131
Institut d’administration des entreprises de Paris Université Paris 1 Panthéon Sorbonne Master d’Administration des Entreprises Mémoire de fin d’études Promotion 2006-2008 Biologie synthétique, quel business model ? Situation actuelle du secteur, contextes technique et concurrentiel, étude de cas. Auteur : François Le Fèvre Domaine scientifique : Organisation et Stratégie de l’entreprise, Management de projet et Gestion de l’Innovation Entreprenariat

Synthia : which business model for synthetic biology?

Embed Size (px)

DESCRIPTION

Synthetic biology is a new approach to biology, which aims at synthesizing and engineer components and biological systems to new or re-engineering existing biological elements in order to create systems performing useful functions.This report, mostly made from literature analysis, aims at reporting progress in this area, not at the scientific level but in the context of a "business” approach.The rapid development of synthetic biology creates a new market and induces a redistribution of the cards, in the fields of biotechnology, energy and petrochemicals. The market is characterized by two types of businesses that are Gene Foundries, which synthesize genes and genetic circuits on demand, and BioSynTechs, which develop microorganisms from these genes synthesized in order to produce biofuels, medicines or chemicals. These companies are the base of a broader economic tissue that integrates academic actors, such as universities and private industries such as food, pharmaceutical and petrochemical. This market has recently already developed traditional strategies of partnership and alliance, and vertical integration upstream and downstream. Synthetic biology raises many questions about intellectual property: how can one promote investment in innovation? Different approaches are envisaged such as patent protection and copyright, but although tools such as "open source", each with advantages and disadvantages. Like many emerging technologies, synthetic biology raises many issues relating to ethics: it is the first time that man is facing the possibility of creating new life forms. In addition, the evaluation of synthetic biology in terms of biosafety and biosecurity is essential. Indeed, synthetic biology can synthesize genomes of viruses and bacteria that can serve as a basis for developing biochemical weapons. But the main problem could be just bio-error and not bio-terror.Taking into account all these factors appears necessary to ensure sustainable development of synthetic biology and allow major impact on the economy but also in our daily lives.

Citation preview

Institut dadministration des entreprises de Paris Universit Paris 1 Panthon Sorbonne Master dAdministration des Entreprises

Mmoire de fin dtudes Promotion 2006-2008

Biologie synthtique, quel business model ?Situation actuelle du secteur, contextes technique et concurrentiel, tude de cas.

Auteur : Franois Le Fvre

Domaine scientifique : Organisation et Stratgie de lentreprise, Management de projet et Gestion de lInnovation Entreprenariat

Informations du Correcteur et engagement thique

Informations du Jury et Engagement EthiqueNOM : PRENOM : ADRESSE : TEL. : MAIL : CYCLE : LE FEVRE FRANOIS 14 BOULEVARD GAMBETTA 94130 NOGENT-SUR-MARNE 0950752803 / [email protected], [email protected]

LONG

NUMERO DE GROUPE : 306-302

DIPLOME LE PLUS ELEVE OBTENU AVANT LENTREE A LI.A.E : MAGISTERE DE BIOTECHNOLOGIES MASTER EN INFORMATIQUE APPLIQUEE A LA BIOLOGIE

ENTREPRISE : GENOSCOPE COMMISSARIAT A LENERGIE ATOMIQUE, DIRECTION DES SCIENCES DU VIVANT INSTITUT DE GENOMIQUE SECTEUR OU BRANCHE : BIOTECHNOLOGIES VOTRE FONCTION DANS LENTREPRISE : INGENIEUR EN BIOINFORMATIQUE

MEMOIRE DE STAGE :

NON CONFIDENTIEL

ETHIQUE :JE CERTIFIE :

AVOIR REDIGE PERSONNELLEMENT CE RAPPORT DACTIVITE AVOIR REMIS CE RAPPORT DACTIVITE UNIQUEMENT A LI.A.E DE PARIS ET A AUCUN AUTRE ORGANISME DE FORMATION. AVOIR MIS EN ITALIQUE OU INDIQUE CLAIREMENT TOUT TEXTE INSERE PAR COPIERCOLLER OU TOUT AUTRE MODE DINSERTION (HORS LES TEXTES EN ANNEXE) NE PAS AVOIR DEPASSE 20% DU TEXTE EN COPIER-COLLER (OU TEXTE INSERE) DANS LA REDACTION DU RAPPORT (HORS LES TEXTES EN ANNEXE) DATE : SIGNATURE :

Franois Le Fvre 2008

- ii

Cette page est intentionnellement laisse vierge.

Franois Le Fvre 2008

- iii

Franois Le Fvre 2008

iv

Remerciements

RemerciementsMerci ma femme, Pascale, pour le soutien continu au cours de ces 2 dernires annes dans nos multiples activits respectives: thse et enseignement pour toi, Genoscope et MBA pour moi. De nos jours, il est difficile que les personnes dun mme couple puissent tous deux mener leur vie professionnelle de front avec leur vie familiale. Malgr des hauts comme des bas, je pense que ces preuves nous ont rapprochs. Ce fut galement pour nous deux de la dcouverte et de lapprentissage dun nouveau mtier : celui de parents. Merci Vincent Schchter pour le choix du sujet et ses conseils prliminaires. Merci Patrick Wincker, Francis Quetier et Jean-Marc Aury pour les lments relatifs aux technologies de squenage et aux conditions de la cration du Centre National de Squenage. Enfin un grand merci Christian Vincent, responsable de la cellule valorisation de la DSV pour sa disponibilit et mavoir renvoy vers les diffrents spcialistes du brevet. Merci Emmanuelle Kempf et Robin Hanquier pour mavoir reu aussi rapidement pour rpondre mes questions relatives au droit de la proprit intellectuelle. Je ddie ce mmoire Pauline M. C. O.

Les nanosystmes pourraient avoir pour but de court-circuiter l'errance darwienne et de promouvoir le succs du design Damien Broderick, crivain de science-fiction et chercheur honoraire de l'universit de Melbourne

Lgende: Organism e orizon H gntique Barrire gntique Progression par volution Progression par designFigure 1: Errance darwinienne et succs du design en biologie synthtique. Le scientifique cherche obtenir un organisme capable deffectuer une application (production de mtabolite par ex.). En prenant lorganisme initial, celui-ci peut par des mutations successives acqurir de nouvelles proprits, qui, si elles sont slectionnes, permettent dobtenir un organisme offrant de meilleures capacits que lorganisme initial. Toutefois, plusieurs mutations peuvent savrer ncessaires ; de plus lorganisme peut tre confront des sauts volutifs trop complexes ( barrire gntique ). Le scientifique peut aujourdhui, grce la biologie synthtique, sabstraire de ces contraintes, et designer un organisme qui rpond ses exigences. Il faut noter que la biologie synthtique ne se substitue pas lvolution mais doit sajouter en parallle au processus de slection naturelle ou dirige. Daprs un expos de Philippe Marlire, gnticien Isthmus, en 2006. Source : Franois Le Fvre (2008)

Franois Le Fvre 2008

v

Cette page est intentionnellement laisse vierge. .

Franois Le Fvre 2008

vi

RsumLa biologie synthtique est une nouvelle approche de la biologie qui vise la synthse et lingnierie de composants et de systmes biologiques nouveaux ou la ringnierie dlments biologiques prexistants dans le but de crer des systmes ralisant des fonctions utiles. Ce mmoire, essentiellement ralis partir de recherches bibliographiques, a pour objectif de faire le point sur ce domaine, non pas en terme scientifique mais bien dans le cadre dune approche de type business . Le dveloppement fulgurant de la biologie synthtique est lorigine dun nouveau march et dune redistribution des cartes, entre autres dans les secteurs de la biotechnologie, de lnergie et de la ptrochimie. Le march se caractrise ainsi par deux types dentreprises que sont les Gene Foundries, qui synthtisent des gnes et des circuits gntiques la demande, et les BioSynTechs, qui dveloppent des microorganismes partir de ces gnes synthtiss dans le but de produire des biocarburants, des mdicaments ou des produits chimiques. Ces entreprises sont au cur dun tissu conomique plus vaste qui intgre des acteurs acadmiques, comme les universits, et des acteurs privs tels que les industries agroalimentaire, pharmaceutique ou ptrochimique. Ce march rcent voit dj le dveloppement de stratgies classiques de partenariat et dalliance, dintgration verticale en amont et en aval. La biologie synthtique pose de nombreuses questions quant la proprit intellectuelle : comment favoriser les investissements dans linnovation ? Diffrentes approches sont ainsi envisages depuis la protection par brevet et droits dauteur jusqu lutilisation doutils de type open source , chacune prsentant des avantages et des inconvnients. Comme de nombreuses technologies mergentes, la biologie synthtique soulve de nombreuses questions relatives lthique : cest la premire fois que lhomme est confront la possibilit de crer de nouvelles formes de vie. Par ailleurs, lvaluation de la biologie synthtique au regard de la biosret et de la bioscurit est essentielle. En effet, la biologie synthtique permet de synthtiser la demande des virus et des bactries pathognes pouvant servir de base au dveloppement darmes biochimiques. Le problme majeur pourrait pourtant ne pas tre de type bioterreur mais plutt de type bioerreur. La prise en compte de lensemble de ces lments apparat ncessaire pour permettre un dveloppement durable de la biologie synthtique et permettre des retombes majeures dans lconomie mais aussi dans notre vie quotidienne. Mots cl : biotechnologie, biologie synthtique, bio raffinerie, biocarburant.

Franois Le Fvre 2008

vii

SummarySynthetic biology is a new approach to biology, which aims at synthesizing and engineer components and biological systems to new or re-engineering existing biological elements in order to create systems performing useful functions. This report, mostly made from literature analysis, aims at reporting progress in this area, not at the scientific level but in the context of a "business approach. The rapid development of synthetic biology creates a new market and induces a redistribution of the cards, in the fields of biotechnology, energy and petrochemicals. The market is characterized by two types of businesses that are Gene Foundries, which synthesize genes and genetic circuits on demand, and BioSynTechs, which develop microorganisms from these genes synthesized in order to produce biofuels, medicines or chemicals. These companies are the base of a broader economic tissue that integrates academic actors, such as universities and private industries such as food, pharmaceutical and petrochemical. This market has recently already developed traditional strategies of partnership and alliance, and vertical integration upstream and downstream. Synthetic biology raises many questions about intellectual property: how can one promote investment in innovation? Different approaches are envisaged such as patent protection and copyright, but although tools such as "open source", each with advantages and disadvantages. Like many emerging technologies, synthetic biology raises many issues relating to ethics: it is the first time that man is facing the possibility of creating new life forms. In addition, the evaluation of synthetic biology in terms of biosafety and biosecurity is essential. Indeed, synthetic biology can synthesize genomes of viruses and bacteria that can serve as a basis for developing biochemical weapons. But the main problem could be just bio-error and not bioterror. Taking into account all these factors appears necessary to ensure sustainable development of synthetic biology and allow major impact on the economy but also in our daily lives. Keywords : synthetic biology, system biology, biosafety, biosecurity, biofab.

