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Stage de SES
Orléans 29 mars 2012
ERAGRAGUI A. Kader
FELIU Philippe
Les dĂ©faillances du marchĂ© : asymĂ©tries delâinformation, externalitĂ©s et biens collectifs
TRANSPOSITIONDIDACTIQUE
Bibliographie :
AsymĂ©trie de lâinformation :
1. Cahiers français, La pensée économique contemporaine,n° 363, Juillet-Août 2011, la Documentation française.
1. Cahiers Français, Découverte de la microéconomie, n° 254,janv.-fév. 1992, la Documentation française.
2. Bernard Bernier, Henri-Louis Védié, Initiation à lamicroéconomie, 2° édition, Dunod, 2009
3. G. Rotillon, Introduction à la microéconomie, RepÚres, Ladécouverte, 1996 (2e édition).
4. P. Cahuc, La nouvelle microéconomie, RepÚres, La découverte,1998.
5. P.Cahuc et A. Zylberberg, Economie du travail, la formationdes salaires et les déterminants du chÎmage, De BoeckUniversité, 1996.
Lycée P. M. Curie
36 000 ChĂąteauroux
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Programme officiel de la classe de PremiÚre ES : BO spécial n°9 du 30 septembre 2010 (Extrait)
ThÚmes Notions Indications complémentaires
3.3. Commentles marchésimparfaitementconcurrentielsfonctionnent-ils ?
Pouvoir demarché
Oligopole
monopole
On soulignera le caractĂšre trĂšs particulier du marchĂ© concurrentiel et onintroduira la notion de structures de marchĂ©. Sans aucun recours Ă laformalisation et Ă l'aide d'exemples (monopole de lâĂ©lectricitĂ© ou dutransport, concurrence monopolistique par l'innovation ou ladiffĂ©rentiation des produits, oligopoles dans les domaines de l'automobile,etc.), on montrera que les vendeurs mettent en Ćuvre des stratĂ©giessusceptibles de renforcer leur pouvoir de marchĂ© (positionnement etmarketing des produits, ententes entre vendeurs, guerres de prix, crĂ©ationde demande captive, etc.). On pourra s'interroger sur les conditionsfavorisant ces structures non concurrentielles et sur le rĂŽle des pouvoirspublics dans la rĂ©gulation de la concurrence.
3.4. Quelles sontles principalesdéfaillances dumarché ?
Asymétriesd'information
Externalités
bienscollectifs
On montrera qu'en situation d'information asymĂ©trique, on constatel'existence d'Ă©quilibres avec rationnement voire l'absence de marchĂ©(marchĂ© des voitures d'occasion, marchĂ©s des professionnels de santĂ© etdes avocats, marchĂ© de l'assurance, etc.). Les diverses maniĂšres deproduire et de diffuser de l'information - labellisation, publicitĂ©,comparateurs de prix, magazines de consommateurs, etc. pourront ĂȘtreĂ©voquĂ©es, de mĂȘme que la rĂ©glementation publique sur l'information.En s'appuyant sur des exemples, on montrera aussi que les marchĂ©speuvent ĂȘtre dĂ©faillants dans le domaine de l'allocation des ressources enprĂ©sence de biens collectifs ou d'externalitĂ©s (pollution, Ă©clairage public,pollinisation par les abeilles, etc.).
Bibliographie donnée par M. Galanti Sébastien
Manuels Universitaires de niveau licence (suffisants à mon avis car bien conçus) :
1. E.Wasmer (2010), Principes de Microéconomie, ed Pearson, ch. 19 et 20.
2. Pyndick et Rubinfeld et Sollogoub, (2009), Microéconomie, 7eme ed Pearson, ch 5.3, ch16.7, ch 17 et 18
Manuels de niveau master (pour approfondissement) :
1. JB Ferrari, Microéconomie approfondie, information équilibre et optimalité (2006), ed Bréal, coll AmphiEconomie, chapitre 4.
2. Martimort et Laffont, The theory of incentives : the principal-agent model (2001), Princeton University Press,ch 2 et 4.
3. Salanié, Théorie des Contrats, (1994) ed. Economica, ch 2et 4.
Articles principaux :
1. Akerlof, George (1970), âThe market for lemons : Quality uncertainty and the market mechanism, QuarterlyâJournal of Economics, 84(3), 488â500.
2. Diamond, Douglas W. (1984), âFinancial intermediation and delegated monitoringâ, Review of EconomicStudies, 51 (166), 393â414.
3. Grossman, Sanford J. and Joseph E. Stiglitz (1980), â On the impossibility of informationally efficient markets â, American Economic Review 70(3), 393â408.
4. Hirshleifer, Jack (1971), âThe private and social value of information and the reward to inventive activityâ,American Economic Review 61(4), 561â574.
I - Lâinformation imparfaite : Les asymĂ©tries dâinformation
Préambule :
LâhypothĂšse de lâinformation imparfaite est une avancĂ©e importante de la science Ă©conomique depuis les annĂ©es60. Elle a donnĂ© lieu Ă des travaux sur les asymĂ©tries de lâinformation et la thĂ©orie des contrats (G. AKERLOF, J.STIGLITZ et M. SPENCE - Prix Nobel en 2001). Ces travaux permis une meilleur comprĂ©hension du fonctionnementdes marchĂ©s aujourdâhui.
L'asymĂ©trie de l'information est le constat que chaque acteur sur le marchĂ© ne dispose pas des mĂȘmesinformations. Les informations des offreurs et des demandeurs sur les prix et la qualitĂ© des biens peuvent ainsiĂȘtre imparfaites et inĂ©galement rĂ©parties. Cette asymĂ©trie de l'information favorise le pouvoir de marchĂ© decertains acteurs et peut justifier les diffĂ©rences dâanticipation.
Il existe en fait deux cas oĂč la mauvaise information des agents pose des problĂšmes majeurs pour le bonfonctionnement du marchĂ© :
- Le cas de lâanti-sĂ©lection ou la sĂ©lection adverse
- Le cas de lâalĂ©a moral ou le risque moral
HypothĂšse Description Exemple
Anti-sélection
(sélection adverse)
Un des agents ignore certaines caractéristiques de
la transaction. II risque d'ĂȘtre trompĂ© au moment
oĂč il va signer le contrat.
Une personne veut acheter une voiture
d'occasion mais n'est pas un spécialiste
des voitures.
Risque moral
(lâalĂ©a moral)
Un des agents peut dissimuler son comportement
qui ne sera révélé qu'aprÚs la signature du contrat
= comportement peu moral
L'acheteur d'une voiture se rend chez
un assureur pour souscrire une police.
L'assureur ne sait pas qu'il roule
toujours vite et qu'il ne veut pas porter
de lunettes alors qu'il voit mal
Imperfection de lâinformation(Information imparfaite)
Tous les agents Ă©conomiques nâont pas, ou ont un accĂšsincomplet Ă lâinformation disponible lors des transactions
(market failures)
Desdâautun ede son futur salariĂ©.
rendre compte de la réalité
Certains agents sont mieux informĂ©s que dâautres :âą agents mieux informĂ©sâą agents peu informĂ©s
(Contrats incomplets)
Echecs du marché
Certains agentobservables paLâemployeur neou dâeffort app
AsymĂ©trie de lâinformation = information imparfaite
LâalĂ©a moral (le risque moral) :
s font le choix ou mĂšnent des actions nonr dâautres agents :
peut contrĂŽler parfaitement le niveau de soin
LâantisĂ©lection (sĂ©lection adverse) :
agents sont dotés de caractéristiques queres ne connaissent pas :
mployeur qui connait mal les compétences
Le marché de CPP ne peut pasdéployer ses propriétés : ne peut
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orté aux tùches accomplies par son salarié.
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Asymétrie de l'information et politiqueéconomique
Joseph E. Stiglitz
Joseph Stiglitz, prix Nobel d'économie 2001, est professeur d'économie à l'université de Columbia (New-York). Il aété président du groupe des conseillers économiques du président Clinton, économiste en chef et vice-président dela Banque mondiale.
Project Syndicate, décembre 2001
Cette annĂ©e (2001), le prix Nobel d'Ă©conomie a Ă©tĂ© attribuĂ© Ă George Akerlof de l'universitĂ© de Berkley, Ă MichaelSpence de l'universitĂ© de Stanford et Ă moi-mĂȘme pour notre travail sur "l'asymĂ©trie de l'information". J'aimeraisexpliquer ce dont il s'agit et la raison de ce travail.
Pendant 200 ans, les Ă©conomistes ont utilisĂ© des modĂšles Ă©conomiques simples basĂ©s sur l'hypothĂšse idĂ©ale quechacun des acteurs dispose des mĂȘmes informations et des mĂȘmes connaissances. Ils savaient que ce n'Ă©tait pastout Ă fait le cas, tout en espĂ©rant que de petites inĂ©galitĂ©s dans la rĂ©partition de l'information joueraient un rĂŽlenĂ©gligeable. Nous avons montrĂ© que cette conception Ă©tait inexacte : de petites diffĂ©rences dans la rĂ©partition del'information peuvent avoir un impact considĂ©rable sur l'Ă©conomie.
Le ComitĂ© d'attribution du Prix Nobel a rĂ©compensĂ© notre travail sur "l'asymĂ©trie de l'information", un aspect del'imperfection de l'information dĂ» au fait que les diffĂ©rents acteurs d'un marchĂ© ne disposent pas des mĂȘmesconnaissances. Ainsi le vendeur de voitures en sait probablement plus sur ses voitures que l'acheteur, l'assurĂ© aune meilleure connaissance de ses risques d'accident que l'assureur (risques liĂ©s par exemple Ă sa conduite), undemandeur d'emploi en sait plus sur ces compĂ©tences que son employeur potentiel, un emprunteur en sait plussur sa solvabilitĂ© que son crĂ©ancier. L'asymĂ©trie de l'information n'est qu'une face de l'imperfection del'information, mais qui mĂȘme lĂ©gĂšre, peut ĂȘtre lourde de consĂ©quences.
George Akerlof et moi Ă©tions Ă©tudiants ensemble au MIT au dĂ©but des annĂ©es 1960. On nous a enseignĂ© lesmodĂšles en vigueur Ă l'Ă©poque, mais ils ne signifiaient pas grand chose pour nous. D'une maniĂšre trĂšsrudimentaire, ils voulaient exprimer que l'offre Ă©gale la demande. Notre blague favorite Ă©tait de dire qu'unperroquet pouvait devenir Ă©conomiste. Il suffisait de lui rĂ©pĂ©ter "l'offre et la demande". Ces modĂšles avaientd'Ă©tranges consĂ©quences. Par exemple, si la demande en main d'Ćuvre Ă©gale l'offre, il ne peut pas y avoir dechĂŽmage.
J'ai grandi à Gary, dans l'Indiana, une ville industrielle sur les bords du lac Michigan. J'y ai vu la pauvreté, lechÎmage et la discrimination. Je suis devenu économiste parce que je voulais comprendre et agir sur cesphénomÚnes. Apprendre comme étudiant des modÚles qui supposent l'inexistence du chÎmage était une curieusemaniÚre de débuter.
Nos modĂšles permettent de comprendre pourquoi les marchĂ©s ne se comportent pas comme le veut la thĂ©orieclassique : pourquoi ils pourraient ne pas exister, pourquoi il y a du chĂŽmage, pourquoi le crĂ©dit peut ĂȘtrerationnĂ©, pourquoi les secousses Ă©conomiques peuvent ĂȘtre amplifiĂ©es et leurs effets persister bien au-delĂ de ladisparition de la cause initiale.
L'un des rĂ©sultats les plus importants de notre travail concerne l'idĂ©e d'Adam Smith selon laquelle "la maininvisible du marchĂ©" assure son bon fonctionnement. Notre analyse montre que cette main est effectivementinvisible, probablement parce qu'elle est inexistante ou dans le meilleur des cas parce qu'elle a perdu toute savigueur. Avec Bruce Greenwald de l'universitĂ© de Columbia, nous avons dĂ©montrĂ© que mĂȘme dans une Ă©conomiede marchĂ©, l'Etat peut intervenir pour le bien de tous, mĂȘme s'il est confrontĂ© aux imperfections de l'informationau mĂȘme titre que le secteur privĂ©. Depuis longtemps les Ă©conomistes savent qu'il ne faut pas trop compter sur lemarchĂ© pour rĂ©soudre des problĂšmes liĂ©s Ă des facteurs extĂ©rieurs Ă l'activitĂ© Ă©conomique, tels que la pollution. Ilpeut y avoir production de certaines choses Ă l'excĂšs, par exemple l'acier dont la fabrication est source depollution, et pas assez d'autres comme la recherche qui permet de faire avancer la connaissance. Nous avons
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montrĂ© que si l'on reconnaĂźt que l'information est imparfaite - ce qu'elle est effectivement - on s'aperçoit que cesfacteurs extĂ©rieurs jouent un rĂŽle essentiel, au mĂȘme titre que les insuffisances du marchĂ©.
Le paradoxe de l'histoire est qu'au moment oĂč toute une armĂ©e de chercheurs dans le monde entier dĂ©veloppaitces idĂ©es et soulignait les insuffisances du marchĂ©, les institutions Ă©conomiques internationales poussaient auConsensus de Washington, basĂ© sur le "fondamentalisme de marchĂ©" qui ferme les yeux sur ses Ă©checs.Aujourd'hui, bien que la connaissance des limites du marchĂ© soit un lieu commun dans les milieux universitaires,nombre d'institutions Ă©conomiques internationales y sont encore impermĂ©ables. Cela contribue Ă crĂ©er desfrictions entre elles et les pays qu'elles conseillent, car beaucoup de jeunes et brillants Ă©conomistes qui travaillentpour les gouvernements des pays en dĂ©veloppement ont une comprĂ©hension plus approfondie de l'Ă©conomie demarchĂ© que celle donnĂ©e par les anciennes idĂ©ologies et les modĂšles simplistes utilisĂ©s par certains bureaucratesinternationaux.
On a suggĂ©rĂ© que le travail thĂ©orique sur l'imperfection de l'information qui est rĂ©compensĂ© par le Prix Nobel estsans rapport avec mes prises de positions au sein de la Banque mondiale sur l'Asie de l'Est, la Russie ou ledĂ©veloppement. C'est inexact, mes prises de positions sur la libĂ©ralisation des marchĂ©s financiers sont fondĂ©es surune thĂ©orie de la rĂ©gulation qui repose sur l'asymĂ©trie de l'information.La crainte de banqueroutes - les taux d'intĂ©rĂȘt Ă©levĂ©s demandĂ©s par le FMI en Asie de l'Est qui conduisent lesentreprises au dĂ©sastre, ont un impact nĂ©gatif sur les taux de change, dĂ©truisent l'Ă©conomie et rendent ces paysmoins attractifs pour les investisseurs - vient d'une thĂ©orie de la finance des entreprises basĂ©e sur le concept del'asymĂ©trie de l'information. Au niveau le plus simple, dans un monde idĂ©al, si chacun disposait de toutel'information nĂ©cessaire, il n'y aurait pas de banqueroute. Pourquoi prĂȘterait-on Ă quelqu'un dont on saitpertinemment qu'il ne va pas rembourser ? Dans le monde rĂ©el, les Ă©checs des privatisations sont dus en partie Ă une mauvaise gouvernance d'entreprise, elle-mĂȘme liĂ©e Ă l'asymĂ©trie de l'information entre dirigeants etactionnaires.
