont disponibles en permanence, accessibles et bien utilisés par

tous les individus, pour leur permettre de mener une vie saine et productive.

Système agricole et alimentaire : Ceci inclue toutes les personnes, les processus, les ressources et

l'infrastructure impliqués dans la production, la transformation, l'emballage, le transport, le commerce, la

Page 12: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire 3

commercialisation, la consommation et l'utilisation des aliments, des aliments pour animaux et des

végétaux dans l'aquaculture, l'agriculture, la pêche, la sylviculture et l’élevage. Le système alimentaire et

agricole existe au sein d’un contexte social, politique, économique et environnemental, et il en subit

l’influence.

Système de santé : toutes les personnes, institutions, ressources et activités dont le but premier est

de promouvoir, recouvrer et maintenir la santé.

Système local : se réfère à l’ensemble des acteurs interconnectés (gouvernements, société civile,

secteur privé, universités, citoyens et autres) qui produisent ensemble un résultat particulier en matière

de développement.

Source : USAID (2016).

Page 13: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 4

1. Introduction

Cette analyse systémique de l’insécurité alimentaire et nutritionnelle dans les régions de Mopti,

Tombouctou, Gao et du cercle de Niono (région de Ségou), au Mali, a été initiée par le bureau de Food

For Peace (FFP) (Vivres pour la Paix) de l’USAID au Mali. Les informations contenues dans ce document

sont destinées aux sociétés répondant à l’appel d’offre et à l'équipe de d’USAID / FFP Mali. Elles

analysent les données et les tendances actuelles relatives à la sécurité alimentaire dans les régions

concernées. Elles décrivent les facteurs clés qui influencent la sécurité alimentaire, en particulier ceux

liés à la résilience communautaire, à la jeunesse et à la gestion des ressources naturelles. Ce rapport est

aussi une synthèse des enseignements et des bonnes pratiques des programmes précédents en matière

de sécurité alimentaire au Mali.

Le Mali, avec une population estimée à 19 419 000 habitants, selon les projections de la Direction

Nationale de la Population (DNP), est un pays sahélien, enclavé, et structurellement vulnérable à

l’insécurité alimentaire et à la malnutrition. Les deux tiers du pays sont désertiques. Son économie est

fortement dépendante du secteur primaire : l’agriculture, l’élevage, la pêche et la sylviculture occupant

68.0 pour cent de la population active. Ce secteur est lui-même tributaire de facteurs exogènes,

principalement d’ordre climatique, telles les sécheresses récurrentes et les inondations.

Les catastrophes naturelles et l'extrême pauvreté contribuent aux problèmes de sécurité alimentaire et

nutritionnelle au Mali. L'insécurité, les groupes rebelles, les groupes djihadistes et les conflits civils,

depuis 2012, ont exacerbé ces problèmes, augmenté les déplacements internes de personnes (USAID,

2018c), et continuent d’impacter négativement les conditions de vie des ménages, principalement dans

les régions du nord (Gao, Tombouctou), et du centre (Mopti) du pays. La dégradation des moyens

d’existence (bétail, récoltes, sources de revenus, emploi, réduction des activités économiques, etc.) qui

en résulte augmente la vulnérabilité des ménages, particulièrement les plus pauvres, à l’insécurité

alimentaire.

La malnutrition chronique continue de toucher environ 29 pour cent des enfants de moins de cinq ans

(INSTAT, 2019). Dans les régions de Mopti, Tombouctou et Gao, les taux de malnutrition (retard de

croissance et émaciation) sont beaucoup plus élevés que le taux national. Le nombre de personnes en

situation critique d’insécurité alimentaire s’élevait à 458 997 personnes en 2019.

Le rapport présente les objectifs de cette recherche et l’approche méthodologique suivie. Il donne, dans

le chapitre 2, un aperçu de la situation en matière de sécurité alimentaire dans les régions concernées.

Le chapitre 3 décrit différents facteurs liés à la sécurité alimentaire. Le chapitre 4 offre un aperçu des

stratégies des ménages face à l’insécurité alimentaire. Enfin, les chapitres 5 et 6 décrivent différentes

expériences d’assistance alimentaire, et les enseignements tirés de la programmation en matière de

sécurité alimentaire.

Objectifs

L’objectif de cette recherche est de fournir une vue d’ensemble du contexte, des acteurs, et des

enseignements tirés en matière de sécurité alimentaire, de nutrition, et de résilience dans les zones

géographiques ciblées du Mali. Plus précisément, sont examinés :

Page 14: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire 5

Les données et les

tendances actuelles en

matière de sécurité

alimentaire dans les régions

concernées : Mopti, Gao,

Tombouctou et Ségou.

Les facteurs clés liés à la

sécurité alimentaire dans les

régions concernées : Mopti,

Gao, Tombouctou et Ségou,

en particulier ceux liés à la

résilience communautaire, à

la jeunesse et à la gestion

des ressources naturelles.

Les enseignements tirés et

les bonnes pratiques des

programmes précédentes de

sécurité alimentaire au Mali.

Méthodologie

Cette étude repose sur une analyse documentaire, complétée par une enquête qualitative auprès des

acteurs clés en matière de sécurité alimentaire et nutritionnelle, dans les régions de Mopti,

Tombouctou, Gao et du cercle de Niono, dans la région de Ségou. Des entretiens individuels

approfondis et des discussions de groupe ont été réalisés, après identification des intervenants clés en

matière de sécurité alimentaire. Les méthodes suivantes ont été utilisées :

Analyses quantitatives :

o Analyse de tendance des données secondaires du système national d’information sanitaire,

couvrant la période de 2007 à 2019.

o Analyse des données par région pour les indicateurs de santé maternelle, néonatale, infantile

et de nutrition.

o Analyse des données fournies par l’Enquête Modulaire Permanente, pour comprendre les

tendances et les caractéristiques socio-économique locales.

Revue des documents pertinents en matière sécurité alimentaire et nutritionnelle pour les régions

étudiées.

Analyse qualitative :

o Entretiens avec les intervenants clés dans les collectivités territoriales (cercles), les

communes et les villages, et discussions de groupe avec les populations vulnérables.

o Entretiens au niveau régional avec les directeurs régionaux du développement social et de

l’économie solidaire, les représentants du système d’alerte précoce (SAP), les représentants

Graphique 1. Régions ciblées

So urce: Élaboration des auteurs.

Page 15: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 6

de l’office des produits agricoles du Mali (OPAM), les représentants du commissariat à la

sécurité alimentaire, et les représentants de l’office du marché agricole.

o Au niveau des cercles : entretiens avec les médecins chefs de district sanitaire, les chefs de

services du développement social, les responsables locaux pour la nutrition, les

représentants du SAP, les représentants de OPAM

o Au niveau des communes et des villages : discussions de groupe avec les conseillers

villageois, les leaders des associations féminines et les jeunes.

Des informations complémentaires sur la méthodologie employée sont disponibles en annexe. Ce

rapport se concentre sur quatre régions spécifiques au Mali : Mopti, Gao, Tombouctou et Ségou.

Toutefois, des références au contexte national sont faites le cas échéant.

2. Situation de la Sécurité Alimentaire

Plusieurs facteurs

contribuent à l'insécurité

alimentaire au Mali : le

climat, les faibles

rendements agricoles, les

conflits et l’insécurité

(USAID, 2018). La

pression démographique,

en particulier dans les

zones rurales, a des

conséquences sur

l’exploitation agricole et

les réserves de

nourriture (FEWS NET,

2019). Au Mali, la

pluviométrie et la

production des denrées

alimentaires de base

(maïs, mil, riz et sorgho),

sont bonnes. Cependant la distribution inégale des denrées alimentaires, des zones excédentaires vers

les zones déficitaires, associée à un faible pouvoir d'achat des populations, contribuent à l'insécurité

alimentaire (FEWS NET, 2019). Cette situation affecte particulièrement les couches les plus vulnérables

de la population.

Le nombre de personnes en phase critique d’insécurité alimentaire dans la région de Mopti, a plus que

triplé sur la période 2015-2019, passant de 79 009 à 256 335 personnes (Error! Reference source

not found.). Dans la région de Tombouctou, il a connu une baisse de près de moitié, faisant passer le

nombre de personnes de 114 283 en 2015 à 63 587 personnes en 2019. Cette baisse avait été précédée

par augmentation importante des populations affectées, qui était passée de 85 920 à 104 177 entre 2017

Graphique 2. Population en phase de crise de 2013 à 2019 en Mali

0

50,000

100,000

150,000

200,000

250,000

300,000

350,000

400,000

Segou Mopti Tombouctou Gao

2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019

Source: FEWS NET, 2019

Page 16: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire 7

et 2018. Des tendances similaires ont été observées dans la région de Gao, où les populations touchées

ont diminué entre 2015 et 2019 (passant de 98 634 à 83 141 personnes), après une augmentation entre

2016 et 2017. La région Ségou quant à elle, a présenté le plus faible nombre personnes en phase de

crise. Cette région a enregistré une augmentation du nombre personnes touchées de 33 350 personnes

entre 2015, pour atteindre 55 934 personnes en 2019 (FEWS NET, 2019). Au total, ces régions

représentent 458 997 personnes en phase de crise en 2019.

Contexte politique et réglementaire

La Politique nationale de sécurité alimentaire et nutritionnelle (PolNSAN) est conforme aux objectifs du

Cadre stratégique pour la relance économique et le développement durable (CREDD) en matière de

réalisation des objectifs de développement durable, d'amélioration de la sécurité alimentaire et

nutritionnelle pour tous, de protection sociale et de renforcement des actions humanitaires. La politique

de développement agricole s'inscrit dans le cadre de la Loi d'Orientation Agricole. Elle définit et met en

œuvre une politique de promotion des initiatives de développement aux niveaux local, régional et

national, et apporte son appui à la création d'entreprises agricoles, agro-alimentaires et péri- agricoles.

Elle a pour objectif d'assurer la sécurité alimentaire au niveau national et international, en facilitant

l’accès à des produits alimentaires de qualité, en quantités suffisantes.

La gestion de la sécurité alimentaire par le gouvernement a suivi les étapes suivantes :

Une gouvernance proactive et inclusive de la sécurité alimentaire ;

La coordination des interventions en matière de sécurité alimentaire ;

Le soutien aux systèmes de production durables ;

La mise en œuvre d’une politique de subvention des intrants agricoles pour les plus pauvres et les

plus vulnérables ;

Le soutien aux organisations professionnelles des jeunes et des femmes ;

Le soutien à l’industrie agro-alimentaire de transformation (GdM, 2017)

Disponibilité alimentaire

Le Mali dépend de la production nationale et des importations pour satisfaire ses besoins en denrées

alimentaires de base. La production varie selon les régions, mais les régions du sud sont généralement

les plus productives, en particulier pour les céréales. Les principales céréales produites et consommées

au Mali sont le mil, le sorgho, le riz et le maïs. La production de ces quatre céréales a augmenté au cours

des cinq dernières années. Le maïs arrive en tête, et réalise la plus forte augmentation de production

annuelle, suivi du riz. Le Mali est globalement un pays céréalier excédentaire, même s'il importe une

quantité considérable de riz chaque année, et de faibles quantités de céréales secondaires, de façon

saisonnière (maïs, mil et sorgho) (FEWS NET, 2019).

Les marchés des régions de Mopti, Tombouctou, Gao et Ménaka dépendent des approvisionnements

d'autres régions du pays et des importations internationales pour couvrir les déficits

d'approvisionnement locaux. La région de Ségou (principalement les cercles de Niono et de Macina)

constitue une source supplémentaire d’approvisionnement en riz local pour ces régions. Les flux de

Page 17: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 8

céréales secondaires entrant dans la zone étudiée proviennent principalement de la région de Sikasso,

Bamako. Le Burkina Faso fournit à la région de Mopti du riz importé, de la farine de blé et de l'huile

alimentaire, tandis que l'Algérie approvisionne Gao et Ménaka (FEWS NET, 2019).

Les résultats de l’enquête qualitative, réalisée en septembre 2019 auprès des services de l’Office des

produits alimentaires du Mali (OPAM), à Mopti et à Gao, illustrent l’insuffisance de la production

régionale agricole :

“La production agricole locale de la région de Gao ne peut pas nourrir la population de la région pendant trois

mois” (Agent, OPAM, Gao).

“…la région de Mopti est une région déficitaire. Donc chaque année on constate qu’il y a des déficits en terme

alimentaire et c’est pourquoi le commissariat à la sécurité alimentaire vient en appui aux populations démunies

tous les ans" (Agent, CSA, Mopti)

Le sud du Mali approvisionne les régions du nord et du centre en produits locaux et importés. Par

ailleurs les régions du nord et du centre approvisionnent le sud du pays en produits horticoles,

essentiellement des oignons, et en bétail. (FEWS NET, 2019)

Les compléments alimentaires de la région de Gao proviennent des régions du sud du Mali ou de

l’étranger, comme l’atteste le représentant de l’OPAM de Gao : « Par exemple les céréales sèches viennent

du sud. C’est San, Koutiala, Ségou qui envoient des camions chargés de céréales, et de mil pour venir vendre ici à

Gao. Les commerçants sont obligés d’importer du riz. Le riz importé vient du marché pakistanais et indien, ce

sont ces riz qui viennent ici. Ça c’est le riz consommé, mais la majeure partie de consommation du riz ça vient

de l’extérieur, c’est importé, c’est du riz importé qu’on consomme ici » (Agent, OPAM, Gao).

Production alimentaire

La production agricole globale dans les régions de Tombouctou, Mopti et Gao a augmenté ces dernières

années (CPS/SDR, 2018), principalement en raison des régimes de précipitations favorables et du niveau

de l'eau le long du fleuve Niger. Cependant, la production locale est affectée par les éléments suivants :

les variations hydriques locales

(sécheresses et inondations excessives Graphique 3. Production céréalière nationale, 2012-2018.

Source: FEWS NET 2019, page 53

localisées), la présence de parasites et

de maladies des cultures, la disponibilité

limitée de semences adaptées aux

conditions locales (en particulier à

Tombouctou), la baisse de la fertilité

des sols due à l'érosion, le régime

foncier, les contraintes d’accès à la

terre, l'insécurité et les conflits (FEWS

NET, 2019).

Le tableau ci-dessous illustre les

tendances de la production céréalière

dans les régions de Mopti, Gao,

Tombouctou et Ménaka. Au cours des

Page 18: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire 9

cinq dernières années, l’augmentation était plus accentuée dans les cercles de Bankass, Koro, et Mopti

dans la région de Mopti. Les cercles de la région de Gao ont connu une augmentation de la production

céréalière au cours de la campagne 2018-2019. Dans la région de Tombouctou, les cercles de Diré et

Niafunke ont enregistré de 2014 à ce jour une production céréalière moyenne contrairement aux

cercles de Gourma-Rharous, Goudam et Tombouctou.

En général dans les régions de Gao, Mopti et Tombouctou la production céréalière 2018/19 est

supérieure à la moyenne, ce qui réduira probablement le niveau global d'insécurité alimentaire dans le

pays pendant la période de soudure de 2019 (FEWS NET, 2019).

Au Mali, le riz est cultivé dans divers systèmes d’agriculture irriguée ou pluviale. De 2012 à 2018, la

production a augmenté de plus de 66 pour cent. Cette augmentation de la production est due en partie

aux investissements publics dans les infrastructures d'irrigation et aux modifications apportées par l'État

dans la commercialisation du riz (Kelly et al, 2010).

Le riz et le mil sont les céréales principales produites et consommées dans les régions de Mopti,

Tombouctou, Gao et Menaka, suivis du blé, du sorgho, du maïs et du fonio (FEWS NET, 2019). Dans la

région de Mopti, le sorgho est produit à Douentza et à Bankass (ENSAN, 2018). Les cercles de Bankass

et Koro sont donc considérés comme le panier à mil, tandis que la production de riz est concentrée

dans les plaines inondables des cercles de Tenenkou, Youwarou et Djenné. Quant à la région de

Tombouctou, le cercle riverain de Diré et les cercles lacustres de Niafunké et de Goundam sont les

principales zones de production céréalières. Cependant la production de maïs dans la région de

Tombouctou est en grande partie destinée à l’autoconsommation. La production des denrées de base

(riz, mil, sorgho et maïs) est limitée dans la région de Gao. La production de riz est concentrée dans les

cercles d'Ansongo et de Gao (FEWS NET, 2019).

Graphique 4. Production céréalière (Millier de Tonnes), par cercle 2014-2018

Source: FEWS NET, 2019

Page 19: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 10

En raison du vaste périmètre de cultures irriguées du delta intérieur du Niger, la région de Ségou

contribue à environ 45 pour cent de la production totale de riz, suivi par la région de Mopti (20 à 25

pour cent), les régions de Sikasso, et Tombouctou (10 pour cent) (FEWS NET, 2019).

