Upload
odilon-aubin
View
111
Download
2
Embed Size (px)
Citation preview
1
Stratégies industrielles
2
• L’économie industrielle est la branche de la théorie
économique qui se donne pour objet l’étude de
fonctionnement dynamique de l’industrie, sous
l’influence de son environnement et des
comportements stratégiques des firmes qui la
composent, le terme d’industrie étant compris
comme l’ensemble des producteurs se trouvant en
concurrence sur le marché d’un bien ou service
donné.
3
• L’économie industrielle est à la fois un schéma descriptif
et d’explication et outil de prévision et d’action.
• L’aspect descriptif est en relation avec la méthodologie
inductive et positive utilisée, se basant sur l’observation
de la réalité et la tentative de la réduire à des lois de
fonctionnement simples et peu nombreuses, susceptibles
d’être généralisées.
• On a recours aussi à une approche théorique, se basant
sur des hypothèses.
4
• C’est de ce dualisme méthodologique et de leur complémentarité que l’Eco Industrielle tire toute sa vitalité, sa richesse et son dynamisme.
• Ce schéma et cet outil servent à différents acteurs de la vie économique.
• Aux entreprises pour connaître le cadre contraignant et contingent dans lequel elles effectuent leur calcul économique et prennent leurs décisions stratégiques.
• Aux pouvoirs publics pour apprécier la contribution d’une industrie donnée à la réalisation des grands équilibres macro-économiques, et les possibilités d’inflexion qui peuvent y être apportées.
5
• Aux syndicats professionnels pour estimer l’efficacité du fonctionnement de leur industrie et son potentiel de croissance, ou encore de résistance à la concurrence étrangère.
• Aux syndicats de salariés pour apprécier la création et la répartition des richesses émanant de leur industrie.
• Et plus généralement, à toute personne intéressée à comprendre le fonctionnement concret de telle ou telle industrie.
6
• Alfred Marshal est généralement considéré comme le
père de l’économie industrielle.
• Il s’attachait à analyser le dilemme suivant :
Partant du constat que les économies d’échelle
poussent à l’accroissement de la taille des firmes, il se
demande si leur croissance ne mène pas
inéluctablement au monopole, situation incompatible
avec un optimum dans la création et l’allocation des
ressources.
7
• Arthur Pigou imagine le concept de taille optimale
pour une firme, soulignant que les économies
d’échelle se trouvent limitées du fait du caractère
fini des compétences des entrepreneurs ; il trouve
ainsi une solution au dilemme de Marshall. Joan
Robinson développe pour sa part une analyse de la
concurrence imparfaite, destinée à comprendre le
fonctionnement d’un marché dominé par un petit
nombre de grandes firmes.
8
• L’éco ind en arrive ainsi à envisager plusieurs
situations possibles sur les marchés. Lorsque règne
la concurrence pure et parfaite, les producteurs,
maximisant leur profit, permettant l’obtention
d’une situation optimale pour l’industrie. Lorsque
des économies d’échelle entraînent l’accroissement
de la taille des firmes, on peut se trouver face à un
monopole qui maximisent son profit, s’écarte de la
situation optimale.
9
• On peut également se trouver en présence d’un petit
nombre de grandes firmes qui soit s’entendent entre elles
pour aboutir à une situation identique à celle de
monopole, soit se livrent concurrence et réalisent alors
des performances semblables à celles du schéma
théorique de la concurrence pure et parfaite.
10
• ces différentes situations débouche sur la chaîne de
raisonnement de l’économie industrielle : les
conditions de base d’une industrie déterminent ses
structures (nombre de producteurs ; celles-ci
permettent la mise en œuvre de telles ou telles
stratégies (la maximisation du profit n’étant qu’une
parmi d’autres) ; les stratégies se traduisent par un
certain niveau de performances (plus ou moins
proches de l’optimum).
11
• La chaîne de raisonnement de l’économie industrielle peut
être appréhendée selon deux optiques différentes.
dans une optique mécanique, on considère que les firmes
qui composent une industrie effectuent leur calcul
économique, prennent leurs décisions stratégiques dans un
milieu immuable, insensible à ces stratégies, milieu qui
influe sur leurs décisions au même titre que les
caractéristiques internes des firmes. Dans cette optique, une
même action, si elle est répétée, aura toujours les mêmes
conséquences. La vision est statique.
12
• Elle est commode pour représenter de manière formalisée
le fonctionnement de l’industrie. Mais elle traduit mal son
fonctionnement dynamique réel, appréhende mal les
stratégies des firmes et leurs résultats.