Les idĂ©es sont parfois aussi puissantes que les intĂ©rĂȘts Ă©conomiques. Quand les vieilles idĂ©ologies et les intĂ©rĂȘtsfinanciers de certains vont dans le mĂȘme sens, comme dans le passĂ©, il y a des gagnants, mais il y a aussi desperdants. L'asymĂ©trie de l'information correspond Ă une asymĂ©trie de pouvoir Ă©conomique sur le marchĂ©. Lafonction du gouvernement est non seulement de corriger les insuffisances du marchĂ©, mais aussi de rĂ©Ă©quilibrerle pouvoir des diffĂ©rents acteurs.
Notre travail, que le Comité Nobel porte maintenant à l'attention d'un large public, est un élément de la basethéorique d'une TroisiÚme voie qui est de plus en plus reconnue comme étant le seul moyen d'allier progrÚséconomique avec justice sociale.
Joseph E. Stiglitz
www.project-syndicate.org/commentary/stiglitz9/French
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Fiche 1. Lâanti-sĂ©lection
1. Le problĂšme de lâanti-sĂ©lection
Les problĂšmes liĂ©s Ă lâanti-sĂ©lection ont Ă©tĂ© mis en Ă©vidence par GeorgeAkerloff dans le cas particulier du marchĂ© des vĂ©hicules dâoccasion.
Sur ce marché, la qualité des voitures vendues est imparfaitementconnue des acheteurs potentiels qui ne sont pas des professionnels. Seuls les garages qui vendent les voituressavent si elles ont été bien entretenues ou non, si elles ont été accidentées ou non⊠En bref, la qualité desvoitures vendues est une information cachée.
Sur un marchĂ© oĂč la qualitĂ© est facilement observable, il est impossible de vendre des produits de mauvaisequalitĂ© au mĂȘme prix que des produits de bonne qualitĂ©. Des pommes tavelĂ©es seront bradĂ©es Ă un prix plusfaible que des pommes qui ne le sont pas. Mais si la qualitĂ© du produit nâest pas facilement perceptible parlâacheteur potentiel, le prix ne joue plus son rĂŽle dâajustement. En effet, le prix de ces voitures a tendance Ă sâaligner sur un vĂ©hicule de qualitĂ© moyenne. Or, les vendeurs qui disposent de vĂ©hicules de trĂšs bonne qualitĂ©peuvent ĂȘtre rĂ©ticents Ă les mettre sur le marchĂ© Ă un prix moyen. Ă lâinverse, les propriĂ©taires de voitures demauvaise qualitĂ© seraient ravis de les cĂ©der Ă ce mĂȘme prix moyen. De leur cĂŽtĂ©, certains acheteurs quiaccepteraient Ă©ventuellement de payer plus cher un vĂ©hicule de bonne qualitĂ© ne peuvent pas identifier cesvĂ©hicules et peuvent renoncer Ă acheter au prix du marchĂ©, craignant de ne trouver pour ce prix que desvĂ©hicules moyens ou dĂ©fectueux. Le marchĂ© des vĂ©hicules dâoccasion fonctionnera mal car les propriĂ©taires devĂ©hicules de bonne qualitĂ© refuseront de les vendre au prix du marchĂ© et les acheteurs craindront de ne trouverque des vĂ©hicules de mauvaise qualitĂ© au prix proposĂ©.
Si les vendeurs baissent le prix pour attirer des clients, ils ne font quâaggraver le problĂšme. Les meilleurs vĂ©hiculesqui Ă©taient en vente sont retirĂ©s du marchĂ© et la crainte des acheteurs augmente.
2. Le traitement de lâanti-sĂ©lection
En thĂ©orie, comme la plupart des acheteurs de vĂ©hicules dâoccasion ne sont pas des professionnels, le marchĂ© desvĂ©hicules dâoccasionne devrait pas pouvoir fonctionner. Or, il se vend en France entre 4 et 6 millions de voituresdâoccasion tous les ans ! Les acheteurs feraient-ils tous de mauvaises affaires ? Les propriĂ©taires de voitures debonne qualitĂ© accepteraient-ils tous de vendre au mĂȘme prix que ceux qui possĂšdent des voitures malentretenues ou accidentĂ©es ?
La rĂ©ponse tient en une idĂ©e qui se dĂ©cline selon de nombreuses variantes. Il faut que le vendeur qui dĂ©tientlâinformation sur la qualitĂ© des vĂ©hicules fasse en sorte dâinformer lâacheteur par des signaux adaptĂ©s.
Le plus simple pour un vendeur qui est sĂ»r de la bonne qualitĂ© dâune voiture quâil propose Ă un acheteur est dâengarantir le fonctionnement pendant un certain temps et de sâengager Ă la rĂ©parer gratuitement si elle tombe enpanne. En sâengageant ainsi auprĂšs de lâacheteur, le vendeur Ă©met un signal de qualitĂ© qui permet Ă la loi delâoffre et de la demande de mieux fonctionner. La qualitĂ© du produit offert est plus facilement perceptible et levendeur dâun produit de bonne qualitĂ© peut trouver un acheteur prĂȘt Ă le payer plus cher quâun produit dequalitĂ© infĂ©rieur. Les bonnes occasions ne sont plus chassĂ©es du marchĂ©.
Source du document : www.academie-en-ligne.fr/default.aspx
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Fiche 2. Le risque moral
1. Le problĂšme du risque moral
Contrairement Ă celui posĂ© par lâanti-sĂ©lection, le problĂšme liĂ© aurisque moral ne survient pas avant que lâoffreur et le demandeur nese soient mis dâaccord mais aprĂšs. Le contrat est bien passĂ© entre les deux agents mais lâapplication du contrat vase rĂ©vĂ©ler dĂ©sastreuse pour lâun des deux, celui Ă qui lâautre aura rĂ©ussi Ă cacher le comportement qui sera lesien.
Supposons par exemple que lâacheteur dâune voiture dâoccasion se rende chez un assureur pour souscrire uneassurance tous risques. Le montant de la prime Ă payer a Ă©tĂ© calculĂ© en se fondant sur le risque quâencourt unconducteur moyen qui sait normalement conduire, ne commet pas dâimprudence dĂ©libĂ©rĂ©e, entretientcorrectement sa voiture⊠Or, rien ne dit que le futur assurĂ© correspond bien Ă ce profit. Il ne va Ă©videmment pasrĂ©vĂ©ler spontanĂ©ment que, par exemple, il ne connaĂźt pas la diffĂ©rence entre un feu vert et un feu rouge,consomme systĂ©matiquement de lâalcool avant de prendre le volant et nĂ©glige de faire entretenir ses freins dontil ne voit pas vraiment lâutilitĂ© puisque ce sont les autres qui sâarrĂȘtent en le voyant arriver. Si lâassureur a lamalchance de nâavoir que des clients de ce type, le nombre de sinistres quâil devra prendre en charge sera trĂšssupĂ©rieur Ă la moyenne et les primes payĂ©es par ses clients ne couvriront pas les dommages Ă rĂ©parer.
La crainte de nâavoir que des « mauvais risques » Ă couvrir est susceptible de perturber le fonctionnement dumarchĂ© de lâassurance.
2. Le traitement du risque moral
Tout comme dans le cas du marchĂ© des vĂ©hicules dâoccasion, le problĂšme posĂ© par lâasymĂ©trie dâinformationnâempĂȘche nullement les sociĂ©tĂ©s dâassurance de souscrire des polices et, mieux mĂȘme, de rĂ©aliser des profitsextrĂȘmement confortables. Câest donc que le problĂšme posĂ© par le risque moral nâest pas insurmontable. Leprincipe gĂ©nĂ©ral de la solution consiste Ă mettre en place des mĂ©canismes qui vont conduire lâassurĂ© Ă adopter uncomportement normalement prudent et Ă ne pas prendre plus de risques au prĂ©texte quâil est assurĂ© et que «lâassurance paiera ».
En matiĂšre dâassurance automobile, le dispositif le plus connu dâincitation Ă un comportement prudent est le «bonus malus ». Lorsquâun nouveau conducteur demande Ă ĂȘtre couvert par une police dâassurance, il paye uneprime de base, correspondant Ă un conducteur moyen. Sâil se rĂ©vĂšle bon conducteur et quâil nâa pas dâaccident, ilbĂ©nĂ©ficiera dâune rĂ©duction de prime sous la forme dâun bonus. Si, au contraire, il fait preuve dâun comportementimprudent et est responsable dâaccidents, il devra payer un supplĂ©ment de prime sous la forme dâun malus. Lefait de pouvoir payer moins cher si lâon est un conducteur prudent constitue un moyen de lutter contre le risquemoral de lâassurance.
Source du document : www.academie-en-ligne.fr/default.aspx
Quelles rĂ©ponses aux imperfections dâinformation ?
Le rĂŽle de lâEtat
G. AKERLOF, «The market for lemons: quality uncertainity and the market mechanisms»,1970
Document.
Face Ă ce type d'imperfection de marchĂ©, un premier rĂ©flexe a Ă©tĂ© de valider le recours Ă l'intervention de l'Ătat.Ainsi. G. Akerlof (1970), suggĂšre-t-il de rendre l'assurance obligatoire lorsque l'information est asymĂ©trique et lesassurĂ©s hĂ©tĂ©rogĂšnes. Car la prĂ©sence d'individus au profil plus risquĂ© que les autres a pour inconvĂ©nient d'Ă©vincerceux qui prĂ©sentent le moins de risques. En effet, pour ces derniers, le coĂ»t de l'assurance - calculĂ© en fonction durisque moyen - excĂšde les bĂ©nĂ©fices attendus. Ils prĂ©fĂ©reront ne pas s'assurer plutĂŽt que de financer l'assurancedes individus aux profils risquĂ©s. PoussĂ©e Ă l'extrĂȘme, cette Ă©viction peut aboutir Ă l'inexistence du marchĂ©, s'il nereste plus que les individus particuliĂšrement coĂ»teux Ă assurer parmi les demandeurs. Une lĂ©gislation imposantune obligation d'assurance permet de dĂ©passer les dĂ©sordres liĂ©s Ă cette sĂ©lection adverse puisquâaucun individune peut alors se soustraire au marchĂ©.
Les Cahiers français, Les imperfections de lâinformation et la thĂ©orie des contrats, DF, n° 636, juillet-AoĂ»t 2011
Exemple : le marché des assurances
(AsymĂ©trie de lâinformation)
les bénéfices attendus.
moyenne)
risqués, se retirent du marché
G. AKERLOF
Une législation imposant uneassurance obligatoire pourdépasser les désordres liés à la
MarchĂ© des assurances :Certains assurĂ©s prĂ©sententplus de risques que dâautresque lâassureur ignore
sélection adverse
hétérogÚnes
Intervention de lâEtat :Une rĂ©ponse au dysfonctionne-ment du marchĂ©
Pour les assurĂ©s quiprĂ©sentent moins de risques,le coĂ»t de lâassurance excĂšde
Rendre lâassurance obligatoirelorsque lâinformation estasymĂ©trique et les assurĂ©s
La prĂ©sence dâassurĂ©s avec unprofil plus risquĂ© peut Ă©vincerceux qui prĂ©sentent moins derisques (Ă prime dâassurance
Absence de marché :Il ne reste que les assuréscoûteux au profil plus risqué
Ils prĂ©fĂšrent ne pas sâassurerpour ne pas financerlâassurance des assurĂ©s plus
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Exercice dâapplication sur lâasymĂ©trie de lâinformation
Distinguez selon le cas, sâil sâagit dâune mesure pour lutter contre le risque moral ou lâanti-sĂ©lection.Proposez Ă la fin du tableau deux autres exemples de mesures ; lâune relevant du risque moral et lâautre relevantde lâanti-sĂ©lection.
ExemplesRisque moral /
anti-sélectionExplications
1. RĂŽle du contrĂŽle technique pour lemarchĂ© des voitures dâoccasion
Anti-sélection
En prenant connaissance du contrĂŽletechnique, lâacheteur est informĂ© de laqualitĂ© du vĂ©hicule par un tiers.
2. La Franchise : la compagnie dâassurancene rembourse les dommages causĂ©s parses assurĂ©s quâau-delĂ dâun certainmontant.
Risque moral
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3. Les compagnies dâassurance ont instaurĂ©des systĂšmes de bonus/malus pourrĂ©compenser ou sanctionner leursassurĂ©s.
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4. Une entreprise pĂ©troliĂšre exige delâentreprise qui transporte ses produits uncertificat de bon Ă©tat de son navire.
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5. Un employeur exige dâun demandeurdâemploi une expĂ©rience professionnelle.
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6. Un Ă©pargnant qui veut placer son capitalen bourse, passe par lâintermĂ©diaire dâunconseiller financier.
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7. Un employeur nâembauche dĂ©finitivementun salariĂ© quâaprĂšs une pĂ©riode dâessai de2 mois.
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8. Un vendeur de voitures d'occasion(Garage) propose des garanties
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9. âŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠ..
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Documents courts sur le thĂšme des asymĂ©tries de lâinformation
Document 1.DĂšs les annĂ©es 1960, la littĂ©rature Ă©conomique mettait en avant le fait que l'imperfection de l'information pouvaitaltĂ©rer la bonne marche de l'Ă©conomie concurrentielle. Ce type d'imperfection fait partie de ce que lesĂ©conomistes appellent les Ă©checs de marchĂ© (âŠ) Parmi ces hypothĂšses, celle d'imperfection de l'informationstipule que tous les agents Ă©conomiques n'ont pas accĂšs Ă toute l'information disponible ou nĂ©cessaire lors dudĂ©roulement d'une transaction. Certains agents Ă©conomiques peuvent ĂȘtre mieux informĂ©s que dâautres, ce quipeut dĂ©boucher sur des contrats incomplets.Deux types d'asymĂ©trie d'information caractĂ©risent gĂ©nĂ©ralement ce que l'on entend par imperfection demarchĂ© : l'antisĂ©lection (ou sĂ©lection adverse) et l'alĂ©a moral (ou risque moral). Dans le premier cas, certainsagents sont dotĂ©s de caractĂ©ristiques que d'autres ne connaissent pas, situation couramment illustrĂ©e par le casde l'employeur qui ignore les compĂ©tences intrinsĂšques de son salariĂ©. Dans le second cas, certains agentsĂ©conomiques font des choix ou mĂšnent des actions inobservables par d'autres agents, ce qu'illustre aussi larelation entre employeur et employĂ© lorsque le premier ne peut contrĂŽler parfaitement le niveau de soin oud'effort apportĂ© aux tĂąches accomplies par le second.