Franois Le Fvre 2008

ix

Franois Le Fvre 2008

x

SommaireInformations du Jury et Engagement Ethique......................................................................... ii Remerciements.......................................................................................................................v Rsum ............................................................................................................................... vii Summary...............................................................................................................................ix Sommaire ..............................................................................................................................xi Figures .................................................................................................................................xv Tableaux.............................................................................................................................xvii Avant-propos : quelques lments sur mon parcours...............................................................3 A. Cursus universitaire ....................................................................................................3 B. Bioinformaticien au Genoscope ..................................................................................3 1. Historique du Genoscope ........................................................................................3 2. Missions du Genoscope...........................................................................................3 3. Les missions dun bioinformaticien en System biology ......................................4 C. Pourquoi l'IAE ? .........................................................................................................4 D. Contexte de ce mmoire..............................................................................................5 Introduction............................................................................................................................9 Chapitre 1 : Quest ce que la biologie synthtique ? ..........................................................13 A. Biologie des systmes versus biologie synthtique ....................................................13 1. Dfinition..............................................................................................................13 2. Histoire .................................................................................................................15 B. Technologies.............................................................................................................16 1. Squenage des acides nucliques .........................................................................16 2. Synthse dADN ...................................................................................................17 C. Approches complmentaires en biologie synthtique.................................................20 1. Top-down D assemblage ..................................................................................20 2. Bottom-Up - Assemblage ......................................................................................21 D. Applications..............................................................................................................22 1. Nouveaux processus pour la production de substances ..........................................22 2. Bio senseurs ..........................................................................................................23 3. Production dnergie .............................................................................................23 4. Bioremdiation......................................................................................................23 5. Cellules avec des nouvelles proprits pour amliorer le corps humain..................23 E. Evolution et limites venir de la biologie synthtique..............................................24 1. Evolution des technologies de synthse/squenage. .............................................24 2. Loi de Moore ........................................................................................................25 3. Standardisation et Design......................................................................................26 4. Roadmap...............................................................................................................28 Chapitre 2 : Acteurs majeurs de la biologie synthtique ....................................................31 A. Des personnalits fortes influencent la biologie synthtique ......................................31 1. BioFab Group .......................................................................................................31 2. Autres personnalits lies la biologie synthtique ...............................................32 B. Acteurs acadmiques : une domination amricaine....................................................32 1. Publications et financement...................................................................................33

Franois Le Fvre 2008

xi

Sommaire Enseignement et biologie synthtique....................................................................34 Les entreprises du secteur de la biologie synthtique.................................................36 1. Les Gene Foundries ..............................................................................................36 2. Les BioSynTechs : les pure players .................................................................43 3. Bilan .....................................................................................................................46 D. Pouvoir Publics et Autorit de rgulation ..................................................................46 1. Actions amricaines pour la biologie synthtique ..................................................46 2. Initiative pour soutenir le dveloppement de la biologie synthtique en Europe.....47 3. Actions au niveau de la France ..............................................................................48 4. Organisations non gouvernementales ....................................................................52 C. Chapitre 3 : Stratgies autour du march de la biologie synthtique ..................................55 A. Essor : un march en pleine explosion.......................................................................55 B. Offshore pour les Gene Foundries .............................................................................56 C. Dfis relever pour les Gene Foundries ....................................................................56 D. De socit de production socit de services...........................................................56 E. Start-Up ....................................................................................................................57 1. Cadre lgal pour favoriser linnovation .................................................................57 2. Cycle de financement ............................................................................................57 F. Alliances...................................................................................................................58 G. Bilan des stratgies des diffrents acteurs de la biologie synthtique .........................60 Chapitre 4 : Proprit intellectuelle...................................................................................69 A. Quelques lments sur la proprit intellectuelle .......................................................69 1. Droits dauteur ......................................................................................................69 2. Le brevet ...............................................................................................................70 B. Biologie synthtique et proprit intellectuelle ..........................................................71 1. Droits dauteur et biologie synthtique ..................................................................71 2. Brevet et biologie synthtique ...............................................................................72 C. Autres approches de protection de la proprit intellectuelle .....................................74 1. Copyleft ................................................................................................................74 2. Brevet open-source ..........................................................................................74 3. Non revendication de lutilisation de brevet...........................................................75 4. Lgislation sui generis ..........................................................................................75 5. Domaine public.....................................................................................................75 Conclusion ...........................................................................................................................79 A. Ethique et Socit .....................................................................................................79 1. Ethique..................................................................................................................79 2. Socit et environnement: exemple des bio-carburants ..........................................79 B. Risques lies la biologie synthtique ......................................................................80 1. Sret biologique ou la menace de bio-erreur ........................................................80 2. Scurit biologique ou la menace de bio-terreur ....................................................81 C. La biologie synthtique : une opportunit pour le CEA .............................................83 1. Statut ....................................................................................................................83 2. Facteurs cls de succs ..........................................................................................83 3. Pour quel projet ? ..................................................................................................85 D. Bilan .........................................................................................................................85 2.

Franois Le Fvre 2008

xii

Sommaire Citations ...............................................................................................................................87 Glossaires des abrviations et des termes spcifiques rarement utiliss .................................89 A. Termes en relation avec le domaine de la biologie.....................................................89 B. Termes en relation avec le domaine de la finance ......................................................90 C. Termes en relation avec lEurope ..............................................................................91 D. Autres .......................................................................................................................91 Bibliographie........................................................................................................................93 Annexes ...............................................................................................................................99 A. Liste des entreprises du secteur de la biologie synthtique.........................................99 B. Zoom sur Synthetic Genomics, une BioSynTech.....................................................104 C. Brevets....................................................................................................................105 D. Projets de biologie synthtique financs par le FP6 de lEurope ..............................108 E. Listes des mtabolites polluants ..............................................................................110 F. Pipeline pour une bioraffinerie ................................................................................110 G. Curriculum vitae .....................................................................................................112 Index ..................................................................................................................................113

Franois Le Fvre 2008

xiii

Franois Le Fvre 2008

xiv

FiguresFigure 1: Errance darwinienne et succs du design en biologie synthtique.............................v Figure 2 : Comparaison entre protocole de recherche sans et avec biologie synthtique. .......14 Figure 3 : Photos des principaux squenceurs de la nouvelle gnration. ..............................17 Figure 4 : Domaines de longueur de fragments dADN synthtiss. ......................................18 Figure 5 : Prsentation des diffrents procds de synthse de lADN...................................18 Figure 6 : Procd actuel de synthse de gnes et de gnomes partir doligonuclotides. ....19 Figure 7: Processus de commande gne par Internet. ............................................................19 Figure 8 : Modules de la biologie synthtique. ......................................................................21 Figure 9 : Point dinflexion dans les technologies de biologie. ..............................................22 Figure 10 : Cot du squenage et de la synthse dune paire de base dADN.......................24 Figure 11 : Amlioration de la productivit dans la synthse et le squenage de lADN. .....25 Figure 12 : Evolution de la valeur ajoute conomique des technologies...............................26 Figure 13 : Nombre de publications dans le domaine de la biologie synthtique par anne....33 Figure 14 : Rpartition des publications scientifiques et des financements par pays. .............33 Figure 15 : Capture dcran du site web The Registry of Standard Parts du MIT ...............35 Figure 16: Rpartition mondiale des Gene Foundries. ...........................................................37 Figure 17 : Process de fabrication et produits typique dune Gene Foundries ........................38 Figure 18 : Rpartition de la taille des fragments dAD synthtiss par une Gene Foundries. 38 Figure 19 : Etude des diffrents acteurs du march des Gene Foundries. ...............................42 Figure 20 : Rpartition mondiale des BioSynTechs...............................................................43 Figure 21 :Etude des diffrents acteurs du marche des BioSynTechs.....................................45 Figure 22 : Analyse conomique de la plateforme GeneMarker compar la PCR..........55 Figure 23 : Pipeline du financement de linnovation en biologie synthtique.........................58 Figure 24 : Stratgies des entreprises du secteur de la biologie synthtique ...........................62 Figure 25 : Evolution du nombre de brevet en biologie synthtique au cours des annes. ......72 Figure 26 : Evolution des fonds relatifs aux bio carburants. ..................................................80 Figure 27 : Mise aux enchres dun synthtiseur dADN sur E-bay.......................................81 Figure 28 : Spectre du risque: de la recherche basique Bin Laden Genetics, Inc. ................82 Figure 29 : Interaction et rgulation de la filire de la synthse dADN.................................83 Figure 30 : CEA, analyse succincte de type SWOT...............................................................84 Figure 31: Concept de la bio-raffinerie. ................................................................................85 Figure 32 : Model de flux de produits issu. Analogue celui de lindustrie ptrochimique. 111