L'équilibre délicat entre les précipitations locales et le niveau d'eau du delta intérieur du Niger sont les

principaux facteurs de la production d'aliments et de fourrage. Une faible pluviosité entraîne la

sécheresse et des pluies trop abondantes provoquent des inondations et une saturation des terres en

eau (Del Rio et al, 2014 ; Henrick et al, 2015).

Le Mali est l'un des principaux pays producteurs de bétail de la sous-région par la taille du cheptel. Les

régions de Mopti, Tombouctou, Gao et Ménaka sont des zones majeures de production de bétail,

approvisionnant les marchés nationaux et régionaux (FEWS NET, 2019). Cependant les pâturages sont

en train de devenir rares en raison de leur vulnérabilité aux sécheresses ou aux inondations saisonnières

constantes (Cheng et al, 2017).

Le commerce du bétail sert à approvisionner les marchés locaux et nationaux, malgré la pression

démographique, le surpâturage et le coût élevé des aliments pour le bétail. Les principaux marchés de

bétail sont Fatoma à Mopti, Gourma-Rharous et Wabaria à Gao. Les tourteaux du coton et le fourrage

sont les aliments les plus couramment utilisés pour nourrir les animaux dans les régions de Mopti,

Tombouctou, Gao et Ménaka. Ces aliments servent de complément aux pâturages particulièrement

pendant les années de faible pluviométrie (FEWS NET, 2019).

L’offre de bétail sur les marchés est supérieure à la moyenne des régions du nord et du sahel occidental.

Les mauvaises conditions d’élevage dans ces zones poussent en effet les éleveurs à un déstockage massif

(FEWS NET, 2018).

Le caractère saisonnier des pluies, qui changent les routes de migration des troupeaux, la concurrence

pour les pâturages et les points d’eau, les conditions climatiques, constituent des défis qui renforcent les

divergences d’opinions entre les agriculteurs et les éleveurs sur l’utilisation des terres (FEWS NET,

2019).

Les entretiens réalisés sur le terrain, auprès du représentant du système d’alerte précoce de la région

de Tombouctou, montrent que le bétail peut être considéré comme un facteur favorisant la sécurité

alimentaire, comme en atteste ce témoignage : « Je peux dire que le bétail contribue pour beaucoup à

assurer la sécurité alimentaire dans la région, surtout dans la région de Tombouctou, qui est une zone pastorale.

Bon, cela se fait de plusieurs façons, les gens peuvent vendre des animaux pour acheter des céréales et du coup

cela contribue à la sécurité alimentaire de ces ménages. Ils peuvent aussi abattre des animaux pour vendre de la

viande et ainsi se procurer de la nourriture. Donc, ces animaux peuvent assurer la sécurité alimentaire des

populations » (Agent, SAP, Tombouctou).

Ce témoignage montre que la possession de bétail peut contribuer à assurer la sécurité alimentaire, au

niveau des ménages mais aussi auprès de l’ensemble de la population. Cependant, même si un marché

est bien achalandé, une famille peut se trouver en insécurité alimentaire, si elle a connu des périodes de

chômage et si les prix sont trop élevés pour son pouvoir d’achat. De même une région peut disposer de

stocks alimentaires, mais un village de cette région peut être souffrir d’insécurité alimentaire du fait de

son isolement ou à cause d’un conflit localisé.

Page 20: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire 11

La pêche dans les régions de Mopti, Tombouctou et Gao est concentrée autour du fleuve Niger et des

lacs. La plupart des activités de pêche et d'aquaculture ont lieu entre décembre et mai. La production

dépend des niveaux d'eau et des techniques de pêche. Les poissons sont vendus frais, séchés ou fumés.

Les activités de pêche sont dominées par les hommes, tandis que les activités de commercialisation

(commerce, transformation et vente) sont presque exclusivement effectuées par des femmes. Le

commerce du poisson est principalement local, mais avec quelques ventes à des acheteurs de Bamako

(FEWS NET, 2019).

En 2019, dans la région de Mopti, seulement la moitié des terres agricoles a été ensemencée par rapport

à l’année 2018. Cette situation s’explique par l’existence de conflits intercommunautaires et par

l’insécurité, qui ont entraîné des déplacements massifs des populations. L’évaluation des superficies

cultivables n’a pas pu être menée dans les zones de Koro, de Bankass et de Mondoro et dans la région

de Mopti, qui sont inaccessibles suite à de violents conflits (Cluster Sécurité Alimentaire, 2019).

Stocks

Le stockage des céréales est généralement possible à travers les magasins de l’OPAM et les organismes

de développement qui disposent d’entrepôts dans les régions, ou à proximité des bénéficiaires. Les

stocks sont destinés soit à la vente par le secteur privé, soit à la distribution, dans le cadre de

l’assistance humanitaire. Ces stocks sont composés de 35 000 tonnes de céréales (pouvant être

utilisées en cas de besoins d'assistance alimentaire d'urgence) et de 25 000 tonnes supplémentaires de

riz pouvant être vendues sur le marché en cas de rupture d'approvisionnement. Cependant, le coût de

stockage élevé, la péremption ou la perte potentielle des produits, découragent les commerçants qui

desservent les régions de Mopti, Tombouctou, Gao et Ménaka (FEWS NET, 2019). De nombreux

commerçants desservant

les zones déficitaires, avec

des contraintes d’accès

physiques et

géographiques, s’engagent

à pré-stocker des

quantités relativement

importantes pour éviter

toute rupture

d’approvisionnement

(FEWS NET, 2019).

Le stock actuel au niveau

des ménages est en

moyenne de 494 kg. Il s’est

amélioré par rapport à

celui de l’année 2017 qui

était de 445,5 kg à la

même période. Le stock

céréalier moyen le plus

élevé est enregistré dans la

région de Sikasso avec

Source: ENSA, 2018.

Graphique 5. Pourcentage des stocks céréaliers des ménages provenant de l’achat

Page 21: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 12

925,21 kg contre 745,8 kg en 2017, soit une augmentation de 19,3 pour cent, qui s’explique par les bons

rendements céréaliers de la récolte passée (Graphique 5).

Commerce alimentaire

Les marchés des régions de Mopti, Gao et Tombouctou se comportent relativement bien. Les activités

de vente au détail en milieu rural ont lieu sur des marchés de plein air et dans de petites épiceries, qui

vendent divers produits alimentaires de consommation courante. Les marchés permanents sont plus

importants dans les zones urbaines. Le nombre d'acteurs sur le marché varie considérablement selon le

type de marché et de la marchandise (FEWS, NET, 2019).

Il existe de nombreux acteurs sur le marché dans la majeure partie des régions de Mopti, Tombouctou,

Gao et Ménaka, ce qui limite les monopoles Dans les zones urbaines, les transactions se font en espèces,

mais le troc est important, en particulier entre les négociants locaux en riz et en poisson à Mopti.

(FEWS NET, 2019)

Les activités commerciales au Mali passent par des réseaux de négociants bien organisés qui sont en

liaison avec les marchés régionaux et mondiaux (Kelly et al, 2012). Cela reste vrai aujourd'hui dans les

régions de Mopti, Gao et Tombouctou malgré les récentes perturbations du marché et des activités

commerciales liées au conflit (FEWS NET, 2019). L'information circule très facilement aujourd'hui. Les

communications via téléphones portables facilitent la coordination et la livraison des commandes entre

acheteurs et vendeurs sur de grandes distances. Les marges commerciales sont limitées en raison des

coûts élevés de transport, de l’insécurité et du faible pouvoir d’achat de la population ; par conséquent,

les bénéfices résultent principalement du volume des transactions (INSTAT et al, 2019).

Les prix sont généralement négociés sur place entre acheteurs et vendeurs. Les grossistes des régions

de Mopti, Gao et Tombouctou fixent généralement le prix de vente avec leurs clients, mais ailleurs ils

doivent accepter les prix de leurs distributeurs. Le Gouvernement, à travers la Direction Nationale du

Commerce de la Concurrence et de la Consommation (DNCC), intervient seulement lorsque les prix

des denrées de première nécessité (riz importé, huile alimentaire, sucre, lait en poudre et viande) sont

perçus comme trop élevés. Les importateurs autorisés bénéficient souvent d'exonérations fiscales pour

une quantité spécifiée et sur une période bien définie, généralement d'un à trois mois (FEWS NET,

2019).

Les prix des céréales sur les marchés de Mopti, Tombouctou et Gao sont restés stables en moyenne sur

la période 2014-2019. Les prix les plus bas ont été enregistrés dans la région de Tombouctou. Une

grande partie des régions de Mopti, Tombouctou, et Gao est déficitaire en termes de production

céréalière. Le prix des denrées de base est fortement influencé par le volume de la production, les prix

des principaux marchés d’approvisionnement et le coût de transport (FEWS NET, 2019).

Les échanges commerciaux de produits agricoles entre le Mali et les autres pays du monde sont vitaux

pour le pays. Ils permettent au Mali de vendre les produits agricoles locaux à l’étranger et d’importer les

produits nécessaires pour assurer une meilleure sécurité alimentaire des populations maliennes. Les

quantités de produits agricoles sont passées de 79 708 tonnes au mois de janvier 2018 à 77 746 tonnes

au cours du mois de février 2018, soit une baisse de -2 pour cent (OMA, 2018).

Page 22: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire 13

L’insécurité a affecté le commerce dans les quatre régions. Selon un acteur local à Mopti, « Douentza

n'est pas une zone agricole, on ne cultive en majorité que du mil donc les légumes sont importés de Mopti, de

Sikasso, de San etc. Maintenant beaucoup de gens ont même cessé de venir à la foire hebdomadaire de

Douentza car il a toujours cette insécurité. Prenons l'exemple de la commune de Mondoro. Mondoro était

approvisionnée en denrées alimentaires par le Burkina Faso. Mais comme il y a eu des attaques, et des engins

explosifs ont été posés, les Burkinabés ont délaissé totalement la commune de Mondoro. Maintenant le principal

problème dans cette commune est vraiment la malnutrition, même chez les adultes. Ils n'ont pas accès aux

denrées de base et ils ne peuvent pas cultiver non plus. Comme on le dit dans notre jargon : "Ils sont sous

embargo". Il y a plusieurs autres communes dans cette situation, où l’on risque de perdre la vie en allant

travailler aux champs. » (Agent, Développement Social, Douentza).

Accès aux denrées alimentaires

La vulnérabilité des populations aux chocs climatiques récurrents, exacerbée par les conflits et l'extrême

pauvreté, réduisent l’accessibilité des ménages à la sécurité alimentaire et nutritionnelle.

Au Mali, durant les cinq dernières années, les régions de Mopti, Tombouctou, Gao et Ménaka ont été en

situation de stress de phase 2, au cours de la période de soudure. Selon les projections, les récoltes de

la saison agricole 2018/2019 devraient être supérieures à la moyenne, ce qui réduira probablement le

niveau global d'insécurité alimentaire dans le pays pendant la période de soudure de 2019 (FEWS NET,

2019)

Le niveau de consommation alimentaire des ménages permet d’évaluer l’accessibilité de la population à

l’alimentation. Selon les résultats de l'étude de l’ENSAN, sur toute l'étendue du territoire malien, il y a

eu une légère amélioration de la consommation alimentaire, qui est passée à 81,7 pour cent en

septembre 2019 par rapport à 79,5 pour cent en septembre 2018. En septembre 2019, plus du deux

tiers des ménages a atteint un niveau de consommation alimentaire « acceptable » (ENSAN, 2019).

De façon globale, le niveau de consommation alimentaire des pauvres a substantiellement baissé, et cela

dans toutes les régions du Mali. Seule la région de Mopti a atteint les 10 pour cent. (ENSAN, 2018). Les

dépenses de consommation sont un bon indicateur du bien-être des ménages grâce à leur stabilité, ce

qui n’est pas le cas des revenus. Plus la dépense de consommation alimentaire par personne du ménage

est élevée, plus le ménage est supposé satisfaire ses besoins vitaux (EMOP, 2018).

Les dépenses alimentaires mensuelles des ménages sont en moyenne de 80 652 FCFA. Pour les

dépenses non alimentaires, le montant moyen est de 57 142 FCFA. La proportion des dépenses allouées

à l’alimentation représente plus de la moitié des dépenses totales (soit 66 pour cent). Cette valeur est

stable par rapport à celle de septembre 2017 (67,5 pour cent). Dans l’ensemble, près du tiers des

ménages, soit 32,8 pour cent, consacrent plus de 75 pour cent de leurs dépenses à l’alimentation. En

2017, à la même période, la proportion était de 37,6 pour cent, légèrement en baisse. Le nombre

important de ménages qui consacrent plus de 75 pour cent de leurs dépenses à l’alimentation pourrait

s’expliquer par le niveau élevé des prix des céréales, notamment pendant la période de soudure.

Quatre cercles parmi les dix consacrent plus de 75 pour cent de leurs dépenses à l’alimentation à savoir

: Ansongo, Youwarou, Bandiagara et Djenné. Les ménages qui consacrent plus de 75 pour cent de leurs

dépenses à l’alimentation ont de très faibles capacités d’investissement pour le développement de leurs

activités et sont dans une situation de vulnérabilité constante.

Page 23: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 14

Utilisation des denrées alimentaires

Les changements d’habitudes alimentaires résultent généralement des difficultés d’accès aux denrées

alimentaires. Les ménages sont amenés à choisir d’autres types de denrées alimentaires, plus accessibles

sur le plan financier. En 2018, environ 29 pour cent des ménages à Tombouctou, 15,5 pour cent des

ménages à Gao, 11,7 pour cent des ménages à Mopti ont changé leurs habitudes alimentaires. Les

raisons avancées pour les changements négatifs dans les habitudes alimentaires portent essentiellement

sur les difficultés d’accès aux denrées, la faible disponibilité des produits sur le marché, l’insécurité et les

catastrophes naturelles qui ont perturbé certains points d’approvisionnement. Les changements positifs

observés, bien qu’insignifiants, reposent en partie sur les envois de vivres et d’argent et les appuis

humanitaires.

La Malnutrition Infantile chez les enfants de moins de cinq ans et les femmes

enceintes

L’émaciation, ou un faible poids par rapport à la taille, est une mesure de la malnutrition aiguë. Elle est la

conséquence d’une alimentation inadéquate. L’émaciation peut résulter de prises alimentaires

inadéquates ou d’un épisode récent de maladie conduisant à une perte de poids (par exemple, la

diarrhée) (CPS/SSDSPF, 2018). Au Mali, 27 pour cent des enfants de moins des de cinq ans ont un

retard de croissance ou sont atteints de malnutrition chronique (ils sont trop petits pour leur âge). 10

pour cent ont un retard de croissance sévère. L’Enquête Démographique et de Santé (EDS) Mali 2018

constate également que 19 pour cent des enfants de moins de cinq ans présentent une insuffisance

pondérale (ils sont trop maigres pour leur âge). 5 pour cent présentent une insuffisance pondérale

sévère.

Près d’un enfant de moins de cinq

ans sur dix (9 pour cent) au Mali

est émacié ou souffre de

malnutrition aiguë. 3 pour cent

sont sévèrement émaciés. La

prévalence de la malnutrition

chronique au Mali est légèrement

plus élevée chez les garçons que

chez les filles (28 pour cent contre

26 pour cent). Les enfants en

milieu rural sont deux fois plus

atteints de malnutrition chronique

qu’en milieu urbain (29 pour cent

contre 15 pour cent). (INSTAT et

al, 2019)

Dans la région de Ségou, 28,6 pour

cent des enfants de moins de 5 ans

ont un retard de croissance ou

souffrent de malnutrition

chronique, 30,4 pour cent à Mopti,

Graphique 6. Prévalence de la malnutrition chronique chez les enfants

de moins de 5 ans

Source: INSTAT et al, 2019

Page 24: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire 15

29,5 pour cent la région de Tombouctou et 33,4 pour cent dans la région de Gao (INSTAT et al, 2019)

(Graphique 6).

La prévalence de la malnutrition chronique diminue de manière importante avec l’augmentation du

niveau d’instruction de la mère. Elle passe de 30 pour cent, quand la mère n’a aucun niveau d’instruction,

à 13 pour cent, quand elle a un niveau d’éducation secondaire ou supérieur. De même, du quintile de

bien-être économique le plus bas au plus élevé, la prévalence la malnutrition chronique passe de 33 pour

cent à 13 pour cent et celle de l’insuffisance pondérale de 24 pour cent à 11 pour cent (INSTAT et al,

2019).

