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CLT-2OOO/WS/l Décennie mondiale du développement culturel Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara Ezzedine Hosni UNESCO

Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

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CLT-2OOO/WS/l

Décennie mondiale du développement culturel

Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

Ezzedine Hosni

UNESCO

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L’étude Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara a été réalisée par M. Ezzedine Hosni à la demande de l’UNESCO à la suite de la proposition d’amendement au programme et bud- get pour les années 1998-1999 déposée par la Tunisie et adoptée à la Conférence générale de l’Organisation lors de sa vingt-neuvième session, au mois de novembre 1997.

L’auteur est responsable du choix et de la présentation des faits figurants dans cet ouvrage, ainsi que des opinions qui y sont exprimées, lesquelles ne sont pas nécessairement celles de l’UNESCO et n’engagent pas l’Organisation. Il remercie, par ailleurs, M me Virginie Accatcha, CLT/CH/RD, pour la correction d’épreuves et la mise en forme rédactionnelle de son texte.

Pour tout renseignement complémentaire, contacter M. Hervé Barré, Responsable de l’Unité Recherche et développement Division du patrimoine culturel, Secteur de la culture UNESCO 1, rue Miollis -75732 Paris Cedex 15, France.

Publié en ZOOO par l’organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture

7, Place de Fontenoy, 75352 Paris 07 SP

0 UNESCO, 2000

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SOMMAIRE

Introduction 5

Le Sahara, un gisement touristique riche, rude et cependant très fragile

1. Caractéristiques @o-physiques et socio-écologiques du Sahara 1.1 Importance du Sahara parmi les déserts du monde 1.2 Les traits géo-physiques du Sahara 1.3 La flore et la faune 1.4 Le peuplement, l’activité économique et commerciale

II. Les enjeux de la gestion des ressources naturelles et de la lutte contre la désertification 2.1 La gestion des ressources en eau 2.2 La dégradation de l’environnement dans les milieux arides et semi-arides

9

11 11 11 13 13

15 15 16

III. Les actions internationales de lutte contre la désertification et la sauvegarde du patrimoine 17 3.1 Les programmes d’étude et de formation 17 3.2 Les sites du patrimoine mondial et les réserves de la biosphère du Sahara 17

Le tourisme saharien : études de cas 21

1. Diversité et particularités régionales du tourisme saharien 23 Le tourisme saharien au Maroc 23 1 .l Importance et caractéristiques du tourisme marocain 23 1.2 Le tourisme Saharien au Maroc : atouts et perspectives 24 1.3. Les problèmes de développement du tourisme durable dans le sud marocain 27 Le tourisme saharien en Tunisie 28 1.1 Évolution et caractéristique du tourisme tunisien 28 1.2. Le tourisme saharien tunisien : problématique d’un développement régional complexe 30 Le tourisme saharien en Égypte 3J 1.1 L’évolution du tourisme national égyptien 35 1.2 L’importance du développement du tourisme égyptien 3.5 1.3 Le tourisme saharien en Egypte 36 1.4. Les atouts du tourisme saharien Égyptien 38 1.5 Les obstacles au développement du tourisme saharien en Égypte 38 Le tourisme saharien au Mali 38 1.1 L’évolution du tourisme malien : une fréquentation étrangère très ancienne 38 1.2 Place du tourisme saharien au Mali 39 1.3 Atouts et problèmes du développement du tourisme au Mali 40 Le tourisme saharien au Niger 41 1.1 L’évolution du tourisme saharien au Niger 41 1.2 Les indicateurs du tourisme au Niger 41 1.3 Atouts et freins au développement du tourisme saharien au Niger 42

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Le tourisme saharien au Tchad 1.1 Le développement touristique au Tchad : un choix économique récent 1.2 Le potentiel touristique saharien 1.3 Atouts, problèmes et perspectives du tourisme saharien au Tchad Le tourisme saharien en Mauritanie 1.1 Un pays où la menace de la désertification est omniprésente 1.2 Place du tourisme saharien dans l’activité économique mauritanienne 1.3 Tourisme et sauvegarde du patrimoine en Mauritanie : la sauvegarde

des anciens ksour mauritaniens Le tourisme saharien en Algérie 1 .l Approche géographique 1.2 Les potentiels touristiques du Sahara algérien 1.3 Le schéma directeur d’investissements touristiques dans le grand sud algérien Le tourisme saharien en Libye 1.1 Aperçu géographique 1.2 Le patrimoine culturel libyen 1.3 La stratégie du développement du tourisme libyen Le tourisme saharien au Soudan 1.1 Généralités géographiques et ethniques 1.2 Le potentiel touristique soudanais 1.3 Le patrimoine culturel et naturel soudanais 1.4 Atouts et problèmes du tourisme soudanais

II. Esquisse de bilan sur le développement du tourisme saharien 2.1 Un développement touristique inégal 2.2 Arrivée des touristes internationaux dans les pays sahariens en 1998 2.3 Le tourisme comme réponse à la dégradation de l’environnement

et à la crise économique : les atouts du tourisme saharien 2.4 Les faiblesses et le degré d’intégration du tourisme saharien

Le développement durable du tourisme au Sahara

1. Propositions pour un tourisme durable au Sahara 1 .l Proposition d’une Conférence internationale sur le développement durable

du tourisme au Sahara 1.2 Proposition d’actions spécifiques pour le développement durable

du tourisme au Sahara 1.3 Le financement

II. Le développement du tourisme durable au Sahara 67 2.1 Développement et tourisme durable 67 2.2 Les déclarations et chartes du tourisme durable 67

III. Propositions de principes stratégiques pour un développement du tourisme durable au Sahara Principe 1 Principe 2 Principe 3 Principe 4 Principe 5 .

43 43 43 44 44 44 45

46 47 47 47 48 48 48 49 49 50 50 50 50 JO

fil 51 51

51 52

59

59

60 66

69 69 69 69 70 70

Conclusion 71

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Introduction

1 L est indéniable, que le tourisme représente aujourd’hui l’une des activités économiques les

plus rémunératrices et les plus créatrices d’em- plois dans le monde. Ainsi, selon l’Organisation mondiale du tourisme (OMT), les arrivées aux frontières ont atteint en 1998, 625 millions de touristes, générant 444,~ milliards de dollars de recettes, soit un accroissement respectif de 2,4 % et 2 % par rapport à 1997, et ce, malgré l’énorme crise financière asiatique qui a affaibli l’économie de beaucoup de pays. Un phénomène de société mondial est ainsi à constater en cette fin de siècle : le tourisme devient une activité profondément ancrée dans les habitudes et on continue à voya- ger même en période de crise.

Sur le plan régional, c’est en Afrique que l’on observe la plus forte progression des arrivées tou- ristiques en 1998 avec 24 903 000 touristes, soit ï’,5 % de plus qu’en 1997, suivie par le Moyen Orient (+5,3 %), l’Asie du Sud (+5 %), l’Europe (+3 %) et les Amériques (+1,4 %). Quant à la région de l’Est de l’Asie et du Pacifique, elle continue à enregistrer un solde permanent néga- tif de -1,2 %. Cette performance de l’Afrique a été stimulée, outre la désaffection atteignant les marchés d’Extrême-Orient, par l’intérêt grandis- sant pour le tourisme de nature (l’éco-tourisme) en Afrique australe et orientale et par la fré- quentation notamment balnéaire en Afrique du nord et particulièrement au Maghreb.

En Afrique du Nord, le Maroc et surtout la Tunisie enregistrent les résultats les plus impor- tants. Cette dernière peut même se targuer de devenir la première destination de l’Afrique avec près de 5 millions d’arrivées internationales en 1998. D’autre part, c’est en Afrique du Nord que l’on enregistre depuis 1989, le pourcentage le plus élevé des recettes touristiques par rapport aux exportations de services (53,34 % en 1997) suivie par l’Afrique orientale (51,03 %) l’Afrique australe (50,07 OA) et bien loin ensuite l’Afrique occidentale (27,97 %) et l’Afrique centrale (6,75 %).

Cependant ces chiffres, dans leur globalité, ne doivent pas nous faire oublier que le tourisme africain ne représente qu’une part infime du tou-

risme mondial, à peine 4 % des arrivées de tou- ristes internationaux et 2,2 % des recettes tou- ristiques en 1998 (respectivement 1,5 % et 2,7 % à titre indicatif en 1970). C’est que les pays afri- cains, à part quelques rares exceptions, souffrent souvent d’une image de marque désastreuse auprès des marchés émetteurs de touristes euro- péens ou américains. Des situations réelles de sous-développement structure1 ou de catas- trophes humanitaires causées par la sécheresse et la désertification ou l’insécurité engendrée par des conflits politiques ou inter-ethniques sont souvent amplifiées par les médias.

Certains pays de l’Afrique centrale et de l’Afrique de l’Ouest tels que le Tchad, le Niger, le Mali et la Mauritanie ou des pays limitrophes au nord, tels que le Soudan, la Libye ou l’Algérie, subissent les conséquences de ces situations. Cela est de nature à contribuer, en plus de l’absence parfois d’une réelle volonté politique, à la fai- blesse relative de leur activité touristique inter- nationale. Les autres pays sahariens, la Tunisie, le Maroc et l’Égypte enregistrant de bien meilleurs résultats, s’orientent résolument vers la diversification de leurs produits touristiques en développant notamment leur tourisme saharien, moins concurrencé que le séjour balnéaire ou le circuit culturel par les autres destinations touris- tiques méditerranéennes telles que l’Espagne, la Grèce, ou la Turquie.

Un fait apparaît actuellement bel et bien éta- bli : tous les pays ayant le Sahara pour partage, et malgré des expériences de politique touristique différentes, ont pris conscience à des degrés et à des périodes différents, du formidable gisement naturel et culturel que constituent leurs régions désertiques ainsi que des retombées économiques positives de son exploitation touristique. Cependant, ces régions connaissent de très sérieux problèmes de dégradation de l’environ- nement autour de leurs vieilles oasis et cités saha- riennes qui subissent les phénomènes d’ensablement progressif, de l’avancée du désert, accentuée par la surexploitation agricole et pas- torale et de l’exode rural relatif des jeunes. L’ampleur de ces phénomènes de désertification,

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additionnée à une sécheresse persistante affectant surtout les pays de l’Afrique septentrionale, y compris ceux du Sahel, ont été largement abor- dées à Rio (Brésil) en juin 1992, lors de la Conférence des Nations Unies pour l’environ- nement et le dével.oppement (CNUED). Outre l’agenda 21 et son chapitre 12, principale plate- forme pour la protection de l’environnement des zones arides et sub-humides sèches, la CNUED (intitulée également le Sommet de la terre a amené la communauté internationale à décider l’établis- sement d’une Convention internationale sur la lutte contre la désertification qui fut adoptée en juin 1994.

A ce stade, nous sommes interpellés par plu- sieurs interrogations : - Comment le tourisme saharien pourrait-il

contribuer à résoudre les problèmes de dévelop- pement des régions arides qui subissent les phé- nomènes de sécheresse et de désertification ?

- Comment le tourisme saharien, pourrait-il encourager la sauvegarde du patrimoine cul- turel et naturel du Sahara et appuyer les actions environnementales de lutte contre la désertification en vue du développement durable ?

- Qu’appelle-t- on dans ce contexte, tourisme durable ?

- Comment concilier le développement socio- économique par le tourisme et l’utilisation des ressources culturelles, naturelles et humaines ainsi que la gestion durable des éco- systèmes fragiles du Sahara ?

2 - Quelle forme d’aménagement touristique

2 choisir ? Quels types d’équipements hôteliers 2 2

et d’animation adopter ? -

E Quelles mesures prendre afin d’encourager les

.E activités traditionnelles telles que l’artisanat ?

0 - Quelle serait la spécificité du produit touris- Y -2

tique saharien ? OJ

3 - Quelle politique promotionnelle faudrait-il

2 adopter ? -z - E

Quel devrait être le rôle des tours opérateurs,

E des ONG et des acteurs directs du tourisme

& saharien (administration du tourisme, hôte- 0

3 liers, collectivités locales, guides, transpor-

% teurs, etc . ..) ?

2 - Quels types de circuits imaginer ?

2 - Quelle place devrait prendre la collaboration a inter-étatique et interrégionale?

.2 - 2

Comment sensibiliser et associer-les popula-

2 tions locales dans le développement du tou- CFI risme saharien ?

- Quelles propositions concrètes pourrait-on envisager en termes de recommandations

6 (réglementaires, de formation, d’informations

administratives, de coopération internatio- nale, etc.) en vue d’un développement har- monieux du tourisme au Sahara? Ces recommandations, tout en tenant compte

des différentes actions, conventions et chartes internationales se rapportant à la fois au déve- loppement du tourisme et à la lutte contre la désertification (notamment les actions de l’UNESCO), pourraient constituer les bases de principes stratégiques à soumettre aux pays saha- riens en vue d’un développement durable du tou- risme au Sahara.

Le projet d’étude d’une stratégie du développe- ment durable du tourisme au Sahara est intéres- sant à plusieurs niveaux : 1. D’abord, il permet de présenter une très vaste I

région de l’Afrique répartie sur dix Etats qui comporte de nombreux parcs et sites natu- rels et culturels qu’il faudra préserver pour les générations futures. Beaucoup de ces sites ont été inscrits par l’UNESCO sur la Liste du patrimoine mondial.

2. L’évocation des différentes politiques touris- tiques des pays sahariens permettra de faire un bilan critique des expériences p’ionnières déjà menées par certains de ces pays dans le cadre du développement du tourisme saha- rien. Elle permettra également d’en tirer les leçons permettant d’éclairer judicieusement les futures initiatives des autres pays en terme de préservation de l’environnement, de sau- vegarde du patrimoine culturel, et, de déve- loppement local.

3. Enfin, la proposition de principes stratégiques pour un développement durable du tourisme au Sahara, prenant en compte les impératifs socio-économiques et le respect des exigences en matière d’environnement et d’écologie, pourrait aboutir si elle est approuvée par les pays concernés, à des actions concrètes de sensibilisation des acteurs du tourisme saha- rien à tous les niveaux (local, national et inter- national) et à des projets précis dans les domaines de la formation, de l’emploi, de la valorisation culturelle, traditionnelle, artisa- nale et architecturale ainsi que l’adéquation entre le tourisme et d’autres secteurs de l’éco- nomie tels que l’agriculture ou le commerce. Cela permettra, à moyen et à long terme, de rapprocher les habitants de la région autour d’un projet commun qui contribuera à établir une paix durable, élément essentiel du déve- loppement et de la démocratie dans cette partie de l’Afrique.

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Le projet d’étude d’une Stratégie pour le déve- loppement du tourisme durable au Sahara se base sur la triple démarche d’investigation suivante :

- Effectuer des déplacements sur le terrain. - Rencontrer des acteurs directs et indirects du

tourisme saharien. - Participer ou assister à des séminaires, col-

loques ou congrès intéressant le sujet.

Ainsi, les déplacements sur le terrain ont concerné la Tunisie, la Mauritanie, le Mali, le Niger, l’Algérie et le Maroc : - En Tunisie, à partir de Tunis, les régions du

sud ouest (oasis de Gafsa, de Chebika, Tamerza, Mides), du Jerid (oasis de Tozeur, Nefta), du Nefzaoua (oasis de Kebili, Douz), du sud-est (Médénine, Tataouine, les Ksour).

- En Mauritanie, à partir de Nouakchott, les régions : du nord (le parc national du Banc d’Arguin), du nord-est (les villes anciennes de Chinguetti et Oualata), du sud (jusqu’à Rosso sur la frontière du Sénégal).

- Au Mali, à partir de Bamako, les régions du nord (Tombouctou), du centre (Ségou, Djenné, Mopti) et du centre-est (Gao, pays Dogon).

- Au Niger, à partir de Niamey le nord-est jus- qu’à Agadez.

- En Algérie, à partir d’Alger, au sud, la cité de Tamanrasset, le parc national du Hoggar jus- qu’au refuge du Père de Foucault à 1’Assekrem.

- Au Maroc, à partir de Marrakech, les régions de Ouarzazate et de Zagora.

Les rencontres avec des responsables et des acteurs directs ou indirects du tourisme saharien ont été réalisées soit au sein des pays concernés, soit en dehors du Sahara, notamment en France et en Espagne. Dans les pays sahariens, ce furent surtout au niveau local, les responsables minis- tériels (ministères du tourisme, de la culture, et de l’environnement), des professionnels (agents de voyages, guides, hôteliers, artisans, transpor- teurs routiers ou aériens), des chercheurs (uni- versitaires, conservateurs de musées ou de sites, géographes...), des représentants d’organisations internationales (UNESCO, PNUD, ONG . ..).

A l’étranger, de nombreuses rencontres ont eu lieu, principalement en France, avec les délé- gués permanents des pays sahariens ou leurs délé- gués adjoints à l’UNESCO, ou au siège de leur représentation diplomatique. D’autre part, au sein même du Secrétariat de l’UNESCO à Paris, plusieurs responsables ont été consultés dans différents secteurs : culture, patrimoine mondial,

environnement (programme MAB), Centre de I’OSYROSELT. Des rencontres ont également eu lieu avec les représentants des administrations touristiques des pays concernés, au sein de leur Office du tourisme à Paris ou à Madrid (Tunisie, Maroc.. .) ou au sein des services de leur ambas- sade (Mali, Niger, Tchad, Soudan, Libye, Mauritanie, Algérie et Égypte) .

Par ailleurs, des contacts ont été également établis avec les directeurs des tours-opérateurs et agences de voyage spécialisées dans le tourisme saharien ou d’aventure, en France (Terres d’aventure, Nomade, Atalante, Assinter, Club Aventure, Nouvelles Frontières) ou en Espagne (Touareg). A Madrid (Espagne) au sein de l’OMT, le sujet du tourisme saharien a été discuté avec différents responsables de départements : les Représentants régionaux pour l’Afrique et l’Europe, le Chef de la Section du développe- ment du tourisme durable.

La participation à des séminaires, colloques scientifiques ou congrès, intéressant le tourisme en général et le tourisme saharien en particulier, s’est déroulée au Sénégal, en Tunisie et en France : - Congrès annuel du tourisme du tour opéra-

teur français, Nouvelles Frontières en sep- tembre 1998, à Mahdia (Tunisie).

- Congrès de la Fédération universelle des asso- ciations des agences de voyages (FUAAV) en octobre 1998 à Dakar (Sénégal). Visite de la zone touristique de Saly et de la Casamance. Séminaire sur la sécheresse et la désertifica- tion organisé par l’Observatoire du Sahara et du Sahel (OSS) fi n octobre, début novembre 1998. Institut des régions arides (IRA), Médenine (Tunisie). Colloque sur les guides touristiques impri- més depuis le XVI~ siècle, décembre 1998, Université de Paris 7 (France).

- Rencontre avec des experts en écologie et en environnement à l’Institut des aménagement régionaux et de l’environnement (IARE), février 1999 à Montpellier (France).

- Tables rondes sur le tourisme en marge du Salon mondial du tourisme et des voyages (SMTV), en mars 1999 à Paris.

Parallèlement à ces contacts établis sur le terrain ou à l’extérieur du Sahara, l’élaboration de cette étude s’est articulée autour de trois axes : 1. Le premier axe délimite, dans une première

partie, l’espace du Sahara et présente briè- vement ses caractéristiques physiques clima- tiques et humaines, ainsi que les enjeux et 7

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les défis que l’on y rencontre (eau, déserti- fication...). Il présente ensuite une brève rétrospective des actions internationales, celles de l’UNESCO notamment, en matière de développement durable au Sahara à tra- vers, d’une part, les programmes d’étude et de formation et d’autre part, les campagnes de sauvegarde des sites culturels et naturels et leur inscription sur la Liste du patrimoine mondial.

2. Le deuxième axe analyse les politiques tou- ristiques des pays sahariens en matière de tou- risme et en dégage les atouts et les faiblesses.

3. Le troisième axe présente d’abord, l’éclairage de différentes chartes et conventions se rap- portant au tourisme international, pour for- muler ensuite l’ébauche de propositions et de recommandations pour la mise en place de principes stratégiques du développement du tourisme durable au Sahara.

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Le Sahara, un gisement touristique

riche, rude et cependant très fragile

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T Caractéristiques 1 l géo-physiques

et socio-écologiques du Sahara

1.1 Importance du Sahara parmi les déserts du monde

Les déserts et semi-déserts chauds couvrent plus du tiers de la superficie des terres émergées et abritent environ 16 % de la population de la pla- nète. Leur localisation présente une diversité liée à la répartition des reliefs et des continents. On distingue trois types de localisation :

(4 Les grandes masses homogènes axées sw le tropique

L’ensemble le plus impressionnant est celui saharo-arabe et au delà du Golfe arabo-persique (côtes sud du Belouchistan et de l’Iran et basse vallée de l’Indus). Dans 1’Hémisphère Sud, de grands déserts de plateaux et de plaines s’étendent en Australie et en Afrique australe (Kalahari). Les déserts arides chauds de l’Amérique du Nord peuvent être rattachés à ce type de désert.

(ii) Les bandes arides allongées occupant les façades occidentales des continents

Ils s’observent essentiellement dans 1’Hémisphère Sud. Ainsi en Amérique, une étroite bande aride s’étend du 30e au 4e degré de latitude sud jus- qu’aux environs de la baie de Guayaquil.

(iii) Les enclaves semi-arides des très basses latitudes

Ces enclaves désertiques sont situées à des lati- tudes très proches de l’Équateur. C’est le cas du centre de la péninsule indienne, des côtes de l’Afrique orientale somalienne, du nord du Venezuela, des Antilles néerlandaises et du nord- est du Brésil.

1.2 Les traits géophysiques du Sahara

1.2.1 La situation géographique du Sahara : des limites difficiles à cerner

Le Sahara (al Sabra, en arabe) constitue le plus grand désert du monde avec plus de huit millions

de kilomètres carrés séparant l’Afrique du nord de l’Afrique noire et s’étendant sur 5300 km de l’Atlantique à la mer Rouge et 1700 km du ver- sant sud de l’Atlas algérien jusqu’aux premières steppes sahéliennes subtropicales. Si, au nord l’Atlas marque la limite septentrionale du désert qui atteint la mer en Libye et en Égypte, au sud, en revanche, aucun accident de relief ne permet de fixer une limite bien tranchée. On considère que, si le désert véritable commence lorsque apparaît le palmier dattier, le Sahara s’achève, en revanche, dans la zone où apparaît le Cram-Cram (Cenchrus biflorus), graminée à graines piquantes typique du Sahel. Elle nécessite des pluies d’été régulières et forme alors un tapis continu, tandis que les touffes vertes du had (cornulaca mono- cantha) qui caractérisent le désert ont disparu. Cette transition entre désert et steppe sahélienne est loin d’être brutale.

1.2.2 Le climat du Sahara

Ce sont les conditions et les critères climatiques qui définissent le domaine aride. Ce dernier cor- respond aux régions du globe caractérisées par un bilan hydrique déficitaire, résultant essentiel- 3 lement de l’insuffisance des précipitations par 2 rapport aux prélèvements de l’évaporation et de 2 I’évapotranspiration (transpiration des plantes). Ë Le Sahara est caractérisé par la présence de hautes

.-

pressions subtropicales séparées des basses pres- 0 s

sions équatoriales par le front intertropical. Le balancement saisonnier de cette ceinture anticy-

z 2

clonique engendre les types de temps rencontrés. La sécheresse est causée par les hautes pressions.

Au centre du Sahara, les températures sont très élevées durant toute la journée (jusqu’à 50”). L’amplitude entre le jour et la nuit est très impor- 2 tante ( de 15” à 30”). Plus élevées l’été que I’hi- 0 ver, les températures présentent une moyenne de 3

30” en juillet et 12” en janvier. Le sable peut 2 a atteindre 80" en surface, en période chaude, tan- y dis que les températures négatives sont fréquentes

;g

durant les nuits claires d’hiver (-18” enregistrés ri Z

au Tibesti). Les pluies sont souvent fines dans le Sahara septentrional, mais peuvent devenir diluviennes dans le Sahara central où elles 11

Page 12: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

endommagent parfois des oasis. Ainsi, plusieurs années peuvent passer sans pluies (au Hoggar et dans 1’Ajjer par exemple). Pire, certaines régions ne reçoivent jamais d’eau (sud libyen), mais quand elles surviennent, les pluies peuvent être torrentielles.

Les tempêtes de sable se produisent lors- qu’une dépression atlantique se rapproche de l’Afrique du Nord. Les alizés qui s’échappent des anticyclones en direction de l’Équateur, sont des vents modérés et réguliers lorsque la pression est stable. L’alizé sec qui souffle du nord-est et se transforme en vent venant du sud provoquant une élévation de température, est le Cbehili du Sahara du nord ou Sirocco. Le vent devient vio- lent et un mur de sable qui peut cacher le soleil se transforme à l’horizon. Le vent de sable peut affecter des régions étendues ou rester très loca- lisé. Il se déplace dans le même sens que les dépressions à une vitesse de 30 à 50 Km/heure. Quand l’alizé reprend enfin une orientation régu- lière, le sable tombe et le ciel s’éclaircit.

1.2.3 Le relief du Sahara Le Sahara est modelé par son passé humide : canyons des Tassili, de l’Air et du Tibesti, oueds, roches modelées par les eaux, sables livrés par l’eau à l’action du vent, d’où les superbes mas- sifs dunaires caractéristiques des paysages saha- riens. Généralement, le Sahara se présente sous les aspects suivants :

(a) Les déserts de pierres et de roches (reg et hamada) : Les regs dérivent d’une plaine allu-

@ viale dont les matériaux ont été déposés dans

2 l’eau comme les alluvions ordinaires, puis triés 2 2

par le vent. Les éléments fins ont disparu de la

Ë surface et n’ont été conservés qu’en profondeur,

.? sous une couche de graviers et de sable gros-

0 siers. Plus de la moitié de la région saharienne Y 4

est constituée de regs. Les rares montagnes, cor- 02

0 respondant à des bombements de la couverture

t sédimentaire surmontée par des reliefs d’origine -d 2

volcanique, déterminent les points culminants.

Ë Le plus élevé de ces massifs est le Tibesti dans

a, le nord du Tchad, qui culmine au mont Emi 3

-F Koussi à 3415 m. Quant au Hoggar, il culmine

% avec le Tahat à 2918 m. En revanche, à l’ouest

2 du Sahara aucun sommet n’atteint 1000 m

2 d’altitude. Les plateaux gréseux qui entourent le a Hoggar prennent le nom de Tassili. Les .3 49

Hamadas sont des plateaux constitués par I’af-

@ fleurement d’une roche dure (hamada du Draa Lz au Maroc, Hamada el Homra en libye)

(b) Les dunes de sable (erg) : elles sont rare- ment isolées sauf dans le désert égyptien (Barkan). Elles se groupent fréquemment en mas- sifs appelés ergs ou arg en arabe. Les grands mas- sifs dunaires s’allongent dans le sens des vents dominants (nord-est) et occupent les dépressions qui entourent les montagnes et les plateaux. Ces dunes sont plaquées sur un relief d’érosion flu- vial. Les masses de sable qui s’étaient déposées dans les oueds à la fin de la période pluviale ont été ultérieurement découpées en terrasses pou- vant atteindre plusieurs mètres de hauteur. Les chaînes de dunes s’alignent le long de ces ter- rasses, elles-mêmes dirigées comme les anciens bras. La force du vent modèle ensuite la dune. Les bras des dunes sont séparés par des couloirs : f ‘dj’ 1 q “1 et t, ors u 1 s sont creusés dans le sable, gassi, si le plancher est un reg. La plupart d’entre eux sont jalonnés de sites néolithiques situés souvent à la base des dunes. La beauté des paysages qu’offre ces dunes est indéniablement l’un des attraits majeurs de la fréquentation touristique au Sahara (Grands Ergs oriental et occidental, dunes de Mauritanie).

(c) Le désert de terre glaise et de gravier (serir) : il résulte de l’action de corrosion exer- cée par le vent chargé de sable et la nature de la roche affectée. Ses stries parallèles et un net poli se remarquent dans un matériau cohérent et homogène. Des affleurements comme les cailloux, des regs alvéolés ou façonnés en facettes sont affectés par le polissage du vent. Ainsi, se développent les dreikanters des serirs sahariens à partir des dragées de quartz. Aussi, les vents de sable donnent-ils aux buttes résiduelles, décou- pées dans des couvertures gréseuses, la silhouette de rochers champignons. Selon leur direction, les vents creusent également des sillons parallèles dans les roches meubles, argiles ou limons accu- mulés dans les cuvettes.’

(d) Une autre forme de désert, les dépressions fermées : elles constituent l’un des traits les plus austères des paysages sahariens. Les garaas sont des dépressions fermées peu salées à régime hydraulique, superficiel sous la dépendance des crues des oueds environnants. La topographie des garaas présente une nette uniformité à platitude. Les sebkhas présentent, outre une très grande platitude, une abondance de sels solubles, chlo- rures et sulfates concentrés à la surface interdi- sant toute végétation. Dans les franges des chotts, moins salés, apparaissent des touffes d’herbes halophiles. Souvent, des argiles durcies par un

12 1. Encyclopaedia Universah, Paris, 1985.

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ciment constitué d’une multitude de microcris- taux amassés en une dense poussière transparente en surface, naissent des mirages grâce à la réflexion de la lumière. Certaines dépressions fer- mées se trouvant nettement au-dessous du niveau de la mer ont pu se transformer en lagunes d’eau jaunâtre. Les grandes sebkhas présentent l’exemple d’un ennoyage permanent au quater- naire moyen (chotts Djerid, Fedjedj et Rharsa dans le sud tunisien).

1.3 La flore et la faune

Malgré de sévères contraintes physiques et éco- logiques, la vie est bien présente au Sahara, maté- rialisée par des centaines d’espèces végétales ou animales. Ainsi, de l’Atlantique à la mer rouge, a-t-on recensé 1300 espèces végétales, le plus sou- vent de taille réduite, pour mieux s’adapter à la sécheresse. Ce sont les régions montagneuses qui sont floristiquement les plus intéressantes. Ainsi, sur 150 000 km2 au Hoggar, on n’observe pas moins de 370 espèces végétales.