Franois Le Fvre 2008

xv

TableauxTable 1 : Evnements marquant de la biologie synthtique. ..................................................15 Table 2 : Diffrentes technologies de squenage de lADN. ................................................16 Table 3 : Comparaison des performances de la prochaine gnration de squenceurs............16 Table 4 : Technologies de synthse dADN. .........................................................................18 Table 5 : Quelques donnes cl sur le projet phare M. laboratorium. ....................................20 Table 6 : Dfinitions et exemples dimplmentation des BioBriocks. ....................................21 Table 7 : Liste des 12 mtabolites dintrt identifis par le DOE. ........................................23 Table 8 : Dlai de synthse de gne en fonction de la longueur du fragment. ........................24 Table 9 : Exemples de logiciels ddis la modlisation en biologie synthtique..................27 Table 10 : Avances ncessaires au dveloppement de lindustrie de la biologie synthtique 28 Table 11 : Membres du Bio Fab group. .............................................................................31 Table 12 : Acteurs moteur de la biologie synthtique sur le plan prive ou acadmique. ...32 Table 13 : Universits partenaires dans le centre SynBERC bas Berkeley.........................34 Table 14 : Les Big 4 de la synthse de gne. ...................................................................36 Table 15 : Domaines dactivits stratgiques des Gene Foundries. ........................................37 Table 16 : Critres de diffrenciation des Gene Foundries ....................................................41 Table 17 : Extrait de la liste des BioSynTech ou pure player ...........................................43 Table 18 : Ples de comptitivit pouvant accueillir des projets de biologie synthtique. ......50 Table 19 : Grands groupes internationaux, investisseurs dans la biologie synthtique. ..........59 Table 20 : Typologie des brevets en biologie synthtique.....................................................73 Table 21 : Synthse des stratgies de protection de la proprit intellectuelle en biologie synthtique ...........................................................................................................................76 Table 22: Liste des BioSyntechs majeures ............................................................................99 Table 23 : Liste des entreprises vendant des synthtiseurs d'ADN.........................................99 Table 24 : Liste des Gene Foundries. ..................................................................................100 Table 25 : Liste des brevets Synthetic Biology ..............................................................106 Table 26 : Projets de biologie synthtique financs par le FP6 de lEurope ........................108 Table 27 : Liste des activits Applied Life Sciences soutenues par le FP7..........................108 Table 28 : Projets retenus pour Activity 2.3: Life Sciences Biotechnology and Biochemistry for Sustainable Non-Food ................................................................................................109 Table 29 : Liste des 31 mtabolites identifies comme polluants majeurs .............................110

Franois Le Fvre 2008

Franois Le Fvre 2008

Partie 1 :

Avant-Propos

Franois Le Fvre 2008

1

Avant-propos : quelques lments sur mon parcoursA. Cursus universitaireAprs une classe prparatoire en Biologie Chimie Physique et Sciences de la Terre 1 jai fait le choix dune formation thorique et pratique de haut niveau en gnomique en tudiant au sein du Magistre de Biotechnologies2. Jai poursuivi ces tudes par lobtention dun Master en Informatique Applique la Biologie3. Ces tudes mont permis dacqurir des bases fondamentales dans les biotechnologies et les sciences de linformation ainsi que de dacqurir un esprit critique. Jai pu galement dvelopper des comptences techniques lors de nombreux stages dans des instituts de prestige tant en France (INRA : Clonage4, ParisXI : Bioinfo 5), qu ltranger (Institut de cancrologie/docanologie en Allemagne6 ; Institut de Biomdecine aux Etats-Unis7). Ces diffrents stages mont permis de rencontrer des tudiants et tudiantes aux cultures diffrentes et ainsi dapprendre comprendre lautre et travailler avec lui. Jai pu galement travailler avec des scientifiques de haut niveau, et des entrepreneurs en biotechnologies. Jai ainsi pris conscience des diffrences de comptences existant entre le domaine de la recherche et celui du business.

B. Bioinformaticien au GenoscopeCe parcours universitaire ma permis dintgrer en 2004 le Centre National de Squenage (CNS), en qualit de bioinformaticien. Cet tablissement de recherche est connu au niveau international sous la dnomination de Genoscope.

1. Historique du GenoscopeLe Genoscope a t cr en 1997 pour 10 ans en tant que Groupement dIntrt Public (GIP). En 2002, le Genoscope, le Centre National de Gnotypage (CNG) et le Rseau National des Genopoles (RNG) ont intgr le Consortium National de Recherche en Gnomique (CNRG). Depuis le 1er mai 2007, le Genoscope et le Centre National de Gnotypage ont intgr la Direction des Sciences du Vivant (DSV) du Commissariat l'Energie Atomique (CEA) sous la forme d'un institut, l'Institut de Gnomique. Ce rapprochement a, entre autres, pour but de prenniser le statut de CNS/CNG, d'tablir des synergies et de renforcer le CEA dans le domaine des sciences de la vie, limage de ce qui se passe aux tats-Unis avec lquivalent du CEA, le Dpartement de lEnergie (DOE).

2. Missions du GenoscopeLune des missions initiales du Genoscope a t de participer en tant quacteur majeur au squenage du gnome humain, au sein du consortium international Human Genome Project (HGP). Le Genoscope sest ainsi investi dans le squenage, lassemblage et lannotation du bras long du chromosome 14, soit 87 410 661 nuclotides. Une premire version du gnome humain a t publie dans la revue Nature le 15 fvrier 2001, la version finale le 14 avril 2003. Le squenage lui seul reprsente ainsi 10 millions d'euros. Les autres missions du Genoscope consistent participer leffort des nations dveloppes de produire, en accs libre, des donnes de squence dintrt gnral, rpondre aux besoins en1 2

BCPST Lyce Chateaubriant Magistre de Biotechnologie : Universit de Paris XI, ENS de Cachan 3 DESS Informatique applique : Universit de Versailles-Evry-Paris 6 4 Institut National de Eecherche Agronomique : 5 Institut de bioinformatique, Universit de Paris XI 6 Institut fr Meereskunde, Kiel et Cancer Forschung Center Borstel Aallemagne 7 Institut for Computational Biomedicine, USA

Franois Le Fvre 2008

3

squenage grande chelle de la communaut acadmique et permettre de se maintenir au niveau de ltat de lart dans le domaine du squenage et de lanalyse de la squence . Depuis quelques annes, le Genoscope a pris un nouveau virage : le cap vers la gnomique environnementale . Le but est dtre capable didentifier des fonctions biologiques pouvant tre utilises dans le cadre des industries chimiques. Nous parlons ici des biotechs blanches par opposition aux biotech rouges, vertes, grises et bleues, qui relvent respectivement des interactions avec lindustrie pharmacologique, lagro-industrie, lenvironnement et les ressources ocaniques. Cest dans une logique de dveloppement durable que le Genoscope cherche des solutions biologiques dans la chimie de synthse, afin de la rendre moins polluante et moins consommatrice dnergie et de carbone fossile. 8 , propos de Jean Weissenbach, chef de lInstitut de Gnomique. Lintgration au CEA tant toute rcente je nai pas assez de recul pour en faire lanalyse. Je ne dvelopperai donc pas ce point.

3. Les missions dun bioinformaticien en System biology Depuis 2004, jai intgr une quipe de recherche en modlisation du mtabolisme au niveau de lchelle de la cellule. Ce domaine de recherche vise comprendre les relations entre les proprits de haut niveau , encore appel le phnotype (La cellule est elle capable de pousser sur un milieu riche en glucose ?) et le contenu en gnes des cellules. La spcificit de ce domaine, la biologie des systmes ou biologie systmique, est que le chercheur ne sintresse pas caractriser en particulier un des acteurs de la cellule mais bien lensemble des acteurs et les interactions qui les unissent. Mon mtier de bioinformaticien au sein de lquipe Computational and System biology consiste dvelopper des applications informatiques ddies la modlisation des rseaux du mtabolisme. Un des buts poursuivis par notre quipe est ainsi dtre capable de prdire le phnotype de pousse/pousse pas de bactries ensemences sur diffrents milieux. Pour cela nous effectuons des analyses dites in silico qui sont compares des expriences in vivo . Nous travaillons donc en forte interaction avec des exprimentateurs. Les logiciels crs sont valoriss au travers de travaux de recherche qui mnent des publications scientifiques et la mise la disposition pour la communaut scientifique de bases de donnes et doutils en ligne. Ce travail est men en troite collaboration avec des tudiants ralisant des stages, des thses, avec des post-doctorants et des chercheurs que ceux-ci soient spcialistes en statistiques, mathmatiques, optimisation, en biochimie ou en informatique. La pluridisciplinarit de cet environnement en fait toute sa richesse.

C. Pourquoi l'IAE ?Plusieurs lments sont lorigine de mon choix de suivre la formation du Master Administration des Entreprises de lIAE de Paris Lors de mon cursus universitaire, jai pu minvestir dans une initiation au management et la proprit intellectuelle, ce qui ma donn envie de me perfectionner dans la matrise de ces outils. Mes diffrents stages mont galement permis de rencontrer des bio-entrepreneurs, jai pu ainsi mesurer les difficults pour un chercheur de valoriser ses inventions au travers dune innovation et la cration dune entreprise. Jai donc suivi par moi-mme diffrents sminaires9 visant me donner des outils et des cls de comprhension. Mais pour atteindre mes objectifs il me faut aller plus loin : amliorer mes comptences managriales et acqurir des qualits de leadership.8

Jean Weissenbach, site web du Genoscope http://www.genoscope.cns.fr/spip/Presentation-duCentre,36.html#mot 9 Salon du Medec-Bioentreprendre (2005-2007), Chaire d'innovation technologique au Collge de France (2008)

Franois Le Fvre 2008

4

Je me suis donc naturellement tourn vers les formations gnralistes pour cadres. LIAE de Paris travers le MAE vise former des hommes et des femmes capables dassumer les challenges des entreprises de demain. Pour tre apte grer des projets ncessitant la comprhension globale de lentreprise et de son environnement, jai donc voulu associer ma formation initiale, mes qualits personnelles et ma premire exprience professionnelle, la formule unique du MAE. Malgr le manque de recul ce jour, lintgration au MAE de lIAE de Paris ma permis daccder une formation gnraliste en management de haute qualit, qui ma donn une vue approfondie des diffrentes facettes dune entreprise : gestion des hommes et des femmes, gestion de projet, aspect macro-conomique, financier, relation avec les clients/fournisseurs, pour nen citer que quelques uns. Ensuite cela a t une exprience unique pour travailler avec des tudiants issus dentreprises et de cultures diffrentes. Je suis en effet convaincu que de la confrontation des ides naissent les solutions les plus novatrices. En suivant la formation MAE en cours du soir, en me spcialisant avec le suivi de la thmatique Management de projet et Gestion de lInnovation et en poursuivant mon mtier, jai ainsi pu dvelopper en parallle mes capacits danalyse et de synthse lIAE, et acqurir une rigueur et un ralisme dans la gestion de projet. Enfin jai pu me crer un rseau de professionnels que je pourrais ainsi entretenir et ractiver pour pouvoir rebondir tout au long de ma carrire. Le suivi du MAE s'inscrit donc pour moi dans la continuit de mon projet professionnel. Cette transversalit des comptences savrera indispensable pour me permettre daccder un poste de manager afin de relever les nouveaux dfis lis la cration et au management des projets scientifiques transversaux dans les entreprises europennes de demain.