François PANNEQUIN, Les imperfections de lâinformation et la thĂ©orie des contrats, cahiers français, n° 636, juillet-AoĂ»t 2001
Quand lâasymĂ©trie de lâinformation conduit Ă la « sĂ©lection adverse » âŠ
Document 2.Supposons, pour simplifier, que la population puisse ĂȘtre rĂ©partie en deux groupes homogĂšnes : les «bonsrisques», qui ont une espĂ©rance de vie Ă©levĂ©e, et les «mauvais risques», dont l'espĂ©rance de vie est plus faible.Que se passe-t-il si les assureurs, faute de pouvoir distinguer les bons risques des mauvais, offrent un contratunique Ă tous les assurĂ©s potentiels ? Pour Ă©viter de faire des pertes, les assureurs vont calculer la prime ducontrat en fonction de l'espĂ©rance de vie moyenne dans la population ; mais les bons risques vont refuser desouscrire ce contrat, dont les primes sont trop coĂ»teuses au vu de leur forte espĂ©rance de vie. En revanche, lesmauvais risques vont trouver le contrat avantageux et y souscrire en masse. Sans le chercher, l'assureur asĂ©lectionnĂ© ses assurĂ©s dans la population, et le rĂ©sultat est contraire Ă ses espĂ©rances puisqu'il n'assure plus queles mauvais risques : c'est l'origine de l'expression de «sĂ©lection adverse», qui est souvent utilisĂ©e dans cedomaine. Le malheureux assureur fera des pertes sur le contrat offert et le retirera donc, si bien que la populationsera laissĂ©e sans assurance.
Bernard SALANIĂ, MicroĂ©conomie. Incitations et contrats, EncycLopedia Universalis, 2010.
Quand lâasymĂ©trie de lâinformation conduit au « risque moral » âŠ
Document 3.Dans le domaine de l'assurance, on parle de «risque moral» lorsque le risque que l'on cherche Ă assurer estaggravĂ© du fait du comportement des personnes qui se savent couvertes. Ă partir de cette dĂ©finition, lesĂ©conomistes de la santĂ© ont rĂ©pertoriĂ© deux catĂ©gories de risque moral :- le risque moral ex ante : n'ayant pas Ă assumer les coĂ»ts liĂ©s Ă leur maladie, les assurĂ©s adoptent descomportements Ă risque et font moins de prĂ©vention (âŠ)- le risque moral ex post : pour une pathologie donnĂ©e, un assurĂ© va dĂ©penser plus qu'un non-assurĂ©. [...] Ă titred'exemple, une personne dont le contrat d'assurance complĂ©mentaire couvre les dĂ©passements et qui a besoind'une prescription de simples lunettes ne va pas avoir d'incitation particuliĂšre Ă tĂ©lĂ©phoner Ă tous lesophtalmologues de son quartier pour chercher lequel (âŠ) propose le dĂ©passement le moins Ă©levĂ©. [...]
David BARDEY, AgnĂšs COUFFINHAL et Michel GRIGNON, «Trop d'assurance peut-il ĂȘtre nĂ©faste? ThĂ©orie du risquemoral ex post en santé», Bulletin d'information en Ă©conomie de la santĂ©, n° 53, juin 2002.
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Exemple 1. Le marchĂ© des automobiles dâoccasion
Document 3.
Dans un article cĂ©lĂšbre (1970), G. Akerlof1 va dĂ©montrer que le prix n'est pasnĂ©cessairement synonyme de qualitĂ©, bonne ou mauvaise selon son Ă©volution.Et pour cela, il prend l'exemple d'un marchĂ© de 100 voitures d'occasion oĂč 50sont des modĂšles de mauvaise qualitĂ© et 50 sont des modĂšles de bonnequalitĂ©. Qui connaĂźt la qualitĂ© exacte du modĂšle proposĂ© ? Certainement pasl'acheteur. Seul le propriĂ©taire dispose de l'information. Pour les acheteurspotentiels, l'asymĂ©trie d'information est totale.Quel sera le prix du marchĂ© ? Tout laisse Ă penser que le propriĂ©taire dâun mauvais modĂšle est prĂȘt Ă le vendrebeaucoup moins cher que le propriĂ©taire d'une voiture de bonne qualitĂ©. Si la qualitĂ© des modĂšles estparfaitement identifiĂ©e, pas de problĂšme. Par contre, que se passe t-il si l'acheteur est incapable d'estimer laqualitĂ© du modĂšle proposĂ© (asymĂ©trie dâinformation) ?Ă cette question, Akerlof rĂ©pond simplement : en proposant un prix unique, qui pourrait ĂȘtre un prix moyen, lemarchĂ© permet uniquement la mise en vente des modĂšles de mĂ©diocre qualitĂ©. A ce prix, les propriĂ©taires desmodĂšles de bonne qualitĂ© se retirent du marchĂ©, le prix moyen du marchĂ© Ă©tant faible. L'asymĂ©trie del'information exclut donc du marchĂ© les produits de bonne qualitĂ© au profit des produits de moindre qualitĂ©. C'estce qu'on appelle donc lâantisĂ©lection ou sĂ©lection adverse. « Les mauvais produits chassent les bons »⊠Ainsi lelaisser faire peut avoir des consĂ©quences dĂ©sastreuses : Ă©limination des bons produits, voire absence dâĂ©change.
1. G. Akerlof, The market for lemons : Quality uncertainity and the market mechanisms, 1970
http://www.creg.ac-versailles.fr/spip.php?article251
Exemple 2 : le marché des assurances santé aux Etats-Unis
Document 4.
L'assurance ne connaĂźt pas le risque rĂ©el des assurĂ©s. En sens inverse, l'assurĂ©peut ne pas avoir toute la visibilitĂ© souhaitable sur l'assurance. Les assurĂ©s sontdonc intĂ©ressĂ©s par des informations sur les caractĂ©ristiques et la qualitĂ© desassurances (par exemple, un assurĂ© amĂ©ricain se demande si telle assurance acontractĂ© avec tel spĂ©cialiste rĂ©putĂ© qui prend en charge la maladie dont il estatteint), ainsi que sur l'action des assurances (il se demande si l'assurance luilaissera facilement consulter ce spĂ©cialiste).Dans le contexte assurantiel amĂ©ricain, les payeurs incitent parfois les mĂ©decins Ă restreindre les soins, parexemple en les intĂ©ressant aux bĂ©nĂ©fices de l'entreprise.Aux Ătats-Unis, les assurances en concurrence ne cherchent pas Ă Ă©valuer finement le risque de chaque groupe etĂ Ă©laborer des tarifications complexes adaptĂ©es aux risques. Ce serait trop coĂ»teux. Ă la tarification diffĂ©rentielledes risques, elles prĂ©fĂšrent la sĂ©lection diffĂ©rentielle des risques (sĂ©lection adverse) : elles refusent de couvrir oudissuadent des personnes ou des groupes soupçonnĂ©s de prĂ©senter un risque Ă©levĂ©.
HervĂ© Nabaiette, « Nobel d'Ă©conomie et asymĂ©tries d'information en santĂ© », dossiers Ăconomie de la santĂ©,Medcost.fr, 19 nov. 2001.
Exemple 3. Le marché du crédit
Document 5.Lorsque les parents ne peuvent pas financer les Ă©tudes de leurs enfants, il estrentable que l'individu emprunte pendant ses Ă©tudes et rembourse la dette avecle surcroĂźt de rĂ©munĂ©ration procurĂ© par la formation supĂ©rieure. Mais lesbanques commerciales sont rĂ©ticentes Ă prĂȘter aux Ă©tudiants sauf lorsque lerisque est trĂšs faible. [...] Pour les autres, le marchĂ© du crĂ©dit fait face Ă unproblĂšme classique d'asymĂ©trie d'information1.D'oĂč l'obligation pour l'emprunteur de fournir une garantie extĂ©rieure sous laforme d'une caution, d'un gage ou d'une hypothĂšque. [...] Les jeunes disposant de peu de ressources ou desoutien familial sont donc fortement pĂ©nalisĂ©s par la contrainte de crĂ©dit, car ils ne peuvent effectuerl'investissement Ă©ducatif qui maximise leurs revenus futurs.1. Si les banques ne peuvent pas distinguer les bons emprunteurs des mauvais, c'est-Ă -dire ceux qui ontrĂ©ellement les capacitĂ©s de faire de bonnes Ă©tudes de ceux qui veulent simplement consommer rapidement leurcrĂ©dit, alors elles vont pratiquer un taux d'intĂ©rĂȘt reflĂ©tant le risque moyen de la population Ă©tudiante. Or, lesemprunteurs les moins risquĂ©s trouveront ce taux trop Ă©levĂ© et prĂ©fĂ©reront ne pas emprunter. Cette situationconduirait la banque Ă ne prĂȘter qu'aux plus risquĂ©s et il est ainsi rationnel pour la banque de ne prĂȘter Ă personne et donc de rationner le crĂ©dit.
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Centre d'Analyse Stratégique, La note de veille, n° 143, Juin 2009
Exercice dâapplication
Imaginons que deux voitures modĂšle Renault Clio blanches soient vendues dâoccasion 4 000 âŹ, sur la base de leurĂąge et de leur kilomĂ©trage calculĂ©s dans l'Argus officiel. L'une est la voiture de Mme Fernandez. Sa Clio est restĂ©eprotĂ©gĂ©e de la corrosion dans son garage et a Ă©tĂ© utilisĂ©e surtout pour des trajets tranquilles sur une route decampagne. En rĂ©alitĂ©, cette voiture en parfait Ă©tat pourrait sans doute trouver preneur Ă 7 000 âŹ.L'autre Clio est la voiture de M. Martin. Son fils l'a beaucoup malmenĂ©e et elle a subi plusieurs accidents, mais unbeau-frĂšre bricoleur l'a remise en Ă©tat. AprĂšs une Ă©tude attentive, elle ne vaudrait sans doute pas plus de 2 000 âŹ.
1. Pourquoi Mme Fernandez ne peut-elle obtenir un prix plus élevé sur le marché pour sa voiture ?
2. Ces deux personnes ont-elles intĂ©rĂȘt Ă vendre leur voiture d'occasion sur le marchĂ© ?
3. Y aura-t-il sur le marché surtout de bonnes occasions ou de mauvaises occasions ? Que pourrait-il alorsadvenir du marché de la voiture d'occasion ?
4. Imaginez par quels moyens l'asymĂ©trie d'information peut ĂȘtre rĂ©duite.
Comment faire apparaßtre les informations cachées : la solution de J. Stiglitz
Document 6.Lâassurance est un domaine dans lequel lesasymĂ©tries d'information sont essentielles.En effet, dans une logique de marchĂ©, les primespayĂ©es dĂ©pendent des risques. Mais comment lesmesurer, alors que l'assureur ne sait pas si l'assurĂ©est bon conducteur ou s'il est en bonne santĂ© ?En l'absence d'information, l'assureur va proposerun contrat moyen, lui laissant un profit satisfaisant.Mais les « bons risques », c'est-Ă -dire les personnesen bonne santĂ©, jeunes et sans enfant, par exemple,prĂ©fĂ©reront se passer d'assurance plutĂŽt que payertrop cher par rapport aux risques qu'elles courent.Seuls vont s'assurer les « mauvais risques », ce quine fait pas l'affaire des assureurs.Pour Joseph Stiglitz, l'assureur doit proposerplusieurs contrats diffĂ©rents : l'un fournit uneprotection complĂšte mais chĂšre, l'autre uneprotection limitĂ©e mais bon marchĂ©. L'assurĂ©, enchoisissant un contrat, rĂ©vĂšle ainsi Ă l'assureur s'ilest un « bon » ou un « mauvais » risque. Dans lespays europĂ©ens, le problĂšme a Ă©tĂ© gĂ©nĂ©ralementrĂ©glĂ© hors marchĂ©, par la solidaritĂ© : l'assurance estobligatoire, publique et identique pour tous, si bienque les « bons risques » payent pour les « mauvaisrisques ».
A. Parienty, Nathan, © 2011.
www.mutmidi
Affaire Ă saisir !!
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Comment amĂ©liorer lâinformation sur les marchĂ©s ?
Document 7.Les asymĂ©tries d'information conduisent gĂ©nĂ©ralement Ă des situations sous-optimales : les assurĂ©s relĂąchent leurattention1, [...] les managers ne maximisent pas le profit, la productivitĂ© du travail est faible, seules les entreprisesrisquĂ©es empruntent2, seules les voitures de mauvaise qualitĂ© sont mises sur le marchĂ© de l'occasion ![Le principal] dispose de plusieurs moyens pour inciter les agents Ă rĂ©vĂ©ler leur information et Ă ne pas secomporter de maniĂšre opportuniste :- dans le cas de l'assurance, les solutions prĂ©conisĂ©es sont bien connues : la sĂ©lection adverse est combattue endiffĂ©renciant les tarifs selon la puissance des voitures et l'Ăąge du conducteur ; face au risque moral, l'assureurpeut instaurer un systĂšme de bonus-malus et une franchise pour les remboursements ;- dans le cas de la relation du travail, les employeurs peuvent augmenter les salaires au-dessus du niveauconcurrentiel pour inciter la main-d'Ćuvre Ă faire des efforts ;- dans le cas de la relation entre le banquier et ses clients potentiels, le «rationnement du crĂ©dit» peut constituerune solution : le banquier n'accepte pas d'accorder un prĂȘt Ă une firme qu'il ne connaĂźt pas, mĂȘme si cettederniĂšre est prĂȘte Ă payer un taux d'intĂ©rĂȘt plus Ă©levĂ©.
1. Comme pour les conducteurs automobiles ou les personnes assurĂ©es contre le vol2. Pour se prĂ©munir contre le risque de ne pas ĂȘtre remboursĂ©s, les banquiers peuvent augmenter leur taux dâintĂ©rĂȘt : lesentreprises capables de rembourser nâemprunteront pas.