Du point de vue de la faune, de nombreuses espèces ont été également recensées : 116 espèces de mammifères, 60 d’oiseaux nicheurs, plusieurs centaines d’espèces de migrateurs, 90 de reptiles (54 sortes de lézards, 31 de serpents, 5 de tor- tues), 10 de batraciens et 20 de poissons. Citons parmi ces derniers, des barbeaux et des tilapias vivant dans des gueltas. C’est dans l’une des grandes gueltas du Tassili-n’Ajjer qu’a été exter- miné, au début de ce siècle, le dernier crocodile du Sahara, témoin d’un passé plus humide.

Afin de lutter contre les fortes chaleurs et la déperdition d’eau, les mammifères du désert adoptent plusieurs stratégies de survie à la fois physiologiques, morphologiques ou comporte- mentales. Ainsi, ils se caractérisent souvent par des urines très concentrées, des fèces très sèches, et une évaporation réduite. Le dromadaire par exemple, peut supporter facilement une déperdi- tion d’eau égale à 30 % de son poids, soit trois fois plus que l’homme. La température interne de plusieurs mammifères peut atteindre des niveaux qui dépassent largement le seuil d’hy- perthermie mortel chez l’homme. Semblable aux herbivores sauvages tels que l’addax ou la gazelle, le dromadaire trouve l’eau dans les plantes qu’il consomme. Perdant jusqu’à 100 Kg de son poids suite à une longue expédition saharienne, il peut les récupérer en dix minutes en buvant 100 litres d’eau. L’addax par contre, ne boit pratiquement

jamais et peut survivre dans les immensités de la Majabat-a1 Koubra en Mauritanie, de l’Air et du Ténéré au Niger ou de 1’Ennedi au Tchad. Cette antilope au pelage clair se nourrit et s’abreuve en même temps des rares plantes qui poussent dans son environnement préféré notamment dans les dépressions des oueds. Bien qu’absente du vrai désert, l’autruche survit au Sahara méridionale, au sud-est de la Mauritanie et dans la réserve naturelle de l’Air Ténéré.

Si les rongeurs (gerbille, gerboise, rat-kan- gourou, souris épineuse...) hibernent dans des ter- riers profonds plus frais et plus humides que le milieu de surface et stockent souvent leur nour- riture, les carnivores (renard pâle, hyène, fennec) trouvent l’eau vitale dans le sang de leurs proies et peuvent varier leur régime alimentaire. C’est le cas du fennec qui se nourrit de lézards, inver- tébrés, de mollusques, d’oiseaux, d’oeufs et de fruits’.

1.4 Le peuplement et l’activité économique et commerciale

1.4.1 Nomades et sédentaires

Le Sahara comprend une population qui se com- pose de berbères, d’arabes et de noirs. Beaucoup de ces derniers, descendants probablement des esclaves noirs que transportaient les caravanes d’une rive à l’autre du désert, habitent générale- ment les oasis (les Harratines en Mauritanie, les Fezzanais en Libye). L’installation du groupe berbère au Sahara remonte à la période de l’antiquité. Les Touaregues occupent tout le Sahara central. Parlant le tamacheck, ils ont adopté la langue arabe et la religion islamique amenées par les arabes dès le VIF siècle. Véritables maîtres du désert, les nomades arabes ou ber- bères dominent les oasis ou les ksour. L’Islam, diffusé jusqu’en Afrique noire, a joué le rôle de ferment dans l’unité de ces populations diverses où les métissages sont opérés petit à petit grâce à la sédentarisation progressive.

1.4.2 Pastoralisme et agricuhre

Les activités économiques majeures dans le Sahara se basent sur le pastoralisme, l’agriculture dans les oasis et l’exploitation des ressources minières et énergétiques. Le pastoralisme exige des nomades des déplacements saisonniers à la recherche de pâturages pour les troupeaux. La persistance de la sécheresse de ces dernières années, surtout dans les marges du désert et du

1. Bousquet B. Guide des parcs nationaux d’Af q ri ue, Delachaux et Niestle, Paris, 1992.

Page 14: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

Sahel, a obligé beaucoup de nomades à se fixer dans les oasis, d’autant qu’ils ont perdu le mono- pole des transports à cause du modernisme et de l’introduction du camion sur les nouveaux axes routiers.

L’activité agricole dans les oasis se base sur les procédés d’irrigation, soit par simple dériva- tion des cours d’eau, seguias, soit en creusant des puits ou en utilisant des galeries souterraines (foggaras), soit en cultivant en bours, sans prati- quement irriguer car la nappe phréatique est toute proche de la surface (palmeraie du Fezzan par exemple). Le palmier dattier (phoenix dactilifera) constitue la ressource essentielle des oasis, notamment celles de l’Afrique du Nord, parallè- lement à d’autres cultures maraîchères ou non alimentaires (tabac dans le Souf ou le Touât).

1.4.3 Oasis et cités caravanières

Dans les oasis, les maisons sont généralement construites en briques crues faites d’un mélange d’argile et de paille, séchées au soleil. Tout en étant un bon isolant du soleil, cette argile ne résiste pas aux pluies torrentielles que peut subir l’oasis. Cette dernière se compose de plusieurs villages regroupés autour du ksar ou lieu fortifié.

Les cités caravanières d’antan ont gardé l’as- pect prestigieux de leur centre urbain et spirituel. Les caravanes étaient affrétées comme l’on affrète un bateau pour transporter une cargaison. Elles apportaient sur les marchés de la Méditerranée, les produits soudanais, les plumes d’autruche, des peaux et des tissus. Au retour, elles apportaient du blé, de l’orge, de l’huile, certains métaux et des produits de l’artisanat nord-africain. Les cara- vanes se relayaient une ou deux fois le long des routes, faisant la fortune des villes telles que Ain Salah, Tindouf, Ghadames ou Tombouctou. La route de l’Est reliait la Tripolitaine à Gao en pas- sant par le Fezzan, le Tassili, 1’Adrar des Iforas. Au centre, la piste passait par le Touât et le Tanezrout pour atteindre le fleuve Niger ou par Ain Salah et 1’Adrar d’Ahnet. A l’ouest, les cara- vanes quittaient le Tafilalet et se rendaient jus- qu’à Taoudenni, célèbre pour son sel, puis Ouadane ou Chinguetti, jusqu’à Tombouctou, Djenné ou Gao. L’aspect architectural, les mos- quées, l’activité religieuse et intellectuelle avec les anciens manuscrits, ont fait la réputation de ces cités. Des milliers de ces anciens manuscrits peu- vent toujours être admirés dans de très vieilles bibliothèques privées ou au sein des medersas coraniques.

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Page 15: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

II Les enjeux de la gestion 0 des ressources naturelles

et de la lutte contre la désertification

Depuis une cinquantaine d’années, on assiste à un changement d’attitude des exploitants agri- coles et des pasteurs des zones sahariennes. Ceux-ci, par l’effet de multiples contraintes nouvelles autres que climatiques, se préoccupent en priorité de répondre à leurs besoins immé- diats, alimentaires particulièrement, aux dépens d u patrimoine ressource naturelle de leur exploitation.

La disparition de la fonction conservation du patrimoine ressource, devenue impossible du fait de l’incapacité de l’exploitant de dégager un sur- plus, est à l’origine de la dégradation des res- sources naturelles et de la rupture des équilibres écologiques. Ces derniers sont très souvent mis à l’épreuve par une trop forte action anthropique engendrée par la pression démographique et les effets de la sécheresse. Parmi ces actions causant directement ou indirectement la dégradation des terres et des milieux arides, on peut citer : la mau- vaise gestion des ressources d’eau, la surexploi- tation agricole, le surpâturage et l’augmentation des prélèvements de produits ligneux.

2.1 La gestion des ressources en eau

2.1 .l Les eaux de surfaces

Les ressources en eau des régions arides ou semi- arides proviennent des eaux de surface ou des eaux souterraines. Le déficit hydrique qui règne dans ces régions la majeure partie de l’année, fait que les eaux de surface y sont rares, souvent de qualité variable et très influencées par l’ampleur du ruissellement. L’écoulement de base des oueds, interconnecté aux nappes souterraines, se carac- térise par des eaux de qualité médiocre ainsi que par des apports de petites crues à eau saumâtre. Les gueltas constituaient jadis des étapes de repos pour les caravanes.

2.1.2 Les eaux souterraines sont soit renouvelables soit fossiles

Les nappes souterraines à ressources renouve- lables sont celles qui reçoivent une certaine ali-

mentation d’eau à l’échelle saisonnière annuelle ou pluriannuelle. Elles se distinguent par une dynamique piézométrique, résultante conjuguée de cette alimentation et de l’exploitation qui en est faite. Les nappes sont le plus souvent des aqui- fères à faible emmagasinement. L’essentiel des nappes à ressources renouvelables provient du ruissellement suite à des pluies dépassant les 20 mm, ou suite à de grandes averses. Cependant, l’eau qui s’infiltre à la suite de petites averses, est souvent piégée par le sol pour être reprise par l’évaporation. C’est ce qui entraîne la concentra- tion des sels dissous. Ces sels sont ensuite lessi- vés par l’eau de pluie qui s’infiltre dans le sol et sont entraînés jusqu’à la nappe souterraine. Suite à une surexploitation de la nappe, surtout en période de sécheresse, parallèlement à une absence de son alimentation, on observe une variation chimique de ses eaux qui deviennent très chargées en sel.

L’exploitation de ces nappes se fait souvent à l’aide de puits de surface ou de forages. Les eaux souterraines fossiles alimentent des nappes pro- fondes des régions arides et semi-arides. Souvent captives, elles se caractérisent par une géométrie 3 complexe d’aquifères multicouches et réagissent à l’exploitation par décompression.

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Ainsi, l’exploitation de ces ressources doit Ë ,9 se faire en tenant compte du caractère non 2 renouvelable de ces eaux et des changements de 5 qualité qui peuvent résulter de leur surexploi- tation. L’eau des nappes fossiles est souvent

2 2

exploitée dans les oasis où les cultures irriguées 2 constituent la principale activité consommatrice E d’eau. Un surplus d’irrigation est à l’origine de Ë la salification des terres, d’où la nécessité d’avoir

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recours au drainage. Pourtant, la création de $ >

nouvelles superficies gagnées sur les dunes et ’ irriguées convenablement constitue une SO~U- 2

tion contre l’avancée du désert. (L’exemple de ; &

la nouvelle exploitation agricole de R’Jim .s Maâtoug dans l’extrême sud Tunisien est à ce ‘i propos édifiant). LF

15

Page 16: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

2.2 La dégradation de l’environnement dans les milieux arides et semi-arides

La conjugaison des facteurs de sécheresse, de pressions démographiques et d’intensification des activités agraires et pastorales ont engendré une surexploitation des ressources naturelles dans les aires habitées sahariennes, notamment les oasis.

2.2.1 Les formes de la dégradation

La pression démographique n’étant pas vouée dans la plupart de ces zones pour un exode rural dirigé vers des régions plus industrialisées, il en découle une pression agricole sur les écosystèmes concernés (ressources en eau, couvert végétal...). L’eau d’irrigation est souvent maîtrisée à la source et provient de forages. Disposant de plus d’eau, certains agriculteurs sont tentés de gagner plus de terres sur le désert. Cependant, le danger consiste en une augmentation de la quantité d’eau de drainage qui s’accumule dans les bas fonds et . . . , ,. s’y sahmse nremedrablement. Une solution serait d’irriguer les palmeraies et les oasis avec juste le nécessaire d’eau afin de maintenir les sels du sol en profondeur, sans les déverser dans le paysage par l’intermédiaire des nappes.

Du point de vue pastoral, l’augmentation des effectifs du cheptel, en liaison avec la croissance démographique, entraîne une surcharge sur ces espaces pastoraux. Cette pression excessive a engen- dré un déséquilibre entre les prélèvements fourragers et la production des parcours. Ainsi, assiste-t-on à : - La disparition du couvert végétal engendrant

l’accroissement du processus d’érosion du sol et la réduction du potentiel pastoral.

- La réduction de la valeur pastorale par la dis- parition des espèces pastorales.

- La diminution de la végétation, déjà faible, des écosystèmes pastoraux, dû à la fois à la disparition des semenciers, à la dégradation générale et au dysfonctionnement hydrique.

- D’autre part, la possibilité de transporter les troupeaux par camions ou chemins de fer sur de grandes distances a permis d’aller chercher l’herbe sur des parcours ouverts, loin du siège de l’exploitation d’élevage. Cela eût pour consé- quence une aggravation du processus de dégra- dation des parcours. C’est le cas des zones step- piques algériennes. D’autre part, le statut foncier ambigu des terres collectives entourant les oasis qui voient le désengagement progressif des tri- bus et de l’État, se traduit par une absence totale de régulation de l’usage des parcours.

Dans un autre contexte, le statut foncier de certains ksour dans le sud marocain ou tunisien par exemple, où des nébuleuses tribales et fami- liales ont droit de regard sur les biens immobi- liers, empêche la réhabilitation ou l’affectation de ces lieux pour une exploitation culturelle ou tou- ristique adéquate.

2.2.2 La répartition géographique de la dégradation

Du point de vue de la dégradation au Sahara et dans ses franges immédiates, on note globalement les éléments suivants : - L’érosion éolienne intéresse tous les pays

sahariens et la zone aride stricto senso. Des villages entiers sont menacés d’ensablement et toutes les oasis doivent déployer des tech- niques de plus en plus élaborées pour se pro- téger de cette menace (le cas le plus connu est celui des vieilles oasis mauritaniennes).

- La dégradation chimique concerne la salinisa- tion (oasis d’Afrique du Nord...), la sodisation de grands périmètres irrigués (Djezira du Soudan, pourtour du lac Tchad, office du Niger, vallée du fleuve Sénégal) et la perte en éléments fertilisants (zone soudanienne, Sahel...).

- La surexpl’oitation agricole est plus l’apanage de l’Afrique du Nord alors que le surpâturage concerne l’Afrique de l’Est et le Sahel. Ces deux causes indirectes de la dégradation sont engendrées, comme on l’a déjà signalé, par la pression croissante exponentiellement de l’homme et de ses animaux domestiques. Cette pression n’est pas toujours compensée par des techniques appropriées de gestion des terres et des écosystèmes, de pâturage différé, de mise en défens et la culture en courbes de niveau tels les Jessours ou de dispositifs anti-érosifs’. Les États, ayant le Sahara pour partage, ont

mené chacun suivant ses capacités, des actions pour lutter contre les formes de la dégradation de leurs milieux et contre la désertification, s’ap- puyant sur leurs organismes nationaux ou sur l’aide d e grandes organisations internationales (telles que l’UNESCO) ou des ONG.

Les États sahariens ont déployé des efforts et des investissements importants dans des projets précis, espérant atteindre des résultats satisfai- sants dans leur lutte contre la désertification. Malheureusement, les résultats tardent souvent à être enregistrés, à cause notamment de la faible intégration des populations locales concernées par ces projets.

1. Pontanier A., M’Hiri A., Aronso J., Akrimi N., Le Floch E., L’Homme peut-il refaire ce qu’il a défait ? John Libbey Eurotext, Paris 1995.

Page 17: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

III 0

Depuis quelques décennies, la communauté inter- nationale s’est attelée avec de plus en plus de volonté, à lutter contre la désertification en Afrique. Les actions des Nations Unies et de l’or- ganisation de l’UNESCO sont, à ce propos, édi- fiantes. Cette dernière, par exemple, a mené, en plus de ses programmes d’étude et de formation des actions de sauvegarde de sites culturels et naturels sahariens.

3.1 Les programmes d’étude et de formation

Le premier programme international d’étude et de recherche sur les terres arides fut lancé dès 1951 par l’UNESCO. Dirigé par un comité de consultation international, il fût poursuivi jus- qu’en 1964, après avoir été érigé en Projet Majeur de l’UNESCO en 1957. De 1965 à 1974, les zones arides et semi-arides furent le sujet d’études prio- ritaires, concernant les problèmes de l’eau dans cette région et dans le cadre de la Décennie hydraulique internationale (DHL). Les zones arides ont également constitué une place impor- tante au sein du Programme sur l’homme et la biosphère (MAB) lancé en 1971. C’est précisé- ment dans le cadre du MAB et du Projet majeur que des projets sectoriels spécifiques au Sahara, appelés projets pilotes sur les terrains, appuyés par des activités de formation et d’échange d’in- formations, ont été expérimentés.

Ainsi le projet intégré sur les zones arides IPAL, en Tunisie, s’est déroulé de 1980 à 1984, suivi pendant deux années par le projet pilote de lutte contre la désertification dans le sud tuni- sien. Deux séminaires régionaux, regroupant des spécialistes des pays entourant le Sahara, ont débattu des résultats de ces projets qui ont servi de base scientifique et technique pour I’élabora- tion de la stratégie nationale pour la lutte contre la désertification, adoptée par les autorités tuni- siennes en 1986. D’autre part, des réunions régio- nales ont eu lieu, notamment le congrès interna- tional sur la restauration et la réhabilitation des

Les actions internationales de lutte contre la désertification et la sauvegarde du patrimoine

terres dégradées tenu, en novembre 1994 en Tunisie, ou l’atelier de coopération intersectoriel organisé en mars 1995, à l’oasis d’E1 Kharja en Égypte. Ce dernier a porté sur les problèmes du développement durable en milieu oasien’.

La concertation internationale et interrégio- nale sur le Sahara s’est, par ailleurs, concrétisée par l’association de la Division des sciences éco- logiques de l’UNESCO avec l’Observatoire du Sahara et du Sahel (OSS), afin de mettre en place un Réseau d’observatoires de surveillance écolo- gique à long terme, projet ROSELT, concernant vingt pays circumsahariens du Sahara et du Sahel. Parallèlement aux efforts de l’UNESCO, la Conférence des Nations Unies sur la désertifica- tion (UNCOD) a adopté en 1977 un Plan d’ac- tion contre la désertification (PACD). En 1991, le programme des Nations Unies pour l’envi- ronnement (PNUE), constate que malgré des cas sporadiques de réussite, la dégradation des sols dans les zones arides, semi-arides et sèches sub- humides s’est aggravée. Cette situation alarmante fût l’un des principaux sujets débattus lors de la Conférence des Nations Unies sur l’environne- ment et le développement (CNUED) tenue à Rio en Juin 1992. Furent adoptés, suite à cette conférence : - Un programme intitulé action 21, et notam-

ment son chapitre 12, fournissant une base pour la lutte contre la désertification.

- La résolution 17/188 de l’Assemblée Générale des Nations Unies, tenue en Décembre 1992, affirmant la priorité qu’elle a assigné à l’Afrique.

- L’adoption, le 17 juin 1994, à Paris, de la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification.

3.2 Les sites du patrimoine mondial et les réserves de la biosphère du Sahara

Les pays sahariens possèdent d’imposants sites et réserves naturelles inscrits sur la Liste du

1. UNESCO, Les zones arides dans les programmes de l’UNESCO, 1995.

Page 18: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

patrimoine mondial. Ce sont d’incontestables vestiges de l’humanité et de fabuleux témoins de la force et de la vitalité de la nature à travers leurs spécificités historiques, architecturales, écolo- giques, paléo-climatiques et anthropologiques. Ces sites et ces réserves constituent un formi- dable capital identitaire et touristique à préser- ver pour les générations futures. Ils répondent parfaitement aux critères et aux principes de la Convention mondiale sur la protection du patri- moine naturel et culturel de l’UNESCO, ainsi qu’au concept de biosphère développé dans le cadre du programme MAB (l’homme et la bio- sphère).

La Convention concernant la protection du patrimoine mondial culturel et naturel fut adopté par la Conférence générale de l’UNESCO en 1972. Son objectif principal est d’identifier et de protéger tout patrimoine culturel et naturel ayant une valeur universelle et exceptionnelle, dont l’existence et la beauté sont un enrichissement pour chaque homme et dont la disparition consti- tuerait une perte irréparable pour l’humanité toute entière. La Liste du patrimoine mondial est composée aujourd’hui de 582 sites culturels et naturels répartis sur 156 États signataires de la convention.

Lancé par l’UNESCO en 1971, le Programme sur l’homme et la biosphère (MAB), traite de l’écologie terrestre et des problèmes de gestion et de conservation des ressources naturelles en général. Ainsi, fut créé un réseau mondial des

réserves de la biosphère. Les dix pays entourant le Sahara totalisent 38 sites inscrits sur la Liste du patrimoine mondial et 12 réserves MAB. Tous les pays sahariens ont ratifié la convention pour le patrimoine mondial et ont vu beaucoup de leurs sites culturels et naturels couronnés par le label de l’UNESCO.

Ainsi, on peut remarquer que la plupart des sites et réserves de la biosphère sont situés en Afrique du Nord et que c’est la Tunisie qui en possède le plus grand nombre (8 sites et 4 réserves). L’Egypte fut, en revanche, le premier pays signataire de la Convention dans le monde suite à la campagne de sauvegarde d’Abou Simbel et des temples de Nubie. D’autre part, la majo- rité des sites concernent surtout des vestiges archéologiques de l’époque punico-romaine ou d’anciennes villes arabo-islamiques. Une dizaine de ces sites et 6 réserves de la biosphère concer- nent le milieu aride saharien’.

Le tourisme de la nature, la recherche d’espaces insolites loin des facteurs de pollution et du stress quotidien, le goût de l’aventure et la quête d’un certain absolu font que le tourisme saharien est en vogue aujourd’hui et que son avenir est pro- metteur. ‘Cependant, pour faire connaître ce pro- duit, il faut mener des actions spécifiques de pro- motion qui entrent dans le cadre d’une politique globale de développement touristique. C’est à cette stratégie de chaque pays saharien que nous allons nous intéresser.

18 1. UNESCO, Liste du patrimoine mondial, Centre du patrimoine mondial, 1995.

Page 19: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

Sites du patrimoine mondial et réserves de la biosphère en Afrique saharienne

Pays Date de ratification de la convention

du patrimoine mondial

Nombre de sites Nombre de réserves du patrimoine mondial de la biosphère

Gwpte Soudan

Algérie

Niger

Tunisie

Maroc

Mali

Libye

Mauritanie

Tchad

7 février 1974

6 juin 1974

24 juin 1974

23 décembre 1974

10 mars 1975

28 octobre 1975

5 avril 1977

13 octobre 1978

2 mars 1981

23 juin 1999

5 2

2

7 2

2 2

8 4

6

3 1

5

2

Total

Source UNESCO

Sites du patrimoine mondial situés dans les régions Sahariennes

Pays Sites

Algérie Le Tassilli N’Ajjer - La vallée du M’Zab

Libye Tadrart Acacus

Maroc Ksar Ait Ben Haddou

Niger Air - Ténéré

%ypte Temples de la vallee de Nubie

Mali Tombouctou Djenne

Mauritanie Ksour de Ouadane - Chinguetti -

Oualata-Titchitt

Source UNESCO

38 12

Réserve de la biosphère situées dans les régions arides ou semi-arides sahariennes

Pays Nom de la réserve

Algérie

Niger

Soudan

hwe Tunisie

Tassilli n’Ajer

l’Air-Ténéré

Dinder

Omayed - Wadi Allaqui

Djebel Bou Hedma

Source UNESCO

Page 20: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

Le tourisme saharien : études de cas

Page 21: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

1 Diversité et particularités 0 régionales

du tourisme saharien

On peut considérer qu’il existe deux catégories surtout s’il a été choisi en tant que site du patri- de touristes visitant le Sahara : moine mondial par l’UNESCO. - Le touriste dont l’objectif, du début jusqu’à

la fin de son séjour, se limite à la découverte du Sahara, à l’exclusion d’autres formes de produits touristiques.

- Le touriste qui, tout en s’intéressant au Sahara, combine son voyage avec d’autres produits : balnéaire, archéologique, écolo- gique ou dont le circuit touristique prévoit une escale plus ou moins longue dans l’es- pace saharien.

Cependant, dans la perspective d’une analyse du tourisme saharien dans les pays entourant le Sahara, il n’est pas toujours aisé de déterminer précisément le nombre de touristes séjournant uniquement au Sahara par rapport aux autres tou- ristes, du manque ou de l’inexistence de données statistiques fiables. Les données se rapportant au total des nuitées ou à la capacité en lits touris- tiques sahariens ne sont pas disponibles dans tous les pays.

La présentation des actions spécifiques des États, dans la promotion de leur industrie touristique en général et de leur tourisme saharien en parti- culier, permet de déterminer la politique de ces États par rapport à ce secteur : organisation admi- nistrative, incitations fiscales, protection de l’en- vironnement et du patrimoine. Ce dernier est pré- senté comme un facteur d’attraction touristique,

Un bref descriptif de certains de ces sites per- mettra de se rendre compte de la richesse du potentiel touristique saharien. Enfin, l’évocation des atouts et des obstacles du tourisme saharien des différents pays permettra de comparer leurs stratégies dans ce domaine. L’étude de ces cas a concerné trois ensembles de pays : - Trois pays d’Afrique du Nord : le Maroc, la

Tunisie et l’Égypte. - Quatre pays se situant au sud du Sahara : le

Mali, le Tchad, le Niger et la Mauritanie. - Les aspects du tourisme saharien des pays res-

tants sont présentés en fonction du contexte actuel de ces pays : l L’Algérie, avec son énorme potentiel tou-

ristique saharien, en tant que pionnier dans ce secteur, se préparant à son corne back pour l’an 2000 grâce à un schéma directeur touristique du grand sud.

l La Libye, qui fait une entrée remarquée sur la scène touristique internationale en orga- nisant ses rouages administratifs et la pro- motion de ce secteur, en est encore aux pre- miers balbutiements.

. Le Soudan, enfin, qui malgré la guerre qui le mine au sud, adopte une discrète stratégie de développement touristique.

Le tourisme saharien au Maroc

1.1 Importance et caractéristiques du tourisme marocain

L’activité touristique du Maroc constitue l’un des secteurs les plus prometteurs de l’économie du pays. Employant 250 000 personnes, elle ferait vivre 1,5 millions de marocains environ, soit 6 % de la population. Elle participe à hauteur de 8 %

à la formation du PIB ,et constitue le cinquième du total des biens et services exportés. Formi- dable soutien pour l’artisanat et les transports, le tourisme représente la deuxième source des devises du pays après les transferts des 1,~ mil- lions de résidents marocains à l’étranger et avant les recettes des ventes et produits dérivés du phosphate.

Page 22: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

L’évolution de la fréquentation touristique fut spectaculaire depuis le début des années 1960, lorsque furent lancées les premières opérations d’équipement et de promotion touristiques. La fréquentation touristique est passée de 160 000 personnes en 1965 à 1 600 000 en 1987 et 3 243 000 en 1998 soit dix fois plus d’arrivées au bout de la première période et un doublement au bout de la deuxième. Cependant, durant quatre années, de 1991 à 1995, le tourisme maro- cain accusa une alarmante baisse des flux et de l’activité touristique.

La progression des flux touristiques reprit dès 1996 avec un taux d’augmentation de 3,5 % des arrivées internationales, y compris les nationaux résidents à l’étranger. Cette progression se confirma nettement l’année suivante (+14 % en 1997) et plus timidement l’année d’après (+5,6 % en 1998). La fréquentation hôtelière tributaire pour près de 80 % du tourisme international a crû, quant à elle, de 9,6 % en 1997, passant de 7 886 191 nuitées en 1996 à 8 645 000 nuitées en 1997l. Ce sont les Européens qui constituent I’es- sentie1 de la clientèle étrangère touristique au Maroc. Les Français viennent en première posi- tion suivis par les Allemands, les Espagnols, les Italiens et les Anglais. En effet, plus de 80 % des touristes proviennent des pays d’Europe suivi par les Amériques, le Moyen Orient et le Maghreb. L’offre touristique marocaine a présenté jusqu’à ces dernières années des aspects contrastés : d’un côté des potentialités énormes liées à la richesse du patrimoine, la diversité des aspects culturels et de paysages (littoral, montagne, sud désertique) et de l’autre une sous-exploitation de ces poten- tialités à cause, essentiellement, d’un manque de vision globale et d’une faiblesse de la politique promotionnelle.

1.2 Le tourisme Saharien au Maroc : atouts et perspectives

1.2.1 Une fréquentation touristique en forte progression

Les arrivées touristiques dans la région du grand sud présaharien ont enregistré, ces dernières années, une hausse significative. Ainsi, si l’on compare les différentes régions touristiques en 1996, on remarque que c’est la région de Ouarzazate qui affiche la plus forte progression. A l’inverse, les régions balnéaires ont subi une baisse très nette des arrivées internationales. En effet, Agadir et Tanger ont enregistré en 1996 une baisse respective de -3,3 % et de -4,9 % alors

que Ouarzazate a enregistré une hausse de 19 % passant de 248 000 à 295 000 entrées internatio- nales entre 1995 et 1996. Elle est suivie par Fez (+ll %) et Marrakech (+9,4 %).

Ainsi, on remarque que le tourisme balnéaire, bien que toujours prédominant grâce notamment à la forte concentration hôtelière sur le littoral marocain, peut en revanche, subir de sérieux revers avec une baisse inhabituelle. Cela est confirmé par l’importante chute qu’a subi en 1996, la zone touristique balnéaire méditerra- néenne au nord du pays : -4,8 % des arrivées bien que possédant 11 % de la capacité hôtelière. Cette situation fut de nature à inciter les responsables du tourisme marocain à mieux développer le tou- risme des régions pré-sahariennes et désertiques. Ce tourisme présente en effet de formidables atouts malgré des freins empêchant son plein essor.

1.2.2 L’offre hôtelière dans la région du grand sud

Dans la région du grand sud présaharien et saha- rien, l’offre en établissements hôteliers et en nombre de lits touristiques présente des caracté- ristiques spécifiques. Ouarzazate ne représente qu’à peine 9 % des arrivées et 6 % de la capacité hôtelière totale du pays soit 32 hôtels des 530 unités en 1996. Abstraction faite d’Agadir qui représente 60 % des établissements hôteliers et 74 % de la capacité en lits touristiques du grand sud, tous les autres hôtels de la région saharienne totalisent 55 établissements soit lO,3 % du total national et 40 % du total régional. Ces hôtels présentent une capacité de 7 659 lits. Ouarzazate en détient la part du lion avec 5 478 lits soit 71,5 % du total régional, suivie par Taroudant 9,7 %, Laayoun 7,2 %, Tiznit 6,6 %, Tata 2,7 %, Tan-Tan 1,3 % et Oued El Dahab 0,7 %. Une spécificité de ces établissements hôteliers est le grand nombre d’hôtels classés quatre et cinq étoiles, supérieur à la moyenne nationale. Ainsi, plus de la moitié de la capacité en lits touristiques à Ouarzazate est composée d’hôtels de première catégorie. Ces derniers représentent 46 % des lits touristiques des autres villes sahariennes.

