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Syrie et Irak : UN PATRIMOINE CULTUREL EN PERIL
SĂ©ance dâinformation et de rĂ©flexion
Compte-rendu
Le mercredi 22 avril 2015, de 9h Ă 13h CitĂ© de lâArchitecture et du Patrimoine
1) La formation des architectes au patrimoine en Syrie : La coopĂ©ration entre lâEcole de
Chaillot et la FacultĂ© dâarchitecture de Damas (2003-2011)
Mireille Grubert, Directrice de lâEcole de Chaillot
2) Actions et pistes de réflexion du ministÚre de la Culture
Bruno Favel, Chef du Département des affaires européennes et internationales,
Direction générale des patrimoines, ministÚre de la Culture et de la Communication
- Echanges avec la salle
3) Projection sur lâĂ©tat des lieux, les acteurs et le rĂŽle de lâICOMOS
Samir Abdulac, SecrĂ©taire gĂ©nĂ©ral dâICOMOS France, responsable du groupe de travail
de lâICOMOS sur la sauvegarde du patrimoine culturel en Syrie et en Irak
4) Les sites archéologiques syriens
Nathalie Cluzan, Archéologue, Conservateur au Musée du Louvre
5) Un panorama sur lâaction actuelle de lâUNESCO au Proche-Orient en crise
Giovanni Boccardi, Chef de lâUnitĂ© de la prĂ©paration et des rĂ©ponses aux situations d'urgence
au secteur de la Culture de lâUNESCO
- Questions et débat
6) Quâest-il possible de faire ? Conclusions
Pierre-Antoine Gatier, PrĂ©sident dâICOMOS France
2
Pierre-Antoine Gatier, PrĂ©sident dâICOMOS France, accueille les participants et remercie la CitĂ© de
lâarchitecture et de lâEcole de Chaillot de leur accueil. Il introduit Mireille Grubert, architecte-urbaniste
en chef de lâEtat, Ă plusieurs reprises impliquĂ©e dans des missions Ă lâĂ©tranger, et depuis 2003 Directrice
de lâEcole de Chaillot.
1) La formation des architectes au patrimoine en Syrie : La coopération entre
lâEcole de Chaillot et la FacultĂ© dâarchitecture de Damas (2003-2011)
La présentation de Mireille Grubert
introduit les missions de coopération au
niveau de la formation que lâEcole de
Chaillot, Ă la demande de la Direction
générale des patrimoines du MinistÚre de
la Culture et de la Communication et du
MinistĂšre des Affaires Ă©trangĂšres, a
menées en Syrie de 2003 à 2011. Ce
potentiel dâexpertise formĂ© avec lâEcole de
Chaillot pourra ainsi servir au pays quand
celui-ci commencera sa reconstruction, en sâappuyant sur ses nombreuses qualitĂ©s patrimoniales.
LâEcole de Chaillot bĂ©nĂ©ficie dâune expĂ©rience de 125 ans en matiĂšre de formation des architectes du
patrimoine et de 20 ans de coopĂ©ration Ă lâinternational. Elle veille Ă proposer des cursus de formation
adaptés aux contextes locaux pour des formations de longue durée (en Bulgarie, au Cambodge, au
Laos, au Vietnam) et Ă travers des ateliers croisĂ©s qui impliquent Ă la fois les Ă©lĂšves de lâEcole de Chaillot
et des universités partenaires (en Ecosse, Roumanie, Grande-Bretagne, Syrie, Chine, Italie, GrÚce).
La coopĂ©ration de lâEcole de Chaillot avec la Syrie a Ă©tĂ© menĂ©e en partenariat avec la FacultĂ©
dâArchitecture de lâUniversitĂ© de Damas (« Master professionnel en restauration et mise en valeur du
patrimoine architectural, urbain et paysager »). CâĂ©tait en Syrie la premiĂšre formation de spĂ©cialisation
au patrimoine en direction des architectes. Elle devait permettre de renforcer la capacité des
administrations et des agences privées à intervenir sur le patrimoine. La Direction générale des
antiquités et des musées de Syrie (DGAM) a été impliquée dans le partenariat, rendu possible et initié
par le ministĂšre français de la Culture et lâAmbassade de France en Syrie, avec le soutien de lâAgence
Universitaire de la Francophonie.
La coopĂ©ration a dĂ» ĂȘtre suspendue en mars 2011 face Ă la situation en Syrie, avant la fin du cycle de
deux ans de la quatriĂšme promotion syrienne. Les soutenances de fin dâĂ©tude ont malgrĂ© cela pu ĂȘtre
présentées en décembre 2011 à Paris. La formation a cependant pu continuer malgré le retrait de
lâEcole de Chaillot, dont elle est rĂ©guliĂšrement informĂ©e des avancĂ©es.