Emmanuel Combes, Précis d'économie, PUF, coll. « Major », 2009
Document 8.Comment peut faire un demandeur d'emploi pour signaler une qualitĂ© inobservable Ă l'employeur, se demandel'Ă©conomiste Michael Spence dans un article de 1973 ?Il lui faut fournir un signal attestant ses qualitĂ©s, qui ne puisse ĂȘtre imitĂ© par un autre n'ayant pas les mĂȘmesqualitĂ©s.Spence estime que le diplĂŽme joue ce rĂŽle de signal : la rĂ©ussite Ă un concours d'entrĂ©e signale que le candidat ades capacitĂ©s de travail et de la motivation. Les diplĂŽmes les plus recherchĂ©s sont alors ceux qui fournissent lesmeilleures chances d'accĂšs Ă l'emploi et les meilleurs salaires, ce qui explique pourquoi les diplĂŽmes des grandesĂ©coles sont trĂšs convoitĂ©s, indĂ©pendamment des qualitĂ©s personnelles manifestĂ©es pendant la formation.Cependant, le diplĂŽme n'est pas directement un dĂ©terminant de la productivitĂ© du salariĂ©, note Spence (maĂźtriserles Ă©quations diffĂ©rentielles est-il utile pour faire de la gestion ?). Si bien que le fonctionnement du marchĂ© dutravail est assez peu efficace.L'entreprise doit rĂ©soudre le mĂȘme type de problĂšme : comment signaler au consommateur que ses produits sontde bonne qualitĂ© ?La rĂ©putation d'une marque, construite par le marketing, peut remplir cet objectif. Une autre solution est d'offrirune garantie, qui signifie que l'entreprise a parfaitement confiance dans ses produits. Une solution paradoxale,qui montre bien que l'insuffisance d'information perturbe sĂ©rieusement le marchĂ©, est de pratiquer des prixĂ©levĂ©s, le consommateur supposant, au moins dans un premier temps, qu'ils signalent une qualitĂ© Ă©levĂ©e.
A. Parienty, © Nathan, 2011.
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Les diverses maniĂšres de produire et de diffuser de l'information
1. Le rĂŽle des labels
Document 9.La jurisprudence reconnait comme Label une maque spĂ©ciale, dĂ©livrĂ©e par les pouvoirspublics ou crĂ©Ă©e par un syndicat professionnel prĂ©sentant des garanties dâimpartialitĂ©et de compĂ©tence, apposĂ©e sur un produit destinĂ©e Ă la vente pour en certifierlâorigine, les conditions de fabrication, la qualitĂ©, etc.
2. Le rĂŽle des associations de consommateurs
Document 10.Il est facile de se perdre au cĆur de notre sociĂ©tĂ© de consommation oĂč chaque jour, denouveaux besoins sont crĂ©Ă©s. La nĂ©cessitĂ© d'une information objective et indĂ©pendantese fait parfois sentir, pour consommer intelligemment. [...] Au moyen d'analysesfiables, de tests comparatifs et d'enquĂȘtes sĂ©rieuses et impartiales, l'association QueChoisir a gagnĂ© la confiance des lecteurs et des internautes soucieux de prendre labonne dĂ©cision. [...]Au-delĂ de conseils pour l'achat, [...] l'activitĂ© de Que Choisir vise aussi Ă dĂ©fendre lesdroits du consommateur en le mettant en garde contre les abus des fabricants et desgrandes marques. [...] Cette association de dĂ©fense des consommateurs agit mĂȘme enjustice, quand cela s'avĂšre nĂ©cessaire. »
Comparatif.quechoisir.org
3. Le rĂŽle des comparateurs de prix sur Internet
Document 11.
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II â Les dĂ©faillances du marchĂ© : les biens publics et les externalitĂ©s
Auteur : Jean Magnan de BornierUniversité Aix-Marseille III
http://junon.univ-cezanne.fr
Les échecs du marché
Les marchĂ©s, concurrentiels ou non, ont pour fonction dâassurer la fourniture des biens et des servicesnĂ©cessaires. Dans le cas de certains biens, on constate que les marchĂ©s ne sont pas capables de les fournir, ouquâils ne peuvent Ă©viter certaines consĂ©quences de la production qui sont hautement indĂ©sirables comme parexemple la pollution. On parle alors dâĂ©checs du marchĂ© (La concurrence imparfaite est considĂ©rĂ©e par certainscomme un des cas dâĂ©chec du marchĂ©). On se limitera ici Ă une approche technique desdits Ă©checs, enconsidĂ©rant les deux formes les plus importantes : les biens publics et les externalitĂ©s.
1. Les biens publics
On appelle biens publics purs ou biens collectifs des biens caractérisés par les deux propriétés suivantes :
1. Ils ne sont pas exclusifs, en ce sens que la consommation de ces biens par une personne ne diminue pas lespossibilitĂ©s de consommation des autres ; le fait que jâĂ©coute un concert Ă la radio ne diminue pas la quantitĂ© dece concert disponible pour les autres (propriĂ©tĂ© de "non-concurrence").
2. Ils ne sont pas privatifs, parce quâil est impossible de priver de ces biens celui qui ne voudrait pas payer pour leconsommer. Câest le cas de la lumiĂšre Ă©mise par un phare pour guider les bateaux, de la dĂ©fense nationale ou dela justice.
Les biens publics purs ne correspondent pas nĂ©cessairement Ă ce que fournissent les pouvoirs publics Ă travers lebudget de lâĂtat ; les services dâĂ©ducation fournis part lâĂtat en France ne sont pas des biens publics purs.
La nature des biens collectifs implique le problĂšme du passager clandestin : le financement des biens collectifs estdifficile Ă assurer dans un cadre de production privĂ©e, parce quâon ne peut pas obliger les consommateurs Ă participer Ă ce financement, mĂȘme sâils attachent une grande valeur Ă la consommation du bien.
Chacun compte sur les autres pour assurer le financement de ce bien. Pour le phare par exemple, chaquepropriĂ©taire de bateaux refusera de payer si on le lui demande dans un cadre de marchĂ©, sâil suppose que lesautres propriĂ©taires assureront ce financement. Il est donc probable que le phare ne sera pas construit. Hormiscette hypothĂšse, la production de biens collectifs par lâinitiative privĂ©e est gĂ©nĂ©ralement insuffisante (âŠ)
On considĂšre donc souvent que la production du bien collectif doit ĂȘtre assurĂ©e par les pouvoirs publics, qui ont lacapacitĂ© dâobliger tous les bĂ©nĂ©ficiaires Ă assurer son financement par les mĂ©canismes de lâimpĂŽt. On pourraitmĂȘme dĂ©finir des conditions de production optimale de biens collectifs, qui ressembleraient aux conditions deproduction des biens privĂ©s (coĂ»t marginal = utilitĂ© marginale), chacun payant par lâimpĂŽt en fonction de la valeurquâil attribue aux biens considĂ©rĂ©s, comme dans le cadre de la fourniture de biens privĂ©s par les marchĂ©s.
Mais un des grands problĂšmes qui se posent aux gouvernements est de savoir quels biens publics ils doiventfournir, et en quelle quantitĂ© ? Seuls les consommateurs des services des phares peuvent dire quels sont lesbesoins en phares. Si les services gouvernementaux visitent les bĂ©nĂ©ficiaires potentiels de la production dephares en vue de connaĂźtre la quantitĂ© Ă produire, les armateurs ne voudront pas dire quâils en ont besoin, depeur dâavoir Ă payer les phares par lâimpĂŽt. Câest le problĂšme de la rĂ©vĂ©lation des prĂ©fĂ©rences : comment inciterles consommateurs potentiels de biens publics Ă dire quelle utilitĂ© ces biens prĂ©sentent pour eux, si on lesinterroge pour dĂ©terminer le montant de leur impĂŽt ? La solution du financement par lâimpĂŽt ne rĂ©sout donc pasla question de la quantitĂ© des biens collectifs Ă produire.
La production des biens collectifs dans la pratique bute donc sur ce grave problĂšme et lâĂtat utilise dâautrestechniques pour dĂ©terminer la nature et la quantitĂ© des biens Ă produire sous lâappellation de biens publics, destechniques qui au regard de la thĂ©orie Ă©conomique apparaissent souvent comme arbitraires. Quant aufinancement, il est indiffĂ©renciĂ©, puisque tous les contribuables financent tous les biens collectifs sans que leurpart soit en relation avec la valeur Ă©conomique quâils attribuent aux biens en question.
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Comme on le voit, si le marchĂ© est incapable de fournir efficacement les biens publics, lâĂtat ne le fait quant Ă luique dâune maniĂšre aveugle â au regard de lâefficacitĂ© Ă©conomique.
2. Les externalités
Une externalitĂ© est une influence exercĂ©e par un agent Ă©conomique sur un ou plusieurs autres agents mais nonprise en compte par le systĂšme des prix et des coĂ»ts. Une externalitĂ© apparaĂźt quand le coĂ»t pour la sociĂ©tĂ© dâuneaction (par exemple une production), câest-Ă -dire son coĂ»t social, nâest pas assumĂ© totalement par celui quientreprend cette action : ce dernier nâassume que le coĂ»t privĂ© de son action, ce quâil doit dĂ©bourser.LâexternalitĂ© est caractĂ©risĂ©e par une divergence entre coĂ»t social et coĂ»t privĂ© â ce dernier Ă©tant plus faible encas dâexternalitĂ© nĂ©gative.
La pollution de lâair ou dâune riviĂšre par une entreprise est un exemple classique dâexternalitĂ© : lâentreprise subitles coĂ»ts normaux de production, constituĂ©s de lâachat des ressources quâelle achĂšte ; ces coĂ»ts privĂ©s font partiedu coĂ»t social, puisque des ressources sont dĂ©truites. Mais la destruction de lâenvironnement ne figure pas parmices coĂ»ts privĂ©s, alors quâelle fait partie du coĂ»t social. Cette divergence fausse le calcul Ă©conomique duproducteur, puisquâil produit sans tenir compte de tous ses coĂ»ts.
Dans le cas dâune externalitĂ© positive, le bĂ©nĂ©fice privĂ© dâune action est infĂ©rieur Ă son bĂ©nĂ©fice public : parexemple un pianiste de gĂ©nie qui rĂ©pĂšte dans sa maison ignore que ses voisins lâĂ©coutent et en tirent une grandesatisfaction ; il sâarrĂȘte de jouer dĂšs que son propre programme de rĂ©pĂ©tition est rempli alors que le bĂ©nĂ©ficesocial pourrait ĂȘtre accru, parce quâil ne tient pas compte de la satisfaction Ă©prouvĂ©e par ses voisins.
Comme on le voit, les externalitĂ©s sâopposent Ă la pleine efficacitĂ© Ă©conomique. La solution classique au problĂšmedes externalitĂ©s a Ă©tĂ© proposĂ©e par A. C. Pigou au dĂ©but du XXĂšme siĂšcle, Ă travers une intervention de lapolitique Ă©conomique qui serait destinĂ©e Ă diminuer les Ă©missions dâexternalitĂ©s nĂ©gatives et Ă encourager lesĂ©missions dâexternalitĂ©s positives. Dans le premier cas on taxerait les Ă©missions dâexternalitĂ©s et dans le secondon les subventionnerait. Cette mesure, si elle est bien calculĂ©e, permettra aux agents dâopĂ©rer leur calculĂ©conomique en tenant compte de lâexternalitĂ©. La divergence entre coĂ»t social et coĂ»t privĂ© disparaĂźtrait ainsi : onparle alors dâinternalisation des externalitĂ©s.
Dans les annĂ©es 1960-70, une remise en cause de cette approche a Ă©tĂ© proposĂ©e par Ronald Coase. CoaseconsidĂšre que cette opposition entre coĂ»t social et coĂ»t privĂ© nâa de sens quâĂ certaines conditions ; dans le casdâune pollution par exemple, la divergence coĂ»t social - coĂ»t privĂ© ne se prĂ©sente que sâil existe un vide juridique Ă propos de la propretĂ© du bien polluĂ©.
Prenons lâexemple dâune riviĂšre qui est polluĂ©e par une usine dĂ©versant des rejets toxiques qui tuent le poisson etrendent impossible la baignade. Le voisin en aval de lâusine ne peut donc plus ni pĂȘcher ni se baigner, encoremoins boire lâeau de cette riviĂšre : il subit une externalitĂ© nĂ©gative. Pour Coase, il faut se demander si le droit dulieu oĂč se dĂ©roule cette triste histoire protĂšge le voisin, ou sâil autorise lâusine Ă polluer Ă son grĂ©, ou encore sâilest muet, ignorant le problĂšme.
Si lâun des protagonistes dispose dâun droit sur la riviĂšre (droit de la polluer ou droit de la conserver propre), leraisonnement de Coase aboutit Ă montrer que la nĂ©gociation entre les agents concernĂ©s est parfaitementsuffisante pour rĂ©gler la question en Ă©liminant la dissociation entre coĂ»t social et coĂ»t privĂ©. Il montre aussi quelâoptimum sera atteint dans ces conditions, quel que soit le titulaire du droit (le pollueur ou le polluĂ©). Commebeaucoup de rĂ©sultats Ă©conomiques, ce thĂ©orĂšme nâa de validitĂ© empirique quâautant que ses hypothĂšsessâappliquent. Une hypothĂšse importante ici est que les agents ont la possibilitĂ© de nĂ©gocier sans difficultĂ©, sanscoĂ»t. Le thĂ©orĂšme de Coase repose donc sur lâabsence de coĂ»ts de transaction.
Dâautre part, les cas dâexternalitĂ© avec un Ă©metteur et de nombreux rĂ©cepteurs
â câest le cas gĂ©nĂ©ralement de la pollution des riviĂšres ou de la pollution atmosphĂ©rique
â ne se prĂȘtent pas facilement Ă la mĂ©canique du thĂ©orĂšme, puisquâon imagine mal un pollueur traiter avec unemultitude de polluĂ©s pour obtenir leur autorisation.
Une autre approche rĂ©cente, qui a Ă©tĂ© mise en Ćuvre par les autoritĂ©s publiques dans certains cas, est la crĂ©ationdâun marchĂ© des droits Ă polluer.