1.2.3 Palmeraie et kasbahs du grand sud

Le tourisme dans le sud du Maroc combine les attraits naturels et l’authenticité culturelle. C’est dans cette région que l’on peut admirer les nom- breuses palmeraies, les kasbahs et les magnifiques ksour, témoins d’une architecture ancestrale.

1. cf. Organisation mondiale du tourisme (OMT) et Ministère du tourisme marocain.

Page 23: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

1.2.3.1 Les oasis du Drâa, du Dadès et du Tafilalet

Les oasis et les palmeraies les plus visibles se trou- vent disséminées dans la vallée du Draa, entre Ouarzazate et Zagora, ou dans la vallée du Dadès en direction du Tafilalet. La piste reliant par la mon- tagne de l’Atlas, les gorges du Dadès aux gorges du Todgha, permet de pénétrer au coeur d’un paysage minéral avant de redescendre sur la palmeraie de Tineghir puis des confins sahariens jusqu’aux dunes de 1’Erg Chebbi qui p euvent atteindre 150 m de hauteur (dune de Merzouga). C’est dans le Tafilalet au sud d’Erfoud que se situe Rissani, construite sur les décombres de Sijilmassa fondée au huitième siècle après J.C, qui fut l’un des plus grands centres caravaniers du commerce de l’or, du sel, et des esclaves. C’est également là que se trouve le ber- ceau de la dynastie Alaouite fondée en 1666, qui vient de perdre son l7e souverain chérifien en la personne du roi Hassan II. C’est à partir de Zagora que s’étend à l’infini la plaine rocailleuse de la Hamada. C’est de là que l’on peut rejoindre M’Hamid, dernier centre administratif du Draa moyen, et que commence la piste de l’ouest qui longe la frontière algérienne pour rejoindre Goulimine via Foum Zguig, Tata et Ben Izarkan (576 km). A partir de Goulimine, on peut rejoindre le désert du Sahara occidental via Tan-Tan et Laayoune.

1.2.3.2 Le Sahara occidental Le Sahara occidental a une altitude qui ne dépasse pas 450 m. Il se compose de Seguiet El Hamra et du Rio de Oro. La première a une superficie de 82 000 km* et s’étend du sud de Tarfaya au parallèle 26, la seconde compte 190 000 km’ et est délimitée par le douzième méridien de longi- tude ouest jusqu’au niveau du Tropique du Cancer. Le parallèle 21020, jouxtant le bassin minéralier de Zouerate en Mauritanie, constitue la limite sud du territoire. Composé de six régions naturelles, (la Hammada, le Zemmour, le Cap Bojador, la Dakhla, la bande du désert de Tiris et le massif basaltique de 1’Adrar Soutouf), le Sahara occidental comprend différentes tribus dont les Reguibat et les Tekna qui possèdent un important cheptel de dromadaires et de chèvres.

1.2.4 L’Architecture de terre : un patrimoine en péril

1.2.4.1 Origine des kasbahs et des ksour Les ksour, kasbah et Agadirs du sud marocain édifiés en pisé, offrent des aspects typiques. Originale et spectaculaire, cette architecture de

pisé à décor de briques n’existe au Maroc que dans les oasis présahariennes du Dadès, du Drâa et du Tafilalet et dans quelques vallées de mon- tagnes directement reliées à ces oasis. Les Ksour les plus anciens se trouvent dans le Tafilalet. Or cette région est située sur le territoire de l’an- cienne Sijilmassa, célèbre cité au riche rayonne- ment culturel et économique au haut moyen âge. La recherche des origines de l’architecture des oasis marocaines nous amène à nous pencher sur l’étude des liens entre le rôle historique, les rap- ports socio-urbains et les techniques architectu- rales de Sijilmassa et de son réseau de commu- nication caravanière’.

A noter l’existence de ksour dans d’autres cités présahariennes dans le sud tunisien, le sud algérien et, plus proche, en Mauritanie.

Conçue à l’origine pour se prémunir contre les raids extérieurs et l’insécurité, la kasbah ou le ksar étaient des étapes nécessaires sur les routes du commerce caravanier.

1.2.4.2 Typologie des kasbahs et des ksour L’usage courant a étendu la désignation de Kasbah à la plupart des constructions du sud marocain comportant des éléments de fortifica- tion : villages enceints de mur (ksar) et grenier citadelle (agadir). Comportant généralement des kasbahs et des maisons souvent en ruine, les ksour qui remontent souvent, au début du XVIIIe, ont permis l’emploi de techniques très anciennes (pisé). Les parties supérieures des kasbahs sont ornées de décors géométriques, formés par la dis- position et l’alignement des briques selon plu- sieurs plans verticaux espacés les uns des autres. Les kasbahs, appelées Téghrent en berbère, sont constituées de grandes maisons regroupant autour d’une cour centrale de plan rectangulaire, quatre hautes ailes fortifiées, dominées par des tours d’angle. Elles commandent des logements annexes, moins élevés, regroupés autour d’une seconde cour à l’abri d’un mur d’enceinte.

Le grenier citadelle à caractère collectif, l’aga- dir, est bâti au sommet de la colline. Ainsi à la kasbah cellule familiale, s’oppose le ksar grou- pement essentiellement collectif, entouré de murailles défensives renforcées de tours d’angle et percées d’une porte en chicane. Les espaces communautaires jouxtant les maisons concernent des bergeries ou étables collectives, des greniers et silos. Cela peut être une place du marché, une salle de réunion de 1aJmaa (assemblée des chefs de famille), une mosquée. Le rez-de-chaussée des maisons est affecté généralement à des usages agricoles alors que les étages servent d’habitation d’hiver (en partie haute) et d’été (en partie basse).

5 a .2 2 c cz

25

Page 24: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

Les logements annexes étaient affectés aux ouvriers agricoles. A noter que la kasbah peut être un véritable palais forteresse, siège du pou- voir local, comme c’est le cas à Telouet.

1.2.4.3 Un exemple de ksar: L’Aït Benhaddou Le ksar de Ait Benhaddou est devenu le lieu de destination des groupes touristiques visitant la région de Ouarzazate. Considéré comme étant le plus célèbre des ksour de le vallée de I’Ourika, il constitua le décor de plusieurs films célèbres tels Laurence d’Arabie ou Jésus de Nazareth. En 1987, le ksar fut choisi comme site du patrimoine mondial par l’UNESCO en raison des caracté- ristiques des constructions qui leur conférent une valeur exceptionnelle. Parmi ces caractéristiques, on peut noter, d’après des critères de I’ICOMOS : - Leur adaptation aux conditions climatiques. - Leur fusion et leur intégration au paysage

environnant. - La simplicité et l’ancienneté des procédés

architectoniques qu’elles mettent en oeuvre. - L’harmonie des proportions et des volumes. - La sobriété et l’efficacité du décor dont elles

sont revêtues. La valeur exceptionnelle de ces bâtisses mena-

cées de délabrement total justifie pleinement leur inscription sur la Liste du patrimoine mondial’.

Construit au début du XVIII~ siècle, le ksar de 1’Ait Ben Haddou comporte six kasbahs et une cinquantaine de maisons en ruines. Il fut déserté par sa population qui a préféré construire un bourg moderne sur l’autre rive de 1’Asif Mellah, où quatre vingt quatre familles se sont installées dans des habitations en parpaing de ciment. Inexorablement, malgré les groupes de touristes qui viennent déambuler tous les jours dans le dédale de ses ruelles, le ksar d’Ait Ben Haddou, comme d’innombrables autres Ksour de la région, se dégrade de jour en jour. A ce stade, nous nous posons la question de savoir comment réagissent les pouvoirs publics et la population locale pour préserver ce patrimoine et l’explorer en tant que produit touristique. Cela nous amènera ensuite à considérer les faiblesses et les perspectives du tourisme saharien au Maroc.

1.2.5 Sauvegarde du patrimoine et tourisme dans le sud marocain

Prenant conscience du péril de disparition qui guette les ksar et les kasbahs du sud, le ministère de la culture marocain a lancé, à la fin des années

quatre vingt, un programme national pour la pré- servation des kasbahs du sud. Sur mille kasbahs répertoriées, 300 furent désignées prioritaires pour être réhabilitées : le ksar Ait Ben Haddou fut le premier à bénéficier de ce programme. Le programme eut l’appui du PNUD, de l’UNESCO et de I’OMT. Outre le sauvetage du patrimoine culturel en péril, le programme visait aussi à sti- muler l’activité touristique dans la région.

Plusieurs facteurs sont derrière la dégradation des kasbahs et des ksour parmi lesquelles l’abandon par les familles des demeures traditionnelles. En effet, ces villages citadelles ne remplissent plus leur rôle d’antan de protecteur de la population du fait de : - La disparition des routes caravanières trans-

sahariennes. - La disparition de l’insécurité. - L’installation d’un État national centralisé. - L’exigence légitime d’avoir accès aux moyens

de la vie moderne (électricité, accès direct par la route). La dégradation dramatique du ksar d’Ait Ben

Haddou a amené les pouvoirs publics, dans le cadre de leur programme national de préserva- tion des kasbahs du sud et de la promotion tou- ristique, à procéder à des actions de réhabilita- tion sur le site telles que: - Relevés architecturaux des maisons du village. - Travaux de nettoyage. - Pavement des ruelles. - Aménagement des berges de l’ouest.

Construction d’une passerelle. - Restauration des façades des maisons et des

édifices les plus significatifs tels que la mosquée. Ces actions ont engendré une activité touris-

tique accrue, soutenue par la réputation qu’a conféré au site son inscription sur la Liste du patrimoine mondial et le tournage de films célèbres dans ses décors. Cette activité touris- tique s’est matérialisée par les résultats suivants : - Création de 25 bazars et magasins de souve-

nirs, dont huit dans le vieux village et quatre cafés restaurants qui proposent des chambres.

- Construction de deux petits hôtels. - Création d’une association culturelle. - Intégration systématique du ksar d’Ait Ben

Haddou dans le programme des circuits des tours opérateurs étrangers et des agences de voyages marocaines venant de Marrakech et de Ouarzazate.

- Une fréquentation touristique estimée à 400 visiteurs/jour’.

1. ICOMOS. Avis pour l’inscription du ksar d’Aïd Ben Haddou sour la Liste du patrimoine mondial. 1987.

2. Berriane M., Maroc : 1~ lente renaissance des qsar - Le Courrier de l’UNESCO, juillet-août, 1999.

Page 25: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

Cependant, malgré ces résultats le projet de sauvegarde du ksaidy n’a pas tenu toutes ses promesses et des problèmes subsistent, dont certains concernent le secteur touristique marocain dans son ensemble.

1.3 Les problèmes de développement du tourisme durable dans le sud marocain

1.3.1 La difficile réhabilitation des ksour et des kasbahs

L’action des pouvoirs publics pour réhabiliter le KUY d’Ait Ben Haddou n’a pas permis de le sau- vegarder totalement car il est resté déserté par la population, tel une forteresse fantôme. Les quelques opérations de restauration sur le bâti ne sont pas suffisantes pour assurer une survie à long terme du village. En effet, nous sommes en face d’une archi- tecture de l’éphémère avec l’utilisation du pisé qui nécessite une perpétuelle renaissance grâce à des aménagements et des actions de protection perma- nentes, contre les agressions du temps et des intem- péries. Cela nécessite donc une présence humaine permanente, autrement dit le retour des habitants d’origine au sein du &Y. Or, il faut accompagner ce projet d’un minimum d’infrastructures de base qui puissent assurer la dynamique d’une commu- nauté de gens aujourd’hui (électricité, eau courante, école, desserte routière...). Ce projet fut réellement discuté par différents organismes et ministères publics pour l’aménagement de survie du ksm. Les décisions suivantes ont été prises : - Construction d’une école coranique par le

Ministère de l’éducation nationale en atten- dant d’édifier une école primaire quand les effectifs le permettront, avec un accès direct au village qui puisse vaincre les caprices de l’oued en période de crue.

- Equipement du village en énergie solaire grâce à l’Office national de l’électricité. Or ces décisions n’ont jamais été réellement

concrétisées à cause, notamment, de la multipli- cation des intervenants et de l’absence de coor- dination entre les différents ministères ainsi que l’existence d’obstacles juridiques liés au statut foncier du rC?SaY où des héritiers de certaines kas- bah sont difficiles à joindre (certains vivant à l’étranger). Ainsi, malgré que quelques rares per- sonnes y vivent toujours en permanence (trois familles), le k5ar reste toujours sans équipements structurants. D’autres problèmes se posent par rapport à la fréquentation touristique : - Concernant la capacité de charge du village

et des kmbahs environnants en fonction des groupes de visiteurs.

- Concernant les retombées réelles de cette fré- quentation sur les populations locales.

- Concernant les sources de financement des projets du développement touristique.

1.3.2 Autres questions freinant le tourisme saharien

Parmi les autres handicaps mentionnés comme causes de la désaffection touristique, on peut citer :

La lenteur des formalités administratives d’accès aux postes frontières. La vétusté de certaines unités hôtelières et leur surclassement par rapport au standard international de classement des hôtels. L’insuffisance de la formation et la détériora- tion de la qualité des prestations. Le harcèlement des touristes (faux guides, vendeurs ambulants) et l’insuffisance de l’information. Le manque de mesures incitatives pour l’in- vestissement.

1.3.3 La mise à niveau et les perspectives du tourisme Marocain

Les défaillances dressées sans complaisance par les opérateurs tant institutionnels que privés lors des Journées nationales du tourisme tenues à Rabat les 23 et 24 février 1998, ont permis de ten- ter de rectifier le tir. Plusieurs mesures furent pré- conisées, tels que le renforcement des brigades de contrôle touristique contre le harcèlement, un meilleur contrôle du service dans les établisse- ments hôteliers et para-touristiques. Ainsi le ministère du tourisme n’hésita pas à déclasser plu- sieurs hôtels présentant des défaillances dans leurs prestations. Les Groupements régionaux d’inté- rêt touristique (GRIT) furent mis à contribution pour l’adoption de chartes de qualité au niveau régional’. D’autres recommandations furent lan- cées visant, également, le tourisme saharien : - Mise en place d’un fond de rénovation hôte-

lière, d’autant plus que beaucoup d’hôteliers sont extrêmement endettés.

- Adoption de la charte des investissements. - Adoption d’un dispositif de formation conti-

nue et de reconversion professionnelle. - Remise à niveau des Zones d’intérêts touris-

tiques (ZIT) - Prise en compte du facteur environnement

dans tout nouvel aménagement. - Mise en place d’un label Maroc. - Mettre l’accent sur le tourisme de différencia-

tion en créant de nouveaux produits touris- tiques tel que le tourisme saharien précisément.

1. Cf. CFCE, Le tourisme au Maroc: évolution et perspectives, Paris, 1998.

Page 26: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

Le tourisme saharien en Tunisie

1.1 Evolution et caractéristique du tourisme tunisien

L’année 1998 est une année faste pour le tourisme tunisien. En effet, pour la première fois, le pays dépasse le cap des cinq millions de touristes et se hisse ainsi à la première place de cette activité en Afrique et dans le monde arabe.

Cependant, si le total des arrivées touristiques atteint un niveau très honorable pour ce petit pays de 164 000 km* et de neuf millions d’habi- tants, en revanche, les prix des prestations hôte- lières restent bas, reflétant l’image persistante d’un pays touristique essentiellement balnéaire et très abordable.

Pourtant les pouvoirs publics tentent de sor- tir de cette situation en menant des campagnes promotionnelles ciblées et en diversifiant les pro- duits touristiques. Le tourisme saharien est pré- cisément l’un des produits souvent mis en avant pour sa richesse et l’attrait qu’il exerce sur les occidentaux. L’État tunisien, conscient de ce fait, s’est attelé à promouvoir ce secteur en encoura- geant la construction de nombreuses unités hôte- lières dans les oasis les plus réputées du sud du pays.

Cette politique s’est surtout affirmée à la fin des années quatre-vingt grâce aux avantages fis- caux accordés aux promoteurs privés. Cependant, le tourisme saharien tarde à s’installer dans les oasis comme véritable activité de séjour, tarde également à affirmer son autonomie par rapport au tourisme balnéaire. Plus préoccupant encore, le taux d’occupation annuel des hôtels haut de gamme des oasis tunisiennes a du mal à atteindre des niveaux satisfaisants.

Les causes de cette situation sont-elles internes à la région ou relèvent-elles de facteurs plus complexes ? Y-a-t-il adéquation entre la demande et le produit touristique saharien ? Pourtant, les régions sahariennes tunisiennes pos- sèdent une richesse incontestable du point de vue patrimoine culturel et naturel baignant toutefois dans un univers fragile.

La vocation du tourisme tunisien en tant que tourisme balnéaire de masse a été dictée dès les années soixante par des impératifs économiques urgents. En effet, après son indépendance en 1956, le pays le plus démuni en matières pre- mières de l’Afrique du Nord, oeuvra à trouver des solutions de rechange à son handicap. L’économie tunisienné basée essentiellement sur une agriculture dépendante des aléas climatiques,

subissant le plus souvent la sécheresse, trouva dans le tourisme le moyen d’équilibrer sa balance commerciale et de créer de nombreux emplois.

1.1.1 Les atouts géographiques et humains

Les conditions géographiques et humaines se prê- taient bien à cette stratégie : 1300 km5 de côtes, un climat tempéré méditerranéen au nord et sur les côtes, semi aride

à l’intérieur, aride au sud, une histoire riche jalonnée par des peuples divers (Phéniciens, Carthaginois, Romains, Vandales, Byzantins, Arabes, Espagnols, Turcs, Français), des vestiges archéologiques et un patrimoine architectural et artisanal, une main d’oeuvre disponible prête à être formée sur le terrain.

De l’autre côté de la Méditerranée, la clien- tèle européenne, après avoir visité les côtes ita- liennes et espagnoles, était curieuse de découvrir ce pays, porte de l’Orient, berceau de Carthage et de l’Islam occidental, qui a inspiré depuis le siècle dernier les nombreux écrivains et artistes qui y séjournèrent. Ce furent successivement : Chateaubriand (1806), Alexandre Dumas (1846), Gustave Flaubert (1858), Guy de Maupassant (1887), André Gide (1873, 1896 et, 1942), Isabelle Eberhardt (1899 et 1903), les frères Lumière (1816) ou plus tard encore Paul Klee, Auguste Macke, Henry de Montherland, Georges Duhamel, Colette et Antoine de Saint Exupéry. Nombre de ces célébrités furent également fas- cinées par l’attrait des oasis et du désert tunisien tels Gide, Klee ou Saint Exupéry.

Cependant, même si le tourisme colonial fut prospère jusqu’aux années trente surtout à Tunis, lieu du tourisme d’hivernage, ce fut l’ouverture du premier Club Méditerranée en juin 1954 et le Lancement de la station d’Hammamet au début des années soixante, qui préfigurèrent du carac- tère balnéaire du tourisme tunisien.

1.1.2 Le rôle catalyseur de l’État

Jusqu’en 1965, la croissance du tourisme était caractérisée par l’intervention directe de l’Etat, essentiellement dans la construction hôtelière, grâce à la Société hôtelière touristique de Tunisie (SHTT) et la Société des financements touris- tiques (COFITOUR).

La relève, assurée ensuite par le secteur privé, permit au tourisme de connaître un nouvel essor. L’État délimita et équipa en infrastructures (avec l’appui financier de la Banque internationale de reconstruction et de développement, la BIRD)

Page 27: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

cinq zones prioritaires d’aménagement touris- tique : Tunis nord, Tunis sud, Hammamet- Nabeul, Sousse-Monastir, Jerba-Zarzis. Ces zones, toutes situées sur la côte, furent dotées de nombreux établissements hôteliers et devinrent ainsi le fer de lance du tourisme tunisien. Combinant déjà le tourisme de séjour balnéaire avec des excursions ou des circuits culturels, les agences de voyage commencèrent à inclure la région des oasis sahariennes dans leur programmation.

Des complexes touristiques plus importants, tels que Port El Kantaoui, virent le jour et les établissements hôteliers accaparèrent le front de mer, le long de cordons de plus en plus étendus au sein des zones touristiques.

1.1.3 Evolution de l’industrie touristique tunisienne de 1962 à 1997

Ainsi, des balbutiements du tourisme moderne des années soixante jusqu’à la fin des années soixante dix (1962-1977), soit quinze ans plus tard, l’activité touristique fit un bond spectacu- laire : les investissements, les entrées des non rési- dents (de 46 000, on passe à un million de tou- ristes), et les nuitées furent multipliées par vingt, la capacité en lits et les emplois directs, par 15, le nombre des établissements hôteliers par quatre et les recettes par soixante-dix, (de l,9 millions de dinars tunisiens, on passa à 139,4 millions de DT). La décennie suivante (1977-1987) vit la maturité du tourisme tunisien se confirmer. Les investissements furent multipliés par 3,5 les hôtels, le nombre de lits et les emplois directs par l,5. Quand aux entrées des non résidents et aux nuitées, elles furent doublées alors que les recettes quadruplèrent. Ainsi, on passa de 1 million à 1,9 million de touristes et de 288 à 434 hôtels.

L’année 1987 correspond au changement de régime politique en Tunisie, avec l’accession au

pouvoir du Président Ben Ah. L’activité touris- tique fut confirmée comme étant l’une des prio- rités absolues de l’économie nationale par le nou- veau gouvernement. La construction hôtelière s’affirma avec plus d’intensité. Deux codes des investissements touristiques furent promulgués en 1990 et 1993, avec des conditions fiscales très avantageuses pour les promoteurs nationaux et étrangers, surtout dans les zones de développe- ment régional telles que : - Exonération totale des impôts pendant 10 ans,

puis 50 % les dix années suivantes. - Dégrèvement de 100 % des bénéfices

réinvestis. - Suppression de la TVA sur les biens

d’équipement. - Droits de douane réduit à 10 %.

Ces conditions fiscales ont permis au volume global des investissements cumulés de presque quintupler passant de 723 millions au terme de l’année 1986 à 3 423 millions à la fin de l’année 1997. Soit, une progression de 373 % en dix ans. En même temps, les investissements étrangers ont contribué à la création de 50 000 lits déboursant 228 millions de dinars dont 73,6 % durant la période 88/97. Le nombre des établissements hôteliers passa de 434 à 641 unités soit 47,6 % de progression, alors que le nombre de lits aug- menta de 72 %, passant de 98 668 à 170 000. Quant aux entrées des non résidents, elles pas- sèrent de l,9 millions à 3,9 millions, soit un dou- blement du nombre des touristes. D’autre part, dans l’effort de diversification du produit tou- ristique, furent créés depuis 1987 une dizaine de terrains de golf, autant de centres de thalasso- thérapie et 26 ports dont 5 de plaisance. Le tou- risme saharien devint l’une des priorités du nou- veau pouvoir politique en Tunisie après le changement du 7 novembre 1987.

Évolution de l’industrie touristique tunisienne de 1962 à 1996

Années Invest. Nbre d’h6tels capacités Emplois Entrées Nuitées, Recettes (millions de DT) en lits directs non résidents nbre de nuits (millions de DT)

non résidents

1962 10,141 74 4 077 1 631 46 110 395 777 1,970

1977 210,613 288 64 097 25 639 1 015 966 a 117 577 139,439

1986 723 434 98 668 40 182 1 900 000 17 525 741 568.9

1996 417 641 170 000 68 000 3 900 000 24 129 960 1413,2

Source ONTT

Page 28: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

1.2 Le tourisme saharien tunisien : problématique d’un développement régional complexe

Le choix d’encourager le développement du tourisme saharien n’est pas un choix fortuit ou de circonstance de la part du gouvernement tunisien, mais bien le fruit d’une réflexion sur le devenir du tourisme tunisien et la stratégie de sa diversification dans un environnement compétitif. Ce n’est pas un hasard si le premier conseil des ministres réuni cinq jours seulement après le changement du régime politique, fut consacré au secteur du tourisme et plus parti- culièrement au tourisme saharien. Considérée comme le point de départ d’une nouvelle ère de prospérité pour le Sahara, d’une reconnais- sance officielle de la valeur esthétique, histo- rique et économique des régions sahariennes, cette journée du 12 novembre 1987 permit de promulguer un ensemble de décisions et de recommandations considérées comme salutaires pour l’avenir des contrées sahariennes. Fut créée également ce jour là, la Journée nationale du Sahara. La stratégie de ce nouveau choix est double : - Permettre, à moyen terme, à l’industrie tou-

ristique tunisienne, en butte à la concurrence des autres destinations balnéaires méditerra- néennes et à la chute des prix de ses presta- tions, de faire fructifier un gisement touris- tique peu exploité jusqu’alors, le lançant ainsi sur l’orbite des produits innovants destinés

t en priorité au marché européen.

2 - Permettre aux régions sahariennes déshéritées Lz 2

de trouver, dans le tourisme, une solution à

fi leurs problèmes économiques, tout en pré-

.2 servant leur patrimoine culturel et naturel. 2 s 1.2.1 -z

Les potentialités touristiques du Sahara tunisien OJ

I, 2 0 n peut, schématiquement, distinguer quatre

-2 régions touristiques sahariennes : 2 - E

La région de Gafsa et du Jerid avec les oasis

& de Tozeur, Nefta, et les oasis de montagne 3

Y (Chebika, Mides, Temerza).

- %

La région du Nefzaoua avec Kebili, Douz, le

s grand sud et le parc national de Jbil.

- 3 La région des troglodytes de Matmata, les a Ksour de Tataouine avec Gabes Médenine et

.o 2

Tataouine.

z - L’île de Jerba, bien que faisant partie du tou-

w risme balnéaire, peut constituer une base d’appui à cette dernière région.

1.2.1.1 Le panorama géographique d’ensemble

La région touristique saharienne de la Tunisie est mise en relief dans sa partie septentrionale et au sud - est par un certain nombre de chaînes mon- tagneuses, n’excédant pas les 600 m, alternant avec des dépressions, un plateau et une plaine. Ainsi, au delà des monts de Gafsa, flanqués au sud par les chotts d’E1 Fejaj et d’E1 Gharsa (à proximité des oasis de montagne), les chaînes du Gherb et du Tebaga orientées est-ouest, enca- drent la dépression qui sépare les oasis du Jerid et du Nefzaoua du détroit de Gabes, sur la bor- dure septentrionale du Sahara. Ce dernier est flanqué, à l’est, d’un plateau, le Dahar, lui même bordé par une falaise, les monts des ksour. Entre cette chaîne méridienne et la mer, s’étend la plaine de la Jeffara. L’île de Jerba constitue le prolon- gement de cette steppe et une illustration d’une bipolarité saharienne et méditerranéenne.

Au-delà de ces espaces, l’extrême sud tuni- sien est enclavé, sur 80 000 km5, entre la fron- tière algérienne, depuis Mides jusqu’à El Khadra et la frontière libyenne, depuis El Khadra jus- qu’à la Méditerranée. Ce territoire désertique est occupé, pour moitié, par les magnifiques dunes du Grand Erg Oriental. C’est ce panorama avec ses multiples oasis et ksour montagneux, avec ses chotts figés et l’immensité ondulée de l’Erg, qui confère au Sahara tunisien, son charme particu- lier et où nomades et semi-nomades transhument dans ses plaines.

1.2.1.2 Le Djerid ou pays des palmes Tozeur Capitale administrative de la région, Tozeur compte 38 000 habitants. Sa palmeraie de 1200 ha et 250 000 palmiers est réputée pour l’abon- dance de sa végétation étagée et luxuriante. Le vieux quartier des Ouled El-Hadef, tout comme le centre moderne, présentent des façades au décor géométrique, fait de briques de couleur ocre, tantôt en saillie, tantôt en retrait, caracté- ristique de l’architecture locale. La zone touris- tique, avec ses nombreux hôtels situés de part et d’autre d’un vaste boulevard stylepromenade des Anglais, se trouve à la lisière de la palmeraie, très loin du centre ville. Là, se trouve un centre d’ani- mation culturel, le Dar Chraïet, mélange de musée des arts populaires et de parc d’attraction, avec le thème des mille et une nuits. La capacité hôtelière de Tozeur est de 3 782 lits.

30

Page 29: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

La fragdité du patrimoine architectural saharien : l’oasis de montagne de Tamerzn (Tunisie).

Nefta Distante de Tozeur de 25 km, sa palmeraie compte 350 000 palmiers environ, la plus vaste de Tunisie. La ville a une réputation religieuse, avec ses nombreuses mosquées, dont certaines datent du XVI~ siècle. Ses marabouts font l’objet de pélerinages, notamment le mausolée de Sidi Bou Âli. La corbeille de Nefta est réputée pour son point de vue panoramique qui surplombe un paysage de palmiers dont certaines des nom- breuses sources l’alimentant, ont brusquement tari, il y a quelques années. Le centre de la ville historique, située admirablement sur la crête d’une colline, présente les mêmes aspects archi- tecturaux que Tozeur, avec ses façades en brique ocre. Beaucoup de ces maisons ont été réhabili- tées à la suite de destructions, liées aux pluies diluviennes de 1980. Ces pluies ont également détruit une partie du centre historique de Tozeur et des oasis environnantes notamment, celles de Chebika Mides et Tamerza.

La zone hôtelière se trouve répartie sur deux sites de développement (en raison de la situation topographique de la ville) : l’un dans la palme- raie, l’autre dans le site de la corbeille, à proxi- mité du fameux hôtel Sahara Palace, un des pre- miers construits dans la région, et qui est actuellement en rénovation. La capacité hôtelière de Nefta est de 1138 lits. A quelques kilomètres, au sud de la ville, se trouvent de hautes dunes de sable d’où l’on peut admirer le spectacle du coucher ou du lever du soleil. A partir de Nefta,

on peut rejoindre l’oasis d’E1 Oued, en Algérie, qui se trouve à 25 km seulement au sud, et com- biner ainsi Saharas tunisien et algérien. Les oasis de montagne de Chebika, Tamerza et Mides Elles se trouvent localisées à une cinquantaine de kilomètres vers la frontière algérienne au sein de paysages, de canyons, de falaises et de lignes de crêtes. Outre la vue panoramique, l’attraction tou- ristique concerne les anciens villages construits en terre. Malheureusement, ces oasis ont été détruites en 1980 par les pluies. En contrebas de ces vieux centres historiques dévastés, les pouvoirs publics ont construit des villages modernes aux larges rues et aux maisons en ciment.

