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Numéro 2, mai 2016 Le magazine de POINT FORT Burkina Faso ACTUALITÉ Des casseroles sales dans nos rayons

Solidarité 2/2016

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Journal de Solidar Suisse

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Numéro 2, mai 2016

Le magazine de

POINT FORTBurkina Faso

ACTUALITÉDes casseroles sales dans nos rayons

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Esther MaurerDirectrice de Solidar Suisse

2 ÉDITORIAL

REVUE DE PRESSE

Chère lectrice, cher lecteur,Bon anniversaire, Solidar Suisse! Notre organisation fête ses 80 ans cette année, ce qui en fait l’une des plus anciennes œuvres d’entraide helvétiques – une organisation qui, si elle reste attachée à la tradition et défend toujours les mêmes valeurs, n’en est pas moins synonyme de dynamisme, de renou­vellement et d’innovation. Il n’y aura toute­fois pas de célébration, de banquet ou d’ouvrage commémoratif pour marquer cet anniversaire, car nous n’avons pas le cœur à la fête: à Berne et dans les médias, l’efficacité de l’aide au dévelop­pement est remise en question semaine après semaine, les échecs dans les pays du Sud, pointés du doigt, fournissent des arguments à ceux qui, de tout temps, ont cherché des excuses pour ne pas ouvrir leur portemonnaie pour secourir les moins nantis. Certaines forces politiques pré­parent le terrain afin de ne pas appliquer la décision prise par le Parlement il y a cinq ans, qui prévoit que la Suisse, en tant que pays riche du monde industrialisé, alloue progressivement 0,5 % de son PIB aux populations défavorisées des pays les plus pauvres. D’ici la parution de ce numéro, le Parlement pourrait bien déci­

der, de manière irresponsable, des coupes claires dans l’aide au développement.Certes, il y a eu des ratés et des échecs. Mais à quelle aune jugeons­nous? Si, en Suisse, nous n’avons toujours pas réussi à unifier les programmes scolaires, comment espérer que l’Afrique

de l’Ouest le fasse en trois ou cinq ans? Si, chez nous, des communes de montag­ne construisent des routes forestières surdimensionnées pour la simple raison que celles­ci bénéficient de subsides fédéraux, comment s’étonner qu’un châ­teau d’eau entièrement financé par des tiers se dresse au mauvais endroit dans le sud du Sahel?En 80 ans, Solidar a aussi essuyé des échecs. Mais avec nos organisations par tenaires, nous avons toujours tiré les leçons de nos erreurs. C’est aussi cela, le développement. Et le résultat global est remarquable. Comme au Burkina Faso.

Ce n’est pas de nos 80 ans que nous sommes fiers, mais de l’histoire, des valeurs et de l’engagement que nous partageons. Votre fidélité et votre solidarité font notre fierté.

Esther Maurer

29.1.2016Les casseroles des fabricants de poêlonsQuelque 40 % des casseroles vendues en Suisse proviennent de Chine. Or, les conditions de travail dans les usines y sont exécrables, dénonce Solidar Suisse, qui demande aux distributeurs et fabri­cants suisses qui commercialisent ces casseroles de s’attaquer au problème. L’examen a révélé 27 graves manque­ments, dont la majorité est non seule­ment contraire aux standards sociaux internationaux, mais aussi aux droits du travail chinois. Aucune des entreprises examinées ne verse les prestations so­ciales prescrites par la loi.

12.2.2016A Neuchâtel, des enchères au profit de l’aide aux réfugiésLa galerie C, à Neuchâtel, accueille jusqu’au 27 février une exposition collec­tive baptisée «Papier, bitte!» et consacrée aux frontières. En marge de cet accro­chage, elle organise le 17 février une vente aux enchères dont les bénéfices seront reversés à l’association Recif, qui favorise l’intégration des femmes dans le canton de Neuchâtel, et à un projet de Solidar Suisse, active dans les camps de réfugiés au Liban. Une trentaine d’artistes d’horizons divers offriront qui une photographie, qui une peinture, une lecture ou un concert privé.

16.2.2016Un faux Blatter se paie les candidats à la présidenceEt si Joseph Blatter s’exprimait pour une fois en toute franchise sur les can­didats à la prochaine élection pour la pré­sidence de la FIFA? C’est ce qu’a tenté d’imaginer et de produire Solidar Suisse. Par cette action, l’ONG espère inciter le grand public à signer une lettre qui sera expédiée au futur nouveau président de la FIFA, l’enjoignant notamment à amé­ liorer les conditions de travail des ou­vriers travaillant sur les chantiers des stades des futures Coupes du monde, en Russie (2018) et au Qatar (2022).

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ACTUALITÉ Heures de travail excessives, salaires à la pièce, conditions de sécurité déficientes: nos casse­roles sont souvent produites dans des fabriques chinoises aux conditions indignes.

POINT FORTL’analphabétisme, le changement climatique et le chômage, mais aussi une société civile dynamique caractérisent les réalités multiples du Burkina. 4

POINT FORT Burkina Faso 4 Travail des enfants, agriculture en péril, mobilisation populaire: les multiples facettes d’un pays 6 Des techniques agricoles ciblées permettent de lutter contre l’érosion et les conséquences du changement climatique 8 ACTUALITÉ Le jeu de l’oie des 80 ans de Solidar Suisse 10 La Suisse rate une occasion d’ancrer les marchés publics équitables dans sa législation 13 Népal: un an après le tremblement de terre, la reconstruction a démarré 15 Un rapport de Solidar révèle les conditions misérables dans les fabriques chinoises où sont produites nos casseroles 17 PORTRAIT La jeune burkinabée Abzèta Koana a suivi une formation de ferblantière et va créer sa propre entreprise 18 CHRONIQUE 9 BRÈVES 12 & 16 CONCOURS 14

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Editeur:Solidar Suisse, Quellenstrasse 31, case postale 2228, 8031 Zurich, Tél. 021 601 21 61, email: [email protected], www.solidar.ch CP 10­14739­9 Lausanne. Membre du réseau européen SolidarRédaction:Katja Schurter (rédactrice responsable), Rosanna Clarelli, Eva Geel, Lionel Frei, Cyrill Rogger

Layout: Binkert Partner, www.binkertpartner.ch / Spinas Civil VoicesTraduction: Evelyne Carrel, Petra Varilek et Jean­François ZurbriggenCorrection: Jeannine Horni, Catherine VallatImpression et expédition:Unionsdruckerei/subito AG, Platz 8, 8201 SchaffhouseParaît quatre fois par an. Tirage 37 000 ex.

