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SUJET : AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET
PROSPECTIVE TERRITORIALE AU SENEGAL : ENJEUX,
LIMITES ET PERSPECTIVES.
Nom du candidat : Sous la direction du :
Jacques Moïse DEMBA Pr. Amadou DIOP
Année académique : 2009-2010
Dédicaces
A mon défunt père Alphonse DEMBA, très tôt arraché à notre affection ; à ma mère
Elisabeth Diatta qui m’a accompagné et soutenu tout au long de mon cursus ; à mes parents
« adoptifs » du Mali, le Général Mohamed Coulibaly et Albertine Niasse, pour leur affection
et soutien durant les sept longues et dures années de formation au Prytanée Militaire de Kati ;
mais aussi, à mon voisin de chambre, frère et complice feu Samba Dieng, parti
prématurément ; sans oublier mon affectueux parrain, feu Adrien Diassy qui n’aura pas eu la
chance de lire ce travail pour lequel il manifestait beaucoup d’intérêt.
De toutes ces chères personnes, et je leur en serai toujours reconnaissant, j’ai appris la
moralité, le respect du prochain, et surtout l’inaliénabilité de la dignité. Que les portes du
paradis soient grandement ouvertes à ceux qui ne sont plus parmi nous ; longue et accomplie
vie à ceux qui sont toujours là.
Sigles et acronymes
ANAT : Agence National d’Aménagement du Territoire
ANSD : Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie
CPET : Contrat de Plan Etat-Région
DAT : Direction de l’Aménagement du Territoire
DEEC : Direction de l’Environnement et des Etablissement Classés
DEPAS : Division des Etudes Prospectives et Analyse Spatiale
DEPONAT : Déclaration de Politique National d’Aménagement du Territoire
DPS : Direction de la Prévision et de la Statistique
LOAT : Loi d’Orientation pour l’Aménagement du Territoire
PNASCOT : Programme National d’Aménagement pour la Promotion de la Solidarité
et de la Compétitivité Territoriale
PNAT : Plan National d’Aménagement du Territoire
SES : Situation Economique et Sociale
SNAT : Schéma National d’Aménagement du Territoire
Sommaire
Sommaire ......................................................................................................................... 1
Contexte générale de l’étude ............................................................................................ 5
Problématique .................................................................................................................. 9
Objectifs de l’étude ......................................................................................................... 12
Hypothèses ..................................................................................................................... 12
Méthodologie ................................................................................................................. 13
Définition des concepts ................................................................................................... 15
Première partie : Aménagement du territoire au Sénégal entre
rupture et continuité ......................................................................................... 22
Chapitre I : PARCOURS DE L’AMENAGEMENT AU SENEGAL ............................................. 23
Chapitre II : LES ANCIENS ET NOUVEAUX DEFIS DE L’AMENAGEMENT DU TERRITOIRE AU
SENEGAL ....................................................................................................................... 32
Conclusion partielle ...................................................................................................... 37
Deuxième partie : Prospective, projet territorial, et patrimoine
historique et culturel ....................................................................................... 38
Chapitre I : PROSPECTIVE TERRITORIALE, DEMARCHES ET OUTILS ................................. 39
Chapitre II : PROSPECTIVE, PROJET TERRITORIALE, GOUVERNANCE, ET VISION................. 46
Conclusion................................................................................................................... 50
Conclusion générale ........................................................................................................ 51
Bibliographie .................................................................................................................. 53
Table des illustrations ................................................................................................... 58
Table des matières ......................................................................................................... 59
INTRODUCTION GENERALE
Contexte générale de l’étude
L’une des caractéristiques notables de la fin du XXème siècle au début de ce XXIème
siècle, demeure la constitution ou la confortation de grands ensembles économiques et
politiques reposant sur des bases objectives et concrètes de convergence à l’échelle
continentale ou régionale.1 À en croire John O. Igue (1995) les regroupements régionaux sous
la forme d’intégration régionale, dictés par le besoin d’une économie d’échelle, n’épargne
aujourd’hui aucun continent. Ces regroupements donnent lieu sur les autres continents
(Europe, Amérique…) à la déclinaison de visions, programmes et projets communs (Chartes,
politiques, monnaies...). Tandis que l’Afrique Noire, traversée depuis des siècles par des
crises de toutes sortes, douteuse quant à son avenir,2 peine toujours à décliner une vision
claire, « originale », commune et partagée de son futur, gage de sa renaissance tant annoncée.
Certainement, l’Afrique reste un continent où tous les grands défis, relatifs à
l’épanouissement des sociétés actuelles, sont à relever simultanément (autosuffisance,
éducation, cadre de vie, santé, infrastructures, sécurité des biens et personnes, croissance
urbaine, exode rurale, redynamisation culturelle…). Devant l’immensité des enjeux, certaines
littératures qui s’appuient à dessein sur une analyse des éléments négatifs (guerres, crises
politiques, statistiques et autres indicateurs synthétiques du genre IDH, PIB, taux…) et des
généralisations abusives conjecturent l’évanouissement de ce continent qui a vu naître
l’humanité. La logique de leur raisonnement postule des attitudes et mentalités anti-
développement (Axelle Kabou, 1991)3, si elle n’infère pas l’absence de perspectives voire
l’incapacité des africains à penser leur avenir ; et donc un scénario macabre que les afro-
pessimistes adoptent en prétextant de son réalisme…
Devant de telles positions, tout effort de réflexion qui ambitionne de proposer des issues, tout
discours positif ou attitude optimiste, est considéré comme insensé, utopique ou spéculatif.
1. L’Union Européenne se fortifie de nouveaux membre et en est à 27 pays, l’ALENA renforce sa coopération militaire depuis les attentats du 11 septembre… 2. Jean-Marie Cour note, par exemple, que « Parmi les conséquences de la crise qui a frappé l’Afrique sub-saharienne pendant les années 1980-1990, la plus dommageable a sans doute été la perte de confiance en l’avenir qui a affecté tant les membres des classes dirigeantes que leurs partenaires extérieurs. » Club Sahel, (1998) ; dans le même ordre d’idée P. Merlin (1996) écrit que « (…) faute de progrès sensibles, les occidentaux sont pessimistes quant à l’avenir de ce continent, et les africains eux-même découragés. » 3. En effet pour Axelle Kabou (1991) « On ne peut s’empêcher d’être frappé par l’acharnement avec lequel
les Africains refusent la méthode, l’organisation. Ils gaspillent leurs maigres ressources, sabotent tout ce qui pourrait fonctionner durablement au profit du plus grand nombre. Ils détestent la cohérence, la transparence, la rigueur...» p.76
C’est le cas de ce projet prodigieux et pluriséculaire de la « renaissance africaine4 », idéalisé
certes, mais pourtant latente.
Est-ce une attitude responsable et acceptable, pour l’Africain en général, et
particulièrement l’intellectuel, que de jeter l’éponge devant l’ampleur du chantier de la
reconstruction ; de renoncer au combat pour la renaissance avant de l’avoir livré ; de dévier le
regard de la réalité manifestement terrifiante au lieu de l’affronter et la transformer
positivement ? La vision et l’ambition ne sont-elles plus permises ? N’est-ce pas le sage Ki-
Zerbo qui enseigne que « Tout est possible, il n’y a que l’impossible qui est un peu plus
difficile »5 ?
Comme pour dire que la réflexion sur le processus de développement ou encore de
transformation en mieux de l’Afrique reste toujours entière. Ni les visions pessimistes
dominantes qui ne voient d’autre avenir pour l’Afrique que la rétrogression ou au mieux la
stagnation6 ; ni même la démence de certains intellectuels africains abdicataires devant leurs
missions et responsabilités, ne pourraient empêcher cette cogitation salutaire.
Et l’Aménagement du territoire, conçu globalement comme, « l'expression spatiale des
politiques économique, sociale, culturelle et écologique de toute société»7, à travers ses outils
(notamment la prospective territoriale) et les objectifs qui lui sont assignés, jouera un rôle
moteur dans ce processus de métamorphose de l’espace africain.
Cependant, il est à noter que cet espace africain, éclaté en micro-Etat du fait de la
colonisation, loin d’être homogène, est constitué d’espaces différenciés aussi bien dans les
dynamiques qui les animent, que dans leur contenu, leurs aspects physique, organisationnel…
Agnès Lambert (1998) étaye ce fait, dans son analyse des relations inter-sociétales qui
assuraient la continuité de l’espace ouest-africain précolonial, en relevant que « celui-ci
(l’espace) n’était pas uniforme ni homogène ». Cette hétérogénéité du territoire a été d’autant
plus exacerbée par le charcutage colonial que le dynamisme économique — comme en
témoigne l’inscription de l’espace Ouest-africain médiévale dans « l’économie-monde »
(Braudel, 1979) — qui contribuait à la structuration de cet espace, s’en était trouvé
4. On ne renait pas ex nihilo, à partir de rien! ce que l’on comprend à travers la définition de Kaya J. P. (2007), pour qui, la renaissance africaine est « le besoin de renouer avec le contenu positif de l’héritage historique et culturel de l’Afrique ». 5. Joseph Ki-Zerbo : « Exhortation à former et à se former » discours de Dakar. 6. Rien n’est plus faux ! car, ainsi que le remarque Alvergne Christel (2003) « l’afro-pessimisme ne relève pas d’une réflexion élaborée, construite à partir de l’observation de la réalité. Et les visions du futur qui en découle procèdent plus de perceptions superficielles et passionnés (…) ». 7. Cf. Charte Européenne de l'aménagement du territoire – Charte de Torremolinos – adoptée le 20 mai 1983 à Torremolinos (Espagne)
chambardé.8 Il s’en est suivi, comme le note John Igue (1995), « un déséquilibre ou
disfonctionnement spatial » imputable à la logique de partage coloniale, qui fixa de nouvelles
frontières en fonction des intérêts exclusifs des puissances colonisatrices (Ama Mazama
2003 : 94), et sans prise en compte des réalités spatiales, historique et culturelle (vécu), de
même que des intérêts africains. D’où l’impertinence de ce tracé, d’autant qu’il ne coïncidait
et ne coïncide toujours pas avec les comportements spatiaux ou les logiques spatiales des
populations africaines.9
A la veille des indépendances, alors même qu’était requise, tel que l’avait fait Césaire
Aimé en 1959, « (…) une rupture définitive avec les structures coloniales »10 ; les Etats
africains (dans un mimétisme aveugle) se sont contenter de reconduire ou adapter les logiques
héritées du passé à leurs projets et à leurs intérêts (A. Lambert 1998 Op. cit.). Et
l’aménagement du territoire, en inscrivant ses politiques, ses actions dans ces cadres spatiaux
problématiques, a compromis d’avance ses chances d’atteindre ses objectifs (de
développement harmonieux de l’espace…).
En effet, les Etats de l’Afrique de l’ouest vont se lancés isolément dans des politiques
d’aménagement du territoire en gardant la configuration spatiale léguée par le colon, et dont
Bruno Stary (1995) relève la non viabilité culturelle et économique. Ceci peut être, comme
l’envisage J. O. Igue (1993) la cause des problèmes de développement en Afrique.
Au demeurant, le point commun à ces politiques d’aménagement, reste toutefois leur
inclusion dans des options sectorielles de développement davantage orientées vers la
recherche et le renforcement de l’unité nationale aux dépens de l’équilibre spatial global.11
Elles visaient à structurer l’espace national à partir de grands axes, de l’affirmation des
fonctions de capitales nationales et d’un réseau de chef-lieu, et enfin de la valorisation
sectorielle selon les ressources et les vocations supposées des différents milieux vus comme
des zones ou des régions de développement… (Frédéric Giraut, 2007). Le Sénégal n’échappe
pas à cette logique avec ses zones éco-géographiques.
8. Dans le même ordre d’idée, Agnès Lambert soutient que : Le partage du territoire en cercles, districts et territoires fractionnait cette économie-monde de l’Afrique précoloniale en « une myriade de petits espaces sociaux érigés en races, tribus et ethnies » [Amselle, (1986)]. Cf. Agnès Lambert 1998 Op. Cit. 9. La mobilité des populations ouest-africaines, leur aptitude à franchir les frontières pour tirer parti des
opportunités offertes dans un pays voisin, l’éclatement d’un même lignage en différents points du sous-continent, les réseaux marchands ouest-africains opérant dans des espaces trans-étatiques en sont des exemples vivants. (A. Lambert 1998) 10. Cf. Mazama Ama, (2003) op. cit. 11. Document - Cadre d'Orientation Générale de la Politique d'Aménagement du Territoire Communautaire de l’UEMOA, Ouagadougou, septembre 2003, 53p.
Néanmoins, le bilan que l’on peut faire de ces politiques d’aménagement du territoire
jusqu’à nos jours est négatif, et amène à s’interroger, à l’instar de Igue John (1995 op. cit.) sur
la capacité des états (affaiblis par les crises) à créer des dynamiques internes de
développement. D’où la nécessité d’un changement de perspective corroboré, entre autres,
par : la profusion de périmètres d’intervention et de mobilisation institués par de nouveaux
acteurs territorialisés (Frédéric Giraut, 2006), l’interconnexion des économies mondiales
impulsées par les effets de la globalisation (Amadou Diop, 2004), les exigences de la
renaissance africaine qui supposent la prise en compte du patrimoine historique et culturel
dans le processus de développement…
C’est dans ce sens, que la prospective territoriale, en tant qu’elle débouche (par sa rigueur
méthodologique, sa démarche rétrospective et anticipative…), sur une « vision partagée et
appropriée du futur territorial », demeure un outil privilégié du renouveau de l’aménagement
du territoire en Afrique et particulièrement au Sénégal.
Dès lors, un diagnostic long et minutieux de notre parcours historique, la considération
de l’ensemble des dynamiques propres à nos sociétés, la recherche de formules innovantes et
l’ouverture intelligente aux expériences différentes d’autres cieux, telles semblent être les
fondements de l’action contemporaine dans le champ de l’aménagement du territoire, et de la
réflexion prospective.
Problématique
Aborder la question de l’aménagement du territoire au Sénégal nécessite au préalable de
faire un diagnostic, une évaluation de la situation pour savoir si les objectifs que cette
politique s’est assignée, depuis ses prémisses, ont été atteints. Ne perdant pas de vue que de
façon générale, les objectifs étaient dominés par « la volonté d’assurer l’épanouissement et le
bien être de la population dans l’indépendance nationale par l’exploitation optimale de toutes
les ressources et potentialités du pays là où elles se trouvent. » Igue John O. (1995).