D. Contexte de ce mmoireLa biologie synthtique est une approche rcente de l'ingnierie de la biologie base sur des technologies ddies la synthse d'ADN, le support de l'information dans le monde du vivant. titre professionnel, mais aussi titre personnel, je suis trs intress par son dveloppement et les applications prometteuses qui semblent en dcouler. Je me suis ainsi personnellement investi dans un concours international de biologie synthtique iGEM10 qui a permis des tudiants franais de mener bien un projet et de remporter au MIT le prix de recherche fondamentale. Ce mmoire est pour moi loccasion de faire le point sur ce domaine, non pas en terme scientifique mais bien dans le cadre dune approche business . Outre la validation de mon MBA, mon objectif est de rendre un rapport qui puisse servir de document de base, de rflexion diffrents acteurs du domaine de la biologie synthtique: - chercheur qui souhaite crer une entreprise, - acteur financier (Business Analyste, Venture capital ) qui cherche comprendre quelles sont les cls danalyse de ce secteur, - entreprises, telles que le CEA, qui doivent valuer lopportunit et les risques ou non de lancer des programmes de recherche & dveloppement, voire dinnovation en biologie synthtique. Ce mmoire nest donc pas exactement un mmoire dactivit mais un mmoire centr sur un secteur conomique en dveloppement, la biologie synthtique. Cest pour moi le moyen de prendre du recul, afin d valuer les perspectives et les contraintes du futur modle conomique de la biologie synthtique. Certains points du rapport mont tenu plus cur que dautres, mais ont t traits de manire concise pour garder un quilibre entre les parties du

10

iGEM : The international Genetically Engineered Machine competition

Franois Le Fvre 2008

5

rapport : ceci concerne tout ce qui touche la valorisation et la proprit intellectuelle, ainsi que la bio-securit . Par ailleurs, je tiens prciser que ce rapport nengage que ma propre personne, celui-ci nayant pas t ralis avec le support de mon entreprise, le CEA. Les analyses et interprtations nengagent donc que ma personne. Enfin, je tiens mexcuser auprs des lecteurs des nombreux termes anglo- saxons utiliss dans ce rapport. En effet, comme dans la plupart des domaines scientifiques la pointe de la recherche, la littrature est quasi- exclusivement rdige en anglais ; comme nous le verrons par ailleurs, la France est extrmement peu prsente dans le domaine de la biologie synthtique, ce qui fait que les traductions des termes anglo- saxons nexistent pas toujours ; il ma donc sembl illusoire de tout vouloir systmatiquement traduire dans la langue de Molire. Par ailleurs, de longues priphrases seraient parfois ncessaires pour traduire imparfaitement certaines expressions, il ma donc sembl plus judicieux de les exprimer en anglais.

Franois Le Fvre 2008

6

Introduction

Partie 2 :

Synthia

Franois Le Fvre 2008

7

IntroductionDepuis une dizaine dannes, des avances technologiques et scientifiques ont permis de dvelopper des outils pour analyser et manipuler les systmes biologiques. Ces technologies utilises dans le secteur des biotechnologies sont au cur de notre conomie mondiale comme en tmoignent les chiffres cls publis par le rapport annuel de Ernst&Young. Si le squenage de lADN, molcule support de linformation gntique, a permis de mieux comprendre la Nature, les nouvelles technologies dites de synthse dADN vont permettre aujourdhui douvrir une nouvelle re dans lingnierie des systmes biologiques. La biologie synthtique est ainsi une approche de l'ingnierie de la biologie base sur des technologies ddies la synthse d'ADN. Le prsent mmoire vise tout dabord donner les clefs de ce domaine en caractrisant la biologie synthtique dun point de vue scientifique, technologique et du point de vue des ses applications. Nous nous intresserons ensuite dterminer les diffrents acteurs de la biologie synthtique, pour caractriser ensuite leur relation au sein du march de la synthse dADN. Enfin, nous nous intresserons la problmatique de la proprit intellectuelle en biologie synthtique, avant de conclure sur les aspects thiques et les risques lis la biologie synthtique.

Franois Le Fvre 2008

9

Chapitre 1 :

Quest ce que la biologie synthtique ? _______

Franois Le Fvre 2008

11

Chapitre 1 : Quest ce que la biologie synthtique ?

Chapitre 1 :

Quest ce que la biologie synthtique ?

Cette partie vise apporter les cls de comprhension de la biologie synthtique pour un non spcialiste du domaine. Nous nous attacherons donc dterminer les contours prcis de la biologie synthtique, puis regarder sur quelles technologies se base cette discipline, pour enfin donner quelques exemples non exhaustifs de ses applications.

A. Biologie des systmes versus biologie synthtique1. DfinitionLe terme synthetic biology peut-tre traduit par biologie de synthse ou biologie synthtique , nous utiliserons ce dernier dans le prsent rapport. Diffrentes dfinitions de la biologie synthtique ont t proposes afin de dlimiter ce nouveau champ dapplication. Dans le cadre de notre tude, nous nous baserons sur la dfinition de la communaut europenne issue du rapport de Hubert BERNAUER pour le projet Synbiology : Synthetic biology is the engineering of biological components and systems that do not exist in nature and the re-engineering of existing biological elements; it is determined on the intentional design of artificial biological systems, rather than on the understanding of natural biology. La biologie synthtique est donc la synthse et lingnierie de composants et de systmes biologiques nouveaux ou le ringnierie dlments biologiques prexistants dans le but de crer des systmes ralisant des fonctions utiles. La biologie synthtique se distingue de nombreux domaines scientifiques rcents. Elle soppose ainsi la biologie systmique, qui vise comprendre les systmes biologiques dans leur ensemble. En effet, la biologie systmique dveloppe une perspective scientifique (faire de la science pour de la science mme si des retombes dans le domaine mdical sont actuellement en cours) alors que la biologie synthtique vise des objectifs plus technologiques et surtout plus appliqus. Ces deux approches scientifiques sont bien entendu complmentaires. La biologie synthtique se diffrencie galement du gnie gntique dont lun des buts est lobtention dorganismes ralisant une fonction donne, mais ce grce lutilisation et aux transferts de gnes existants modifis ou non par la technologie de lADN. La biologie synthtique permet de sabstraire totalement de cette contrainte dADN prexistant. La biologie synthtique, de par son approche dite de synthse, rvolutionne ainsi le travail quotidien des quipes de recherche. En effet, de nos jours, les scientifiques passent une grande partie de leur temps obtenir leur gne dintrt via des techniques de biologie molculaire : des copier coller de fragments dADN entre organismes. Ceci ncessite du temps et des moyens humains consquents, mais dsormais ils peuvent commander leur gne directement via Internet auprs dentreprises de biologie synthtique Gene Foundries - et ce sous 10 jours. [Voir Figure 2] Les entreprises de biotechnologies traditionnelles ont procd jusqu prsent dune manire plus ou moins empirique, la biologie synthtique grce au design rationnel et au re-design va permettre le passage grande chelle et instaurer des modifications en profondeur dans la conduite des projets de biotechnologies.

Franois Le Fvre 2008

13

Figure 2 : Comparaison entre protocole de recherche sans et avec biologie synthtique. Dans le protocole du haut sans biologie synthtique, le chercheur est contraint avec son quipe de modifier son fragment dADN afin dobtenir la squence dintrt. Ce qui a demand 3 ans. Dans le protocole du bas, il lui suffit de commander via Internet la squence dsire quil recevra par la poste sous 14 jours. Source : figure extraite du rapport Synthetic Genomics, options for governance.

Franois Le Fvre 2008

14

2. HistoireLe tableau suivant prsente une chronologie des vnements cls qui ont permis lavnement de la biologie synthtique.Table 1 : Evnements marquant de la biologie synthtique. La troisime colonne, C. ou catgorie, vise organiser par grands domaines les vnements. Ainsi S,E,M reprsentent respectivement les catgories Science, Entreprise et Socit.

Date1953 1970 1974 1975 1977 1977 1978 1978 1979 1980 1981 1986 1995 1995 1998 1999 1999 1999 2000 2001 2002 2003 2003 2004 2004 2004 2004 2005 2005 2005 2005 2006 2006 2006 2006 2006 2006 2007 2007 2008 2008 2008

Evnement

C.

Watson et Crick dcouvrent que le support de linformation gntique est lADN S Arrt Chakrabartu USA conduisant la brevetabilit du vivant aux USA M Waclaw Szybalski introduit pour la premire fois le terme synthetic biology S Asilomar International Conference sur les technologies recombinantes M Maxam et Gilbert publient "DNA sequencing by chemical degradation" S Fred Sanger publie "DNA sequencing by enzymatic synthesis". S Prix Nobel pour Smith, Arber et Nathans pour la dcouverte des enzymes de restriction M Squenage du premier gnome, le virus PhiX174 S Khorana (+17pers) ralise la synthse dun gne pour la premire fois (207 bp) S Bayh Dole Act, loi permettant aux universits de breveter des inventions sur fondspublics M Racaniello et Baltimore ont construit un poliovirus par assemblage de cDNA S Premire publication publique sur la PCR par Kary Mullis S Premire bactrie squence, Haemophilus influenzae S Stemmer synthtise un grand gne (2700 bp) par PCR S Directive europenne sur la brevetabilit des gnes et des squences partielles de gnes M Clonage complet dun virus influenza de type A S Cration de lentreprise GeneArt E Cration de lentreprise Blue Heron Biotech E Squenage du gnome humain M Attaque du 11 septembre M Wimmer construit un poliovirus avec des oligonuclotides commands sur internet en 1an M Synthse en 14 jours dun virus phiX174 (5386bp) par un group de linstitut Venter S Cration de lentreprise DNA2.0 E Premier concours de biologie synthtique S Synthetic Biology, premire confrence internationale sur la biologie synthtique au MIT M Tian dveloppe un procd de synthse de squences longues de 14.5 kb (DMD) S Cration de Codon Devices E Synthse direct du virus de la grippe espagnol (1918) par Tumpey S Chan1, Kosuri et Endy synthtise en le redesignant un bactriophage T7 S Premire comptition internationale de biologie synthtique iGEM M Cration de lentreprise Synthetic Genomics E Reconstruction dun virus fossile S Synthetic Biology 2.0, luniversit de California, Berkeley M Cration de linstitut J. Craig Venter E Cration du Synthetic Biology Engineering Research Center E Dept de brevet sur lorganisme minimal Synthia (20070122826) E Synthse commerciale dun fragment dADN de 35kbp par Codon Devices E Rapport par le groupe ETC sur la Extreme Genetic Engineering M Synthetic Biology 3.0, lETH de Zurich M Synthse commerciale dun fragment dADN de 52kbp E Synthse du gnome complet dune bactrie Mycoplasma genitalium (582,970 bp) E Synthetic Biology 4.0, ; Hong Kong M

Source : Franois Le Fvre (2008)

Franois Le Fvre 2008

15

B. TechnologiesDeux grands types de technologies sont associes la biologie synthtique : celle qui permet de lire la squence de lADN (plus ancienne) et celle qui permet de synthtiser ce mme ADN la synthse. Ces deux technologies sont au cur de lindustrie de biologie synthtique : lune permettant de synthtiser les gnes, lautre permettant de vrifier la synthse obtenue.