Le prix de l’abonnement est compris dans la cotisation (membres individuels 70.– par an minimum, organisations 250.– minimum). Imprimé sur papier recyclé et respectueux de l’environnement.Photo de couverture: une Burkinabé lors d’un cours d’alphabétisation Photo: Andreas Schwaiger. Dernière page: Envoyez­nous vos photos souvenirs! Photo: Solidar Suisse.

IMPRESSUM

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Au Burkina Faso, les enfants travaillent souvent pour aider leurs parents, comme ces jeunes vachers.

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POINT FORT

BURKINA FASOLe Burkina Faso compte parmi les pays les plus pauvres du monde. Plus de la moitié de la population est analphabète. Les enfants quittent l’école après quelques années à peine et beaucoup travaillent dans les mines d’or, dans les rues de Ouagadougou, dans les champs. Pour les jeunes, l’avenir est bouché. Par ailleurs, les changements climatiques menacent les personnes qui vivent de l’agriculture, soit 80 % de la popu­lation. Malgré ces problèmes, les Burkinabés ont, au cours des dix­huit derniers mois, renversé un régime autoritaire sans effusion de sang et élu démocratiquement un président. Portrait d’un pays aux multiples facettes, où Solidar Suisse est à l’œuvre depuis plus de quarante ans. Photo: Jürg Gasser

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C’est à Thomas Sankara, président du pays de 1983 à 1987, que l’ancienne Haute­Volta doit son nom de Burkina Faso – le «Pays des hommes intègres» (voir Solidarité 3/2015). Un nom auquel les Burkinabés ont fait honneur ces dix­huit derniers mois: en octobre 2014, ils ont chassé le président, Blaise Compaoré qui, après vingt­sept ans d’un régime au­toritaire, voulait modifier la Constitution pour se maintenir au pouvoir. Une tenta­

tive de putsch en septembre dernier a poussé la population à descendre dans les rues de la capitale, et cette mobilisa­tion populaire – la «ruecratie» – a gagné le reste du pays à la vitesse de l’éclair. Malgré la perte de revenu qu’aucune indemnité ne viendrait compenser, même les petits commerçants les plus pauvres ont rejoint la grève générale. Après une semaine de protestations et d’insécurité, le calme est revenu; le pays a retrouvé un

gouvernement civil, et Roch Marc Kaboré a été élu démocratiquement à la prési­dence en novembre 2015. Autant d’évé­nements qui témoignent d’une culture de la désobéissance civile et de la haute moralité que l’on attend des politiciens. «La grande gagnante de ces élections, c’est la démocratie. On ne peut que louer la maturité de la population burkinabé», résume le responsable du bureau de Solidar au Burkina Faso, Dieudonné

Une société civile qui défend ses droits avec succès malgré la pauvreté et un taux d’analphabétisme élevé: au Burkina Faso, les contradictions ne manquent pas.Texte: Katja Schurter. Photos: Ricus Jacometti

LE BURKINA INVENTE LA «RUECRATIE»

Au Burkina Faso, pouvoir suivre les leçons dans sa langue

maternelle ne va pas de soi.

Burkina Faso

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Zaongo. Solidar Suisse a contribué à la participation dans les communes en infor­mant la population et en l’encourageant à s’inscrire au registre électoral. Par rapport à 2012, le nombre d’électrices et d’élec­teurs enregistrés dans la région du Pla­teau Central a augmenté de 27 %.

Des leçons que les enfants comprennentLe Burkina Faso compte parmi les pays les plus pauvres du monde. Plus de la moitié de la population vit avec moins

de 1,25 dollar par jour et le taux d’anal­phabètes s’élève à 65 %. La plupart des enfants ne comprennent pas la langue officielle utilisée à l’école: alors que l’on dénombre 49 langues différentes au Burkina Faso, l’enseignement est géné­ralement donné en français, l’ancienne langue coloniale. Pour améliorer la situa­tion, Solidar Suisse a lancé, en 1994, un programme d’enseignement bilingue: les cours sont donnés dans la langue maternelle locale et en français en paral­lèle. Le succès ne s’est pas fait attendre: au vu des résultats des premiers projets pilotes menés au degré primaire, Solidar a élargi le modèle aux degrés préscolaire et secondaire. En 2007, l’enseignement bilingue a été inscrit dans la loi nationale

sur l’éducation. Ce programme, considé­ré comme l’un des projets de réforme les plus réussis en Afrique, devrait bientôt trouver son aboutissement. Si, fin 2015, seules 200 écoles primaires publiques (2 %) avaient introduit les leçons bilin­gues, on s’achemine pas à pas vers la généralisation de ce système: l’ensei­gnement bilingue a été intégré dans la formation des enseignants en 2014 et bénéficie d’un budget sept fois plus élevé qu’il y a cinq ans. Solidar transfère actuellement son savoir­faire à l’Etat bur­kinabé pour que celui­ci puisse étendre le modèle à tout le pays, et notre orga­nisation se retirer progressivement du secteur de l’éducation formelle.Solidar continue toutefois à soutenir les jeunes qui n’ont pas suivi une scolarité normale – soit deux tiers des jeunes du pays – en leur offrant la possibilité de rattraper le programme scolaire, d’effec­tuer une formation professionnelle et de faire un stage pour avoir une première expérience pratique. Les plus motivés bénéficient en outre d’un coaching pour

pouvoir créer leur propre petite entreprise et la financer grâce au microcrédit (voir page 18). Cette formation informelle cont­ribue également à combattre le chômage, qui touche près de 75 % des jeunes dans les régions rurales.

Une agriculture touchée par le réchauffementSolidar soutient aussi les adultes en don­nant par exemple des cours d’alphabé­tisation et de français, car de nombreux Burkinabés ne sont jamais allés à l’école. 80 % de la population vit de l’agriculture. Mais seules les personnes qui maîtrisent le français à l’oral et à l’écrit ont une chance de participer à la vie publique et de vendre leurs produits sur les marchés où on parle d’autres langues que la leur.Les effets du réchauffement climatique, de plus en plus perceptibles au Burkina Faso, constituent un autre problème de taille pour les agriculteurs: avec une sai­son des pluies plus courte, la sécheresse

«Nous avons des fonde-ments historiques solides qui favorisent un esprit de paix et de tolérance.»

va croissant. Les techniques agricoles enseignées par Solidar permettent de retenir l’eau ou de fabriquer du compost et d’augmenter ainsi la production (voir page 8).