De prime abord, il est important de signaler le fait que la position stratégique du
Sénégal (Finistère de l’Afrique de l’ouest), expliquant le rôle central que ce pays avait joué
durant la colonisation (capitale de l’AOF et porte d’entrée de l’Ouest africain) lui avait permis
de bénéficier d’un important ensemble d’infrastructures.12 Si bien qu’à l’indépendance, Dakar
est l’agglomération la plus importante d’Afrique de l’Ouest et le Sénégal figurait parmi les
pays les plus fortement urbanisés avec 23% de sa population vivant dans les zones urbaines
(Jérôme Chenal, 2009 : p.106).
Carte 1 : Les villes en Afrique de l'ouest et du centre en 1960
Cependant, sur le plan de l’organisation spatiale, la colonisation allait léguer, des
déséquilibres et disparités13 que l’Etat indépendant du Sénégal va essayer de résorber, mais en
vain, en axant ses premiers interventions en matière d’aménagement territorial sur le monde
rurale (Alexis Campal, 2009), qui souffraient d’un sous-équipement criard. Ce qui fait dire, à
12. Chemin de fer, hôpitaux, écoles, routes, port, aéroport, université… 13. Déséquilibre entre régions d’une part ; entre le tiers Ouest (axe Dakar-Thiès) et le reste du pays d’autres part ; mais aussi, on peut y ajouter les disparités entre les villes-capitales régionaux et leurs périphéries rurales.
juste titre à Diop Amadou (2004 : 36p.) que « l’aménagement du territoire a une « origine
rurale » et procède de la volonté d’organiser la propriété foncière (Loi sur le domaine
national de 1963) et de mieux soutenir la politique de développement agricole ». Cette
focalisation sur le monde rural se manifeste par la mise sur pied du BATV (Bureau de
l’Aménagement des Terroirs et Villages) en 1961, transformé en service en 1962, avec
comme mission principale : l’équipement et l’intégration des zones rurales dans le tissu
économique. C’est aussi, dans la continuité, la création de plusieurs Sociétés Régionales de
Développement Rural (SRDR) telles que la SAED en 1965 au Nord, la SODEVA au centre,
SOMIVAC au sud… (Diop Amadou 2004 op. Cit.)
Toutefois, au fil des années, cette approche partielle (ruraliste) de l’aménagement
(axée sur le monde rural, et donc le secteur primaire) va se globaliser, notamment par
l’élaboration du premier Schéma national d’aménagement en 1968 ; la reprise de la promotion
du secteur secondaire industriel (avec la mise sur pied de la SONEPI en 1969) ; la lutte contre
la macrocéphalie de Dakar…
Mais très vite, une succession de crises (écologique, politique et économique) va disqualifier
les préoccupations d’aménagement du territoire. Le DEPONAT de 2010 en qualifiant cette
période « d’années d’immobilisme en matière d’aménagement du territoire » la situe entre
1987-1999 avec en toile de fond « l’ajustement structurel ».
Au sortir de ce coup d’arrêt au cours duquel sera adopté le PNAT en 1997 qui suivait six (6)
objectifs spécifiques,14 et de la reprise en main de l’aménagement de 2000 à nous jours, quel
bilan pouvons-nous faire du développement territorial au Sénégalais après 50ans d’exercice
d’aménagement ?
La macrocéphalie de Dakar est là encore plus oppressante avec son pendant l’exode
rurale qui prend des proportions inquiétantes ;
l’arrière pays sombre encore dans la léthargie économique, et se vide de ses esprits et
bras valides au profit et détriment de la mégapole Dakaroise ;
l’urbanisation est mal-maitrisée avec pour effet la dégradation accrue de
l’environnement urbain (du cadre de vie) ;
l’enclavement de zones d’habitation et de production est toujours une réalité ;
un découpage arbitraire du territoire avec des collectivités locales non-viables ;
14. 1) Développement équilibré des régions ; 2) lutte contre la macrocéphalie de Dakar ; 3) gestion rationnelle des ressources naturelles ; 4) l’autosuffisance et le plein emploi ; 5) le développement industriel ; 6) l’épanouissement de l’homo senegalensis.
la décentralisation ayant en charge, en appoint de l’Etat, le développement au niveau
local, n’a toujours pas encore joué de rôle majeur dans l’animation, la dynamisation
des territoires locaux ;
le déphasage, la dissymétrie entre les programmes politiques et les plans préétablis ;
mais aussi entre les plans nationaux, sectoriels et locaux.
l’absence d’une réelle vision partagée du territoire par une démarche prospective
participative rigoureuse....
Ces constats, en plus de ressortir les tares, et de représenter des défis du développement
territorial du Sénégal, dépeignent bien le tableau de l’organisation spatiale du Sénégal sur
fond d’incohérence et de déséquilibre, d’inconséquence de politiques publiques a-territoriales.
Ce faisant, aménager le ou les territoire(s)15 du Sénégal, c’est répondre à un certain nombre
d’enjeux ; les uns endémiques et inscrit dans le cours et le moyen terme en raison de leur
urgence permanente (inondation, exode, urbanisation, enclavement…) ; et les autres relevant
de perspectives lointaines, du long terme (le développement harmonieux du territoire). Pour
ce faire, l’aménagement du territoire, même s’il conserve ses objectifs et finalités, est tenu de
renouveler ses approches et ses principes d’intervention et de gestion (Amadou Diop 2004 op.
Cit.).
De même, la complexité et la rapidité des mutations en cours, des évolutions des territoires,16
sans évolution concomitant ou adaptation des institutions et des politiques publiques de plus
en plus inefficaces, prescrit une attitude, une démarche d’anticipation ou plus précisément de
prospective territoriale.
15. Selon Jean-Louis Coll (2003), analysant l’actualité de l’aménagement des territoires, il est plus pertinent de parler des territoires plutôt que de territoire puisque la notion de territoire ne renvoie plus à une donnée homogène et indifférenciée, mais à une réalité hétérogène et différenciée dont l’aménagement à justement pour objet de porter la cohérence et la cohésion. p.21 16. Comme soutenu ailleurs et juste raison : L’objet de l’aménagement consiste à agir sur des réalités dynamiques, évolutives selon les lieux.
Objectifs de l’étude
Globalement, cette étude ambitionne d’apporter des éléments d’analyse afin de
contribuer à la réflexion pour le renouveau de l’aménagement du territoire en Afrique de
manière générale et particulièrement au Sénégal.
Et spécifiquement, elle vise entre autres à :
aider à une prise de conscience accrue de la nécessité de prise en compte du territoire ou
des territoires avec ses/leurs multiples dimensions (notamment historico-culturelles) dans
le processus de développement ;
contribuer à la promotion de la prospective territoriale comme un outil essentiel à la
construction de notre avenir territorial, surtout dans notre environnement où tout change
en toute vitesse sans qu’on y ait une réelle emprise.
susciter un débat plus approfondi sur la place centrale des valeurs civilisationnelles dans la
reconstruction ou dans la construction du futur d’un pays.
Hypothèses
Notre travail reposera sur trois hypothèses de recherche essentiellement :
Hypothèse 1 : L’insuccès de l’aménagement du territoire et les changements en cours
imposent un état des lieux, et la déclinaison de nouvelles perspectives dans le domaine de
l’aménagement du territoire.
Hypothèse 2 : Une vision prospective, alors même qu’elle doit susciter l’adhésion des
populations, ne peut s’élaborer en faisant abstraction des croyances et valeurs culturelles
(héritages historiques et culturels), sans risquer de compromettre le projet territorial.
Hypothèse 3 : les projets, plans et visions régionaux ou continentaux doivent être
envisagé ou prise en compte dans les desseins nationaux de l’aménagement du territoire.
Méthodologie
Pour atteindre les objectifs que cette recherche s’est fixée, et vérifier les hypothèses
autour desquelles s’articuleront le travail, une méthodologie a été élaborée et se structure sur
deux points essentiels : la revue documentaire et la cartographie à partir de données
empruntées à des études d’enquêtes externes.
La revue et l’analyse documentaire ont permis de passer en revue les concepts qui
structurent ce travail de recherche, à savoir : l’aménagement du territoire, la prospective
(territoriale), la vision, la renaissance africaine… Ceci nous a permis de nous familiariser
et d’approfondir les concepts en raison de leur complexité et diversité ; de saisir leurs
évolutions, les changements et leurs implications, les influences etc. En somme, cette
étape nous a conduit à mieux cerner les dits concepts et à les recadrer dans le contexte du
Sénégal avec ses particularités. Pour ce phase de documentation, la Bibliothèque
Universitaire, la bibliothèque du Master 2 ATDDL, la DAT et la littérature grise sur des
sites spécialisés, ont été ciblés et visités tout au long de ce travail de recherche. La
définition des concepts est le résultat de cette première étape de revue documentaire
essentielle pour tout travail de recherche.
Les compléments d’informations, précisément sur la prospective territoriale au Sénégal,
en raison de la rareté sinon de l’inexistence de documents sur cet outil d’aménagement, a
été apporté par un entretien avec le responsable de la division des études prospectives et
analyse spatiale sise à la direction de l’aménagement du territoire. Cet entretien a porté
sur : l’historique de la prospective territoriale au Sénégal, ses outils, ses démarches, ses
résultats, ses limites et perspectives. Un guide d’entretien permettant de ressortir
l’ensemble de ses informations avait été élaboré à cet effet.
Enfin, nous avons procédé à une cartographie thématique à partir des données d’enquêtes
sur les différents secteurs de développement. Etant donné le court délai dont nous avons
disposé pour la réalisation de ce travail de recherche, et compte tenu de l’étendu et de la
complexité du thème de recherche, il nous a été difficile de collecter, traiter, analyser et
cartographier des données qui nous sont propres. C’est pour cela que nous nous sommes
appuyés, entre autres, sur les études économiques et sociales réalisées sur le Sénégal et les
données d’enquêtes socio-démographiques et socio-économiques produites par la DPS ou
l’ANSD, des ministères et bureaux d’étude. La cartographie a donc été réalisée sur la base
de ces données et informations. Elle a été faite à l’aide des logiciels usuels prévus à cet
effet (Mapinfo, Adobe illustrator), par la jointure de la fond de carte du Sénégal (digitalisé
à partir d’une image géo-référencée) avec les données y afférent, afin d’effectuer les
requêtes et ressortir les informations souhaitées. Ensuite, les cartes réalisées ont été
exportées vers le logiciel Adobe Illustrator pour l’amélioration de la visibilité et de la
lecture des cartes.
La dernière phase a été consacrée à la rédaction du document final, et ce dans le respect
des normes de rédaction de documents scientifiques.
Toutefois, ce travail de recherche, comme toute activité scientifique, n’a pas été exempt de
difficultés. Au fait, nous avons rencontré un certain nombre d’obstacles que nous avons tant
bien que mal contournés. La contrainte de temps en est l’essentielle, en ce sens que la gestion
du délai accordé pour la réalisation de ce travail a été compromise entre autres par :
le manque d’encadrement, si l’on sait l’importance capitale d’un regard expérimenté et
critique sur toute production académique ;
la justesse du temps imparti pour la réalisation de ce mémoire doublée des coupures
intempestives qui nous ont amené à reprendre à plusieurs reprises des portions
importantes de textes ;
l’indisponibilité de documents techniques sur la prospective territoriale au Sénégal, de
même que des personnes ressources ;
sans oublier les contraintes d’ordre financière…
Néanmoins, tout ceci ne justifie en rien les erreurs ou fautes d’analyse, bref, les
imperfections qui seront constatées. Et enfin, ce mémoire n’a pas manqué de consolider
nos acquis en apportant un plus à notre courte expérience en fait de recherche académique.
Définition des concepts
Aménagement du territoire
L’aménagement du territoire, envisagé de sa confusion originelle avec l’urbanisme17, est
relativement ancien (début du XXème siècle, précisément en 1910), mais demeure récente en
tant que concept et politique (postérieure à la seconde guerre mondiale). Cependant, il est
intéressant de noter que l’aménagement du territoire est un fait qui ne date pas d’aujourd’hui,
en ce sens que la réalité à laquelle il renvoie a quasiment toujours existé. L’homme ayant
depuis les temps immémoriaux organisé son espace en fonction des ressources dont il
disposait, de ses besoins, de ses réalités socio-culturelles, mais aussi de ses contraintes.
Ceci dit, c’est surtout la période couvrant l’immédiate après seconde-guerre (1939-1945) qui a
vu la naissance et la diffusion des pratiques d’aménagement du territoire (Monod, De
Castelbajac, 2002), devenant ainsi une activité systématique et un des aspects importants de
l'action politique.
Toutefois, l’aménagement du territoire reste une notion qui ne se laisse pas saisir
commodément. Certaine de ses définitions18 peuvent paraître simples et réalistes, mais sa
compréhension est loin d’être évidente. En effet, un certain flou sémantique, tenant de sa
versatilité définitionnelle, entourait le concept d’aménagement du territoire. Flou qui s’est
précisé au fil du temps, élargissant son champ d’intervention ou d’application (intégration des
zones rurales) et devenant aussi multidimensionnel. Nzisabira J. (1997) retrace clairement
cette évolution en consignant, au sujet de l’aménagement du territoire, que « ses enjeux, ses
acteurs et ses stratégies se sont diachroniquement précisés en trois étapes : l’aménagement
du territoire comme urbanisme stricto-sensu, l’aménagement du territoire comme
décentralisation de l’activité industrielle et l’aménagement du territoire comme planification
régionale ou décentralisation du développement ».
Par ailleurs, approcher l’aménagement du territoire en termes de définition caractérise
l’instabilité de celle-ci en ce qu’elle s’énonce différemment selon l’époque, le locuteur,
17. La notion d’urbanisme est mentionnée d’après Pierre-Alain Rumley (2002) pour la première fois en
1910 dans la revue de la Société neuchâteloise de géographie. Aussi, Diop Amadou (2004) remarque que Dans plusieurs pays Européens, l’aménagement du territoire trouve, certainement, sa source dans l’urbanisme. 18. Comme tout concept, il n’existe pas une définition consensuelle de l’aménagement du territoire ; mais il
subsiste néanmoins des définitions (que nous verrons plus loin) qui permettent de bien cerner le concept, c'est-à-dire son objet, ses enjeux, ses objectifs…
l’espace et les intérêts souvent contradictoires qu’elle recouvre (Jérôme Gastambide 2008).