Jean Magnan de Bornier, Université Aix-Marseille IIILectures complémentaires :
N. G. MANKIW : Chapitres 4, 6, 7, 10, 11, 15, 16
J. STIGLITZ : Chapitres 7, 13, 14, 15, 21
17
A- Les externalités
1°â DĂ©finition des externalitĂ©s
Document 1 : Le concept dâexternalitĂ© dans la littĂ©rature Ă©conomique : quelques exemples fondateurs
Source : Marie-France Jarret, Maßtre de Conférences en Sciences Economiques, Université du Maine,Fonds pour la Recherche en Ethique Economique http://www.ethique-economique.fr
1. A lâorigine : Arthur Pigou (1932, 4Ăšme Ă©dition, The economics of welfare, 1Ăšre Ă©dition, 1920)Une externalitĂ© correspond Ă une situation oĂč : « une personne A, en mĂȘme temps quâelle fournit Ă une personneB un service dĂ©terminĂ© pour lequel elle reçoit un paiement, procure par la mĂȘme occasion Ă dâautres personnes,des avantages ou des inconvĂ©nients dâune nature telle quâun paiement ne puisse ĂȘtre imposĂ© Ă ceux qui enbĂ©nĂ©ficient, ni une compensation pour ceux qui en souffrent ». DĂ©finition qui insiste sur le caractĂšre hors marchĂ©de lâeffet externe (extĂ©rieur Ă lâĂ©change marchand) qui peut ĂȘtre positif ou nĂ©gatif.Lâexemple initialement donnĂ© par Pigou est celui - externalitĂ© nĂ©gative- de la locomotive Ă vapeur (le train servantau transport des voyageurs et des marchandises) qui dĂ©clenche sur son passage des incendies dĂ©truisant lesrĂ©coltes ou les forĂȘts ; dâoĂč un prĂ©judice pour des personnes ne participant pas Ă lâĂ©change du service ferroviaire.Cette externalitĂ© nĂ©gative est bien illustrĂ©e aujourdâhui par la pollution : si A est une usine fabriquant des produitschimiques pour B, et si, lors de lâactivitĂ© de production, les Ă©manations des cheminĂ©es de A sont susceptibles derendre les cultures de lâagriculteur riverain impropres Ă la consommation.
2. James Meade, 1952, The theory of economic externalities : the control of environnemental pollution andsimilar costs : les externalités pécuniaires
Est surtout connu pour sa « fable » de lâapiculteur : un apiculteur profite de sa proximitĂ© avec un arboriculteur, etrĂ©ciproquement. Les abeilles de l'apiculteur pollinisent les arbres de l'arboriculteur qui font des fruits et les arbresde l'arboriculteur nourrissent les abeilles avec le nectar et le pollen. Il s'agit d'un effet bĂ©nĂ©fique croisĂ©involontaire entre les deux activitĂ©s.Sa dĂ©finition : « une Ă©conomie (ou dĂ©sĂ©conomie) externe est un phĂ©nomĂšne qui apporte un bĂ©nĂ©fice apprĂ©ciable(ou inflige un prĂ©judice significatif) Ă une ou plusieurs personnes qui nâont pas Ă©tĂ© parties prenantes du processusde dĂ©cision qui a abouti directement ou indirectement Ă lâeffet produit ».
Document 2.
On dit qu'existe un effet externe (ou externalitĂ©) lorsque l'activitĂ© d'un agent Ă©conomique affecte le bien-ĂȘtre oule profit d'autres agents, sans qu'il nây ait de transactions sur le marchĂ©. Par exemple, on analyseraĂ©conomiquement la pollution due Ă l'activitĂ© productive d'une entreprise comme un effet externe que celle-ciimpose aux autres agents Ă©conomiques, rĂ©duisant le bien-ĂȘtre des consommateurs ou les possibilitĂ©s deproduction d'autres producteurs. L'externalitĂ© peut aussi ĂȘtre interprĂ©tĂ©e comme l'Ă©cart entre le coĂ»t social,c'est-Ă -dire pour l'ensemble de la sociĂ©tĂ©, de l'activitĂ© de l'entreprise et son coĂ»t privĂ© ; chaque fois qu'une partiedu coĂ»t social de son activitĂ© (comme le coĂ»t de la pollution) n'est pas supportĂ©e par l'entreprise au titre de sescoĂ»ts privĂ©s, il existera un effet externe. Une externalitĂ© empĂȘche le marchĂ© de conduire Ă une situationoptimale.
S. Faucheux et J.-F. Noël, Les Menaces globales sur l'environnement, éd. La Découverte, 1990
Exercice : Les situations suivantes engendrent-elles des externalités positives, négatives ou nulles ?
externalitéspositives
externalitésnégatives
A- Lâexistence dâun aĂ©roport pour les riverains ?
B- Le dégazage au large des cÎtes par des bateaux ?
C- Le bruit produit par ses voisins ?
D- La diffusion des connaissances scientifiques dans lâĂ©conomie ?
E- Une campagne de vaccination contre la grippe
18
Fiche dâĂ©valuation des externalitĂ©s
Exercice 1 : ComplĂ©tez le texte Ă trous Ă lâaide des termes suivants :
monĂ©taire â avantage â prix â marchĂ© â nĂ©gatives â coĂ»t â positives â externalitĂ© âeffets externes â dommage â coĂ»t social
Un agent Ă©conomique provoque une âŠâŠâŠâŠâŠ..âŠ..âŠâŠâŠ.. Quand son action a un effet Ă©conomique sur des tiers
sans que cet effet soit pleinement reflĂ©tĂ© dans les âŠ.âŠâŠâŠâŠâŠ..⊠du marchĂ©. En effet, les externalitĂ©s ou
âŠâŠâŠâŠâŠ...âŠâŠâŠâŠâŠâŠ regroupent les effets crĂ©Ă©s par un agent Ă©conomique qui procurent Ă autrui un avantage
gratuit ou un âŠâŠâŠâŠâŠâŠ..âŠ..âŠâŠâŠ sans compensation âŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠ..âŠ...
Lâeffet est dit « externe » car il nâest pas pris en compte par le âŠ.âŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠ et son systĂšme de prix. Ainsi,
quand une entreprise pollue lâenvironnement sans payer le âŠâŠâŠâŠâŠ.âŠâŠâŠâŠâŠ de cette pollution, câest-Ă -dire le
coĂ»t de cette pollution pour la collectivitĂ©, le coĂ»t du produit pour lâentreprise et son prix de vente ne reflĂštent
pas lâensemble des coĂ»ts.
On distingue :
- des externalitĂ©s âŠâŠâŠâŠâŠ.âŠ..âŠâŠâŠ.. quand un acteur de la vie Ă©conomique subit un âŠâŠâŠâŠâŠâŠ..âŠ.⊠quâil nâa
pas librement accepté ;
- des externalitĂ©s âŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠ.âŠ..âŠ.âŠquand un acteur de la vie Ă©conomique bĂ©nĂ©ficie dâun âŠâŠâŠâŠâŠ.âŠâŠ..âŠâŠ
quâil nâa pas eu Ă payer directement.
Exercice 2 : Classez les externalités suivantes dans le tableau :
Gaz dâĂ©chappement des automobiles â Vaccination â Recherche de nouvelles technologies â PĂ©trolier vidangeantses cuves en haute mer â FumĂ©e de cigarettes dans une voiture â Stage de formation â MĂ©tro dans une ville
Externalités positives Externalités négatives
Externalités de
consommation
âŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠ..âŠâŠâŠâŠâŠ.
âŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠ..âŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠ.
âŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠ..âŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠ.
âŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠ.
âŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠ.âŠâŠâŠâŠ.
âŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠ.âŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠ.
ExternalitĂ©s de productionâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠ..âŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠ.
âŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠ.âŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠ.
âŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠ..âŠâŠâŠâŠ.
âŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠ.âŠâŠâŠâŠâŠ.
âŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠ.âŠâŠâŠâŠâŠ.
âŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠ.âŠâŠâŠâŠâŠ.
Exercice 3. RĂ©sumons-nous âŠ. une externalitĂ© produite par A (auteur) et qui impacte BComplĂ©tez le tableau en utilisant les notions suivantes : « N'est pas compensĂ© » et « N'a pas Ă payer »
Externalité négative Externalité positive
A (auteur) âŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠ. âŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠ.
B (affectĂ© par l'action de A) âŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠ. âŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠâŠ.
dâĂ©quilibre
2° â Comment gĂ©rer les externalitĂ©s ?
a) â La solution de PIGOU : lâinternalisation des effets externes
Document 1.Les externalitĂ©s sont les effets (principalement nĂ©gatifs dans le cadre de lâĂ©conomie delâenvironnement) dâune action sur dâautres parties lorsque ces effets nâont pas Ă©tĂ© pris encompte par lâauteur de lâaction. Ces effets nâont pas donnĂ© lieu Ă Ă©change ou Ă compensation monĂ©taire. Comment les prendre en compte ?En internalisant les effets externes = faisant Ă©merger un signal-prix incitant les agents Ă modifier leur comportement.Lâinternalisation des effets externes passe, dâun point de vue Ă©conomique par deux grandespossibilitĂ©s :- soit, comme le prĂ©conise A. Pigou, « on » instaure une taxe administrative (1)- soit, comme le prĂ©conise R. Coase ou Dales « on » crĂ©e les conditions dâune nĂ©gociation bilatĂ©rale entreĂ©metteur et victime de lâexternalitĂ©.Pour Pigou, lâexternalitĂ©, positive ou nĂ©gative, est analysable en termes de divergence entre le coĂ»t privĂ© et lecoĂ»t pour la collectivitĂ© ou coĂ»t social ; cet Ă©cart fait que lâon ne se trouve pas dans une situation Pareto-optimale.Lâensemble des coĂ»ts imposĂ©s par une activitĂ© Ă la collectivitĂ© constitue le coĂ»t social.Une partie ou peut-ĂȘtre lâensemble de ce coĂ»t social est compensĂ© par les paiements effectuĂ©s par lâagent Ă lâorigine de lâactivitĂ© (coĂ»t des matiĂšres premiĂšres, du capital, coĂ»t du facteur travail) : ce sont les coĂ»ts privĂ©s.Dâautres coĂ»ts peuvent ĂȘtre imposĂ©s Ă dâautres agents sans quâun paiement serve de compensation (le feu auxrĂ©coltes, les Ă©manations de fumĂ©es toxiques, la riviĂšre polluĂ©e,⊠autant dâĂ©vĂšnements qui entraĂźnent toute unesĂ©rie de coĂ»ts = perte de rĂ©coltes, impossibilitĂ© de consommer les produits agricoles, impossibilitĂ© de consommerlâeau, problĂšmes de santĂ©, Ă©puisement des ressources naturelles...)Ces coĂ»ts sans compensation pĂ©cuniaire peuvent nĂ©anmoins ĂȘtre Ă©valuĂ©s monĂ©tairement.DĂšs lors, si ces coĂ»ts sont pris en compte dans la somme des coĂ»ts qui dĂ©terminent le coĂ»t social, celui ci serĂ©vĂšle ĂȘtre bien supĂ©rieur au coĂ»t privĂ©.
(1) Câest le mode dâinternalisation dĂ©veloppĂ© par Pigou (1920) qui sert de fondement thĂ©orique au principe pollueur-payeurĂ©noncĂ© par lâOCDE en 1972 et repris en France 2008
Source : Marie-France Jarret, Maßtre de Conférences en Sciences Economiques, Université du Maine, Fonds pourla Recherche en Ethique Economique http://www.ethique-economique.fr
Exercice 1. Effets dâune taxe dĂ©cidĂ©e par lâĂtat suite Ă une pollution liĂ©e Ă la production de coton
1. Situation du marché sans externalités 2. Situation du marché avec externalités
Q*
1. Quel est lâeffet de la mise en place dâune taxe, po
2. Quelle est la conséquence de cette taxe sur les q
Quantités
Offre
Demande
Equilibre
du marché
Prix
e
Arthur C. PIGOU
P1
P*
Q1 Q* Quantités
Offre 1
Demand
Offre 2
P* = prix
ur réduire la pollution, sur le prix payé
uantitĂ©s dâĂ©quilibre ?
par le
19
consommateur?
dâĂ©quilibre
P1
Exercice 2. Effets dâune subvention accordĂ©e par lâĂtat pour encourager une production
L'Etat peut internaliser les effets externes positifs. Prenons l'exemple d'un parc d'attractions qui attire destouristes dont profitent les commerçants d'une commune. Sans intervention des pouvoirs publics, le parcd'attraction ne tient compte que de son coût marginal privé (Offre 1).En réalité, son activité crée un avantage social qu'il faudrait prendre en compte. Ici, le coût social (offre 2) est plusfaible que le coût privé. Donc, sans intervention des pouvoirs publics, la production est trop faible par rapport à l'optimum. Cette fois-ci, la force publique doit subventionner l'entreprise de façon à augmenter ses recettes pourégaliser la recette marginale privée et l'avantage marginal social.
Q* Q1
1. Quel est lâeffet de la mise en place dâune subvention par
2. Quelle est la conséquence de cette subvention sur les qu
Exercice 3. Internaliser une externalité de consommation
Partie 1.
Fumer provoque une externalitĂ© nĂ©gative en imposant unpassifs. La consommation de cigarettes entraĂźne Ă©galementl'espĂ©rance de vie plus faible des fumeurs. Le centre amĂ©social moyen de la consommation d'un paquet de cigaretteexternalitĂ©s nĂ©gatives. Le tableau suivant indique le prix dĂtats.
ĂtatsPrix des cigarettes taxe comp
(par paquet)
Californie 4,40$
New-York 5,82$
Floride 3,80$
Texas 4,76$
Ohio 4,60$
Paul Krugman, M
1. Pourquoi le coĂ»t sociĂ©tal de la consommation dâun paqcoĂ»t privĂ© (prix de vente) dâun paquet de cigarette ?
2. Pourquoi la mise en place dâune taxe plus Ă©levĂ©e sur laefficace afin que le coĂ»t sociĂ©tal soit effectivement pris
3. Vous produirez un schĂ©ma de marchĂ© des cigarettes (ographique dâune telle mesure.
4. Dâautres solutions non Ă©conomiques sont elles possible
Prix
Subvention
r
r
f
Offre 1
Offre 2
lâE
ant
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icro
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Demande
P* = prix
t
i
usaac
Ă©
c
,
20
at sur le prix payé par le consommateur?
tĂ©s dâĂ©quilibre ?
e pour la santé de ce que l'on appelle les fumeurspertes de productivité pour l'économie à cause de
in pour le contrĂŽle des maladies a estimĂ© le coĂ»tns diffĂ©rents Ătats en prenant en considĂ©ration cesigarettes et le CoĂ»t social moyen estimĂ© dans cinq
Estimation du coût de la consommation decigarettes en2006 (par paquet)
15,10$
21,91$
10,14$
9,94$
9,19$
conomie, 1Úre éd. De Boeck université. 2009. Bruxelles.
de cigarettes est-il systématiquement supérieur au
sommation est-elle une solution Ă©conomiqueompte ?
demande, prix, quantitĂ©) et reprĂ©senterez lâeffet
Quantités
21
Partie 2.
Le transport routier engendre des effets decongestion et surtout de pollutionatmosphĂ©rique, qui entraĂźnent un coĂ»tmarginal social que lâon estime au double ducoĂ»t marginal privĂ©.
1°- OĂč se trouverait sur le graphique lâĂ©quilibrecorrespondant Ă un optimum social ?
2°- Montrer la tendance à la surproduction parle marché des biens ou services engendrant desexternalités négatives.
Exemple : La Directive Eurovignette
Document 2.