Statut Nutritionnel des Femmes

Le tableau montre qu’une femme de 15 à 49 ans sur dix, dans la région de Gao, a un indice de masse

corporelle légèrement inférieur à la normale. Le pourcentage le plus élevé de femmes présentant une

insuffisance pondérale légère a été observé dans la région de Gao, et le plus faible a été observé dans la

région de Mopti. La région de Kayes enregistre le pourcentage le plus élevé de femmes de 15 à 49 ans

dans un état de maigreur modéré à sévère. Le plus faible pourcentage a été constaté dans la région de

Kidal. Dans cet état un peu plus d’un quart des femmes de 15 à 49 ans est obèse (INSTAT et al, 2019).

Tableau 1. Répartition des femmes de 15 à 49 ans par région en fonction du statut nutritionnel (%)

* IMC = Indice de Masse Corporelle

Source: INSTAT et al, 2019.

Statut Nutritionnelles des

femmes

Kayes

Ko

uliko

ro

Sik

ass

o

Ségo

u

Mo

pti

To

mb

ou

cto

u

Gao

Kid

al

Bam

ako

Maigreur légère (IMC* 17.0 –

18.4)

9,6 8,2 9,3 6,5 4,7 6 ,1 12,2 1,2 5,4

Maigreur modérée et sévère

(IMC < 17.0)

6,3 2,5 2,2 2,1 1,6 4,6 4,5 0,4 1,6

Surpoids (IMC 25.0 -29.9) 13,8 20,5 12,5 20,2 18,7 23,8 15,4 34,8 26,7

Obésité (IMC > 30.0) 4,7 8,5 5,5 6,8 5,0 11,0 6,3 27,5 19,3

Page 25: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 16

3. Facteurs liés à la Sécurité Alimentaire

Les facteurs d'insécurité alimentaire au Mali sont complexes et nombreux. Certains sont des facteurs

structurels, comme les changements climatiques, d’autres sont liés aux conflits violents qui ont

commencé dans les régions du nord en 2012 et se sont progressivement déplacés vers le centre, dans la

région de Mopti. Les risques climatiques et agricoles structurels dans les régions de Mopti, Gao et

Tombouctou varient géographiquement, mais incluent des pluies insuffisantes et des périodes sèches

prolongées (affectant la production agricole et animale), des inondations saisonnières (en particulier le

long des plaines inondables du fleuve Niger), des parasites des cultures (insectes et oiseaux granivores)

et des maladies animales (Dixon, 2010).

Facteurs socio-économiques

Démographie

Jeunesse

Au Mali, 40 pour cent de la population est comprise entre 15 et 40 ans. Le taux de chômage des jeunes

est extrêmement élevé dans les zones rurales. Il constitue une menace évidente pour la cohésion sociale

et la sécurité alimentaire dans les communautés (FAO, 2017). Cette jeunesse a intérêt essentiellement à

l’établissement d’une paix véritable et durable. Cependant, cette population en croissance se voit

confrontée à d’énormes obstacles. Beaucoup de jeunes n’ont pas accès à l’éducation, et parmi ceux qui

peuvent y accéder, beaucoup quittent le système sans avoir obtenu les compétences et les

connaissances nécessaires pour trouver un emploi qui répond aux attentes de leurs familles (FAO,

2017).

Voici quelques témoignages de jeunes sur les difficultés rencontrées : « En dehors de tout ce qu’il vient de

dire, j’ajoute cependant qu’il y a beaucoup de chômeurs chez nous ici. Les jeunes ont terminé avec les études,

mais ils n’ont pas pu trouver un emploi. Aussi, il n’y a pas beaucoup d’activités à Douentza dû à la crise. Par

exemple, il est très difficile aujourd’hui de trouver un simple photographe à Douentza. Les gens sont qualifiés

pour la réparation des motos, mais à cause de la crise ils ne trouvent plus de clients. Certains ont été obligés de

fermer leurs boutiques. D’autres sont même allés à l’aventure. » (Groupe, Jeunes, Douentza)

L’autonomie des jeunes reste précaire dans la plupart des zones ayant fait l’objet d’une enquête. En effet,

la grande majorité des jeunes ne sont pas autonomes, car ils n’exercent aucune profession, et n’ont

aucune source de revenu leur procurant une indépendance financière. La plupart d’entre eux se

considèrent comme une charge pour leurs parents. Certains se considèrent même comme des parasites,

comme en atteste ce témoignage : « Nous ne sommes pas autonomes, pour être autonome il faut pouvoir se

prendre en charge. C’est malheureux à dire mais nous sommes comme des parasites parce que, jusqu’à 37 ans,

tu vis chez les parents. Donc on est loin d’être autonome, pour être autonome il faut avoir une source de revenu.

Mais un jeune de 35 à 37 ans qui n’a rien pour se prendre en charge, c’est la maman qui le nourrit . » (Groupe,

Jeunes, Ansogo).

A cela il faut ajouter le problème récurrent d’insertion économique et d’insécurité alimentaire et

nutritionnelle des régions de Ségou, Mopti, Tombouctou et Gao, en particulier dans les communes et les

Page 26: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire 17

villages. Cette situation peut être une des raisons pour laquelle les jeunes gens rejoignent des groupes

armés. Ce comportement peut aussi être justifié par le soutien communautaire aux groupes armés, qui

incite les jeunes à s’engager dans la violence par sens du devoir ou un désir de se faire respecter (Mercy

Corps, 2017).

L’insertion professionnelle des jeunes pourrait contribuer à juguler la naissance et la multiplication des

crises, comme l’affirme ce passage : « Si les jeunes ont un l’emploi, l’intensité de la crise sécuritaire va

beaucoup diminuer. Sinon, quelqu’un qui n’a pas à manger acceptera facilement si une personne lui propose un

travail de 500 000 FCFA ou de 1 million par mois, même si c’est pour prendre des armes ou placer un engin

explosif quelque part. Et, c’est la situation réelle la plus fréquente » (Groupe, Jeunes, Douentza).

Les mouvements migratoires sont aussi des phénomènes courants. Ils sont liés aux moyens d’existence

(sources de revenus) ou à des stratégies d’adaptation des communautés. Ces mouvements peuvent être

habituels ou non selon les périodes, les zones et les types de population. Ce sont majoritairement les

jeunes garçons (93,8 pour cent) qui partent en migration saisonnière, tandis ce taux est de 56,2 pour

cent pour les jeunes filles. La migration saisonnière est de 80 pour cent dans la région de Gao. Les

migrations inhabituelles touchent une bonne partie des communautés de Tombouctou (66,7 pour cent).

Dans ces localités le nombre de départs est plus important que d’habitude (ENSAN, 2018).

L’exode rural est un moyen pour beaucoup de jeunes de trouver des occupations et d’investir dans des

activités génératrices de revenus. Cela est fréquent

dans les régions étudiées, notamment dans les sept

communes du cercle d’Ansongo, dans la région de

Gao. A la fin de l’hivernage, certains jeunes, pour

assurer leur subsistance pour le reste de l’année,

partent en exode. Les destinations sont les sites

d’orpaillage vers le sud du pays et aussi certains pays

limitrophes comme le Niger et la Côte d’Ivoire. Dans

certains villages l’exode rural est planifié par les chefs

de familles. Il arrive très souvent que les chefs de

familles décident qui doit partir. Plusieurs témoignages

illustrent ces propos, en voici quelques-uns :

« Plus les gens sont dans l’insécurité, moins ils seront

productifs. Moins ils seront productifs, plus cela aura une relation, un impact sur la sécurité Alimentaire. Il y a

aussi le manque de disponibilité des bras valides pour participer aux activités agricoles. A cause de l’insécurité il y

a des jeunes qui sont partis. Dans la famille, il reste très peu de gens, ils sont tous partis tous à l’orpaillage, il y a

très peu de personnes pour participer aux activités agricoles, donc la famille va souffrir et l’insécurité alimentaire

va s’installer. » (Agent, Développement Social, Bankass).

Un autre témoignage : « Il faut reconnaître qu’il y a un problème d’insertion, au niveau du village en particulier,

et de la commune en général, parce que les secteurs porteurs ne sont pas nombreux. Certes les jeunes se

débrouillent pour pouvoir s’en sortir, mais il y a vraiment des difficultés par rapport à l’insertion économique des

jeunes. La plupart des jeunes font des études et à la fin il n’y a pas d’emploi. Ceux qui n’ont pas fait d’études se

retrouvent aux champs, mais bon, les champs aussi c’est pour un temps bien déterminé. Tu viens de finir tes

études, il n’y a pas d’emploi au niveau local, tu es toujours au chômage, c’est pourquoi la plupart des jeunes

« Juste après l’hivernage tu trouveras que tout le

monde s’exile pour couvrir les besoins des autres

mois de l’année, surtout de la période de

soudure. L’exode est fréquent. Dans certains

ménages, s’il y a deux garçons, l’un part cette

année et l’autre part l’année suivante »

(Groupe, Jeunes, Ansongo).

Page 27: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 18

s’exilent au Niger, en Côte d’Ivoire pour chercher de quoi à subvenir à leurs besoins. » (Groupe, Jeunes,

Ansogo). Les jeunes filles s’exilent principalement pour constituer des dots en vue de leur mariage.

Quant à l’implication des jeunes dans la gestion des ressources naturelles, les propos divergent. Une

partie des jeunes affirment qu’ils font partie des concertations dans les décisions relatives à la gestion

des ressources naturelles de leur localité, même si leurs voix ne sont pas toujours prises en compte,

comme le souligne cet extrait : « Je dirai que les jeunes font partie des concertations dans les prises de

décisions. A chaque fois qu’on lance un appel pour parler des questions relatives aux ressources naturelles, les

jeunes participent. Ils donnent leur opinion, même si souvent leurs voix ne sont pas entendues » (Groupe,

Jeunes, Douentza). Certains jeunes expliquent l’absence de prise en compte de leurs opinions par le fait

qu’ils ne sont pas représentés (ou sont sous-représentés) dans le circuit exécutif, qui est l’instance de

décision. C’est ce que stipule le passage suivant : « Si vous voyez que nos opinions ne sont toujours pas prises

en compte, c’est parce que nous ne sommes pas dans le circuit. Partout où l’on prend des décisions, si 60 pour

cent de personnes sont des jeunes, beaucoup de nos préoccupations seront prises en compte et nous serons

écoutés. » (Groupe, Jeunes, Douentza).

Les circuits exécutifs sont des instances de prise de décision à différents niveaux. Par exemple au niveau

du village, il y a le conseil de village, au niveau de la commune c’est le PDSEC, au niveau du cercle c’est le

conseil de cercle, et au niveau de la région c’est le conseil régional.

Une partie des discours confirme que le gouvernement n’a pas pris suffisamment de mesures pour

impliquer les jeunes dans la gestion des ressources naturelles, malgré leurs demandes. Certains jeunes

martèlent qu’il n’y a pas de place pour eux dans la politique de gestions des ressources naturelles,

comme en témoigne ce passage : « Chez nous, à ma connaissance, le gouvernement n’a pas pris des mesures

particulières pour impliquer les jeunes dans la gestion des ressources naturelles. Nous avons fait la demande,

mais on n’a pas eu de résultat pour l’instant. Le gouvernement n’a pas mis en place une politique de gestion des

ressources naturelles. » (Groupe, Jeunes, Douentza). Ces idées ressortent de la plupart des discussions de

groupes avec des jeunes, dans les différentes localités visitées. C’est ainsi qu’au niveau communal,

certains jeunes ne savent même pas ce qu’est un PDSEC, et à plus forte raison ne sont pas impliqués

dans leur élaboration.

Les jeunes n’ont pas accès aux institutions financières telles que les banques, les caisses d’épargnes, à

causes de l’insécurité dans la zone. Ces institutions financières craignent le risque de non

remboursement des prêts, car la création d'activités génératrices de revenus est rendue difficile par

l’insécurité, comme témoigne ce passage : « Chez nous on ne connaît pas les banques qui financent, il faut

créer des AGR (activités génératrices de revenu) pour avoir accès aux finances et cela est très difficile, les

institutions financières ne prennent pas de risque à cause de l’insécurité dans la zone » (Groupe, Jeunes, Gao).

Il ressort des entretiens que les jeunes sont souvent mal organisés, ils évoluent de manière individuelle

et cela freine leur accès à certaines opportunités sur le marché de l’emploi. Le manque de perspective

motive certains jeunes à emprunter la voie de l’exode rural. Pendant les entretiens avec les femmes de

Niono, il a été constaté qu’elles n’ont pas facilement accès au crédit, comme stipule ce passage : « c’est

seulement avec l’agriculture qu’on peut avoir de l’argent ici à Niono, aussi on ne trouve pas de crédit et on n’en

donne pas de crédit, on n’a trouvé personne pour donner des crédits et nous aussi on n’a rien » (Groupe,

Femmes, Niono). L’absence des institutions financières dans les zones de conflits peut être une

explication à ces propos des jeunes et des femmes.

Page 28: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire 19

Genre

Les femmes jouent un rôle important dans la sécurité alimentaire et nutritionnelle de la famille car elles

cuisinent pour le ménage. En outre, elles contribuent au développement de l’économie rurale par

l’agriculture maraîchère, malgré un accès limité aux terres. (FAO, 2018).

Les résultats de l’entretien mené auprès d’un agent local dans le cercle de Gourma Rharous dans la

région de Tombouctou confirment : « Bon le genre peut influencer la sécurité alimentaire de façon positive

puisque nous constatons ces dernières années que la plupart des activités maraîchères sont réalisées par les

femmes (le jardinage, la production de tomates, de salades, de pommes de terre, etc.). Ce sont des périmètres

aménagés et exploités par des femmes. La plupart des femmes mettent directement les produits sur le marché

ou les amènent à la famille pour la consommation, donc ça permet vraiment d’améliorer la situation

nutritionnelle au niveau des communautés.» (Agent, Santé, Gourma Rharous).

En cas d’insuffisance de la production au cours de l’année, les hommes sont responsables de l’achat des

compléments de vivres, même si les ressources doivent provenir de la femme. Elles peuvent cependant

se prononcer si leur avis est demandé. La contribution de la femme à la sécurité alimentaire est

rarement exigée ou revendiquée de façon ouverte ; elle est souvent imposée, soit par l’indisponibilité de

ressources du chef de ménage, soit par des ressources supérieures chez la femme ou par la présence

des enfants qui l’obligent à faire face à son rôle nourricier (FAO, 2018). Cependant, les femmes les plus

vulnérables ont un soutien limité, comme le stipule ce passage : « Il y a beaucoup de souffrances que les

femmes pauvres endurent quand les récoltes ne sont pas bonnes. Parce que beaucoup de ces femmes sont

seules, sans mari, sans terres cultivables et sans activités génératrices de revenus. Sauf si elles partent

quémander, faire la bonne (femme de ménage) ou chercher un autre moyen pour survivre. » (Groupe,

Femmes, Goundam).

Les conflits ont perturbé les activités économiques et les autres activités de subsistance (FEWS NET

2019). Les principales activités économiques des femmes ont lieu dans les foires (marchés

hebdomadaires), et l’insécurité limite le mouvement. « Si les femmes n’ont pas accès aux foires, elles ne

peuvent pas se déplacer, d’une foire à l’autre, à cause des conflits, cela pose problème et si les femmes

n’arrivent pas à amener les produits sur les marchés, cela pose problème. Généralement dans la région de

Mopti, ce sont les femmes qui font des petites activités de commerce. Rares sont les hommes qui vendent des

légumes et autres. Dans certaines localités, ça se fait, mais généralement ce sont les femmes. Et pour la

cueillette très généralement ce sont les femmes. Cela peut beaucoup influencer la sécurité alimentaire et

nutritionnelle. Si elles n’arrivent pas à circuler librement dans la localité, à travailler, à diversifier les aliments cela

peut jouer sur la sécurité alimentaire et nutritionnelle. » (Agent, Direction Régionale Santé, Mopti).

Alors que les femmes assument une responsabilité majeure en matière de sécurité alimentaire, la prise

en compte du genre indique que l’implication des hommes, des femmes et des enfants dans la sécurité

alimentaire et nutritionnelle est importante pour le développement. Comme le montre ce passage :

« Tout le monde à son rôle à jouer… La société est en train de favoriser l’accès des femmes, l’accès des jeunes à

ses équipements parce qu’ils pensent que ces personnes ont un grand rôle à jouer dans la sécurité alimentaire. Si

elles ne jouent pas leur rôle ça peut avoir des influences négatives» (Agent, Développement Social, Mopti).

Page 29: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 20

Moyens d’existence

Les moyens d’existence sont variés en fonction des régions (Graphique 7). Dans la région de

Tombouctou la population se livre à l’élevage nomade et au commerce avec l’Algérie, avec une petite

zone maraîchère et de culture de dattes. C’est une zone peuplée, avec des précipitations faibles, qui a

été touchée par les conflits et l'insécurité, réduisant l’accès au marché et les activités commerciales de la

région (FEWS NET, 2019).