• A cette approche mécanique, on peut opposer une approche
systémique dans laquelle les firmes composant une
industrie sont considérées comme un système qui possède
les propriétés suivantes : c’est un ensemble d’unités et de
relations, organisé selon des finalités, doté d’une
dynamique autonome et ouvert sur d’autres systèmes.
13
• Précisons cette définition systémique de l’industrie. C’est un
ensemble de firmes : toutes ne sont pas de même taille, toutes
ne possèdent pas le même objectif, les mêmes règles de
fonctionnement, la même organisation interne. Elles établissent
entre elles des relations privilégiées tenant au fait qu’elles
fabriquent des biens ou des services comparables, offerts sur un
même marché : ces relations entre firmes représentent l’état de
la concurrence dans l’industrie en question, la concurrence
constituant les lois propres de fonctionnement de l’industrie
considérée comme un système : la structure de l’industrie se
réfère à ce processus de concurrence.
14
• D’autres relations lient les firmes à leur
environnement, qu’il s’agisse de l’environnement le
plus large constitué par l’état de développement
économique et social de l’économie dans laquelle
fonctionne l’industrie, ou d’un environnement plus
immédiat défini par les techniques de production, ou
encore par les déterminants de la demande propres
aux biens ou services de l’industrie considérée ; cet
environnement constitue les conditions de base.
15
• Les stratégies des firmes dominantes, dans ce
contexte, vont être stimulées par les structures de
l’industrie à laquelle appartiennent, par les
caractères distinctifs de leur environnement, tout
autant que par leurs caractéristiques internes
propres. Le résultat de ces stratégies sera de
modifier le processus de concurrence,
l’environnement, ou encore la situation des firmes
par rapport à ces éléments.
16
• Cette représentation systémique de l’industrie est retracée de la manière suivante :
Les conditions de base de l’industrieEnvironnement socio-économique
Caractéristiques de l’offre
Caractéristiques de la demande
les structures
un ensemble de firmes constituant un système :
- liens entre les firmes
- liens avec l’extérieur du système (clients, fournisseurs, concurrence d’autres produits)
Les stratégies
- Visent à modifier l’environnement(conditions de base et structures) de manière à alléger les contraintes qu’il représente
pour la firme.
-dépendent des forces et faiblesses de chaque firme
Les performances
-Mesure dans laquelle la firme atteint les objectifs qu’elle se fixe ;
-Contribution de l’industrie au fonctionnement de l’économie à laquelle elle appartient.
17
La chaîne de raisonnement de l’économie industrielle sera illustrée à travers la démarche suivante : étude des conditions de base, c’est-à-dire l’environnement dans lequel fonctionne une industrie, par la suite, étude des structures, les relations concurrentielles entre firmes d’une même industrie entre elles.
Les stratégies mises en œuvre par les firmes en vue de s’isoler des forces concurrentielles et de transformer les lois de fonctionnement du système à leur avantage seront traitées juste avant l’analyse des performances des firmes et de l’industrie.
18
Axe 1 : La firme
19
• Selon l’école néoclassique, la firme est définie par trois
éléments :
- le chef d’entreprise, rationnel, est le seul décideur ;
- Une fonction de production, qui retrace les conditions
technico-économiques auxquelles doit se plier l’entreprise ;
- un objectif et comportement tout à la fois : la maximisation
du profit.
Les prix des facteurs de production et du bien fabriqué par
l’entreprise étant des données du marché, le producteur
adapte le volume de son offre de manière à obtenir le profit
maximum.
20
• Chaque producteur définit ainsi son offre. La somme des offres de tous les producteurs d’un même bien constitue l’offre de l’industrie qui, confrontée à la demande adressée au marché, détermine le prix et la quantité d’équilibre. Tous les agents économiques participant au marché considéré ayant basé leur décision de production et de consommation sur des critères rationnels (profit maximal pour le producteur, utilité maximale pour le consommateur), aucun d’eux n’aura intérêt à modifier l’équilibre de marché (prix et niveau d’offre/demande). Cet équilibre, qui est aussi un optimum, est donc stable.
21
• Dans cette construction théorique, la firme est
appréhendée non pas comme l’objet de l’analyse,
mais simplement comme un outil permettant de
démontrer l’existence de l’équilibre partiel. La
firme de la théorie est une abstraction qui ne
correspond pas à la firme de la réalité.
22
• Cette limite que présente cette définition a contraint les
théoriciens à considérer l’entreprise comme un système
ouvert. La firme est liée à son environnement par un
ensemble de relations que l’on peut rassembler en trois
sous-groupes.
• Le premier est un ensemble très général, qui agit sur
l’entreprise : caractéristiques économiques, sociales,
culturelles, politiques, de l’économie dans laquelle
l’entreprise exerce son activité.