Ainsi, sens était donné à l’aménagement du territoire en fonction des réalités propres et des
objectifs que poursuivaient les Etats. Selon le cas l’aménagement aura, entre autres exemples,
comme ambitions de :
Atténuer le déséquilibre engendré par la présence d'une capitale trop peuplée et
concentrant une trop grande part des activités économiques. C’est le cas de la France
(Paris et le désert français), mais aussi du Sénégal.
la mise en valeur de l'intérieur du pays, comme au Brésil, mais aussi le Sénégal, où une
large partie du territoire est très peu peuplée, mal desservie et très peu exploitée.
une meilleure répartition de la population, comme en Indonésie, où des îles presque vides
se trouvent au voisinage d'îles incroyablement peuplées.
le développement économique par une politique de grands travaux permettant d'étendre
l'agriculture irriguée et de fournir des matières premières à l'industrie, comme en Egypte et
au Pakistan...19
Il ressort de la lecture de ces objectifs poursuivis par l’aménagement du territoire, que
ce dernier à un caractère curatif, car dans tous les cas cités, il vise à résorber un déséquilibre
ou une anomalie sur le plan de l’organisation spatiale, conséquence des mauvais choix
économico-politiques, et donc de développement. De sorte que l’aménagement du territoire
est décliné par l’un de ces concepteurs, en l’occurrence Claudius Petit, comme étant « la
recherche, dans le cadre géographique, d’une meilleure répartition des hommes en fonction
de ressources naturelles et des activités économiques » (Yves Madiot, Renan LeMestre
2001). Dans le même ordre d’idée, Alphonse Yapi-Diahou (2005), après un bref aperçu du
parcours du concept, déduit que l’aménagement du territoire vise en permanence une
adéquation entre trois éléments fondamentaux, à savoir : l’homme, les ressources et l’espace.
Ce faisant, l’aménagement renvoie en définitive à l’idée d’organisation, d’équilibrage, de
fonctionnalisation et de mise en cohérence de l’espace et de ses composantes… avec comme
finalité, l’homme, son bien être, son épanouissement20... C’est pris sous cet angle que
l’aménagement du territoire demeure donc une préoccupation universelle, telle qu’exprime
19. In L’Aménagement du territoire http://www.memo.fr/article.asp?ID=THE_ENV_002 20. En effet, l’aménagement du territoire, selon Catherine Dubois (2009) vise l’organisation volontaire des
territoires au bénéfice « des sociétés qui les occupent ». Pour Beaujeu-Garnier J. (1982) « Ce qui distingue l’aménagement du territoire par rapport aux autres systèmes de développement planifié ou régulé, ce sont les préoccupations sociales, ce sont les soucis de l’homme » cf. « Réflexions sur l’aménagement du territoire » in Travaux de l’Institut de Géographie de Reims, n°51-52, 1982, p. 3-10.
dans la définition laconique proposée par Jean Louis Coll & al. (2004) qui fait de
l’aménagement du territoire, « la dynamique spatiale du développement ».
En outre, un certains nombres de mutations encours, liées à la mondialisation, aux
regroupements régionaux, à la décentralisation… ; mais également à la promptitude et à la
complexité des évolutions territoriales, imposent un réexamen de l’aménagement du territoire.
En réponse à cette exigence, l’expression même « Aménagement du territoire » s’est muée,
dans son bastion français, en « Aménagement, compétitivité et développement durable des
territoires » (F. Giraut, M. Vanier 2006). En Afrique, et particulièrement au Sénégal,21 la
notion de compétitivité territoire fait son apparition dans le champ lexical de l’aménagement
du territoire, et représente selon Igue John (1995) à la fois un objectif et une contrainte.
La prospective territoriale
Parler de la prospective territoriale nécessite au préalable d’éclaircir le concept de
prospective tout court, en faisant un détour par celui de l’anticipation. En effet, l’anticipation
a toujours été une préoccupation forte de toutes sociétés (Pierre F. Gonod, Jean-Luc Gurtler,
2002). Cette pensée tirée de la sagesse africaine, « construis ton puits avant d’éprouver la
soif », et certaines pratiques ou activités (préparation des champs avant l’hivernage…)
traduisent bien cette conscience de l’anticipation en Afrique.
Ainsi, l’approche de la prospective par la notion de l’anticipation est d’autant plus nécessaire
que, selon Gonod et Gurtler, « la prospective serait la forme moderne de l’anticipation. »
L’origine du mot prospective, prospectivus, remonte à la fin de l’empire romain et
signifie « d’où l’on a de la perspective ».22 Prévost René (1965), soulignant que l’étymologie
du mot « prospective » suffirait à nous indiquer la signification fondamentale de cette
discipline, avance que la prospective vient du latin « Prospecto » qui signifie « regarder en
avant avec l’idée d’attendre, d’épier ».23 Ailleurs, Bertrand de Jouvenel24 met en avant la
piste verbale qui voudrait que le mot prospective tire ces racines du verbe latin "prospicere"
qui signifie "regarder au loin", ou "de loin, discerner quelque chose devant soi". Néanmoins,
21. Le Programme National d’Aménagement pour la Promotion de la Solidarité et de la Compétitivité Territoriale (PNASCOT), qui constitue le plan de mise en œuvre du PNAT, place la compétitivité parmi ses préoccupations. Cf. DEPONAT - 2010 22. Gaffiot F, 1934, « Dictionnaire illustré latin-français », Hachette, Paris, p.1263. 23. Max Wientzen « Rétrospective et prospective » Lille, le 18 juin 1998 (consulté le 06/10/2010 sur le site : http://www.missionspubliques.com/pdf/14-prospective.pdf 24. Cf. « La prospective territoriale : outil d’analyse, d’innovation et de développement territorial. » in http://vision2025.uqac.ca/colloque2004/cahierdp/Prospective.pdf, consulté le 06/10/2010.
prospectivus, Prospecto ou prospicere appartiennent à la même famille et ont en commun la
préposition « pro » qui a, aussi bien en latin qu’en grec, le sens de « en avant ».
Il parait évident, après ce bref aperçu étymologique, que la prospective renvoie à l’idée de
discerner, de regarder devant soi, en avant, loin ou au loin… ; mais aussi elle évoque plus ou
moins explicitement l’idée de patience (attendre), d’observer (épier), de prudence... Par
conséquent, ces idées sus mentionnées sont non seulement définitoires de la prospective, mais
cadre à quelques exceptions près avec la caractérisation de « l’attitude prospective »
proposées par Gaston Berger : « Voir loin, voir large, analyser en profondeur, prendre des
risques, penser à l'homme. »25
Par ailleurs, en tant que support de planification, outil d’aide ou d’éclairage de
décision, et même discipline scientifique, la prospective demeure un concept
quinquagénaire.26 Dans le contexte français, les bases de cette pratique ont été jetées par
Gaston Berger dès 1955 (Philippe Durance, 2008), alors que son équivalent dans la situation
anglaise, notamment les « Futures Studies », ont éclos vers les années 1950, particulièrement
au sein de l’administration militaire des Etats-Unis (Emilie J. K. Mutombo & al. 2007).
L’environnement d’émergence de cet exercice de construction de l’avenir, qu’est la
prospective, est historiquement le même que celui de l’aménagement du territoire, c'est-à-dire,
durant la période de reconstruction consécutivement à la seconde guerre mondiale. Mais
surtout, la prospective s’est réaffirmée par une remise en question des méthodes de gestion
publique et des démarches classiques (faites de prévisions) qui ont montré leurs limites quant
au long terme.
Cependant, il est à noter, comme le fait remarque Guy Loinger (2005), que : La
prospective n’est pas d’un simple exercice d’anticipation. C’est une façon d’analyser la
réalité que l’on entend faire évoluer. C’est une méthode et une attitude. C’est également une
manière d’infléchir l’avenir. De même, elle représente un mode de connaissance
essentiellement orienté vers l’avenir en vue d’éclairer l’action.
Au demeurant, depuis le début des années 1990, on assiste au développement d'un
nouveau champ d'application de la prospective : les territoires. Ceci a donné naissance à ce
qu’il est convenu de nommer la « prospective territoriale » qui ne serait qu’une application de
25. Bibliothèque de France (1967), « Etapes de la prospective », Paris, Presse Universitaire de France, 337p. in http://www.laprospective.fr/dyn/francais/memoire/etapesprospectives.pdf (la prise de risque et la finalité humaine) 26. « (…) La prospective, sous ses diverses variantes n’a que cinquante ans » In Pierre F. GONOD, Jean-Luc
GURTLER (2002), « Évolution de la prospective », Revue OCL volume 9. Numéro 5. Septembre-octobre 2002, 16p
la prospective aux territoires dans leur diversité. A en croire Guy Loinger (2005 op. cit.), la
prospective territoriale est la forme localisée de la prospective générale. Elle obéit aux lois
générales de la prospective appliquées à un champ d’intervention particulier, celui de
l’élaboration d’un projet de territoire (Ph. Durance, M. Godet & al., 2007).
D’autre part, un fait largement partagé par les auteurs, est que la prospective
(territoriale) n’est pas une science. Manuel Castells, dans son papier intitulé « Théorie et
idéologie en sociologie urbaine » établit qu’une science se caractérise ou se définit d’abord
par l’existence d’un objet théorique propre, lui-même suscité par un besoin social de
connaissance d’une partie du réel concret. La prospective répond t-elle à cette stipulation ?
A juste titre, Joël Creusat (janvier 2005) argue que La prospective territoriale n’est pas une
science au sens où elle ne dispose pas d’un objet propre, de méthodes d’investigation avec
des protocoles établis et de critères internes et externes de validation des résultats. Elle se
propose d’assembler différents savoir-faire, de combiner des méthodes venues d’horizons
divers et fait une grande place à la pluridisciplinarité en associant des chaînes de
raisonnements rarement réunies.
Vision prospective
Dans les discours, très souvent, il est exprimé le besoin d’une « vision » ; vision qui
permettrait de remédier, transformer ou transcender une situation trouble, non-désirée, bref !
une situation d’impasse… La vision loin d’être une fin en soi, est souvent suivie, tel que
l’indique Van Der Helm (2005 : p.15), d’un véritable projet pour développer ou réaliser cette
dite vision.
A quoi cette notion de vision renvoie t-elle ? Pourquoi tant d’insistance sur ce concept qui, il
faut le noter au passage, représente également un objectif de la prospective avec lequel elle
reste intimement liée27 ?
En se référant à Emilie J. K. Mutombo & al. (2007, op. Cit.), la vision est un terme anglais
qui, s'il est souvent repris tel quel en français, devrait plus précisément être traduit par
"représentation du futur". Aussi, il est important de remarquer que chaque peuple à développé
sa propre vision du monde, sa propre représentation du monde qui a assuré sa conduite en que
société. Van Der Helm (2005) étaye ces propos en relevant que « Depuis l’avènement de
l’histoire, la vision du futur donne sens à l’existence humaine, notamment par le sacré et par
27. Il revient souvent dans les travaux sur la prospective, qu’elle débouche ou qu’elle permet de construire
une vision, fut elle « du futur », « partagée », « stratégique » etc… (les visions sont liées à la prospective descriptive)
l’au-delà ». Et au même auteur de conclure que le phénomène vision s’inscrit dans le long
terme et, par conséquent, doit faire appel à la prospective.
Une autre perspective, qui associant la vision au désir, conçoit « la vision comme le support
du désir, une étape dans l’attente de son accomplissement dans la création ». Ainsi, le
phénomène vision est fondé dans le désir (Lebrun Chantal, 2003); de même que le désir est le
moteur de la prospective (Godet, Michel, 1977).
La renaissance africaine
S’il y a un concept qui revient très souvent dans les travaux et les discours, un vœu qui
avait nourri et continu de nourrir beaucoup d’espoir pour l’Afrique, c’est bien celui de
« renaissance africaine ». N’en déplaise à certains intellectuels qui clament tout haut l’absence
de vision d’avenir en Afrique,28 nous appréhendons la « renaissance africaine » telle une
vision d’avenir d’autant plus qu’elle s’inscrite dans le long terme que le Pr. Jean Charles
Coovi-Gomes affirme le caractère prospectif29 de ce concept utilisé pour la première fois par
Cheikh Anta Diop30. Qu’est ce donc la « renaissance Africaine » ?
De prime abord, il est crucial de faire comprendre le phénomène de renaissance tout
court, en se fondant sur des expériences puisées dans l’histoire du monde. En effet, plusieurs
révolutions dans beaucoup de sociétés qui, à certain moment de leur parcours historique ont
sombré dans une longue période de crise, des troubles ou d’obscurantisme, ont été sous-
tendues par un objectif de renaissance ou de réveil. Théophile Obenga (2004) titrant :
« Renaissance », phénomène assez courant dans l’histoire humaine, note que dans l’Egypte
pharaonique, la "re-naissance" était appelée ouhem mesout/uhem mesut, c’est-à-dire,
littéralement : la "Répétition-des-Naissances", après une période socio-politique trouble.
Obenga poursuit qu’au lendemain de la seconde guerre mondiale, précisément le 12 août
1949, Churchill (1874-1965), homme de très grande vision, dans son discours prononcé à
Strasbourg, Place Kléber, parle bien de renaissance : "Ainsi, nous trouverons le chemin de la
renaissance ...".
Dans le même sens, l’ère Meiji sous le règne de l’Empereur Mutsuhito (1852-1912), le
Sionisme conçu comme un double mouvement de retour du peuple juif de la diaspora vers la
28. Christel Alvergne : envisage la situation de l’Afrique à travers l’absence de visions et de discours cf. (Jean Louis Coll & al., 2004) ; et Kum’ A Ndumbe III (2000) soutient que : nous succombons de notre manque de visions pour l’avenir collectif de nos pays et notre continent. 29. Comité France du FESMAN, « Table ronde-débat sur la renaissance africaine », sous le parrainage de l’ambassade se Sénégal en France, du consulat général du Sénégal à Paris et de la délégation permanente du Sénégal auprès de l’UNESCO, Paris-2010, in www.kamayiti.com 30. Cheikh Anta Diop 1948, « Quand pourrait-on parler de renaissance africaine ? » in "Le Musée Vivant" (Paris), N° Spécial, novembre 1948, pp. 57-65, illustra.