50 % d’enfants dans les mines d’orAu Burkina Faso, les enfants sont sou­vent obligés de travailler pour soutenir leur famille et beaucoup n’ont pas d’autre solution que de descendre au fond des mines. Selon l’Unicef, les enfants consti­tuent jusqu’à 50 % de la main­d’œuvre dans les puits. Conséquences: pas de scolarité, des problèmes de santé, un salaire de misère et aucune perspective d’avenir. La Suisse profite aussi du travail des enfants: 70 % de l’or mondial est raffiné dans notre pays. Le commerce de l’or a connu un formidable essor au Burkina Faso ces dernières années. De­puis 2009, le pays exporte plus d’or que de coton. En 2013, le métal précieux représentait 80 % des exportations; en 2014, il contribuait déjà pour 20 % au produit intérieur brut. Solidar s’engage sur place pour lutter contre le travail des enfants et l’analphabétisme et offrir des perspectives aux jeunes Burkinabés.

De multiples défis à relever La poursuite du processus de démocrati­sation constitue une autre préoccupation majeure, surtout après les attentats per­pétrés par des extrémistes islamistes à Ouagadougou le 16 janvier 2016. «Le Burkina Faso repose sur des fondements historiques solides qui favorisent un esprit de paix et de tolérance, estime Dieudonné Zaongo. Si nous nous atta­quons aux multiples défis qui se posent actuellement sans que la question sécu­ritaire l’emporte sur tout le reste, nous sortirons de cette période difficile plus forts qu’avant.»

Katja Schurter est rédactrice responsable de Solidarité.

7POINT FORT

Carte: Jon Harald Søby

Burkina Faso

Ouagadougou

Plateau Central

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«Ce vent et cette poussière! Avant ça soufflait comme ça en février. Mainte­nant, c’est déjà là en janvier», témoigne Hamidou Ilboudo, presque un ancêtre du haut de ses 60 ans dans un pays où l’espérance de vie est de 55 ans. Les études scientifiques attestent des impacts du changement climatique sur le pays: la moyenne annuelle de la plu­viométrie a par exemple baissé de 200 millimètres en trente ans. Une réalité aux conséquences directes pour Ilboudo, qui travaille la terre dans la commune de Boussé, dans la région du Plateau Central: «Quand j’étais enfant, la saison des pluies pouvait durer de mai jusqu’à novembre. Mais maintenant, en mai, la pluie n’est pas là, on doit parfois attendre jusqu’en août pour semer.»

Des techniques agricolesOutre le changement climatique, les terres déjà fragiles du Burkina sont soumises à d’importantes pressions écologiques, telle l’exploitation des forêts pour le bois de chauffage ou l’augmenta­tion de la population des troupeaux. Le Sahara progresse année après année et mange les terres arables, posant des problèmes majeurs pour les trois quarts de la population qui vivent de l’agriculture. Or, garantir des récoltes suffisantes est essentiel dans un pays où près d’un ménage sur cinq est en situation d’insécurité alimen­taire selon le Programme alimentaire mondial. Pour cela, des techniques tradi­tionnelles sont réintroduites. Appelées TCS pour «Techniques de Conservation du Sol», elles permettent d’améliorer la

productivité des récoltes, tout en pré­servant l’éco système. Elles ont pour nom: fumure organique, zaï et cordons pierreux.

La fumure est réalisée grâce à des «fosses fumières». Une fosse, renforcée avec du ciment, est creusée. Tout au fond de celle­ci, on dépose du sable fin, puis de la cendre, des débris végétaux et des débris animaux. Arrosé généreusement avec 500 litre d’eau toutes les deux ou quatre semaines, le contenu de la fosse

«On cultive des champs qu’on ne pouvait plus utiliser avant à cause de la dégradation des sols.»

LA LUTTE CONTRE LE DÉSERT Au Burkina Faso depuis trente ans, les terres se craquellent, le sable malmène les cultures, l’eau se fait plus rare. Des techniques agricoles permettent cependant d’organiser la lutte. Texte: Lionel Frei. Photos: Andreas Schwaiger, Solidar, CCAFS

Des paysan-ne-s construisent un mur de

pierre pour protéger les champs de l’érosion.

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est régulièrement mélangé. Au final, l’en­grais naturel obtenu remplace avantageu­sement les coûteux intrants chimiques.

Le zaï est une technique culturale tra­ditionnelle réapparue dans les années 1980 suite aux fortes sécheresses. Bien que lourd en main­d’œuvre – plus de 300 heures par hectare – le zaï empêche l’érosion et les ruissellements, mais sur­tout permet de récupérer des terres considérées comme stériles sans cette technique. Celle­ci consiste à creuser de petits bassins de 30 centimètres à inter­valles réguliers, dans lesquels les graines sont plantées. Les trous retiennent la pluie et protègent les cultures. La terre retirée du trou est déposée en croissant en aval des trous afin de limiter l’érosion. De la fumure est ajoutée dans les trous afin d’augmenter le rendement.

Les cordons pierreux renforcent la lutte contre l’érosion des sols. C’est un dispositif qui est placé dans les champs et qui permet de limiter la vitesse de ruissellement de l’eau, et donc de lutter contre l’érosion. Il permet aussi de con­tenir la fumure dans les champs: sans lui, la fumure serait emportée par l’eau.

Des revenus améliorés«Nous n’avions pas connaissance de ces techniques. On faisait déjà des cordons pierreux, mais pas de la même façon que celle qu’on nous a apprise. Le zaï et les demi­lunes, on ne connaissait pas du tout.

Et la fumure qu’on utilisait n’était pas dé­composée», explique Hamidou Ilboudo, qui fait partie d’un groupement de paysan­ ne­s, membres de l’association Tind Yalgré. Comme 430 autres personnes, il a suivi une formation aux Techniques de Conser­vation du Sol soutenue par Solidar Suisse. Les bénéficiaires ont aussi reçu le maté­riel nécessaire pour mettre en œuvre les techniques apprises: marteau, barres à mine, brouettes, ciment, etc. Aujourd’hui Hamidou peut faire vivre les 15 personnes qu’il a à sa charge, enfants et petits­ enfants compris. Avec ses revenus élevés grâce à ces nouvelles techniques, il est en mesure de payer la scolarité de ses enfants. «On cultive de nouveaux champs qu’on ne pouvait plus utiliser avant à cause de la dégradation des sols. On a récupéré ces terres. Pour les champs qu’on cultivait déjà, le rendement a augmenté.»