23
• Le second est un ensemble plus spécifique caractérisant la demande qui est adressée à l’entreprise, et la manière de produire.
• Le troisième, lui aussi spécifique, concerne la forme et l’intensité que prend la concurrence entre l’entreprise considérée et les autres producteurs fabricant le même bien et l’offrant sur un même marché.
• Les deux premiers ensembles correspondent à ce que l’on appellera les conditions de base de l’industrie, le troisième à ses structures.
24
• Dans cette même optique, l’entreprise est également
caractérisée par ses objectifs : elle ne se trouve pas
dans un état d’équilibre statique, mais passe par une
succession d’états d’équilibres dynamiques,
correspondant chacun à une situation satisfaisante
dans la gestion des contraintes qui se posent à la
firme. Elle opère en permanence une série
d’arbitrages, variables dans le temps.
25
• L’entreprise enfin est une totalité, un ensemble de
sous-systèmes en relations d’interdépendance qui
constituent l’organisation de la firme ; ces sous-
systèmes correspondent à chacune des fonctions
assumées par l’entreprise : production,
commercialisation, financement, etc.
26
• La firme est une organisation regroupant des
facteurs de production dans des relations qui
peuvent être différentes d’une firme à l’autre ; la
rationalité de ses décisions est nécessairement
limitée et contingente du fait que son organisation
interne est conflictuelle, du fait que ses relations
avec son environnement le sont également.
27
• D’autres auteurs ont défini la firme en se référant à la
conception des coalitions industrielles. Selon cette
approche, la firme est un lieu de coordination de l’activité
économique alternative au marché, organisation dotée de
règles de fonctionnement et d’objectifs propres. La
confrontation entre salariés et actionnaires, sous l’arbitrage
des managers, aboutit à un objectif satisfaisant pour la
firme dans la mesure où la coalition qu’elle représente est
maintenue, où son organisation permet un partage accepté
de la quasi-rente organisationnelle dont elle bénéficie.
28
• D’autres coalitions engagent la firme avec son
environnement : clients, fournisseurs, concurrents, etc.
• cette approche systémique de la firme paraît la plus
riches. Elle est suffisamment proche de la réalité pour
appréhender les stratégies des entreprises, sans exclure
pour autant les possibilités de formalisation destinées à
tester les avenirs possibles, à aider à la décision.
29
• Les théories de la firme ont progressivement évolué,
d’une firme outil de la démonstration de l’équilibre
partiel, à une firme émergée dans son environnement,
douée de stratégies visant à gérer le mieux possible
les contraintes internes et externes auxquelles elle est
soumise.
• L’économie industrielle précise le cadre des
contraintes externes pesant sur la firme, considérant
comme essentielles celles émanant de la concurrence.
30
Axe 2 : L’industrie
31
• L’industrie peut être définie comme un ensemble
de firmes en concurrence, produisant des biens
ou services étroitement substituables, offerts sur
un même marché.
32
• Selon les époques, les courants de pensée, les préoccupations,
les auteurs ont donc privilégié telle ou telle caractéristique
particulière permettant d’effectuer un regroupement entre
firmes (le marché pour les uns, l’ensemble des producteurs
pour les autres), le groupement ainsi effectué étant considéré
comme homogène et baptisé alors du nom d’industrie. Le
souci de constituer un découpage plus pertinent du système
productif a poussé certains économistes insatisfaits par les
partitions généralement admises à imaginer des concepts
alternatifs à l’industrie comme la filière ou le groupe
industriel et financier.
33
• Les comptables nationaux, à la recherche de
regroupements statistiques présentant une unité et
compatibles avec les contraintes de la collecte
d’information, utilisent les concepts de secteur, de
branche et de nomenclature d’activités et de produits.
Ces découpages ont été effectués en vue de
comprendre le fonctionnement de l’économie
générale ; ils présentent des imperfections lorsqu’il
s’agit d’étudier celui de l’industrie.
34
• C’est pourquoi, par-delà les découpages et
regroupements, par delà la sélection de relations
particulières rendant homogène tel ou tel sous-ensemble
du système productif, il est important de comprendre
que pour devenir objet d’étude, l’industrie doit se doter
d’une méthode d’analyse propre : cette méthode a pour
nom la méso-analyse. C’est sa mise en œuvre qui
permettra de comprendre le fonctionnement d’une
industrie et d’en prévoir l’évolution.
35
1/ Le concept téléologique d’industrie et les découpages alternatifs
Les économistes ont tout d’abord considéré l’industrie comme
une abstraction destinée non pas à expliquer ou décrire le
fonctionnement de tel ou tel secteur d’activité, ni même à servir
d’outil de prévision pour le fonctionnement de cette entité, mais
à expliquer ou prévoir le fonctionnement de l’économie
générale. Se démarquant par rapport à cette approche, sans s’y
opposer toutefois, des travaux plus récents ont fait preuve de
novation en proposant des découpages alternatifs à l’industrie :
la filière, le groupe industriel et financier.