Les élÚves formés étaient des architectes syriens, issus des secteurs public et privé, avec une majorité
travaillant pour la DGAM. PrÚs de 25 architectes étaient sélectionnés tous les deux ans, et
poursuivaient leur activité professionnelle pendant la formation (les cours étaient dispensés sous
forme de sessions de 2 jours tous les 15 jours, par une quinzaine dâenseignants syriens, pour la plupart
universitaires, et huit praticiens français envoyĂ©s par lâEcole de Chaillot : ACMH, architectes du
patrimoine, ingĂ©nieurs, accompagnĂ©s par des chercheurs de lâIFPO). Plus de 70 architectes ont ainsi
été diplÎmés en 2003 et 2011. Les programmes étaient élaborés conjointement entre la faculté
dâarchitecture de Damas et lâEcole de Chaillot afin de rĂ©pondre aux mieux aux attentes des
professionnels syriens.
Etudiants d'une ancienne promotion de la coopération franco-syrienne à l'Ecole de Chaillot
3
Les modalités de contrÎle de connaissance impliquaient notamment des projets longs portant à la fois
sur lâarchitecture et lâurbanisme, les deux dimensions Ă©tant liĂ©es tout au long de la formation. Ces
études et analyses ont conduit à des projets de conservation et de réutilisation.
Les projets de fin dâĂ©tude des Ă©tudiants Ă©taient reprĂ©sentatifs de la diversitĂ© du patrimoine et de la
géographie du pays (les élÚves venaient de toutes les régions de Syrie), et associaient effectivement
les dimensions architecturale et urbaine.
Une Ă©tude de lâEcole de Chaillot sur les projets de fin dâĂ©tude a permis de pointer le type de
patrimoines sur lesquels les Ă©lĂšves se penchaient en prioritĂ© : il en ressort une majoritĂ© dâĂ©tudes sur
des Ă©difices du XIXĂšme, ainsi que des proportions importantes de maisons de ville et de patrimoine
industriel. Le patrimoine analysé était souvent désaffecté, avec dans la majorité des cas des
réutilisations envisagées pour une vocation culturelle.
La question des usages était ainsi un enjeu récurrent dans les projets présentés. Comment réintroduire
dans la sociĂ©tĂ© un Ă©lĂ©ment patrimonial inutilisĂ© ? Comment lâadapter Ă de nouveaux usages ?
Comment introduire de nouveaux éléments techniques et de confort ? Quelles adaptations
climatiques, sismiques ?
Sur le site de lâEglise de Bizzos, dans le nord du pays, la
question des usages et particuliĂšrement de lâappropriation
par les habitants était prégnante et a alimenté la réflexion
des élÚves. Le site en question était en effet occupé par des
familles de bergers, qui jouent un rĂŽle dans lâentretien du
site et dans sa protection contre les pilleurs.
Aujourdâhui, les Ă©lĂšves issus de cette formation sont
dispersés à travers le monde, mais ils constituent un vivier
quâil sera important de pouvoir mobiliser quand une
reconstruction du pays sera envisageable.
Pierre-Antoine Gatier remercie Mireille Grubert de son tĂ©moigne et souligne lâimportance du suivi de
ce groupe dâexperts formĂ©s. Il cĂšde la parole Ă Bruno Favel, Chef du DĂ©partement des affaires
européennes et internationales (DAEI) à la Direction générale des patrimoines.
2) Actions et pistes de réflexion du ministÚre de la Culture
Bruno Favel remercie particuliÚrement Samir Abdulac, Chérif
Khaznadar, Sophie Makariou et Judith Kagan qui se sont mobilisés
pour lancer un appel contre la destruction des patrimoines de
Syrie et dâIrak.
Depuis prĂšs de 5 ans, des trĂ©sors patrimoniaux font lâobjet de
destructions en Syrie et en Irak dans lâindiffĂ©rence des mĂ©dias et
soulevant trĂšs peu de condamnations politiques. Devant cette
situation, la DAEI a dĂ©cidĂ© avec lâaide de Philippe Lalliot, ambassadeur français auprĂšs de lâUNESCO, et
le soutien dâAzzedine Beschaouch, ex-ministre tunisien de la Culture, de dĂ©velopper une stratĂ©gie
dâaction pour voir comment rĂ©agir rapidement et pratiquement, avec peu de moyens.