Lionel Frei est responsable de la communication pour la Suisse romande.

Hamidou Ilboudo a pu améliorer son revenu grâce aux nouvelles techniques introduites. Une agricultrice prépare son champ avec la technique du zaï.

THEMA 9

Un versement de 90 francs permet à un agriculteur ou une agricultrice de se procurer les outils nécessaires pour mettre en oeuvre les techniques de conservation du sol ou fabriquer une fosse fumière pour une production d’engrais respectant l’environnement.

Votre don compte

9THEMA 9THEMA 9

An der WM sollen Strassenhändle-rInnen ihre Waren rund um die Stadien nicht verkaufen dürfen.

Hans­Jürg FehrPrésident de Solidar Suisse

C’est en 1936 que l’Œuvre suisse d’entraide ouvrière (OSEO) a vu le jour, succédant au «Secours aux enfants d’ouvriers», lui­même issu du «Secours prolétarien aux enfants». Elle réunissait alors trois sections: l’aide aux enfants, l’aide aux réfugiés et la Commission pour l’instruction et la formation con­tinue du Parti socialiste suisse et de l’Union syndicale suisse. Et 80 ans après, ces origines transparaissent encore dans les thèmes traités: les dix associations régionales de l’OSEO actives en Suisse s’engagent dans l’encadrement, la formation et l’intégra­tion des sans­emploi et des migrants. Solidar Suisse, l’ancien département international de l’OSEO, s’engage pour sa part à l’étranger, dans la coopéra­tion au développement et l’aide huma­nitaire en cas de catastrophe. Avec des organisations partenaires sur place, Solidar lutte contre la pauvreté, l’ex­ploitation et l’exclusion, car on ne peut malheureusement pas dire que la soli­darité soit moins nécessaire qu’autre­fois. En Suisse, de nombreuses per­sonnes ne profitent pas du bien­être matériel et risquent l’exclusion sociale. Et à l’étranger, plus encore n’ont pas accès à l’essentiel de ce qui fait que la vie vaut la peine d’être vécue. Ni les unes ni les autres ne peuvent s’en sortir seules. Avec une organisation comme l’OSEO ou Solidar Suisse pour les épauler, elles améliorent claire­ment leurs chances. Solidarité, effi­cacité: voilà ce dont elles ont besoin.

80 ans de solidarité

CHRONIQUE

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REVIVEZ EN JEU QUELQUES ÉTAPES DE SON HISTOIREJEU DE L’OIE POUR LES 80 ANS DE SOLIDAR SUISSE

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Règles du jeuLes joueurs lancent le dé tour à tour et avancent leur pion du nombre de

cases correspondant. S’il s’arrête sur une photo, le pion monte ou descend

en suivant la flèche jusqu’à la case située à l’extrémité. Le premier qui

parvient au but a gagné. Pour cela, il faudra toutefois qu’il ait obtenu

exactement le nombre de points nécessaires avec le dé. Chaque point de

plus l’oblige à reculer d’une case.

2 1936: Regina Kägi­Fuchsmann cofonde l’Œuvre suisse d’entraide

ouvrière dans l’objectif de porter assistance aux victimes de la guerre civile

espagnole, et notamment aux enfants. Avancez à la case 21

10 1939: La Seconde Guerre mondiale éclate. L’aide que l’OSEO

s’efforce d’apporter aux réfugiés en Suisse et dans divers pays européens

n’est hélas qu’une goutte d’eau dans la mer. Retournez à la case 6

12 1949: L’OSEO est l’une des premières œuvres d’entraide suisses à

pratiquer l’aide au développement à l’échelle internationale, notamment en

Grèce, en Palestine/Israël ainsi qu’en Yougoslavie. Avancez à la case 23

17 1979: La révolution sandiniste aboutit au Nicaragua. L’OSEO soutient

des campagnes d’alphabétisation. Avancez à la case 34

22 1984: L’OSEO accomplit un travail de pionnier en mettant en place

des programmes d’insertion pour les chômeurs, dont le nombre a fortement

augmenté en Suisse. Avancez jusqu’à la case 31

28 1986: Durant la guerre que mènent les Contras contre la révolution

sandiniste, des dizaines de milliers de civils sont assassinés.

Retournez à la case 11

33 2007: Le gouvernement burkinabé adopte le modèle de formation

multilingue proposé par Solidar Suisse. Avancez à la case 50

35 2010: Avec les syndicats sud­africains, Solidar obtient une amélioration

des conditions de travail pour les ouvriers du Mondial 2010. Quelque 13 715

personnes signent la pétition adressée à la Fifa. Avancez à la case 54

41 2011: En lançant son rating des communes, Solidar évalue à quel point

elles assument leurs responsabilités à l’égard du reste de la planète, en matière

d’achats équitables et d’aide au développement. Avancez à la case 49

47 2013: Des affrontements armés entre le parti gouvernemental

et celui de l’opposition portent préjudice à la population mozambicaine

comme aux projets menés par Solidar. Retournez à la case 42

52 2014: Le contrôle de qualité du lait cru, initié par Solidar,

est ancré dans la loi au Kosovo. Avancez à la case 55

56 2014: Le président de la Fifa Sepp Blatter rompt sa promesse

d’engager le débat avec la société civile brésilienne, sous l’égide de Solidar,

concernant l’organisation du prochain Mondial. Retournez à la case 37

58 2015: Solidar contribue à faire soutenir par le premier ministre

pakistanais Nawaz Sharif une nouvelle loi renforçant les droits des enfants.

Allez directement au but!