Palestine et aussi de développement d’Israël après l’holocauste, sont perçus comme des
exemples de renaissance… Cependant, la Renaissance la plus connue dans l’historiographie
mondiale est la « Renaissance Européenne », commencée en Italie, et qui a duré en gros du
14e au 16e siècle. Et à Doué Gnonsea (2003) d’arguer à ce sujet que L’Europe de la
renaissance et la France de Napoléon Bonaparte vont-elles puiser aux sources de leurs
patrimoines historiques grec et romain pour trouver de nouveaux souffles de développent et
de progrès. De sorte que la renaissance africaine est déclinée comme : « Le besoin de renouer
avec le contenu positif de l’héritage historique et culturel de l’Afrique » Kaya Jean-Pierre
(2007), pour une nouvelle créativité des Africains dans le monde d’aujourd’hui où il s’agit
non seulement de "recevoir" mais aussi de "donner", de "participer", de "construire", d’"agir"
(Th. Obenga 2004 op. cit.).
En définitive, il faut retenir que la renaissance africaine est un processus à long
terme31 qui part, pareillement à toute renaissance ou étude prospective, d’un diagnostic
scrupuleux du passé et du présent africain avec ses réalités ; afin d’identifier les enjeux futurs
et les défis majeurs, du continent et de sa diaspora, à relever. Et comme tout processus, elle
est assortie d’un cadre méthodologique et stratégique décliné en actions concrètes pour la
réalisation des objectifs, et donc de cette vision.
31. Th. Obenga (2004 op. cit.) propose des étapes et stratégies, échelonnées de 2005 à 2100-2150, pour aboutir à la renaissance africaine, et insiste qu’il faut un scenario auquel l’Afrique puisse se confronter pour exercer pleinement ses capacités, et construire son bien-être, dans le monde qui avance et progresse (…).
Première partie :
AMENAGEMENT DU TERRITOIRE AU SENEGAL, ENTRE RUPTURE ET CONTINUITE ?
« L’aménagement du territoire, c’est la vie même d’une
société, la synthèse de ses choix de développement. C’est la marque,
dans la géographie d’un pays, de son idéologie, de ses espoirs, de ses
hésitations aussi.» (Yves Madiot, Renan Le Mestre 2001)
De nos jours, la problématique de la considération de l’aspect spatiale voire territoriale
des politiques publiques (enjeu central des politiques d’aménagement du territoire) est une
préoccupation aussi pressante pour l’Afrique et le Sénégal aujourd’hui, qu’elle ne l’a été à
l’indépendance (il y a 50ans). Cela est dû à un constat d’échec patent des politiques
d’aménagement du territoire qui restent encore à revisiter et à redéfinir dans de nouveaux
contextes et cadres territoriaux.32 En effet, les politiques, plans et autres schémas élaborés, au
cas où ils sont mis en œuvre (parce qu’ils ne le sont pas souvent), n’ont pas produits les effets
escomptés. Si bien que le débat sur l’actualité de l’aménagement en Afrique se pose en
termes, de prise de conscience de la nécessité de l’aménagement, de renforcement voire de
renouvellement des outils, méthodes et démarches à l’aune des nouveaux enjeux.33
C’est autour de ces questions que se structura cette première partie, en insistant dans un
premier temps sur le comportement des secteurs clés de notre développement, sur l’évolution
de l’aménagement du territoire au Sénégal, et en second lieu sur les défis qui se posent à cette
politique présentement et dans le futur.
32. Plusieurs travaux ont évoqué la nécessité du renouveau de l’aménagement du territoire en Afrique : Christel Alvergne (2002) plaide une renaissance des politiques d’aménagement du territoire en Afrique de l’Ouest ; Diop Amadou (2004) suggère un renouvellement d’approches, de principes d’intervention et de gestion ; Alphonse Yapi-Diahou (2005) aborde cette question en termes de défis ; et Igué John (1995) parle de l’entièreté du débat sur la dimension spatiale du développement… 33. La décentralisation et la recomposition territoriale, la construction régionale, la complexification de l’évolution socio-économiques…
Chapitre I : PARCOURS DE L’AMENAGEMENT AU SENEGAL
I. Présentation du Sénégal
1. Eléments géographiques
Le Sénégal occupe la position la plus à l’ouest du vaste continent africain. Position
consacrée par sa presqu’île du Cap-Vert située au confluent de l’Europe, de l’Afrique et des
Amériques, et représentant un carrefour de grandes routes maritimes et aériennes.34 Il est situé
entre la latitude 12°8 et 16°41 Nord et la longitude 11°21 et 17°32 Ouest, et couvre une
superficie de 196.712 km2. Le territoire est bordé au Nord par le grand fleuve du même nom
qui le sépare de la Mauritanie, à l'est par le Mali, au Sud par les deux Guinée (Bissau et
Conakry) et à l'Ouest par l'Océan Atlantique.
Le relief est généralement plat avec une altitude
inférieure à 50 m sur 75% du territoire ; le point culminant
se situant à l’extrême Sud-Est, sur les contreforts du Fouta-
Djallon à la frontière guinéenne,35 constitué par le mont
Assirik (525 m).36
En outre, il est arrosé par plusieurs cours d’eaux dont entre
autres : les fleuves Sénégal, Casamance, Sine-Saloum et les
ramifications du fleuves Gambie. Ce qui, ajouté aux lacs,
rivières, et à une pluviométrie d’une importance graduelle
(moins de 300mm au Nord à plus de 1000mm au Sud)
confère au Sénégal un potentiel hydrographique et
hydraulique non négligeable.
Carte 2 : Situation géographique du Sénégal en Afrique37
Aussi, il faut relever que la situation géographique particulière du pays autorise
l’alternance de plusieurs masses d’air d’origine et de caractères différents. Cette position
ajoutée à son histoire géologique imprime au pays une diversité des domaines climatiques, de
formations végétales (DAT-2008), avec la forêt au Sud, la savane arborée au centre et la
steppe sub-désertique au Nord.
34. BRAPA, ONU-HABITAT (2008), « Profil National du Sénégal », 40p. 35. Ibid 36. Comité National Habitat II, avril 2004, « Etude sur la sécurité de l’occupation foncière et immobilière et la bonne gouvernance. », rapport final, 116p. (p.10) 37. HG. MENSCHING DESERTIFIKATION DARMSTADT, 1990.P 55.
Le territoire sénégalais se localise dans la zone Soudano-sahélienne et présente six
zones éco-géographiques, chacune faisant l’objet d’un traitement spécifique en matière
d’aménagement. Il y a : le vieux bassin arachidier ; la zone sylvo-pastorale ; la région du
Sénégal oriental ; la Casamance ; la vallée du fleuve Sénégal et le littoral nord ou zone des
Niayes.
Du point de vue démographique, le portrait du Sénégal est à l’instar de celui des autres
pays de l’Afrique Sub-saharienne, et se caractérise par une forte croissance démographique
(avec une prédominance de sa jeunesse)38 surtout dans les zones urbaines.39 En effet, la
population Sénégalaise est passée de 2 750 000 habitants en 1950 à 12 853 259 habitants en
2010 (selon Perspective monde), soit plus qu’un quadruplement (4,4) de sa population en 60
ans, et donc un doublement environ tous les 25 ans.40
Figure 1 : Evolution de la population du Sénégal entre 1950 et 2010
DEMBA J.M. 2010, SOURCES DONNEES : BADIS 2005 – 2006, ANDS, RAPID (2009), PERSPECTIVE MONDE
Toujours au sujet de la démographie, le Sénégal a une densité moyenne de 61,9 habitants au
km2 en 2009. Toutefois, l’occupation humaine de l’espace se caractérise par de grands
déséquilibres entre l’ouest et l’est. En effet, plus de 75% des sénégalais vivent à l’ouest de la
ligne Saint-Louis, Kaolack et Ziguinchor.41 Les fortes concentrations humaines à l’ouest (la
Région de Dakar, la plus peuplée a plus 4549 habitants au km², à l’intérieur de laquelle les
zones comme Guédiawaye, Grand-Yoff ont plus de 20 000 habitants au km2) contrastent
38. Selon ANSD (2009), en 2008, 42,0% des Sénégalais ont moins de 15 ans, 53,3% ont moins de 20 ans. 39. L’accroissement naturel combiné à l’exode rural impose aux zones urbaines une croissance intenable sans commune mesure avec les possibilités d’accueil et d’offre de services des villes. 40. C'est-à-dire que l’échelle temporelle envisagée par les plans d’aménagement ou de développement (25 ans, prise comme l’échelle d’une génération) correspond à un doublement de la population. 41. Donc le Sénégal n’échappe pas à la littoralisation du peuplement avec 80% de sa population se trouvant à moins de 60km de la côte selon A. Diop (2004). Dans le même sens, « Plus de la moitié de la population (50,8%) réside dans l’axe Dakar (24,8 %) - Thiès (13,6%) - Diourbel (12,4%). (Rapport Enquête de Suivi de la Pauvreté au Sénégal (ESPS, 2005-2006), ANSD, Dakar, Sénégal 89p)
nettement avec les «No mans land» de Régions orientales (la Région de Tambacounda pour
une superficie de 59542, près du tiers du territoire, a une densité de 11 habitants au km2).42
Figure 2 : Répartition de la population du Sénégal par surface régionale en % en 2008
REALISEE PAR DEMBA J.M. 2010, SOURCES DE DONNEES : ANDS (2009)
Ces grandes disproportions sont sous-tendues par une urbanisation galopante. Près de 40,7%
des sénégalais vivent en ville avec un taux d’urbanisation de 46,8 % en 2008 (DAT-2008,
Atlas Final).
Enfin, sur le plan de l’organisation administrative et territoriale, le pays est constitué
de 543 collectivités locales ou territoriales réparties comme suit : 14 régions, (divisées en 45
départements), 113 communes (dont 5 villes), 46 communes d’arrondissements et 370
communautés rurales. La gestion de ces collectivités est assurée par les conseils régional,
communal ou rural, à la tête desquels se trouvent respectivement les Présidents de conseil
régional, des maires et des Présidents de conseil rural travaillant tous sous le contrôle des
représentants de l’Etat. L’objectif qui leur est assigné d’assurer le développement au niveau
au niveau local, par le transfère de neuf (9) domaines de compétence dont l’aménagement, est
rendu difficile par le manque de ressources (humaines et financier), des problèmes de
gouvernance etc.
2. Données socio-économiques
Il sera passé en revue succinctement les paramètres ou les secteurs clés du
développement, ceux qui ont une influence importante dans le fonctionnement de l’économie
et la vie quotidienne du Sénégal. Il s’agit principalement de l’Education, la santé,
l’agriculture, les transports, et succinctement, du télécom et de l’industrie…
42. DEEC (2010), « Deuxième communication nationale du Sénégal à la Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques », Ministère de l’Environnement de la Protection de la Nature, 177p.
- L’éducation demeure un secteur stratégique pour le développement, car c’est sur elle que
repose, à ne pas en douter, l’avenir du pays. Seulement, l’examen de la situation évolutive de
ce secteur montre des avancées nuancées. Le nombre de salles de classe en service est passé,
entre 2000 et 2009, de 18.554 à 41.348, soit un accroissement de 22.794 unités et un Taux
d’accroissement moyen de 9 %. L’effectif des enseignants du public a été multiplié par 2
puisqu’il est de 40.925 en 2009 contre 19.876 en 2000, soit une augmentation nette de 21.049
dont 7.779 femmes.43 Sur le plan académique de nouveaux établissements universitaires
régionaux ont vu le jour. A l’université de Dakar, de Saint-Louis et l’université Polytechnique
de Thiès sont venues s’ajouter les Universités de Bambey et de Ziguinchor, en plus d’une
multitude écoles ou instituts de formations techniques et professionnelles. Malgré ses progrès,
il faut noter que faute de places, des bacheliers ne sont pas orientés, et que les abris
provisoires font toujours office de classes dans beaucoup de zones.
- La santé : L’appréciation de ce secteur se fera en référence aux normes de l’OMS qui
établissent, en matière de couverture en personnel et infrastructures sanitaires, certains
ratios.44(voir tableau 1)
Tableau 1 : Répartition des infrastructures de santé du Sénégal en 2008
SOURCES : ANSD 2009, SES 2008
- L’agriculture est incontestablement le secteur de souveraineté le plus central, car sur elle
repose la sécurité alimentaire mais également la prospérité de plus de la moitié de la
population. Elle est soumise aux caprices du climat qui doublé au manque d’investissement, à
la dégradation des sols et à la non maîtrise de l’eau empêche la modernisation du monde rural.
43. Cf. Rapport 2009 de la Direction de la planification et de la réforme de l'éducation (DPRE) sur l'évolution les indicateurs de la scolarisation entre 2000 et 2009. Rapport EPT 2009 de l'Unesco Rapport EPT, 2010, Unesco. 44. Aussi, les normes préconisées par l’OMS en matière de couverture en infrastructures sanitaires sont les suivantes : 1 poste de santé pour 10 000 habitants ; 1 centre de santé pour 50 000 habitants et 1 hôpital pour 150 000 habitants. Et en personnel : 1 Médecin pour 10 000 habitants ; 1 Infirmier pour 3000 habitants ; 1 Sage Femme pour 300 Femmes en Age de Procréer (FAR), les femmes âgées de 15 à 49 ans
Carte 3 : répartition spatiale des espaces agricoles au Sénégal
HTTP : //WWW.CARTOGRAPHIE.IRD.FR-SENEGALFIG/SENEGAL PDF/ESPACE AGRICOLE.PDF (CONSULTE LE JEUDI 28/10/2010-
Les transports45 : Le secteur des transports constitue l’un des secteurs les plus dynamiques de
l’économie du Sénégal. En 2007, sa contribution au PIB s’est élevée à environ 4 %. Elle serait
du même ordre en 2008 (Ludovic Nguessan, 2009). De plus, les coûts élevés des intrants
notamment le prix des produits pétroliers, sont souvent répercutés sur l’ensemble des autres
secteurs de l’économie (SES 2008).