Les députés ont voté hier le compromis trouvé avec le Conseil concernant la révision de la Directive Eurovignette.Les Etats membres pourront majorer en 2013 les tarifs des péages pour la pollution et la congestion générées parles poids lourds.Les députés européens ont approuvé le 7 juin en seconde lecture par 505 voix contre 141 et 17 abstentions letexte présenté par l'eurodéputé Saïd El Khadraoui (S&D, BE) révisant la Directive Eurovignette datant de 1999. LeParlement a voté en pléniÚre l'accord trouvé le 23 mai dernier avec les ministres européens. Le nouveau textepermet désormais aux Etats membres qui le souhaitent d'imposer des frais de péage supplémentaires aux poidslourds pour la pollution atmosphérique et les nuisances sonores qu'ils génÚrent. Il introduit le principe dupollueur-payeur au sein de l'UE en internalisant ''ces coûts externes" causés par les poids lourds utilisant lesinfrastructures routiÚres.
Des tarifs de pĂ©age majorĂ©sâŠLa Directive concernera donc les axes transeuropĂ©ens Ă©largis dĂ©sormais aux autoroutes (soit 30.000 km) ets'appliquera aux poids lourds de plus de 3,5 tonnes. [Si les pĂ©ages actuels coĂ»tent entre 15 et 25 centimes parkilomĂštre en moyenne pour les poids lourds,] le texte prĂ©voit une augmentation des redevances au pĂ©agecomprise entre 3 et 4 centimes d'euros par vĂ©hicule et par kilomĂštre. Le paiement s'effectuera par des systĂšmesĂ©lectroniques qui devront ĂȘtre opĂ©rationnels au niveau de l'UE d'ici 2012.Les Etats membres pourront en pĂ©riode de congestion, moduler les tarifs des pĂ©ages en les majorant jusqu'Ă 175% aux heures de pointe mais seulement durant 5 heures par jour. Dans les zones sensibles et montagneuses,une majoration pourra aussi ĂȘtre appliquĂ©e jusqu'Ă 25 % pour les vĂ©hicules aux classes d'Ă©missions les pluspolluantes (EURO 0 Ă II), et sera Ă©tendue le 1er janvier 2015 Ă la classe EURO III.âŠet des exonĂ©rationsDes dĂ©rogations peuvent toutefois ĂȘtre obtenues par les pays membres pour les poids lourds jusqu'Ă 12 tonnes.Les demandes d'exceptions seront examinĂ©es par la Commission europĂ©enne. Des exonĂ©rations sont prĂ©vuespour les poids lourds ''aux moteurs les plus propres'' de la classe d'Ă©mission EURO VI (en vigueur en 2014)jusqu'au 1er janvier 2018. Tandis que les vĂ©hicules aux normes EURO V (effectives depuis octobre 2009) le serontjusqu'au 1er janvier 2014.Les recettes de la taxe devront donc ĂȘtre investies Ă hauteur de 15% dans l'amĂ©lioration des rĂ©seaux de transporttranseuropĂ©ens (RTE-T). Les sommes restantes ''devraient servir Ă attĂ©nuer les nuisances et Ă dĂ©velopperl'ensemble des systĂšmes de transport de façon durable'', selon les eurodĂ©putĂ©s. La Directive oblige en revancheles Ătats membres Ă ''faire rapport rĂ©guliĂšrement et de maniĂšre transparente'' sur la façon dont ils utilisent lesrecettes totales des pĂ©ages.Le Conseil des ministres des transports devrait dĂ©finitivement Ă son tour approuver le texte ''avant l'Ă©tĂ©''. LesEtats membres auront deux ans pour transposer la Directive qui s'appliquera d'ici 2013.Une "occasion manquĂ©e" d'Ă©cologisation des transports routiers ?Si la fĂ©dĂ©ration France Nature Environnement a notamment saluĂ© l'accord, Europe Ecologie Les Verts - qui a toutde mĂȘme votĂ© le texte - a toutefois regrettĂ© une ''occasion manquĂ©e'' d'intĂ©grer tous les coĂ»ts externes (sociaux,sanitaires, environnementaux et Ă©conomiques) dans la Directive.
"Bien que les coĂ»ts du bruit et de la pollution atmosphĂ©rique seront inclus dans la taxe, d'autres «coĂ»ts externes»du transport routier ont totalement Ă©tĂ© laissĂ©s de cĂŽtĂ©. Il est dĂ©concertant que les coĂ»ts des accidents de la routeseront exclus de la taxation. L'environnement obtient Ă©galement peu de cas, avec les coĂ»ts du paysage et dedommages Ă la biodiversitĂ© et au changement climatique qui ont Ă©galement Ă©tĂ© ignorĂ©s'', a dĂ©noncĂ© le dĂ©putĂ©Michael Cramer en charge des transports au sein du parti. ''Coquille vidĂ©e de ses ambitions par les Etats-Membres,l'Eurovignette est une petite Ă©tape vers le principe pollueur-payeur (âŠ) La route est encore longue vers un avenirdurable des transports'', a ajoutĂ© l'eurodĂ©putĂ© Jean-Paul Besset, membre d'EELV.
Rachida Boughriet, actu-environnement.com, du 08 Juin 2011
Document 3 : Explication du mécanisme de la taxe carbone ?http://developpementdurable.com/economie/2011/04/A5921/leurope-veut-mettre-en-place-une-taxe-carbone-des-2013.html
b) â La solution de COASE et de DALES
Ronald Coase, John Dales : droits de propriété, marchandage et marché de droits à polluer 1
Document 4. (suite document 1)
R. Coase (1960), nĂ©gociation bilatĂ©rale (marchandage), droits de propriĂ©tĂ© : pour Coase, quicritique la solution de Pigou car elle est unilatĂ©rale, lâinternalisation dâeffets externes ne peutĂȘtre effectuĂ©e que lors dâune nĂ©gociation (un marchandage) entre Ă©metteur et victime2 donc apriori, pas dâintervention Ă©tatique. Une condition essentielle est nĂ©anmoins la nullitĂ© des coĂ»tsde transaction (en lâoccurrence, dâorganisation de la nĂ©gociation) ; ce qui est peu probable.Pour Coase, la nĂ©gociation bilatĂ©rale aboutit Ă deux variantes symĂ©triques :- variante 1 : lâĂ©metteur de lâexternalitĂ© nĂ©gative verse une indemnitĂ© compensatoire Ă lavictime pour les dommages subis du fait du maintient de son activitĂ©.- variante 2 : la victime potentielle verse une somme susceptible de dissuader lâĂ©metteur de sactivitĂ© nuisible [âŠ]Du point de vue de la recherche du niveau optimal de pollution, ces deux solutions sont Ă©quivalentComment sâĂ©tablit le choix de lâune ou lâautre des variantes au cours de la nĂ©gociation ?Selon Coase, cela dĂ©pend de lâallocation initiale des droits de propriĂ©tĂ©.Dans le cas dâune pollution issue de A et touchant B si A possĂšde les droits de propriĂ©tĂ© sur lâealors B, la victime, doit le dĂ©dommager pour lâempĂȘcher de continuer son activitĂ© polluante mais sdroits, A doit compenser les dommages subis par B.Cette solution nâimplique, a priori, aucune intervention de lâĂtat, si ce nâest la dĂ©volution des droits d
Dales (1968), lâĂ©change de droits de propriĂ©tĂ© : pour Dales, les externalitĂ©s sont essentiellement dou Ă la mauvaise dĂ©finition des droits de propriĂ©tĂ© sur les biens. En particulier les « biens enviro(lâair, lâeau..) sont souvent considĂ©rĂ©s comme des biens « libres », non appropriĂ©s et donc non Ă©condâautres biens, les droits de propriĂ©tĂ© sont « attĂ©nuĂ©s» : particuliĂšrement les biens publics, consosans « rivalitĂ© » et sans « exclusion ».Si des droits de propriĂ©tĂ© exclusifs3 et transfĂ©rables4 peuvent ĂȘtre dĂ©finis sur les biens environnproblĂšmes dâenvironnement peuvent ĂȘtre rĂ©glĂ©s par une nĂ©gociation bilatĂ©rale directe, un marchentre dĂ©tenteurs de droits de propriĂ©tĂ©. Si ce nâest pas le cas, Dales propose dâĂ©tablir des droiexclusifs et transfĂ©rables chaque fois quâil est nĂ©cessaire sur des biens jugĂ©s jusque lĂ comme nonet comme tels, sources dâexternalitĂ©s. La constitution des droits de propriĂ©tĂ© et leur Ă©change marcla fixation dâun prix dâĂ©quilibre (qui est un optimum au sens de Pareto). A ce prix lâexternalitĂ© est rle calcul Ă©conomique des agents (elle est internalisĂ©e) et disparaĂźt en tant que phĂ©nomĂšne horsdroits sont crĂ©Ă©s et peuvent sâĂ©changer, lâincitation financiĂšre Ă prĂ©server la ressource est retrouvĂ©
1Le marché des droits à polluer est à attribuer à Dales (1968).
2Une des principales critiques Ă lâidĂ©e du marchandage a Ă©tĂ© Ă©mise par Hans Jonas et son principe responsabilitĂ© : un m
possible avec les générations que nous ne connaitrons pas ?3
Droits de propriĂ©tĂ© exclusifs : tous les coĂ»ts et tous les bĂ©nĂ©fices liĂ©s Ă la possession et Ă lâusage de la ressource doivedu propriĂ©taire ou lui revenir, soit directement, soit indirectement par lâĂ©change marchand4
Droits de propriété transférables : tous les droits sont librement transférables par échange volontaire
22
e livrer Ă cette
es.
nvironnement,i B possĂšde ces
e propriété.
ues Ă lâabsencennementaux »omiques. Pour
mmés par tous
ementaux, lesandage (Coase)ts de propriété
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e.
archandage est-il
nt ĂȘtre Ă la charge
Ronald COASE
23
Le systĂšme conduit Ă dĂ©finir le prix optimal du droit Ă polluer par le jeu des offres et des demandes de droits.Le prix de la pollution nâest plus administrĂ© comme chez Pigou. Ces droits Ă polluer fournissent une incitationpermanente pour les agents pollueurs Ă adopter des procĂ©dĂ©s moins polluants et permettent une rĂ©partitionefficace des efforts de dĂ©pollution, puisque lâon minimise le coĂ»t global de rĂ©alisation dâun niveau globaldâĂ©mission. Ceux qui ont les coĂ»ts de dĂ©pollution les plus faibles peuvent vendre leurs droits Ă ceux qui ont lescoĂ»ts les plus Ă©levĂ©s.Lâinstauration dâun marchĂ© de droits Ă polluer nĂ©cessite lâintervention de la puissance publique au stade de laconception du dispositif et sâeffectue en trois Ă©tapes :â la fixation dâun plafond global de pollution ;â la rĂ©partition des droits entre les acteurs concernĂ©s par lâexternalitĂ© ;â lâautorisation dâĂ©change des droits.
Marie-France Jarret http://www.ethique-economique.fr
Le thĂ©orĂšme de COASE : les vertus magiques de lâĂ©change
Document 5.
L'idĂ©e dĂ©veloppĂ©e par Coase qu'en l'absence de coĂ»ts de transaction la nĂ©gociation permettait d'atteindre unoptimum a conduit Ă la formulation du thĂ©orĂšme Ă©ponyme.Coase part de l'idĂ©e que l'Ă©change ne porte pas tant sur un bien que sur le droit d'utiliser ce bien, c'est-Ă -dire surles droits de propriĂ©tĂ©, que cette utilisation provoque des effets externes ou non.Il Ă©crit : « J'ai expliquĂ© dans « Le problĂšme du coĂ»t collectif » que ce qui est Ă©changĂ© sur le marchĂ©, ce n'est pas,comme il est souvent supposĂ© par les Ă©conomistes, des entitĂ©s physiques, mais les droits d'exercer certainesactions, et que les droits que les individus possĂšdent sont Ă©tablis par le systĂšme lĂ©gal».Il avance l'idĂ©e qu'une allocation optimale dos ressources peut ĂȘtre atteinte grĂące au mĂ©canisme des prix, mĂȘmeen prĂ©sence de nuisances, c'est-Ă -dire d'extemalitĂ©s nĂ©gatives5. Quelle que soit l'allocation initiale des droits, icide nuire ou d'ĂȘtre protĂ©gĂ© des nuisances, des nĂ©gociations directes entre les parties concernĂ©es portant sur cesdroits vont se poursuivre, jusqu'Ă ce que soient Ă©puisĂ©es toutes les possibilitĂ©s d'Ă©changes mutuellementavantageux. On atteint alors par dĂ©finition une situation Pareto-optimale. Cette solution ne fait intervenir l'Ătatque pour dĂ©finir et attribuer initialement les droits et elle permet de parvenir Ă une allocation optimale par lanĂ©gociation directe. En outre, cette allocation des ressources est dans les exemples de Coase, indĂ©pendante del'attribution initiale des droits ; peu importe qui en est le bĂ©nĂ©ficiaire, ce qui est nĂ©cessaire c'est que les droitssoient attribuĂ©s Ă l'un ou l'autre dos partenaires de la nĂ©gociation (Ă celui qui provoque la nuisance ou Ă celui quila subit).Dans les exemples qu'il dĂ©veloppe, Coase pose deux hypothĂšses explicites. La premiĂšre est que l'objet de lanĂ©gociation, c'est-Ă -dire le droit de propriĂ©tĂ©, est clairement dĂ©fini. Par exemple, une entreprise qui achĂšte unprocĂ©dĂ© de fabrication polluant doit possĂ©der le droit d'utiliser ce procĂ©dĂ© mĂȘme s'il provoque l'Ă©mission defumĂ©es polluantes, que ce droit lui soit attribuĂ© initialement ou qu'elle l'achĂšte. Il ajoute une deuxiĂšme hypothĂšse; les transactions Ă©puisent les gains de l'Ă©change Ă condition qu'elles soient sans coĂ»t. En d'autres termes, les «coĂ»ts de transaction » (dĂ©couvrir qui souhaite Ă©changer, informer les partenaires potentiels que l'on souhaiteĂ©changer et en quels termes, conduire les nĂ©gociations qui mĂšnent Ă un accord, rĂ©diger le contrat, entreprendreles contrĂŽles nĂ©cessaires pour s'assurer que les termes du contrat sont suivis, etc.) sont nuls.L'idĂ©e gĂ©nĂ©rale que l'Ă©change conduit Ă une allocation optimale, et que cette allocation est indĂ©pendante del'attribution initiale de droits, dans un monde oĂč les droits de propriĂ©tĂ© sont clairement dĂ©finis et oĂč les coĂ»ts detransaction sont nuls, est appelĂ©e « thĂ©orĂšme de Coase ». Bien que Coase ne l'ait pas Ă©noncĂ© lui-mĂȘme, il ne lerĂ©fute pas. Le premier Ă utiliser ce terme est Stigler6 en 1966 : « Peu importe qui, aux yeux de la loi, estresponsable des dommages [âŠ] le thĂ©orĂšme de Coase affirme qu'en rĂ©gime de concurrence parfaite, les coĂ»tscollectifs sont Ă©gaux aux coĂ»ts privĂ©s ».