1.2.1.3 Gafsa et Métlaoui L’oasis de Gafsa peut être jointe soit au nord de Tozeur sur 100 km, soit à partir des oasis de mon- tagne en traversant le paysage minéral des vieilles cités minières d’Oum Laraïes et El Rdaïf, en pas- sant par Métlaoui, pays des phosphates. La ville, qui compte 50 000 habitants, a une vieille médina arabo-musulmane qui a été judicieusement réha- bilitée, et est le berceau de la civilisation cap- sienne (d’où vient Homo-caprien). Il existe autour de Gafsa, différents sites préhistoriques, datant du paléolithique : ossements de rhinocéros, de zèbre et d’antilope ainsi que des silex taillés au moins 40 000 ans av. J.C. à El Gtar. D’autres sites, datant du néolithique, de tradition capsienne (- 4000 ans av. J.C.), ont été découvert à Mekta,

Page 30: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

à 15 km au nord de la ville et à Metlaoui, à 30 km au sud. L’empreinte de l’époque romaine et byzan- tine est également très présente à Gafsa, avec les piscines romaines et les mosaiques de la même époque, que l’on peut admirer dans un musée amé- nagé à proximité de la palmeraie. Cette dernière peut révéler les secrets des techniques hydrau- liques foggarus, seguias, puits aghlabites. Malgré ses richesses, la ville demeure un simple relais pour les touristes, dans son hôtel le Maamoun situé au centre ville, ou le Jugurtha (du nom du célèbre chef numide natif de la ville). La capacité hôte- lière est de 732 lits dont 424 non classés.

1.2.1.4 Le Nefzaoua Kebili et Douz Ces oasis se trouvent de l’autre côté du chott El Djerid (120 km de Tozeur). Kebili d’abord, fameuse par ses eaux thermales et son fort aux autruches et Douz ensuite, la plus saharienne des oasis du sud tunisien.

Fief des tribus M’razig, Douz est célèbre pour son festival international du Sahara, organisé chaque année au mois de décembre, et comme point de départ de nombreuses méharées vers le grand sud, en passant par Zaafrane ou El Faouar. De Douz, on peut se rendre au parc national de Jbil. C’est également le lieu traditionnel des promenades à dos de dromadaires des groupes touristiques. Son artisanat, réputé, est étalé dans un marché tradi- tionnel aménagé, où s’organise un souk hebdoma- daire. Le musée de Douz présente différents aspects de la vie au Sahara. La zone d’aménagement tou- ristique a été conçue au pied des dunes les plus proches de l’oasis. Plus au sud de Douz, se trouve à Zaafrane une unité d’hébergement, lieu de départ de méharées ou de promenades à dos de droma- daires pour les nombreux groupes qui viennent là de façon journalière. Un autre hôtel trois étoiles se trouve à El Faouar, dans une ancienne station de forage de pétrole. La capacité hôtelière existante à Kébili et Douz est de 3 805 lits

1.2.1.~ Mutmata et la route des Ksour Entouré par un paysage lunaire, le village de Matmata (3000 habitants environ) offre une vision apocalyptique. Lorsqu’on l’observe de haut, l’architecture des maisons a pour base un entonnoir circulaire qui découpe le sommet d’une colline et forme la cour autour de laquelle s’or- donnent les pièces de la demeure creusée dans les parois de la cour (ou hdouch). Sédentaires, les Matmatias cultivent, grâce au système des ies- SOU~S (ou terrasses), les terres limoneuses des fonds

d’oueds. Beaucoup se sont installés dans Matmata la nouvelle à quinze kilomètres de l’ancienne.

Plusieurs hôtels ont été construits à Matmata. Le plus ancien est le fameux Touring Club, vieille demeure transformée en lieu d’hébergement. La capacité d’hébergement est de 554 lits. Autour de Matmata, les villages de Beni Zelten, Tamezret, Zeroua ou Toujane ont gardé leur cachet berbère. Des monts Matmata jusqu’à la plaine de la Jeffara, soit en traversant l’oasis de Gabes, soit en pas- sant directement par Mareth, le visiteur peut admirer d’autres formes architecturales typiques, telles les Ghorfas de Medenine et de Metameur ou les ksour de la région de Tataouine. Rappelant les ksour et kasbahs du sud marocain, ce sont sou- vent des citadelles greniers, sous forme de villages pitonniers, ou des habitations dispersées autour d’un grenier collectif fortifié où habitaient ber- bères ou arabes sédentaires. Parmi les premiers, on peut admirer Chenini, Douiret et Guermessa. Parmi les seconds on peut citer Ksar Ouled Soltane, Ksar Haddada, Ksar Ouled Debbab.

La région de Tataouine compte soixante cinq ksour de montagne localisés dans un rayon de 40 km, et une dizaine de ksour de plaine localisée autour de Smar (Beni Mhira, ksar Jedia, El Ain...). Le festival des ksour, organisé chaque année début avril, rappelle l’importance de ce patri- moine. A partir de Tataouine, on peut également découvrir des vestiges islamiques ou romains à Ouni, Oum Zouggar (Dehiba) et El Brigua Kebira et Seghira (Remada). Enfin, Tataouine est le point de départ pour découvrir le désert du Sahara proprement dit avec les bases d’appui de Tiaret SP3, Kamour SP4 et El Borma. Plus vers le sud, on peut atteindre le Sahara libyen en direction de Ghadames.

1.2.1.6 Le patrimoine architectural et urbain du sud tunisien en péril et sa relation avec l’activité touristique

Les nombreux ksour et ghorfas du sud tunisien posent le problème de l’usage des biens culturels : soit ils sont considérés comme des musées de plein air, soit on leur donne une fonction particulière. Celle ci peut être soit à but d’exploitation touris- tique, soit une appropriation du lieu à but d’habi- tation. Dans le premier cas, quelques Ghorfas, mai- sons troglodytes ou ksour, ont été affectés à des prestations touristiques de passage. C’est le cas de maisons à Matmata, des Ghorfas de Metameur ou de Ksar Hadada transformés en unités hôtelières (Ksar Hadada comprenant par exemple 72 lits). Dans le deuxième cas, se pose le problème des

1. Où l’eau, disparue en 1995, coule de nouveau grâce à d’importants efforts du gouvernement tunisien.

Page 31: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

infrastructures (eau, électricité...) et donc du finan- cement, mais aussi du pouvoir de persuasion et de concertation avec les populations locales .

Ces exemples peuvent également s’appliquer aux autres cités sahariennes endommagées par le temps ou les intempéries comme les oasis de mon- tagne de Chebika, Mides ou Tamerza. L’emploi combiné à but résidentiel et/ou touristique se heurte souvent à des obstacles d’ordre foncier, puisque les héritiers du bien (souvent dans l’in- division) se trouvent dispersés dans d’autres régions ou à l’étranger, notamment en France.

1.2.2 L’offre touristique hôtelière dans la région du Sahara tunisien

1.2.2.1 Un hébergement d tendance huut de gumme

L’analyse de la répartition de la capacité hôtelière par catégorie révèle les aspects suivants : sur les 9 786 lits que compte la région de Tozeur, les lits de catégorie trois étoiles représentent la moitié de la capacité hôtelière totale. Les hôtels quatre et cinq étoiles constituent 20 % de l’ensemble de la capacité. Ainsi on constate une prédominance d’établissements de bon standing (moyenne et haut de gamme). D’autre part, l’étude de la période 1987-1997, nous indique que la capacité hôtelière a plus que triplé, reflétant l’intérêt des promoteurs à investir dans la région des oasis sahariennes. Cet intérêt est motivé essentiellement par les avantages fiscaux consentis par l’État.

1.2.2.2 Un faible tuux d’occupation Malgré cet engouement pour la construction hôtelière et les avantages octroyés par les pou- voirs publics, le taux d’occupation des hôtels reste bas (autour de 30 %) et n’excède jamais les 40 %. En 1996, ce taux est tombé à 29,l %. Plus grave encore, la région de Gafsa-Tozeur présente le

Taux d’occupation des hôtels par région

Année 1996 1991

Tunis-Zaghouan

Nabeul-Hammamet

Sousse-Kairouan

Monastir-Madhia-Sphax

Djerba-Zarzis

Gafsa-Tozeur

Bizerte-Beja

Tabarka-Ain-Draham

Moyenne annuelle

36,9 39.1

46,5 52

53,l 57,8

53.1 59,7

52,7 58

29,l 31.7

36.2 35.7

34,3 37,4

42,8 46,4

Source ONTT

taux d’occupation hôtelière le plus bas de toutes les régions touristiques.

1.2.3 L’action de l’État pour promouvoir le tourisme au Sahara.

La sous-occupation hôtelière a amené les pou- voirs publics à décider d’abaisser de 50 % les taxes aéroportuaires pour les compagnies aériennes programmant Tozeur en ligne directe. En fait, le souci d’encourager le développement du tourisme dans les oasis sahariennes est attesté par les mesures décidées en novembre 1987 et relatives aux avantages fiscaux supplémentaires pour ceux qui investissent dans le tourisme saha- rien. Parmi ces décisions : - Abaisser le taux d’auto financement de 40%

requis pour l’ensemble du secteur à 30% pour le tourisme saharien.

- Exonérer de l’impôt la totalité des bénéfices réinvestis dans les projets touristiques au Sahara.

- Exonérer l’entreprise des impôts pour une période de 10 ans. D’autres recommandations relatives à l’amé-

lioration de l’environnement et de la qualité du produit saharien furent également proposées :

Créer un musée du Sahara à Douz. Réorganiser et rehausser le standing des fes- tivals dans la région. Assurer une meilleur desserte avec les aéro- ports tunisiens. Multiplier les forages et les équiper pour mieux utiliser l’eau dans les hôtels, notam- ment pour les usages autres que la boisson et sa rétrocession à l’agriculture. Créer des réserves et des parcs naturels. Développer et assurer les moyens de secours dans la région. Faciliter les opérations d’importations des biens d’équipements nécessaires aux projets touristiques agréés. Donner la priorité aux projets d’infrastructures permettant un meilleur accés, notamment les axes Tozeur-Tamerza et Medenine-Kebili. La célébration, le 12 novembre de chaque année, de la Journée nationale du tourisme saharien.

1.2.4 Approche de bilan de l’activité touristique dans le sud tunisien

Parmi les recommandations gouvernementales qui ont pu être concrétisées, on peut citer : - L’encouragement du festival international de

Douz qui se déroule chaque année au mois de décembre ainsi que l’ouverture du musée du Sahara.

Page 32: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

- La création du festival des ksour organisé au début du mois d’avril de chaque année.

- La desserte aéroportuaire est mieux fournie avec des vols réguliers de Tunis Air et de Tuninter à partir de Tunis mais également des grandes villes européennes.

- La multiplication des forages a permis d’ali- menter les nombreuses piscines des hôtels.

- La création du parc national de Jbil dans l’ex- trême sud tunisien, au niveau du Grand Erg Oriental.

- La création d’une école hôtelière à Tozeur. - La création ou l’amélioration des axes rou-

tiers : El Hamma/Chebika, Douz/ Matmata, Matmata/Ghilane, la route des Chotts.. . Le total des investissements en matière d’in-

frastructures pour la période 1988-1997, a concerné 2 505 000 DT pour Tozeur Nefta, et 3 138 000 DT pour Kebili Douz. Ce qui corres- pond à 8,5 % du total des investissements dans l’ensemble des zones touristiques.

1.2.4.1 Les investissements étrangers dans l’hôtellerie saharienne

Attirés probablement par les incitations fiscales qui s’appliquent, en Tunisie, également aux inves- tisseurs étrangers, beaucoup de groupes interna- tionnaux ont participé au développement de l’hô- tellerie saharienne, souvent en association avec des promoteurs tunisiens. Ainsi : - Le groupe ACCOR a tenté une association

avec le groupe tunisien Sangho de M. Jemmali pour gérer et commercialiser, outre les anciens hôtels de la chaîne Tanit de l’ex. S.H.T.T., situés sur la côte, l’hôtel Sangho à Tataouine, Ibis à Medenine, et le Sahara Palace à Nefta.

- La société PANSEA dirigée par des ex-sala- riés du groupe français ACCOR, associé au groupe Carthage Tours de M. Loukil et à la société pétrolière la Trapsa, a réalisé un relais saharien à Ksar Ghilane. Quant aux relais de Zaafrane et Tiaret, ils sont encore au stade de projets. Le relais de Ksar Ghilane, au sud-est de Douz, est en fait, un hôtel quatre étoiles situé à côté d’une source thermale, dont les chambres sont disposées sous forme de tentes tout confort et climatisées. Ce même groupe financier, devenu la société mixte SITH, pro- jette également restaurer le vieux village de Mides.

- Le tour-opérateur français Nouvelles Frontières, associé à 33 % au groupe Hannibal Tours de M. Bhira et à des banques, a construit en 1991 l’hôtel Basma à Tozeur,

en plus de ses autres Palladiens d’Hammamet et de Mahdia.

- FRAM a construit une Framissima à Tozeur, l’hôtel la Palmeraie de 150 lits, en plus de sa gestion du Golf Beach à Jerba et des hôtels Ribat et El Habib à Monastir.

1.2.4.2 Diagnostic des problèmes du tourisme saharien en suspens

Les faiblesses du tourisme saharien Malgré les énormes atouts de la région saharienne et les diverses actions pour le promouvoir, force est de reconnaître que le produit touristique saha- rien présente des résultats encore insuffisants, dus à des raisons à la fois internes et externes. Les raisons internes concernent : - L’inadéquation de certains hôtels, haut de

gramme, par rapport au produit commercia- lisé. Cela concerne, notamment, le tourisme individuel et national.

- La faiblesse de l’animation. - La faiblesse de l’innovation en matière de

valorisation du patrimoine culturel et naturel des régions (peu de spectacles)‘.

- La dépendance envers le tourisme balnéaire. - La faible prise en compte de la capacité de

charge dans certains sites touristiques. - L’insuffisance de programmes incluant l’éco-

tourisme, l’observation de la nature et le mode de vie local (gestion de l’eau, récolte, élevage...).

- L’insuffisance d’infrastructures sportives, tels parapente, ULM, escalade...

- Le faible intérêt pour les nouveaux produits tels le trekking, la randonnée, la rencontre avec l’autre, le tourisme des jeunes et d’aventure.

- L’insuffisance des structures d’hébergements autres que classiques : gîtes, pensions de famille, relais sahariens, campings.

Les raisons externes concernent essentiellement : - La dépendance envers les tours opérateurs

étrangers. - La politique promotionnelle à l’étranger qui

doit être plus agressive et se baser davantage sur la politique de la différenciation. Malgré les formules de partenariat financier, il y a peu de possibilité pour les Tunisiens d’influencer en amont la promotion ou la commercialisa- tion du produit touristique tunisien.

- Le cercle vicieux : taux d’occupation faible, baisse des prix, dépendance envers le voya- giste étranger.

- La difficulté de donner une image plus valori- sante, sur le plan touristique, de la destination

1. Ministère de l’environnement et de l’aménagement du territoire, Le schéma directeur du Gouvernorat de Tozeur, Tunis, 1998.

Page 33: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

malgré les nombreuses participations à des foires et à des salons spécialisés’.

Les atouts du tourisme saharien - Une volonté politique très forte pour déve-

lopper le secteur du tourisme saharien. Cette volonté se manifeste, grâce, notamment, aux multiples actions du ministère du tourisme et de l’artisanat. Parmi ces actions, on peut rele- ver outre la participation aux foires et aux salons étrangers, l’invitation de nombreux journalistes, équipes de télévision et agents de voyages (2 044 en 1998) ; l’affectation d’un budget spécial pour la promotion touristique du sud tunisien ; l’organisation de grandes manifestations tels que défilés de mode, com- pétitions sportives, congrès et l’institution

d’une Journée du tourisme saharien. Cet effort se poursuiva en 1999 avec l’organisation, le 31 décembre, du Sahara mellenium dans la région de Tozeur.

- Un effort manifeste pour la préservation de l’environnement et du patrimoine culturel.

- Un contrôle administratif strict, des équipe- ments et des acteurs du tourisme.

- L’ouverture de l’aéroport international de Gafsa en novembre 1998.

- La pénétration des marchés américains et japonais. Le tourisme saharien tunisien est très récent

et il est appelé à connaître un développement plus important dans le futur, récoltant ainsi les divi- dendes d’un effort d’investissements soutenu, le plus spectaculaire des pays sahariens.

Le tourisme saharien en Égypte

1.1 L’évolution du tourisme national égyptien

L’évolution du secteur touristique en Égypte reflète la dépendance de cette activité économique envers les événements conflictuels géopolitiques externes et internes. Ainsi, la guerre du Golfe et la série d’attentats intégristes ayant secoué le pays au début des années quatre-vingt-dix, ont fait net- tement diminuer le flux des arrivées et des recettes touristiques en Égypte. Cette baisse fut de - 22 % en 1993 pour les arrivées et -51,2 % pour les recettes. Ainsi, en une année, les arrivées touris- tiques baissèrent brutalement de 700 000 per- sonnes passant de 3,207 millions en 1992 à 2,508 millions de touristes en 1993. Quant aux recettes touristiques, elles furent amputées de la moitié, passant de 2730 millions de dollars américains en 1992 à 1332 millions de dollars en 1993.

En fait, l’Égypte est l’un des pays arabes, qui, malgré son immense potentiel touristique, a subi le plus souvent les contre-coups des soubresauts politiques de la région : le conflit armé israélo- arabe de 1967 et 1973, la prise de l’Achille Lauro un navire de croisière italien en 1985, le raid amé- ricain sur la Libye, en 1986, sans compter l’em- bargo arabe, suite au traité de paix séparé égypto- israélien de 1986. Malgré ces circonstances, le tourisme égyptien a progressé au rythme annuel

1. OMT, Tendances des marchés touristiques, Afrique, 1999.

de 6,7 %, entre 1975 et 1985. En 1988, le cap des 2 millions de touristes est atteint.

Six années plus tard, suite aux événements qui secouèrent le pays (guerre du Golfe et attentats) et devant l’ampleur des annulations des groupes touristiques les pouvoirs publics adoptèrent une politique promotionnelle agressive, à l’étranger, soutenue par un budget de 42 millions de dol- lars américains durant les années 1993 à 1995. Les prix des prestations de services locales furent bradés. Rapidement une reprise très nette du tou- risme s’amorça les années suivantes. Ainsi, on enregistrera en 1996, 3,s millions d’arrivées tou- ristiques en progression de 55 % par rapport à 1993. Le terrible attentat de Louxor en novembre 1997, annonça le glas du tourisme égyptien. Ses conséquences ne furent cependant pas trop catas- trophiques et la baisse touristique maîtrisée à -12,8 %. Ainsi les arrivées touristiques enregis- trèrent 3,~ millions en 1998 au lieu de 3,~ millions de visiteurs l’année d’avant.

1.2 L’importance du développement du tourisme égyptien

La célérité et l’importance avec laquelle les pou- voirs publics ont géré cette crise (le président de la république tentant lui-même de rassurer à plu- sieurs reprises les marchés émetteurs) montrent

Page 34: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

la place primordiale qu’occupe ce secteur dans l’économie nationale et la préoccupation du pou- voir égyptien à le maintenir performant. Le tou- risme, en effet, représente la deuxième source de devises du pays après les envois des Égyptiens à l’étranger et avant les revenus du pétrole et des taxes de passage du canal de Suez. Ainsi, dans le cadre d’une stratégie de diversification des pro- duits touristiques, autres que les circuits cultu- rels basés sur la visite de sites à majorité pha- raoniques, des projets de construction hôtelière d’envergure furent lancés au Sinaï à El Arish sur la côte méditerranéenne ou le long des golfes d’Akaba et de Suez pour exploiter les fonds marins de la mer Rouge à Taba, Dahab, Charm El Cheikh et Ras Sudr.

Ainsi, 36 000 lits seront créés jusqu’en 2002 sur les côtes du Sinaï. Ils viendraient se rajouter aux 140 000 lits déjà existants en 1996. Cependant, ces projets financés entièrement par des capitaux privés appuyés par des incitations fiscales du gou- vernement égyptien, intéressent principalement le tourisme balnéaire international. Elles concernent très faiblement les oasis sahariennes de l’ouest du pays. Celles-ci présentent pourtant un patrimoine naturel et culturel ainsi que des potentialités tou- ristiques importantes. Exploitées judicieusement, elles pourraient dynamiser ces régions vers un développement durable.

1.3 Le tourisme saharien en Égypte

C’est précisément à l’ouest du Caire que se trouve la Route des oasis qui, au niveau de Giza, se dirige à l’ouest, vers Siwa et au sud-ouest, vers les oasis de la Baharia, Farafra, Dakhla et el Kharja.

1.3.1 Les caractéristiques géographiques du Sahara libyque d’Égypte

Loin de la frénésie des constructions hôtelières qui a saisi le littoral de la mer Rouge et les sites côtiers du Sinaï, loin des flux incessants des groupes touristiques visitant les sites pharao- niques le long de la vallée du Nil, les oasis du Sahara égyptien(ou désert libyque) apparaissent comme des havres de paix accueillantes et mys- térieuses. Ces oasis, au nombre de cinq, (Siwa, Bahariya, Farafra, Dakhla et Kharja), dessinent un chapelet d’îles verdoyantes dans l’immensité ondulée du milieu aride qui les entoure. De grandes dépressions dont le fond se situe sous le niveau de la mer, ont permis à certaines oasis d’être plus proches de la nappe phréatique et don- nent à la région des paysages étonnants.

36 1. Guide Gallimard : L’Égypte, Paris,1998.

Le désert libyque, bordé au sud par le Soudan, se situe à l’ouest du Nil jusqu’à la frontière libyenne sur une distance moyenne de 800 km couvrant environ les deux tiers du pays. Il est formé de plateaux uniformes et peu élevés pro- longeant ceux du Soudan par de grandes dalles rocheuses (Hamadas) dont les rebords forment des escarpements atteignant jusqu’à 1934 m au Djebel Ouerat, ces plateaux sont entaillés par des vallées d’oueds asséchés et souvent couverts de champs de dunes ou ergs. Tour à tour constitués par des calcaires dorés et des grès bruns sombres, ils sont fracturés par une série de dépressions allongées au sud et au nord-ouest et où se trou- vent les oasis. Avant d’atteindre la côte méditer- ranéenne au nord, ces plateaux s’ouvrent sur la grande dépression de Kattara (-137 m) et tombent au sud-ouest du Caire sur la dépression de Fayoum (-45 m).

1.3.2 Les potentialités touristiques des oasis

Les oasis égyptiennes du désert libyque recè- lent, dans des décors d’une grande beauté, d’im- portants sites historiques témoins de civilisa- tions florissantes. En effet, dès l’Ancien Empire, les dunes de la région furent sillonnées par un réseau de chemins caravaniers desservant les pays voisins. On transportait l’ivoire, l’ébène, le cuir de rhinocéros et de peau de panthère, ainsi que des esclaves. Afin de contrôler ces richesses , venant de Libye ou du Darour, les Egyptiens colonisèrent les oasis occidentales, les Grecs y élevèrent des temples ptolémaïques et les Romains des forteresses. Durant l’ère islamique, les nomades continuaient à contrôler les cara- vanes et à prélever des tributs apurés des popu- lations sédentaires

A l’époque contemporaine, les oasis de Kharja, Dakhla et Farafra ont fait l’objet, en 1959, d’un programme de colonisation du désert libyque afin de développer l’agriculture des oasis, tout en exploitant les richesses minières de la région (phosphate). Le projet de nouvelle vallée est ainsi né. Il concerne une superficie de 450 000 m* et de 120 000 habitants’. Du point de vue de la localisation géographique, on peut distinguer deux ensembles : - L’oasis de Siwa situé à l’ouest du pays, proche

de la frontière libyenne. - Les oasis de la nouvelle vallée, situés au centre

et au sud du pays parallèlement à la vallée du Nil. Ce sont les oasis de Bahariya, Farafra, Kharja et Dakhla.

Page 35: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

1.3.2.1 L’oasis de Siwa

Située à 627 km du Caire et à 306 km de Marsa Matrouh sur les rivages de la Méditerranée, l’oasis de Siwa se trouve au fond d’une dépres- sion à 16 m en dessous du niveau de la mer. L’oasis est célèbre pour ses trois cent sources, ses deux lacs et ses sites antiques. Parmi les vestiges importants : - Le temple d’Aghourmi date de la XXVIe

dynastie (664 à 525 av. J.C.) appelé égale- ment le temple de l’oracle, il fut immorta- lisé par la visite d’Alexandre le Grand en 331 av. J.C.

- Le temple d’Amon (XXXe dynastie) dit d’Oum Oubayda.

- Le site antique de Gebel el Maouta (mon- tagnes des morts). Il abrite des tombeaux pha- raoniques de la XXVIe dynastie.

- La cité de Shali, fondée en 1 203 avec ses ruelles tortueuses, ses maisons en karshi (boue séchée) et son enceinte fortifiée. Elle fut abandonnée en 1926 à la suite de pluies qui l’endommagèrent.

- L’artisanat de Siwa est célèbre (bijoux, van- nerie et tissus brodés).

- Le bain de Cléopatre ou Ain El Hammam avec d’autres sources réputées (Al Araïes, Katnas, Maloul, Tanghazi, Zakawa). L’hébergement touristique se limite aux hôtels

Al Waha, dépendant de la municipalité, La Rose des sables et Siwa Safari.

1.3.2.2 Oasis d’E1 Bahariah Située à 360 km, c’est l’oasis la plus proche de la capitale. Ses palmeraies recouvrent une dépres- sion d’une centaine de kilomètres de long au relief très accidenté d’origine basaltique. Elle recèle 268 sources d’eaux sulfureuses et basaltiques, ainsi que des vestiges pharaoniques et romains aux sites d’A1 Kesseir et d’A1 Babouti. Elle compte 26 000 habitants. L’hébergement touris- tique consiste en un complexe de chalets dépen- dants du gouvernement.

1.3.2.3 L’oasis de Farafra Située à 170 km au sud des oasis de Bahariah, la ville est entourée d’une enceinte en pierres et contient des ruelles bordées de murs aveugles. Au nord se trouve à 30 km, le fameux désert blanc, où de gigantesques formations calcaires d’un blanc pur prennent des formes étonnantes.

1.3.2.4 L’oasis de Dakhla Située à 200 km au nord de Kharja, l’oasis de Dakhla s’étend sur une soixantaine de km jalon-

née, par des villages à l’architecture traditionnelle restée intacte. Le plus important est celui de Mout. La plupart des sites historiques se trou- vent localisés le long de la route : - Deir El Hogar, est un bâtiment de pierre

d’origine romaine, endommagé lors d’un tremblement de terre.

- Les tombeaux d’A1 Mauzaouaka sont des tombeaux de Pélusis et Petosiri.

- Le village fortifié d’E1 Kasr date de l’époque des Ayyubides.

- On rencontre des cimetières de la VI dynastie à Mout.

- Construit sur le modèle pharaonique, Bashandi est un village situé à l’est de Mout et refermant un tombeau islamique et des tombeaux romains dont le plus important est celui de Kitanos.

1.3.2.5 L’oasis de Kharja C’est la plus importante des oasis, longue de 185 km. Ses vestiges pharaoniques, gréco- romains, ou islamiques se trouvent disséminés le long de la route vers Dakhla :

Le temple d’Hibis est le seul temple grec de vaste dimension en Égypte. Il fut élevé par Darius ler. La necropole de Bagawat : on compte près de 120 chapelles nestoriennes élevées entre le IV~ et le xe siècle. Seuls cinq de ces monu- ments conservent des décors peints. Le temple de Nadoura a été construit par les Romains sous Hadrien. Darb El Sindadiya sont des forteresses sou- terraines . Les maisons en brique ont des poutres en tronc de palmier. Ce site du xe siècle sert aujourd’hui d’étable. Ain Oum El Dabadid, village romano- byzantin, présente les caractéristiques des cités caravanières. Ain Oum Labakha est un temple romain comportant des tours rondes. Al Deir est l’une des anciennes forteresses de l’époque romaine construite pour protéger les caravanes. Devenue plus tard un monastère, elle se trouve localisée à environ 30 km au nord de la ville de Kharja. Le temple d’E1 Ghoueitta, bâti et décoré à l’époque ptolémaïque entre les règnes de Ptolemée III et de Ptolemée X, érigé en 250-280 av. J.C. Il fut consacré au culte de la Triade Sainte : Amont Ra-Mout-Khonsir. Le temple d’A1 Zayan fut bâti sous les Romains. Il est situé à 25 km au sud de l’oasis de Kharja.

Page 36: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

1.3.3 L’hébergement touristique dans les oasis

Les hôtels sont peu nombreux dans la région des oasis et se trouvent concentrés principalement dans la ville de Kharja. Celle-ci regroupe trois hôtels 2 étoiles, quatre hôtels non classés et un camp de camping. Un autre hôtel non classé se trouve à Mout. Un centre d’hébergement de catégorie supé- rieure est construit sur un ensemble de chalet dépendant de la préfecture de Kharja. Ce même type d’hébergement se retrouve à l’oasis de Siwa, les chalets dépendant également de la municipalité.

1.4 Les atouts du tourisme saharien égyptien

Parmi les principaux atouts du tourisme saharien égyptien on relèvera surtout : - L’étonnante richesse du patrimoine culturel

et historique de la région : de très nombreux monuments pharaoniques, gréco-romains, islamiques sont intégrés dans les différentes oasis constituant un gisement incomparable.

- Différents sites naturels tel le désert blanc, différentes sources thermales attirent les visi- teurs nationaux et étrangers.

- Il existe des manifestations annuelles inter- nationales tel le rallye des pharaons.

1.5 Les obstacles au développement du tourisme saharien en Égypte

- Des ressources peu exploitées. - Un sous équipement hôtelier. - Un patrimoine architectural et archéologique

nécessitant d’être restauré. - Des actions d’investissement et de promotion

du tourisme saharien encore insuffisantes.

Le tourisme saharien au Mali

1.1 L’évolution du tourisme malien : une fréquentation étrangère très ancienne

Le tourisme est considéré aujourd’hui comme l’une des activités économiques primordiales à développer au sein du Mali moderne, et devant prendre des proportions plus importantes dans le futur. En effet, la richesse culturelle et natu- relle du pays à travers ses villes anciennes, sites du patrimoine mondial (Tombouctou, Djenné), ses paysages (pays Dogon, Sahara, fleuve Niger), son artisanat et ses traditions populaires, est appelé à donner au secteur touristique une forte impulsion dans les années qui viennent. Le tou- risme peut être considéré, cependant, comme une tradition ancienne remontant au siècle dernier, et même au moyen âge. En effet, le premier tou- riste célèbre à avoir mentionné le nom de la cité de Tombouctou dans ses écrits fut le géographe arabe Ibn Battùta, en 1350, qui la visita sur sa route vers le Maroc.