Les crimes en cours en ce moment en Irak et en Syrie sont des crimes contre lâhumanitĂ©, et non des
crimes de guerre comme on peut parfois lâentendre. LâidĂ©e de reconnaĂźtre la notion de crime culturel
contre lâhumanitĂ©, Ă©voquĂ©e dans une rĂ©union dâun groupe de travail du ministĂšre de la Culture le 26
Village antique du nord du pays encore occupé par la population
4
mars dernier, nâen est encore quâĂ ses balbutiements, et prendra du temps avant quâelle ne puisse ĂȘtre
partagĂ©e par les diffĂ©rentes organisations internationales. Aujourdâhui en effet, la destruction
volontaire dâun monument est reconnue comme crime de guerre et non comme crime contre
lâhumanitĂ©, sous le prĂ©texte quâun monument peut ĂȘtre reconstruit.
Le dernier Conseil exĂ©cutif de lâUNESCO a par ailleurs pris une sĂ©rie de mesures importantes, et Ă©tudie
notamment la proposition avancĂ©e par lâEspagne et lâItalie, et soutenue par la France, dâobserver des
zones de sĂ©curitĂ© dans lesquelles les monuments et les Ćuvres dâart seraient particuliĂšrement
surveillĂ©es. Le ministre italien avait mĂȘme avancĂ© lâidĂ©e de « casques bleus culturels », mais dont la
mise en place pourrait sâavĂ©rer difficile et qui devrait prendre une autre forme. Est Ă©galement Ă©tudiĂ©e
la proposition suisse de faire venir en Europe des Ćuvres en danger dans des zones sĂ©curisĂ©es. La
ministre de la Culture souhaite renforcer les mesures concernant le marchĂ© de lâart et sensibiliser les
syndicats de collectionneurs et de revendeurs pour les sensibiliser Ă la question. LâidĂ©e de renforcer
les contrÎles des douanes entre la Belgique et la France est aussi envisagée, ainsi que celle de produire
une nouvelle liste rouge irakienne Ă lâimage du travail rĂ©alisĂ© par lâICOM1. Cette liste actualisĂ©e sera
ainsi présentée au Louvre le 3 juin prochain.
Bruno Favel souligne que des pans entiers du patrimoine irakien ont disparus, sous lâeffet du
vandalisme et de la surpopulation. Les villages antiques de nord de la Syrie évoqués par Mireille
Grubert sont en grand danger, parce quâoccupĂ©s par des populations qui nâont plus nulle part oĂč aller,
et se replient dans ces villages non aménagés et non stabilisés. Des sites comme Palmyre, Dura Europos
ou le Krak des Chevaliers ont par ailleurs Ă©tĂ© endommagĂ©s par lâarmĂ©e. En Irak, ce sont Hatra, Samarra,
Ninive ou le musée de Mossoul qui ont été trÚs sérieusement touchés, voire complétement détruits.
Face Ă cela, outre un renforcement des mesures contre le trafic illicite des biens culturels, la France
propose une action concrÚte pour la protection des manuscrits syriens, araméens et chaldéens,
sauvegardés à Erbil ou à Charfet au Liban par les communautés locales. La bibliothÚque nationale de
France, le service interministériel des archives et le professeur Desreumaux, Président de la Société
dâĂ©tudes syriaques, travaillent actuellement Ă la numĂ©risation de ces manuscrits et tiennent pour la
communauté internationale un inventaire à jour.
La situation est plus complexe pour le patrimoine bĂąti, puisquâen dehors de villes comme Erbil, Bagdad
ou Damas, on ne peut pas se rendre sur place. En plus dâorganiser des grandes expositions, comme le
Louvre-Lens prévoit de le faire sur les civilisations mésopotamiennes, il serait important de pouvoir
mandater une mission internationale dâexperts quand la situation le permettra, comme lâavait proposĂ©
Irina Bokova auprĂšs des organisations accrĂ©ditĂ©es auprĂšs de lâUNESCO.
Il convient également de veiller à continuer de communiquer des « no strike lists » aux aviations
engagĂ©es dans la coalition contre Daech, qui permettent dâĂ©viter que des sites patrimoniaux ne soient
bombardĂ©s. Les revendeurs de biens culturels syriens ou irakiens en Europe doivent par ailleurs ĂȘtre
trĂšs sĂ©vĂšrement punis. LâidĂ©e est de dĂ©gager rapidement avec les ONG et les institutions concernĂ©es
des axes de travail qui aillent au-delĂ du symbolique, des expositions, des recommandations de
lâUNESCO ou de la rĂ©solution 2199 des Nations Unies (celle-ci exige quâon protĂšge avec des moyens
appropriĂ©s les Ćuvres culturelles en Irak et Syrie). Cette rĂ©solution montre quâil y a enfin eu une
réaction de la communauté internationale, mais il reste à considérer les actions menées dans les pays
transfrontaliers (Jordanie, Liban, Turquie, Chypre, et jusque dans le Caucase) afin de fédérer les
initiatives et les intentions.