36
• L’industrie : un concept téléogique
Le concept d’industrie apparaît tout d’abord dans
le sens de marché : ce qui fait l’homogénéité d’un
ensemble de firmes repose sur le fait qu’elles
vendent sur une même marché. C’est ainsi
qu’Alfred Marshall, prolongeant l’œuvre de Léon
Walras montre comment se détermine le prix d’un
bien par confrontation entre la demande et l’offre.
37
• L’industrie est alors un outil pour une théorie de l’échange et
de l’allocation harmonieuse des ressources. Pour caractériser
l’industrie-marché, Marshall rappelle les définitions
proposées par Cournot (le marché est considéré, non pas un
lieu déterminé où se consomment les achats et les ventes,
mais tout un territoire dont les parties sont unies par des
rapports de libre commerce, en sorte que les prix s’y
nivellent avec facilité et promptitude), et par Jevons
(marché : un corps de personnes qui sont en étroites relations
d’affaires et qui effectuent sur une large échelle des
transactions relatives à une marchandise quelconque).
38
• Dans la théorie marxiste, l’industrie est appréhendée du
point de vue de la production et de la valorisation du
capital : les producteurs engagés dans une industrie
donnée réalisent un taux de profit moyen, fonction de
l’offre et de la demande, de l’importance des capitaux
engagés dans le processus productif différents. Mais la
concurrence entre capitaux tend à niveler les différences
de valorisation qui peuvent exister ; la tendance à la
baisse du taux de profit, générale à toute économie
capitaliste, n’épargne ainsi aucune industrie.
39
• Chaque industrie est le regroupement conscient
ou inconscient des producteurs qui obtiennent
un même produit à partir de processus de
production comparables.
40
• La filière et le groupe
Différents auteurs ont rejeté ces approches de
l’industrie non pas du fait de leur objet, mais du
fait qu’elles ne permettaient pas de saisir la
dynamique du système économique. Ils ont ainsi
proposé des concepts alternatifs à celui
d’industrie : la filière et le groupe industriel et
financier.
41
• La filière émane de la volonté de souligner les liens technologiques qui peuvent unir des activités distinctes par leurs produits, liens qui semblent plus étroits que ceux créés par leur présence sur un même marché.
• A l’origine de ce concept, on trouve les réflexions de l’économie industrielle anglo-saxonne relatives à l’intégration verticale. La préoccupation centrale reste encore la compréhension de la dynamique de l’économie générale, à travers les relations de domination et d’entraînement qui caractérisent les liens entre industries.
42
• Mais progressivement, le concept de filière a été analysé pour lui même.
• La filière est alors définie comme un ensemble de branches qui entretiennent entre elles des échanges plus intenses qu’avec les autres, plus précisément comme «un ensemble articulé d’activités économiques intégrées, intégration consécutive à des articulations en termes de marchés, technologies et capitaux».
• Le concept ainsi défini ne sert plus seulement comme outil de découpage du système productif à des fins d’analyse de la dynamique économique générale, ou à des fins de politique économique ; il sert aussi d’outil de description, d’analyse des stratégies et donc d’analyse de la dynamique de la filière elle-même.
43
• Dans une filière, on distingue trois niveaux : le centre,
l’amont et l’aval.
• Fait partie de l’amont de la filière toute branche qui
est un fournisseur important du centre, et pour
laquelle le centre représente une part notable des
ventes.
• Fait partie de l’aval une branche qui est un débouché
principal pour le centre, celui-ci représentant une part
élevée des achats de la branche aval.
44
• L’intérêt de la filière apparaît particulièrement
dans la définition des stratégies des acteurs. Une
branche amont ou aval pourra jouir d’un pouvoir
de marché particulier, ce qui incitera les firmes
installées dans le centre de la filière à engager une
stratégie de détournement de ce pouvoir.
45
• Certaines branches, communes à plusieurs filières,
représenteront de ce fait un nœud stratégique du point
de vue de l’exercice du pouvoir, et il sera intéressant
pour une firme de chercher à s’y implanter ou s’y
renforcer. Pour ce qui est de la politique industrielle
également, la filière permet d’apprécier les cohérences
techniques, de repérer les éventuels goulots
d’étranglement qui pourraient freiner le développement
de la filière, d’apprécier les effets de diffusion.