11 parla de cette cité en ces termes : Nous voyagedmes après pour la ville de Tombouctou. Entre elle et le Nil, il y a quatre milles. La majo- rité de ses habitants sont des Massufa, porteur du Litham. Il y a en cette localité le tombeau du poète illustre Abdel Ishak Al Sahili, il y a aussi le tombeau de Siraj Al Din Al Kuwayk, un des grands commerçants d’Alexandrie. Se trouvent ainsi réunies dans cette citation les deux activi-

tés qui avaient fait la réputation de certaines cités caravanières sahariennes telles que Tombouctou : - L’activité intellectuelle à travers notamment le

Fikh (1 a uris ru ence), la théologie musul- j * p d mane, dont il reste d’innombrables manuscrits et les fameuses mosquées et medersas.

- L’activité commerciale qui approvisionnait les cités caravanières en denrées rares et les reliait entre elles.

D’autres écrivains mentionnèrent plus tard le nom de la ville tel que Hassane Ibn Mohamed, dit Léon l’Africain en 1519. Ce furent pourtant des explorateurs et missionnaires européens qui renforcèrent la fonction touristique de cette région de l’Afrique saharienne : Gordon Laing en 1826, René Caillé en 1828, Henrich Barth en 1853, Oscar Lenz en 1880. Les maisons habitées à Tombouctou par ces trois derniers, peuvent être visitées de nos jours par les touristes. Ceux-ci peuvent aussi admirer l’aspect architectural ancestral de l’habitat et des mosquées en terre malienne. Celle de Djenné, est la plus importante. Malgré ces atouts incontestables et l’image mythique que détiennent les villes anciennes maliennes, ainsi que l’effet médiatique exercé par le rallye Paris-Dakar, l’industrie du tourisme reste encore faible, totalisant à peine 50 000 touristes.

L’examen de la fréquentation touristique fait apparaître les conséquences de la révolte des

Page 37: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

Touaregs sur le nombre des arrivées internatio- nales. En effet, ces dernières ont subi une baisse sensible depuis 1990 et qui devient plus nette en 1993, passant de 44 000 arrivées à 24 000 soit une chute de 45 %. Après l’accord de paix de 1994, la courbe des arrivées devient ascendante passant de 39 759 en 1995 à 50 130 en 1996 soit une varia- tion de 62 % et 26 %. Les principaux marchés d’origine concernent l’Europe, l’Afrique et les États Unis. La capacité d’hébergement représente 2 534 lits pour l’année 1996 répartis sur 90 éta- blissements hôteliers. La plupart des hôtels sont concentrés à Bamako, Mopti et Tombouctou. Beaucoup de ces hôtels ne correspondent pas aux normes internationales, hormis des établisse- ments réputés, tel que l’hôtel de 1’Amitié ou le Grand Hôtel. Ce dernier a été privatisé en 1996.

1.2 Place du tourisme saharien au Mali

Le tourisme saharien se concentre surtout dans la région de Tombouctou qui constitue généralement une étape de circuits de plusieurs jours. Ces cir- cuits incluent Bamako, Ségou, Mopti, Djenné, le pays Dogon et Tombouctou. Cette dernière peut être rejointe par voie fluviale ou par voie aérienne. C’est à partir de Tombouctou que des méharées peuvent s’organiser : Dinaberg, Azima, Dimbeldouz ou Arouane sur la route du sel vers Taoudeni. La ville de Taoudeni, à 450 km au nord de Tombouctou, fut pendant des siècles le but des caravanes à la recherche des blocs de sel. Les salines d’Agorgott, à Taoudeni, sont toujours en exploi- tation depuis le XVIe, période où elles ont rem- placé celles de Teghazza, beaucoup plus éloignée.

1.2.1 Les sites du patrimoine mondial : Tombouctou, Djenné

Les deux anciennes villes du Mali furent inscrites sur la Liste du patrimoine mondial en 1989.

1.2.1.1 Tombouctou Tombouctou, en plus de son rôle de cité carava- nière, fut un grand lieu de propagation de l’Islam en Afrique. Dotée de la prestigieuse université coranique de Sankoré et d’autres medersas, elle était au XVe et XVIe siècle une capitale intellec- tuelle et spirituelle. Ses trois grandes mosquées (Djingareiber, Sankoré et Sidi Yahia) témoignent de l’âge d’or de Tombouctou. Tous ces monu- ments sont menacés par l’avancée des sables. Une pratique traditionnelle qui se répète tous les ans consiste en une restauration collective et béné- vole des mosquées.

Restauration collective de la mosquée de Sankoué à Tombouctou (Mali)

La commune de Tombouctou, chef lieu de la 61e région du Mali compte environ 30 000 habi- tants. Vaste de 49 ha, la Medina comprend les quartiers de Djingareiber, Badjindé, Sankoré et Sorei-Keïna. Selon l’ICOMOS, malgré que la pierre alhor, qui est relativement résistante soit utilisée dans de nombreux édifices, la plupart des constructions en matériaux traditionnels sont en danger, si d’énergiques mesures conservatoires n’interviennent pas rapidement’. Autre danger qui guette la ville concerne l’urbanisation anar- chique. En dehors des mosquées, on compte à Tombouctou 16 cimetières et mausolées dont ceux de Cheikh Aboul Kassim Attouaty mort en 1529, du savant Sidi Mahmoudou mort en 1548 et du Cadi El Aqib, le grand restaurateur des mosquées mort en 991 de 1’Hegir (1583).

Autres éléments concernant les composantes d u patrimoine architectural et urbain de Tombouctou : les remparts, la Kasbah marocaine, les marchés (Badjindé), le palais des souverains manchy (Madougou), la place de Tombouctou et le carrefour de Bity Hatouma, la maçalla pour la prière des grandes fêtes. Outre les maisons qui accueillirent les explorateurs Gordon Laing, René Caille, Barth et Lenz, on peut se recueillir devant les demeures des savants et ulemas de

1. cf. ICOMOS, Avis concernant l’inscription de Tombouctou sur la Liste du patrimoine mondial, mai 1981.

Page 38: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

grands renoms tels Mohamed Bagayko, Es- Sayouti, Cheick a1 Mokhtar El Konty. Dans la périphérie de Tombouctou, 13 des 333 saints pro- tègent la ville de tous les malheurs. Un autre patri- moine, et non des moindres, concerne les 15 000 anciens manuscrits répertoriés au centre culturel Ould Baba. Du point de vue hébergement, le relais Azalai de classe internationale, l’hôtel Bouctou (non classé) et un campement constituent I’essen- tiel des lits touristiques à Tombouctou.

1.2.1.2 Djenné et ses villes anciennes Comme Tombouctou, Djenné connut son âge d’or au XV~ et XVI~ siècles comme centre de rayonne- ment de l’islam. La ville qui succéda à l’ancienne ville, Djenné Djano, au XI~ n’incorpora véritable- ment l’islam qu’au XIII~ siècle sous l’influence des marchands markas. Tombée au pouvoir des Marocains en 1591, des Peuls en 1810, des Toucouleurs en 1862, colonisée par les Français en 1893, la ville a vu sa physionomie changer. La phase d’urbanisation de la ville revient aux popu- lations Nono, qui en firent un marché et la plaque tournante dans le commerce transsaharien de l’or.

Djenné s’étend sur plusieurs togueré (buttes) et est divisée en deux par une grande avenue, marquée au sud par la place du marché que domine la grande mosquée reconstruite en 1906. De part et d’autre de cet axe, environ 1850 mai- sons traditionnelles se répartissent sur une vingtaine d’hectares de parcellaire ancien. L’architecture domestique, influencée par celle du Maroc, se caractérise par sa verticalité. En effet, des contreforts scandent les façades à deux niveaux des maisons, dont l’entrée est très soignée. Au delà de ce quartier historique, peu- vent s’observer des constructions contempo- raines datant des extensions successives de la ville. Édifiés au bord du fleuve Niger, les 17 ports de Djenné sont d’un grand intérêt, notamment celui de Bambara. Outre Djenné-Djeno, les villes anciennes à côté de Djenné concernent Hambarketolo, Tanomba et Kaniana, qui appor- tent un témoignage exceptionnel sur les civilisa- tions pré-islamiques du delta intérieur du Niger’.

1.2.1.3 Les falaises de Bandiagara Cette région pré-saharienne, l’un des jalons, tout comme Djenné, de la route des circuits touris- tiques vers Tombouctou, est appelé également le pays dogon. En effet, les falaises qui abritent de très belles architectures (habitations, greniers, autels, sanctuaires et lieux de réunions appelés toguna) demeurent, depuis des siècles, l’âme de

la culture Dogon traditionnelle. Les caractéris- tiques géologiques et les paysages font du pla- teau de Bandiagara l’un des sites les plus impres- sionnants de l’Afrique de l’ouest.

1.3

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Atouts et problèmes du développement du tourisme au Mali

1.3.1 Les atouts du tourisme malien

Des potentialités culturelles et naturelles exceptionnelles avec des sites classés sur la liste du patrimoine mondial (Tombouctou, Djenné, falaise de Bandiagara). Une volonté politique qui se dessine avec l’encouragement à la construction hôtelière et à la privatisation des unités d’hébergement (le grand hôtel à Bamako). L’organisation de vols charters à partir de la France (Lyon, Gao) et d’éductours à partir des États Unis. Les Américains entretiennent un véritable culte pour la ville mythique de Tombouctou qui pourrait être un argument de vente efficace. Amélioration des infrastructures aéroportuaires. Stabilité politique et ouverture démocratique du pays. Création d’un office du tourisme qui a rem- placé l’ancien commissariat du tourisme en août 1995. La préparation d’un code d’investissement touristique. Un artisanat très performant surtout celui d’origine Touareg, se basant sur le fer forgé et le cuir. Les perspectives d’organisation de la CAN 2002 Coupe d’Afrique des Nations au Mali. Des initiatives de jumelage entre villes. Exemple : projet de jumelage entre Kairouan (Tunisie) et Tombouctou. Outre les sites historiques, l’existence du parc naturel de la Boucle du Baoulé, qui a reçu avec ses trois réserves adjacentes le label réserve de la biosphère de l’UNESCO en 1982.

1.3.2 Les problèmes de développement du tourisme malien

Insuffisance des structures hôtelières adé- quates au tourisme. Faiblesse d’application du règlement régissant la profession de guide touristique : beaucoup d , . e guides experimentés se trouvant concur- rencés par des amateurs sans formation. Formalités de paiement de taxes supplémen- taires séparées à l’aéroport.

1. cf. ICOMOS, Avis concernant l’inscription de Djenné sur la Liste du patrimoine mondial, mai 1981.

Page 39: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

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Transports terrestres défectueux à partir de Ségou vers Mopti. Contrôles administratifs sur les routes. Problème de l’environnement lié aux eaux usées. Absence de représentations régionales du tourisme ou de syndicats d’initiatives dans les sites touristiques. Absence de représentation officielle du tou- risme à l’étranger indépendante des ambassades. Inexistence d’un ministère autonome du tourisme. Actuellement, l’administration du tourisme est combinée avec le ministère de la culture. Faiblesse d’une politique d’aménagement touristique et de contrôle hôtelier. Peu d’encouragements spécifiques pour le tourisme saharien.

Faiblesse d’aide aux coopératives de l’artisa- nat notamment Touaregs. Mise en application insuffisante du plan national d’aménagement touristique de 1991. Faible programmation des tours-opérateurs occi- dentaux spécialisés et absence de tarif charter. Faible présence bancaire en dehors de Bamako. Insuffisance de signalisation touristique. Peu de programmes privilégiant l’éco-tourisme. Saisonnalité de la destination et de la voie flu- viale (2 à 5 mois par an). Cherté des transports aériens des compagnies internationales d’aviation. Insuffisance de sensibilisation des popula- tions locales au respect de l’environnement et de son exploitation pour un tourisme durable.

Le tourisme saharien au Niger

1.1 L’évolution du tourisme saharien au Niger

Le tourisme nigérien a connu un certain engoue- ment dans les années quatre-vingt. Malheureuse- ment, l’insécurité engendrée par la rébellion toua- reg a arrêté toute activité touristique dans le nord du pays dès 1991. Suite à l’accord de paix signé à Ouagadougou en Avril 1995 et à une relative stabilité politique, le tourisme connut un certain regain et un ministère du tourisme fut créé. Fut également mis sur pied un comité d’action du tourisme (CAT), destiné à promouvoir et redy- namiser ce secteur. Parmi les résultats obtenus dès l’automne 1996, on peut citer : - La législation de la chasse dans certaines

régions du Niger. - La création d’une vingtaine d’agences de

voyage à Agadez. - La programmation de la destination par des

tours-opérateurs européens, notamment fran- çais.

- La mise en place d’un charter reliant Agadez à la France. Auparavant en 1995, la compa- gnie Corsair, filiale du tour-opérateur fran- çais Nouvelles Frontières avait commencé à desservir Niamey à des prix 30 % moins chers que ses concurrents Air France et Air Afrique.

Toutes ces actions furent vaines, puisque des tou- ristes furent à plusieurs reprises dévalisés dans

l’Air par des hommes en armes. Cette situation d’insécurité a conduit les tours-opérateurs et les compagnies charter à annuler leurs opérations sur le Niger dès janvier 1997. Pour faire face à cette nouvelle crise, le gouvernement nigérien, après avoir nommé en décembre 1997 un ancien chef rebelle touareg natif de l’Air, M. Rhissa Ag Boula, en tant que ministre du tourisme, mit en place un programme biennal (1998-2000) dont les objectifs étaient les suivants : - Réduire les taxes pour les professionnels et

simplifier les formalités. - Privatiser et réhabiliter le secteur hôtelier. - Mettre en place des promotions touristiques,

avec comme objectif d’augmenter le nombre de touristes. Parmi ces opérations promo- tionnelles fut l’organisation, du 11 au 14 novembre 1998, d’un défilé de mode inter- national à Tiguidit, en plein désert, sous la férule du créateur nigérien Alphadi.

1.2 Les indicateurs du tourisme au Niger

1.2.1 La fréquentation touristique

L’analyse des statistiques sur les arrivées touris- tiques fait ressortir les données suivantes : - Importance du tourisme africain : 46 % en

1996 et 44 % en 1997, des 16 104 et 17262 arrivées totales soit respectivement 7 388 et 7 488 Africains.

- Le marché européen représente 40,8 % des arrivées en 1996 et 41,7 % en 1997.

Page 40: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

Avec 5 202 touristes, les Français occupent plus des deux-tiers des arrivées européennes en 1996 et 32,2 % du total des arrivées. Viennent ensuite les Américains avec 1923 arrivées soit 11,9 % du total. Les nuitées ont enregistré un total de 203 000 en 1996 générant 17 millions de dollars américains. L’hébergement compte une capacité de 3037 lits en 1995, soit une progres- sion de 25,8 % par rapport à 1994. La plupart des hôtels sont concentrés à Niamey avec dix hôtels homologués totalisant 551 chambres et bunga- lows. Les autres villes comportant des unités d’hé- bergement sont Agadez, Anlit, Ayorou, Dosso, la Tapoa, Marach, Nomaro, Tahoua et Zinder.

1.2.2 Les transports

Seule Niamey est desservie par les transports aériens réguliers internationaux. Il existe aux frontières du Niger un visa touristique entente, valable 60 jours, commun aux pays suivants : Bénin, Burkina Faso, Côte d’ivoire, Togo et Niger. Les compagnies aériennes opérant au Niger sont : Air France, Air Afrique, Air Algérie, Éthiopian Airlines, Air Niger (représentant Corsair) et Niger Service. Le réseau routier nigé- rien est assez bien développé et les principaux axes du pays sont goudronnés. Le taxi-brousse est le principal moyen de transport. Une dou- zaine de lignes de bus est desservie par les autocars de la Société nationale des transports nigériens (SNTN).

1.3 Atouts et freins au développement du tourisme saharien au Niger

1.3.1 Les atouts

1.3.1.1 L’atout patrimoine : La Réserve naturelle de L’AiT et du Ténéré

Le principal atout du tourisme nigérien concerne son patrimoine culturel et naturel. En effet, la Réserve naturelle de l’Air et du Ténéré est ins- crite sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 1991. Située dans la région saharienne, à environ 160 km au nord-est d’Agadez, c’est la plus grande aire protégée d’Afrique avec 7,7 millions d’hectares. La zone bénéficiant du statut de sanctuaire intégral appelé Addax, n’en constitue que le sixième. Le massif de l’Air se distingue par des activités métamor- phiques et éruptives et, bien que se trouvant dans le désert saharien du Ténéré a, grâce à son climat, sa flore et sa faune, des particularités sahéliennes.

La Réserve possède un ensemble exceptionnel de paysages et d’espèces végétales et animales sau- vages. On y a identifié 40 espèces de mammi- fères, 165 d’oiseaux, 18 de reptiles et différentes espèces d’ongulés : 12 000 gazelles Dorcas, 170 gazelles Dama, 3 500 mouflons à manchettes et quelques addax. Parmi les carnivores, on note le fennec, le renard de Ruppelle, des guépards. On compte également 85 espèces d’oiseaux parmi celles qui ont été décrites qui sont des migrateurs du paléartique. Parmi les autres vit une popula- tion de 800 à 2 000 autruches. Les outardes de Nubie et des reptiles (varan du désert, vipères des sables, boas, geckos) constituent le reste de la faune. On trouve aussi, dans plusieurs endroits de la réserve, des sites archéologiques, paléoli- thiques et néolithiques ainsi que des sites de gra- vures rupestres. Vivent dans cette réserve 3 500 à 7 000 Touaregs pratiquant un pastoralisme transhumant. Un des problèmes majeurs, dans cette réserve est le braconnage’.

Un autre site digne d’intérêt touristique mais se trouvant au sud-ouest du pays est le parc natio- nal du W. 11 fut inscrit sur la Liste du patrimoine mondial en 1996. Ce site reflète les interactions entre les ressources naturelles et l’homme depuis le néolithique.

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1.3.1.2 Les autres arguments encourageant le développement du tourisme

Le retour de la paix dans le nord. L’élaboration d’un plan de promotion et de commercialisation. Des mesures fiscales pour encourager le sec- teur du tourisme. La participation aux foires et aux salons inter- nationaux. Un artisanat de qualité en cuir ou en argent ciselé, d’origine touareg.

1.3.2 Les freins au développement du tourisme

Insuffisance de la desserte aérienne. Prix élevés du transport aérien. Embargo imposé au Niger par la commu- nauté internationale. Dégradation des structures d’accueil. Insuffisance des contrôles envers les guides et les opérateurs touristiques. Faiblesse de sensibilisation et d’information des populations locales concernant la protec- tion de l’environnement notamment dans la région saharienne.

1. UICN, La Réserve naturelle nationale de l’air et du Ténévé, avril 1991, pp. 45-46. Union internationale de la conservation de la nature et de ses ressources.

Page 41: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

Le tourisme saharien au Tchad

1.1 Le développement touristique au Tchad : un choix économique récent

Avec une superficie de 1 284 000 kmz, le Tchad est le plus vaste des États nés de l’éclatement de l’ancienne Afrique Équatoriale Française (AEF). Lourdement handicapé par l’enclavement total du pays et l’absence de ressources autres qu’agri- coles, l’économie tchadienne a gravement pâti de l’état d’instabilité entretenu par des conflits divers.

Très faiblement industrialisé, le Tchad dépend des sources extérieures d’approvisionnement. Son économie se base sur l’agriculture et l’éle- vage. Les ventes de coton, seul produit d’expor- tation garantissant un apport de devises, assurent une couverture de plus en plus réduite des impor- tations. L’élevage, constitue la deuxième source de revenus du pays après le coton et se compose d’un cheptel de 10,5 millions de têtes (ovins, caprins, chevaux, ânes et dromadaires). Géré par un ministère autonome, ce secteur accentue la fragilité des terres dans les régions désertiques du nord qui subissent le surpâturage. Le Tchad pos- sède un patrimoine naturel exceptionnel avec sa faune très riche et ses paysages uniques, notam- ment dans sa région saharienne de Borkou- Ennedi-Tibesti (BET). Poussé par une volonté politique, le secteur touristique pourrait être un vecteur pour l’économie et l’environnement du Tchad.

Le tourisme au Tchad se basait à ses débuts, à la fin des années quarante, sur l’activité de la chasse. En effet, Fort-Archambault, aujourd’hui Sarh, a été ouvert aux grandes chasses de 1948 à 1975. Dans les années 1960, l’agence Tchad Tourisme fut créée. Parallèlement, fut lancée à Douguia en 1964, la petite et moyenne chasse grâce au club des Argonautes Français et UTA (l’Union des transports aériens). Douguia fut ainsi le premier centre touristique du Tchad. En 1968, fut ouvert au tourisme, Bardaï, dans le Tibesti. De 1975 à 1978, le Tchad connut un grand essor touristique grâce à de nouvelles créations hôtelières : l’hôtel La Tchadienne, le complexe hôtelier du Barh Tinga à Zakouma au sud-est du pays et l’agrandissement de l’hôtel de chasse de Sarh dans la préfecture du Moyen Chari. Le tou- risme tchadien entra ensuite dans une léthargie accentuée par les conflits politiques internes. En 1997, le ministère du tourisme est né.

1.2 Le potentiel touristique saharien

Le territoire du Tchad comporte des richesses naturelles et culturelles exceptionnelles qui ne sont pas assez valorisées à cause, notamment, des problèmes de communication.

1.2.1 Le patrimoine culturel et naturel tchadien

Outre le lac Tchad avec ses îles flottantes et sa riche faune dans la région nord de N’Djamena, on peut admirer le sud avec le lac Leré, les chutes Gauthiot, des grottes, ses parcs nationaux, ses réserves de faunes, ses vestiges archéologiques et son architecture traditionnelle ; à l’est, le site de Wara, ancienne capitale du Ouaddai ; au centre, le site de découverte du crâne d’Abel, considéré comme l’ancêtre de l’humanité, dans la région de Korotoro. Enfin au nord, la région de Borkou- Ennedi-Tibesti est considérée incontestablement comme l’une des plus belles régions du Tchad et un des joyaux de paysages désertiques dans le monde.

1.2.2 Le Borkou - Ennedi - Tibesti

En effet, cette région qui constitue le principal but du tourisme saharien au Tchad, dispose de multiples attraits : pics, rochers, canyons, cratères volcaniques, grottes, sources thermales, trous au natron, peintures rupestres, palmeraies, faune saharienne, dunes de sables, guelta d’Archei et lacs d’ounianga.

1.2.2.1 Le Tibesti Ainsi, dans la zone du Tibesti au sud du domaine volcanique de 1’Emi Koussi (le point culminant du Sahara à 3415 m), des plateaux sédimentaires abritent des oasis au pied des falaises de grès brun. Le désert immense se déroule alternant les ergs miniatures, les arches et les roches citadelles. Les méharées peuvent s’organiser à partir de l’oasis de Tigui au nord de Faya Largeau et fief des nomades Tedas. De là, peuvent être admirés les pitons gréseux du tassili de kouroudi et les pein- tures rupestres de Tohil avant de traverser, de nouveau, les magnifiques reliefs de Borkou où alternent dunes, accumulations d’algues fossiles et palmeraies. Viennent, ensuite, les villages de Ngour et Kirdimi avec leurs maisons toubous en forme de coquilles renversées ainsi que le village de Bedo aux salines en activité.

Page 42: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

1.2.2.2 L’Ennedi

Le deuxième lieu célèbre du Sahara tchadien est le massif de 1’Ennedi au nord-est, près de la fron- tière soudanaise. Là, nous sommes sur les terres des nomades des Bideyat. Au sud-ouest du mas- sif, le décor tassilien est magnifique : relief de grès-aiguilles, arches, donjons de pierres alter- nent avec de grandes dunes. Outre des bouquets d’arbres centenaires, on peut admirer dans cette région des peintures rupestres. D’autre part, vit également dans cette région, une faune riche de panthères, b ac i e és k k 1 et des crocodiles vivant dans la guelta d’Archei.

1.3 Atouts, problèmes et perspectives du tourisme saharien au Tchad

1.3.1 Les atouts

Le tourisme tchadien suscite un sentiment ambi- valent d’euphorie et de déception. Euphorie, à cause de la richesse exceptionnelle de ses paysages, de ses sites et des traditions ancestrales de sa popu- lation. Ce sont là, les atouts touristiques du Tchad. La déception réside par contre dans le manque important en infrastructures et en équipements.

1.3.2 Les problèmes structurels et conjonctuels

- Manque d’hôtels en dehors de la capitale. - Manque d’électricité : celle-ci est réputée

comme étant chère et rare. - Tarifs élevés des transports aériens. - Enclavement et éloignement des sites touris-

tiques. - Sentiment d’insécurité à cause des troubles

dans le nord.

1.3.3 Les perspectives

On peut considérer que le futur du tourisme tchadien, si les conditions de sécurité le permet- tent, pourrait avoir un développement rapide.

En effet, la volonté politique des pouvoirs publics affiche une nette détermination pour oeuvrer à son essor : - Création d’un ministère du développement

touristique le 2 mai 1997, avec trois direc- tions : étude, promotion et exploitation.

- Adoption de la Déclaration de politique géné- rale de développement du tourisme au Tchad, le 7 octobre 1998. Cette déclaration met l’ac- cent sur le développement de l’écotourisme. Un certain nombre d’objectifs y sont définis tels que :

- Promotion des produits touristiques. - Protection de l’environnement et du patri-

moine socio-culturel. - Implication de la population et du secteur

privé dans l’accueil des touristes. - Organisation de la formation professionnelle

dans le secteur du tourisme.

Cette volonté s’est manifestée aussi dans le domaine culturel, par la ratification par le Tchad, le 23 juin 1999, de la Convention mondiale sur la protection des sites naturels et culturels de l’UNESCO.

1.3.4 Les problèmes touristiques encore en suspens

Cependant, malgré cette volonté affichée des pouvoirs publics en faveur du tourisme, subsis- tent encore des problèmes : - Problèmes de financement des projets. - Manque de guides touristiques. - Inexistence d’un Office national du tourisme

tchadien. - Faiblesse de la participation à des foires du

tourisme. - Absence d’un code d’investissements spéci-

fique au tourisme. - Inexistence de sites inscrits sur la Liste du

patrimoine mondial. - Problèmes d’insécutité.

Le tourisme saharien en Mauritanie

1.1 Un pays où la menace de la désertification est omniprésente

La République Islamique de Mauritanie a une superficie de 1 030 700 km*, délimitée par le Sénégal au sud, le Mali et l’Algérie à l’est, le Sahara Occidental au nord et la façade atlantique à l’ouest. La Mauritanie se présente comme une

vaste pénéplaine nord-est sud-ouest traversée par un affleurement du socle primaire qui se mani- feste par un réseau de plateaux et falaises (dhars) selon un axe approximativement nord-sud, enca- drant deux grandes régions arides : à l’ouest, une plaine maritime, à l’est, une vaste zone noyées sous des dépôts sédimentaires.

Page 43: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

De vastes formations dunaires sillonnent ces deux zones. Les régions alluvionnaires de la val- lée du Sénégal et ses rares affluents occupent le sud du pays. Cette région du sud, irriguée par les pluies et les crues du fleuve Sénégal, est la seule région propice aux cultures et à la survie d’une végétation permanente et diversifiée. En effet, sur les deux-tiers arides de la superficie, la végétation est discontinue, sous forme de quelques oasis autour des gueltu (sources résur- gentes des anciens oueds). En revanche, en moyenne et basse Mauritanie, le tapis végétal devient plus régulier : savane faiblement arborée associant graminées et arbustes épineux.

Le climat de la Mauritanie est de type saha- rien occidental, dont la rigueur s’atténue pro- gressivement en descendant vers le sud. Relief et climat conditionnent la distribution dans l’espace des hommes et des types d’activités auxquels ils s’adonnent. La population compte 2 450 000 habitants en 1998 et vit groupée pour plus de 90 % sur 1/5 du territoire, situé au sud du 18” parallèle. Cette répartition de la population a été perturbée par les périodes de sécheresse pro- longées ces trente dernières années, qui ont entraîné une poussée de désertification vers le sud. Outre la désertification, beaucoup de villes, notamment au nord, sont menacées d’ensable- ment et de disparition irrémédiable. C’est cette nouvelle menace qui a amené la communauté internationale à tenter de sauver les anciens Ksour de Ouadane, Chinguetti, Tichitt et Oualata, en les déclarant sites du patrimoine mondial. Ces ksour ponctuent, aujourd’hui, les circuits touris- tiques et les méharées de plus en plus nombreux qui s’organisent dans la région saharienne de 1’Adrar. Un autre site fut déclaré site du patri- moine mondial, c’est la Réserve naturelle du Banc d’Arguin.

touristique mauritanienne 2 La société nationale industrielle minière est le 3 plus grand groupe industriel du pays. Depuis 1963, ce groupe exploite le minerai de fer du nord

‘8 z

1.2 Place du tourisme saharien dans du pays et emploie 4000 salariés. A ce titre, il est l’activité économique mauritanienne le deuxième employeur du pays après l’État et sa

1.2.1 Un tourisme peu développé et peu encadré

Il ne semble pas que le tourisme ait figuré parmi les secteurs prioritaires à développer en Mauritanie. Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette situation : - La société mauritanienne est composée

surtout de musulmans pratiquants (40 % de Maures, 30 % de Noirs, 30 % de Harratines) et reste réticente vis-à-vis d’un secteur qu’elle associe au relâchement des moeurs.

contribution à la balance commerciale est de 4 50 %. Exportant 11 millions de tonnes de mine- rai de fer, il contrôle une usine d’enrichissement

$

du minerai, une voie ferrée longue de 700 km et & 0

un port minéralier en eaux profondes. La SNIM 3 contrôle également cinq filiales qui opèrent dans ” plusieurs secteurs de l’économie nationale dont 2 la SOMASERT. fz

Opérant en tant que réceptif touristique, la .% SOMASERT s’est taillée la part du lion dans ce secteur. Aussi, en 1998, sur les 7 ou 8 000 per-

‘$ G

- Le fait que les exportations se basent à 99,7 % sur deux produits, (le minerai de fer, et le

sonnes ayant visité le pays, la SOMARSET en a accueilli 4 500. Ses groupes, qui atterrissaient à Atar, capitale de l’Adrar, arrivaient par charter

produit de la pêche), n’a pas permis au sec- teur du tourisme d’apparaître comme source d’entrées de devises prioritaire.