1 http://icom.museum/programmes/lutte-contre-le-trafic-illicite/base-de-donnees-listes-rouges/L/2/
5
En matiĂšre de formation, la France souhaite former les douaniers Ă la liste rouge, renforcer la
formation des conservateurs de lâINP Ă la question des trafics illicites, accueillir des archĂ©ologues
irakiens post-doctorants dans des unités de recherche, accueillir des historiens irakiens et syriens dans
les centres culturels de rencontre, former auprÚs de la BNF des spécialistes syriens et irakiens, accueillir
des spĂ©cialistes du patrimoine bĂąti dans les diffĂ©rentes ONG, favoriser les actions dâinformation auprĂšs
des architectes en formation (Ă lâĂ©cole de Chaillot et Ă lâENSA Paris-Belleville notamment), des
archĂ©ologues de lâINRAP, des conservateurs de lâINP et des Ă©tudiants de lâEcole du Louvre. Des
restaurateurs doivent Ă©galement pouvoir ĂȘtre accueillis.
En matiĂšre dâĂ©ducation, il a Ă©tĂ© demandĂ© Ă la Commission nationale française auprĂšs de lâUNESCO et
à son président Daniel Janicot de rappeler à la ministre Najat Vallaud-Belkacem que les civilisations
assyriennes et mĂ©sopotamiennes nâĂ©taient plus enseignĂ©es correctement dans les programmes de
lâEducation nationale. Il sâagit donc de mieux former les formateurs de lâEducation nationale. Il faut
pouvoir proposer des boites Ă outils aux enseignants et leur permettre dâĂ©duquer les enfants Ă ces
questions depuis le primaire. Les rĂ©seaux dâĂ©ducation populaire et la sociĂ©tĂ© civile doivent ĂȘtre
également mobilisés pour sensibiliser les jeunes. Les plateformes numériques comme Youtube, Google
Maps peuvent aussi ĂȘtre utilisĂ©es pour partager une information de qualitĂ© sur ces enjeux. Un autre
enjeu est dâapprocher les chaĂźnes dâinformation continue qui traitent parfois ces sujets culturels de
maniĂšre trop partielle afin quâils proposent un discours plus rigoureux (sur lâhistoire, les datations, les
prononciations). Des rendez-vous ont déjà été proposés aux présidents de France Télévisions et Radio
France afin quâils appliquent ces principes Ă leurs chaĂźnes.
Un autre axe de travail porte sur une réflexion autour des formes de culture et de leur construction
dans le temps. Ce travail sur la vision des autres cultures depuis lâEurope doit ĂȘtre menĂ© avec lâUnion
europĂ©enne. Lâusage des rĂ©seaux sociaux doit par ailleurs ĂȘtre renforcĂ©.
Philippe Lalliot, lâambassadeur français auprĂšs de lâUNESCO, continue ses efforts pour mobiliser la
communautĂ© internationale, puisque des pays comme la Russie (avec lâAzerbaĂŻdjan et le BĂ©larus) et la
Turquie (depuis la reconnaissance par le Vatican du génocide arménien) sont réfractaires à certaines
mesures visant la protection du patrimoine culturel. Ainsi, les sujets de la Syrie et de lâIrak ont Ă©tĂ©
retirĂ©s de lâordre du jour de la confĂ©rence des ministres du patrimoine du Conseil de lâEurope du 22-
24 avril.
De telles destructions du patrimoine culturel sont sans précédents depuis Mostar et les guerres des
Balkans. Pour lutter contre la violence et lâobscurantisme, le simple fait de sâintĂ©resser Ă ces questions,
dâen parler autour de soi est important, puisquâune vraie mobilisation autour du patrimoine en danger
tarde Ă Ă©merger en Europe, et est quasiment inexistante aux Etats-Unis.
Malgré la situation chaotique, des contacts sont entretenus à titre non officiel avec le Directeur général
des antiquités et musées de Syrie, avec lequel des projets communs avaient été menés depuis plus de
10 ans. Ce directeur essaie tant bien que mal sur les zones oĂč il a encore une autoritĂ© de maintenir une
vie patrimoniale, en payant les gardiens, en envoyant Ă lâĂ©tranger ses collaborateurs en danger.