Dans la région de Gao, en raison des faibles précipitations, le pastoralisme est le seul moyen de

subsistance viable pour la population. Les ménages sont extrêmement vulnérables aux dangers qui

menacent leurs troupeaux car les moyens de subsistance alternatifs sont limités. Lorsque le pâturage

est mauvais à cause d’une mauvaise pluviométrie, que l’accès au marché est difficile, en raison de l’état

des routes et des conflits, de nombreuses personnes cherchent d’autres opportunités de travail en dehors de la zone, en Algérie ou en Libye (FEWS NET, 2019).

Source: FEWS NET

Les principaux moyens de subsistance dans la région de Mopti dépendent de l'agriculture pluviale et de

l'élevage sédentaire. Le Plateau Dogon (cercle de Badiangara) est caractérisé par la culture du mil et des

échalotes. C’est une zone particulière en raison de son altitude élevée, qui reçoit suffisamment de pluie

pour la culture du mil. L'accès au marché est généralement bon pendant la saison sèche, mais difficile

Graphique 7. Zones de Moyens d’Existence

Page 30: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire 21

pendant la saison des pluies, ce qui affecte les activités commerciales dans cette zone. En raison de

l’insécurité, les moyens de subsistance de la population dans ces régions ont été fortement affectés

(FEWS NET, 2019). L’instabilité politique, la répartition inégale des infrastructures, la dégradation de la

situation sécuritaire, engendrée par les conflits avec les groupes armés islamiques, ont occasionné des

déplacements de centaines de milliers de personnes. Cette situation a augmenté la vulnérabilité des

populations. L'insécurité a limité les mouvements des pasteurs et de leurs troupeaux. La production

agricole a été réduite, l'approvisionnement des marchés perturbé, et on a constaté une pénurie de main

d’œuvre agricole (USAID, 2018e).

L’analyse montre qu’avec le déplacement des populations, les ménages qui pratiquaient le commerce et

les travailleurs indépendants sont ceux qui s’en sortent le mieux. Les autres secteurs d’activité ont en

général régressé. Les ménages pratiquant l’agriculture sont passés de 13 pour cent à 1 pour cent, et

ceux pratiquant l’élevage de 18 pour cent à 7 pour cent du total des ménages. La grande majorité des

ménages a perdu son autonomie financière et vit désormais d’aides et de dons humanitaires (49 pour

cent), d’aides des communautés et/ou de tierces personnes (30 pour cent) (Commission Mouvement de

Populations, 2019)

Dans le tableau ci-dessus les zones de moyens d’existence, « Milieu urbain », « Sud-ouest maïs, élevage

et orpaillage » et « Nord-ouest sorgho, transfert et élevage » sont celles dont les revenus moyens des

ménages sont les plus élevés. Par contre les zones de moyen d’existence « Plateau Dogon mil et

échalote », « Nomadisme et commerce transsaharien » et « Office du Niger riz et maraîchage »

connaissent des baisses plus ou moins importantes du revenu moyen des ménages (ENSAN, 2018).

Les activités des jeunes sont : l’agriculture, l'élevage, l’agriculture maraîchère, la confection et la couture,

la photographie, la menuiserie métallique et bois, le petit commerce, la confection et vente des briques,

la réparation des motos, la maçonnerie, la vente de fourrage pour l’alimentation du bétail.

Les femmes en milieu rural consacrent 90 pour cent de leur temps aux travaux ménagers et, quand cela

est possible, au jardinage ou à d’autres activités de transformation. (FAO, 2018). Le Mali est le troisième

pays africain producteur de poisson d’eau douce. La pêche est pratiquée en général par les hommes et

les femmes s’occupent de la transformation (fumage et salaison) et de la commercialisation.

Généralement, les femmes n’ont pas le contrôle de la production familiale si le chef de ménage est un

homme. La production et la gestion des stocks relèvent des hommes. Le commerce céréalier est une

activité importante dans l’économie, mais il est moins pratiqué par les femmes, qui sont plus impliquées

dans la commercialisation des produits agroalimentaires. (FAO, 2018).

Les Services Sociaux de Base

Les services sociaux dans l’ensemble des quatre régions de l’enquête connaissent des difficultés de

plusieurs nature. Dans certains endroits comme Mopti, ils existent et fonctionnent, mais toujours de

façon très réduite. Dans la région de Tombouctou, l’insécurité et les conflits ont rendu les services

sociaux de base inaccessibles pour la majeure partie de la population. A Gao, c’est le même constat,

beaucoup d’écoles sont fermées. Celles qui sont encore ouvertes manquent d’enseignants, en particulier

de personnel qualifié. Les centres de santé manquent de matériels et de médicaments. La recrudescence

de la violence, et la présence d’individus armés non identifiés, limite beaucoup l’accès aux services de

santé. Les populations, dans de nombreux endroits, ne peuvent plus quitter leurs communautés pour se

Page 31: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 22

rendre dans les structures de santé. Il est quasiment impossible de quitter un village pour aller dans un

centre de santé communautaire (premier échelon de la pyramide sanitaire au Mali) situé à moins de dix

kilomètres.

Éducation

Le tableau ci-dessous fait le point sur le niveau de fréquentation scolaire dans les différentes régions du

Mali. Les données révèlent un faible niveau de fréquentation scolaire pour le primaire et pour le

secondaire dans les régions de Ségou, Mopti, Tombouctou et Gao. Pour le primaire, il est de moins de

50 pour cent et la baisse de fréquentation est plus considérable encore dans le secondaire où le taux le

plus élevé de 25 pour cent est observé à Ségou (INSTAT, 2018).

Depuis l’année 2012, l’enseignement dans les régions de Mopti, Tombouctou et Gao, a subi des arrêts

partiels, de courte à longues durée, à cause de la situation sécuritaire (Banque Mondiale, 2018).

En janvier 2018 (voir le tableau ci-dessous) les chiffres montrent que les régions de Mopti et de Ségou

ont enregistré des pourcentages élevés de fermetures d’écoles, suivi des régions du Nord Mali (Kidal,

Ménaka, Tombouctou et Gao). En octobre 2019, la région de Mopti reste toujours en tête avec plus de

30 pour cent d’écoles fermées, suivie par les régions de Ségou, Gao et Tombouctou, où ces taux ont

aussi augmenté en 2019. L’éducation des enfants dans ces zones est compromise en raison de ces

fermetures.

Outre la situation sécuritaire désastreuse, le manque de pertinence du système scolaire en relation avec

les types d'emplois disponibles pourrait expliquer l’abandon scolaire. En ce qui concerne les jeunes filles,

le mariage précoce est la principale cause d’abandon scolaire (Save the Children, 2016).

En ce qui concerne les adultes, dans la région de Mopti, 45,7 pour cent des chefs de famille sont

alphabétisés. Dans la région de Tombouctou la moitié des chefs de familles (50,4 pour cent) sont

alphabétisés, contre 30,1 pour cent dans la région de Gao.

Tableau 2. Situation des écoles en Octobre 2019

Régions Nombre total d’écoles Écoles fermées

Nombre d’écoles fermées Pourcentage

en Octobre 2019

(%)

Ansongo (Gao) 138 18 13,0

Mopti 1 905 660 34,6

Niono (Ségou) 199 17 8,4

Tombouctou 528 106 20,0

Total 2 770 801 28,9

Source : Académie d’enseignement des zones

Page 32: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire 23

Santé

Selon l’enquête démographique et de santé du Mali de 2018, le taux de mortalité maternelle a été

estimé à 325 décès pour 100 000 naissances vivantes au cours de la période de 2012 à 2018 (INSTAT et

al, 2019). Les indicateurs de santé reproductive, maternelle, néonatale et infantile, et de nutrition sont

des mesures valides de l’accessibilité des services de santé particulièrement dans les zones de conflit.

Les résultats de l’enquête démographique et de santé du Mali de 2018, illustrent une très faible

utilisation des services de la planification familiale par les femmes de 15 - 49 ans, vivant en couple, dans

les régions de Gao, de Tombouctou et de Mopti. L’utilisation de moyens de contraception (toutes

méthodes) dans ces régions est de loin inférieure au niveau national (Mali 17,2 pour cent ; Mopti : 9,0

pour cent ; Tombouctou : 6,0 pour cent, Gao : 3,4 pour cent). L’indice de fécondité de ces régions fait

partie des plus élevés du pays (INSTAT et al, 2019). Les décisions liées à la planification familiale sont

prises au niveau du couple et souvent d’un commun accord. Mais certains hommes rejettent la

planification et cela peut engendrer des désaccords. Selon une femme de 42 ans qui voulait avoir recours

à la planification familiale : « Si votre mari ne consent pas, c’est difficile à faire… En matière de planification

familiale, mon mari ne l’a pas accepté, et j’ai laissé tomber parce que mon mari est le chef du ménage et aussi

pour maintenir la stabilité dans ma maison. » (Harande, 2017).

Le taux de consultation prénatale auprès d’un prestataire qualifié est de 80 pour cent au niveau national,

76 pour cent à Ségou, 79 pour cent à Mopti, 66,6 pour cent Tombouctou, 58,7 pour cent à Gao. Ces

résultats dénotent les difficultés d’accès des femmes enceintes aux services de consultation prénatale,

auprès d’un prestataire qualifié, dans les régions de Tombouctou et de Gao. Plus de la moitié des

femmes enceintes dans les régions de Tombouctou et Gao ont accouché sans assistance d’une personne

ayant des qualifications médicales pendant la période de 2014 à 2018 (INSTAT et al, 2019).

Tableau 3. Couverture vaccinale, par région.

Source: INSTAT et al, 2019

La couverture la plus élevée est enregistrée dans la région de Ségou (52 pour cent). Les couvertures les

plus faibles sont enregistrées dans les régions de Kidal (INSTAT et al, 2019).

Accès aux services de santé % d’enfants de 12-23 mois ayant reçu tous les

vaccins de base avant l’enquête

Kayes 41

Koulikoro 48

Sikasso 45

Ségou 52

Mopti 37

Tombouctou 34

Gao 22

Kidal < 1

Bamako 48

Page 33: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 24

Ce tableau (Tableau 4) présente la situation des

femmes, âgées de 15-49 ans, qui témoignent de la

difficulté d’accéder aux soins de santé quand elles

sont malades. Il ressort du tableau que dans les

régions de Ségou, Mopti, et Gao, plus de 40 pour

cent des femmes ont été confrontées à un

problème financier. Ce taux s’élève à 60 pour

cent dans la région de Tombouctou. Le problème

d’accessibilité géographique constitue une

barrière d’accès aux soins pour plus de 40 pour

cent des femmes dans les régions de Mopti,

Tombouctou et Gao (INSTAT et al, 2019).

En raison des contraintes financières, les chefs de

famille ont recours aux soins traditionnels pour

traiter certaines maladies, ce qui peut s’avérer

problématique lors des accouchements et pour

traiter les maladies infantiles (Monti C, 2016).

Les dispensaires et le personnel médical sont

souvent ciblés par les acteurs des conflits, cela

peut constituer une contrainte majeure pour les

opérations en zone de conflit. Plusieurs témoignages soulignent l’impact du conflit sur le système de

santé, comme le martèlent ces passages : « Je dirais que c’est très limité. En premier lieu l’accessibilité

géographique est difficile parce que Youwarou est une zone enclavée. Pour aller d’un district à un autre, ce n’est

pas facile. De plus il y a un problème d’insécurité résiduelle et de manque de personnel intervenant dans ce

domaine…» (Agent, Santé, Youwarou)

« Bon, aujourd’hui, le contexte est difficile, en fait très difficile. Le contexte dans lequel nous vivons, tout le

monde le sait, avec les contraintes sécuritaires que tout le monde connaît, notamment dans la zone de Tobiri

(nom d’un village), où vraiment les agents de santé avaient des problèmes pour venir s’approvisionner, suivre des

formations, à cause de l’embargo (des djihadistes), il y avait beaucoup de problèmes…» (Agent, Santé,

Tenekou).

Tableau 4.

santé dans

Indicateurs d’accessibilité aux services

l’ensemble des régions du Mali

de

Accès aux services

de santé

Accessibilité

financière (%)

Accessibilité

géographique

(%)

Kayes 38,6 28,8

Koulikoro 40,4 30,8

Sikasso 39,2 22

Ségou 43,9 28,9

Mopti 43,4 41,3

Tombouctou 60 49,5

Gao 48,5 41,6

Kidal 63 65,6

Bamako 33,3 17,4

Source: INSTAT et al, 2019

Page 34: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire 25

Eau, hygiène, et assainissement (“EHA”)

Les déplacements de populations,

suites à des conflits armés, pèsent

lourdement sur les infrastructures

EHA, déjà insuffisantes dans les

régions de Mopti, Tombouctou et

Gao (Save The Children, 2019).

L’assainissement et l’hygiène

médiocres, ainsi que le manque

d’accès à l’eau potable, aggravent le

taux de morbidité et compliquent le

profil nutritionnel du Mali (USAID,

2018a).

Ce graphique présente la répartition,

e

Graphique 8. Pourcentage de la population utilisant un source

améliorée d’eau de boisson

Source: INSTAT et al, 2019.

en pourcentage, de la population

disposant d’une source

d’approvisionnement en eau potable,

par région et par quintile de bien-êtr

économique. Ce tableau montre que

les sources améliorées

d’approvisionnement en eau potable

sont importantes les régions de

Ségou, Tombouctou et Gao. Cependant, elles sont très faibles dans la région de Mopti avec un taux de

46 pour cent, qui est le taux le plus faible sur le plan national (INSTAT et al, 2019).

Le Mali a fait de grands progrès, au sein les pays sahéliens, pour élimination de la défécation à l'air libre,

via des approches d'assainissement répondant à la demande. Ces approches ont été largement saluées

comme étant un succès. Cependant, les progrès ont été moindres dans l'amélioration des

comportements clés en matière d'hygiène, et en particulier l’accès au lavage des mains (moins de 2 pour

cent d'accès aux services de base de lavage des mains.) (GFSS, 2018).

Le tableau 5 présente la répartition en pourcentage de la population disposant d’une d’installation

sanitaire améliorée ou non améliorée ; et le pourcentage de la population qui se lave les mains dans les

différentes régions du Mali. Il ressort du tableau que plus de la majorité des ménages dans les régions de

Ségou, Mopti, Gao et Tombouctou, ne disposent pas d’une installation sanitaire améliorée. Ce taux est

le plus faible dans la région de Tombouctou (26,4 pour cent), où le taux de défécation à l’air libre est le

plus élevé (43 pour cent).

Le lavage des mains est pratiqué par la majorité des ménages, sauf dans la région de Mopti, où il est le

moins répandu, avec un taux de 51 pour cent (INSTAT et al, 2019).

En outre, les maladies diarrhéiques sont très répandues dans les zones inondables (par exemple, le

choléra est endémique dans la zone inondée de Mopti). Ces caractéristiques clés EHA entravent

probablement d'importants progrès sur les principaux résultats en matière de nutrition, de santé et

d'économie (USAID, 2018b).

Page 35: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 26

Tableau 5. Pratiques d’hygiène et Installations sanitaires

Source : INSTAT et al, 2019.

L’EDS a signalé que 34 pour cent de la population malienne avait accès à des installations

d'assainissement améliorées ou partagées et 69 pour cent utilisent l’eau potable provenant de sources

améliorées. Ce pourcentage est nettement plus élevé en milieu urbain (95 pour cent) qu’en milieu rural

(62 pour cent) (INSTAT et al, 2019).

Le GFSS (Global Food Security Strategy) continuera à promouvoir le traitement de l'eau et les bonnes

pratiques d'assainissement pour les ménages et les communautés. Des solutions durables fournies par le

secteur privé pour augmenter la demande d'investissement des ménages dans des produits et services

EHA de qualité seront explorées (USAID, 2018d).