- Peu de tours-opérateurs se sont véritablement intéressés aux potentialités touristiques de ce pays. La Mauritanie reste, à l’instar du rallye du Paris-Dakar, une étape de passage avant de poursuivre vers le Sénégal. Néanmoins, quelques groupes touristiques

choisissent des méharée et des circuits touris- tiques dans la région saharienne. Ces circuits incluent dans leurs programmes certains des ksour en péril comme Chinguetti ou Ouadane. Quelques équipements touristiques modestes (gîtes, petits restaurants), ont été établis dans ces ksour (notamment à Chinguetti) et ont permis la création d’emplois touristiques : chauffeurs, guides, chameliers de méharée, agents de voyages, fabricants d’objets d’artisanat.

Du point de vue administratif, le secteur du tou- risme est géré par l’une des directions du minis- tère du commerce. Cette direction dispose de peu de moyens financiers et humains et encore moins de données statistiques. En fait, il semble que le secteur du tourisme soit totalement soumis aux conditions de l’offre et de la demande sans qu’il y ait ingérence de la part des pouvoirs publics. Cette non ingérence n’est qu’apparente car l’É- tat est, en vérité, impliqué commercialement en tant qu’opérateur touristique à travers la Société nationale industrielle minière (SNIM). Celle-ci opère dans le secteur grâce à la Société maurita- nienne de service et de tourisme (SOMASERT). c!

1.2.2 Le rôle de la SNIM dans l’activité 2 2

45

Page 44: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

46

depuis Marseille ou Paris. Ces opérations s’étaient réalisées en partenariat avec le voyagiste français le Point Afrique. Cette emprise de la SOMARSET sur le secteur, va s’amplifier dans le futur, avec l’ouverture de nouveaux vols sur Nouadhibou et Zouerate. C’est dans cette dernière que la SNIM a créé, en 1992, un musée sur le désert.

1.2.3 Les infrastructures de transport et d’hébergement

-

-

La Mauritanie détient deux aéroports inter- nationaux, Nouakchott et Nouadhibou, treize aéroports secondaires et vingt aérodromes. Les routes sont insuffisantes : 1 786 km de terres asphaltées contre 5 850 km de pistes. Trois ports jalonnent la côte : un port de com- merce à Nouakchott, (80 % du trafic global) et deux ports à Nouadhibou (pêche et miné- ralier). Le chemin de fer totalise 700 km de voies ferrées gérées par la SNIM. Au point de vue de l’hébergement, la plupart des hôtels sont concentrés à Nouakchott.

1.3 Tourisme et sauvegarde du patrimoine en Mauritanie : la sauvegarde des anciens ksour mauritaniens

1.3.1 Intérêt historique et architectural et causes de la dégradation

La rudesse du climat et l’avancée inéluctable du désert avec son lot d’ensablement progressif, fac- teur de l’exode rural, ont fortement endommagé les villes anciennes mauritaniennes, appelées éga- lement ksour de Ouadane, Chinguetti, Tichitt et Ouallata. Ces cités anciennes sont les seuls sites survivants de la Mauritanie, habités depuis le moyen âge. Elles furent initialement construites pour desservir les routes des caravanes qui, au XIe siècle après J.C, commencent à traverser le Sahara du nord au sud et d’est en ouest. Situées en lisière d’une vallée ou d’une oasis, leur fonction première est alors de dispenser un enseignement religieux. Elles se développent donc autour de mosquées, accompagnées de maisons pour les maîtres et leurs étudiants. Les marchands y construisirent des entrepôts pour protéger leurs biens. Naquit, ainsi, la forme caractéristique du ksar à l’architecture de pierre et de conception urbaine adaptée aux rudes conditions climatiques de la région.

En effet, ces anciens ksour fondés au XII~ siècle recèlent une architecture originale de

1. Cf. UNESCO, Proposition d’inscription des Ksour, 1995.

pierres décoratives. Leur tissu urbain est dense et serré et comporte des passages étroits et sinueux, enserrés entre les murs d’enceinte des maisons organisées autour d’une cour centrale. Ces villes historiques, vivantes, fournissent les derniers témoignages d’un mode d’occupation de l’espace original et traditionnel, représentatif de la culture nomade placée en milieu désertique’. C’est dans ce cadre que les cités se sont déve- loppées en accueillant différents savants, jusqu’à devenir les brillants foyers de la culture et de la pensée islamique.

Outre le cycle sécheresse, famines, épidémies, les principaux facteurs qui ont dégradé ces villes sont : - L’abandon progressif du commerce carava-

nier : Ouadane, Chinguetti et Tichitt étaient sur la route de l’exportation du sel et du pèlerinage vers la Mecque. Oualata d’autre part, était le lieu de convergence de deux grandes routes marchandes : Marrakech-Idjil- Chinguetti-Tichitt et Sijilmassa-Teghase- Taoudeni.

- L’exode de la population. - Les conflits locaux et régionaux. - L’enclavement.

1.3.2 Le projet de sauvegarde de l’UNESCO

Les quatre anciens ksour de Mauritanie sont clas- sés sites du patrimoine mondial depuis 1996. Leur réhabilitation vise, en premier lieu, une revitali- sation et une promotion des différents secteurs économiques sociaux et culturels des quatre cités. Parmi les mesures envisagées en rapport avec le développement du tourisme, on peut citer : - Développer une infrastructure d’accueil dans

le centre ancien de Chinguetti avec la construction et la réhabilitation de dix mai- sons anciennes. Le coût moyen de recons- truction et de restauration par maison est estimé à 20 000 dollars (2,5 millions d’ou- guiyas). La participation des propriétaires des maisons à les restaurer, en tant que gîte d’étape, fut considérée comme une condition pour l’exécution des travaux. L’exécution de ce projet fut confiée à la Fondation nationale pour la sauvegarde des villes anciennes (FNSVA), en partenariat avec la municipalité de Chinguetti.

- Contribuer à la lutte contre l’ensablement en favorisant la consolidation et l’amélioration de l’habitat traditionnel.

Page 45: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

Le tourisme saharien en Algérie

1.1 Approche géographique

L’Algérie a une superficie de 2 381 741 km’, et une population estimée en 1997, à 29,2 millions d’habitants. Le pays s’étend sur 1 100 km le long de la Méditerranée. Près des côtes, les plaines sont fertiles et le climat doux. Au sud, se succé- dent de hauts plateaux peuplés de nomades, puis l’Atlas saharien culminant à 2 300 m d’altitude. Là se trouve la limite climatique avant les régions désertiques du Sahara.

La région du Sahara couvre deux millions de km2 environ. Les paysages constitutifs du produit touristique saharien sont variés et contrastés com-

* prenant . des régions telles le Souf, le Mzab, la Soura, le Touat, le Hoggar ou le Tassili. Ce der- nier a fait l’objet d’un classement sur la Liste du patrimoine mondial. En effet, en plus des pay- sages, ces régions recèlent des vestiges de pein- tures rupestres d’un intérêt exceptionnel. C’est notamment autour de cette région du Hoggar et du Tassili n’Ajjer que le tourisme saharien algérien débuta. Il fût le pionnier dans tout le Sahara dans les années quatre-vingt avant de s’arrêter net au début des années quatre-vingt-dix, à cause des événements d’Algérie. En attendant une amélio- ration du secteur du tourisme, le gouvernement a lancé en 1995 un schéma directeur d’investisse- ments touristiques dans le grand sud.

1.2 Les potentiels touristiques du Sahara algérien

De tous les pays sahariens, l’Algérie est le pays qui a le territoire saharien le plus vaste. Nous nous contenterons d’aborder les quatre régions du grand sud algérien : I’Adrar, l’Illizi, Tamanrasset et Tindouf.

1.2.1 L’Adrar

Occupant un territoire de 427 000 km* pour 270 000 habitants, la wilaya de 1’Adrar est située au sud-ouest du pays. Elle est limitée par les wilayates suivantes : au nord par Bechar, Naama et Ghardaïa, à l’ouest par Tindouf, à l’est Tamanrasset et au sud par la Mauritanie et le Mali. Composée de onze daïrates, 28 communes et 248 villages, la wilaya dispose de trois aérodromes (Adrar, Timoumin et Bordj Badji Mokhtar).

1.2.2 Potentiel touristique de 1’Adrar

La région se distingue par de grands ensembles géographiques tels que 1’Erg Chech, le grand Erg

Occidental et le plateau de Tanezrout qui occupe les 3/4 de la superficie de la wilaya. Le Touat, le Gourara et le Tadikelt, ont toujours été les lieux de transit de caravanes commerçantes assurant la jonction entre l’Afrique noire et l’Afrique du Nord. La région est connue pour le brassage de cultures différentes se traduisant par la richesse du folklore et de la poterie. Les vestiges concer- nent des foggaras et des forteresses séculaires.

1.2.2 LZlizi : Le Tassili n ‘Ajjer

La wilaya de 1’Illizi à l’extrême sud-est de l’Algérie occupe une superficie de 286 808 km* répartis sur six daïrates, Djanet étant la plus importante. Comptant 24 000 habitants, la région est limitée au nord par la wilaya de Gourara, au nord-est par la Tunisie, au sud par le Niger, à l’est par la Libye et à l’ouest par la wilaya de Tamanrasset.

1.2.2.3 Le Tassili n’Ajjer

Le parc national du Tassilli est classé, depuis 1982, patrimoine mondial de l’UNESCO. Il fut égale- ment classé en 1986 comme réserve de la bio- sphère M.A.B. C’est un étrange pays lunaire de grand intérêt géologique abritant l’un des plus importants ensembles d’art rupestre préhisto- rique du monde. Plus de 15 000 dessins et gra- vures permettent d’y suivre, 6 000 ans av. J.C., les changements du climat, les migrations de la faune et l’évolution de la vie humaine aux confins du Sahara. Les formations géologiques avec les niches que l’érosion a creusé dans le grès, sont d’une beauté exceptionnelle.

D’une superficie de 8 000 km’, le parc natio- nal du Tassili a une altitude moyenne de 1 500 m, bien individualisé sur sa limite ouest par une longue falaise s’allongeant sur près de 700 km. Cette falaise, haute de 500 m, fait du Tassili une sorte de forteresse naturelle pénétrable au niveau de quelques rares échancrures (ou Akba). L’intérieur de la forteresse est parcouru par un incroyable réseau de canyons avec des gueltas, des sources d’eau et des ceintures végétales. Des populations touaregs sédentarisent à Iherir, Aharhar et Tamadjet.

1.2.3 Tamanrasset : le Hoggar

Ayant une altitude de 1 395 m et une superficie de 113 000 km’, la wilaya de Tamanrasset est limi- tée par 1’Adrar à l’ouest, 1’Illizi à l’est, le Niger et le Mali au sud. La ville de Tamanrasset compte 45 000 habitants et est formée de huit communes.

Page 46: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

1.2.3.1 Le parc national du Hoggar

Créé en 1987, ce parc couvre 450 000 km’ (près de 80 % du territoire français). Il comprend : - Le plateau irrégulier de 1’Atakor situé à

2 000 m d’altitude. - Une dépression périphérique située entre 500

et 800 m d’altitude. - Une ceinture extérieure de tassilis gréseux ou

schisteux. - La flore du Hoggar est l’une des plus variées

au Sahara (olivier de laperine, myrte de Nivelle, pistachier, acacias). La végétation est de toute première importance pour les trou- peaux des nomades.

- La faune comprend des gazelles Dorça, des mouflons, des guépards, des chacals, des fen- necs, des chats sauvages et une grande variété d’oiseaux.

- Les gravures rupestres sont regroupées dans plusieurs centaines de stations.

1.2.4 Tindouf

La wilaya de Tindouf est située à l’extrême ouest de l’Algérie. Elle est limitée à l’est par les wilaya de Bechar et d’Adrar, à l’ouest par le Sahara Occidental et la Mauritanie, au sud par le Mali et au nord par le Maroc. Occupant une superficie de 168 000 km*, Tindouf compte une population de 23 000 habi- tants. L’oasis de Tindouf, fief des nomades de la région, est réputée pour ses anciens ksour.

1.3 Le schéma directeur d’investissements touristiques dans le grand sud algérien

En 1995, le gouvernement algérien a lancé des mesures incitatives applicables à des créneaux

d’activités économiques destinés à encourager l’investissement dans les wilayates d’Adrar, d’Illizi, de Tamnarasset et de Tindouf.

1.3.1 Les mesures incitatives - Abattement de 50 % de l’impôt sur le revenu. - Exonération pendant dix ans de l’impôt sur

les bénéfices des sociétés. - Réduction de 50 % du taux réduit des

bénéfices réinvestis dans l’une des régions sahariennes.

1.3.2 Le programme du schéma directeur d’investissement touristique

Les autorités algériennes à travers le ministère du tourisme ont décidé de lancer un programme de réhabilitation et de construction hôtelière per- mettant de répondre à une demande potentielle de 100 000 visiteurs par an à l’horizon 2000. L’armature de ce schéma est organisée autour de différents pôles touristiques, à Tamanrasset, dans I’Adrar et dans 1’Illizi.

Les opérations de rénovation concernent trois hôtels et un camping à Tamanrasset (capacité de 440 lits) ainsi qu’un hôtel et deux campings dans 1’Adrar (capacité de 226 lits).

Les opérations de constructions quant à elles, englobent le refuge de 1’Assekrem à Tamanrasset dans le parc national du Hoggar ; quatre motels de 100 lits et cinq campings à 1’Illizi ; une auberge et un camping de 40 lits chacun dans 1’Adrar ; la capacité totale de lits touristiques en rénovation et en construction jusqu’en l’an 2000 serait, ainsi, de 910 lits.

Le tourisme saharien en Libye

1.1 Aperçu géographique

La population totale libyenne compte 5 400 000 habitants, répartis sur le territoire. Compris entre les 35” et 20” parallèle nord, entre les 11” et 25” méridiens, ce territoire, couvre une superficie de 1 759 000 km*. Le pays est surélevé en trois points par des massifs qui ne dépassent nulle part 800 à 900 mètres : Le djebel tripolitain prolongé sur le Fezzan par un désert de roches rouges Hamada-Al-Hamra, le djebel Akhdar en Cyrénaïque, le djebel-al-Soda en arrière de la

grande Syrte. A l’exception des terres arables de la plaine tripolitaine de la Jeffara et de quelques domaines céréaliers de Cyrénaïque, le sol est ingrat, peu arrosé et peu propice à l’agriculture. Les pluies sont rares et irrégulières de 300 à 500 millimètres sur les monts de Cyrénaïque, 15 mil- limètres parfois au Fezzan. Dans ce dernier, seules les nappes d’eau souterraines alimentant les puits, sont utilisables. Là, en général, ne pous- sent que des dattiers. C’est dans cette région au sud-ouest du pays, qu’un début de tourisme saha- rien commence à s’organiser.

Page 47: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

1.2 Le patrimoine culturel libyen

La Libye possède des potentialités touristiques exceptionnelles : des sites archéologiques romains, avec les célèbres Sabratha et Leptis Magna, sur la côte méditerranéenne au nord, des cités anciennes arabo-musulmanes au tissu archi- tectural intacte telle Ghadames, ou de fabuleux paysages sahariens tels que celui de Tadrar Acacus, du Fezzan au sud-ouest, avec ses mil- liers de peintures rupestres, parmi les plus riches du monde. Ces trois types de sites, figurant sur la Liste du patrimoine mondial, se rajoutent à de nombreux autres lieux, témoins des différentes époques et des différentes civilisations qui ont jalonné le territoire libyen : Phéniciens, Romains, Byzantins, Arabo-Musulmans. Méditerranéenne dans sa façade maritime, la Libye est cependant très fière de ses racines sahariennes et africaines.

1.3 La stratégie du développement du tourisme libyen

Malgré ce patrimoine exceptionnel, le tourisme libyen est très embryonnaire. L’isolement de la Libye de la scène internationale à cause du long embargo qui l’a frappé jusqu’en mars 1999, fut l’un des principaux facteurs de cette situation. Un autre facteur est lié au manque de réelle volonté politique pour développer ce secteur, jugé, avant l’embargo de 1986, comme étant secondaire. Dix ans plus tard, on observe un changement dans la politique économique libyenne, qui opte pour une stratégie de déve- loppement du tourisme. Deux facteurs peuvent expliquer ce virement : faire face à la crise économique grâce à la manne touristique ; chan- ger l’image de la Libye à l’étranger grâce à son patrimoine touristique.

Dès lors, des moyens conséquents furent mis en place pour développer le tourisme dans le pays. Durant ces dernières années, bien que subissant les restrictions de l’embargo, la Libye avait tout de même pu drainer des centaines de groupes touristiques vers ses sites historiques et ses contrées sahariennes notamment. Ces groupes, pour la plupart européens, transitaient à travers la Tunisie, après avoir débarqué à l’aé- roport de l’île de Jerba. C’est au printemps de l’année 1996 que les autorités libyennes annon- cèrent leur intention d’investir 1 700 millions de dollars dans le secteur du tourisme. Couvrant la période qui sépare l’an 2000, ces investissements devraient être destinés aux infrastructures et à la promotion. Un plan quinquennal, dressé pour le développement touristique prévoit notamment :

- La création d’une société spécifiquement chargée des investissements. La création d’une banque, d’une société res- ponsable de l’achat des équipements et autres fournitures. La création d’une société de transports et d’une agence de marketing. La formation du personnel hôtelier. L’organisation des festivals La participation aux foires nationales et internationales. La création de bureaux de promotion à l’étranger.

La Jamahiriya arabe libyenne s’employa à consul- ter plusieurs sources compétentes afin d’organi- ser efficacement son industrie touristique : - Rapport d’expertise d’un bureau de consul-

tants anglais en 1997. - Rapport d’expertise de l’UNESCO sur la

vieille ville de Ghadames. - Déplacement sur place de responsables de

I’OMT. - Invitation d’une délégation tunisienne dirigée

par le Ministre du tourisme tunisien en sep- tembre 1997. Des projets de coopération furent définis, avec notamment, la constitu- tion d’une compagnie libyo-tunisienne d’in- vestissement et de jumelage des sites.

D’autre part, les autorités libyennes ont créé par le décret 2.2.1998, l’Office du développement du tourisme et des investissements (ODTI). Ce nou- vel organisme est attaché directement au Comité populaire général du tourisme, avec pour princi- 4 pale tâche : la promotion des richesses nationales (sites archéologiques, expositions diverses, etc...)

$

et la mise en place, à partir des recettes, d’infra- Ë .‘” structures adéquates. Par ailleurs, la participation libyenne, dans des salons mondiaux du tourisme,

2 z

s’intensifia ces derniers mois. Déjà, en 1996, une délégation libyenne avait participé au colloque organisé à Hammamet, sous l’égide de d l’UNESCO, sur les interactions entre tourisme et culture. Précisément, en 1996, les autorités

i

libyennes annonçaient que 85 000 touristes K 0

avaient visité la Libye. Majoritairement euro- 7 péens, ceux-ci étaient surtout Français, Italiens et Allemands. En mars 1999, la Jarmahiriya arabe

;

libyenne a obtenu la levée de l’embargo interna- 2 a

tional qui la sanctionnait. Une nouvelle ère s’est ouverte qui permettra de développer sur un ter- rain pratiquement vierge, dans son extension saharienne notamment, un tourisme harmonieux et respectueux, espérons le, des principes de l’en- vironnement et du développement durable.

Page 48: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

Le tourisme saharien au Soudan

1.1 Généralités géographiques et ethniques

La république démocratique du Soudan est le plus vaste pays du continent africain, avec ses 2 505 813 km*, soit 1,7 % de la surface des terres émergées. Situé dans le nord est de l’Afrique, le Soudan possède des régions différentes les unes des autres : régions désertiques au nord, régions couvertes d’une végétation luxuriante au sud, régions ayant un climat continental tropical au centre. Avec 30 millions d’habitants, le Soudan partage ses frontières et ses ethnies avec huit pays : l’Egypte au nord avec les Nubiens, le Tchad et la République centrafricaine à l’ouest avec les Felleta et les Four, le Zaïre au sud-ouest avec les Zandé, l’Ouganda au sud avec les Kakwra, le Kenya au sud-est avec les Topaza, l’Éthiopie à l’est avec les Beni Amer, la Libye au nord-ouest où les condi- tions climatiques sont si rudes quelles ne per- mettent pas d’habitants frontaliers. Le pays ser- vira durant des siècles de terre d’asile et d’étape obligée, de la route des pèlerins vers la Mecque’.

1.2 Le potentiel touristique soudanais

Le nombre d’hôtels au Soudan atteint 54 éta- blissements, dont la moitié se trouve dans la capi- tale. 48 hôtels sont en construction, localisés, notamment, le long de la mer rouge. D’autre part, on dénombre 155 pensions de famille, huit auberges et deux camps touristiques. La capacité totale d’hébergement est estimée à 17 991 lits. Depuis 1996, date à laquelle des sanctions inter- nationales ont été appliquées envers le Soudan, il existe très peu de statistiques sur les arrivées touristiques. 63 000 arrivées étaient recensées en 1995, dont 18 000 européens, ce qui correspond à 28,5 % du total des arrivées.

1.3 Le patrimoine culturel et naturel soudanais

L’histoire soudanaise est l’une des plus vieilles de la terre et a vu se succéder différentes civilisa- tions et peuples qui ont laissé leur trace. La plu- part des vestiges archéologique se trouvent vers

1. Encyclopédie Universalis, Paris, 1985, p. 349.

le nord ou à l’est : Al Naga, Al Mossawarat, Karima, Méroé, Dongola, Djabel a1 Barkal. Des sites pharaoniques ou méroëtiques alternent avec des sites de l’époque islamique tels que Suakin, Sinnar, ou de l’époque chrétienne telles que les églises de Dongola.

1.4 Atouts et problèmes du tourisme soudanais

1.4.1 Atouts

Outre les richesses archéologiques et naturelles du Soudan, on note une véritable volonté des autorités soudanaises à développer le tourisme national. Différents indices confirment ce fait : - Révision des textes juridiques régissant les

activités touristiques pour qu’ils soient conformes à la nouvelle constitution du pays.

- Organisation, sous l’égide du ministère de l’environnement et du tourisme, de stages de formation professionnelle touristique et hôte- lière pour la plupart des professionnels du secteur.

- Ouverture de nouveaux établissements hôte- liers dans les plus grandes villes grâce à des financements privés.

- Signature d’accords de coopération en matière de tourisme avec le Yémen, la Syrie et le Liban.

- Réouverture de lignes aériennes avec Istanbul, Naïrobi, Bangui et création de nouvelles liai- sons aériennes internes.

1.4.2 Les problèmes du développement touristique au Soudan

- Poursuite de la guerre civile dans le sud. - Insuffisance d’infrastructures et d’équipe-

ments hôteliers ou de transport. - Faiblesse des actions promotionnelles

à l’étranger avec fermeture des offices de tourisme.

- Concentration du tourisme uniquement sur les sites archéologiques du nord et de l’est.

- Faiblesse des activités touristiques dans la région saharienne.

Page 49: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

II Esquisse de bilan sur l le développement

du tourisme saharien

L’analyse de la situation du tourisme saharien dans les différents pays entourant le Sahara fait émerger les points suivants : une disproportion entre les pays du nord de l’Afrique et les pays situés au sud du Sahara ; le tourisme est consi- déré comme une réponse à la crise économique et à la dégradation de l’environnement écolo- gique ; une stratégie et des atouts différents pour promouvoir l’activité touristique ; des obstacles difficiles à gérer ; un manque de concertation et de coopération interrégionale.

2.1 Un développement touristique inégal

Les disproportions entre les pays touristique- ment développés du nord de l’Afrique et ceux se trouvant au sud et au centre du Sahara sont très nettes. En effet, on remarque que les pays

comme sites du patrimoine mondial par l’UNESCO.

Cette situation nous amène à constater que le tourisme lié uniquement au Sahara est encore à l’état embryonnaire puisque les sept pays saha- riens n’ont réalisé en 1998 que 3,6 % du total des arrivées de 1’ ensemble des États sahariens (soit 364 000 sur 10 278 000). Cela confirme, ainsi, le fait que le tourisme des trois autres pays saha- riens d’Afrique du Nord (Tunisie, Maroc, Égypte) est surtout balnéaire ou archéologique. En 1998, ces pays ont drainé à eux trois, un total de 9 914 000 touristes internationaux soit, 96,3 % du total des arrivées internationales au sein des pays entourant le Sahara.

2.2 Arrivées des touristes internationaux dans les pays sahariens en 19%

Pays

Tunisie

63yw Maroc

Total

Part en %

Source OMT

Nbre de touristes

en milliers

4 501

3 400

2 013

9 914

96.4

Pays

Algérie

Libye

Soudan

Nbre de touristes

en milliers

94.8

85

63

242,8

2.4

Pays

Mali

Tchad

Niger

Mauritanie

Nbre de touristes

en milliers

50.1

38

25.7

8

121,8

1.2

Total touristes

internationaux

10 278.6

100

situés au sud du Sahara (Soudan, Tchad, Niger, Mali, Mauritanie) et dans une autre proportion ceux dont le territoire s’étend jusqu’au centre du Sahara (Algérie, Libye) présentent des résul- tats touristiques bien inférieurs aux pays du nord du Sahara tels que la Tunisie, le Maroc ou l’Égypte. Pourtant, les sites sahariens touris- tiques se trouvant au sud et au centre du Sahara sont parmi les plus célèbres au monde : le Tibesti-Ennedi au Tchad, l’Air-Ténéré au Niger, la région de Tombouctou au Mali, les villes anciennes en Mauritanie, le Tassili n’Ajjer en Algérie, 1’Acacus en Libye. Tous ces sites, excepté le Tibesti au Tchad, ont été choisis

2.3 Le tourisme comme réponse à la dégradation de l’environnement et à la crise économique : les atouts du tourisme saharien

Par ailleurs, une nette différence se constate au niveau économique entre les pays situés au nord du Sahara et ceux situés au sud du désert plus pauvres. Cette pauvreté est accentuée par le phé- nomène de la sécheresse des années soixante-dix, et l’action anthropique sur le milieu par le sur- pâturage et la pression trop forte sur la terre agri- cale en milieu aride. On retrouve aussi ce phé- nomène de dégradation de l’environnement et de

Page 50: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

crise économique parmi les populations nomades sahariennes ou parmi celles des contrées oasiennes du nord du Sahara où habitent, dispersées, des populations parmi les plus déshé- ritées de ces pays (Algérie, Tunisie, Maroc, Libye, Égypte, Soudan).Le développement de l’activité touristique dans certaines de ces régions saha- riennes dans les années quatre-vingts fut consi- déré par les pouvoirs publics comme une des réponses possibles à la crise économique et à la dégradation de l’environnement (Tamanrasset, Djanet en Algérie, Tozeur, Douz en Tunisie, Ouarzazate Zagora au Maroc, Agadez, Air, Ténéré au Niger). Certains responsables y voyaient aussi une façon de diversifier le tou- risme balnéaire (Tunisie, Maroc). Les atouts du tourisme saharien concernent à la fois le patri- moine culturel et naturel et son exploitation tou- ristique.

2.3.1 Le patrimoine cuhrel et naturel saharien

Outre les grands sites du patrimoine mondial et les réserves naturelles disséminées dans l’espace saharien, les pays entourant le Sahara présentent des atouts touristiques qui se basent sur une histoire et des cultures très anciennes. Celles-ci puisent leurs racines au sein, à la fois, des civili- sations méditerranéennes au nord et africano- sahéliennes au sud. De ce point de vue, le Sahara et son pourtour offrent un ensemble géogra- phique dont le patrimoine préhistorique, archéo- logique, architectural, ethnologique et naturel est

2 l’un des plus riches et des plus variés de la pla-

2 nète. Le brassage des civilisations, des peuples et 2 2

des religions a laissé sur le terrain des vestiges

E innombrables : sites préhistoriques, archéolo-

.v: giques, pharaoniques, numides et romains, pein- 2 2

tures rupestres, ksour berbères, villages noirs afri-

4 tains, cités caravanières arabo-musulmanes, et

e> 0

traditions ancestrales qui se manifestent encore 2

-2 aujourd’hui à travers les différences de langues,

E de fêtes, de musiques et d’activités artisanales

E (Touaregs, Maures, Dogon...).

a, 0 2.3.2 L’exploitation touristique

2 du patrimoine d 2

L’exploitation des sites archéologiques, musées,

3 parcs naturels dans un but touristique relève le a plus souvent, dans les pays sahariens, du minis- .3 2

tère de la culture.

2 Des agences spécialisées telles que l’Agence cs nationale d’exploitation du patrimoine (ANEP)

en Tunisie ou l’Office du développement du tou-

52 risme et des investissements (ODTI) en Libye, ont été créées plus tard, afin d’exploiter les sites

et les musées fréquentés par les touristes. Les parcs naturels nationaux sont généralement contrôlés soit, par les ministères de la culture (Algérie) ou de l’agriculture (Tunisie) ou de l’en- vironnement (Mali). L’intérêt d’exploiter le patri- moine à travers le tourisme est un choix qui s’est imposé aux pays sahariens. Il fut en effet décelé comme étant une source appréciable de devises.

2.3.3 La diversité des structures administratives du tourisme

Les pays au nord du Sahara (Tunisie, Maroc, Algérie) ont créé, dès la fin des années soixante, un office du tourisme. Celui-ci, sera coiffé plus tard par un ministère du tourisme. Un commis- sariat général du tourisme fut créé à Tozeur, il représente directement l’office du tourisme dans la région des oasis. A Ouarzazate, c’est un Groupement régional d’intérêt touristique (GRIT) qui défend 1 es intérêts du sud. Peu nom- breux sont les pays sahariens qui ont créé un ministère du tourisme autonome excepté l’Égypte, l’Algérie, le Maroc et le Tchad qui créent en 1995, le ministère du développement touristique.