1. Squenage des acides nucliquesLe squenage de lADN consiste dterminer lenchanement des nuclotides, Adnine (A), Guanine (G), Cytosine (C) et Thymine (T), composants de lADN. La squence ainsi obtenue permet ensuite grce des analyses bioinformatiques de dterminer la position et aussi la fonction des gnes. Cette technologie est utilise en biologie synthtique afin de dterminer si les squences produites sont bien conformes la squence demande par le client.Table 2 : Diffrentes technologies de squenage de lADN.

Technologie de squenage Pyrosequencing Par synthse Ligation-based Single DNA molecule Microcapillaire NanoPore DNA chip Single Molecule Real Time Fluorescence Resonance Energy Transfer Electron microscopy

Entreprise / Produit 454 Life Sciences / GS 20 Illumina Applied Biosystems Helicos Divers laboratoires Universit de Harvard Divers laboratoires Pacific Biosciences VisiGen Divers laboratoires

Statut Commercialis Commercialis Commercialis Commercialis Dveloppement Dveloppement Dveloppement Dveloppement Dveloppement Dveloppement

Source : Franois Le Fvre (2008) partir dune prsentation de Jean-Marc Aury.

Les diffrentes technologies de squenage actuellement commercialises se distinguent par : - Leur rapidit de squenage ( nb de lecture par run) - La longueur des lectures - Le temps de chaque run Ces paramtres influencent sur la qualit de la squence en termes de nombre derreur, mais aussi sur la facilit raliser lopration dassemblage. Les technologies actuelles ne permettent pas de squencer en seule fois un gnome, il faut pour cela le dcouper en plusieurs parties chevauchantes, qui sont chacune squence puis mis bout bout lors de lopration dassemblage. Plus les squences de lectures sont petites, plus le nombre de combinaison pour assembler est grand et ncessite de puissants algorithmes et ordinateurs.Table 3 : Comparaison des performances de la prochaine gnration de squenceurs.

Source : The impact of next-generation sequencing technology on genetics by Elaine R. Mardis. [http://www.ajhg.org/images/mardis.pdf]

Franois Le Fvre 2008

16

Applied Biosystems ABI 3730XL

Roche / 454 Genome Sequencer FLX

Illumina / Solexa Genetic Analyzer

Applied BiosystemsSOLiD

Figure 3 : Photos des principaux squenceurs de la nouvelle gnration. Source : partir dune prsentation de Jean-Marc Aury (chercheur au Genoscope)

Il faut noter que lamlioration de ces technologies induit une augmentation considrable des volumes de donnes numriques grer, ce qui ncessite outre lutilisation de matriels informatiques de hautement performant, des logiciels et algorithmes de bioinformatique permettant dexplorer, danalyser ces donnes pour en extraire une information pertinente. Plusieurs entreprises prcdemment cites participent au X-Price : 1000 gnomes dont le but est de squencer 1000 gnomes humains en 10 jours pour moins de 10.000$ par gnome. Lavenir nous rserve de fantastiques applications dans ce domaine.

2. Synthse dADNLa biologie synthtique repose sur la possibilit de synthtiser des gnes, voire des gnomes et ce sans matrice initiale, ce qui soppose au gnie gntique. Dautre part, la biologie synthtique dveloppe une approche de type ingnierie qui permet aux scientifiques dindustrialiser le procd de design de ces fragments dADN par lutilisation de parts, devices et systmes standardiss. [Voir p21] Depuis 30 ans, le gnie gntique consiste utiliser des technologies de biologie molculaire (essentiellement la Polymerase Chain Reaction - PCR) afin de couper/coller des fragments dADN provenant dorganismes initiaux stocks dans des banques dans des organismes htes grce aux enzymes de restrictions. Grce la mutagense dirige, les scientifiques pouvaient modifier ponctuellement la squence coller, pour ainsi tudier les effets dune mutation. La biologie synthtique offre un tout autre type doutil. Tout dabord, les scientifiques sont capables de faire synthtiser la demande toutes squences dADN contenues dans les bases de donnes mais galement toutes squences non naturelles, c'est--dire nayant pas dquivalent dans la Nature. La longueur de ces squences, suprieure 200 bp diffrencie ainsi lindustrie de la biologie synthtique de celle lie la synthse doligonuclotides, fragment dADN infrieure 200 bp, lments de base pour des approches de type biologie molculaire (PCR, cloning etc). [Voir la Figure 4]

Franois Le Fvre 2008

17

101

102

103

104

105

106

107

Oligos Gne Circuits gntiques Gnome minimal Gnome designFigure 4 : Domaines de longueur de fragments dADN synthtiss. Lchelle en haut reprsente le nombre de paire de base synthtise en puissance de 10. Ainsi les oligonuclotides vont de 1 200 nuclotides. Source : Inspire dune prsentation powerpoint de Carr et Kong du MIT Media Laboratory [http://cba.mit.edu/events/07.05.fluid/Carr_Kong.ppt]

Les diffrents procds de synthse sont rsums dans la Table 4, le matriel ddi la synthse est illustr succinctement dans la Figure 6. La Figure 6 explicite le procd majeur de synthse de long fragments dADN.Table 4 : Technologies de synthse dADN.

Technologie Entreprise Photolithographie Affymetrix Control de la localisation de la synthse (par Nimblegen Inc. la lumire / chaleur) sur puce ADN Impression par jet AgilentSource : Franois Le Fvre (2008) Figure 5 : Prsentation des diffrents procds de synthse de lADN. A Synthse dADN par le procd impression dAgilent . B Synthse dADN par le procd Digital Mirror device de Nimblegen, Inc. C. Microfluidics for Gene Fabrication. Source A: site web de Agilent [http://www.chem.agilent.com/temp/ radD75B2/00000176.pdf] B : site web de Nimblegen [http://www.nimblegen.com/images/ synthesis_illustration.jpg] C : Prsentation du MIT Media Laboratory [http://cba.mit.edu/events/07.05.flui d/Carr_Kong.ppt]

Franois Le Fvre 2008

18

Figure 6 : Procd actuel de synthse de gnes et de gnomes partir doligonuclotides. Source : Cette figure est extraite du rapport Synthetics genomics, option for Governance

Figure 7: Processus de commande gne par Internet. Le scientifique commande directement via un portail Internet la squence de ces gnes intrt. Il recevra sous 14 jours la totalit de la squence par la poste. Cette illustration est tire du site de lentreprise Mr. Gene. [http://mrgene.com/PortalData/1/Resources/imagepool/business_model.gif].

Franois Le Fvre 2008

19

C. Approches complmentaires en biologie synthtiqueLa biologie synthtique sorganise en deux approches complmentaires: d-assemblage ou assemblage de la vie.

1. Top-down D assemblageCette approche consiste prendre un systme biologique existant et le manipuler de faon obtenir un systme plus simple et ainsi plus comprhensible et manipulable. Concrtement, cela consiste prendre une bactrie et lui retirer souvent ses gnes un un pour obtenir un gnome contenant uniquement les gnes ncessaires pour pousser dans des conditions contrles en laboratoire. Le projet actuel le plus abouti est celui de lInstitut J.C. Venter avec lorganisme synthtique Synthia . Un groupe de recherche men par le prix Nobel Hamilton Smith travaille concevoir Mycoplasma laboratorium, une bactrie gnome minimal issu de Mycoplasma genitalium. Ainsi en 1999, lquipe avait identifi la liste des gnes ncessaires et suffisants pour crer cette bactrie. En 2008, lquipe associe la Gene Foundries, Blue Heron Biotechnology, a synthtis le gnome complet, soit 580 000 paires de bases dADN. La prochaine tape consistera injecter ce gnome synthtis dans une bactrie receveuse afin de remplacer son gnome initial, et de crer ainsi la premire vie synthtique ! Le but de lInstitut J.C. Venter est de crer des organismes synthtiques pour produire des biocarburants. Nous reviendrons plusieurs fois dans ce rapport pour aborder les diffrents aspects de ce projet : questions thiques et proprit intellectuelle. Le groupe activiste ETC a dailleurs donn le nom de Synthia, or the pandora bug ce projet pour alerter lopinion publique sur les risques lies aux expriences de biologie synthtique.Table 5 : Quelques donnes cl sur le projet phare M. laboratorium.

Bactrie originale Bactrie finale Nom de code Nombre de gnes initiaux Nombre de gnes finaux Institut Chef de projet AnneSource : Franois Le Fvre (2008)

Mycoplasma genitalium Mycoplasma laboratorium Synthia 482 381 Insitut J.C.Venter Hamilton Smith 1999-2008

Franois Le Fvre 2008

20

2. Bottom-Up - AssemblageLapproche dite Botton-Up consiste dfinir des briques lmentaires et les assembler pour fabriquer un gnome rpondant des spcifications fonctionnelles prcises. Les concepts de base ont t dfinis par les membres du groupe BioFab [Voir Chapitre 2 : A.1] : - Cration de diffrents niveaux de hirarchisation : DNA, parts, devices et systems - Abstraction - Dcouplage - StandardisationTable 6 : Dfinitions et exemples dimplmentation des BioBriocks.