46
• Conclusion :
L’industrie est un regroupement de firmes en concurrence
pour la production et la commercialisation d’un bien ou
service donné. Dès lors que l’on considère l’industrie
comme objet de l’étude et non comme un outil permettant
d’analyser la dynamique de l’économie générale, il
convient d’adopter des outils théoriques propres à cette
analyse : cette construction spéculative a pour nom la
méso-analyse. Elle épouse le schéma de raisonnement de
l’économie industrielle (conditions de base–structures–
comportements–performances) non pas de manière
mécanique, mais de manière systématique.
47
Axe 3 : Les conditions de base
48
• Les conditions de base influent sur les structures
d’une industrie. Mais peu d’auteurs analysent ces
conditions de base en tant que telles : elles seront
le plus souvent étudiées en même temps que les
structures, et caractérisées comme leurs
déterminants. Parfois encore, elles le seront en
tant que facteurs contribuant à expliquer les choix
stratégiques des firmes.
49
• Pour ce qui est de la prise en considération des
conditions de base, notons également que deux
attitudes s’opposent : pour les uns, il s’agit de
données prégnantes qui évoluent sous l’action de
forces externes à l’industrie mais sont insensibles
à l’action des stratégies des firmes qui la
composent.
50
• Pour les autres au contraire, les conditions de base tout comme les structures sont susceptibles de faire l’objet de stratégies des entreprises dominantes, qui cherchent ainsi à renforcer leur pouvoir de marché.
• La première attitude est commode, fixant un point de départ stable pour l’analyse, particulièrement lorsqu’il s’agit de construire une formalisation.
• La seconde est plus réaliste mais rend plus difficile l’analyse dans la mesure où l’on ne peut plus considérer que toutes choses sont égales par ailleurs ; c’est là l’une des difficultés de l’analyse en termes de systèmes.
51
1/ L’environnement socio-économiques de l’industrie
Une industrie donnée fait partie de l’ensemble plus vaste
qu’est l’économie nationale. Les règles de fonctionnement
de cette économie influent fortement sur toute industrie, à
même tel point qu’il est délicat d’opérer des comparaisons
d’une même industrie entre différents pays, ou pour des
années différentes. Cet environnement est générateur
d’effets externes sur le fonctionnement des firmes :
économies et déséconomies externes affectent les coûts de
production, les prix, la rentabilité.
52
– Le niveau de développement de l’économie
Le niveau de développement économique et social
d’une économie influe sur le fonctionnement de toute
industrie ; du côté de l’offre, il implique un type de
techniques, des habitudes et disciplines de travail,
des relations sociales dans et hors de la production ;
pour ce qui est de la demande, il implique des
habitudes et normes sociales de consommation, des
tailles et rythmes de croissance des marchés.
53
• Le niveau de développement correspond aussi à une
socialisation plus ou moins poussée des coûts de
l’éduction et de la formation, à un degré de
divulgation et vulgarisation de l’information. Il se
caractérise encore par la densité des infrastructures de
transport et communication. Enfin, il correspond à
une certaine répartition des richesses et du pouvoir
économique, répartition qui selon le cas, constitue un
frein ou une incitation à la croissance économique.
54
- Les rôles respectifs de l’Etat et du marché
Le degré et la nature de l’intervention de l’Etat
dans la vie économique jouent également sur les
structures industrielles. Entre une pure économie de
marché et une économie centralement planifiée, il
existe un large éventail de situations.
55
• L’Etat peut intervenir simplement en tant que gestionnaire de
la monnaie nationale et en tant que percepteur ; mais il peut
aussi imposer des normes dans les processus de production
(conditions de travail, droits et obligations des employeurs,
environnement) ou dans la spécification des produits ; il peut
réglementer la concurrence, en freinant par exemple la
disparition des petites entreprises qui sinon seraient
massivement éliminées par une vive concurrence (agriculture,
petit commerce), en maintenant des industries peu rentables
mais jugées stratégiques soit du fait de leur production.
56
• Il ressort de l’histoire économique que la non-
intervention de l’Etat, le libre jeu de la
concurrence, ont entrainé le développement de
firmes de grande taille et la concentration ; la
réglementation économique s’avèrent favorable au
maintien des petits producteurs (notamment pour
des considérations sociales, ou même électorales).
57
• L’Etat peut aussi intervenir directement sur les structures de certaines industries, poussant à la constitution de firmes de grande taille ou créant même des secteurs régis par des entreprises publiques en situation de monopole. L’analyse économique s’est exercée à montrer qu’il existe une différence de gestion entre un monopole public et un monopole privé, elle a tenté d’expliquer en quoi consistait un monopole naturel.
• Des réflexions nouvelles inspirées par la vague de privatisations des années quatre-vingt tendent cependant à nier le caractère naturel ou légitime des interventions de l’Etat sur les structures des industries.