Accès au financement

Dans les régions de Mopti, Tombouctou et Gao, l’octroi des crédits ne cible pas typiquement les

activités agricoles. Les crédits sont généralement accordés aux commerçants, avec un taux d’accès

global de 67 pour cent. Cette accessibilité varie selon les régions, avec une répartition inégale entre

hommes et femmes. Les populations de Gao ont davantage accès aux crédits que celles des autres

régions. Dans la région de Mopti, seulement 40 pour cent des femmes y ont accès. Dans ces régions, la

majorité de la population ne fréquente pas les banques, ni les institutions de micro-finance qui restent

réservées à la tranche de la population la plus aisée. Les pauvres rencontrent des difficultés pour

accéder aux services financiers. En voici un témoignage : « Nous avons deux caisses d’épargne. Pour que ces

deux caisses t’accordent un crédit, il te faut donner (présenter) des garanties et les gens n’ont pas de garantie à

donner (à présenter) et ça c’est un problème. Les gens qui n’ont pas de quoi manger, comment ils vont donner

Régions

Hygiène Assainissement

Défécations à l'air

libre

Installations sanitaires

améliorées

Installations sanitaires

non améliorées Lavage des mains

Kayes 5,3 69,5 25,1 68,7

Koulikoro 7,9 50,3 41,8 62,8

Sikasso 2,7 44,7 52,6 83,2

Ségou 4,3 48,9 46,7 75,5

Mopti 24,2 42,2 33,6 51

Tombouctou 43,8 26,4 29,7 94,5

Gao 23 44,9 32,1 72,1

Kidal 61,2 30,1 8,6 77,5

Bamako 0 90,6 9,3 63,6

Page 36: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire 27

des garanties ? Du coup ils n’ont pas accès à ces crédits. Sauf si c’est familial, si tu as du bétail que tu le vends

pour faire tes activités. » (Agent, OMA, Diré).

Les services financiers sont peu accessibles, particulièrement à Tombouctou et Gao. Les distances

moyennes entre les marchés et les banques sont de 11 kilomètres à Mopti, 57 kilomètres à Tombouctou

et de 80 kilomètres à Gao. La distance moyenne pour accéder aux institutions de micro-finances est en

moyenne de 11 kilomètres à Mopti, 27 kilomètres à Tombouctou et de 75 kilomètres à Gao (OMA,

2017).

Les résultats de l’analyse qualitative révèlent que l’accès des femmes aux finances passe par les banques,

les caisses d’épargne, et les tontines. Les tontines sont mises en place par les groupements et

associations de femmes au niveau des villages. La participation à ces groupements est essentielle pour

accéder au financement, comme le souligne un agent du service de développement social du cercle de

Koro, dans la région de Mopti : « Toute personne qui n’est pas dans une société coopérative n’a pas accès à

ça (aux crédits).» (Agent, Développement Social, Koro).

L’accès des femmes aux crédits favorise leur autonomie, crée des emplois et constitue un facteur majeur

de sécurité alimentaire et nutritionnelle. Ce passage en atteste : « Les avantages (de l’accès des

groupements de femmes aux crédits) ! Les avantages, il y en a beaucoup. Parmi eux on peut citer,

l’autonomisation des acteurs. Le groupement qui bénéficie d’un crédit, d’un financement peut facilement

développer son activité. Donc cela crée des emplois et aussi il y a beaucoup de gens qui peuvent facilement se

prendre en charge à travers cette activité. » (Agent, Développement Social, Tombouctou).

Pour les téléphones cellulaires, les distances entre le marché et les services offerts par ces derniers sont

de zéro (0) kilomètres à Mopti, moins d’un kilomètres à Gao et de 5 kilomètres à Tombouctou. Les

téléphones sont un vecteur important d'inclusion financière (OMA, 2017).

Une grande partie de la population possède ou a accès à la téléphonie mobile. C'est dans les capitales

régionales que l'on connaît le mieux son utilisation pour les transactions financières. Les systèmes de

transfert d'argent tels que Money Gram et Western Union sont couramment utilisés par les ménages

dans les régions de Mopti, Tombouctou et Gao (FEWS NET, 2019).

L’absence d’institutions financières dans les zones de conflit fragilise également les commerçants de

bétail, qui n’ont plus d’autres moyens pour mettre leur argent en sécurité. De même les acheteurs se

trouvent dans l’impossibilité d’accéder à leurs fonds. A ces problèmes s’ajoute le rôle des rebelles, dans

la réglementation des taxes sur les marchandises, qui perturbent aussi le fonctionnement du marché.

Protection sociale

En réponse à la crise alimentaire les organisations internationales et humanitaires, notamment l’USAID,

le PAM, l’UNICEF, Christian Aid et Action Contre la Faim, se concentrent sur les distributions

alimentaires gratuites par l’intermédiaire du Stock National de Sécurité et des Banques de Céréales

(USAID, 2018b).

Page 37: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 28

Grâce au Plan de Réponse Nationale, le gouvernement fournit une aide d’urgence dans les zones qui

font objet d’insécurité alimentaire. Ces activités sont coordonnées par le conseil national de la sécurité

alimentaire. Les ONG internationales soutiennent les efforts d’intervention du gouvernement dans les

régions de Mopti, Tombouctou, Gao et Ménaka. L’expansion du programme national de protection

sociale dans le centre et le nord est en retard, notamment à cause de l’insécurité, du manque de soutien

des services techniques et du financement limité des

donateurs (FEWS NET, 2019).

Le Gouvernement du Mali et ses partenaires

interviennent en appui des populations vulnérables en

organisant des distributions gratuites de vivres et de

produits de première nécessité. « Les efforts du

gouvernement en termes d’assistance et de protection

sociale, portent généralement sur la distribution de

produits alimentaires, notamment l’huile, le riz, le sucre et

le lait aux populations qui en ont besoin… » (Agent,

Développement Social, Douentza).

Des espaces d’apprentissages et de jeu ont été créés

pour offrir des services intégrés de soutien

psychologique, social et scolaire aux enfants déplacés

(UN OCHA, 2019).

« Le Régime d'Assistance Médicale (RAMED) est le seul mécanisme de protection sociale dont dispose l'état,

dans la localité de Douentza pour l’assistance aux plus vulnérables. L’accès aux services de santé commence à

devenir facile grâce au système d’assurance maladie Obligatoire (AMO) dont les services ne couvrent pas

actuellement toutes les zones. Pour l’accès à l’eau, le gouvernement s’est engagé à étendre les réseaux de

distribution d’eau potable de la SOMAGEP, afin de rendre l’eau potable accessible à tous. » (Agent,

Développement Social, Douentza). Il faut rappeler que le Régime d’Assistance Médicale (RAMED) est

une réforme du Gouvernement de la République du Mali, instituée par la loi N°09-030 du 27 juillet 2009,

qui assure la prise en charge médicale des personnes dépourvues de ressources, appelées « indigentes »

et celles qui nécessitent une assistance sociale.

D’autres acteurs, à travers des programmes de paiement conditionnel, soutiennent des activités de

protection sociale. Ils financent des projets d’infrastructures rurales et des activités de renforcement de

la résilience au niveau communautaire, dans les régions de Mopti, Tombouctou, Gao et Ménaka. Il s’agit

entre autres d’activités de construction ou de maintenance et d'irrigation des parcelles destinées au

jardinage. En fonction de la tâche effectuée le rendement journalier pour ces travaux varie

géographiquement entre 1 500 et 3 000 FCFA. Ces activités ne suffisent pas à diminuer les migrations

saisonnières ou à long terme, en particulier chez les jeunes. Des activités complémentaires pourraient

être envisagées pour aider les bénéficiaires à investir leurs revenus et créer une petite entreprise.

(FEWS NET, 2019)

Accès à l’aide humanitaire

« Les personnes vulnérables sont majoritairement

les déplacés qui ont quitté leur localité d’origine à

cause de la guerre. Ces personnes ont besoin d'une

assistance psychologique et sociale, car la plupart

ont assisté aux meurtres de leurs proches. Il est vrai

qu’elles sont parvenues à s'échapper mais elles sont

toujours victimes de chocs post traumatiques. De ce

fait, nous recommandons aux autorités une

assistance particulière pour ces personnes

déplacées qui n’ont pas seulement besoin de

vivres… » (Agent, Développement Social,

Douentza).

Page 38: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire 29

Le nombre de personnes déplacées à l’intérieur du pays (PDIs) est passé de 171 437 personnes à

187 139 en septembre 2019, soit une augmentation de 15 702 individus. Cette augmentation est due à la

violence dans les régions de Mopti, Ségou, Tombouctou, Gao et dans la bande frontalière entre le Mali

et le Burkina Faso (Protection Cluster Mali, 2019)

Graphique 9 met en évidence l’évolution du nombre de déplacés internes sur la période 2012 – 2019.

Un pic a été observé au mois de juin 2013 avec un déplacement interne de plus de 350 000 personnes,

qui a été suivi d’une diminution progressive du nombre de déplacés jusqu’en janvier 2018. Depuis cette

date, nous remarquons une recrudescence du nombre de déplacement, d’environ 200 000, en

septembre 2019.

L'utilisation de bons d’achat dans le centre et le nord du Mali a gagné en popularité dans les zones

d’intervention. Les bénéficiaires échangent leur bon d’achat contre des produits comme des céréales,

des légumineuses, de l’huile alimentaire, du sucre, des pâtes. Les avantages de ce mécanisme incluent un

choix plus flexible pour les bénéficiaires et un paiement plus rapide des fournisseurs (FEWS NET, 2019)

Depuis 2015 de nombreux acteurs

préfèrent utiliser des bons d’achat

que de l’argent liquide, compte tenu

de la détérioration de la situation

sécuritaire dans les régions du nord

et du centre. Néanmoins, les

liquidités représentent environ 74

pour cent des transactions, 25 pour

cent des transactions étant réalisées

en bons d’achat (OCHA, 2019).

L’accessibilité des cercles des

régions de Mopti, Tombouctou et

Gao pour les besoins humanitaires

est difficile, car il faut assurer la

sécurité du personnel humanitaire

(OCHA, 2019).

Conflit et insécurité

Le coup d'état institutionnel de 2012 a eu comme conséquence la détérioration de la situation

sécuritaire et l'augmentation du nombre de conflits violents dans les régions de Mopti, Tombouctou et

Gao (OCHA, 2019). Depuis les régions du nord du Mali (région de Tombouctou, Gao), l’insécurité s'est

propagée dans la région du centre du Mali (Mopti) et dans certains cercles de la région de Ségou

(Niono). Cette détérioration a créé une situation humanitaire instable, qui a réduit la libre circulation

des personnes et des biens. Elle a eu comme conséquences la perturbation des moyens de subsistance,

de l'accès aux services de base et des déplacements des personnes. Le conflit a également entraîné le

retrait des organisations non gouvernementales internationales (ONG) des zones touchées vers des

zones plus sûres, comme Bamako. Dans certains cas, ces ONG se sont retirées totalement du Mali

(Mwangi, 2014).

0

50,000

100,000

150,000

200,000

250,000

300,000

350,000

400,000

sept-

12

oct

-12

dec-

2012

mar

s-13

juin

-13

sept-

13

janv-

14

mar

s-14

aout-

14

oct

-14

dec-

14

avr-

15

mai

-15

juil-

15

sept-

15

janv-

16

mar

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16

juil-

16

dec-

16

janv-

17

dec-

17

janv-

18

dec-

18

janv-

19

fev-

19

mar

s-19

avr-

19

juin

-19

sept-

19

Graphique 9. Evolution du nombre de PDI 2012 à 2019

Source: FEWS NET, 2019

Page 39: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 30

Les conflits opposaient traditionnellement les éleveurs et les agriculteurs. Ils ont pris une nouvelle

dimension ; ils affectent les vies humaines et perturbent les activités économiques et de subsistance

(FEWS NET, 2019). Si la situation sécuritaire s’est améliorée dans certaines zones depuis 2016, elle

continue de se dégrader à d’autres endroits, à cause de la présence de nouveaux groupes armés. Ceci

affecte la contribution des femmes aux activités agricole. Il faut se poser la question de solutions

acceptables pour que les femmes puissent contribuer aux activités agricoles. En effet elles représentent

entre 3,1 et 8,9 pour cent des exploitants agricoles dans les régions d’intérêt (FAO et CEDEAO, 2018).

Le prix du bétail a chuté car les marchés sont submergés d’animaux volés. De plus, les éleveurs se voient

obligés de vendre leurs animaux à bas prix, car ils craignent le pillage et les maladies. En conséquence, le

prix du bétail a regagné du terrain, du fait d’un arrêt de l’approvisionnement des marchés lié à

l’insécurité (Mwangi, 2014). Les conflits et l’insécurité dans le delta intérieur du Niger, le Grand Nord et

la région frontalière Liptako-Gourma, entre le Mali, le Niger et le Burkina Faso, ont eu des effets

catastrophiques sur les mouvements habituels des troupeaux. (FEWS NET, 2019)

Les éleveurs sont plus exposés aux risques du conflit que les autres agriculteurs car les pâturages sont

occupés par les rebelles. La surpopulation sur les pâturages a également entraîné une augmentation de la

mortalité des animaux et une réduction du bétail en vente sur le marché.

La détérioration de la situation sécuritaire et les affrontements intercommunautaires violents dans la

région de Mopti, entre mi-février et avril 2018, ont forcé environ 3 000 personnes à quitter le pays et

1 500 personnes supplémentaires ont été déplacées à l'intérieur du pays (UNHCR, 2018).

Selon, l’UNHCR (Agence des Nations Unies pour les réfugiés), le nombre de déplacés internes (PDIs) au

Mali est estimé à 187 139 et à près 138 000 réfugiés maliens se trouvent au Burkina Faso, en Mauritanie

et au Niger, en raison du conflit (USAID, 2018c). La situation sécuritaire rend indispensable une révision

des modalités d’assistance dans les zones d’intervention, en l’occurrence la mise en place de

programmes qui prennent en compte le contexte conflictuel (FEWS NET, 2019).

Facteurs environnementaux - Climat

La situation géographique, socio-économique et une économie sensible aux changements climatiques

font du Mali un des pays les plus vulnérables aux effets néfastes de ce changement. Les trois quarts du

pays se trouvent dans la zone saharienne aride et sahélienne semi-aride.

Selon Notre Dame-Global Adaptation Initiative (Chen et al, 2015), la vulnérabilité se mesure en fonction

de l'exposition, de la sensibilité et de la capacité d'un pays à s'adapter à l'impact négatif du changement

climatique. La vulnérabilité globale se mesure en prenant en compte la vulnérabilité dans six secteurs

vitaux : nourriture, eau, santé, services écosystémiques, habitat humain et infrastructures. Le Mali est

classé parmi les pays les plus vulnérables.

La liaison entre la région de Mopti et les régions de de Gao et Tombouctou est assurée par les réseaux

routiers et fluviaux. L’approvisionnement des marchés a aussi été perturbé par les mauvaises conditions

des routes. Le temps de voyage entre les centres urbains des régions de Mopti, Tombouctou et Gao

prend plusieurs jours (voire une semaine) à cause de l'effet combiné du mauvais état des routes, des

Page 40: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire 31

check points, des restrictions imposées à la circulation des populations à certains moments de la

journée, et de l'escorte sécuritaire (FEWS NET, 2019).

L’évolution du climat au Mali est le suivant :

De 1950 à 1980, un déclin rapide des précipitations a été observé avec une amélioration partielle à

partir de 1990 ;

Une augmentation de la température annuelle moyenne de 0,7° C depuis 1960 ;

De l’année 2000 à 2009, des précipitations inférieures à la moyenne ont été observées (-12 pour

cent par rapport à la moyenne de 1920-1969) ;

Une augmentation de la fréquence des nuits chaudes et une diminution des nuits froides en toutes

saisons, sauf pendant les mois de décembre à février ;

Une augmentation de la fréquence de l’harmattan1 dans le centre et le nord. (FEWS NET, 2019)

Au Mali, on prévoit les changements climatiques suivants, d’ici 2060 :

Une augmentation de la température de 1,2 ° Celsius à 3,6 ° Celsius avec des augmentations plus

importantes dans le sud-ouest (Kayes) et les régions de Mopti et Gao ;

Une augmentation de la durée des vagues de chaleur et une réduction de la durée des vagues de

froid.

Des changements divers de précipitations avec une tendance à l’augmentation des épisodes de fortes

précipitations dans le sud et à la diminution des précipitations dans le nord.

Une désertification accélérée dans le nord et des événements météorologiques extrêmes plus

fréquents (inondations et sécheresses) dans le sud (USAID, 2018e).

Les secteurs clés de la sécurité alimentaire les plus vulnérables risquent d’être les plus affectés par les

effets néfastes du changement climatique. Parmi ces secteurs, on trouve l’agriculture, les secteurs de

l’eau, de la santé humaine et les écosystèmes.

Le changement climatique risque d'entraîner une augmentation de l’évapotranspiration et une réduction

des quantités d’eau disponibles pour l’agriculture, une perte ou un déplacement des zones agricoles et

une réduction de la végétation, affectant les pâturages et la production de fourrage. Il existe également

un risque d’impact sur la variété et l'occurrence des parasites, et sur les maladies affectant le bétail. Le

retard de croissance et la malnutrition chez les enfants pourraient augmenter en raison de l'insécurité

alimentaire accrue.