Le « thĂ©orĂšme de Coase, une rĂ©flexion sur les fondements micro-Ă©conomiques de lâintervention publique », E.Bertrand et C. Destais, De Boeck UniversitĂ©, Reflets et perspectives de la vie Ă©conomique, 2002 pages 111 Ă 124
5 MĂȘme si le problĂšme que se pose Coase ne concerne pas les externalitĂ©s positives, on peut considĂ©rer que le raisonnement coasien reste valable dans cecas, ainsi que les critiques qui lui sont adressĂ©es6George J. Stigler (1911-1991), prix Nobel d'Ă©conomie en 1982, a consacrĂ© l'essentiel de ses travaux Ă l'intĂ©gration des coĂ»ts d'information dans le
raisonnement Ă©conomique et Ă l'analyse du phĂ©nomĂšne de captation des rĂ©gulateurs par les intĂ©rĂȘts privĂ©s auxquels la rĂšgle s'applique.
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Document 6. Exemple de R. Coase : externalités entre le confiseur et le médecin
Les nuisances occasionnĂ©es par les activitĂ©s dâune entreprise peuvent prĂ©senter une grande variĂ©tĂ© de formes.Pour clarifier la nature de mon raisonnement et dĂ©montrer son applicabilitĂ© gĂ©nĂ©rale, je propose de l'illustrer parla rĂ©fĂ©rence Ă un cas rĂ©el.ReconsidĂ©rons d'abord l'affaire Sturgens c. Btidgman, que j'ai utilisĂ©e, Ă titre d'illustration du problĂšme gĂ©nĂ©ral.Dans ce cas prĂ©cis, un confiseur (situĂ© dans Wigmore Street) utilisait pour son activitĂ© deux mortiers et pilons (l'unavait fonctionnĂ© de la sorte pendant plus de soixante ans et l'autre pendant plus de vingt-six ans). Un mĂ©decinvint alors occuper des locaux voisins (situĂ©s dans Wimpole Street). Les machines du confiseur ne causĂšrentaucune nuisance au mĂ©decin jusqu'Ă ce que, huit ans aprĂšs qu'il eut occupĂ© les locaux, il construisĂźt un cabinet deconsultation au bout de son jardin, jouxtant ainsi la cuisine du confiseur. On constata alors que le bruit et lesvibrations provoquĂ©es par les machines du confiseur rendaient difficile pour le mĂ©decin l'usage de son nouveaucabinet de consultation. [...],Le mĂ©decin entreprit donc une action en justice pour obliger le confiseur Ă arrĂȘter ses machines. Le tribunal eutpeu de difficultĂ© Ă accorder au mĂ©decin l'injonction qu'il rĂ©clamait. « Des cas individuels difficiles pourraientapparaĂźtre si l'on se tient Ă une stricte application du principe sur lequel nous avons Ă©tabli notre jugement, mais lanĂ©gation mĂȘme de ce principe conduirait bien davantage encore Ă des difficultĂ©s individuelles tout en produisantun effet prĂ©judiciable sur l'occupation des sols Ă titre d'habitation. »La dĂ©cision du tribunal Ă©tablissait le droit qu'avait le mĂ©decin d'empĂȘcher le confiseur d'utiliser ses machines.Mais, bien entendu, il aurait Ă©tĂ© possible de modifier les dispositions envisagĂ©es dans la dĂ©cision judiciaire aumoyen d'un accord conclu entre les parties. Le mĂ©decin aurait trĂšs bien pu accepter de se dĂ©sister de son droit etainsi permettre au confiseur de continuer Ă faire fonctionner ses machines si ce dernier lui avait versĂ© une sommed'argent supĂ©rieure Ă la perte de revenus qu'il aurait subie soit en devant dĂ©mĂ©nager dans un emplacement pluscoĂ»teux ou moins commode, soit en devant restreindre ses activitĂ©s Ă cet endroit, ou encore (comme il a Ă©tĂ©suggĂ©rĂ© dans l'affaire) en Ă©tant dans l'obligation de construire un mur de sĂ©paration qui aurait amorti les bruits etles vibrations. Le confiseur aurait pu accepter de le faire si la somme Ă verser au mĂ©decin Ă©tait infĂ©rieure Ă laperte de revenu subie s'il avait dĂ» changer son matĂ©riel, abandonner son activitĂ© ou dĂ©placer son affaire deconfiserie vers quelque autre lieu.La solution du problĂšme dĂ©pend essentiellement de savoir si l'utilisation des machines du confiseur ajoute aurevenu du confiseur plus qu'elle ne soustrait Ă celui du mĂ©decin.Mais considĂ©rons maintenant la situation oĂč le confiseur aurait gagnĂ© son procĂšs. Le confiseur aurait alors eu ledroit de continuer Ă faire fonctionner ses machines gĂ©nĂ©ratrices de bruits et de vibrations, sans avoir Ă payer quoique ce soit au mĂ©decin. Les rĂŽles auraient Ă©tĂ© inversĂ©s ; le mĂ©decin aurait dĂ» indemniser le confiseur pourl'amener Ă stopper l'utilisation de ses machines. Si, parce que le confiseur continuait d'utiliser ses machines, laperte de revenus du mĂ©decin avait Ă©tĂ© supĂ©rieure au profit qu'en tirait le confiseur, un accord de marchĂ© parlequel le mĂ©decin indemniserait le confiseur pour qu'il cesse d'utiliser ses machines aurait certainement Ă©tĂ©possible. C'est-Ă -dire que les circonstances oĂč il ne serait pas rentable pour le confiseur de continuer Ă utiliser sesmachines et de dĂ©dommager le mĂ©decin pour les pertes que cela lui occasionnerait (si le mĂ©decin avait le droitd'empĂȘcher le confiseur d'employer les machines), sont identiques Ă celles oĂč il serait dans l'intĂ©rĂȘt du mĂ©decind'indemniser le confiseur pour l'inciter Ă cesser d'utiliser ses machines (si le confiseur avait toujours le droit defaire fonctionner ses machines).
R Coase, lâentreprise, le marchĂ© et le droit, traduit par B Aliouat, Editions dâOrganisation 2005, p. 128
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Exemple : Le marché des droits à polluer
Document 7.
Un marché de droits à polluer, encore appelé marché de permis négociables, est un instrument économique depolitique environnementale qui vise à limiter le niveau global de rejets polluants en répartissant les coûts à supporter pour respecter cette contrainte de maniÚre efficace.
L'idĂ©e de marchĂ© de permis nĂ©gociables est nĂ©e Ă la fin des annĂ©es 1960, Ă la suite des travaux de Ronald Coase(Prix Nobel d'Ă©conomie en 1991) sur les effets externes et de John Dales sur les droits de propriĂ©tĂ© pour l'usagede biens environnementaux. Cette idĂ©e fut partiellement expĂ©rimentĂ©e quelques annĂ©es plus tard, aux Ătats-Unis, sous la forme de dispositifs permettant la rĂ©affectation entre entreprises de limites d'Ă©missions de gazpolluants. Mais ce n'est qu'Ă partir de la fin des annĂ©es 1980 que de vĂ©ritables marchĂ©s de permis nĂ©gociablessont mis en place, dans le cadre de la politique amĂ©ricaine de lutte contre la pollution atmosphĂ©rique. Le plusimportant a Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ© Ă partir de 1995, dans le cadre du programme concernant les pluies acides (Acid RainProgram), pour rĂ©duire les Ă©missions de dioxyde de soufre (SO2) des centrales de production d'Ă©lectricitĂ©. Cepolluant atmosphĂ©rique acidifie les eaux de pluies, ce qui entraĂźne le dĂ©pĂ©rissement des forĂȘts, l'Ă©rosion desmatĂ©riaux et l'acidification des sols et des eaux douces. L'objectif de ce marchĂ© Ă©tait de parvenir Ă limiter lesĂ©missions de SO2 des centrales Ă©lectriques situĂ©es sur le territoire amĂ©ricain Ă 8,95 millions de tonnes par an Ă partir de 2010, ce qui correspond Ă une baisse de 50 p. 100 des rejets par rapport Ă 1980.
Ce marchĂ© a Ă©tĂ© bientĂŽt dĂ©passĂ© en taille par le systĂšme communautaire d'Ă©change de permis d'Ă©missions de gazĂ effet de serre que l'Union europĂ©enne a mis en Ćuvre Ă partir de 2005, dans le cadre de son programme delutte contre le changement climatique. Le marchĂ© europĂ©en couvre plus de 12 000 installations d'industriesgrandes consommatrices d'Ă©nergie (cimenterie, papeterie, production d'Ă©lectricitĂ©, etc.) localisĂ©es dans les paysmembres de l'Union. Il a devancĂ© de quelques annĂ©es le marchĂ© international de permis d'Ă©missions de gaz Ă effet de serre qui a vu le jour Ă partir de 2008, une fois acquise la ratification du protocole de KyĆto, nĂ©gociĂ© en 1997.
Dans un premier temps, les autorités publiques choisissent la quantité globale de rejets polluants qu'ellesautorisent sur un territoire et une période donnés, et créent une quantité équivalente de permis qu'ellesdistribuent, gratuitement ou non, aux entités polluantes implantées sur ce territoire. Ces derniÚres ont alorsl'obligation de posséder une quantité de permis suffisante pour couvrir leurs rejets polluants.
L'originalité du dispositif, le marché proprement dit, vient de la possibilité pour les acteurs concernés des'échanger les permis. De ces échanges résulte un prix de marché qui confÚre à la pollution un coût d'opportunité(manque à gagner) ou un coût direct, selon que les permis ont été distribués gratuitement ou non : dans lepremier cas, lorsqu'une entreprise utilise ses permis pour couvrir ses rejets polluants, elle se prive de la possibilitéde les vendre sur le marché ; dans le second, elle supporte directement un coût en devant acheter des permislorsqu'elle pollue. Les entreprises comparent alors les coûts qu'elles supporteraient si elles diminuaient leurpollution (en développant ou en adoptant de nouvelles technologies moins polluantes, en réduisant leurproduction, etc.) aux revenus qu'elles percevraient si elles vendaient les permis que la baisse des rejets a libérésou aux économies qu'elles réaliseraient en évitant de devoir acheter de nouveaux permis. Pour les entreprisesdont les coûts de dépollution sont faibles, il est intéressant de réduire les rejets polluants et de vendre les permisnon utilisés. à l'inverse, celles qui supportent des coûts élevés préfÚrent acheter sur le marché les permis qui leurmanquent. Ainsi, chaque entreprise choisit individuellement le moyen le moins coûteux de respecter la contrainteenvironnementale qui lui est imposée.
Stéphanie MONJON, http://www.universalis.fr/encyclopedie/marches-de-droits-a-polluer/
Document 8. Présentation du marché des droits à polluer
http://savoir.neopodia.com/20100907-economie-finances-macro-eco-protocole-kyoto-emission-co2-gaz-effet-serre-pollution-credit-carbone?t=294
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Fiche dâexercices dâapplication
Exercice 1.
Une compagnie ferroviaire peut faire passer de 0 Ă 2 trains par jour sur une voie ferrĂ©e traversant le champ dâunfermier. En notant q le nombre de trains, le profit de la compagnie ferroviaire est de 2
Le fermier peut cultiver chacune des parcelles situĂ©es de part et dâautre de la voie ferrĂ©e. Cependant, en raisondâĂ©tincelles rĂ©sultant du passage dâun train et susceptibles de mettre le feu Ă la rĂ©colte, son profit dĂ©pend nonseulement du nombre q 1 de parcelles cultivĂ©es mais aussi du nombre de trains traversant son champ. Le profitdu fermier est dĂ©terminĂ© dans le tableau suivant :
Questions :
1- DĂ©terminer la meilleure solution du point de vue de lâoptimum social
2- On suppose quâaucune rĂ©glementation nâoblige la compagnie ferroviaire Ă indemniser le fermier. DĂ©terminerla solution rĂ©sultante. Montrer quâun arrangement privĂ© entre les deux agents Ă©conomiques est cependantsusceptible de conduire Ă la solution la meilleure du point de vue de lâoptimum social. On suppose que larĂ©glementation existante oblige la compagnie ferroviaire Ă indemniser totalement le fermier.
3- DĂ©terminer la solution rĂ©sultante et montrer Ă©galement quâun arrangement privĂ© entre les deux agentsĂ©conomiques est susceptible de conduire Ă la solution la meilleure du point de vue de lâoptimum social.Comparer les deux arrangements en termes des profits rĂ©alisĂ©s.
Exercice 2.
Un apiculteur vit Ă cĂŽtĂ© dâun verger de pommes. Le propriĂ©taire du verger bĂ©nĂ©ficie dâexternalitĂ©s positives desabeilles parce quâune ruche pollĂ©nise Ă peu prĂšs 1 acre de pommiers. Le propriĂ©taire du verger ne paie cependantrien en contrepartie pour ce service parce que les abeilles viennent dans le verger sans quâil nây ait rien Ă faire.Parce quâil nây a pas assez dâabeilles pour pollĂ©niser le verger en entier, le propriĂ©taire du verger doit complĂ©ter lapollinisation par des moyens artificiels, Ă un coĂ»t de 10 ⏠par acre dâarbres.
Lâapiculteur a un coĂ»t marginal Cm = 10 + 5 Q, avec Q le nombre de ruches. Chaque ruche lui rapporte un mieldâune valeur de 40 âŹ.
1. Combien de ruches lâapiculteur va tâil conserver ?
2. Est-ce le nombre Ă©conomiquement efficace de ruches ?
3. Quels changements vont conduire Ă un fonctionnement plus efficace ?
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Exercice 3. Application pollution et coût social
Une usine (A) produisant de la peinture est installée le long d'une riviÚre dans laquelle elle rejette ses déchets.Une fabrique d'eau minérale (B) située en aval de l'usine subit un dommage (ou coût) : elle doit accroßtre sesdépenses de dépollution de l'eau contaminée à mesure que la quantité de déchets rejetés dans la riviÚre parl'usine augmente. Les coûts de A et B sont résumés dans le tableau ci-dessous.
RAPPEL : à l'équilibre sur un marché concurrentiel, le prix est égal au coût marginal et à la recette marginale.