Plus d’infos sur l’histoire de Solidar: www.solidar.ch/jubile

Crédits photos: Solidar, Gipanic, Jürg Gasser, Brigit Ruprecht, Sabine Rock, Usman Ghani

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12 BRÈVES

Philippines: reconstruction en bonne voie Le 8 novembre 2013, Haiyan, le typhon le plus violent jamais mesuré, s’abattait sur l’archipel des Philippines. Atteignant des vitesses dépassant 275 km/h, il a détruit ou endommagé plus d’un million d’habitations. En 2014, une fois la phase de distribution de matériel de survie terminée, l’organisation a démarré le travail de reconstruction dans trois com­munes gravement affectées de l’île de Panay, parmi les plus fortement dévas­tées. Les familles touchées ont participé à la construction ou à la rénovation de pas moins de 3000 maisons résistantes aux typhons, ainsi que de 800 toilettes. On a veillé à privilégier les matériaux indi­gènes, à faible incidence écologique et

La Fifa saura-t-elle se réformer? Le 26 février dernier, Gianni Infantino était élu au poste de nouveau président de la Fifa. Saura­t­il mener l’organisation vers une nouvelle ère, exempte de viola­tions des droits de l’homme, de corrup­tion et d’exploitation? Solidar Suisse lui a adressé une lettre ouverte et invite les internautes à la signer. Cinq mille d’entre eux environ ont déjà répondu présent. En été 2015, Solidar a élaboré un code de durabilité à l’intention de la Fifa, dans lequel elle préconise un renforcement des exigences posées aux pays candi­dats, la définition de critères sociaux et l’adaptation des contrats avec les pays hôtes, ainsi que la mise en place de mécanismes de contrôle et de sanction. Ce code de durabilité a été envoyé à Gianni Infantino en accompagnement de la lettre, et nous nous efforçons d’établir avec lui un dialogue sur les modifications les plus urgentes aux modalités de tenue des Coupes du monde.

Spectacle pour les 50 ans de la FGC Pour célébrer ses 50 ans d’existence, la Fédération genevoise de coopération (FGC) a mis sur pied en janvier 2016 la pièce de théâtre dansé «Dans la peau du monde», pour attirer l’attention des jeunes sur les inégalités Nord­Sud et les motiver à s’engager pour plus de justice. La pièce a remporté un franc succès au sein des classes d’école genevoises venues la voir.

Appel contre la faim et la pauvreté Les efforts ininterrompus de la Suisse pour lutter contre la faim et la pauvreté sont aujourd’hui remis en question. Le Conseil fédéral réduit les budgets de l’aide bilatérale au développement, alors même qu’il s’est engagé de manière répétée à consacrer 0,7 % du revenu national à l’aide au développement. Il est intolérable que la Suisse économise sur la lutte contre la pauvreté alors que le manque de perspectives chasse toujours plus de personnes sur les routes. Plutôt que d’économiser au mauvais endroit, la Suisse devrait respecter les engage­

rapidement renouvelables, et le bambou s’est avéré idéal. Grâce aux dons de généreux contributeurs et au soutien de la Chaîne du Bonheur, Solidar prévoit d’achever le projet en mai prochain, comme prévu. www.solidar.ch/philippines

ments pris à l’automne 2015 et cont­ribuer à la réalisation des objectifs des Nations Unies pour le développement. Les ONG suisses ont adressé au Parle­ment un appel pour une Suisse ouverte et un renforcement de la coopération. Exigez vous aussi que nos politiques tiennent parole, en signant notre appel sur la page www.solidar.ch/appel

Afin de poursuivre ce travail de sensibi­lisation, Solidar Suisse Genève, groupe régional de Solidar Suisse et organisa­tion partenaire de la FGC, a mené trois ateliers dans des classes d’écoles pro­fessionnelles de la ville et des alentours. A l’issue d’un débat sur les droits hu­mains, les jeunes ont visionné un film consacré au projet «Lanzarte», mené par Solidar en Bolivie. Ils ont pris une part active à la discussion et se sont montrés très intéressés par les questions de droit

du travail et de responsabilité sociale des entreprises.

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Bon an mal an, la Confédération, les cantons et les communes achètent pour pas moins de 40 milliards de francs de biens et de services. En leur qualité de grands consommateurs, ils assument une responsabilité particulière en ma­tière d’achats durables et de garantie de conditions de travail équitables. Car bon nombre de marchandises produites dans le monde le sont au prix du travail d’en­fants, de salaires de misère et d’horaires de travail interminables.

En contradiction avec les objectifs de durabilité«La Confédération (…) montre l’exemple par son mode de consommation en exi­geant, dans le cadre des marchés publics, la livraison de produits et d’ouvrages fabriqués dans le respect des critères de rentabilité, de l’environnement, de la protection de la santé et, autant que possible, de la responsabilité sociétale.» Voilà mot pour mot la déclaration d’inten­tion trouvée dans la «Stratégie pour le développement durable 2016–2019» de la Confédération. La réalité, toutefois, est

tout autre. Alors que la loi sur les marchés publics se trouve en cours de révision, on omet d’y ancrer de vrais principes de durabilité. Malgré d’immenses besoins, rien ne bouge. Or non seulement la répu­tation du pays est en jeu, mais la contra­diction est totale avec nos objectifs de durabilité…

De beaux principes, sans ancrage légal…On laisse donc aux cantons et aux com­munes l’initiative d’imposer des critères sociaux et écologiques dans le cadre de leurs achats. Mais ne pas ancrer le principe de durabilité dans la loi revient à les mettre en situation fort délicate:

décideraient­ils d’appliquer des critères de durabilité et n’octroieraient­ils pas un marché à telle entreprise ne remplissant pas ces critères, celle­ci aurait beau jeu de se retourner contre eux et de contes­

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ter la procédure de sélection. Or il n’est pas prévu d’inscrire des critères de dura­bilité contraignants dans la loi en cours de révision! Cela contribuerait non seule­ment aux objectifs de durabilité, mais améliorerait la sécurité du droit et ins­taurerait des conditions de concurrence plus équitables.

Les achats équitables, c’est possibleDepuis des années, Solidar Suisse s’em­ploie à convaincre les pouvoirs publics de ne pas chercher toujours le meilleur prix, au risque que les biens et les services achetés aient été produits dans des conditions indignes. Pour la troisième fois, nous organisons notre rating des communes, destiné à vérifier si elles assu­ment leurs responsabilités par des achats durables et la solidarité avec les pays en développement. Dès la deuxième édition, nombre de communes avaient amélioré leurs pratiques. Les résultats du 3e rating sont attendus cet automne. Il apparaît déjà que certaines effectuent leurs achats selon des principes de durabilité et que, malgré l’absence de bases légales, elles appliquent des critères contraignants de durabilité.

Il est encore tempsNotre prise de position, corédigée avec d’autres ONG dans le cadre de la consul­tation relative à la révision de la loi, a été signée par plus de 2100 sympathisants. Nous y faisons des propositions concrètes pour ancrer dans la loi le principe de

responsabilité sociale et écologique: conditions de travail décentes, salai­res couvrant les besoins essentiels, respect d’exigences sociales mini­males et contrôles aléatoires. Le

Parlement doit en débattre cet automne. Il n’est donc pas trop tard pour faire pression et amener les élu­e­s à ancrer le principe de durabilité dans la loi. Ne lâchons pas le morceau!