1 Vent très sec qui souffle de l'est ou du nord-est sur le Sahara et l'Afrique occidentale

Page 41: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 32

Dans le domaine des ressources en eau, le changement climatique risque d'entraîner une augmentation

des zones inondées ou une diminution du niveau d’eau des affluents du fleuve Niger, et pourrait

engendrer des conflits (USAID, 2018e).

Après analyse des résultats de l’enquête qualitative, l’effet de la variation saisonnière aura une incidence

sur :

La production agricole, avec une tendance à la baisse. « C’est une baisse de la production agricole d’où

une faible disponibilité des productions alimentaires dans les villages…» (Agent, PRESA, Mopti).

En cas de variation saisonnière, « l’impact se fera sentir sur la maîtrise de l’eau, car tantôt il y aura des

sécheresses et tantôt des inondations… » (Agent, SAP, Youwarou).

Dans l’entretien mené auprès du représentant du commissariat à la sécurité alimentaire dans la région

de Mopti, la baisse de la production agricole apparait comme le principal effet de la variation saisonnière

sur la vulnérabilité dans la région de Tombouctou, « l’effet de la variation saisonnière sur la vulnérabilité à

l’insécurité alimentaire impactera sur la disponibilité alimentaire. » (Agent, SAP, Niafunké).

Accès à la terre et aux autres ressources naturelles

Gestion de la terre

L’analyse des données de l’enquête qualitative, montre que les communautés sur leurs territoires, ont

toujours géré et préservé leur environnement naturel, en dépit des cadres juridiques et des institutions

modernes. Les différents espaces géographiques et culturels des zones faisant l’objet d’une enquête sont

riches des savoirs et savoir-faire séculaires en matière de gestion des ressources naturelles. Ces savoirs

permettent une bonne coordination entre les communautés pour réguler l’utilisation des ressources

naturelles. Ils permettent également aux communautés de prévenir et, dans le pire des cas, de gérer les

conflits liés à l’exploitation de ces ressources. En voici une illustration :

« Dans notre localité chacun connaît le propriétaire de chaque parcelle. Si vous n’avez pas de parcelle à cultiver,

vous allez voir le propriétaire terrien, qui pourra éventuellement vous en céder une partie. En contrepartie, dans

notre culture, après la récolte on se doit d’amener au propriétaire un sac provenant de la récolte, en guise de

remerciement. Si le terrain cédé devient insuffisant, le propriétaire terrien peut en augmenter la superficie.

Personne ne peut dire qu’un tel n’a pas le droit de cultiver la terre. Ici, chez nous, à Douentza, nous n’avons pas

appris cela de nos ancêtres. Si vous êtes dans le besoin, toute personne ayant une abondance de terre sera prête

à vous en donner pour que vous puissiez avoir de quoi vivre. Dans les champs, la délimitation est claire, ici c’est

pour un tel et à partir de là c’est pour tel autre. Si vous posez les bonnes questions et faites la demande, vous y

aurez accès. L’interdiction de cultiver la terre ne survient que si le demandeur se comporte mal avec le

propriétaire. Là on lui retire la parcelle, purement et simplement » (Groupe, Conseil de Village, Douentza).

Ce témoignage des jeunes va dans le même sens : « Ici, il y a des gens qui vendent leur parcelle aux

personnes qui ont de l’argent. Mais si vous n’avez pas d’argent et que vous avez besoin d’un champ pour le

cultiver, vous en faites la demande aux propriétaires terriens. Cela se fait auprès du chef de village. Il vous dit

quelles sont les conditions traditionnelles pour exploiter le champ. Souvent quelques noix de colas suffisent. »

(Groupe, Jeunes, Douentza).

Page 42: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire 33

Ces passages montrent que les collectivités locales ont un rôle important et particulier à jouer dans le

processus de développement local, ainsi que dans la protection et la gestion des ressources naturelles.

La décentralisation a favorisé l’implication et la responsabilisation des communautés au niveau local en

leur offrant des outils institutionnels qu’on supposait adaptés aux formes d’organisation des sociétés

maliennes.

Traditionnellement, les femmes dans la plupart des ethnies au Mali n’ont qu’un accès indirect à la terre.

L’accès à la terre, notamment en milieu rural, se fait en se prévalant surtout des règles coutumières

plutôt que du droit positif. Elles bénéficient en général de lopins de terre acquis par l’intermédiaire d’un

tiers (en général un homme : mari, chef de lignage, autre parent avec l’accord du conjoint…) pour leur

production. Mais elles n’ont aucun contrôle sur la ressource. La discrimination envers les femmes en

matière de gestion foncière est liée à des pesanteurs socioculturelles car dans la plupart des

communautés, la femme ne peut pas hériter de la terre (FAO-Mali, 2018). Cela est illustré dans ce

passage : « Généralement les femmes n’ont pas accès à la terre. Pourquoi ? Parce que quand un chef de famille

décède, généralement les femmes on ne les inclue pas dans l’héritage par rapport à la terre. Mais cette manière

de faire commence à changer. » (Agent, Développement Social, Gourma-Rharous).

Ces pratiques sont antérieures aux dispositions modernes sur la gestion des ressources naturelles,

même si elles n’ont pas une valeur juridique. L’histoire du cadre juridique et institutionnel lié à la gestion

des ressources naturelles au Mali renvoie au débat plus global sur la coexistence entre droit positif

moderne et règles et pratiques traditionnelles. Avant la période coloniale, l’organisation politique et

économique des communautés ou de l’empire du Mali, révèlent des modes de régulation plus ou moins

élaborés, traduisant un sentiment incontestable d’appartenance sociale et culturelle. L’installation et la

consolidation d’un nouvel ordre politique et social radicalement différent a conduit les colonisateurs puis

les régimes issus de l’indépendance à ignorer, voire à détruire l’héritage des valeurs et pratiques

culturelles séculaires.

Après l’indépendance, l’État, présenté comme omniscient, est intervenu dans toutes les secteurs de la

vie économique et sociale, garantissant le développement accéléré de la société. Après des décennies et

face à la fragilité des institutions publiques, et des crises économiques, ce modèle post indépendance de

la gestion des ressources naturelles a été appelé à plus de modestie vis-à-vis des valeurs et pratiques

culturelles séculaires. Ainsi le redimensionnement des missions de l’État et la prise en compte des

intérêts des acteurs sociaux sont amorcés dans les réformes juridiques et institutionnelles. A cet égard,

l’adoption du nouveau Code domanial et foncier de 1986 a été décisive. Depuis cette date, le législateur

malien reconnaît les droits et pratiques coutumiers et recherche la compatibilité entre us et coutumes

et droit positif dans le domaine de la gestion foncière. Au regard des insuffisances et des lacunes de la

gestion actuelle, le ministère en charge des Domaines et des Affaires foncières a initié un projet de

réforme : la réforme domaniale et foncière au Mali, dont le cadre institutionnel a été créé par le décret

n°2016-0177/PM-RM du 25 mars 2016. Les divers textes législatifs et réglementaires encadrant les

aménagements, la mise en place des plans d’occupation et d’affectation des terres (Ordonnance

n°2012-001 du 10 janvier 2012 portant Code Domanial et Foncier modifié et ratifiée par la loi

Ordonnance n°2016-025/ du 14 juin 2016), stipule qu’aucun droit foncier coutumier, non révélé au

cours d’une procédure d’immatriculation faite selon les règles, n’est opposable au titre foncier.

Au Mali, il existe une Association des Municipalités (AMM) et une Association des Collectivités Cercles

et Régions. L’AMM est organisée par cercle. Les liens avec les collectivités territoriales se traduisent par

Page 43: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 34

des programmes de soutien et de d’assistance technique. Le dispositif d’assistance technique est la

Cellule de Coordination Nationale (CCN) et le dispositif d’assistance financière est l’Agence Nationale

d’Investissement des Collectivités Territoriales. Le dispositif technique soutient les collectivités dans

l’élaboration du PDSEC. Le Plan de Développement Social Économique et Culturel, PDSEC, est un

document de planification des activités au niveau des collectivités. Le plus souvent quinquennal, il

présente les besoins prioritaires des populations. Il englobe tous les domaines à savoir : la santé,

l’éducation, la culture, la gestion administrative, l’hydraulique (Institut Malien de Recherche Action pour

la Paix), (IMRAP, 2015 ; PDSEC, 2016).

Pour donner plus de consistance aux mécanismes traditionnels, plusieurs partenaires (État, projets,

programmes de développement, etc.) se sont intéressés à leur valorisation et à la recherche des voies et

moyens pour la reconnaissance de leur portée juridique comme normes de régulation et de gestion des

conflits liés aux ressources naturelles. C’est ainsi qu’il existe des stratégies au niveau des collectivités

ainsi qu’au niveau des villages. Souvent les maires consultent les conseils de village pour inscrire ces

mécanismes traditionnels dans le PDSEC (USAID, 2010).

Implication des pauvres et des femmes dans la prise de décision et l'utilisation des

ressources naturelles

L'insécurité des droits fonciers et l'accès inéquitable à la terre et aux ressources naturelles définissent la

situation conflictuelle du régime foncier au Mali. Les pratiques coutumières en matière d'héritage foncier

ne peuvent continuer à doter les générations suivantes de terres de taille adéquate, même à des fins de

subsistance. En conséquence, les pauvres en milieu rural sont forcés d’exercer d’autres métiers, ou sont

obligés d’émigrer vers des terres traditionnellement possédées ou contrôlées par d’autres. Les deux cas

de figure ont un effet négatif sur la sécurité du régime foncier (ENSAN, 2018).

Comme indiqué ci-dessus, le transfert des terres se fait par la lignée masculine, du père au fils marié le

plus âgé. Les femmes ne peuvent avoir accès à la terre qu’avec l'autorisation de leur mari. La terre n'est

pas transférée aux femmes mariées (Boubacar et al. 2017). En conséquence, les femmes « disposent de

très peu de terre pour leurs besoins agricoles. Même si elles veulent développer de véritables actions de

développement agricole, l’accès à la terre pose problème et à beaucoup de niveaux. » (Agent, Développement

Social, Bankass).

Les migrants de retour2 n’ont pratiquement aucun accès à la propriété foncière (autre que l’attribution

officielle de titres de propriété par l’achat de terres). Ceux-ci comprennent des métayers, des

travailleurs saisonniers, des jeunes déshérités, des éleveurs devenus agriculteurs sédentaires et des

populations déplacées, qui n'ont souvent pas été indemnisées. Pour les éleveurs, la situation est

particulièrement précaire en ce qui concerne l'accès à la terre, aux ressources naturelles et à leur

utilisation (USAID, 2010).

2 Selon les Nations Unies, ce terme désigne « toute personne qui a résidé dans un pays étranger pendant

plus d’une année, quelles que soient les causes, volontaires ou involontaires, du mouvement, et quels

que soient les moyens, réguliers ou irréguliers, utilisés pour migrer »

https://refugeesmigrants.un.org/fr/définitions

Page 44: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire 35

Selon certaines personnes interrogées, il n’existe pas de familles défavorisées par rapport à l’accès à la

terre, mais plutôt des autochtones, qui disposent d’une grande partie des terres car ils sont les premiers

arrivants, comme montre ce passage : « Dire que certaines familles sont beaucoup plus défavorisées par

rapport à la terre : NON, dans nos communautés, pour le moment, ce sont des notions qui n’ont pas encore vu

le jour. Mais les autochtones du village disposent de la plus grande partie des surfaces cultivables. Donc les plus

grandes parcelles sont à leur nom. Bon, les autres ménages aussi disposent de la terre, eux aussi en disposent

même si la taille des parcelles n’est pas aussi grande. » (Agent, Développement Social, Bankass).

Dans la région de Mopti, (Bandiagara, Douentza, Tenenkou et Youwarou) l’utilisation des ressources

forestières (bois de chauffage, bois vert utilisé pour la construction, charbon, bois pour la fabrication

d’outils, les terres, la récolte de fourrage ainsi que aliments pour l'élevage local et transhumant) est

soumise à une réglementation. Ces ressources sont généralement réservées aux membres de la

communauté et nécessitent dans certains cas le consentement du chef de la communauté, comme la

coupe de bois vert. Les personnes indigènes sont autorisées à collecter le bois pour leur usage

domestique. Par contre les non-autochtones n’y sont autorisés que pour la réalisation des ouvrages

collectifs. Sa commercialisation est interdite. Les forêts, les pâturages et les points d’eau sont considérés

comme des ressources collectives, alors que les terres arables appartiennent à la communauté en charge

de leur gestion (Boubacar et al, 2017).

Les mairies invitent parfois les chefs communautaires à former des brigades de jeunes pour lutter contre

la coupe abusive de bois. En plus des actions des élus communaux, les services des eaux et forêts

délivrent des autorisations d’accès aux ressources naturelles, moyennant un pourcentage, comme le

stipule cet extrait : « Les gens ont un accès équitable aux ressources naturelles parce que les services des eaux

et forêts vous donnent un document pour vous autoriser à aller chercher du bois en brousse et au retour, après

la vente, vous leur donnez en retour un pourcentage de la vente. » (Groupe, Conseil Village, Douentza). Dans

les zones où le gouvernement n’est pas présent, c’est la coutume qui sert de cadre pour le règlement et

la gestion des ressources naturelles. Ainsi le territoire du village est le lieu d'expression des solidarités

familiales, lignagères, intra et inter‑villageoises, qui se manifestent à travers les rapports sociaux et les

modalités d'accès à la ressource, qui s'agencent sur le registre des droits coutumiers. L'accès au foncier

est tributaire de ce mode d'organisation coutumière qui en garantit l'exploitation. La chefferie est l'entité

la mieux informée sur le code domanial traditionnel et les règles de gestion de la ressource.

Il faut rappeler que l’afflux vers les centres urbains a un impact sur la sécurité alimentaire comme

l’atteste ce passage : « Il y a des déplacements saisonniers. A la fin des récoltes, la plupart des jeunes vont à la

recherche du travail dans les centres urbains, certains d’entre eux ne reviennent plus au début de la saison des

pluies. Certaines filles vont dans les centres urbains pour être des aide-ménagères. » (Agent, Développement

Social, Djenne). Selon le service de l’observatoire du marché agricole, l’effet de l’urbanisation se fait

sentir sur la disponibilité des terres pour les activités agricoles, comme l’atteste ce passage : « Il y a

l'urbanisation qui commence à grignoter les terres labourables, car il n’y a plus assez de terre exploitable. Cela

peut créer des problèmes et même amener des tensions entre les populations, on en a connu. » (Agent, OMA,

Dire). A cela il faut ajouter la crise sécuritaire qui a rendu l’accès difficile à certaines ressources

naturelles. Par exemple, avant la crise il était facile de quitter sa commune pour cueillir de l’herbe dans

une commune voisine en payant la modeste somme de 1.000 francs CFA par charrette.

Page 45: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 36

Mécanismes de distribution des ressources naturelles

Dans le cadre de la gestion décentralisée des ressources naturelles, les organisations communautaires et

les particuliers gèrent et exploitent certaines unités d’aménagement des domaines agricoles et forestiers

des collectivités, par délégation. Les principes de cette délégation sont fixés par les textes à travers des

contrats qui peuvent être de plusieurs natures (contrats de gérance, contrats d’affermage, contrats de

concession ou même une combinaison des trois contrats). Il y a des comités de gestion des points d’eau

sous le contrôle du chef de village. Les comités sont composés par des hommes et des femmes de la

communauté. Ils ont comme mission d’entretenir les installations hydrauliques afin qu’elles puissent

durer et servir longtemps les communautés bénéficiaires. Le comité génère des revenus qui permettent

à la communauté de pouvoir participer à des actions de développement, notamment dans le domaine de

la santé, dans le domaine de l’éducation, y compris dans le domaine de l’eau et d’autres structures de

base.

Gestion des bourgoutières

Le bourgou est un type de fourrage essentiel au système de production de bétail, au centre et au nord

du Mali, qui prospère dans les zones inondées du delta intérieur du Niger. Les zones de culture de

bourgou, ou bourgoutières, ont longtemps joué un rôle crucial dans le cycle de la transhumance.

Traditionnellement, le bourgou se développe pendant la période d’inondation du delta intérieur. Les

animaux retournent dans le delta intérieur à mesure que les pâturages et l’eau se raréfient dans les

zones de plaines non inondables. Le bourgou y sert alors de fourrage principal pendant le reste de la

saison sèche, jusqu'à ce que les pâturages pluvieux redeviennent disponibles. Les bourgoutières sont de

plus en plus en danger, pour les raisons suivantes :

Augmentation de la conversion des zones de culture de bourgou en rizicultures, en partie à cause de

la baisse des niveaux d'inondation, ce qui a également entraîné une baisse de la productivité des

bourgoutières ;

Tensions dans le système de gestion des bourgoutières, en tant que système de gestion

traditionnelle (dioro), qui est maintenant confronté à une alternative qui découle de la

décentralisation de la gestion des ressources naturelles au niveau local ;

Augmentation croissante de la valeur marchande de la récolte de bourgou, qui transforme cet

aliment qui était consommé sur place en une culture de rente pour la récolte et la vente sur les

marchés.