58
• Les tenants de la Nouvelle Economie Industrielle
vont même jusqu’à parler des impostures de
l’économie mixte ; c’est là une attitude excessive,
trop étroitement économiste, qui dénie à l’Etat
son rôle de régulateur de la société, doté d’un
pouvoir politique relativement autonome par
rapport au pouvoir économique.
59
2/ Les caractéristiques de l’offre
Les caractéristiques de l’offre sont des contraintes
qui pèsent a priori sur le fonctionnement de toute
firme engagée dans une industrie donnée et qui
influent sur sa structure. Certains soutiennent que
les firmes ne peuvent pas agir sur ces conditions de
production et en déduisent que les structures sont
naturelles. Ces caractéristiques de l’offre font
pourtant bien l’objet de stratégies.
60
• Les types d’entreprises
Les types d’entreprises en présence sur un marché donné contribuent à expliquer sa structure. Par exemple, si l’on rencontre un grand nombre de petites firmes familiales, cela aura probablement pour conséquence une concurrence relativement faible entre producteurs car les objectifs des petites firmes résident plus dans l’obtention d’un niveau satisfaisant de revenu individuel que dans la recherche d’une plus grande part de marché : l’industrie en question restera ainsi peu concentrée ; ou du moins, elle sera caractérisée par une structure duale, où un grand nombre de petites firmes cohabitent avec quelques grands firmes, la concurrence s’exerçant entre ces dernières essentiellement.
61
• A l’autre extrême, une industrie ouverte aux firmes
transnationales sera fortement concentrée,
l’internationalisation des marchés et des productions étant
généralement le fait de firmes de grande taille. Il en ira de
même pour les industries marquées par la présence
d’entreprises publiques, ces dernières correspondant la
plupart du temps à une volonté de la part de l’Etat de
constituer un pôle moteur pour l’industrie en question, un
lieu d’exercice d’un pouvoir de marché, ce qui en
explique la grande taille.
62
• Les économies d’échelle
C’est là une des questions originelles de l’économie industrielle. Il y a économies d’échelle lorsque le coût unitaire de production diminue à mesure que la taille de l’appareil productif augmente ou que la production s’élève. Lorsqu’il en va ainsi, les firmes ont intérêt à accroître leur taille pour améliorer leur compétitivité et si cet accroissement s’effectue à un rythme plus rapide que celui du marché, l’industrie concernée se concentre, au risque de voir s’affaiblir et disparaître la concurrence.
63
• Parmi les causes d’économies d’échelle, on peut
distinguer celles relevant de phénomènes réels et celles
relevant de phénomènes monétaires. Les économies
réelles proviennent tout d’abord d’un effet
d’apprentissage : au fur et à mesure que l’on s’habitue à
produire un bien donné, on réduit son coût de
production, du fait d’un meilleur agencement des
activités productives, d’une meilleure utilisation des
matières employées, d’une plus grande efficacité des
gestes accomplis par les travailleurs.
64
• Des économies d’échelle réelles découlent également de
lois physiques : dans les industries de transformation
(process) par exemple, les coûts de production et
d’investissement sont proportionnelle à la surface des
installations alors que les quantités traités augmentent
selon le volume de ces installations : la dépense totale
augmente donc moins vite que le volume de la
production, entrainant une réduction des coûts unitaires
lorsque la taille des installations croit selon la règle dite
dès six-dixième.
65
• Le principe des multiples est une autre source d’économie
d’échelle réelles. Lorsqu’une production requiert une
succession de processus pour lesquels les capacités des unités
sont différentes, la firme de grande taille pourra se doter d’une
capacité totale correspondant, de manière idéale, au plus petit
commun multiple des tailles de chaque processus ; elle sera
ainsi en mesure d’utiliser à plein ses installations et les
amortira plus rapidement ; alors que la firme de plus petite
taille sera confrontée à des goulets d’étranglement à un niveau
ou à un autre du processus de production et devra stocker, ou
encore dépendre soit de la sous-traitance, soit du marché, pour
utiliser au mieux ses installations.
66
• La loi des grands nombres, dérivée de la précédente, appelée aussi principe des réserves accumulées, est également source d’économies d’échelle réelles. Elle suppose que la grande firme devra se constituer des stocks proportionnellement moindres que la petite firme, que la probabilité qu’elle commette des erreurs de gestion est moindre, donc que ses coûts unitaires sont plus faibles. Plus généralement, cette loi explique en quoi une firme peut avoir intérêt à croître en se diversifiant de manière concentrique, c'est-à-dire sur la base de processus de production ou de réseaux de commercialisation semblables.