Niveau DNA Part Device System

Dfinition squence de nuclotides une squence de DNA ralisant une fonction spcifique Ensemble de parts avec une fonction de plus haut niveau Ensemble de devices organiss

Exemple ATGGATCATGATG RBS, CDS, promoteur, terminateur Inverseur Oscillateur

Source : Franois Le Fvre (2008)

Ces concepts de base marquent une rupture par rapport lingnierie gntique, et apportent une vue clairement issue de lingnierie logiciel ou de lindustrie lectronique.

Figure 8 : Modules de la biologie synthtique. Abstraction barriers (red) block all exchange of information between abstraction levels. Interfaces (green) enable the limited and principled exchange of information between levels. Example exchanges are given in quotes. Source : Foundations for engineering biology, Drew Endy. Nature 2005

Franois Le Fvre 2008

21

Ces concepts dassemblage marquent une rupture par rapport lapproche classique de gnie gntique, qui pourrait conduire un changement de paradigme scientifique. Lutilisation de ces concepts dingnierie ainsi que le dveloppement des technologies associes et des gains en temps/cot vont ainsi damliorer considrablement la performance de la biologie synthtique. Ds lors, des impacts conomiques sont prvoir dans diffrents secteurs dactivits.

Figure 9 : Point dinflexion dans les technologies de biologie. Lamlioration des technologies cls, de squenage et de synthse dADN, et le dveloppement dapproche de bio ingnierie pourraient marquer le commencement dune nouvelle rvolution ayant des implications dans toute lconomie. Source : Rapport Bio-Era R. Carlson

D. ApplicationsLes domaines dapplications de la biologie synthtique sont trs vastes et auront un impact sur lconomie mondiale. Si dans la plupart des cas, les domaines dapplications de la biologie synthtique sont les mmes que ceux de la biotechnologie, ils sont toutefois caractriss par un renouveau dans les approches, par des gains en terme de productivit, par la diminution des dchets gnrs. Certaines applications sont toutefois trs novatrices. Nous avons choisi den dtailler certains.

1. Nouveaux processus pour la production de substancesLa biologie synthtique vise dvelopper des microorganismes capables de synthtiser des produits chimiques et des mdicaments des cots moindres que les technologies actuelles. Ces microbes et plantes deviendront de vritables usines de fabrication. Ces organismes permettront galement de rduire limpact environnemental des procds actuels de synthse qui usent beaucoup de catalyseurs polluants et ncessitent souvent des dpenses nergtiques importantes. Nous pouvons dj citer deux succs : - La synthse du 1,3-propanediol, un intermdiaire critique pour la synthse des polymres de la plateforme de DuPont, - La synthse dartemisinin, un mdicament anti-malaria par une bactrie avec un device ralis par luniversit de Berkeley

Franois Le Fvre 2008

22

Le nombre dapplications dans llaboration de bactries synthtiques est immense. Une premire piste pour explorer les possibilits consiste sintresser aux mtabolites identifis par le DOE comme mtabolites clefs.Table 7 : Liste des 12 mtabolites dintrt identifis par le DOE. Ces mtabolites peuvent aisment tre produits partir de sucres issus de lagro-industrie. Ils peuvent tre ensuite convertis dans des produits et matriaux chimiques haute valeur ajoute. Ils sont connus sous la dnomination The top 12 building blocks (USA 2004).

1,4 succinic, fumaric and malic acids 2,5 furan dicarboxylic acid 3 hydroxy propionic acid aspartic acid glucaric acid glutamic acid

itaconic acid levulinic acid 3-hydroxybutyrolactone glycerol sorbitol xylitol/arabinitol

2. Bio senseursLa biologie synthtique dveloppe des organismes qui pourront ragir des variations physico-chimiques de lenvironnement. Ces microorganismes seront des bio-senseurs trs fins et permettront de dtecter aussi bien des variations de pH, la prsence de toxines, de bactries pathognes ou de toutes autres molcules.

3. Production dnergieUne des applications phare de la biologie synthtique est la conception de microorganismes capables de produire des biocarburants partir de biomasse vgtale ou de dchets. Le march des biocarburants est valu environ $22 billion en 2006 et plus de $110 billions en 2020. Le design de microorganismes photosynthtiques permettant de produire des quantits importantes dhydrogne fait galement partie des projets de biologie synthtique.

4. BioremdiationLa biologie synthtique va permettre de dvelopper des organismes (bactries et plantes) capables dliminer des produits toxiques de leur environnement une toute autre chelle que lingnierie gntique. Nous pouvons ds lors citer un succs dans la dgradation des organophosphates, driv de pesticides par la bactrie Pseudomonas.

5. Cellules avec des nouvelles proprits pour amliorer le corps humainA plus long terme, la biologie synthtique pourra produire des cellules humaines aux capacits volues : reconnaissance de virus ou de pathognes, ou capable de rgnrer un organe.

Franois Le Fvre 2008

23

E. Evolution et limites venir de la biologie synthtique1. Evolution des technologies de synthse/squenage.Il est important de noter que le cot des technologies de biologie synthtique est en diminution rapide et que les rendements (nombre de bases squencs ou synthtiss) sont en augmentation trs rapide. Ainsi, sil a fallu une anne pour que Khorana et son quipe de 17 personnes synthtisent le premier gne (207 bp) en 1979, aujourdhui la synthse dun gne de 1000 bp demande 10 jours et ce pour moins de 1000$. Les amliorations des technologies portent surtout sur la paralllisation et la miniaturisation de ces systmes de synthse, ce qui vite les manipulations humaines, et les pertes de matriels.

Figure 10 : Cot du squenage et de la synthse dune paire de base dADN. Source : Rapport Bio-Era R. Carlson

Les technologies actuelles de synthse de gne sont toutefois limites tant par le temps de synthse, la longueur du fragment obtenu (voir le Table 8) et enfin le taux derreur. Celui-ci est diminu environ 1 erreur pour 4000 bases synthtises grce lutilisation denzyme de dtection et rparation des mauvais appariements (MutS)Table 8 : Dlai de synthse de gne en fonction de la longueur du fragment. Compilation sur les Big Four (Blue heron Biotechnology, DNA2.0, Codon Devices, GeneArt).

Longueur / Dlai Jusqu 1000 bp 1001 - 3000 bp > 3000 bpSource : Franois Le Fvre

Moyen 12 jours 17 jours 26 jours

Rapide 8 jours 13 jours 4 jours

Franois Le Fvre 2008

24

2. Loi de MooreCertains scientifiques montrent que la biologie synthtique, par lvolution de ces rendements de synthse, semble suivre la loi de Moore. En 1965, M. Moore proposa un nonc qui sest avr exact entre 1971 et 2005 : la puissance des microprocesseurs double tous les 18 mois prix constant . Cette nonc est connue sous le nom de : loi de Moore .

Figure 11 : Amlioration de la productivit dans la synthse et le squenage de lADN. Lenzyme naturelle responsable de la synthse dADN chez Escherichia coli est la DNA polymrase de type III. Ce graphique illustre lvolution des technologies de squenage et de synthse, en les comparant lvolution du nombre de transistors par puce et la capacit de synthse de la DNA polymrase III. Il semblerait que les technologies du bio et de llectron suivent la mme progression. Source : Rapport Bio-Era R. Carlson

Les prdictions pour 2010 tablent sur 0,01$/ bp squence et 0,1 $/ bp synthetise11. Ainsi, la synthse du plus petit gnome de bactrie, Mycoplasma genitalium, reviendrait moins de 60.000 $. Ces lments laissent penser Jean-Michel Billaut, conseiller au dpartement Information Technologie de BNP-Paribas, qu aprs la rvolution Agricole (1.0), aprs la rvolution industrielle (2.0), et la 3.0 (la rvolution numrique), la 4.0 dmarre 12.La Figure 12 illustre montre que les rvolutions industrielle (industrial) et numrique (information) ont suivi une volution similaire en terme de valeur ajoute conomique, et extrapole lvolution venir de la rvolution molculaire (molecular) dont fait partie la biologie synthtique. A lheure actuelle, cette rvolution molculaire amorce sa phase de croissance exponentielle en terme de valeur ajoute conomique.

11 12

http://www.synthetic-biology.info/links.html http://billaut.typepad.com/revolution3point0/

Franois Le Fvre 2008

25

Figure 12 : Evolution de la valeur ajoute conomique des technologies

3. Standardisation et DesignLa biologie synthtique doit pouvoir dvelopper son approche dite dingnierie. Pour cela, des outils doivent tre dvelopps pour permettre de designer, tester et standardiser les briques lmentaires. Des outils informatiques bass sur des connaissances biochimiques et de biologie des systmes devront tre capable de designer la squence lADN en fonctions de proprits physico-chimiques (temprature de fusion, biais de codon, teneur GC) mais aussi de proprits de contrle et rgulation de bas niveau ( promoteur, rgulateur .) et de haut niveau (interaction entre parts, design de circuits gntique et protique), voire de niveau suprieur (interaction au niveau cologique entre organismes). A terme, lindustrie de la biologie synthtique devra donc dvelopper des logiciels de modlisation et de design de haut niveau, tels ceux qui sont actuellement utiliss en aronautique, en construction automobile, navale ou dans le btiment. A titre dexemple, nous pouvons ainsi mentionner CATIA, (Conception Assiste Tridimensionnelle Interactive Applique / Computer-Aided Threedimensional Interactive Application), un logiciel de conception assiste par ordinateur (CAO) cr par la socit Dassault et utilis par Boeing pour la ralisation du 777. La biologie synthtique est en passe de dvelopper un nouveau type dindustrie de service, passant des DNA fabrication shops DNA design houses , proposant des Computer Aided Genome Design Application

Franois Le Fvre 2008

26

Table 9 : Exemples de logiciels ddis la modlisation en biologie synthtique. Ce tableau regroupe des logiciels dit de bas niveau permettant de designer des squences de gnes en fonction de proprits physico-chimique, de moyen niveau permettant de designer des gnes ou protines par rapport leur fonction macroscopique (interaction entre domaine de protine) ou encore des logiciels de haut niveau permettant dintgrer lchelle dune cellule de grands nombres de proprits (concentration de molcule, activation de gne, prsence /absence de raction)