La gestion des bourgoutières se fait au travers des « Diooroo ». Ce sont les propriétaires et gestionnaires

des bourgoutières. La gestion des bourgoutières est faite uniquement par les hommes. L’accès aux

bourgoutières est conditionné à un accord et au paiement de quelques frais. Cette réalité existe dans les

milieux Peulh principalement, et en général dans les zones bourgoutières.

Dans le cercle de Gourma-Rharous dans la région de Tombouctou, les bourgoutières sont gérées de la

façon suivante : « Les bourgoutières constituent ce qu’on appelle des projets communautaires villageois, elles

sont inscrites dans le lot des projets communautaires villageois, et là-bas aussi c’est la même chose que les points

d’eau. Les comités de gestion des parcelles de bourgoutières pives (ce sont des délimitations à l'intérieur d’un

champ) utilisent même leurs propres méthodes de gestion. Donc là-bas il y’a un problème à ce niveau,

pourquoi ? Parce que les femmes n’y ont pas accès, les femmes n’ont pas effectivement accès à ces

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Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire 37

bourgoutières-là, même si leurs noms sont enregistrés et font parties des exploitants, mais à ce niveau aussi il

faut noter le poids des chefs dans la gestion des pives, notamment des bourgoutières. » (Agent,

Développement Social, Gourma-Rharous).

Eau

Le delta intérieur du Niger couvre principalement les régions de Mopti et de Tombouctou avec une

superficie de 1200 mètres cubes / seconde. On trouve également le lac Faguibine situé à 80 kilomètres à

l’ouest de Tombouctou. Sa superficie est de 3 360 kilomètres carrés et comprend un certain nombre de

lacs et de canaux convergents qui drainent une plaine basse fertile, alimentée par les inondations

annuelles du fleuve Niger. Cet écosystème se situe à un point critique, entre les pasteurs nomades

arabo-berbères du nord, et les communautés du sud - agriculteurs sédentaires - qui comptent sur le

cycle régulier du lac (PNUD Mali, 2015).

L’irrigation constitue pour les régions du nord, la seule perspective de mise en valeur des terres et de

réduction du déficit alimentaire qui les affecte particulièrement. L’irrigation de surface n’est pas le seul

type d’irrigation. Sont également pratiquées l’irrigation en maîtrise totale, par submersion contrôlée,

mais aussi l’irrigation des bas-fonds et les cultures de décrue (de type vivrière). L’irrigation en maîtrise

totale par bassin est utilisée pour les cultures du riz et du blé, pendant que celle en maîtrise totale à la

raie, est utilisée pour la canne à sucre et le maraîchage. Les superficies aménagées par typologie de

système d’irrigation en hectares dans les régions de Ségou, Mopti, Gao et Tombouctou sont les

suivantes ; Opération Riz Ségou : 36 000 hectares, Opération Riz Mopti : 35 000 hectares , les Mares

des régions de Tombouctou et de Gao : 5 000 hectares, avec un système d’irrigation en submersion

contrôlée ou libre. Les cultures de décrues dans les régions de Tombouctou et de Gao ont été réalisées

sur 60 000 hectares (GdM, 2006).

Gestion des conflits liés aux ressources naturelles

Les conflits occasionnés par la gestion des ressources naturelles sont gérés au niveau communautaire

comme l’indique ce passage : « Bon, la gestion des conflits, nous (les acteurs du développement social)

sommes là chaque jour, tous les jours, en ce sens il y a des comités communaux, il y a un comité local à cet effet,

il y a même des comité villageois pour la gestion de crise, de catastrophe qui jouent un très grand rôle à ce

niveau, le cercle quand même a une particularité par rapport aux autres cercles puisque il y a l’écoute, les gens

s’écoutent, les gens se pardonnent facilement, mais le problème c’est le contrôle du territoire puisque le territoire

est très vaste et personne ne sait qui fait quoi, qui est responsable de quoi, qui vient d’où donc il y a ce problème

qui se pose sinon des actions sont enregistrées dans ce sens et par les humanitaires avec l’accompagnement de

l’état, donc vraiment la gestion des conflits à ce niveau est inclusive ici mais le problème c’est comment mesurer

le résultat. » (Agent, Développement Social, Gourma Rharouss).

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Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 38

4. Insécurité Alimentaire et Moyens

d’Adaptation des Communautés

Les crises humanitaires au Mali résultent des effets combinés des conflits, de l’insécurité multiforme et

des changements climatiques. Ces chocs récurrents

déstabilisent les moyens de subsistance de millions

de personnes, ce qui augmente leur vulnérabilité et

les empêchent de subvenir à leurs besoins par eux-

mêmes (UN OCHA, 2019a).

La résilience à l’insécurité alimentaire dépend des

stratégies suivantes : les aides de parents et d’amis, l’utilisation de l’épargne, la vente de bétail, de

possessions et d’autres biens (EMOP, 2018).3

De 2017 à 2018 les régions de Mopti, Tombouctou et Gao ont été durement frappées par les

changements d’habitudes alimentaires. Les ménages de ces régions ont davantage utilisé les stratégies

d’adaptation alimentaire. En dehors de ces régions, à partir de janvier 2017 et jusqu’à septembre 2018, la

situation est devenue catastrophique à Mopti et Kidal.

Graphique 10. Indice des stratégies de survies des ménages Septembre 2014 - Septembre 2018

Source: ENSAN Mali Septembre 2018

Note sur l’axe y: Plus le score est élevé, plus les ménages ont recours à ces stratégies d’adaptation. Au niveau national,

l’indice des stratégies alimentaires reste stable en septembre 2018 avec un score moyen de 2,04 points contre 1,96 en

septembre 2017.

« Les chocs aujourd’hui qui affectent les

populations vulnérables, ce sont les conflits et

les inondations » (Agent, Développement

Social, Mopti).

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Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire 39

Les stratégies qui concernent la sphère alimentaire sont mesurées par l’indice des stratégies de survie

simplifié (CSI), qui mesure la fréquence de cinq comportements du ménage : la consommation d’aliments

moins appréciés mais moins chers, l’emprunt de nourriture, la diminution des portions, la réduction de

la consommation au profit des enfants et la réduction du nombre de repas par jour. Plus le score est

élevé, plus les ménages ont recours à ces stratégies d’adaptation. Au niveau national, l’indice des

stratégies alimentaires est resté stable en septembre 2018 avec un score moyen de 2,04 points contre

1,96 en septembre 2017 (ENSAN, 2018).

Dans les cercles de Bandiagara, Douentza, Tenenkou, et Youwarou dans la région de Mopti, la

sécheresse a été le choc le plus important ressenti par les ménages au cours de l'année 2016, suivi des

maladies animales, des inondations, de la hausse des prix des denrées alimentaires et des parasites

(USAID, 2018a).

Les avis sont partagés quant à l’analyse des chocs susceptibles de toucher les couches vulnérables et très

pauvres. Le principal choc énoncé par les communautés est l’inondation, exacerbée par la montée des

eaux dans certaines localités, comme l’atteste ce passage : « Actuellement, nous sommes au mois de

septembre et les récoltes n’ont pas commencé. Il y a trop d’eau, les pêcheurs ne peuvent pas pêcher et même

s’ils pêchent, il n’y a rien dans l’eau. Les cultivateurs n’ont pas de récoltes. Djenné s’est vidé de tous ses animaux.

Donc, il y a un déséquilibre par rapport à la sécurité alimentaire » (Agent, Développement Social, Djenne).

Dans le Cadre Stratégique pour la Relance économique et le Développement Durable (CREDD) le

gouvernement du Mali s’est engagé à assurer la protection sociale. Aussi, en référence à l’Alliance

Globale pour la Résilience (AGIR), et à travers la politique nationale de sécurité alimentaire et

nutritionnelle, la politique nationale de la protection sociale, le Gouvernement du Mali et ses partenaires

doivent intervenir dans la résilience des communautés vulnérables en cas de catastrophe, comme en

attestent ce passage: « En matière sociale, les très pauvres sont sous la couverture du Régime d'Assistance

Médicale (RAMED). Dans chaque commune les maires aussi font de leurs mieux, selon leurs capacités. Dans

chaque communauté il y a des mécanismes d'assistance aux plus vulnérables. On sollicite également l'appui de

nos partenaires. » (Agent, Développement Social, Mopti).

L’entraide au niveau communautaire apparaît comme la plus rapide et la plus précieuse en cas de

situation de crise alimentaire. Cela se justifie dans cette citation des conseillers villageois : « Dans notre

localité, en cas d’insécurité alimentaire, c’est l’entraide qui prime, nous sommes solidaires les uns envers les

autres, c’est une vieille tradition qui se perpétue chez nous. Les personnes qui ont plus de moyens ont pitié des

pauvres, les parents qui ont plus de subsistance appuient leurs frères. Nous nous soutenons jusqu'à ce que la

volonté de Dieu se manifeste par une amélioration de nos conditions de vie. » (Groupe, Conseil Village,

Gourma-Rharous).

Pour les conseillers villageois du cercle de Douentza, l’appui en semences et l’aménagement des terres

pourrait permettre de lutter contre l’insécurité alimentaire. Il ressort de l’entretien avec le service de

l'observatoire du marché agricole, que les terres cultivables sont de plus en plus pauvres, avec des

rendements faibles, comme le souligne ce passage : « Concernant la terre il n'y a pas de problème. Mais au

fur et à mesure qu’il y a plus d’exploitants, la terre s’appauvrit, vu que c'est la même terre qui est utilisée depuis

10 ou 15 ans. Du coup, les communes ont besoin de nouveaux aménagements mais ils n'ont pas les moyens et

les choses ne bougent pas » (Agent, OMA, Dire).

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Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 40

« Les ONGs peuvent nous aider en apportant des semences d’arbres fruitiers et de légumes. Nous n’hésiterons

pas à les planter. Je pense cela pourrait diminuer beaucoup l’insécurité alimentaire. Les personnes qui dépendent

de la pluviométrie ne pourront plus nous nourrir. Il faut un aménagement des jardins et la construction des

digues pour contenir l’eau. Favoriser la culture de la patate, de la pomme de terre, du riz et beaucoup d’autres

choses. C’est le seul moyen de lutter contre l’insécurité alimentaire chez nous ici. La pluie ne pourra pas nous

sauver. » (Groupe, Conseil Village, Douentza).

L'amélioration des perspectives de paix, de sécurité et de réconciliation à long terme passent par le

renforcement de la confiance entre les communautés touchées par le conflit et leur gouvernement. Elle

passe aussi par le renforcement de la capacité des communautés à d'atténuer et à gérer les conflits, à

hiérarchiser et à mettre en œuvre les besoins de développement les plus pressants. D’autre part, il

s’agira de responsabiliser les jeunes marginalisés en tant qu’agents de changement.

5. Assistance Alimentaire

USAID

Au Mali, USAID/FFP a des programmes de développement en cours qui accompagnent le

Développement des Activités de Sécurité Alimentaire de Harande (DFSA) à Mopti ainsi que des

programmes humanitaires en cours par le biais d’ONG et d’Organisations Internationales Publiques

(PIOs) dans une grande partie du pays.

A Mopti, le consortium de six ONG (CARE en tant que responsable, Helen Keller International (HKI),

Save the Children (SC), et trois ONG maliennes) est responsable de la mise en œuvre des activités de

HARANDE sur le terrain : YA-G-TU (en anglais « Organisation pour la promotion de la femme »),

Sahel-Eco et GRAT (en anglais « Recherche et applications techniques Groupe »). Le projet a une durée

de cinq ans et son objectif principal est de fournir nutrition et sécurité du revenu pour 270 000

membres vulnérables des ménages, répartis dans 16 communes et dans quatre districts (cercles). La

région comprend les districts de Youwarou, Tenenkou, Bandiagara et Douentza. HARANDE a cinq

objectifs principaux qui se recoupent, visant à renforcer le capital humain, notamment : la nutrition,

EHA, la planification familiale, l'alphabétisation et le développement des compétences essentielles de la

vie quotidienne. Il vise à favoriser la diversification des moyens de subsistance, à augmenter la résilience

au changement climatique, aux chocs et la capacité à prévenir et atténuer les conflits.

En raison de ces défis humanitaires et de développement, le Mali a été sélectionnée comme pays cible de

la Stratégie Mondiale de Sécurité Alimentaire et du programme de résilience. Le Mali dispose d'un

portefeuille complet de missions de l'USAID comprenant une gamme de programmes en matière de

santé, de gouvernance, de croissance économique et d'éducation, contribuant à sa stratégie de

coopération pour le développement (USAID, 2015-2020).

Le portefeuille mondial d'activités pluriannuelles de sécurité alimentaire de l'USAID/FFP vise à réduire le

nombre de cas d'assistances humanitaires par le biais de programmes dans les ménages et les

communautés exposés à l'insécurité alimentaire, à la pauvreté et à la malnutrition.

Page 50: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire 41

Feed the Future soutient les programmes, les partenariats et les organisations suivantes au Mali :

Afrique pour l'intensification durable de la prochaine génération (Africa RISING)

Renforcement de la statistique agricole LSMS (Banque mondiale)

Centre mondial d'agroforesterie (ICRAF)

Renforcement des capacités anti-contrefaçon

Enseignement supérieur pour la recherche et le développement agricole (MSU)

Environnement favorable aux entreprises (Banque mondiale)

Programme du prix des céréales (ACDI / VOCA)

DCA (Investment Credit Fund)

Innovation du laboratoire Feed the Future pour la politique de sécurité alimentaire

Financement des femmes entrepreneurs et sécurité alimentaire

Programme de sécurité alimentaire et agriculture

Horticulture (AVRDC)

Le bétail pour l’accroissement de la chaine de valeur (AECOM)

6. Leçons tirées des Programmes de

Sécurité Alimentaire

Cette revue a permis d’identifier les enseignements suivants :

Les infrastructures d'irrigation, la gestion des pâturages, l'utilisation des intrants améliorés agricoles

comme les semences et les engrais, améliorent la production agricole.

Les éleveurs migrent vers les bourgoutières les plus accessibles sur un plan sécuritaire.

La pêche demeure la seule activité agricole qui n'a pas été affectée par le conflit (Mwangi, 2014).

Les problèmes d’hydrauliques villageoise et pastorale, le système de gestion et la maintenance des

infrastructures d’EHA demeurent le défi principal pour un accès adéquat aux ressources en EHA.

Page 51: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 42

Les ménages agricoles qui ont accès à un service financier, adoptent des pratiques durables de

gestion des ressources naturelles, et ont accès à une source d'eau améliorée et ne défèquent pas à

l’extérieur.

Les femmes qui font le jardinage et le petit commerce afin de pouvoir subvenir aux besoins

alimentaires de leurs ménages sont des agents de résilience des populations.

Dans les régions de Mopti, Gao et Tombouctou, la fixation des prix sur les marchés locaux se fait

localement. Les tendances de la production, le calendrier et le volume d’achats institutionnels

effectués par OPAM et d’autres entités peuvent entraîner une baisse des prix (FEWS NET, 2019).

Le projet de stabilisation vise à améliorer de manière mesurable l’efficience, l’efficacité et la capacité

des communautés locales à mieux résister aux conflits et à l’extrémisme violent. Favoriser la stabilité

dans les régions ciblées n’est pas seulement une fin en soi, mais une condition préalable à la mise en

œuvre intégrale de l’accord de paix et des plans de développement régionaux qui, à leur tour,

créeront les conditions d’une paix plus durable.

La priorisation des besoins permet un renforcement de la cohésion sociale en séquençant et en

intégrant des activités en harmonie avec les parties prenantes afin de tirer parti des opportunités de

changement. Cette approche commence par de petits projets visant à renforcer la gouvernance et la

résolution des conflits : l’approche locale permet de développer une compréhension nuancée village

par village de la dynamique des conflits, en vue d’une plus grande inclusion et d’un meilleur

engagement afin de créer la cohésion sociale et la confiance à partir de la base.

Le GFSS continuera à promouvoir le traitement de l'eau, les bonnes pratiques d'assainissement et un

environnement hygiénique pour les ménages et les communautés. Des solutions durables du secteur

privé pour augmenter la demande d'investissement des ménages dans des produits et services EHA

de qualité seront explorées.

En outre, une évaluation de la qualité des services d'accueil dans les centres de santé

communautaires, l’implication des leaders communautaires et des tradithérapeutes pourraient

améliorer l’accessibilité aux soins dans les cercles de Bandiagara, Douentza, Tenenkou et Youwarou.