67
• Les économies d’échelle monétaires quant à elles
reposent sur le fait qu’une firme de grande taille est en
situation de force vis-à-vis de des interlocuteurs. Elle est
ainsi en mesure de bénéficier de coûts
d’approvisionnement moindres de la part de ses
fournisseurs, de tenir ses prix face à sa clientèle,
d’accéder aisément aux financements privés et publics ;
elle bénéficie en outre d’une bienveillance certaine de la
part des Pouvoirs public du fait des économies externes
qu’elle diffuse.
68
• Aussi les PME se plaignent-elles fréquemment des
garanties draconiennes dont s’entourent les banques
avant de leur accorder des crédits alors qu’elles sont
moins sévères à l’égard des grandes firmes. Ou
encore : les délais de paiement accordés par les
fournisseurs aux petits commerçants sont brefs,
alors que les grandes surfaces arrivent à vendre
leurs marchandises avant de les avoir payé.
69
• Toutes ces sources d’économies d’échelle
correspondent à des phénomènes que l’on peut
observer et elles contribuent largement à
expliquer la croissance des entreprises, l’existence
de firmes de grande taille. Mais dans la réalité, il
est bien difficile de les mesurer : on constate en
effet que les processus de production changent
avec la taille des entreprises, la relation coût-taille
étant ainsi faussée.
70
• On constate par ailleurs qu’il existe à un moment donné une
norme de capacité de production, les fabricants de matériel offrant
des installations à une taille standard, taille qui de ce seul fait
définira la production la moins coûteuse. Il est alors difficile de
dire si la taille standard découle de considérations purement
techniques ou si elle est imposée par la structure du marché, par
les firmes dominantes pour lesquelles cette taille standard est bien
adaptée. Pour ce qui est des économies d’échelle monétaires en
tout cas, la question ne se pose pas de savoir si elles découlent de
phénomènes techniques, ou de l’exercice d’un pouvoir de
marché : elles découlent uniquement de ce dernier.
71
• Depuis les travaux de Arthur Pigou, il est devenu
habituel de parler de taille optimale d’une firme, taille
correspondante au coût moyen minimum de longue
période : ce coût baisserait du fait d’économies
d’échelle, en liaison avec l’accroissement de taille de
la firme ; puis passerait la taille optimale, il s’élèverait
du fait de déséconomies d’échelle provenant des
capacités limitées des entrepreneurs à gérer
correctement leurs entreprises.
72
- Les barrières à l’entrée
Les barrières à l’entrée sont des avantages de coût dont
bénéficient les firmes établies sur les concurrents
potentiels. L’existence de barrières à l’entrée peut ainsi
contribuer à expliquer la stabilité des structures
puisqu’elle limite la mobilité des capitaux. Des barrières
à l’entrée peuvent provenir des dispositions juridiques :
concessions, brevets, autorisations de mise sur le
marché, …, sont autant de contraintes légales qui
influent sur les structures de marché.
73
• Des barrières à l’entrée peuvent exister également du fait
que l’entrée d’une nouvelle firme entraînerait
l’accroissement du prix des fournitures pour l’ensemble
des producteurs, ou encore la baisse des prix des biens
ou services offerts, ôtant ainsi sa compétitivité à toute
l’industrie en cause. De telles barrières apparaissent en
particulier dans les industries caractérisées par
d’importantes économies d’échelle, dans lesquelles un
entrant potentiel représenterait une forte part du marché
initial.
74
• Les barrières à l’entrée peuvent toutefois être remises
en cause par le changement technique, ainsi une forte
croissance de la demande. Par exemple, des barrières
à l’entrée existent dans la fabrication du matériel
électronique domestique ; les constructeurs japonais
ont pu franchir ces barrières grâce à l’abaissement
des coûts des composants électroniques et grâce à la
très forte croissance du marché qui a permis
d’absorber de nouveaux producteurs de grande taille.
75
• Ces deux types de barrières peuvent être
considérés comme naturels, par opposition à
des barrières stratégiques, en termes de
différenciation du produit, ou de prix limite.
Leur existence contribue à figer les structures
de l’industrie.
76
• La structure des coûts
La structure des coûts de production influe sur les
structures d’une industrie : lorsque les coûts fixes
représentent une part importante du coût total, la structure
de l’industrie considérée est stable ; elle est beaucoup
moins lorsque les coûts variables sont prépondérants. En
effet, lorsque les prix baissent sur un marché donné,
certains producteurs peuvent se trouver dans une situation
telle le prix de vente ne permet plus de couvrir en totalité
leurs coûts.