Questions :
1. Dans cette situation de pollution, pourquoi peut-on parler d'externalité négative ?
2. Rappelez ce qu'est le coût marginal et mettez les chiffres entourés dans une phrase.
3. Reproduisez et complétez le tableau.
4. Sachant que le prix de marché d'une tonne de peinture est de 100 euros, quelle quantité de peinturel'entreprise a-t-elle produire à l'équilibre sur le marché ?
5. Pour cette quantité produite, l'usine A pourrait-elle compenser les dommages qu'elle fait subir à B ? Qu'enest-il pour des productions plus élevées ?
6. Quel est le niveau de production qui permet à l'entreprise A de faire le plus de profits tout en indemnisantl'entreprise B (niveau socialement optimal) » ?
Quantité de peinture
(tonnes)
Coût marginal de
production de A (âŹ)
Coût marginal de dépollution
de B (âŹ)
Coût social par tonne de
peinture
1 50 20
2 60 40
3 100 120
4 120 150
On définit le coût social (Cs) comme étant la somme des coûts marginaux de production et des coûts marginaux dedépollution pour tous les agents économiques. Ici nous n'avons que deux entreprises, A et B, donc le coût marginal d'unetonne de peinture est : Cs = Cm A + Cm B.
Exercice 4. ThéorÚme de Coase
Une industrie chimique rejette des dĂ©chets toxiques dans une riviĂšre et rĂ©duit le profit dâune compagnie de pĂȘchede 150 000$ par an.Lâentreprise peut Ă©liminer ces dĂ©chets Ă un coĂ»t de 100 000$ par an. La compagnie de pĂȘche est une coopĂ©rativequi syndique de nombreux pĂȘcheurs.
1. Appliquer le théorÚme de Coase pour expliquer comment une négociation sans coût peut aboutir à un résultatsocialement optimal, peu importe à qui les droits de propriété sont assignés.
2. VĂ©rifier le thĂ©orĂšme de Coase si le coĂ»t dâĂ©liminer les dĂ©chets est doublĂ© et portĂ© Ă 200 000$ (avec unbĂ©nĂ©fice de la compagnie de pĂȘche inchangĂ© de 150 000$).
3. Pourquoi la négociation sans coût est illusoire et quelles sont les conséquences des coûts de négociation ?
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B - Les biens collectifs
I â Biens collectifs et biens publics
Document 1 : Biens collectifs, biens publics : des notions à différencier
Lâusage de lâexpression « biens publics » sâest gĂ©nĂ©ralisĂ©. Les plumes les plus autorisĂ©es traitent de « lâEurope desbiens publics » et, dans le cadre des dĂ©bats sur lâenvironnement et la gouvernance mondiale, on fait souventrĂ©fĂ©rence aux « biens publics mondiaux ». Il existe mĂȘme en France, depuis mai 2009, une direction des bienspublics mondiaux au sein du MinistĂšre des affaires Ă©trangĂšres et europĂ©ennes. Lâemploi de ce terme estnĂ©anmoins souvent ambigu et sa dĂ©finition changeante en fonction des personnes ou institutions qui lâutilisent. Ilnous semble nĂ©anmoins important de stabiliser sa dĂ©finition et de prĂ©ciser notamment la diffĂ©rence entre bienpublic et bien collectif.
[âŠ]La science Ă©conomique dĂ©finit un bien collectif comme un bien non rival et non excluable : la consommationdu bien par un consommateur nâempĂȘche pas la consommation de ce bien par un autre consommateur et il estimpossible dâexclure par les prix un consommateur de lâusage du bien (exemple de la lumiĂšre fournie par unrĂ©verbĂšre dans une rue).La dĂ©finition, au sens strict, dâun bien public est fort diffĂ©rente : un bien public est un bien Ă la fois produit etfourni par la puissance publique (par exemple en France lâĂ©cole publique). La production des bienscollectifs nâĂ©tant pas optimale dans le cadre du marchĂ© (dĂ©faillance du marchĂ©), ces derniers sont souventproduits et fournis par la puissance publique et sont donc souvent aussi des biens publics mais il nâexiste pas derelation nĂ©cessaire entre les deux types de bien : un bien collectif nâest pas forcĂ©ment un bien public et vice-versa.Lâusage du terme « bien public » Ă la place de bien collectif est un anglicisme problĂ©matique qui constitue unobstacle aux apprentissages de la science Ă©conomique par les Ă©lĂšves et les Ă©tudiants et une difficultĂ© pour le bondĂ©roulement du dĂ©bat public. En français le mot « public » renvoie Ă la sphĂšre Ă©tatique au sens large (Etat central,collectivitĂ©s territoriales, administrations de sĂ©curitĂ© sociale). [âŠ] Le sens du mot anglo-saxon « public » est trĂšsdiffĂ©rent. [âŠ].Un grand spĂ©cialiste français de lâĂ©conomie publique, J. BĂ©nard, lâavait fait remarquer il y a longtemps dĂ©jĂ : « Laterminologie anglo-saxonne classique emploie les mots « public goods » et « private goods ». Compte tenu de laconsonance juridique et donc institutionnelle quâont en français les termes « public » et « privĂ© » nous avonsprĂ©fĂ©rĂ© les termes « collectifs » et « privatifs » comme lâont fait avant nous la plupart des Ă©conomistes français telsque X. Greffe, S.C. Kolm, E. Malinvaud, J.C. Milleron et G. Terny » (BĂ©nard, 1985, page 33). Ainsi donc, au milieudes annĂ©es 1980, la plupart des spĂ©cialistes français de lâĂ©conomie publique parlaient de « biens collectifs » etnon de « biens publics ». Si les deux termes ont pu ĂȘtre ensuite assimilĂ©s, et si le terme « biens publics » a eutendance Ă lâemporter, câest quâon a souvent considĂ©rĂ© Ă tort la prise en charge par la puissance publique de laproduction et de la fourniture des biens collectifs comme seule rĂ©ponse possible Ă la dĂ©faillance du marchĂ©. [âŠ]Cette assimilation reste nĂ©anmoins problĂ©matique dans la mesure oĂč il existe dâautres rĂ©ponses aux dĂ©faillancesdu marchĂ© que la prise en charge par la puissance publique des biens collectifs, comme en atteste notammentlâexistence de partenariat publics/privĂ©s. Tous les biens collectifs ne sont donc pas des biens publics et tous lesbiens publics ne sont pas forcĂ©ment des biens collectifs. Il nâest pas douteux en effet que lâĂ©ducation et la santĂ©sont des biens (ou des services) qui sont parfaitement divisibles et facilement excluables. Sâils sont, Ă des degrĂ©sdivers, pris en charge par lâEtat dans de nombreux pays, ce nâest pas parce quâils sont des biens collectifs maistout simplement par choix politique. Un bien public peut donc ne pas ĂȘtre un bien collectif. RĂ©ciproquement, unefondation privĂ©e qui gĂšre un espace naturel ouvert Ă tous, offre un bien collectif, qui nâest pas pour autant unbien public (au sens français). Les deux expressions « bien public » et « bien collectif » ne sont donc passynonymes.Au-delĂ de la confusion entrainĂ©e par lâusage non rigoureux du terme bien public, il nous semble quelâassimilation entre bien public et bien collectif occulte des dĂ©bats importants.
A Beitone, « Biens publics, biens collectifs, Pour tenter dâen finir avec une confusion de vocabulaire », Revue duMAUSS permanente, 27 mai 2010 [en ligne]. http://www.journaldumauss.net/spip.php?article690
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Fiche dâexercices dâapplication
Exercice 1.
Exclusion Non-exclusion
Rivalité (divisibilité)Biens privés
Meubles, maison, voiture
Biens communs
(air, eau, ressources marines)
Non-rivalité (indivisibilité)Biens de club
Autoroute à péage, chaßne cryptée
Biens collectifs
Phare, jardin, Ă©clairage public
Exercice 2 : L'éducation est-elle un bien de type privé ou collectif ?
RĂ©ponse :A premiĂšre vue, lâĂ©ducation semble facilement excluable (lâaccĂšs Ă la connaissance sous ses diffĂ©rentes formesest en gĂ©nĂ©ral coĂ»teux : achat dâun livre, paiement dâun cours particulier, dâune inscription dans une Ă©coleâŠ) etau moins partiellement rivale (par exemple le nombre de places dans une classe est limitĂ©). Elle fournit parailleurs des bĂ©nĂ©fices privĂ©s aux individus, par lâattribution de diplĂŽmes conduisant Ă de meilleurs emplois parexemple. En ce sens, il sâagit fondamentalement dâun bien privĂ©.Il existe cependant clairement des bĂ©nĂ©fices publics liĂ©s Ă lâĂ©ducation : le fait de vivre au sein dâune populationĂ©duquĂ©e est source dâexternalitĂ©s positives (croissance Ă©conomique plus forte conduisant Ă un meilleur niveaude vie, y compris pour les moins Ă©duquĂ©s par exemple). Lâexistence de tels effets externes positifs est souventavancĂ©e comme justifiant lâintervention de lâEtat pour la prise en charge du systĂšme Ă©ducatif (Ă©cole gratuite etobligatoire) afin dâĂ©viter le sous-investissement qui rĂ©sulterait dâune production purement privĂ©e.
On attend la mĂȘme dĂ©marche pour : la dĂ©fense nationale, lâĂ©lectricitĂ© et les feux rouges,âŠ
Exercice 3.
Parmi les biens et services suivants, lesquels sont des biens ou services collectifs ?
Le nettoyage des routes en hiver
Le rĂ©seau de communication dâun opĂ©rateur de tĂ©lĂ©phonie mobile
Les petites routes Ă la campagne
Une pomme
Un programme de TV par cĂąble
Un programme de radio
Des champignons en forĂȘt
Lâautoroute A10
Exercice 4. Selon les caractĂ©ristiques des biens, nous pouvons distinguer des biens privĂ©s et des biens collectifs âŠ
Bien privé :une baguette de pain
Bien collectif :une autoroute
Bien collectif pur :une route nationale
La consommation est-elle exclusive ?
Peut-on exclure leconsommateur ?
Le coût est-il fonctiondes quantitésproduites ?
La consommation de cebien est-elle divisible ?
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Le marché plus ou moins efficace
Le marchĂ© peut-ildĂ©terminer un prix pourlâusage du bien ?
Peut-on faire payertous lesconsommateurs delâusage du bien ?
Document 2. Le phare en Economie
Les Ă©crits des Ă©conomistes traitent du cas du phare parce qu'il est censĂ© Ă©clairer le problĂšme de la fonctionĂ©conomique de l'Etat. On l'utilise souvent comme l'exemple d'une activitĂ© qui doit ĂȘtre assurĂ©e par l'Etat plutĂŽtque par une entreprise privĂ©e. Les Ă©conomistes considĂšrent gĂ©nĂ©ralement que, parce qu'il est impossible derecevoir une indemnitĂ© de la part des propriĂ©taires de navires bĂ©nĂ©ficiant de l'existence du phare, il devient peulucratif, pour tout particulier ou toute entreprise, de construire et d'entretenir un phare.John Stuatt Mill, dans ses Principles of Political Economy, Ă©crit : « C'est une fonction propre au gouvernement deconstruire et d'entretenir des phares, d'Ă©tablir des balises, etc. pour la sĂ©curitĂ© de la navigation ; en effet, commeil est impossible que les navires en mer, qui tirent profit d'un phare, soient amenĂ©s Ă payer un droit Ă l'occasionde l'utilisation de ses services, personne ne construirait des phares pour des motifs d'intĂ©rĂȘt personnel, Ă moinsd'ĂȘtre indemnisĂ© et rĂ©munĂ©rĂ© par un prĂ©lĂšvement obligatoire effectuĂ© par l'Ătat ».Henry Sidgwick, dans The Principles of Political Economy, au chapitre « The System of Natural Liberty Consideredin Relation to Production », affirmait ; « Il existe une classe Ă©tendue et variĂ©e de cas dans lesquels l'hypothĂšse[qu'un particulier peut toujours obtenir, au moyen d'un libre Ă©change, une rĂ©munĂ©ration adĂ©quate pour lesservices qu'il rend] serait manifestement erronĂ©e. En premier lieu, il existe certains services dont l'appropriationpar ceux qui les accomplissent ou qui souhaiteraient les acquĂ©rir est pratiquement impossible. Par exemple, ilarrive souvent que les avantages d'un phare bien placĂ© puissent ĂȘtre largement apprĂ©ciĂ©s par un navire auquel onne pourrait pas imposer, sans difficultĂ©, un droit de passage ».Pigou, dans The Economies of Welfare s'est servi du phare de Sidgwick comme d'un exemple de services nondĂ©dommagĂ©s pour lesquels « le produit marginal net est infĂ©rieur au produit social marginal net, parce que desservices fortuits sont rendus Ă des tiers desquels il est techniquement difficile d'exiger un paiement ».Paul A. Samuelson, dans son ouvrage Economies, s'exprime plus nettement que les auteurs prĂ©cĂ©dents. Dans lechapitre intitulĂ© « The Economie RĂŽle of Government », il dĂ©clare que « le gouvernement assure certains servicespublics indispensables, sans lesquels la vie en communautĂ© serait impensable, et qui par leur nature ne peuventpas, Ă juste, titre ĂȘtre laissĂ©s Ă l'entreprise privĂ©e ». Il cite comme « exemples Ă©vidents » le maintien de la dĂ©fensenationale, de la lĂ©gislation nationale et de l'ordre intĂ©rieur, ainsi que l'administration de la justice et des contrats ;il ajoute Ă©galement, « Voici un autre exemple de service gouvernemental : les phares. Ces derniers sauvent desvies et des cargaisons, mais les gardiens de phares ne peuvent se rendre auprĂšs des capitaines afin d'en percevoirdes redevances. Ainsi, nous avons ici une divergence entre l'intĂ©rĂȘt privĂ© et le coĂ»t de l'argent, et l'intĂ©rĂȘt et lescoĂ»ts sociaux rĂ©els [tels que mesurĂ©s par les vies et les cargaisons sauvĂ©es. [âŠ] Les philosophes et les hommes
d'Etat ont toujours reconnu le rÎle nécessaire du gouvernement dans de tels cas de divergence d'économieexterne entre les bénéfices privés et sociaux. Plus loin, Samuelson se réfÚre à nouveau au phare, comme une «activité gouvernementale justifiable par les effets externes ». Il énonce : « Prenons le cas précédent d'un phareavertissant de la présence de faisceaux lumineux contre les récifs. Son éclat aide tous ceux qui le voient. Unhomme d'affaires ne pourrait pas le construire pour obtenir un profit, puisqu'il ne peut pas réclamer une sommeà chaque utilisateur. La construction des phares est certainement le genre d'activité que les gouvernementsentreprennent naturellement ».
R. Coase, lâentreprise, le marchĂ© et le droit, traduit par B. Aliouat, Editions dâOrganisation 2005