La sécurité des droits fonciers devrait encourager une augmentation des investissements dans la

production agricole. Cela contribuera à améliorer les revenus grâce à la vente de la production

excédentaire, à la création d'emplois dans les secteurs agricole et auxiliaires, à l'amélioration des

opportunités de revenus tout au long de la chaîne de valeur et à l'élargissement des opportunités

commerciales. Sur le long terme, l'augmentation de la production et des revenus améliorent la

sécurité alimentaire en augmentant la disponibilité et l'accès à la nourriture.

Cependant, le manque de sécurité foncière au Mali limite la volonté des petits producteurs et des

agro-investisseurs d'investir dans l'expansion et l'intensification de la production agricole. Le

gouvernement du Mali s'emploie à renforcer la sécurité d'occupation par le biais de nouvelles

politiques publiques de décentralisation du pouvoir de contrôle et de gestion des terres et des

autres ressources naturelles. Cela devrait accroître la capacité du pays à assurer la sécurité

alimentaire des ménages et du pays.

Page 52: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire 43

Pour améliorer la sécurité de leur régime foncier, les femmes forment souvent des associations

légalement reconnues et, par cette voie, demandent des terres pour leur usage collectif. Cette

stratégie améliore la sécurité d’occupation des femmes, mais ne garantit toujours pas que l’État ne

réclame pas les terres plus tard. L’attitude du public à l’égard de la propriété foncière des femmes au

Mali commence à changer. L’État met en œuvre des politiques qui amélioreront l’accès des femmes

à la terre, et l’attribution de titres de propriété peut conférer aux femmes des droits de propriété

plus sûrs.

Les causes profondes de l'insécurité foncière et de l'accès inéquitable aux ressources au Mali sont de

nature diverse. Comme décrit plus en détail, certaines de ces causes incluent la croissance

démographique, les pratiques non durables d'utilisation des terres, le changement climatique, la

coexistence de systèmes fonciers coutumiers et légaux, le manque de sensibilisation du public sur les

cadres juridiques, le manque de bonne gouvernance et de compétences au sein du système

d’administration foncière, la décentralisation lente, l’expropriation de terres et la mauvaise

performance du marché foncier.

Page 53: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 44

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----. 2019a. Humanitarian Needs Overview. Mali. 18 Janvier 2019

UNHCR. Mali Situation Refugees, IDPs and Returnees, July 2018.

U. S. Agency for International Development (USAID). 1992 USAID Policy Determination 19.

Washington, DC: USAID.

----. 2010. Mali, Septembre 2010. Rapport d'évaluation du Régime foncier au Mali

----. 2015. Mali CDCS 2015-2020 https://www.usaid.gov/mali/cdcs

Page 56: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire 47

----, 2016. 2016–2025 Food Assistance and Food Security Strategy.

----. 2018a. Mali

----. 2018b. Mali Resilience Research Report, January 25, 2018.

----. 2018c. FFP Mali Fact Sheet. Available: https://www.usaid.gov/mali/food-assistance.

----. 2018d. Global Food Security Strategy (GFSS) Mali Country Plan. August 2018. Available:

https://www.usaid.gov/sites/default/files/documents/1867/Mali_Country_Plan.pdf

----.2018e Climate Risk Profile Mali. The Adaptation Thought Leadership and Assessments (ATLAS). Fact

Sheet. USAID.

WFP, 2017. Evaluation des marchés alimentaires, Régions de Mopti, Tombouctou, Gao et Kidal.

Opportunités et pertinence de mise en l’échelle des transferts monétaires. Avril 2017.

World Bank Group, 2018. Crise Sécuritaire et Évolution de la Situation des Écoles au Nord Mali.

Page 57: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 48

Annexe I. Méthodologie

La méthodologie utilisée pour la collecte des données qualitatives est la suivante :

Développement de guides d’entretien à travers des versions successives, et incluant les questions clés du

partenaire.

Recrutement des enquêteurs, réalisé selon les critères suivants : avoir un niveau master en sciences

sociales, avoir une expérience en matière d’enquête qualitative, être du milieu, parler la langue locale et

être disponible pendant toute la durée de la collecte des données. Ainsi 17 enquêteurs ont été recrutés

pour couvrir tous les cercles d’étude.

Quatre superviseurs de niveau master avec une expérience dans la supervision des enquêtes qualitatives

ont été recrutés pour superviser les activités des quatre régions de l’étude.

Les superviseurs et les enquêteurs ont tous été formés ensemble pendant quatre jours dans la région de

Mopti. Pendant les deux premiers jours de la formation, les participants ont pris connaissance du

protocole et ont été formés sur les principes d’éthiques de la recherche. Des guides d’entretien ont été

discutés en groupe et une étude de cas a été effectuée. Le troisième jour a été consacré au pré-test des

guides d’entretien sur le terrain. Ensuite, le dernier jour a étudié la prise en compte des réalités du

terrain, l’identification des personnes clés à interroger et l’organisation pratique de la collecte des

données.

Les activités de la collecte des données sur le terrain ont commencé par la visite des autorités

administratives et des collectivités. Le but de cette visite était d’expliquer les objectifs de l’étude et de

les informer de la mise en œuvre de l’enquête.

Après avoir donné toutes les informations concernant l’étude, le consentement éclairé et signé de

toutes les personnes interrogées a été obtenu avant la participation à cette étude, la participation a été

libre et volontaire.

Les entretiens individuels ont été réalisés en français et les entretiens de groupe dans des langues

locales. Le lieu de l’entretien a été déterminé en fonction de la personne interrogée.

Les entretiens ont été enregistrés sur des dictaphones et les données ont été transcrites de façon

verbatim en français. La confidentialité a été observée car les noms et prénoms, et les identifiants des

participants n’ont pas été enregistrés sur les dictaphones.

Documents utilisés :

Politique Nationale de Développement de l’Agriculture,

Politique Nationale de Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle

CREDD : Cadre de Relance Économique et de Développement Durable

Politique Nationale de l’Investissement dans le Secteur Agricole

Politique Nationale de Développement de la Pêche et de l’Aquaculture

Enquête Agricole de Conjoncture par la CPS et INSTAT

Page 58: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire 49

Enquête Nationale de Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle

Rapports de la FAO et du PAM

Document de synthèse GTPA (Groupe Technique Pluridisciplinaire d’Assistance Agro

météorologique)

Rapports de l’Observatoire du Marché Agricole

Bulletin de l’Observatoire du Marché Agricole

Politique Nationale de Genre

Loi d’orientation agricole

Plan d'Action Multisectoriel de la Nutrition

Politique Nationale Domaniale et Foncière

Politique Nationale de Nutrition

Politique Nationale d'Action Humanitaire

Politique Nationale de la protection sociale

Stratégie Nationale de Sécurité Alimentaire

Fiche de Communication du Cadre Harmonisé

Note Technique d'Évaluation de la Situation Alimentaire

Système local d’Information Sanitaire

Système national d’Information Sanitaire

Plan national de Réponse

Bulletin Système d’Alerte Précoce

Documents Flash sur la Santé Animale

Enquête Démographique et de Santé

MICS

SMART

Enquête modulaire permanente

Matrice de Suivi des Déplacements

Rapport sur le mouvement des populations

Rapport cluster sécurité alimentaire

Entretiens avec les intervenants clés :

Le conseil régional

Le gouverneur de région

Les leaders religieux

Chambre régionale de l’agriculture, Organisations paysannes

Société civile

Les services techniques

Direction régionale de la santé

Direction régionale du développement social et économie solidaire

Direction régionale du commerce de la consommation et de la concurrence

Direction régionale de la statistique et de l’informatique de l’aménagement et de la population

SAP : Système d’Alerte Précoce régional

OMA : Observatoire du Marché Agricole

Office des Produits Agricoles du Mali Régional

Direction régionale de l’Agriculture

Direction régionale la Production et de l’Industrie Animale

Page 59: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 50

Direction régionale de la Protection Civile

Direction régionale des Services Vétérinaires,

Direction régionale de la Pêche

Direction régionale des Eaux et Forêts

Chambre régionale de commerce et de l’industrie

Centre de Recherche Agricole

Agence Nationale de la Météorologie

ONG: Save the Children, Care Mali, Water Land

FAO, PAM

Les intervenants clés dans le cercle:

Le préfet

Le conseil de cercle

Chefs secteurs des Services techniques locaux excepté SAP

Les intervenants clés dans le cercle

Le Préfet

Les élus communaux

Leaders religieux

Société Civile

Chefs des Services Techniques au niveau Cercle

Les intervenants au niveau communal :

Le sous-préfet

Les élus communaux

Les leaders religieux

Les chefs d’antennes des services techniques

Les organisations paysannes.

Page 60: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire 51

Annexe 2. Tableaux Tableau 6. Pourcentage des principales sources des céréales par région, 2018

Région %

Niv

eau

de

Sto

ck c

éré

ale

s kg

des

Pro

pre

pro

du

cti

on

principales

Ach

at

(cash

)

sources

Ach

at

à c

réd

it

Em

pru

nt

En

traid

e s

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le

Aid

e

hu

man

itair

e

Tro

c

Tra

vail c

on

tre

no

urr

itu

re

Gla

nage

ap

rès

réco

lte

Kayes 461,46 23,90 68,90 4,70 0,20 1,60 0,50 0,10 0,10 0,00

Koulikoro 493,48 39,80 54,60 4,20 0,00 1,20 0,20 0,00 0,00 0,00

Sikasso 925,21 66,40 31,40 1,30 0,00 0,80 0,00 0,00 0,00 0,00

Ségou 802,26 67,10 29,50 1,20 0,20 1,00 0,50 0,20 0,10 0,00

Mopti 401,94 45,60 46,40 2,30 0,20 2,30 3,00 0,20 0,10 0,00

Tombouctou 148,93 19,40 57,10 17,50 1,30 0,60 3,70 0,20 0,10 0,00

Gao 37,2 2,00 82,00 10,20 0,30 0,80 4,20 0,10 0,10 0,20

Kidal 59,22 0,20 90,90 5,70 0,20 2,40 0,00 0,00 0,20 0,40

Bamako 171,71 1,30 90,50 6,00 0,00 2,10 0,10 0,00 0,00 0,00

National 493,57 39,50 53,20 4,40 0,20 1,40 1,20 0,10 0,10 0,00

Source: ENSAN, 2018

Page 61: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 52

Tableau 7. Groupe de consommation alimentaire par région en Septembre 2018.

Source: ENSA 2018

Tableau 8. Indicateurs de la malnutrition chez les enfants par région, 2018

Statut Nutritionnel Prévalence par région (%)

Ségou Mopti Tombouctou Gao

Retard de croissance 28,6 30,4 29,5 33,4

Insuffisance Pondérale 19,5 18,9 25,2 24,3

Émaciation 10,0 10,1 14,7 10,4

Source: INSTAT et al, 2019

Région SCA Groups

Pauvre (%) Limite (%) Acceptable (%)

Kayes 5,10 16,40 78,60

Koulikoro 8,80 12,40 78,70

Sikasso 7,30 17,10 75,60

Ségou 4,60 12,60 82,80

Mopti 10,90 24,10 65,10

Tombouctou 4,30 17,00 78,70

Gao 4,30 17,50 78,20

Kidal 5,90 16,70 77,50

Bamako 0,30 3,40 96,30

Total 5,90 14,70 79,50

Page 62: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire 53

Tableau 9. Niveau des dépenses alimentaires mensuelles par région, 2018 (FCFA)

Source: ENSAN 2018.

Tableau 10. Taux de fréquentation scolaire dans l’ensemble des régions du Mali, 2018

Source: INSTAT et al, 2019.

Régions Dépense alimentaire Dépense non alimentaire

Part des dépenses

alimentaires dans les

dépenses globales

Moyenne Médiane Moyenne Médiane Moyenne Médiane

Kayes 96 489 78 000 49 365 31 125 70 71

Koulikoro 83 339 66 400 54 888 37 750 64 64

Sikasso 82 910 65 400 75 481 53 554 56 56

Ségou 76 771 61 600 47 310 29 967 66 67

Mopti 59 554 51 000 24 223 15 383 75 78

Tombouctou 72 078 65 000 32 672 22 617 71 71

Gao 53 795 50 750 14 996 11 667 80 82

Kidal 48 977 46 500 8 930 6 500 86 87

Bamako 109 713 90 900 125 762 86 000 52 52

Total 80 652 64 300 57 142 33 042 66 66

Taux de fréquentation scolaire Primaire Secondaire

Kayes 55,9 20,6

Koulikoro 51,9 30,2

Sikasso 53,6 26,0

Ségou 41,3 25,0

Mopti 39,2 22,0

Tombouctou 31,5 17,8

Gao 43,0 23,4

Kidal 17,2 2,0

Bamako 69,0 54,0

Page 63: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 54

Tableau 11. Situation des écoles au Mali en janvier 2018

Région

Nombre total

d’écoles dans la

région

Écoles fermées

Nombre d’écoles

fermées en

janvier 2018

Pourcentage Nombre d’élèves

inscrits dans les écoles

fermées

Gao 506 76 15,0 885

Kidal 73 32 43,8 203

Ménaka 139 56 40,3 ‑

Mopti 1 801 413 22,9 40 291

Ségou 1 486 21 1,4 1 313

Tombouctou 575 75 13,0 7 094

Total 4 580 673 14,7 49 786

Source: World Bank Group, 2018.

Page 64: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire 55

Tableau 12. Estimation du revenu total (en cash - FCFA) des ménages en septembre 2018 et 2017 par Zone de

Moyens d’Existence (ZME)

Source: ENSA, 2018

ZME 2018 2017 Evolution (%)

Moyenne Médiane Moyenne Médiane Moyenne Médiane

Nomadisme et commerce transsaharien 69 800 65 000 99 746 70 000 -30 -7

Nord : élevage transhumant 81 188 60 000 70 947 53 000 14 13

Boucle du Niger : riz et pêche 71 279 60 000 68 724 55 000 4 9

Centre : élevage transhumant, mil et

transfert

91 171 75 000 55 532 50 000 64 50

Plateau Dogon : mil et échalote 50 235 35 000 106 247 70 000 -53 -50

Delta du Niger : riz, élevage et pêche 82 541 65 000 85 843 60 000 -4 8

Office du Niger : riz et maraîchage 125 639 90 000 152 773 135 000 -18 -33

Nord-ouest sorgho : transfert et élevage 147 878 105 000 125 287 100 000 18 5

Centre : sorgho et mil 90 571 75 000 97 937 66 500 -8 13

Sud-est sorgho : mil et coton 94 082 75 000 93 866 75 000 0 0

Sud maïs : coton et fruits 121 697 90 000 96 460 75 000 26 20

Sud-ouest maïs : élevage et orpaillage 153 875 127 000 121 424 95 000 27 34

Centre-Est : mil et élevage transhumant 100 818 90 000 71 416 60 000 41 50

Zone de lacs : mil et sorgho 86 550 75 000 94 872 90 000 -9 -17

Ouest arachide : sorgho et maïs 91 939 75 000 99 077 75 000 -7 0

Sud-ouest : orpaillage et maïs 136 472 105 000 129 653 105 000 5 0

Milieu urbain 189 050 130 000 154 706 125 000 22 4

Page 65: Sécurité Alimentaire au Mali: Étude Documentaire

Sécurité Alimentaire au Mali : Étude Documentaire| Décembre 2019 56

Tableau 13. Indicateurs de santé maternelle par région au Mali, 2018

Santé maternelle

Régions Consultation

prénatale par un

prestataire

formé

Accouchements

déroulés dans un

établissement de

santé

Accouchements

assistés par un

agent formé

2 injections ou plus

durant la dernière

grossesse de la

naissance vivante la

plus récente

Kayes 73,8 55,6 56,8 33,8

Koulikoro 83,8 77,7 78,9 36,1

Sikasso 76,1 71 70,8 33,6

Ségou 76 57,2 57,9 34,6

Mopti 79,1 53,5 52,6 36,2

Tombouctou 66,6 30,5 31,3 27,4

Gao 59,7 53,6 51 25,9

Kidal 22,9 23,9 25,3 7,6

Bamako 95,7 96,7 97,5 44,8

Source: EDS, 2018

Tableau 14. Sources d’eau potable par région, 2018

Régions Source améliorée

Eau potable

d'eau potable

par région

Source non améliorée

potable

d'eau

Kayes 66,5 33,5

Koulikoro 70,5 29,5

Sikasso 66,3 33,7

Ségou 63,0 37,0

Mopti 46,8 53,2

Tombouctou 74,5 25,5

Gao 65,5 34,5

Kidal 68,7 31,3

Bamako 99,0 1,0

Source: INSTAT et al, 2019