NE LÂCHONS PAS LE MORCEAU!

Travailleurs et travailleuses dans une fabrique en Chine. Nos pouvoirs publics ont la responsabilité morale d’empêcher que la production de marchandises se fasse au mépris de leurs droits.

Malgré l’immensité des besoins, rien ne bouge.

La Suisse est sur le point de barrer durablement la route à un ancrage légal des marchés publics équitables. Texte: Katja Schurter. C. Foulger

ACTUALITÉ

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14 CONCOURS

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LE SUDOKU DE SOLIDAR

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Solution

Règles du jeu

Complétez les cases vides avec les chiffres 1 à 9. Chaque chiffre ne peut figurer qu’une seule fois sur chaque ligne, dans chaque colonne et dans chacun des carrés de 3 x 3 cases. La solution se trouve dans les cases grises lues horizontalement, selon la clé suivante:

1 = A, 2 = T, 3 = M, 4 = O, 5 = D, 6 = E, 7 = R, 8 = C, 9 = I

Envoyez la solution à Solidar Suisse sur une carte postale ou par courriel à [email protected], sujet «sudoku».

1er prix un sac2e prix un drap tissé main3e prix un gant de cuisine

Les prix sont des productions du Centre de formation féminine Père Celestino, au Burkina Faso, que soutient Solidar.

La date limite d’envoi est le 13 juin 2016. Le nom des gagnant­e­s sera publié dans Solidarité 3/2016. Le concours ne donne lieu à aucune correspondance ni à aucun recours. Le personnel de Solidar n’a pas le droit d’y participer.

La solution de l’énigme parue dans Solidarité 1/2016 était «non violence». Paul Blind de Hochfelden a gagné un tablier de cuisine, Hanni et Peter Honegger­Neukom de Rüti un T­shirt et Antoinette Charrière de Mézières un sac portant des slogans de campagne de Bolivie. Nous remercions l’ensemble des participant­e­s.

Assemblée générale de Solidar Suisse 2016Mardi 31 mai à 16 heures au Volkshaus, salle bleue, Stauffacherstr. 60, 8004 Zurich

Programme16 heures: Questions statutaires Les membres de Solidar Suisse sont invités. Merci de vous inscrire d’ici au 26 mai à l’aide du coupon de service joint, par email ([email protected]) ou par téléphone (044 444 19 19).

18 heures: Manifestation publique Travail équitable et économie socialeDes produits fabriqués à l’étranger dans des conditions précaires sont toujours plus fréquemment commercialisés en Suisse. A l’exemple d’une campagne à succès de Solidar Suisse, nous montrons comment il est possible d’améliorer la situation des travailleuses et travailleurs. Florian Wettstein, professeur d’éthique à l’Université de Saint­Gall, et Tobias Gerfin, directeur général de Kuhn Rikon et représentant de l’économie suisse, répondent aux questions de Solidar et donnent leur avis sur les possibilités et les limites d’une économie sociale.Un apéritif sera ensuite servi.

Complément d’information sur: www.solidar.ch/agenda

Invitation

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La terre a tremblé à la fin avril 2015 au Népal. Cette catastrophe a causé la mort de 9000 personnes et rasé des villages entiers. Situé à tout juste 45 kilomètres de l’épicentre, le district de Sindhupalchok a subi des destructions particulièrement importantes: 90 % des maisons ont été détruites, les cultures anéanties, les ani­maux de rente ont péri et les semis ont été perdus. Les fortes répliques ont de surcroît compliqué les opérations de re­cherche.

Opérationnelle après quatre jours déjàSolidar Suisse a réagi rapidement et dé­pêché sur place un spécialiste de l’aide d’urgence, quatre jours après le tremble­ment de terre. Afin d’apporter le soutien le plus efficace possible, nous avons décidé de collaborer avec Helvetas et avons pu conjuguer la longue expérience d’Helvetas au Népal avec l’expertise de Solidar dans l’aide d’urgence et la re­construction. Entre les mois de mai et

de juillet, ce projet commun a permis de fournir des toiles de tente, des outils et les principaux articles d’hygiène à 6500 familles; 20 tonnes de semences de riz ont été distribuées pour que les paysan­ ne­s dont les greniers avaient été dé­truits puissent cultiver à nouveau leurs champs. L’aide cofinancée par la Chaîne du Bonheur a pu être menée à terme avec succès en août 2015. Ce soutien rapide ap­porté sans lourdeur bu­reaucratique a contri bué à accroître la confiance de la population et des représentant­e­s des communes dans le travail de Solidar – un facteur clé de succès pour la recons­truction future. Il s’est d’abord agi, dans cette optique, de demander à la popula­tion touchée ce qu’elle estimait être prio­ritaire. Elle a cité comme besoins les plus urgents des logements, l’approvisionnent en eau et le remplacement des biens perdus – car personne n’a d’assurance ménage à Sindhupalchok.

ACTUALITÉ 15

Reconstruire mieuxMais la reconstruction a tardé: des troubles politiques au Népal ont entravé la mise en place de l’autorité nationale chargée de la reconstruction et le blo­cage de la frontière par l’Inde a entraîné une pénurie d’essence, compliquant les transports. Désormais, l’autorité en ques­tion est opérationnelle et la frontière est rouverte: les fondations de la première maison ont été jetées à la mi­février. Ces deux prochaines années, plus de 1000 familles ayant tout perdu profite­ront d’un nouveau toit. Solidar Suisse a conçu ces maisons selon les directives du gouvernement, en veillant à utiliser des matériaux locaux comme la pierre et le bois. La qualité des logements re­construits sera meilleure, notamment grâce aux entretoises «tolérantes aux séismes» montées dans la maçonnerie et à des cadres de porte résistants. La rénovation des systèmes d’amenée d’eau permettra à 3000 ménages d’avoir ac­cès à l’eau potable. Et des contributions financières aideront 2500 familles à racheter des semences, des animaux de rente ou des outils. Les activités de reconstruction de Solidar bénéficient des expériences de longue date acquises

notamment après le tsunami en Asie du Sud ou le typhon qui a balayé les Philip­pines (article en page 12). «La parti­cipation des personnes touchées est tout à fait cruciale», explique Christian Gemperli, responsable du programme d’aide humanitaire auprès de Solidar Suisse. «Car seule une telle approche est garante de l’entretien local des nou­velles maisons et prépare les gens aux futures catastrophes.»