Tableau 2 : Répartition régionale du réseau routier classé
ANSD 2009, SES, 2008
Par ailleurs, en 2008, sur les 309 758 entrées de véhicules, 230 297 sont réceptionnés par
Dakar soit en tout 74,34% pour un kilométrage de route défavorable ou déficitaire, et une
superficie exigüe ; d’où son engorgement qui engendre des pertes de l’ordre de 100 milliards
à l’économie du pays.
45. Ludovic Nguessan – novembre 2009, « Le secteur des transports au Sénégal : enjeux et défis pour la réalisation des objectifs de croissance durable et de réduction de la pauvreté » – PFANE – GT Transports, 136p.
Tableau 3 : Répartition par catégorie de routes régulièrement inspectées
SOURCE : DIRECTION DES TRANSPORTS TERRESTRES
Le transport ferroviaire : d’une longueur totale de 1 086 km dont 934 km de voies principales
et 152 km de voies secondaires, le réseau de chemin de fer du Sénégal n’a connu aucune
extension depuis 1968. Ce réseau comprend deux (2) axes principaux : l’axe Ouest – Est, long
de 645 km, qui va de Dakar à Kidira en passant par Thiès. Cet axe se prolonge au Mali,
jusqu’à Bamako puis Koulikoro ; l’axe Sud - Nord, long de 193 km, qui va de Dakar à Saint-
Louis, en passant également par Thiès (L. Nguessan, 2009 op. cit.).
Le transport maritime : Ancienne rade militaire, devenue par la suite port de commerce, le
Port Autonome de Dakar (PAD) offre un vaste plan de 177 ha d’une profondeur comprise
entre 8,5 et 11 mètres. En plus de cela, nous pouvons ajouter six (6) ports secondaires : Saint-
Louis, Kaolack, Lyndiane, Salin, Djifer, Ziguinchor.
Dans le transport aérien : Le Sénégal dispose de 14 aéroports ouverts à la circulation
publique. Le plus important, l’aéroport international Léopold Sédar Senghor de Dakar, reçoit
96% du trafic passagers et génère 98% des recettes. Parmi les autres aéroports, quatre (4),
Ziguinchor, Cap-Skirring, Saint-Louis et Tambacounda, peuvent accueillir des vols
internationaux. D’autre part, il est à noter la construction du nouvel aéroport de Diass, projet
qui était prévu dès 1989 par le PNAT de même que le maintien en service de l’aéroport
LSS.46
Enfin, il faut noter les avancés notable dans le domaine des télécommunications avec
l’internet (essor du Wi-fi) et surtout la téléphonie mobile (Orange, Tigo, Expresso) qui
connaissent un développement spectaculaire. Quant à l’industrie, elle peine à se relever et
amorcer son essor en raison des chutes répétitives liées aux difficultés d’ordre logistique
(entretien et renouvellement machines), commercial (manque de débouchés), mais surtout
structurel…
46. Notons à ce sujet que le Président Wade, contrairement au plan, prévoit le remplacement de la zone occupée par l’aéroport LSS par une cité économique (des affaires).
En définitive, le bilan que l’on peut faire à l’aune de ces données socio-économique se
conjugue entre une croissance rapide et une jeunesse de la population, une dégradation des
ressources naturelles, une insuffisance et mauvaise répartition des équipements et
infrastructures sur le territoire avec comme corollaire un secteur productif peu performant.
C’est autour de ces défaillances que s’articule la stratégie du PNAT pour un développement
harmonieux et durable du territoire à l’horizon 2021.47
II. La politique d’aménagement du territoire
1. Une évolution en dents de scie
Sans perdre de vue, à l’exemple de Yves Madiot et Renan Le Mestre (2001), que le
territoire, (…) est depuis toujours l’objet d’un aménagement par la population qui l’occupe ; il
faut noter qu’au Sénégal, la conscience de la nécessité de l’aménagement du territoire repose
sur un vieil héritage colonial (Igue John 1995 op. cit.). Mais malheureusement, cet héritage
est dual, car il y a lié à cette prise de conscience de l’aménagement, l’autre facette de la pièce,
c'est-à-dire un déséquilibre spatial notoire. Ce qui, sans conteste, a rendu la gestion
développement territorial d’autant plus difficile au lendemain de l’indépendance que les
efforts consentis dans ce domaine paraissent sans impacts significatifs.48 Voici en quelques
lignes les étapes qui ont marquées le parcours de la politique d’aménagement du territoire au
Sénégal d’après le DEPONAT 2010 :
Les débuts de la construction d’une nation ou d’un Etat-nation sénégalais (1958 –
1966) se caractérise par
Tentatives de composition d’un territoire national (plan décennal) ;
Les opérations de recentrage (loi sur le domaine national, mise en place de sociétés de
développement, Politique de peuplement des zones sous peuplées (migrations
organisées)
La lutte contre la macrocéphalie de la région de Dakar (1967 – 1979)
Création de la Direction de l’Aménagement du Territoire (1967) ;
Elaboration d’un SNAT horizon 1995 ;
Opération de recomposition territoriale (mise en place des Communautés rurales ;
remodelage d’une partie du territoire national avec la création de la région de Louga
en 1976)
Les années fastes de l’Aménagement du Territoire : les prémisses des grandes
ruptures (1979 – 1986)
47. DAT (1999) « Paln National d »Aménagement du Territoire », document de vulgarisation, 31p. 48. La conclusion de Diop Amadou (2004) à ce sujet est explicite : « on peut noter que le bilan
géographique et régional de la colonisation met en évidence, l’organisation sélective de l’espace dont la logique d’exploitation laissa des germes lourds de conséquences quant au devenir du pays. »
Création d’un grand Ministère où l’Aménagement occupe une place centrale (MUHE).
Prise du décret portant élaboration d’un Plan National d’Aménagement du Territoire ;
Elaboration d’une esquisse du PNAT horizon 2000 en 1984
Les années d’immobilisme en matière d’aménagement du Territoire 1987 - 1999
Les élections présidentielles en préparation et les évènements post électorales marqués
par un couvre feu et l’état d’urgence consécutivement aux troubles survenus suite aux
résultats des consultations électorales ;
Les années sombres de l’ajustement structurel49 marquées, notamment, par : 1)
d’importantes restrictions budgétaires (réduction de la masse salariale de la fonction
publique), 2) la dévaluation du franc CFA ; 3) des troubles sociales et scolaires (une
année blanche en 1988 et une année invalide en 1990) ;
Cette situation de crise quasi généralisée a amené le gouvernement à finaliser et à
adopter en janvier 1997 le Plan National d’Aménagement du Territoire (PNAT) dont
les travaux d’élaboration ont démarré en 1980.
Les grandes ruptures : 2.000 – à nos jours
L’Aménagement du Territoire apparaît dans le libellé d’un Département Ministériel
(Ministère de l’Urbanisme et de l’Aménagement du Territoire) ;
L’élaboration d’un Plan de mise en œuvre du PNAT (Programme National
d’Aménagement pour la Promotion de la Solidarité et de la Compétitivité Territoriale
(PNASCOT),
Inscription d’un Programme sur l’aménagement du territoire au PTIP en 2007
(PNASCOT : 2008 – 2010)
Toutefois, il faut y ajouter la transformation de la DAT en Agence (ANAT), qui vient
parachever cette évolution institutionnelle de la politique d’aménagement du territoire du
Sénégal. Cette agence connait des balbutiements, et reste dans une nébuleuse dans la mesure
où rien n’est encore fait de façon concrète depuis un an. Et étant donné la place centrale
qu’occupe l’aménagement du territoire, ceci est problématique.
2. Pour une fin de l’aménagement du territoire « de plan »
Les études sur l’aménagement du territoire en Afrique ont fait état de l’absence de
véritables politiques dans ce domaine (John Igue 1995). C'est-à-dire, des politiques issues
d’un diagnostic rigoureux du comportement des différents secteurs de l’économie et de leurs
rapports avec l’espace, et débouchant sur un plan qui repose sur une véritable vision d’avenir
assorti d’un projet de société exécuté selon une périodicité définie. Le Sénégal ne fait pas
exception à ce constat, mais a néanmoins une tradition pluri-décennale de planification dans
49. A propos de l’impact de l’ajustement structurel sur l’aménagement du territoire, Igue John (1995) argue que « (…) ces programmes sans être des handicaps pour les politiques d’aménagement du territoire n’en constituent pas moins un frein à leur application dynamique sur le terrain ».
le domaine de l’aménagement du territoire. En effet, dès 1967 est élaborée l’esquisse du Plan
National d’Aménagement du Territoire horizon 1995, suivi en 1968 par le premier schéma
d’aménagement pour le même horizon. Depuis lors, se sont succédés schémas et plans dont
celui en vigueur (PNAT de 1997) vise l’horizon 2021. Toutefois, les actions concrètes en fait
d’aménagement sont limitées,50 et une évaluation de la première étape (dont l’échéance était
prévue en 2006) axée sur le renversement progressif des tendances actuelles (DAT, 1999),
montrera l’inefficience des actions réalisées. Entre autres raisons de ces difficultés, nous
noterons l’insuffisance des moyens techniques et financiers alloués au fonctionnement de la
DAT, l’instabilité institutionnelle51, la domination de l’approche projet…, comme pour dire
que l’aménagement du territoire, malgré les instruments mis à sa dispositions (LOAT), n’a
pas l’autonomie nécessaire et semble ne pas finalement avoir les moyens de ses ambitions.
Ceci nous conforte dans l’idée que l’aménagement du territoire au Sénégal est un
aménagement de « plan ». L’aménagement du territoire de « plan », traduit le manque de
volonté politique en vue d’une meilleure organisation de l’espace national, objet même de
l’aménagement. La cohérence des contenus, l’éloquence et la pertinence des textes et travaux
sur l’aménagement sont sans commune mesure avec les réalités du terrain qui paraissent
statiques voire régressives. De l’avis de certains acteurs de l’aménagement, les plans (PNAT,
SNAT…) malheureusement servent le plus souvent à garnir les tiroirs, ou de documentation
qu’à être exécutés et servir de documents de références pour les politiques de développement.
C’est comme si l’infrastructuration cohérente des besoins, des desseins, des logiques et
contraintes spatiales des acteurs… est un rêve inaccessible. Baden Powel ne fait-il pas savoir
que la meilleure méthode d’activité est de faire le plan de son travail, puis faire le travail de
son plan.
50. Malgré le volontarisme et les discours dans le sens d’une application rigoureuse et cohérente des PNAT, l’aménagement du territoire au Sénégal est négligé par les pouvoirs politiques. 51. L’ancrage institutionnel de la Direction de l’Aménagement du Territoire (DAT) est marqué par une très forte transhumance qui l’a amené à changer de 1978, année où elle a quitté le Ministère du Plan, à l’an 2002 année où elle s’est retrouvée encore au Ministère de l’Urbanisme, huit (8) fois de ministère de tutelle (Amadou Diop 2004). Et se retrouvait jusqu’à une date récente avec le Ministère du transport aérien, des infrastructures et de la coopération internationale dont il a encore été extirpé.
Chapitre II : LES ANCIENS ET NOUVEAUX DEFIS DE L’AMENAGEMENT DU TERRITOIRE
AU SENEGAL
I. Les défis d’hier
1. La macrocéphalie de Dakar
Depuis les années 70, la lutte contre la macrocéphalie de Dakar représente un des
objectifs centraux de l’aménagement du territoire. La région de Dakar polarise plus de la
moitié de la population urbaine. La structure politique du pays centralisant tous les pouvoirs
de décision à Dakar a joué un rôle important ayant abouti à l’hypertrophie de la capitale
nationale, tandis que les capitales régionales, qui devraient animer et structurer leur zone
d’influence, sont marginalisées (Amadou Diop, 2004). En effet, confinée sur la presqu’île du
Cap-Vert qui ne permet quasiment aucun développement horizontal des surfaces aménagées,
la région de Dakar, dont la superficie n’est que de 550 km², soit 0,28% du territoire national,
comptait en 200652 25% de la population nationale. Sa population est estimée à environ 2 640
000 habitants en 2008, avec une densité de plus 4000hab. /km2 et croît à un taux moyen de
2,5% l’an.
Carte 4 : Population et densité par région Sénégal 2008
Conception : Jacques Moïse Demba (2010)
52. CETUD, Septembre 2008, « Etude d’analyse de l’impact économique des projets d’infrastructures routières du PAMU ».
Elle abrite 95% des entreprises formelles (tous secteurs d’activité confondus) ; 87% des
emplois permanents ; 80% des Unité de Production Informelles (UPI) non agricoles53
employant environ 435 200 personnes (cf. Ludovic Nguessan, 2009). De plus, Dakar
concentre aussi la totalité des télévisons et des représentations diplomatiques, plus de 50% des
établissements académiques, des infrastructures culturelles et sportives (théâtre national, 3
grands stades…). Que reste t-il finalement pour l’intérieur du pays ?
Carte 5 : Habitants et population académique par région Sénégal 2008
Conception : Jacques Moïse Demba (2010)
Tout ceci est la preuve que les actions jusque là menées, sur le plan de la lutte contre la
macrocéphalie de Dakar, n’ont pas eu d’effet sur cette tendance à la concentration qui s’est
surtout intensifiée au détriment des régions intérieures qui devaient contrebalancer cette
tendance. De sorte que Dakar, concentrant les perspectives et les espoirs, est lieu de transit ou
de vie obligé de toute la population du Sénégal.
2. Le développement des régions intérieures
L’autre constante dans les défis de l’aménagement du territoire au Sénégal, reste le
développement des régions intérieures par la création de pôles régionaux de développement.
53. DPS Juin 2004, « Le secteur informel dans l’agglomération de Dakar ; performances, insertion et perspectives. », Résultats de la phase 2 de l’enquête 1-2-3 de 2003.
La démarche sénégalaise passe par une bonne planification stratégique des centres urbains de
la région. Il s’agit d’atténuer de façon significative l’influence excessive de Dakar sur le reste
du Sénégal et favoriser l’émergence de nouveaux pôles de développement à l’intérieur du
pays. Cette orientation introduit une nouvelle option de développement territorial axée sur la
polarisation et la métropolisation. Dans ce dispositif, les régions,54 traitées dans leurs
diversités et responsabilisées d’avantage, occupent une place centrale (DEPONAT 2010).