77
• Toutefois, tant que les coûts variables sont couverts (salaires, consommations intermédiaires) ; le producteur peut maintenir son offre ; le déficit comptable qu’il affichera correspondra en fait à un report dans le temps des amortissements de ses investissements (coûts fixes). Une telle situation, bien que génératrice de charges financières supplémentaires, ne se traduira pas nécessairement par l’élimination des producteurs les moins efficients ; ils pourront survivre en attendant que le prix de marché s’élève de nouveau jusqu’à couvrir leur coût total, ou investir en vue de le réduire jusqu’à ce qu’il devienne inférieur au prix du marché. C’est pourquoi, dans une industrie caractérisée par des coûts fixes élevés, la population des firmes en présence est stable.
78
- le changement technique
La technologie désigne l’ensemble des procédés techniques couramment mis en œuvre dans la production d’un bien ou service donné. Lorsque la technologie est stable, tous les facteurs précédemment évoqués contribuent à déterminer une structure de l’industrie (les caractéristiques de l’offre et certaines stratégies mises en œuvre par les firmes dominantes y contribuant également). Le changement technique est susceptible de modifier ces structures : il peut remettre en cause les avantages acquis et les situations dominantes, ainsi que les stratégies destinées à les pérenniser.
79
3- Les caractéristiques de la demande
Les caractéristiques de la demande adressée aux
producteurs engagés dans une industrie influent
également sur sa structure.
80
• L’âge du produit
La théorie du cycle de vie du produit expose que sur un marché donné, les ventes évoluent dans le temps selon une succession de périodes : lancement, croissance, maturité et déclin. A chaque période, ou âge, correspond un certain nombre de caractéristiques.
Le lancement est une période très aléatoire pendant laquelle un grand nombre d’entreprises pénètrent l’industrie nouvelle, mais réussissent ou échouent suivant que les particularités qu’elles donnent à leur produit nouveau s’imposent ou non comme la norme du marché.
81
• La croissance est une phase où la demande augmente fortement, où la rentabilité est élevée malgré une concurrence vive entre un nombre toujours important de producteurs ; des entrants potentiels sont attirés par l’industrie. La maturité correspond à une stagnation de la demande, une concentration des producteurs du fait de l’élimination des moins efficients, une faible incitation à l’entrée. Le déclin vient avec la réduction de la demande, l’apparition de produits de substitution, une faible concurrence entre producteurs, d’autant plus fiable que la sortie de l’industrie est possible pour les producteurs en place ; la concentration s’accroît encore.
82
- Les quatre types de produits-marchés
Francis Bidaut dresse une typologie des produits-
marchés, analysant les caractéristiques de la demande
selon qu’elle correspond à des biens de consommation
finale ou intermédiaire, et à des biens de
consommation durable ou non-durable. Cette
typologie correspond de fait à un approfondissement
de l’analyse de l’influence de l’élasticité-prix de la
demande sur les structures industrielles.
83
• Pour les biens de consommation finale non-durable, l’acheteur fera peu d’efforts pour comparer les prix, ni même les quantités ; des offreurs de petite taille pourront survivre dans l’industrie qui se trouvera de fait peu concentrée (c’est le cas pour le petit commerce). S’il s’agit de biens de consommation finale durable (appareils électroménagers, automobiles), la dépense étant importante par rapport au budget de l’acheteur, ce dernier s’informera sur les prix et qualités relatifs des différents produits offerts ; la concurrence jouera fortement et si les produits concernés se prêtent à une production en série, les plus grands des constructeurs élimineront les plus petits, l’industrie se trouvant de la sorte concentrée.
84
• Si l’on a affaire à des biens de production, durables (biens d’équipement) ou non (matières premières, produits semi-finis, services), les acheteurs, clients industriels, seront en général sensibles aux prix d’achat et ce d’autant plus que ces derniers affectent le prix de vente de leur production et que la concurrence les dissuade de fixer leurs prix librement.
• Même si d’autres facteurs influent sur leur choix : la fiabilité du produit, la régularité de l’approvisionnement, la maintenance. En tout état de cause, les grands fournisseurs de biens à usage industriel seront mieux placés que les petits pour satisfaire ces exigences, ce qui donnera une structure concentrée de l’offre.
85
• Conclusion
Voilà un ensemble de causes pour lesquelles les conditions de base d’une industrie, tant celles qui relèvent de son environnement (externalités) que celles qui sont propres à son fonctionnement (offre et demande), influent sur ses structures. Rappelons toutefois qu’il convient de ne pas considérer ces relations comme naturelles ou mécaniques ; en effet, les conditions de base font l’objet de stratégies de la part des acteurs dominants de l’industrie : par exemple, les grandes firmes mettront en œuvre des technologies particulièrement adaptées à leur taille et les imposeront de fait comme norme technique d’efficience ; elles modifieront les caractéristiques de la demande par le jeu de la publicité ; elles feront pression sur l’Etat pour modifier des contraintes légales.