«La participation des personnes touchées est tout à fait cruciale.»

UN AN APRÈS LE SÉISME

Dans la région de Sindhupalchok fortement affectée par le séisme, des Népalaises et des Népalais font la queue pour obtenir des biens de première nécessité.

Au Népal, après le grave séisme de 2015, l’aide d’urgence a pris fin et la reconstruction peut débuter. Texte: Katja Schurter. Photo: Andrea Barrueto

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16 BRÈVES

Pakistan: un travail des enfants qui les rend malades Lors d’une conférence nationale sur les droits des enfants en novembre 2015, Kiran Sarwar, une enfant pakistanaise parmi les 25 millions d’enfants travail­leurs du pays, a parlé des conditions de travail malsaines auxquelles elle est exposée lorsqu’elle cuit des briques. Conclusion de la conférence: la Conven­tion relative aux droits de l’enfant rati­fiée il y a vingt­cinq ans par le Pakistan n’est toujours pas mise en œuvre. Kiran Sarwar a aussi rapporté qu’à Ahmed Town, un quartier de Lahore, l’eau était polluée et rendait les gens malades car nombre de fabriques y déversent leurs eaux usées. En janvier, avec des orga­nisations partenaires locales, Solidar a envoyé une lettre signée par des enfants travailleurs au ministre responsable. Elle lui a rappelé la promesse qu’il avait faite à la conférence de se soucier personnel­lement de l’aménagement d’un réseau d’eau potable.www.solidar.ch/travaildesenfants

Solidar Suisse au coeur de la Genève internationaleL’association Solidar Suisse Genève (SSGE) a récemment été fondée. Sec­tion de Solidar Suisse, cette association soutient des projets de solidarité inter­nationale. Membre de la Fédération genevoise de coopération (FGC), elle vise notamment à mettre en valeur, sur le territoire genevois, les engagements de Solidar Suisse dans les domaines de la coopération au développement. Prési­dée par Olga BARANOVA, l’association regroupe des représentants de la société civile genevoise et de Solidar Suisse.

Aujourd’hui, Solidar Suisse Genève s’en­gage dans la concrétisation de deux projets. En Bolivie, des jeunes sont sen­sibilisés aux droits humains, notamment grâce à la création de spectacles de théâtre et de danse. Au Mozambique, les populations des districts et des muni­cipalités participent à la gouvernance des collectivités locales, en particulier au sein de comités de développement. Pour l’implémentation de ces deux projets, Solidar Suisse Genève est en contact avec les Bureaux de coordination de Solidar Suisse dans ces deux pays.

Solidar Suisse Genève souhaite réa liser avec vous ses projets de coopération au développement et ainsi permettre aux populations les plus vulnérables d’accéder à un avenir meilleur.

ContactSolidar Suisse Genèvec/o FIAN, Maison des associations15, rue des Savoises1205 Genève

Olga BARANOVA, pré[email protected]

Stéphane CUSIN, secré[email protected]

L’initiative pour des multinationales responsables aboutitPlus de 140 000 signatures à l’initiative pour des multinationales responsables ont été réunies en un an à peine. Cette prouesse a été rendue possible grâce à l’engagement d’innombrables personnes motivées et à une large coalition comp­tant aujourd’hui de près de 80 organisa­tions, dont Solidar Suisse. Après son dé­pôt en automne, elle sera examinée par le Conseil fédéral et le Parlement. La vo­tation populaire aura lieu dans un second temps. En cas d’acceptation de l’initiative, les multinationales suisses devront enfin veiller, dans leurs activités à l’étranger, à ce que celles­ci ne portent pas atteinte aux droits humains et à l’environnement. Une exigence de bon sens, mais qui n’est aujourd’hui absolument pas respectée par de nombreuses grandes entreprises suisses.Un important travail de persuasion doit encore être mené auprès de la popu­lation suisse. A cet effet, la coalition

prépare des arguments et du matériel d’information, organise des manifesta­tions et cherche des sympathisants sup­plémentaires.

Notre newsletter vous permet de vous tenir informé­e de l’évolution de la cam­pagne. Vous pouvez vous abonner en visitant notre site internet www.solidar.ch

Si vous souhaitez vous engager dans votre région, vous pouvez vous annoncer sur [email protected]

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17ACTUALITÉ

Près de 40 % des casseroles utilisées en Suisse sont importées de Chine où elles sont fabriquées dans des conditions déplorables. C’est ce que révèle une investigation menée par Solidar: quatre fois plus d’heures supplémentaires qu’au­torisé par la loi chinoise et des salaires à peine suffisants pour vivre. Les ouvrières et ouvriers sont logés dans des dortoirs hébergeant parfois douze personnes et les rares installations sanitaires sont généralement crasseuses. Un travail indécentLa charge de travail constitue un grave problème: ouvrières et ouvriers travaillent jusqu’à 150 heures par mois. Ces heures

supplémentaires seraient accomplies «sur base volontaire». Rien de plus mensonger: obtenir un salaire suffisant pour vivre passe impérativement par ce travail en plus. Les usines rémunèrent en outre usuellement leurs employé­e­s à la tâche, donc par casserole produite, au lieu de verser le salaire minimal prescrit par la loi. Celui­ci dépend donc du car­net de commandes, ce qui répercute le risque économique sur les ouvriers.Solidar exige que vendeurs et fabricants respectent les droits du travail et les normes sociales internationales. La trans­parence doit régner tout au long de la chaîne d’approvisionnement et des mé­canismes de contrôle efficaces doivent

empêcher la dissimulation des dysfonc­tionnements, comme souvent lors des visites de fabriques. Il faut de plus asso­cier la main­d’œuvre: grâce à des méca­nismes de plainte indépendants et à des conventions collectives.