Niveau Bas Moyen Haut

Logiciel Gene Designer Gene Composer Sympheny

Entreprise GeneArt Emerald Biosystems Genomatica The National Resource for Cell Analysis and Modeling MIT international research project Commissariat lEnergie Atomique (CEA) Berkeley

Fonctionnalit Design de gnes Design de gnes pour avoir des proteines aux fonctions dsires Modlisation et analyse des phnotypes, optimisation de souches Modlisation cintique des reactions cellulaires Outil pour designer des parts et devices de biologie synthtique Modlisation cintique des reactions cellulaires Modlisation et analyse des phnotypes, optimisation de souches Un ensemble doutil open source pour reprsenter et modliser les processus cellulaires

Haut Haut Haut Haut

VirtualCell BioJade E-Cell NemoStudio

Haut

BioSpice

Source : Franois Le Fvre

Franois Le Fvre 2008

27

4. RoadmapLa biologie synthtique est un domaine trs prometteur mais encore immature comme le montre ltat de lart actuel, tant sur le point de vue scientifique, technique ou financier et thique. Un certain nombre dobstacles doivent tre levs pour permettre lindustrie de la biologie synthtique de se dvelopper pleinement. La Table 10 prsente une liste non exhaustive des questions et problmes auxquels les personnes impliques dans des projets de biologie synthtique devront apporter une rponse pour passer lchelle industrielle. Nous reviendrons tout au long de ce rapport sur ces lments. Technologie Diminuer les dlais de synthse Diminuer le cot de synthse Diminuer le taux derreur de synthse Augmenter la taille des fragments synthtiss Passer lchelle des chromosomes Standardiser les composants Dvelopper des logiciels de modlisation, de design et de test de parts, devices et systems Amliorer les transferts de ces squences dans des organismes receveurs. Science Etre capable de dmarrer un gnome entirement synthtique dans une cellule hte Avancer dans les aspects de modlisation des systmes biologiques Finance Etre capable de trouver les financements initiaux pour les start-up (difficult en Europe) Industrie Dvelopper le tissu conomique ncessaire au dveloppement des bioraffineries Augmenter les capacits de production dADN synthtique Ethique Socit Proprit Intellectuelle Avancer dans la rflexion autour des organismes gntiquement modifis Permettre une protection des inventions tout en garantissant laccs aux technologies de base lensemble de la communaut Dvelopper les formations universitaires dans ce domaine

Table 10 : Avances ncessaires au dveloppement de lindustrie de la biologie synthtique Source : Franois Le Fvre (2008)

Franois Le Fvre 2008

28

Chapitre 2 :

Acteurs majeurs de la biologie synthtique _______

Franois Le Fvre 2008

29

Chapitre 2 : Acteurs de la biologie synthtique

Chapitre 2 :

Acteurs majeurs de la biologie synthtique

Aprs avoir dfini la biologie synthtique, regard sur quelles technologies elle se basait, et valu ses applications potentielles, il convient maintenant de dterminer quels sont les acteurs de ce secteur. La biologie synthtique est un domaine encore immature scientifiquement et pourtant des acteurs privs, les Gene Foundries et les BioSynTechs, ont dj dessin les contours du march de la biologie synthtique au niveau mondial. Dans ce chapitre, nous nous efforcerons de caractriser au mieux ces acteurs : Quelles sont les personnalits cl de ce secteur ? Qui sont les Gene Foundries et les BioSynTechs ? Sur quel(s) march(s) se dveloppent-t-elles ? Qui sont leurs clients, leurs fournisseurs ? Comment sont ns ces acteurs majeurs du secteur ?

A. Des personnalits fortes influencent la biologie synthtique1. BioFab GroupParmi les acteurs principaux de la biologie synthtique, nous nous devons citer le BioFab Group . Ce groupe rassemble des scientifiques des plus grandes universits amricaines, qui ont dvelopp la biologie synthtique au sein de leurs laboratoires mais galement au sein des premires entreprises de biologie synthtique, en tant que fondateurs ou conseillers scientifiques. Leur relation avec le secteur priv et le monde politique est un lment cl de la comprhension du secteur de la biologie synthtique. Cest pour cela que nous avons souhait les mentionner.Table 11 : Membres du Bio Fab group. Ces scientifique sont lorigine du dveloppement de la biologie synthtique aux Etats-Unis.

Scientifique David Baker Jim Collins Drew Endy Joseph Jacobson George Church Jay Keasling Paul Modrich Ron Weiss Christina Smolke

Universit University of Washington Boston University Massachusetts Institute of Technology Massachusetts Institute of Technology Harvard Medical School University of California, Berkeley Duke University Princeton University California Institute of Technology

Entreprise Conseiller scientifique de Codon Devices Conseiller scientifique de Codon Devices Fondateur/ Conseiller scientifique de odon Devices Fondateur de BioBricks Foundation Fondateur / Conseiller scientifique de Codon Devices Fondateur / Conseiller scientifique de Codon Devices Fondateur / Conseiller scientifique de Codon Devices Fondateur de Amyris Biotechnologies Conseiller scientifique de Codon Devices Conseiller scientifique de Codon Devices Conseiller scientifique de Codon Devices

2. Autres personnalits lies la biologie synthtiqueBien sr la liste des personnalits ne sarrte pas l. Nous avons donc tenu complter cette liste avec dautres lments. Il faut toutefois remarquer que les scientifiques europens sont beaucoup moins lis avec des entreprises par rapport leurs confrres amricains. Une liste

Franois Le Fvre 2008

31

Chapitre 2 : Acteurs de la biologie synthtique trs dtaille est dcrite dans le rapport Synbiology, An Analysis of Synthetic Biology Research in Europe and North America . Au sein de ces acteurs apparat le nom de Craig Venter, le scientifique la tte de lentreprise Celera qui avait dfi le consortium international lors du squenage du gnome humain. Aujourdhui, avec Hamilton Smith, prix Nobel, Craig Venter travaille au sein de Synthetics Genomics la ralisation de la premire bactrie synthtique, Mycoplasma laboratorium driv de Mycoplasma genitalium. Dbut 2008 en partenariat avec Blue Heron Biotechnology, ils ont synthtis le premier gnome bactrien. Cette bactrie synthtique doit servir de support la fabrication dusine cellulaire pour la synthse de biocarburant. Pour linstant la transplantation de ce gnome synthtique au sein dune bactrie receveuse na pas russi, mais nul ne doute que cela devrait arriver trs bientt.Table 12 : Acteurs moteur de la biologie synthtique sur le plan prive ou acadmique.

Personne Hamilton SMITH Craig VENTER Richard Jefferson Antoine Danchin Alfonso Jaramillo Philipe Marlire

Entreprise/Universit Synthetics Genomics Synthetics Genomics CAMBIA GeneArt Institut Pasteur Ecole Polytechnique Isthmus

Pays USA USA EU EU EU EU

Source : Franois Le Fvre (2008), recherche sur Internet et lecture de revue de presse.

B. Acteurs acadmiques : une domination amricaineLa biologie synthtique nest pas une science totalement mre, pour linstant elle se dveloppe surtout au sein des grandes universits nord amricaines et europennes. Lanalyse des publications (nombre, origine, financement) effectue par le projet SYNBIOCOMM permet de dgager une vue densemble de la recherche acadmique en terme de biologie synthtique.

1. Publications et financementLanalyse effectue par le projet SYNBIOCOMM met en vidence que le champ de la biologie synthtique, n dans les annes 1970, nest en train de dcoller que depuis 2004. Ainsi le nombre de publications a t multipli par 5 entre 2000 et 2004. Ce changement est d, entre autres, aux avances technologiques qui ont rsult en une baisse significative des cots : la synthse dune paire de base cotait 30$ en 1970, 1$ en 2004, et environ 0.80$ en 2008.

Figure 13 : Nombre de publications dans le domaine de la biologie synthtique par anne.

Franois Le Fvre 2008

32

Chapitre 2 : Acteurs de la biologie synthtiqueCe diagramme montre le dcollage des publications depuis 2004, et galement le soutien politique qui sest amorc depuis 2003 et qui a ainsi permis le financement de nombreux travaux de recherche. Source : Synbiology, An Analysis of Synthetic Biology Research in Europe and North America

Les experts de SynBioComm notent toutefois un dcalage important entre lAmrique du Nord et lEurope, tant par le nombre de publications, le dlai de temps (les publications europennes ont dbut bien aprs les publications amricaines) et par les financements publics qui soutiennent les projets de biologie synthtique. Il est noter que 85% des financements pour des projets de recherche publics dans le monde sont financs par les EtatsUnis.

Figure 14 : Rpartition des publications scientifiques et des financements par pays. Le cadran de gauche montre que prs de 70% des publications en biologie synthtique sont dues des quipes amricaines, alors que lEurope reprsente seulement 24% des publications scientifiques. La diffrence entre les Etats-Unis et le reste du monde est encore plus flagrante lorsque lon compare les financements qui sont 85% dorigine amricaine. Source : Synbiology, An Analysis of Synthetic Biology Research in Europe and North America

2. Enseignement et biologie synthtiqueIl est important de noter que peu de cours denseignement suprieur sont ddis la biologie synthtique. Toutefois, il convient dattirer lattention sur deux lments : le centre SynBERC et le concours iGEM.

a) The Synthetic Biology Engineering Research Center (SynBERC)En 2000, un centre de recherch ddi la biologie synthtique t cr: SynBERC ou Synthetic Biology Engineering Research Center.[ www.SynBERC.org] Ce centre fait partie de 5 tablissements de Recherche et dIngnierie financ par le National Science Foundation (NSF) pour 10 ans, dont le but est de dvelopper des programmes de recherche interdisciplinaires dans des domaines des hautes technologies et des applications industrielles. La force de cette approche est de combiner dans un mme lieu: - des tudiants et tudiantes trs motivs, - des enseignants-chercheurs, experts en biologie, mathmatiques, informatique ou ingnierie, - un rseau trs connect avec les industriels du secteur, o fournisseurs doutils gntiques et de design des composants ADN,