Mais, il parait évident au regard de la situation actuelle, que ces régions (par leurs
villes) peinent toujours à jouer leur rôle de métropoles d’équilibre pour freiner l’exode de leur
population et contrebalancer l’influence encore grandissante de Dakar qui centralise la quasi-
totalité des fonctions de développement. A ce propos Pierre Merlin (1996) citant Jean
Gottman indique que « l’aménagement du territoire à pour fonction principale et essentielle
d’établir une certaine justice sociale et économique entre les différentes pièces constituants le
corps géographique d’une nation. »
En tout état de cause, des perspectives sont offertes par les Contrats de Plan Etat-
Région (CPER) conçus comme un support essentiel des politiques d’aménagement du
territoire et qui ont l’avantage d’être un instrument souple, adaptable et différencié selon les
régions (Olivier Moulin et al. 2002). En effet, les CPER restent une démarche envisagés dans
le DEPONAT et consiste en une contractualisation globale et pluriannuelle entre l’Etat et les
régions. Outil de mise en œuvre du PNAT, les CPER sont un des moyens nécessaires pour
mettre en cohérence les projets régionaux initiés et mis en œuvre par une multiplicité
d’acteurs sur leur territoire.
Seulement, l’engagement financier conséquent de l’Etat envers les régions, associé à
celui des autres partenaires publics ou privés, de même que l’introduction de la prospective
territoriale55 dans la préparation des exercices de contractualisation, consacreront le succès de
cette formule originale de planification concertée et décentralisée.
II. Les défis d’aujourd’hui et de demain
1. Diversité et complexité des évolutions des territoires
La notion de territoire recouvre une réalité à la fois complexe et plurielle. Pour
exprimer cet état de fait, nous nous limiterons à la synthèse d’Alphonse Yapi-Diahou56 qui
54. Elle (la région) a une mission de coordination de la politique de développement de la région. En effet, la loi 96-07 du 22 mars 1996 confère à la région la mission d’élaborer le schéma régional d’aménagement du territoire. 55. Les exercices de prospective dans le cadre de la préparation des CPER ont le double objet de dégager des avenirs et des projets consensuels, et de servir d’outils de planification (P. Gonod, J-L. Gurtler, 2002). 56. In Jean Louis Coll 2005 (op. cit., pp. 39-58 )
nous permet de saisir les différents paramètres que recouvre le concept de territoire. En effet,
cet auteur rappelle que les espaces écosystèmes, même semblables, sont transformés, de
manière différente selon les groupes humains, en matrice d’existence sociale. Il en déduit que
« chaque société humaine produit donc son territoire qui lui est propre, une entité spatiale
qu’elle s’approprie et qu’elle marque de ses réalisations et de ses vécus (technologie, conflits
et relations dissymétriques internes et/ou d’origine externe…) au cours de son histoire. Il est
le lieu de relations… ».
C’est dire que le territoire n’est pas une fin en soi, une réalité figée ou statique. Il est un
espace dynamique, façonné, vécu et perçu57 différemment selon les sociétés et les époques, si
bien que pour Ch. Wiesmann et al. (2002), Le territoire est un construit social qui est
continuellement retravaillé au gré de l’évolution et de la manifestation des relations
territoriales.
En outre, en un demi-siècle, le territoire Sénégalais à l’instar des pays africains se
trouve aujourd’hui profondément transformé sur le plan morphologique, économique, sociale,
institutionnel, environnemental…58 Cependant, ces mutations des territoires semblent de plus
en plus inintelligible que, comme le fait remarquer Olivier Coppin, (2001), les relations qui
unissent une société, son économie avec son espace d'implantation sont complexes.
Et l’aménagement semble submerger par cette dynamique évolutive du territoire et de son
contenu, si bien que, les concepts, les données qui fondent les méthodes d’analyse ou de
prévision, ou encore les actions dans ce domaine ont des difficultés à cerner, dans sa
promptitude et son ambigüité, ce nouveau contexte. Il faudra ajouter qu’à cette diversité des
territoires, correspond une diversité des évolutions qui appelle à une adaptation des outils
pour permettre de rendre compte de cette multiplicité des situations à prendre en compte dans
les décisions d’aménagement du territoire.
Dès lors, il parait évident et impérieux que les démarches et les instruments de la
politique d’aménagement au Sénégal épousent les contours de ces réalités ; de même qu’il
faut mettre en place des méthodologies, des concepts et des outils qui prennent et rendent
compte de cette multiplicité des territoires et les conditions de leur mise en cohérence.
57. Pour certain, comme Guy Di Méo, le territoire est un construit social, c’est-à-dire une « appropriation à la fois économique, idéologique et politique (sociale donc) de l’espace par des groupes qui se donnent une représentation particulière d’eux-mêmes, de leur histoire » (cf. Guy Di Méo (2000, p. 40) 58. Christel Alvergne, (2002) relève aussi que la géographie économique et humaine a évolué rapidement.
Aussi, la décentralisation (et plus particulièrement la promotion des régions dans le champ de
l’aménagement) et le développement de la politique régionale Ouest africaine ont introduit
une complexité du jeu d’acteurs publics dans le champ de l’aménagement dont la référence
n’est plus exclusivement le territoire national.
2. Intégration régionale et continentale
Membre à la fois de l’UEMOA (Union Economique Monétaire de l’Afrique de
l’Ouest) et de la CEDEAO (Communauté Economique des Etas de l’Afrique de l’Ouest), le
Sénégal est un pays résolument orienté vers une coopération et une intégration économique
sous-régionale dans la perspective d’une union économique voire la création d’une fédération
des Etats de l’Afrique de l’Ouest (DEEC, 2010). Ce qui témoigne de la prise de conscience du
Sénégal des enjeux actuels d’infra-structuration de cette intégration régionale, qui pourrait
ainsi gommer ces découpages parfois inadaptés à la vie quotidienne et aux nécessités du
développement (Christel Alvergne, septembre 2002). A ce propos, B. Badie (1995) signale
que l’introduction de frontières coloniales à la fin du XIXe siècle en Afrique a eu pour
corollaire l’instauration brutale et arbitraire d’un modèle européen d’État et l’importation «
d’un ordre territorial et d’un aménagement de l’espace, tout droit sortis d’un modèle
westphalien abusivement universalisé.
L’intégration régionale voire africaine est un enjeu central pour le futur de la politique
d’aménagement, et aura d’après Igue John 1995 (op.cit.), pour mérite de créer une nouvelle
dimension spatiale de développement. Le même auteur de poursuivre que sur cette question
aussi, les problèmes sont loin d’être maîtrisés. Par conséquent, il est essentiel que les pays
prennent en compte la question de l’intégration dans la définition de leurs politiques
respectives d’infrastructures et plus globalement d’aménagement du territoire.
C’est donc à raison que l’UEMOA fait de l’institution d’une coordination des politiques
sectorielles nationales par la mise en œuvre d’actions communes et éventuellement de
politiques communes notamment dans l’aménagement du territoire, l’un de ces objectifs
majeurs (Igue John 1995).
Sans ignorer les obstacles59 à l’intégration et, de là même, à l’atteinte de ses objectifs
en matière de coordination et mise en cohérence des politiques, nous reconnaissons avec Diop
Amadou (2004 op. cit.) que L’avenir des territoires de l’Afrique, et en particulier du Sénégal,
59. Les causes de l’échec (des intégrations) sont nombreuses, tels les intérêts nationaux à courte vue, les
contraintes structurelles des Etats et les difficultés à réguler le marché.
se joue, désormais, à l’échelle du continent africain et mondial. La politique d’aménagement
du territoire doit agir en donnant une dimension africaine aux stratégies territoriales au
niveau de toutes les échelles, nationale, régionale et locale.
Conclusion partielle
Ce bref aperçu de la situation de l’aménagement du territoire au Sénégal démontre
sans conteste l’actualité et la prégnance de cette problématique qui reste encore entière.
Par ailleurs, deux constats sont à mentionner. D’une part, l’aménagement du territoire ne peut
être abandonné aux simples jeux des forces économiques, aux inspirations personnelles d’un
acteur (fut-il Président) ou de quelques acteurs (fussent-ils technocrates), sans se trahir. Car
nous reconnaissons avec Ph. Laurant cité Igue J. (1995 op. cit.) que « aménager le territoire
c’est introduire une rationalité là où jouaient de simples déterminismes naturels ou des
vouloirs individuels incoordonnées ».
D’autre part, l’aménagement du territoire, par ses plans, n’a pas vocation à s’accommoder aux
programmes d’un parti politique au pouvoir, sinon il se viderait de son sens. Les plans doivent
orienter les politiques publiques, et à l’aménagement, il incombe l’organisation du
développement économique sur l’ensemble du territoire.
Deuxième partie :
PROSPECTIVE, PROJET TERRITORIAL, ET PATRIMOINE HISTORICO-CULTUREL.
« Depuis son origine, l’être humain n’a cessé d’utiliser ses représentations du passé et du futur pour construire son présent. De la divination aux techniques de prédiction jusqu’à la prospective, les hommes ont cherché
sans cesse les moyens d’agir sur leur existence. »60
A partir de la fin des années 60, la planification du développement s’était
progressivement effacée, au profit des plans et programmes de court terme, d’assainissement
financier et d’ajustement structurel, rendus nécessaires par la succession de crises
économiques survenues entre 1973 et 1983.61 Ceci confinait le développement du Sénégal
dans un pilotage à vue qui le condamne à subir impuissamment les problèmes au lieu de les
anticiper ; c'est-à-dire, en dernière instance, à être sujet de son avenir plutôt qu’acteur.
Conscient de cet état de fait, et donc de la nécessité de maîtriser un futur qui semble vouloir
échapper à toute emprise, le Sénégal va introduire à partir des années 80 la prospective dans
les études de développement, notamment dans l’aménagement du territoire.
Cette deuxième partie de notre travail, s’attellera à retracer l’évolution, de même que
ses démarches et outils, de cette exercice de prospective, avant de dégager des perspectives.
Et enfin, il sera question d’aborder la conciliation de la finalité de la prospective (le projet
territorial) avec la vision du monde propre à nos sociétés.
60. Saphia Richou et Evelyne Bertin 26/09/2006 « Prospective et Psychanalyse : des espaces de transition pour bâtir le futur. », Prospective Foresight Network Publication, 13p. 61. Ministère du Plan et de la coopération – 1989, Etude prospective Sénégal 2015
Chapitre I : PROSPECTIVE TERRITORIALE, DEMARCHES ET FINALITE
I. LA PROSPECTIVE TERRITORIALE AU SENEGAL
1. Naissance et évolution de la prospective au Sénégal
Le point de départ de la prospective au Sénégal peut être situé aux alentours de 1076-
1977, période durant laquelle des essais avaient été menés sans permettre d’obtenir un
document achevé (Ludovic Nguessan, 2009). La première étude prospective véritablement
opérationnelle a eu lieu en 1989 : il s’agit de l’Etude prospective Sénégal 2015.62 Donc, c’est
vraisemblablement en cette année 1989 que la prospective pose ses bases au Sénégal.
Toutefois, il est à mentionner que c’est lors du Conseil Supérieur du Plan tenu le 29 juin 1987,
que le Gouvernement va décider de mettre en place un nouveau système de planification dite
« planification glissante », bâti autour de trois instruments complémentaires :
- une étude prospective sur la société sénégalaise à l’horizon 2015 : Sénégal, vision 2015 ;
- une loi - plan d’orientation à l’horizon de six ans : la loi d’orientation 1989 -1995 ;
- une loi - programme triennale d’investissements et d’actions publique : le PTIP 1989-1992
(Ludovic Nguessan, 2009 Op. cit.).
La prospective territoriale, n’étant que l’application à l’avenir d’un territoire de la
prospective générale (qui lui prête ses principes et méthodes), est du ressort de la DAT à
travers sa Division des Etudes Prospectives et Analyses Spatiales. Etant entendu qu’en
aménagement du territoire toute réflexion sur l’avenir d’un territoire peut ainsi s’assimiler à
de la prospective territoriale (Leleux Orane, Viver Camille, 2009-2010).
Par ailleurs, l’application de cet outil de planification territoriale a permis l’élaboration
d’études territoriales inscrites dans le long terme (20-25ans) dont entre autres : le SNAT ou le
PNAT… Il s’agit avec ses études d’identifier les enjeux futurs à fort impact territorial pour
permettre à l’action publique de corriger les disfonctionnements et d’anticiper prudemment
les changements.
2. Les démarches et outils
De prime abord, il faut savoir qu’en matière de prospective territoriale, la déclinaison
d’une méthodologie sera fonction de la forme de prospective (exploratoire63, normative64 ou
62. Présentation de la direction des stratégies de développement - http://www.minfinances.sn/textod02.html (consultée le 17/10/2010) 63. Qui se fonde sur des éléments statistiques et qualitatifs (les prévisions et les tendances), et travaillant
sur des horizons de 20 à 40ans ou plus. (F. Goux-Baudiment 2005) 64. Qui a pour objet le champ d’action de la puissance publique (F. Goux-Baudiment 2010), et reposant sur
l’initiation ou l’adaptation aux changements (F. Goux-Baudiment 2005 po. Cit.)
stratégique65) adoptée (Aliette Delamarre 2002), parce que les démarches diffèrent. Aussi, une
imbrication de plusieurs démarches dans une même étude prospective est envisageable, car les
démarche se complètent.
L’absence de documentation sur la prospective territoriale au Sénégal, nous contraint à une
description synthétique des démarches proposées par les prospectivistes d’autres cieux. Sur
cette base, il nous apparu que la démarche de prospective territoriale repose sur un certain
nombre d’étapes qui vont de la préparation ou mûrissement à l’évaluation du processus et des
résultats, en passant par les étapes phares dites de prospective et stratégique.
En effet, sur le plan théorique, plusieurs démarches à nombre d’étapes variables selon
l’auteur ou le contexte de l’étude, sont proposées dans l’exercice de la prospective territoriale.
Toutefois, il est à relever que les étapes de base (souvent au nombre de trois) restent les
mêmes, comme cela ressort de celles proposées par les auteurs ci-dessous (voir tableau).
