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… même si, dans ce cas précis, l’information ne disparait pas totalement.
On appelle « secret d’Etat » ces informations qu’un pouvoir souhaite cacher à tout
le monde ; cela se fait au nom de la « raison d’Etat » (intérêt supérieur du pays sur
l’intérêt de ses habitants).
17 octobre 1961, une manifestation en faveur de la fin de la guerre en Algérie est
violemment réprimée à Paris…
… par un étrange glissement mémoriel, les
deux événements tendent à se fondre
ensemble conduisant à une invisibilisation
de la manifestation la plus meurtrière et la
plus gênante pour le pouvoir en place.
On a donc la disparition de certains
événements de la mémoire collective
(notamment à travers les programmes
scolaires qui ne parlent pas de certains
événements). Par exemple, des manuels
scolaires de 1948 parlaient de
l’indépendance de l’Inde en 1947… mais
pas du tout de la période de la Seconde
Guerre mondiale en France.
Guingamp : Nuit du 16 au 17 février 2018
Des événements peuvent aussi disparaître de l’Histoire connue du fait de la disparition de sources (une sorte de « secret accidentel »)
L’incendie de la bibliothèque d’Alexandrie fait partie de ces moments tragiques qui
ont fait disparaitre de nombreux ouvrages souvent uniques…
… Parfois les incendies ne sont pas qu’accidentels (exemple des archives sensibles
brûlées en 1914 et 1940 pour éviter qu’elles tombent aux mains des Allemands)
Aujourd’hui, on commence seulement à
s’inquiéter de la disparition des données
numériques car, bien souvent, peu a été
fait pour assurer leur préservation : dans
les services de l’Etat comme dans les
entreprises ou chez les citoyens.
Depuis l'avènement et le développement de la psychologie, les sociétés contemporaines ont compris les vertus thérapeutiques de la parole, du récit de soi à un autre. Dès le XIXe siècle cependant, des hommes et des femmes ont pour habitude de livrer le récit de leur vie personnelle à un directeur de conscience à qui l'on confie ses tourments intimes. On évoque avec lui ce dont on ne peut parler ailleurs : les secrets de l'âme et du corps. De son côté, le directeur doit guider sur la voie du progrès moral. Bien loin cependant de toujours se soumettre à cette exigence de progrès, hommes et femmes dirigés y voient une occasion de parler d'eux-mêmes et de s'observer, d'ouvrir une " chambre à soi " : les femmes y content les pesanteurs de la vie conjugale et domestique, les hommes leur difficulté à remplir leurs devoirs : se marier, entretenir une famille. Préoccupations morales et spirituelles, inquiétudes existentielles, désirs de liberté se lisent dans ces lettres qui portent bien souvent la mention " à brûler ".
Ces différents exemples montrent que,
par l’appui sur des sources diverses (et
parfois improbables), en croisant celles-
ci, les historiens et les historiennes
peuvent accéder à des choses très
intimes (univers de personnes
« anonymes » ; pensées) tout comme à
ce que les « grands » détenant le pouvoir
avaient tout intérêt à cacher au présent…
et parfois même au futur.
Une partie des secrets difficilement pénétrables par l’historien est liée à la
destruction ou à la non-existence des sources : sans celles-ci, difficile de savoir. Par
exemple, pour beaucoup de personnages historiques jusqu’aux trois derniers
siècles, on ne connaît pas toujours la date et le lieu de naissance, le déroulement
des premières années (personne n’a pris la peine de le consigner quelque part
puisqu’on ne pouvait pas savoir que le personnage deviendrait important).
Il se peut aussi qu’on se rende compte que les sources dont on dispose posent
problème (comme dans le cas de correspondance qu’on prend au premier degré
alors qu’il peut s’agir de formules codées disant tout autre chose). Ce secret n’est
pas toujours percé à jour… ce qui peut conduire à des interprétations erronées du
passé.
Dans ces périodes qui restent sombres, sont peu ou pas documentées et restent
pleines de secrets, peuvent s’engouffrer des personnes mues par des intérêts très
divers…
Les adeptes d’une histoire contrefactuelle (qui a sa traduction artistique avec
l’uchronie) qui cherchent à explorer d’autres futurs possibles (« non advenus ») pour
sortir d’une lecture téléologique de l’Histoire.
Les fantasmeurs qui cherchent à démontrer des hypothèses un peu farfelues ou à
mettre à jour des lieux disparus… Et qui fatiguent quand même pas mal les
professionnels de l’Histoire…
Les complotistes de tous poils pour qui un secret a été tendu par-dessus des vérités
historiques qui dérangent : c’est le prétexte à la remise en cause d’événements du
passé (cas du négationnisme par exemple) ou de théories scientifiques (théorie de
l’évolution de Darwin par exemple).
Les historiens William Blanc,
Aurore Chéry et Christophe
Naudin ont étudié le cas de ces
personnages médiatiques et
populaires (souvent invités dans
des émissions de grande écoute…
quand ils ne les animent pas).
Ils se retrouvent tous globalement
autour de l’idée qu’on cache la
vraie histoire, celle qu’on baptise
aujourd’hui du nom de « roman
national », une histoire fondée sur
quelques grands personnages qui
auraient fait la France telle qu’elle
est (ou supposée être). Cela les
conduit à défendre des idées très
marquées politiquement qui
seraient la vérité vraie face à des
tabous ou des secrets imposés par
les historiens universitaires.
La résolution d'un des plus grands mystères de l'Histoire : la guerre de Troie, grâce aux deux œuvres majeures de l'Antiquité, l'Iliade et l'Odyssée. Pour la première fois, Iman Wilkens développe la thèse que la guerre de Troie ne s'est pas déroulée au Proche-Orient mais en Angleterre et qu'Ulysse a voyagé non pas en Méditerranée mais en Europe du Nord et en Atlantique.
A force de subir, les
historiens de
profession (qui
travaillent donc sur
les sources… et ne
se contentent pas
d’en montrer juste
quelques-unes)
peuvent enrager ou
essayer de démonter
par l’humour le partis
pris de ces
« historiens de
garde ».
On est dans un
affrontement entre
professionnels vantant
leur expertise et
« pseudo historiens »
se présentant comme
les seuls valables car
n’étant pas
« poussiéreux » et
« ennuyeux ».
Note : le fameux
ouvrage pédagogique
était une suite de
double page consacrée
aux rois de France…
Cette idée qu’on cache aux Français la véritable Histoire de France est de plus en
plus partagée (retours fréquents de ces questions via les réseaux sociaux
notamment). Mouvement initié à droite et à l’extrême-droite, il convertit aussi d’autres
personnes qui pensent qu’effectivement tout était mieux avant, qu’on connaissait
mieux l’Histoire et que c’est la faute aux profs si tout ça s’est dégradé (les jeunes ne
connaissent plus les dates etc…).
Il faut dire que la classe politique instrumentalise sans cesse et de plus en plus
l’Histoire en la réécrivant selon ses intérêts (Mélenchon affirme que c’est la rue qui a
renversé Hitler…)
Les nouveaux programmes de lycée en Histoire acte un retour à ce roman
national : on y parle plus de la France, des événements politiques, des grands
hommes (qui sont très rarement des femmes), des bons Français (qui ne
viennent donc pas d’ailleurs). Au nom d’une lutte contre ce fameux secret qui
cacherait l’essentiel de leur histoire aux Français…