Il arrive cependant que le secteur du tourisme soit coiffé par un autre ministère : celui du com- merce (Mauritanie) ou de la culture (Mali). Ce dernier a créé un office du tourisme (AMATO). Il en est de même de l’Algérie du Maroc et de la Tunisie. Le ministère tunisien du tourisme coiffe également le département de l’artisanat. C’est le cas aussi du Niger. Cela dénote l’étroite relation qu’entretient le tourisme avec l’artisanat. A l’étranger, seuls la Tunisie et le Maroc ont une représentation de leur office du tourisme, avec pignon sur rue, dans les capitales européennes. Les autres États ont généralement un bureau de tourisme attaché à leur ambassade. Le Mali a créé en mars 1992, à Paris, une association, La mai- son du tourisme africain dont le but fut de pro- mouvoir le tourisme en Afrique. Elle a cessé ses activités quelques mois plus tard.

2.4 Les faiblesses et le degré d’intégration du tourisme saharien

Le tourisme saharien est devenu l’une des pré- occupations des puissances publiques qui œuvrent à le développer directement en finan- çant des projets ou indirectement à travers des investisseurs privés. D’autres part, le développe- ment intensif du secteur peut avoir des consé- quences sur le milieu écologique et le tissu social. L’étude de la situation actuelle du tourisme saha- rien nous permet de déterminer un certain nombre d’aspects le caractérisant, ainsi que les

Page 51: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

entraves limitant son expansion. Ces aspects concernent les points suivants :

La dépendance envers l’étranger. L’image de marque et l’insécurité. L’infrastructure et l’hébergement (qualité et quantité). La formation et l’information. La fréquentation des ksour et des sites saha- riens. Contenu, qualité des produits, animation, artisanat. Le degré d’implication des collectivités locales et des ONG. La coopération interrégionale.

2.4.1.1 La dépendance du tourisme saharien, envers les compagnies de transport aérien et les tours opérateurs étrangers

Phénomène complexe, le tourisme international dépend de plusieurs facteurs en liaison avec la motivation spécifique de chaque touriste (exo- tisme, climat, évasion, culture, rencontre avec l’autre, aventure etc...). Pour les pays sahariens, la fréquentation de leur zone touristique par les touristes, dépend, en plus, de deux facteurs : le transport aérien et la relation avec les transpor- teurs et les agences de voyages européennes. Les transports aériens dans les pays sud sahariens Le transport aérien international est assuré essen- tiellement par Air Afrique, Air France, Air Algérie, Tunis Air, Royal Air Maroc, et les com- pagnies nationales (Air Mauritanie, Air Mali, Air Niger, Air Tchad). Les deux premières compa- gnies sont les plus présentes et assurent les liai- sons surtout avec l’Europe. Bien qu’elle soit le résultat de la fédération de plusieurs États d’Afrique, Air Afrique pratique tout comme Air France, des tarifs jugés prohibitifs par tous les responsables touristiques des pays visités. Cela constitue, selon eux, l’un des facteurs de la désaf- fectation touristique d’autant plus qu’il y a très peu de charters qui s’organisent. Les compagnies nationales (Air Mauritanie, Air Mali, Air Niger, Air Tchad) desservent les capitales des pays voi- sins et assurent la liaison avec leurs villes inté- rieures. Ces dernières sont mal et irrégulièrement desservies. Les compagnies nationales d’Afrique du Nord exercent un monopole qui commence à se fissurer sous la pression de la demande et de nouvelles conjonctures commerciales. Si le pavillon national est toujours prédominant, à tra- vers les vols réguliers, la pratique du charter en revanche se généralise et s’intensifie. C’est ce qui a contribué au succès du Maroc, de la Tunisie et

de l’Égypte en tant que destinations de tourisme de masse. L’Algérie, la Libye, et le Soudan sont frappés par des handicaps conjoncturels internes (Algérie, Soudan) et internationaux (embargo en Libye) qui n’ont pas permis à leur compagnie nationale d’être à niveau égal avec Egypt Air, Tunis Air et Royal Air Maroc. Ces dernières ont dû accepter, sous la pression de leur gouverne- ment qui cherche à favoriser le tourisme, la pré- sence d’autres compagnies privées sur le sol national (Nouvel Air en Tunisie, ZAZ en Égypte). Le transport aérien entre les pays saha- riens est d’autre part très insuffisant. Les tours opérateurs C’est en grande partie sur eux que se base le suc- cès des destinations de tourisme de masse de l’Afrique du Nord (Tunisie, Maroc, Égypte). Leur stratégie du voyage à forfait où tout est compris (vol, hébergement, circuit) et leurs réseaux de distribution commerciale font qu’ils peuvent obtenir des prix très bas de la part des réceptifs africains et des compagnies nationales et charters. Ces tours opérateurs s’intéressent au tourisme saharien en tant que complément du tourisme balnéaire ou comme une partie des cir- cuits touristiques. Le choix du séjour dans les zones touristiques sahariennes en Tunisie et au Maroc, se fait dans un souci de diversification de leur produit, en y appliquant les recettes du bal- néaire (hôtel club de Fram et de Nouvelles Frontières, le Club Med et Jet Tour à Tozeur en Tunisie ou à Marrakech au Maroc). Les agences de voyage spécialisées Une autre approche du Sahara se fait grâce à des agences et des tours opérateurs spécialisés dans l’aventure et le voyage à pied. Les petits groupes qu’ils forment, utilisent très peu les équipements hôteliers classiques (plutôt les bivouacs), et ont une relation plutôt contemplative avec les contrées sahariennes qu’ils traversent. Le produit est vendu cher, car il s’adresse à une clientèle de catégorie socioprofessionnelle de cadres et pro- fessions libérales. Parmi les tours-opérateurs français, on peut citer : Terres et Club d’Aventure, Nomade, Itinérante, Assinter, Allibert. En Espagne, on peut citer le tour-opérateur Touareg. La prédominance des touristes européens L’étude des flux touristiques montre que la pre- mière clientèle du Sahara vient d’Europe et que ce sont les Français qui viennent en premier lieu, par rapport aux arrivées européennes, suivis par les Allemands, les Italiens, les Anglais et les Espagnols. C’est précisément à l’attention de ces marchés que se dirige le plus gros des efforts de promotion des pays à travers leurs représentants (office de tourisme) ou en participant à des salons

Page 52: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

mondiaux du tourisme. Si les Nord-Américains viennent bien loin après les Européens, en revanche on remarque que les originaires afri- cains et maghrébins constituent une part très importante dans les arrivées internationales qui talonne souvent de peu celle européenne. A men- tionner aussi la part de plus en plus importante que prennent les arrivées des nationaux vivant à l’étranger. Ces derniers, grâce à la deuxième et à la troisième génération et aux liens affectifs qu’ils gardent avec le pays d’origine, pourraient consti- tuer un marché potentiel important.

2.4.1.2 L’insécurité : handicap majeur de la fréquentation touristique

L’image de l’Afrique saharienne, si elle est sou- vent perçue en occident comme un espace mys- térieux, répondant au besoin de l’homme dans sa quête de l’absolu et du contact avec la nature, cette image idyllique est souvent entachée par des tensions et des conflits qui effraient les touristes et entravent le développement du tourisme. Ainsi, depuis le début des années quatre-vingt-dix, on dénombre plusieurs foyers de tensions dans les pays situés au nord et au sud du Sahara. En effet, la guerre du G 0 If e, les attentats intégristes, la révolte des Touaregs, le conflit du Sahara occi- dental, les conflits inter-ethniques ou les embar- gos internationaux, ont été des facteurs très dis- suasifs pour le développement du tourisme dans les pays sahariens.

2.4.3 L’infrastructure hôtelière dans les régions touristiques sahariennes

E 2 Du point de vue hôtelier, on peut noter que le si 2

développement du tourisme saharien a engendré

E la création d’une infrastructure qui est différente

.E que l’on soit au nord ou au sud du Sahara.

0 Y a

2.4.3.1 Les capitales sud sahariennes e, concentrent la majorité des hôtels

3 2 En effet, dans les pays sud sahariens, les implan-

-2 9

tations hôtelières sont regroupées, non pas à

E proximité des sites considérés comme touris-

fl tiques ( Ennedi-Tibesti, Air-Ténéré ou d’anciens 3

7 ksour Mauritaniens), mais dans les capitales :

a Khartoum au Soudan, N’Djamena au Tchad,

3 Niamey au Niger, Bamako au Mali et

32 Nouakchott en Mauritanie. Ces villes, accaparent a plus de 80 % de la capacité totale en lits touris- .o g

tiques et sont surtout fréquentées par des tou-

3 ristes d’affaires. A l’inverse, hormis la Libye où

m les hôtels sont également regroupés pour leur majorité dans la capitale Tripoli, les concentra-

54 tions hôtelières sahariennes, au sein des pays du nord du Sahara, se retrouvent à proximité des

sites touristiques ayant fait la réputation des villes telles que Tozeur en Tunisie, Ouarzazate au Maroc ou Tamanrasset en Algérie.

2.4.3.2 La faiblesse du taux d’occupation dans les établissements sahariens en Afrique du Nord

- En Algérie, le taux d’occupation des hôtels dans la région du grand sud est dramatique- ment faible, à l’instar de la situation des éta- blissements hôteliers dans tout le pays. Peu de touristes se hasardent, en effet, à visiter le pays à cause des événements sanglants qui entachent son paysage socio-politique interne. Pourtant la région du sud a toujours été épargnée par les attentats intégristes. Cela donne confiance aux professionnels locaux pour reprendre rapidement une activité qui fut très dynamique quelques années aupara- vant. En attendant, l’État encourage à réno- ver ce qui existe comme hôtels et à construire de pentes unités d’hébergement.

- Au Maroc, la région de Ouarzazate, bien qu’elle connaisse une nette progression de sa fréquentation touristique par rapport aux régions balnéaires du nord, présente un taux d’occupation de ses établissements hôteliers qui dépasse rarement 50 %. En Tunisie le pro- blème se pose avec plus d’acuité. En effet, malgré les importants investisse-

ments hôteliers et l’aide de l’État à travers les exonérations fiscales et les actions promotion- nelles, les établissements hôteliers sahariens souf- frent depuis quelques années d’un faible taux d’occupation qui dépasse à peine 30 %. Cette fai- blesse de la fréquentation en Tunisie et au Maroc peut être expliquée par plusieurs facteurs : - Le manque d’animation de qualité, appro-

priée au tourisme saharien. - Le manque de programmes spécifiques liés à

l’écotourisme et à la découverte du Sahara. - La forte dépendance encore envers le tou-

risme balnéaire. Des groupes provenant des zones touristiques côtières ne restent qu’une ou deux nuitées avant de poursuivre leur route.

- L’inadéquation des nombreuses unités hôte- lières, de catégorie supérieure avec une clien- tèle ne cherchant pas forcément le confort, mais l’insolite et l’aventure.

- L’emplacement et l’aspect architectural de certains hôtels : ceux-ci, de véritables palaces, masquent la palmeraie ou les dunes et se met- tent en scène, au lieu de mettre en valeur l’oa- sis. L’hôtel est exhibé en tant que finalité alors qu’il devrait être un moyen, un relais discret

Page 53: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

Les vestiges d’un Ksar Saharien, Le Ksar Ghilane.

et fonctionnel, dont l’authentique conception se fond dans le paysage saharien.

2.4.4 La formation et l’information

2.4.4.1 La formation des guides et du personnel d’encadrement

La formation professionnelle dans le domaine touristique et hôtelier est l’un des secteurs clé de la réussite et du développement du tourisme saharien. Cependant, à part quelques excep- tions de politiques réussies dans ce domaine (Tunisie, Maroc, Soudan), les autres pays saha- riens présentent de graves lacunes. Ainsi, le sec- teur de l’activité des guides est édifiant à ce propos : - Dans les pays d’Afrique du Nord (Maroc,

Algérie, Tunisie, Égypte), l’exercice du métier de guide touristique est strictement régle- menté : on devient guide régional ou natio- nal après avoir passé un examen officiel (archéologie, culture, langues) et à la condi- tion d’avoir un niveau universitaire adéquat. Aujourd’hui, seul le BTS délivré par l’insti- tut du tourisme de Sidi Dhrif, en Tunisie par exemple, permet l’exercice de cette activité.

- Certains autres pays sahariens n’ont pas encore pris conscience de cette fonction et ne l’ont pas encore réglementée.

- Le problème des accompagnateurs étrangers qui guident les groupes de touristes dans les musées et les sites touristiques des pays saha- riens est à réglementer en s’inspirant des recommandations de la CEE dans ce domaine.

2.4.4.2 L’information

Cela englobe à la fois : - La sensibilisation des populations locales sur

le problème de l’environnement et des échanges culturels à travers le tourisme.De plus en plus d’émissions des médias parlent d’environnement, surtout après le sommet mondial de Rio en 1992 (certains pays comme la Tunisie ont créé des boulevards de I’envi- ronnement dans la plupart des grandes villes). En revanche, l’initiation à une meilleure approche du tourisme et son intégration au sein des populations locales, ainsi que la manière dont celles-ci peuvent lui réserver le meilleur accueil dans le respect mutuel, n’est pas très pratiqué.

- La signalisation des sites et des lieux touris- tiques grâce à des panneaux clairs et au moins bilingues.

2.4.5 La fréquentation des ksouu, anciennes villes et sites sahariens fragiles

Cette fragilité est causée par : - Le manque de réhabilitation sur le bâti par

défaut de financement. - L’exode des populations d’origine. - Le manque de structures d’accueil. - Le problème de capacité de charge où, trop

de touristes envahissent en même temps un lieu touristique fragile. C’est le cas de cer- tains ksour et oasis en Mauritanie, au Maroc, en Tunisie ou en Égypte.

- Le problème de l’urbanisation massive et rampante autour des sites à préserver.

Page 54: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

- Le problème du pillage des sites (exemple : les peintures rupestres).

2.4.6 L’animation et l’artisanat : contenu et qualité des produits

Le touriste visitant le Sahara, a besoin d’une relation authentique et forte avec la nature et les populations locales. Ainsi, en plus des pro- duits caractérisant le tourisme de masse, tels que des spectacles folkloriques ou des lieux noc- turnes animés, il faut imaginer de nouveaux pro- duits répondant à de nouveaux besoins (éco- tourisme, dépenses physiques, rencontre avec l’autre...).

Concernant le secteur de l’artisanat, on assiste : - Soit à un risque de disparition de l’artisanat

local ancestral par un manque d’encourage- ment des pouvoirs publics pour sauver ce secteur, et par une trop faible fréquentation touristique.

- Soit à une dégénérescence des produits de l’artisanat à cause d’une demande trop mas- sive. Les articles perdent de leur authenticité et de leur qualité. Les pouvoirs publics et les artisans eux-mêmes,

ont fait des actions pour promouvoir ce secteur : - Création de coopératives artisanales (les toua-

regs de Ségou ou de Tombouctou au Mali). - Création de coopératives de femmes dans les

ksour mauritaniens et d’écoles de formation aux métiers de l’artisanat en Tunisie et au Maroc. Malgré tous ces efforts, l’activité artisanale a

besoin de plus de soutien dans tous les pays sahariens.

w 2 2.4.7 Le degré d’implication i des collectivités locales .i? 2 Y

Les municipalités ont pris conscience, de nos

3 jours, du rôle moteur du tourisme dans le déve-

UJ 0

loppement local tels que : la création d’emplois 2 directs et indirects, les taxes diverses drainées par -2 E

le tourisme, (TVA, taxe de séjour) et les effets de

2 l’aménagement touristique sur l’environnement

a des villes, (routes, assainissement, éclairage, ani- 3

> mations culturelles et artistiques).

% Certaines municipalités prélèvent 1 % du

2 chiffre d’affaires des hôteliers pour les besoins de

2 protection de l’environnement (Tunisie). Cepen- a dant des problèmes subsistent : .% - 2f

Manque de concertation avec les profession-

5 nels pour une meilleure synergie dans le s domaine du tourisme.

- Manque d’imagination pour créer de nou- veaux produits liés notamment à l’écotou- risme, la randonnée ou la création d’anima- tion culturelle.

- Manque d’initiative pour réaliser des jume- lages avec des villes étrangères. L’exemple de la ville de Tombouctou (Mali), jumelée avec Kairouan est intéressant. Il lui manque cepen- dant d’être ratifié officiellement par les deux villes.

2.4.8 La coopération interrégionale

Certains des pays sahariens se sont fédérés avec d’autres pour s’entraider dans le domaine du tourisme : - Création, en janvier 1968, d’un Comité tech-

nique inter-étatique pour le tourisme (CTIT), entre les pays de l’entente (Niger, Burkina- faso, Bénin, Togo, Côte d’ivoire). Le rôle du CTIT est d’organiser des circuits touristiques en commun et de mettre en valeur des parcs et des réserves nationales contiguës. Cepen- dant faute d’un véritable plan d’envergure, ce comité n’a pu avoir d’actions efficaces. Néanmoins il fut créé un seul visa pour les touristes visitant ces pays, afin de diminuer les attentes et les dépenses supplémentaires.

- Adoption par les ministres, africains du tou- risme, le 3 avril 1993, à Tunis, du projet de la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique (CEA), visant à l’intégration de l’artisanat et du produit culturel dans le produit touristique africain. Le projet consis- tait à encourager une production artisanale inspirée des traditions culturelles africaines et destinée notamment à l’exportation.

- Création en 1995 au Caire de l’association Middle East Méditerranean Travel and Tourism Association (MEMTTA), qui regroupe des professionnels du tourisme de huit pays de la région (Égypte, Tunisie, Maroc, Turquie, Chypre, Israël, Jordanie, Autorité Palestinienne). Parmi les projets, fut envisagée la création d’un billet d’avion per- mettant au touriste de visiter autant de pays de la région qu’il le voudra.

Ainsi, on remarque que s’il y a eu des actions disparates pour promouvoir le tourisme africain et méditerranéen, il n’y a pas eu véritablement une coopération effective et complète dans ce sec- teur, et qui englobe tous les pays se trouvant sur le pourtour du Sahara.

56

Page 55: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

Le développement durable du tourisme au Sahara

A l’aube du XXI~ siècle, dans une société de plus en plus mondia- lisée et glorifiant les loisirs et la réalisation de soi à travers les voyages, le tourisme saharien est appelé à se développer et à s’in-

sérer avec plus de force au sein du tourisme mondial. Rappelons que celui-ci sera le secteur d’activités le plus dynamique qui soit et qui aura progressé le plus rapidement : sera enregistrée, selon l’OMT, durant les vingt prochaines années une progression de 4,3 % par an pour les arri- vées de touristes et de 6,7 % par an pour les recettes du tourisme inter- national. Parallèlement à sa croissance, le tourisme international doit assumer davantage de responsabilités quant à l’ampleur de ses impacts. En effet, au-delà de ses effets économiques directs et indirects, le tou- risme exerce sur l’environnement, sur les sociétés réceptives et sur les sites culturels, des incidences qui doivent être surveillées par les pou- voirs publics, les populations locales et les touristes eux-mêmes. Cette vigilance doit concerner, également, le tourisme saharien et s’inscrire dans le processus du développement durable du tourisme. Elle doit aussi s’exercer en s’inspirant de principes stratégiques que nous suggérerons après avoir fait quelques propositions concrètes sur le développement de ce secteur au Sahara.

Page 56: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

1 Propositions pour 0 un tourisme durable

au Sahara

Dans son rapport prévisionnel intitulé Tourisme, horizons 2000, l’Organisation mondiale du tou- risme affirme :

L’Afrique possède didbondantes ressources naturelles et culturelles dans toutes ses sous- régions. Néanmoins, de nombreux pays man- quent encore d’infrastructures et d’installa- tions touristiques de qualité, et une grande partie de la région souffre grandement d’être perçue comme une destination à haut risque dans les principaux pays émetteurs. Le déve- loppement et l’amélioration des infrastruc- tures et des produits d’une part et un effort de marketing en vue de corriger l’image de la région d’autre part, telles sont les deuxprio- rités pour la plupart des pays africains d’ici l’an 2020 .

Outre ces priorités préconisées par l’OMT, le développement du tourisme saharien doit se baser sur la conciliation entre, d’une part, l’exploitation des ressources naturelles et culturelles en vue du développement socio-économique et, d’autre part, la gestion durable des écosystèmes et du patrimoine culturel. Cette conciliation entre ces deux impératifs ainsi que l’équilibre entre les besoins de rentabilité des opérateurs touristiques et le souci de préserver l’environnement saharien de toutes formes d’agressions irrémédiables, s’avèrent à la fois délicats et difficiles à réaliser. Ils nécessitent, notamment, de la part des États sahariens, la mise en application d’actions priori- taires ainsi que le respect de principes et de règles. Ceux-ci doivent être décidés d’une manière concertée et suivant un calendrier prévisionnel.

1.1 Proposition d’une Conférence internationale sur le développement durable du tourisme au Sahara

La présente étude pourrait constituer la première étape d’un processus qui devrait mener à la réunion d’une Conférence internationale sur le développement durable du tourisme au Sahara, réunissant les États ayant le Sahara en partage ainsi que des experts, des ONG, des associations

spécialistes du Sahara, du tourisme de désert, de l’environnement, de la culture et des sociétés vivant dans le désert. Il s’agirait d’une conférence en deux parties : une partie intergouvernemen- tale et une partie réservée aux experts, aux ONG, et aux études de cas discutées dans des ateliers.

1.1.1 Résultat attendu, processus et préparation de la conférence

Le résultat attendu de cette conférence serait d’ac- célérer une prise de conscience de l’urgence d’adop- ter des mesures favorisant un développement du tourisme durable au Sahara, tant auprès des auto- rités gouvernementales qu’au sein de la société civile et des organisations non gouvernementales.

Au cours de la conférence, seraient débattus et adoptés des recommandations et des principes stratégiques pour un développement durable du tourisme au Sahara, dont la présente étude pro- pose dans sa dernière partie, un premier projet. Jusqu’à la tenue de la conférence qui serait envi- sageable fin 2001 ou début 2002, les propositions de recommandations et de principes stratégiques seraient complétées et enrichies au cours d’un processus de consultation des États membres concernés, d’organismes et d’experts.

Ce processus, ainsi que la préparation de la conférence, serait conduit par un Comité de suivi du projet Sahara. Ce dernier serait composé de représentants tunisiens de ministères et d’insti- tutions chargés du tourisme, de la protection du a patrimoine culturel et naturel au Sahara, de repré- 3 sentants de l’UNESCO, de l’OMT, de 1’OSS ainsi d que de représentants des États ayant une partie du Sahara sur leur territoire.

i

a

1.1.2 Calendrierprévisionnelpour 3

3 le suivi du projet %

Plus concrètement, le calendrier prévisionnel pour 2

un suivi du projet développement d’un tourisme ; 0 a

durable au Sahara au cours du prochain bien- .M nium, se déroulerait de la manière suivante : \”

Diffusion, en début 2000, de la présente étude 3 - Z

auprès des États membres concernés, souhai- tant leur accord quant aux prochaines étapes du projet. 59

Page 57: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

- Réunion, au printemps 2000, du Comité de suivi pour arrêter un calendrier pour la confé- rence et fixer, après les premières réactions, les domaines dans lesquels les recommanda- tions et les principes stratégiques devront être approfondis et complétés.

- Réunion, en 2001 ou 2002, de la Conférence sur le développement du tourisme durable au Sahara.La date définitive devrait être arrêtée en fonction de la progression du projet, du choix des partenaires et des possibilités budgétaires.

1.2 Propositions d’actions spécifiques pour le développement durable du tourisme au Sahara

Parmi les actions et les recommandations qui pourraient être discutées et décidées par les responsables du tourisme saharien, on peut distinguer : - Des actions dans les secteurs institutionnels

et professionnels, au niveau national et inter- national.

- Des actions de sensibilisation et de préserva- tion du patrimoine culturel et naturel.

- Des actions opérationnelles et de conception de produits de tourisme saharien.

1.2.1 Des actions dans les secteurs institutionnels et professionnels au niveau national et international

Ces actions concernent, à la fois, les structures administratives, la formation et l’assainissement du milieu professionnel ainsi que l’évaluation des politiques touristiques et la coopération interré- gionale.

1.2.1.1 Encourager les pouvoirs publics I des Etats sahariens à se doter d’une structure administrative touristique adéquate

Certains pays sahariens, s’ils ont créé un minis- tère ou une direction du tourisme, n’ont pas encore créé un Office du tourisme ou un service de formation des cadres ou des guides touris- tiques. La création d’un Office du tourisme semble être nécessaire. En effet, établissement public à caractère administratif doté de la per- sonnalité morale et de l’autonomie financière, l’Office du tourisme constitue l’instrument du gouvernement pour la définition et la mise en œuvre de la politique nationale en matière de tourisme. Il délivre les agréments pour les constructions hôtelières, l’ouverture d’agences de

voyages et l’exercice de la direction technique des entreprises du tourisme. Il délivre, en outre, la carte professionnelle de guide touristique. L’Office du tourisme représente, également, le pays dans les manifestations promotionnelles à l’étranger. La Mauritanie, le Niger, le Tchad, le Soudan, l’Égypte et la Libye n’ont pas encore créé leur Office du tourisme.

D’autre part, il serait primordial de créer des syndicats d’initiative dans les zones touris- tiques. Composés de personnes représentants différents secteurs (artisanat, restauration, hébergement, transports, commerce, profes- sions libérales, loisirs, chercheurs, etc...), ces syndicats sont le lieu de mise en œuvre collec- tive, de concertation et d’application de la poli- tique touristique locale. Leur rôle d’orientation et de renseignement des touristes se combine avec la promotion de l’activité touristique dans la région.

1.2.1.2 Organiser la formation des professionnels de l’hôtellerie, des agents de voyages et des guides de tourisme

L’administration touristique de chaque État saha- rien se doit d’organiser des sessions de forma- tion et de qualification à tous les niveaux du sec- teur du tourisme (hôtellerie, agences de voyages, guides). En ce qui concerne ces derniers, seuls, la Tunisie, le Maroc, l’Algérie et l’Égypte ont un contrôle strict de leurs guides touristiques natio- naux, régionaux et saisonniers. Il est primordial d’aider les autres pays sahariens à réglementer le métier de guide : - En faisant un test de langue et de culture

générale à ceux qui sont déjà sur place. - En exigeant un minimum de niveau d’éduca-

tion à ceux qui postuleront dans le futur, en encourageant, notamment, la candidature des diplômés chômeurs.

- En organisant des stages de formation sur le patrimoine et de sensibilisation sur le rôle et la responsabilité du guide dans la réussite du tourisme durable ainsi que dans la protection du patrimoine culturel et naturel. Souvent intermédiaire incontournable entre la

population autochtone et les touristes, le guide a un rôle très important pour motiver les uns et les autres à la préservation de l’environnement et du patrimoine, contribuant ainsi, à la protection des monuments et des œuvres d’art, tout en évi- tant la dégradation des sites. Des spécialistes du patrimoine et de l’environnement pourraient assurer ces formations.

Page 58: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

1.2.1.3 Clarifier le métier de guide-accompagnateur

Certains accompagnateurs de groupes de tou- ristes étrangers exercent eux-mêmes le métier de guide dans les pays visités. Ce point a été sou- levé au niveau des pays de la communauté euro- péenne et il ressort de la consultation des textes juridiques les points suivants : - Les professions de guides-accompagnateurs

et interprètes touristiques sont régis par la Directive 75/368/CEE. de 1975.

- Seuls les guides professionnels spécialisés ayant une carte professionnelle sont autori- sés à guider les touristes dans les musées et monuments historiques.

- En cas de visite en dehors des musées et des monuments historiques, un document, attes- tant que l’intéressé est un guide touristique dans son pays de provenance est exigé. Cela concerne les guides touristiques voyageant avec un groupe, en un circuit fermé et qui rentrent dans le pays de provenance après le circuit.

- Les services de la Commission européenne estiment qu’un guide touristique établi dans un État membre qui reçoit des groupes de touristes en provenance d’un autre État membre, doit être soumis aux exigences de l’État d’accueil, en matière de qualifications professionnelles, conformément aux direc- tives 89/48/CEE et 92/51/CEE’.

Dans le cadre d’une stratégie de développement du tourisme durable, il est essentiel que les res- sortissants du pays d’accueil puissent participer eux-mêmes à faire connaître le patrimoine natu- rel et culturel de leur pays. La seule entrave à ce stade est l’incompétence qui peut être jugu- lée grâce à une formation appropriée. En cas de vide juridique dans le pays visité, la règle de la réciprocité peut s’exercer si le groupe provient d’un pays membre de la CEE. On peut, autre- ment, se référer à la définition de guide touris- tique élaborée par la World Federation of Tourist Guide Lecturers (WFTGL) selon laquelle :

est considérée comme guide touristique la personne qualifiée qui :

(a) Possède une licence délivrée ou reconnue par une autorité compétente.

” D ans le cas ou la législation nationale ne pré- voit pas une telle licence, a suivi une forma- tion de guide touristique conduisant à l’ob-

tention d’une qualification reconnue par l’au- torité locale, régionale ou nationale, et qui guide des visiteurs dans un pays, afin de leur fournir des informations et des explications sur l’histoire, l’archéologie, les monuments et les awvres d’art, le développement culturel, les beautés naturelles, les endroits d’intérêt et en général sur tout autre matière relative à la promotion du tourisme. »

1.2.1.4 Veiller à l’évaluation des politiques touristiques sahariennes

Les actions d’évaluation doivent se faire suivant une approche holistique. Des experts des diffé- rents pays sahariens devraient se réunir périodi- quement afin d’évaluer et de comparer les diffé- rentes politiques touristiques

1.2.1. > Encourager la coopération interrégionale

Tout comme les États membres de l’entente (Niger, Burkina Faso, Bénin, Togo, Côte d’ivoire), qui ont établi des projets communs de coopération touristique, les pays sahariens se doi- vent une assistance mutuelle accrue et une coor- dination plus efficace. Cela concerne tous les domaines mais plus particulièrement la forma- tion, les transports et les circuits touristiques transfrontaliers : - Un projet de visa saharien unique, valable

dans tous les pays, serait souhaitable. - D’autre part, l’idée de créer une instance de

coordination et de réflexion serait judicieuse afin de mieux promouvoir le tourisme saha- rien. Cette instance, que l’on pourrait appeler Observatoire ou Comité de liaison saharien serait à la base de plusieurs initiatives dans le domaine de la promotion du tourisme saha- rien, et particulièrement à l’étranger.

- Créer, enfin, grâce aux nouvelles technologies des outils pour la mise en ceuvre des poli- tiques touristiques et culturelles.