Trois étapes de (F. Goux-Baudiment 2010)
Trois phases de (Ph.Destatte 2006)
Trois étapes phares
Comprendre Mûrissement et préparation Rétrospective et Diagnostic
Imaginer Prospective Anticipation ou prospective
Proposer Stratégie Choix stratégiques
Donc, de manière générale, la prospective territoriale s’organise en trois temps que Michel
Godet matérialise par les trois couleurs du triangle grec (le bleu de l’anticipation, le jaune de
l’appropriation et le vert de l’action). La logique de cette relation triangulaire se résume au
fait que le bleu de l’anticipation ne peut se transformer en vert de l’action qu’avec le jaune
de l’appropriation.
Figure 3 : Le triangle Grec66
Cependant, le choix d’une démarche s’imposant à toute recherche sur la prospective
territoriale, nous penchons pour celle ci-dessous qui représente la démarche tronquée de Ph.
65. Qui vise à mettre l’anticipation au service de l’action stratégique et du projet (Aliette Delamerre 2002) 66. Ph. Durance, M. Godet (2007)
Anticipation (vision de l’environnement
passé, présent et futur)
Action (Plan stratégique global
du territoire)
Appropriation (Proposition d’actions
locales)
Destatte (2006 op. cit.) proposée dans son « Guide pour mener un exercice de prospective
territoriale » (figure 4). Chaque étape est divisée en séquences qui permettent de lui donner un
contenu.
Figure 4 : La démarche de prospective territoriale
Aussi, il n’existe pas de méthode ou démarche universelle de prospective. C'est-à-dire que les
démarches, bien que transposables moyennant une adaptation contextuelle, sont modifiables
et donc perfectibles au gré des situations. D’où l’importance de la révision et de l’évaluation
du processus de prospective après chaque application. Ce que nous verrons dans le tableau ci-
dessous qui présente de manière détaillée et complète la démarche décrite plus haut. Ce
tableau inclut en plus des cinq étapes principales, l’étape préliminaire de préparation et la
dernière dite d’évaluation du processus et des résultats. Il renseigne également sur les
séquences qu’implique chaque phase de la démarche de même que les résultats attendus de
chacune d’elle.
Acteurs concernés
1. Identification et diagnostic
prospectif
2. Définition des enjeux à
long terme
3. Construction de la
vision commune
4. Désignation des
axes stratégiques
5. Mesures et choix
des actions concrètes
La démarche de prospective territoriale
III- Stratégique
II- Prospective
I- Diagnostic
Phases et séquences clefs d’un exercice de prospective territoriale
Phases séquences Résultats attendus
Préparation
Note exprimant le cadre et les objectifs de l’exercice
Programme de travail
Budget équilibré de l’exercice
Constitution des structures de pilotage
Liste des acteurs-clés à associer à la démarche
Ebauche d’un dispositif de collecte d’information en réseau
Plan de communication de l’initiative
Prospective
Identification et diagnostic prospectif Connaissance et compréhension du territoire et de ses évolutions
Mise en place de groupe de travail
Définition des enjeux à long terme Mise en réseau des participants et apprentissage mutuel
Liste des enjeux du territoire établie par les participants
Construction de la vision commune
Définition et agglomération des futurs souhaitables
Elaboration d’une vision commune à partir de ses composantes
Vérification du partage de la vision commune
Stratégique
Désignation des actes stratégiques
Plan stratégique précisant les chemins et les étapes temporelles pour
atteindre un horizon déterminé, en faisant bien apparaître le
positionnement sur les enjeux de long terme
Mesures et choix des actions concrètes Plan d’action pluriannuel précis et budgété s’inscrivant dans les actes
stratégiques
Pilotage et suivi de la mise en œuvre
Système de prise en charge et de suivi des actions stratégiques
Dispositif continu de pilotage du projet de territoire associant les
acteurs
Evaluation processus et produits de
l’exercice
Analyse de l’efficience et de l’efficacité de la prospective du point de
vue des actions mise en œuvre, des processus de gouvernance, des
changements culturels et sociétaux
En outre, la prospective territoriale se propose d’assembler différents savoir-faire, de
combiner des méthodes venues d’horizons divers et fait une grande place à la
pluridisciplinarité en associant des chaînes de raisonnements rarement réunies (Creusat Joël,
2005). De même, la prospective territoriale s'appuie sur une solide recherche documentaire,
une forte intelligence collective et un important travail créatif et conceptuel. L'approche
trifonctionnelle, récemment décrite par Thierry Gaudin67constitue une ressource pour
67. Thierry GAUDIN, « Discours de la méthode créatrice », Entretiens avec François L'Yvonnet, Gordes, Ose
savoir- Le Relié, 2003
visibiliser ces efforts, et complète bien les trois composantes du triangle grec (anticipation,
appropriation, action), cher à Michel Godet. Cette approche se décline en trois pôles :
– le pôle factuel, consistant en recueil des données, des faits, de l'existant ;
– le pôle interactif ou affectif, consistant en la délibération entre les chercheurs et experts
pour confronter leurs idées ;
– le pôle conceptualisation, qui permet à une sorte de noyau analyseur, après une période de
retrait, de dégager les concepts structurants (Philippe Destatte 2003 op. cit.).
Au demeurant, comme tout processus, celui de prospective territoriale requiert, dans sa
mise en œuvre, un ensemble d’outils techniques, souples, mais aussi usuels. Des outils qui
permettent de répondre aux exigences qu’impliquent les différentes étapes de la démarche.
C'est-à-dire que chaque étape ou phase permettant de répondre à certaines questionnements, à
trouver différents types d’informations (quantitatives ou qualitatives), les experts en démarche
prospective ont regroupé un ensemble d’outils dans ce que Michel Godet à nommer « la boîte
à outils prospectives ». Ainsi, à chaque étape correspond un ou des outils d’analyses
quantitatifs et/ou qualitatifs particuliers, propres à ressortir les informations et données
convoitées. Mais ses outils ne sont pas les seules qui existent en la matière.
La boîte à outils prospective de Michel Godet
Activités Outils
Initier et stimuler l’ensemble du processus Ateliers de prospective stratégique
Etablir un diagnostic complet du territoire face
à son environnement
Les arbres de compétences
Les outils d’analyse stratégique
Le diagnostic stratégique
Se poser les bonnes questions et identifier les
variables clés L’analyse structurelle et la méthode
Micmac
Analyser les stratégies d’acteurs La méthode Mactor
Balayer le champ des possibles et réduire
l’incertitude
L’analyse morphologique
La méthode Delphi
L’abaque de Reguier
Les impacts croisés probabilistes (Smic-
Prob-expert)
Evaluer les choix et les options stratégiques Les arbres de pertinence
Multipol
Ceci dit, le succès d’une démarche de prospective est dépendant de son intelligibilité, mais
surtout de son appropriation par les acteurs. Cette appropriation (voir ensemble) qui est au
cœur même de la prospective consiste en la compréhension, l’assimilation et le partage des
résultats de la démarche (Destatte Ph. 2006 op. cit.). Elle est à la fois intellectuelle et affective
(Michel Godet 2001) et permet le passage à l’action par la mise en œuvre du projet
territoriale.
Du reste, comme toute démarche, celle de prospective comportes des difficultés et
limites aussi bien interne (liées aux étapes du processus) qu’externe (liées à la mise en œuvre
des actions retenues).
II. LES LIMITES ET LES PERSPECTIVES
1. Les handicaps liés à l’exercice de prospective
Malgré que la rigueur méthodologique en soit l’une des caractéristiques
fondamentales, la prospective territoriale n’est pas exempte de difficultés et de limites. Celles-
ci sont de plusieurs ordres :
Le manque de ressources humaines et matérielles pour mener à bien un exercice de
prospective territoriale (Absence d’école, d’institut spécialisées ou de module sur la
prospective comme c’est le cas de l’aménagement du territoire avec l’ENEA…).
La carence méthodologique (qui peut bloquer le processus ou affecter les résultats) ;
Le confinement aux sphères institutionnelle et technocratique (qui limite la diffusion et
l’appropriation) ;
La difficulté du passage de la réflexion à l’action (ceci est surtout lié au manque de
volonté politique, à la démesure des ambitions) ;
Problèmes de gouvernance (liés à l’implication des populations) ;
La non-capitalisation de l’expérience acquise dans le domaine (qui aurait permis le
renouvellement, et la systématisation de l’application dans les localités ou autres secteurs) ;
La prospective territoriale faisant une large place à l’apprentissage et à l’imagination, exige
tout de même des innovations pour sans cesse perfectionner ou enrichir son processus en
apports tant conceptuel que méthodologique. D’après Guy Loinger (2005), la prospective est
elle-même en état de recherche sur les méthodes les plus appropriées, et sur la recherche des
outils de la meilleure adéquation possible des moyens aux fins (…).
2. Le défi actuel de la prospective
L’un des grands défis en matière de prospective au Sénégal serait d’arriver à son
application au niveau des collectivités locales (les régions), afin que leur gestion sorte du
court-termisme, du réactionnisme…, que leurs plans dépassent les préoccupations actuelles et
électoralistes, pour envisager le long terme. Ceci aura l’avantage d’une part, de permettre aux
élus locaux, dont la durée de mandat s’inscrit dans le court ou au mieux le moyen terme (pris
en compte par la prospective) ; d’avoir une plus grande visibilité sur les actions présentes et
futures à mener, sur leur avenir, et ce en synergie avec les acteurs locaux. D’autre part, ils
baliseront le terrain pour leurs successeurs qui pourront ainsi inscrire leurs actions dans le
cadre du projet territorial déjà établi.
En outre, la décentralisation qui confère aux collectivités locales des compétences en
matière de planification et d’aménagement du territoire ; le regain que connait la planification
avec l’adoption de la double planification ; les exigences du développement durable (long
terme) et d’autonomie des territoires locaux… sont autant de raisons qui poussent notre pays à
envisager l’expansion de la prospective régionale ou territoriale ». Les collectivités locales
doivent pouvoir jouir des vertus de la prospective en ce qu’elle leur permettra de produire des
dynamiques au sein de leur territoire, d’anticiper les changements tout en recherchant, avec
les acteurs du territoire, de meilleures perspectives pour demain aux problèmes d’aujourd’hui.
S’y ajoute que le territoire a pour lui et avec lui deux capitaux très précieux : ses ressources
(potentialités) et ses acteurs. Et la prospective (…) utilisant des méthodes simples et
appropriables est aussi un puissant levier de dynamique territoriale (Michel Godet 2001), et
d’intelligence territoriale68 (Yann Bertachini, 2007).
68. Yann Bertachini définit l’intelligence territoriale comme : un processus informationnel et anthropologique, régulier et continu, initié par des acteurs locaux physiquement présents et/ou distants qui s’approprient les ressources d’un espace en mobilisant puis en transformant l’énergie du système territorial en capacité de projet.
Chapitre II : PROSPECTIVE, PROJET TERRITORIALE, GOUVERNANCE, ET VISION
I. LE RAPPORT DE LA PROSPECTIVE AU PASSE ET GOUVERNANCE
1. Le passé au secours de l’avenir
L’existence humaine est partagée entre trois moments : le passé, le présent et le futur,
qui pris ensemble constitue sa vie. Le plus central, mais non moins nébuleux de ces moments,
demeure le futur, c'est-à-dire ce qu’il y a devant nous, « le non encore vécu » qui est influencé
par la forme des rapports entre le passé et le présent. La prospective territoriale, en partant
d’un diagnostic rétrospectif pour déboucher sur des perspectives ouvertes sur l’avenir, épouse
cette temporalité, d’autant que « L'exercice consiste(…) à repérer, dans le présent et à la
lumière du passé, les indices de futurs possibles et à peser leurs probabilités respectives de se
réaliser » (Jean Baechler, R. Kamrane 2003). Pierre Musso infère que faire de la prospective,
c’est souvent commencer par « faire retour sur le passé ».69 Et à Destatte Philippe (2003) de
synthétiser le tout en concluant avec pertinence que La prospective territoriale intègre non
seulement l'historicité – le rapport entre le passé et le présent – mais aussi la temporalité –
l'articulation entre le passé, le présent et le futur.
Ceci nous amène, en définitive, à conclure qu’il n’existe pas d’autre façon de construire
l’avenir d’un territoire, qu’un diagnostic scrupuleux du passé de ses composantes et
dimensions, pour évaluer le chemin parcouru, identifier les dynamismes, les tendances et
contraintes évolutives... Seule cette rétrospection permettrait véritablement de construire
l’avenir d’un territoire et inscrire la dynamique de son évolution dans le bon sens et dans le
long terme.
2. La gouvernance et la prospective territoriale
Il est admis par les prospectivistes que la prospective territoriale répond à un certain
nombre de questionnements qui, malgré quelques variantes, répondent tous à la même
préoccupation de préparation ou de construction du futur : Que peut-il advenir ? Que
voulons-nous faire ? Qu’est ce qui peut être fait et comment le faire ?
C’est, des réponses à ces trois questions que découlera le projet de territoire (Claude
Spohr, Guy Loinger, Mars 2004). En effet, le projet, c'est-à-dire, l’objectif et la démarche
qui permet de fédérer diverses institutions et territoires dans une ambition partagée, dans
une communauté de destin issue d’une démarche prospective (…) (Jean Louis Coll 2005
69. Cf. Pierre Mirabaud et al. 2006, « Territoire 2030 : prospective des territoires », Revue août 2006 n°3, DIACT, 181p.
op. cit.), implique nécessairement la gouvernance. En cela, la prospective territoriale
devient un outil de gouvernance. Il s’agit d’organiser et de conduire les démarches pour
notamment impliquer et mettre en mouvement les acteurs d’un territoire et la société
civile, développer les coopérations utiles à l’action territoriale (C. Spohr, G. Loinger
(Mars 2004).
Figure 5 : Les acteurs du territoire70
Pour se faire, la prospective territoriale se doit d'identifier et de combiner les échelles
territoriales pertinentes pour la réflexion et l'action. Elle constitue dès lors un outil pour la
gouvernance multi-niveaux qui décline le principe de subsidiarité et active les partenariats
avec les acteurs institutionnels et non-institutionnels (alliances hybrides). (Destatte Philippe,
2003 op. cit.)
Figure 6 : Les apports de la prospection à la gouvernance
70. Cf. Goux-Baudiment Fabienne « Quand les territoires pensent leurs futurs », Editions de l'Aube, 2001, La
Tour d'Aigues pp. 170
En définitive, la prospective contribue à enrichir la gouvernance en apports principiels,
mais aussi caractériels (voir figure 7).