Premières mesures d’améliorationA la fin janvier, Solidar a lancé une campagne en faveur d’une production éthique des casseroles en Chine. En l’espace de deux semaines, elle a obtenu le soutien de plus de 5000 personnes, trouvé un large écho dans les médias et secoué la branche entière. La majorité des entreprises a pris ces reproches au sérieux et ouvert des enquêtes internes. Migros, Coop, Kuhn Rikon et, après des hésitations initiales, Manor également se sont montrées coopératives. Nous conti­nuerons de suivre le processus d’un œil critique.Les réactions des grandes sociétés inter­nationales ont en revanche été contras­tées. Tandis que les gros producteurs WMF et Greenpan ont remis en question la crédibilité de l’investigation, Ikea a cherché le dialogue et entend examiner la situation.Toutes les usines concernées sont sou­mises à des autocontrôles volontaires par les acheteurs. Mais on constate une fois de plus que tant que le respect des droits du travail est laissé à la libre appré­ciation des entreprises, la mise en œuvre reste arbitraire. Les entreprises devraient automatiquement intégrer la protection des droits humains dans leurs procé­dures commerciales, comme l’exige l’ini­tiative pour des multinationales respon­sables que soutient Solidar (page 16).

Simone Wasmann est chargée des campagnes sur le travail équitable en Asie.

NE PAS JETER LES OUVRIÈRES DANS LA POÊLENous faisons souvent dorer nos légumes bio dans des cocottes produites en Chine, dans des conditions de travail déplorables.Texte: Simone Wasmann. Photo: China Labor Watch

Sans gants de protection, une ouvrière chinoise procède au revêtement d’une casserole qui pourrait arriver sur une table suisse.

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LA PLOMBIÈRE DE SAABAA 23 seulement, Abzèta Koana va ouvrir son entreprise de plomberie au Burkina Faso. Un métier qu’elle a choisi «pour être indépendante et ne pas faire comme toutes les filles».Texte: Lionel Frei, Photo: Jürg Gasser

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Elle a un regard déterminé qui en dit long sur son parcours. Abzèta est née dans le département de Loumbila, à quelques encablures de «Ouaga», petit nom donné à Ouagadougou, capitale du Burkina. Après le décès de son père lorsqu’elle avait 10 ans, la fillette a dû quitter l’école, car sa mère ne pouvait plus payer sa scolarité. Elle a pu cependant réintégrer l’enseignement en s’inscrivant dans une école bilingue à Borgo. Développé par Solidar Suisse, l’enseignement bilingue permet aux jeunes Burkinabés d’étudier dans leur langue maternelle – en l’occur­rence le mooré pour Abzèta, tout en apprenant progressivement le français (cf. Solidarité 1/2015).

Après cinq années d’études, la jeune Burkinabé obtient son certificat. On lui demande dans quelle filière profession­nelle elle souhaite s’orienter: ce sera la plomberie. «Un travail réservé aux hommes ne me fait pas peur. Je veux me démar­quer des autres filles et exprimer ma dif­férence.» Abzèta entame alors un Cer­tificat de Compétence Professionnelle (CQP) de deux ans. La première année, très théorique, lui fait éprouver le besoin d’acquérir une expérience pratique. Elle trouve un premier stage dans un atelier du village, puis est repérée par un de ses professeurs qui lui demande de la

rejoindre dans son propre atelier. Il la prend sous son aile et lui permet de se faire la main sur divers chantiers. Au­jourd’hui, elle l’appelle encore respec­tueusement «Monsieur». Ce premier job lui permet par ailleurs de voyager sur divers chantiers dans les provinces du Burkina. Le travail est physique et fati­gant: il faut creuser, déterrer, enterrer des tuyaux… Pourtant, Abzèta impres­sionne son entourage par sa motivation et la qualité de son travail.

Plombière diplôméeEn juillet 2014, Abzèta décroche finale­ment son diplôme. «Monsieur», ses frères et camarades sont là pour la remise. Sa maman, fière, laisse couler des larmes d’émotion: sa fille fait partie des cinq premiers de la promotion. «Un moment qui restera gravé à jamais dans ma mémoire», confie­t­elle. Mais le parcours vers l’indépendance n’est pas terminé. Abzèta décroche un autre stage dans un atelier de plomberie du quartier de Dassasgho, à Ouagadougou. Son statut est précaire: pas de contrat ni de salaire. Quand les affaires sont bonnes, le patron lui donne «l’argent du savon», selon l’ex­pression burkinabé, soit juste de quoi s’acheter le savon pour se laver. Elle l’apprécie cependant, lui qui traite avec

Abzèta Koana dans le dépôt de son maître de stage, en attendant de se mettre à son compte.

PORTRAIT 19

respect ses apprentis, «comme des frères et sœurs». Ses journées sont longues: Abzèta se réveille à 5 h du matin pour s’occuper de ses deux enfants, amène l’aîné à l’école et dépose le second chez la «garde­bébé» avant d’aller au travail. Le soir, elle cuisine pour toute la famille.

Bientôt patronneIl y a quelques années, elle avait dit à «Monsieur» qu’elle voulait créer sa propre entreprise. Aujourd’hui, l’affaire est en bonne voie. Abzèta a été sélectionnée pour faire partie d’un pool de 40 jeunes auxquels Solidar Suisse offre un coaching

pour développer leur entreprise (cf. encadré).Abzèta est actuellement en train de développer son projet d’entreprise. Elle a prospecté

les opportunités du secteur et a prévu d’allier deux activités: un atelier et une quincaillerie. «Je veux m’installer à Saaba, un quartier de la capitale en plein essor. Les chantiers s’y multiplient et la demande en plomberie sera là» détaille­t­elle. Elle a aussi réfléchi aux qualités requises pour être une bonne cheffe d’entreprise: «Il faut être courageuse, combattante, respectueuse, curieuse, optimiste et forte moralement.» Des adjectifs qu’Abzèta possède à n’en pas douter.

«Faire un métier d’homme ne m’a jamais fait peur».

Pour lutter contre le manque de pers­pectives, Solidar propose à des jeunes soigneusement sélectionnés de bé­néficier d’un coaching en matière de gestion d’entreprise et d’administration de crédit, pour fonder leur propre affaire. Ces jeunes entrepreneurs et entrepreneuses sont aussi aiguillés vers des instituts de microfinance.www.solidar.ch/entrepreneuses

Coaching pour jeunes

entrepreneurs

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Des photos racontant l’histoire de Solidar Suisse et de l’Œuvre suisse d’entraide ouvrière sommeillent­elles dans vos archives personnelles? Nous nous réjouissons de les recevoir et les publierons sur notre site web à l’occasion de notre 80e anniversaire! www.solidar.ch/jubile

Envoyez vos photos analogiques ou numériques à:

Solidar Suisse, Quellenstrasse 31, 8031 Zurich ou à [email protected]

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