1.2.2 Actions de sensibilisation et de présemation du patrimoine culturel et naturel

Ces actions ont pour but : - De responsabiliser les populations locales et

les acteurs locaux par rapport à leur rôle dans le développement d’un tourisme saharien res- pectueux de l’environnement.

- D’encourager les actions de sauvegarde des sites historiques ainsi que la concertation des organismes officiels face à la désertification.

1. Commission des communautés européennes, Document de travail WY la question des guides touristiques, Bruxelles, 1997.

Page 59: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

62

- De donner une image valorisante de l’Afrique saharienne à l’étranger grâce à des campagnes publicitaires et à une exposition.

1.2.2.1 Des actions de sensibilisation et d’information sur le tourisme durable

Les maires, les éducateurs, les travailleurs sociaux, les enseignants seraient invités à trans- mettre autour d’eux, l’intérêt de préserver l’en- vironnement tout en développant le tourisme. L’accent serait mis sur les avantages dont béné- ficierait la population locale du fait de ne pas bra- conner, ni couper les ligneux dans certaines régions fragiles, contribuant ainsi à : , - Eviter l’avancée du désert. - Préserver l’écologie et l’environnement de ces

régions pour les générations futures. - Tirer profit de la fréquentation touristique en

termes de création d’emplois, de ventes des objets de l’artisanat, de l’hébergement...

Un dépliant bilingue clair et illustré pourrait être distribué aux personnes au cours de ces contacts. D’autres actions de sensibilisation pourraient être entreprises telles que : - Informer les touristes sur les us et coutumes

locaux grâce à des conférences sur ce thème et les sensibiliser sur les méthodes pour pré- server l’environnement.

- Sensibiliser l’ensemble des acteurs locaux du tourisme (responsables, résidents locaux et touristes), quant à la valeur du patrimoine saharien (villes et oasis anciennes, peintures rupestres, etc...).

1.2.2.2 Des actions de préseruation et de sauvegarde du patrimoine culturel et architectural saharien

Les interactions entre tourisme et culture ont toujours existé, poussant les deux secteurs à col- laborer mutuellement afin de coordonner, pour une meilleure synergie, certains projets spéci- fiques. Parmi ces derniers, les sites historiques ayant un intéret architectural et connaissant une fréquentation touristique, constituent des exemples éloquents.

En effet, beaucoup de ces sites touristiques comportant des spécificités culturelles, ont béné- ficié d’opérations de réhabilitation car, ils sont situés sur le trajet des circuits touristiques. D’autres sites, malgré leur valeur culturelle et architecturale intrinsèque, demeurent écartés de la manne touristique et d’une éventuelle restau- ration. Si les uns sont littéralement envahis par des groupes de touristes dépassant largement

leur capacité de charge (temples nubiens en Égypte, oasis de montagne en Tunisie, Ksar Ait Ben Haddou au Maroc), d’autres se retrouvent ignorés et en butte à une dégradation certaine.

Parmi ces derniers, on peut citer les nom- breux Ksour dans le sud-est de la Tunisie, dans la région de Tataouine. Remplissant, jadis, les mêmes fonctions que les Ksour marocains ou mauritaniens, les Ksour tunisiens sont en butte, également, au phénomène de l’exode de leur population d’origine qui préfère aller vivre au sein d’une nouvelle ville.

C’est le cas du ksar pitonnier de Douiret ou de celui de Ghomarassen. L’une des options pour les faire revivre serait d’y introduire le tourisme en transformant quelques vieilles demeures en lieux d’hébergement originaux et authentiques. Cependant, malgré une dynamique association culturelle à Douiret et une puissante diaspora de Ghomarassen en France, ce projet pourrait mieux réussir au village pitonnier de Chenini-Tataouine. En effet, étant encore habité par quelques dizaines de familles, il serait possible d’y amé- nager quelques gîtes touristiques avec la partici- pation des habitants. Ces derniers seraient aidés financièrement pour restaurer leurs maisons. Cinq maisons pourraient faire l’objet de ce programme à raison d’un investissement de 20 000 US$ par maison, soit un investissement total de 100 000 dollars des États-Unis.

D’autre part, trois recommandations sont à prendre en compte dans le cadre de la protection du patrimoine saharien : - Effectuer un inventaire des sites culturels du

patrimoine saharien à protéger. - Établir un périmètre de sauvegarde autour des

sites à préserver afin d’éviter toute urbanisation envahissante, rénovation anarchique, dégrada- tion ou vol des biens culturels sahariens.

- Créer des moyens de contrôle afin d’arrêter l’exportation illicite des objets d’art vers l’étranger, (le cas des sculptures sur bois du Mali est le plus flagrant). Une des solutions à ce problème serait d’in-

citer à créer des copies parfaites de ces œuvres d’art grâce au moulage, et de les vendre aux tou- ristes amateurs d’antiquités africaines.

1.2.2.3 Des actions de préservation du milieu naturel et de concertation contre la désertification

- Encourager la création et le développement des parcs régionaux et des aires protégés, à l’instar de celles des MAB, en s’aidant des travaux des centres de recherche scientifiques spécialisés.

Page 60: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

- Contacter, dans un souci de coordination, les différents centres de recherche travaillant sur le thème de la sécheresse et de la désertifica- tion au sein des universités ou au sein d’or- ganismes spécialisés, afin qu’ils prennent en compte la dimension écologique et environ- nementale du tourisme :

. . Observatoire du Sahara et du Sahel (OSS). l Comité Inter-États de lutte contre la séche-

resse au Sahel (CILSS). l Réseau d’observatoires de surveillance éco-

logique à long terme (ROSELT). l Institut du Sahel (INSAH). l Institut des régions arides (IRA - Tunisie). l Commission nationale de désertification

(CND - Libye). l INRA/CNRF (Maroc). l IER (Mali) . l INRF (Algérie). l DEAR (Mauritanie). l INRAN (Niger).

1.2.2.4 Des actions de sensibilisation et d’affichage auprès de la diaspora originaire des pays du Sahara

Ces actions peuvent se dérouler auprès des consulats, foyers d’immigrés, associations afri- caines, associations de protection de la nature et de l’environnement. Les jeunes de la deuxième et de la troisième génération ayant un lien fami- lial avec les contrées sahariennes, seront parmi les meilleurs vecteurs pour transmettre le mes- sage de la défense des écosystèmes et du patri- moine au Sahara.

1.2.2.5 Donner une image valorisante du Sahara en organisant une exposition de photos et des séminaires spécialisés

Cette exposition itinérante aurait comme sujet Le patrimoine culturel et naturel du Sahara. Le thème central pourrait être les sites du patri- moine mondial de l’UNESCO au Sahara, avec des aspects divers: architecturaux, humains, écologiques et archéologiques. Serait illustré, notamment, le patrimoine saharien : Ksour mau- ritaniens, cités de Tombouctou, Djenné, Ghadammes, vallée du M’Zab, Ksar d’Aiit Ben Haddou, réserves du Banc d’Arguin, de l’Air- Ténéré, du Tassili n’Ajjer, du Tadrart Acacus. En marge de ces lieux, on pourrait signaler l’exis- tence des autres sites du patrimoine mondial se trouvant en Égypte, en Libye, en Tunisie, en Algérie, au Maroc, au Mali et au Niger.

Organisée d’abord au sein des pays sahariens eux mêmes, cette exposition d’une centaine de

panneaux et intitulée Sahara 2000, serait ensuite (ou parallèlement), présentée au sein de l’UNESCO, des capitales européennes, des villes jumelées avec des cités sahariennes. Montée par l’UNESCO, les pays concernés et différents mécènes, cette exposition nécessiterait l’envoi sur le terrain pendant deux mois d’un photographe et d’un spécialiste du patrimoine. D’autre part, des séminaires spécialisés sur le patrimoine his- torique, culturel et naturel du Sahara pourraient être organisés, notamment, dans les pays émet- teurs de touristes.

1.2.3 Des actions opérationnelles et de conception de produits touristiques saharien

11 s’agit de consolider les produits touristiques classiques tout en créant de nouveaux produits innovants répondant à des concepts porteurs : aventure, écotourisme, découvertes, circuits culturels insolites.

1.2.3.1 Consolider les produits touristiques sahariens classiques

La plupart des sites touristiques sahariens peu- vent être découverts grâce à des méharées ou des circuits combinant Land-Rover et marche à pied. Depuis quelques années, on remarque un vif inté- rêt manifesté par les touristes envers l’écotou- risme au sein, notamment, des parcs nationaux et régionaux des pays sahariens. La contempla- tion de la nature, de la faune et de la flore consti- tue l’essentiel de ce produit qui encourage la pro- tection des sites naturels et a des retombées positives sur les populations locales. L

2 La création d’infrastructures adéquates, W

l’amélioration des équipements et de la signali- 2 sation, la réglementation des professions touris- E .2 tiques (transporteurs, chameliers, accompagna- 2 teurs...) et la valorisation de l’artisanat devraient z figurer parmi les mesures prioritaires à prendre d par les responsables locaux du tourisme. 52

2 a 1.2.3.2 Le concept de tourisme d’aventure 2

et écologique E Segmentation de la clientèle

K 3

du tourisme d’aventure Rechercher de nouveaux produits touristiques, revient à déceler les motivations de la clientèle. Celle-ci, le plus souvent, est attirée par le goût de l’aventure, la rencontre authentique avec la nature. Elle peut être segmentée en quatre catégories : (a) La clientèle des activités touristiques de plein

air : cette clientèle recherche le contact avec les éléments naturels. Elle a une attitude active, créatrice et peut être débutante.

Page 61: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

Un tourisme écologique et d’aventuue. Le repas d’un groupe de touristes durant une meharée (sud Tunisie).

(b) La clientèle de l’éco-tourisme : elle est for- mée de personnes qui veulent s’initier à une meilleure compréhension des écosystèmes naturels. Elle aime contempler à distance les espaces naturels sauvages. Parmi les pro- grammes que l’on peut lui proposer, on peut citer : l La visite des parcs naturels nationaux. l La visite de zones protégées ayant une voca-

tion à caractère scientifique. l La participation à des safari-photos. l La participation à des conférences d’infor-

mation et de vulgarisation scientifiques. On retrouve parmi cette clientèle des personnes non initiées.

(c) La clientèle d’expédition : elle est constituée de pratiquants chevronnés ou d’initiés tech- niciens ou sportifs. Cette clientèle est très motivée par la découverte. Elle s’intéresse à des produits basés sur les techniques de I’ex- pédition.

(d) La clientèle de l’extrême : ce sont des per- sonnes qui veulent aller au bout d’elles- mêmes pour tester, grâce au voyage, les limites de leurs possibilités physiques : escalade par exemple de la falaise de Bandiagara au Mali ou des hauteurs du Hoggar en Algérie. Ainsi, le concept de tourisme d’aventure

ouvre des possibilités marchandes sur un marché limité. Celui-ci nécessite, de la part des profes- sionnels du tourisme, une véritable spécialisation. Pour que le terme de tourisme d’aventure trouve

sa pleine justification, il ne peut être associé à un tourisme de masse. C’est pourquoi, nous avons souvent affaire à de petits groupes qui utilisent peu l’infrastructure touristique classique

La nouvelle tendance du tourisme saharien On assiste aujourd’hui, en occident, à l’engoue- ment pour le tourisme d’aventure au même titre que pour l’écologie. Cela fut encouragé par des émissions de télévision spécialisées ou par des films pour grand public, redécouverts ou en pre- mière vision tels Laurence d’Arabie, Un thé au Sahara, Fort Saganne, The English Patient ou par des personnalités scientifiques tels Théodore Monod.

Le tourisme d’aventure se démocratise et l’on assiste à la remise en cause de la composante risque, imprévu, inconfort et effort physique au profit de concepts moins contraignants tels aven- ture sans risque, tranquille, apprivoisée. Le tou- risme d’aventure évolue ainsi davantage vers la découverte de la faune, de la flore et d’espaces atypiques comme le désert ou les volcans mais aussi vers la découverte de l’autre et la redécou- verte de soi.

L’écotourisme se trouve ainsi renforcé mais il ne peut pas être suffisant pour attirer et retenir une clientèle de plus en plus exigeante. C’est pourquoi, il faut innover en créant dans toutes les régions sahariennes, de nouveaux pro- duits d’accompagnement en favorisant au maxi- mum le contact avec les populations locales

Page 62: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

autochtones, en les faisant participer pleinement à l’activité touristique. D’autre part, concernant l’hébergement touristique, il faudrait réfléchir sur les formes de conceptions architecturales les plus compatibles avec l’esprit du tourisme saharien (hôtel traditionnel, habitat ancien réac- tualisé, tentes bédouines, campement, relais, lodges etc..).

1.2.3.3 Favoriser L’artisanat sous toutes ses formes en encourageant la création de coopératives artisanales

L’exemple des villages de Basse-Casamance au Sénégal, où une communauté de villageois a pris en charge son destin touristique est édifiant. Le village, d’au moins mille habitants, dispose d’un maximum de vingt à trente lits d’hôtes dans un style d’hébergement respectant le cachet tradi- tionnel et offrant des repas confectionnés à par- tir de produits locaux. De jeunes villageois assu- rent, sous l’autorité du chef de village, les services de l’hébergement, des repas et des excursions. Outre les tarifs touristiques et les salaires, la part allouée à la coopérative est décidée d’un com- mun accord et permet d’améliorer les équipe- ments communautaires et de créer de nouvelles activités commerciales, tel l’artisanat.

La prise en charge d’une activité touristique par la communauté autochtone peut s’observer aussi au Mali : coopératives artisanales des Touaregs à Tombouctou, ou à Sekou où, dans cette dernière, une cinquantaine de membres de la même tribu, les Dicko, subsistent de l’artisa- nat. A Tamanrasset, ce sont également les Touaregs qui ont créé leurs propres coopératives alors qu’en Mauritanie, ce sont les femmes qui se voient encouragées à monter leurs associations commerciales.

Les pouvoirs publics, dans ces exemples, aident discrètement, mais sans grands moyens, ces initiatives dont l’un des mérites est, égale- ment, de diminuer la pléthore d’intermédiaires et la dégénérescence d’un art ancestral. Une inter- rogation se pose quant aux moyens à mettre en place, pour protéger et encourager la création artistique dans le secteur de l’artisanat.

1.2.3.4 Favoriser des activités sportives et écotouristiques

Parmi les actions qui devraient être favorisées ou considérées : - Encourager la création de pensions de famille,

de gîtes ruraux et de petits campements ou relais à l’intérieur des villages touristiques et des oasis sahariens.

Artisanat saharien

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Page 63: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

Encourager les municipalités et les syndicats d’initiatives à créer des circuits de randon- nées pédestres, de VTT, d’activités de trek- king, d’escalade et de toutes formes de mani- festations sportives adéquates dont marathon, parapente, ULM. L’organisation de rallyes (Paris-Dakar, Optic ZOOO), si elle a des retombées médiatiques cer- taines sur les régions traversées, doit être considérée avec grande prudence quant à l’im- pact sur l’environnement qu’elle occasionne et la faiblesse des retombées économiques effectives sur les populations locales. Encourager les randonnées de type éco- volontariat ainsi que le tourisme de nature avec la découverte des écosystèmes végétaux. Encourager la rencontre avec l’autre grâce à des stages de mode de vie (mode de vie oasien, récolte des dattes, techniques d’irrigation et soins apportés aux animaux notamment aux dromadaires). L’intérêt pour la santé, également, amène à s’intéresser à l’initiation aux plantes naturelles et à leur utilisation pour certaines maladies, ainsi qu’au plaisir des baignades auprès des sources thermales. Certaines de ces dernières pourraient être exploitées dans le cadre du tourisme thermal.

1.3.3.~ Créer de nouveaux circuits sahariens thématiques et combinés

Ces circuits touristiques permettraient de prendre conscience de l’importance commerciale et du rayonnement spirituel et culturel, qu’évo- quent certains lieux sahariens.

Organisés par segments, ou tout au long des parcours utilisés jadis, ces circuits transfrontaliers pourraient être subdivisés en trois catégories : (a) Les circuits des cités caravanières du com-

merce transsaharien, en mettant en évidence les anciennes routes : l Route du sel. l Route des esclaves. l Route de l’or et du fer. l Routes des 40 jours, des palmiers et du

Bornou

(b) Les circuits des routes et des lieux à carac- tère religieux, spirituel et culturel :

l La route du pèlerinage vers la Mecque. l La route vers des mausolées et des mara-

bouts célèbres. l La route des anciennes médersas et biblio-

thèques aux magnifiques manuscrits anciens. Ceux de Tombouctou et des ksour mauritaniens sont les plus célèbres.

l La route des hommes célèbres : des géographes et penseurs arabes tels Ibn Battuta, Ibn Khaldoun ou Al Sayuti; des missionnaires, explorateurs, scientifiques ou mystiques européens qui furent fascinés par le Sahara tels de Foucault, Caillé, Barthe, Lenz, Théodore Monod.

l Les lieux de tournage de films célèbres. (c) Des circuits combinés entre les pays limitrophes : ,

l Egypte - Soudan. l Tchad - Libye. l Tunisie - Libye. l Tunisie - Algérie. l Algérie - Libye. l Algérie - Niger et Mali. l Mali - Mauritanie. l Mauritanie - Maroc. Suite à certains de ces circuits, un séjour bal-

néaire pourrait être programmé (Mer Rouge, Méditerranée ou Atlantique). Dans le cadre des diverses activités énoncées, un élément essentiel doit rester présent à l’esprit : - Le respect de l’environnement en le préservant. - Le respect mutuel touristes / autochtones en

bénéficiant des interactions des uns envers les autres.

- L’orientation de ces synergies vers le déve- loppement du tourisme durable.

1.3 Le financement

Le financement de certains projets de tourisme durable pourrait s’appuyer sur différentes sources nationales ‘et internationales : fondations, associations, ONG humanitaires et groupes pro- fessionnels. Parmi ces dernières, on peut citer l’exemple de la SNIM en Mauritanie, qui a créé le musée du désert, ou celui de la SITH, en Tunisie, qui a projeté de restaurer l’oasis de montagne de Mides.

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Page 64: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

II Le développement l du tourisme durable

2.1 Développement et tourisme durable

Le concept de tourisme durable est étroitement lié à la notion de développement durable. Celui- ci procède des orientations indiquées au sein du rapport de la Commission mondiale de l’envi- ronnement et du développement, intitulé Notre avenir à tous et qui fut soumis en 1987 à l’Assemblée générale des Nations Unies. Cette notion de durabilité y était définie comme un développement qui, tout en répondant aux besoins présents des sociétés, ne compromet pas la capacité des générations futures à répondre à leurs propres besoins. Le principe de développe- ment durable fut approfondi et inclus dans le programme de l’agenda 21 de la Conférence des Nations Unies pour l’environnement et le déve- loppement (CNUED) organisée à Rio de Janeiro en juin 1992. Trois ans plus tard, un programme d’action 21 pour l’industrie du voyage et du tou- risme, fut également énoncé par les institutions des Nations Unies. Le concept de tourisme durable devint dès lors, une notion prise en compte par de nombreux pays et organismes pour toute forme d’exploitation touristique.

2.2 Les déclarations et chartes du tourisme durable

La constatation des incidences négatives de l’ac- tivité touristique sur les secteurs socio-écono- mique, culturel et de l’environnement a poussé la communauté internationale à se mobiliser et à refléchir sur les moyens d’instaurer un tourisme harmonieux, durable et respectueux des valeurs universelles de l’humanité. Cette mobilisation s’est affirmée à travers différentes déclarations et chartes internationales parmi lesquels on peut citer : - Les Déclarations de Manille (Philippines) du

10 octobre 1980, sur le tourisme mondial et du 22 mai 1997 sur l’impact du tourisme sur la société.

- La Charte du tourisme et le code du touriste adoptés à Sofia (Bulgarie) en 1985 sous l’égide de 1’OMT.

au Sahara

La Déclaration de Rio de Janeiro (Brésil) sur l’environnement et le développement du 13 juin 1992. La Charte du tourisme durable de Lanzarote (Iles Canaries, Espagne) du 28 avril 1995. La Déclaration de Stockholm (Suède) du 28 août 1996 contre l’exploitation sexuelle d’enfants à des fins commerciales. La Déclaration de la responsabilité des géné- rations présentes envers les générations futures adoptée lors de la vingt-neuvième ses- sion de la Conférence générale de l’UNESCO du 12 novembre 1997. La Charte de 1’ICOMOS sur le tourisme cul- turel international. Le Code de l’éthique du tourisme de 1’OMT.

Ces deux derniers ont été ratifiés lors des récentes Assemblées générales de ces deux organisations en octobre 1999. Outre ces actions internatio- nales, des groupements régionaux de pays ont conjugué leurs efforts pour recommander un tou- risme durable. Ainsi, peut-on citer : - La Déclaration ministérielle euro-méditerra-

néenne sur le tourisme dans le développement durable, adopté à Hyères-les palmiers (France) le 23 septembre 1993.

- La Charte du tourisme méditerranéen adop- tée lors de la Conférence ministérielle sur le tourisme méditerranéen, qui s’est tenue à Casablanca (Maroc), du 20 au 22 septembre 1995.

- La Charte de Récife (Brésil) sur le tourisme du troisième âge adoptée en septembre 1996.

- La communication de la Commission de la CEE sur l’appui au développement d’un tou- risme durable dans les pays en voie de déve- loppement (COM, 1998, 563 final).

D’autre part, beaucoup de professionnels ont pris conscience de leurs responsabilités dans le développement d’un tourisme durable. Deux exemples peuvent être cités : - Le Forum sur l’environnement de TUI, orga-

nisé en République fédérale d’Allemagne en 1998, et où le groupe touristique allemand 67

Page 65: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

appela à une répartition plus équitable des bénéfices du tourisme entre les pays du nord et les pays du sud.

- La Charte d’éthique du voyageur, conçue grâce à une collaboration entre le tour-opé- rateur français Atalante, les guides Lonely Planet, Swissair et plusieurs revues de voyages. Cette charte prodigue aux touristes des conseils pour un meilleur respect des lieux et des populations qu’ils visitent. Ces différentes initiatives internationales,

régionales et privées qui se sont multipliées en cette fin de millénaire préfigurent ce que devrait

être le tourisme du XXI~ siècle : une activité majeure du développement, de l’échange cultu- rel diversifié, plus professionnel et mieux contrôlé en ce qui concerne ses effets négatifs.

Le tourisme saharien est lui aussi en face de telles mutations et de tels défis et il nécessite, de la part des États Sahariens et des acteurs du tourisme au Sahara, qu’ils adoptent une vision globale et une politique de développement concertée, que l’on pourrait résumer au sein de principes stratégiques qui seraient de nature à inspirer les politiques touristiques au Sahara.

68

Page 66: Stratégie pour un développement durable du tourisme au Sahara

III Propositions de principes l stratégiques

pour un développement du tourisme durable au Sahara

Principe 1 : Préserver pour les générations futures le patrimoine culturel et naturel du Sahara

1.1 Les générations présentes ont la responsabi- lité de léguer aux générations futures un Sahara qui ne soit pas un jour irrémédiablement endom- magé par l’activité humaine, mais une zone de paix et de développement conjoints.

1.2 Les générations présentes devraient, avant de réaliser des projets touristiques majeurs au Sahara, prendre en considération leurs consé- quences possibles pour les générations futures.

1.3 Les générations présentes devraient veiller à assurer les conditions d’un développement tou- ristique et socio-économique durable et équitable pour les générations à venir grâce, notamment, à une judicieuse et prudente utilisation des res- sources disponibles au Sahara.

1.4 Le tourisme étant synonyme de paix et de rapprochement entre les peuples, les générations présentes devraient veiller à ce que, tant elles- mêmes que les générations futures, soient pré- servées des conflits armés dont une des consé- quences est la destruction du patrimoine cultu- rel et naturel et la disparition du tourisme.

Principe 2 : Promouvoir, au niveau national, une politique touristique respectueuse du développement durable, d’une éthique et d’une déontologie, en particulier lors de l’utilisation des ressources naturelles et culturelles, et qui assure le bien être des touristes

2.1 Veiller à ce que le développement touristique se réalise par un partenariat entre les collectivi- tés locales et régionales, le secteur privé et les populations d’accueil.

2.2 S’assurer que les retombées financières du tourisme soient équitablement réparties de façon à ce que les populations locales puissent en béné- ficier surtout en termes d’emplois directs et indi- rects.

2.3 La conception des infrastructures hôtelières et touristiques et leur exploitation doivent s’in- tégrer harmonieusement dans l’environnement local et s’inspirer, autant que possible, du style architectural traditionnel et tenir compte de la rareté des ressources en eau.

2.4 L’association des populations locales au déve- loppement du tourisme doit s’accompagner de la promotion de la créativité et de l’épanouissement de toutes les formes de l’artisanat et des expres- sions artistiques locales, sans pour autant provo- quer leur standardisation ou leur dégénérescence.

2.5 Les démarches administratives à l’entrée des frontières ou pour l’obtention des visas doivent être facilitées au maximum. Les autorités natio- nales doivent veiller, avec les élus locaux et les responsables sahariens, à assurer aux touristes les conditions sanitaires, de sécurité, d’information et de signalisation nécessaires à leur séjour et à leur bien-être.

Principe 3 : Éduquer, former et informer les responsables publics et privés (élus locaux, professionnels du secteur touristique) et sensibiliser des populations locales aux principes du tourisme durable

3.1 Des sessions de formation et d’information professionnelle doivent être organisées pour tous les acteurs du tourisme local en relation ou en contact avec les touristes (élus locaux, guides, chauffeurs, chameliers, employés de l’hôtellerie, de la restauration et de l’artisanat, gardiens des sites touristiques et des musées...).

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3.2 Les responsables touristiques avec l’aide des élus locaux, les associations culturelles doivent sensibiliser les populations locales et les com- munautés d’accueil : - A mieux protéger l’environnement afin de

préserver les écosystèmes fragiles, la bio- diversité et les espèces menacées de la faune et de la flore.

- A mieux connaître leur patrimoine culturel et naturel et mieux le protéger et le préserver et à mieux connaître les modes de vie, les tra- ditions et les attentes des touristes afin de mieux les accueillir.

3.3 Les administrations du tourisme, les fédéra- tions professionnelles touristiques, les collectivi- tés locales et les centres de recherche sur les régions arides des pays sahariens, doivent coor- donner leurs compétences et leurs efforts, s’échanger des informations et organiser des séminaires et des stages communs, afin d’encou- rager le développement d’un tourisme durable au Sahara

Principe 4 : Promouvoir des pratiques touristiques compatibles avec la conservation du patrimoine naturel et culturel. Les responsables du secteur de la culture et du tourisme dans les pays sahariens, doivent concilier les nécessités du tourisme et la préservation du patrimoine par une harmonisation des politiques culturelles et touristiques

4.1 Les sites du patrimoine culturel et naturel du Sahara constituent un héritage qui appartient à l’humanité. A ce titre, il est nécessaire d’en faire l’inventaire et de veiller à les protéger, à les mettre en valeur et à faciliter leur accès aux touristes nationaux et étrangers grâce à des routes, une signalisation et une interprétation adéquates ainsi que l’utilisation des nouvelles technologies de la communication.

4.2 L’interdépendance entre la sauvegarde des sites du patrimoine culturel et naturel saharien et la fréquentation touristique, est de nos jours évi- dente. Cependant, cette dernière ne doit pas dépasser la capacité de charge des sites, ni contri- buer à leur détérioration par défaut de sur- veillance ou de gestion.

4.3 Les acteurs du patrimoine culturel et naturel (conservateurs, aménageurs, chercheurs, archéo-

logues...) et ceux du secteur touristique (guides, tour opérateurs, architectes, hôteliers...) doivent être informés des opportunités et des risques qui en découlent pour le patrimoine et les popula- tions locales.

4.4 Une partie des revenus financiers de la fré- quentation touristique des sites du patrimoine culturel et naturel doit être réinvestie pour la pro- tection et la conservation de ces sites. Un juste prix d’entrée doit être fixé.

4.5 Créer ou dynamiser des structures de dia- logue et de coordination des politiques culturelles et touristiques aux niveaux local, régional et national.

Principe 5 : Respecter les us et coutumes des habitants et les sites touristiques des pays sahariens

5.1 Le tourisme est un facteur de rapprochement entre les peuples et un moyen pour une meilleure compréhension des autres cultures. Certains autochtones des lieux visités par les touristes, peuvent être choqués par des tenues trop décon- tractées, voire dénudées. Outre le respect des tra- ditions locales, les touristes doivent demander, par exemple, le consentement des personnes qu’ils veulent photographier ou filmer.

5.2 Les touristes doivent respecter les sites ou les sanctuaires religieux qu’ils visitent. Outre le silence requis, une tenue vestimentaire adéquate doit être de rigueur.

5.3 L’héritage historique et culturel d’une com- munauté appartient en principe à l’humanité entière. Cependant, il faut savoir respecter la volonté des populations locales à limiter, voire à interdire la visite de certains lieux dont la sacra- lité est jugée incompatible avec une affluence touristique.

5.4 Les acteurs du tourisme (tours-opérateurs des pays émetteurs, agences de voyages réceptives, guides et représentants locaux) doivent informer les touristes sur les traditions des pays visités, et les sensibiliser sur le respect de l’environnement, 1 ‘. a proprete des sues touristiques (rapporter avec soi les déchets indestructibles tels que sacs plas- tiques, piles...) et sur le respect du patrimoine culturel et naturel des lieux sahariens visités.

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Conclusion

L A durabilité est devenue une condition sine qua non pour toute forme de projet touris-

tique. Formidable moyen de rapprochement entre les peuples, le tourisme devient également un instrument de civilisation et de développe- ment, qui permet de préserver la nature et l’en- vironnement pour les générations futures.

Le développement du tourisme durable au Sahara nécessitera, cependant, une mobilisation de la société civile, des acteurs du tourisme ainsi qu’une volonté politique affirmée au niveau local, national, et international.

Le tourisme saharien peut contribuer à lutter contre la désertification en créant des activités capables de se substituer à celles existantes et pouvant alléger l’action anthropique sur le milieu. Il permettra, également, de relever et de sauve- garder un patrimoine culturel et naturel trop sou- vent méconnu et menacé, tout en créant les condi- tions de l’épanouissement culturel, social et économique des populations locales.

Dans cette perspective, ce projet se situe plei- nement dans le cadre des programmes des orga- nisations du système des Nations Unies, et de l’UNESCO en particulier.