Il ne s’agit plus seulement d’associer les constituants du local dans un projet territorial, mais
d’assurer à la gouvernance une visibilité du futur fondée sur des processus d’anticipation. La
participation est un ressort de la gouvernance, l’anticipation, son outil. Par une meilleure
visibilité de son devenir, le territoire assure auprès de ses acteurs sa nature fondamentale et
implicite : être un lieu de sécurité (Yann Bertacchini, 2007).
II. PROJET TERRITORIALE ET VISION
1. Projet territorial et vision du monde
Dans la mesure où en terme de prospective, la vision est la représentation du monde de
celui qui exprime cette vision et cherche à la réaliser,71 celle-ci doit, au risque de ne pas être
partagée et donc appropriée, être conforme ou intégrer la conception du monde de la société
concernée. Souvent en Afrique, les projets de développements venant de l’Etat, des
partenaires et autres ONG paraissent en déphasage avec les réalités socio-culturelles, et ont
souffert de l’appropriation qui aurait pu en assure le succès.
En fait, chaque territoire possède une mémoire, porte en son sein les vestiges (matériels ou
immatériels) de son passé, qui témoignent du parcours et de la conception ou vision du
monde de la société qui l’habite. Selon Stéphane Cordobes (2010), ce sont ces mêmes
représentations qui sont mobilisées lorsque l’on fait œuvre de prospective et tente d’imaginer
des réalités futures voire des mondes possibles. Alors, une vision ou représentation du futur
peut-elle faire fie de l’héritage civilisationnel dont chaque peuple est dépositaire ?
A en croire Bernard Guesnier,72 Le projet territorial s’inscrit dans un contexte, dans une
temporalité qui exige le respect des héritages, du patrimoine, de l’histoire vécue sans lequel
on ne peut espérer l’appropriation par une collectivité du projet. Pour étayer sa position, il
cite le maire de Rochefort-Sur-Mer qui insistait que « L’homme a besoin aussi pour son
équilibre, de retrouver dans son environnement quotidien les racines qui le rattachent au passé
et le rendent solidaire de l’avenir ».
En effet, bon nombres de travaux de recherche sur la spiritualité, sur la pensée
philosophique africaine (Pierre Merlin 1996, A. Mazama 2003) ont, au sujet de la conception
71. Hervé Maillot, janvier 2009, « Qu’est-ce que l’on entend par « vision » en prospective ? », 3ème Séminaire de prospective IMAGINE – Changer de cap! Vers un futur durable et désirable, 18-20 novembre 2008, 4p. 72. Bernard Guesnie (2005), « Décentralisation : à la recherche d’échelles spatiales pertinentes pour une
gouvernance territoriale efficace », Université de Poitiers, 9p.
africaine du monde et de son environnement, conclu que les africains noirs ont une conception
purement spiritualiste du monde avec lequel ils cherchent à vivre en harmonie. Cette croyance
perdure toujours et se manifeste dans nos comportements, nos aménagements, nos pratiques,
et explique pourquoi l’Afrique est jusque là épargnée par les grandes catastrophes
écologiques. Ces aspects, parmi tant d’autres, ne sont pas à négliger dans la définition d’une
vision du futur ou d’un projet territorial. Et ce, parce qu’une vision pour devenir opératoire et
déboucher sur des choix et actions stratégiques a besoin d’être appropriée et « partagée » par
les décideurs et acteurs du territoire porteur de cette représentation.
2. Projet territorial, unité et renaissance africaine
L’unité africaine, vœu qui fait l’unanimité dans le monde intellectuel Noir (bien que
les méthodes d’y parvenir diffèrent) est une exigence vitale, si l’Afrique veut aujourd’hui,
plus qu’hier et moins que demain, peser dans la mondialisation et compter dans le concert des
nations. Les analyses économiques ou sur le développement, les tendances en cours dans le
monde, n’ont de cesse de démontrer la nécessité de cette union. Cependant, cette unité des
Etats africains n’est que le cadre organisationnel qui mettra en œuvre les projets et actions
communs pour parvenir à la « La renaissance africaine ». Cette renaissance peut-elle faire
office de vision prospective ?
Dans la mesure où la renaissance africaine est le leitmotiv lorsqu’il s’agit de l’avenir,
de vision future de l’Afrique, elle pourrait bien être envisagée comme vision. En effet, les
principes généraux sur lesquels se fonde la prospective aident à le justifier : Voir loin
(envisager l’Afrique en grand, en mieux dans un avenir lointain), voir large (dépasser les
micro-Etats et aller au-delà des micro-visions nationales) ; voir autrement (selon des
perspectives meilleures, différentes de celles afro-pessimismes habituelles) ; voir ensemble
(réflexion et œuvre collectif de tous les africains) ; s’y ajoute que comme toute vision
prospective, la renaissance s’inscrit dans le long terme et est de l’ordre du désir.73 Toutefois,
entre la situation indésirable et inquiétante (à diagnostiquer) de l’Afrique aujourd’hui et sa
renaissance (sa représentation en mieux), il existe un grand fossé à combler à coup
d’imagination, d’inventivité, d’intelligence et d’action collective, de rigueur
méthodologique… L’objectif sera de transformer, de traduire la renaissance africaine très
présente dans les vœux et les discours en un ensemble de processus collectifs dynamiques, de
sorte à inscrire la réalité chaotique du présent dans de meilleures perspectives.
73. Comme déjà cité plus haut, le phénomène vision est fondé dans le désir (Lebrun Chantal, 2003); de même
que le désir est le moteur de la prospective (Godet, Michel, 1977).
C’est donc, en toute légitimité que nos projets d’avenir nationaux dans le domaine de
l’aménagement du territoire se nourriront ou intégreront les croyances et valeurs
traditionnelles, mais surtout s’inscriront dans les réflexions et la dynamique de la renaissance
africaine.
Conclusion partielle
Ce qu’il y a à retenir en matière de prospective, c’est qu’il n’y a pas de "recette"
unique, la démarche doit être adaptée au contexte, au territoire ainsi qu’aux moyens ainsi, le
choix de la méthode est fonction du problème (Leleux Orane, Viver Camille, 2009-2010 op.
cit.). Aussi, l'étude prospective, malgré ses forces et ses faiblesses, est un stimulant pour
l’intelligence collective, mais surtout reste un prétexte pour amener d’avantage l'opinion à
s’intéresser à l'avenir, parce que condamner, comme le dit Woody Allen, à y passer le restant
de ses jours.
Conclusion générale
Au terme de ce travail de recherche, il nous apparu que l’aménagement du territoire
aussi bien dans sa dimension nationale (Sénégal) que supra-nationale (sous-région, ou
continent), doit être re-poser en débat pour une prise de conscience définitive de son caractère
décisif dans le processus de développement. Les travaux sur l’aménagement du territoire en
Afrique n’ont que trop insisté sur la prise en compte de la dimension spatiale du
développement (toutes échelles territoriales confondues). Alvergne Christel (2004) citant
Léon A. insiste que le débat dépasse désormais l’opposition entre marché et plan et les
principaux arguments qui ont prévalu jusqu’à ce jour, pour se focaliser sur les dimensions
territoriales et organisationnelles de l’intégration.
Au Sénégal, les politiques d’aménagement ne semblent pas encore infléchir les
tendances négatives d’hier, qui persistent encore (la macrocéphalie de Dakar, la stagnation
économique des régions intérieures, la dégradation du cadre de vie…), pour atteindre ses
objectifs de développement cohérent de son territoire. A en croire, Diop Amadou (2004 op.
cit.) « toute politique (…) d’aménagement du territoire a besoin, à la fois, de temps pour
infléchir les dynamiques territoriales, d’opérationnalité et de proximité pour coller à l’action
régionale et locale ainsi que de prospective pour anticiper sur les évolutions à venir ».
Anticiper, c’est gagner du temps, avoir une longueur d’avance sur les changements,
particulièrement, dans le contexte de complexité et de vitesse dans lequel évoluent les
territoires. Ainsi, la prospective territoriale est un outil important pour l’aménagement du
territoire.
C’est dire, à la suite de Christel Alvergne combien la prospective pourrait participer
d’une nouvelle ambition pour l’Afrique, prenant mieux en compte les dimensions territoriales
du développement (In Jean-Louis Coll et al. 2005 op. cit.).
Aussi, il faut retenir que « (...) les territoires sont bien plus maîtres de leur destin que,
souvent, leurs responsables ne l’imaginent : les facteurs endogènes jouent un rôle stratégique
essentiel, à commencer par l’aptitude des acteurs locaux à se mobiliser autour de projets
partagés » (Leleux Orane, Viver Camille, 2009-2010 op. cit.). Et à Guy Loinger (2005)
d’insister que la prospective est au fond, un excellent outil de gouvernance stratégique
territorialisé, et de souligner la difficulté de coordonner les jeux d’acteurs.
Reconnaissant avec Loinger que ce sont les valeurs qui sont mobilisatrices, qui
permettent de dégager une énergie collective, nous admettons que l’Afrique devra penser sa
renaissance, son avenir et évoluer, comme le suggère Igue John, selon sa propre vision fondée
sur l’héritage historique et culturel porteur des valeurs.
Toutefois, la Renaissance Africaine ne peut pas avoir lieu, dignement, sans un
immense travail scientifique de connaissance de l’Afrique dans tous ses aspects, toutes ses
dimensions, tous ses problèmes (Théophile Obenga 2004 op. cit.). Par conséquent, « Prendre
le temps de la réflexion, s’interroger sur le pourquoi des choses, fonder son action sur une
analyse rigoureuse de tous les éléments du problème, agir en essayant d’être compris du plus
grand nombre sinon de tous, sortir des sentiers battus, de la routine, de la copie servile, du
mimétisme passif » (Gaston Zossou, 2000) telles semblent être désormais les préalables à
toute politique ou action future de développement territoriale./.
“ L’avenir n’est pas seulement ce qui peut arriver ou ce qui a le plus de
chance de se produire. Il est aussi, dans une proportion qui ne cesse de
croître, ce que nous aurons voulu qu’il soit » Gaston Berger74
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Table des illustrations
Liste des cartes
Carte 1 : Les villes en Afrique de l'ouest et du centre en 1960 ............................................................... 9
Carte 2 : Situation géographique du Sénégal en Afrique ...................................................................... 23
Carte 3 : répartition spatiale des espaces agricoles au Sénégal............................................................ 27
Carte 4 : Population et densité par région Sénégal 2008 ...................................................................... 32
Carte 5 : Habitants et population académique par région Sénégal 2008 ............................................. 33
Listes des figures
Figure 1 : Evolution de la population du Sénégal entre 1950 et 2010 .................................................. 24
Figure 2 : Répartition de la population du Sénégal par surface régionale en % en 2008 ..................... 25
Figure 3 : Démarche de prospective DEPAS .................................................... Erreur ! Signet non défini.
Figure 4 : La démarche de prospective territoriale ............................................................................... 41
Figure 5 : Le triangle Grec...................................................................................................................... 42
Figure 6 : Les acteurs du territoire ........................................................................................................ 47
Figure 7 : Les apports de la prospection à la gouvernance ................................................................... 47
Liste des tableaux
Tableau 1 : Répartition des infrastructures de santé du Sénégal en 2008 ........................................... 26
Tableau 2 : Répartition régionale du réseau routier classé .................................................................. 27
Tableau 3 : Répartition par catégorie de routes régulièrement inspectées ......................................... 28
Table des matières
Sommaire ................................................................................................................................................ 1
Contexte générale de l’étude .................................................................................................................. 5
Problématique ......................................................................................................................................... 9
Objectifs de l’étude ............................................................................................................................... 12
Hypothèses ............................................................................................................................................ 12
Méthodologie ........................................................................................................................................ 13
Définition des concepts ......................................................................................................................... 15
Première partie : Aménagement du territoire au Sénégal : entre rupture
et continuité ................................................................................................................................. 22
Chapitre I : PARCOURS DE L’AMENAGEMENT AU SENEGAL ............................................................ 23
I. Présentation du Sénégal ................................................................................................... 23
1. Eléments géographiques .............................................................................................. 23
2. Données socio-économiques ....................................................................................... 25
II. La politique d’aménagement du territoire ................................................................... 29
1. Une évolution en dents de scie .................................................................................... 29
2. Pour une fin de l’aménagement du territoire « de plan » ...................................... 30
Chapitre II : LES ANCIENS ET NOUVEAUX DEFIS DE L’AMENAGEMENT DU TERRITOIRE AU SENEGAL .... 32
I. Les défis d’hier ................................................................................................................... 32
1. La macrocéphalie de Dakar ......................................................................................... 32
2. Le développement des régions intérieures .............................................................. 33
II. Les défis d’aujourd’hui et de demain ............................................................................. 34
1. Diversité et complexité des évolutions des territoires .......................................... 34
2. Intégration régionale et continentale ....................................................................... 36
Conclusion partielle ........................................................................................................................... 37
Deuxième partie : Prospective, projet territorial, et patrimoine
historico-culturel .................................................................................................................... 38
Chapitre I : PROSPECTIVE TERRITORIALE, DEMARCHES ET OUTILS ............................................... 39
I. LA PROSPECTIVE TERRITORIALE AU SENEGAL ......................................................................... 39
1. Naissance et évolution de la prospective au Sénégal ............................................. 39
2. Les démarches et outils ................................................................................................ 39
II. LES LIMITES ET LES PERSPECTIVES .......................................................................................... 44
1. Les handicaps liés à l’exercice prospective .............................................................. 44
2. Le défi actuel prospective ............................................................................................ 44
Chapitre II : PROSPECTIVE, PROJET TERRITORIALE, GOUVERNANCE, ET VISION ............................ 46
I. LE RAPPORT DE LA PROSPECTIVE AU PASSE ET GOUVERNANCE................................................. 46
1. Le passé au secours de l’avenir ................................................................................... 46
2. La gouvernance et la prospective territoriale ......................................................... 46
II. PROJET TERRITORIALE ET VISION ........................................................................................... 48
1. Projet territorial et vision du monde ........................................................................ 48
2. Projet territorial, unité et renaissance africaine .................................................... 49
Conclusion partielle ...................................................................................................................... 50
Conclusion générale ...................................................................................................................... 51
Bibliographie ......................................................................................................................................... 53
Table des illustrations ........................................................................................................................ 58
Table des matières............................................................................................................................... 59