Franois Le Fvre 2008

33

Chapitre 2 : Acteurs de la biologie synthtique o firmes pharmaceutiques et chimiques, o firmes impliques dans le dveloppement de logiciels de modlisation et doutils bio- informatiques, - des contacts avec des Venture Capital afin de conseiller et daider au dveloppement de start-up, - de largent, du matriel de haute qualit et des btiments ddis Le SynBERC a pour vocation de dvelopper grce la biologie synthtique de nouveaux composants biologiques ddis des applications mdicales (dtection et destruction de tumeurs), ou de biormdiation, voire de dtection dagents biologiques pathognes. Ces applications seront dtectes et transformes en innovation, voire en start-up ou directement intgres via des brevets au sein des grands groupes du secteur.Table 13 : Universits partenaires dans le centre SynBERC bas Berkeley

University of California at Berkeley Harvard University Massachusetts Institute of Technology Prairie View A&M University University of California, San Francisco

b) iGemUne initiative amricaine a conduit au dveloppement dun concours de biologie synthtique: International Genetically Engineered Machinery- organis au MIT. Ce concours vise permettre des quipes de jeunes tudiants de toutes disciplines crer un projet de biologie synthtique. Le MIT Registry of Standartd Biological parts met leur disposition lensemble des parts open-source dveloppes lors des concours antrieurs. Sans beaucoup de connaissances en biologie, ces tudiants sont capables dassembler ces fragments dADN pour raliser des fonctions de haut niveau : dtecteur darsenic induisant un changement de pH du milieu, ou bio senseur mettant une odeur de banane, film bactrien aux proprits photographiques La liste est longue et sagrandit chaque anne. Ce concours permet de donner le got de la biologie synthtique ces tudiants, de leur apprendre travailler dans un environnement interdisciplinaire, mais aussi concrtement implmenter avec les concepts de la biologie synthtique des systmes oprationnels. Le dtecteur darsenic, par exemple, voulait rpondre un besoin des populations indiennes qui ne disposaient pas de mthode peu onreuse pour dtecter ce polluant dans leur eau. Cette anne, en 2007, une quipe franaise a conu un organisme multicellulaire bactrien et a remport le premier prix de recherche fondamentale. Jai pu, en tant que conseiller, participer llaboration de ce projet.

Franois Le Fvre 2008

34

Chapitre 2 : Acteurs de la biologie synthtique

Figure 15 : Capture dcran du site web The Registry of Standard Parts du MIT Cet cran est le point dentre de la communaut open-source pour la biologie synthtique. Vous pouvez en quelques clics slectionner les parts afin de fabriquer un device ou circuit gntique pour limplmenter dans un chassis donn (bactrie, cell-free, cellule de mammifre) Source : [http://partsregistry.org/Part_Type]

Franois Le Fvre 2008

35

Chapitre 2 : Acteurs de la biologie synthtique

C. Les entreprises du secteur de la biologie synthtiqueNous pouvons distinguer actuellement deux grandes catgories dentreprises de biologie synthtique : - celles en charge de synthtiser proprement parler des gnes ou Gene Foundries - celles qui utilisent ces gnes ou gnomes synthtiques afin de produire des applications haute valeur ajoute, ou BioSynTech , par analogie avec le mot Biotech. Nous allons les tudier afin den dterminer leurs caractristiques, leurs clients et fournisseurs, le type de march sur lequel elles voluent.

1. Les Gene Foundries

a) Dfinition Cur de mtierInitialement, les Gene Foundries sont des entreprises de biologie synthtique qui produisent pour leurs clients des fragments dADN. Quatre entreprises de type Gene Foundries se distinguent sur le march mondial de par leur envergure en terme de capacit de production, de technologie, et de poids financiers. Nous les avons prnommes les Big Four , la liste est dans le Table 14. Lanalyse dtaille de ces Big four nous permettra de dgager des lments caractristiques de ce secteur.Table 14 : Les Big 4 de la synthse de gne.

Entreprise Cration Blue Heron Biotechnology Codon Devices GeneArt DNA2.0Extrait de la liste des Gene Foundries fournie en annexe Source : Franois Le Fvre (2008)

Statut Prive Prive Public Prive

Pays USA USA DE USA

b) Liste et rpartitionJai tabli une liste plus complte mais non exhaustive des Gene Foundries dans le monde grce des recherches par mots cls sur Internet mais aussi en utilisant les listes suivantes fournies au sein des documents de Bio-Era, de lETC et de SynBio. Celle-ci est prsente en intgralit en annexe et publie directement sur Internet sous la forme dun tableur et dune carte interactive. De plus, jai galement fait une analyse plus dtaille de certaines dentre elles, les Big Four , en tablissant une fiche didentit prcise de ces compagnies avec des recherches sur le site de leur socit et avec des recherches dans des revues de presse. Ces fiches didentit sont prsente en annexe et publie sur Internet. Jai ainsi valu environ 70 le nombre dentreprises de type Gene Foundries dans le monde. Elles sont majoritairement localises aux USA. LAmrique du sud et lAfrique en sont presque dpourvues. LAsie accueille plusieurs de ces entreprises, de par une volont des Gene Foundries amricaines de simplanter localement pour tre au plus proche de leurs clients mais galement par une prise de conscience par les gouvernements dAsie de limportance des applications ouvertes la biologie synthtique, comme en tmoigne linvestissement par lInde de US$1.6 billion sur les cinq prochaines annes13. Nos recherches

13

Blog de Rob Carlson http://synthesis.typepad.com/

Franois Le Fvre 2008

36

Chapitre 2 : Acteurs de la biologie synthtique ont toutefois t difficiles car la confusion avec des entreprises de synthse doligonuclotides est possible.

Figure 16: Rpartition mondiale des Gene Foundries. Source : Franois Le Fvre (2008)

c) Domaines dactivitsLanalyse des diffrents sites web des Big Four ma permis de distinguer 6 domaines dactivits stratgiques qui sont prsents dans la Table 15.Table 15 : Domaines dactivits stratgiques des Gene Foundries. Synthse ralise partir de lanalyse des diffrents produits et services dcrits sur les sites web des 4 Big Gene Foundries. (*) ce domaine dactivit nest pas stratgique au sens des Gene Foundries car il est plutt relatif aux entreprises de synthse doligonuclotide.

Domaines dactivit Stratgique des Gene Foundries Synthse doligonuclotides (200 bp) Ingnierie de protines Synthse de gnomes (>300 kbp) Obtention de collections de variantsSource : Franois Le Fvre (2008)

(1) Synthse dADNLe cur du mtier des Gene Foundries est de synthtiser des fragments dADN de diffrentes taille ; nous avons tenu distinguer les secteurs en fonction de la taille des fragments. La procdure classique de commande dun gne est dcrite la Figure 17. Il est important de noter que lactivit de synthse doligonuclotides, c'est--dire de courts fragments, ne reprsente que 40% de lactivit totale de la synthse ralise par les Gene Foundries, ce qui les distingue clairement des entreprises qui ne synthtisent que des oligonuclotides pour des applications de type PCR. [Voir Figure 18] Pour linstant, le domaine dactivit synthse de gnome nest pas dactualit, mme si nous pouvons noter la toute premire commande commerciale pour la synthse du gnome bactrien Mycoplasma laboratorium par Blue Heron Biotechnology pour Synthetic genomics.

Franois Le Fvre 2008

37

Chapitre 2 : Acteurs de la biologie synthtique

Figure 17 : Process de fabrication et produits typique dune Gene Foundries Aprs avoir command votre gne, celui-ci vous est livr sous la forme dun plasmide lyophilis, dune culture de bactries contenant votre plasmide, du chromatogramme des deux brins de votre gne et de la carte gntique du plasmide dinsert. Source 1: GeneArt [http://www.geneart.com/english/products-services/gene-synthesis/superspeeddelivery-kopie-1/index.html] Source 2 : Site de lentreprise DNA2.0 [http://www.dna20.com/genesyn/custom/productspecs.php]

Figure 18 : Rpartition de la taille des fragments dAD synthtiss par une Gene Foundries. Extrait du site web de GeneArt [http://www.geneart.com/english/products-services/genesynthesis/technologies/index.html]

(2) Optimisation de lexpressionLes Gene Foundries dveloppent de puissants algorithmes et une expertise afin doptimiser lexpression de la squence dADN demande par le client : en optimisant la squence au regard de lorganisme hte (Biais dans lusage des codons) mais aussi en optimisant la structure de lARNm afin que celui-ci soit traduit dans des conditions optimales. Ces services de design et doptimisation peuvent tre payants ou gratuits suivant les packages choisis.

(3) Ingnierie de protineLes protines rsultent de lexpression des gnes. Les Gene Foundries commencent proposer des services permettant de designer des sites actifs de protines, qui sont en charge de la ralisation dune raction chimique donne. Ces services sont tout rcents et sont fournis sous la forme dun partenariat.

(4) Obtention de collections de variantsLes Gene Foundries ont dvelopp des technologies de synthse qui leur permettent dintroduire des mutations dans la squence initiale permettant ainsi de crer des variants. Ces technologies permettent de crer des collections de variants qui sont ensuite tests,

Franois Le Fvre 2008

38

Chapitre 2 : Acteurs de la biologie synthtique screens par les clients dans le but de trouver la squence du gne qui conduit la protine ayant lactivit dsire. Ainsi, les Gene Foundries peuvent construire des banques de plusieurs millions de variations infimes ( 1011) , qui sont ensuite toutes testes en parallle.

d) Environnement dvolution des Gene FoundriesAfin de bien cerner le march de ces entreprises, nous avons regroup au sein dun mme schma les diffrents acteurs. Ce schma est bas sur les analyses de M. Porter, Choix stratgiques et concurrence, paru dans la revue Economica en 1992.

(1) Fournisseurs- Matires premires Afin de synthtiser des gnes, les Gene Foundries ont besoin des briques lmentaires que sont les acides nucliques : les quatre bases Adnine, Guanine, Cytosine, Thymine (A,G,C,T). Elles se fournissent auprs de chemical provider . Ces fournisseurs de produits chimiques sont prsents depuis plusieurs annes sur le secteur des biotechnologies et sont capables de fournir de grandes quantits de ces molcules. Les Gene Foundries ont galement besoin denzymes permettant de raliser la synthse et la ligation de grands fragments dADN et les corrections derreur. En effet, il est intressant de noter que cest grce des enzymes du Vivant (MutS entre autre) que les technologies de synthse dADN sont ralises lheure actuelle. Les