Des actions existent donc, mais sont certainement insuffisantes. Il convient de se méfier des contre-
informations et de ne pas assimiler trop rapidement la Syrie et lâIrak, deux contextes bien diffĂ©rents. Il
reste que dans les deux pays un patrimoine universel est détruit et que sa perte est irremplaçable.
Enfin, la ministre Fleur Pellerin souhaite travailler dans le cadre dâune concertation europĂ©enne, et
sâappuyer sur les outils numĂ©riques, notamment pour la numĂ©risation des collections.
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Bruno Favel suggĂšre quâaprĂšs les conflits en Bosnie dans les annĂ©es 90 et en Afghanistan en 2001, dans
lesquels lâUNESCO sâest impliquĂ©e pour la prĂ©servation du patrimoine culturel, il aurait Ă©tĂ© intĂ©ressant
dâĂ©tablir une mĂ©thodologie post-conflit et post-cataclysme qui pourrait encore ĂȘtre utile aujourdâhui.
Il nâest pas trop tard.
Il rappelle enfin avant de laisser la parole Ă la salle quâen AzerbaĂŻdjan des pans entiers du patrimoine
araméen et arménien sont détruits, notamment les cimetiÚres, et que des sites sont également
menacĂ©s dans les rĂ©gions de la Tripolitaine et de la CyrĂ©naĂŻque en Libye, oĂč des destructions ont Ă©tĂ©
constatées prÚs de la frontiÚre tunisienne. Il cÚde la parole à la salle pour répondre aux questions des
participants.
Echanges avec la salle
Wanda Diebolt, SecrĂ©taire gĂ©nĂ©rale de lâAgence universitaire de la Francophonie (AUF), Ă©met deux
propositions. Elle rappelle que des modules de formation à distance « e-patrimoines » existent2. Ne
pourraient-ils pas ĂȘtre diffusĂ©s en Syrie et en Irak ? Pourrait-on par ailleurs imaginer monter un module
spĂ©cifique sur la sauvegarde du patrimoine en cas de conflit qui pourrait ĂȘtre diffusĂ© aux collĂšgues de
ces rĂ©gions ? LâAUF dispose par ailleurs dâun bureau Ă Beyrouth, dirigĂ© par HervĂ© Sabourin. Des campus
numériques existent à Damas et Alep et ont continué à fonctionner, et des universités membres de
lâAUF sont Ă©galement prĂ©sentes en Irak. Toutes ces structures peuvent ĂȘtre les relais de ces modules.
Par ailleurs, le Centre archéologique de Bibracte a déjà accueilli des chercheurs syriens et irakiens et
est prĂȘt Ă continuer Ă la faire, en leur fournissant le logement et des conditions de travail.
Enfin, il lui semble indispensable quâune rĂ©union interministĂ©rielle Culture-Education ait lieu, en
introduisant la dimension culturelle par le biais de la lutte contre la « jihadisation » des jeunes français.
Il conviendrait Ă©galement de rĂ©introduire lâhistoire de lâart dans les programmes pĂ©dagogiques.
Bruno Favel souligne que dans le cadre du MOOC « e-patrimoines », un module a été enregistré sur
les conflits, post-conflits et cataclysme et sera mis rapidement Ă disposition. Un autre module sera
rĂ©alisĂ© sur le patrimoine dâIrak et Syrie, pour lequel seront sollicitĂ©s Sophie Cluzan et Samir Abdulac.
En matiĂšre dâĂ©ducation, la difficultĂ© est de trouver du cĂŽtĂ© ministĂ©riel des interlocuteurs motivĂ©s par
ces questions, dâoĂč le rĂŽle de mĂ©diation que peut jouer la CNFU sur le volet Ă©ducatif.
Brigitte Arnould, Inspectrice de lâadministration du dĂ©veloppement durable au CGEDD/MEDDE,
aimerait savoir si lâon peut trouver via le ministĂšre de la Culture un site dĂ©diĂ© oĂč trouver facilement
lâinformation sur ces questions.
Marie Pierdait-Fillie, de lâassociation Vauban, souligne quâune modification des programmes scolaires
pourrait prendre du temps, mais quâun champ libre aujourdâhui est celui des temps dâactivitĂ©s pĂ©ri-
Ă©ducatives, que certaines Ă©coles ne savent pas comment occuper.
Christiane Delplace, ancienne directrice de la mission archéologique française de Palmyre, déplore la
tendance de lâEducation nationale Ă rĂ©duire la place de la culture antique et de lâhistoire ancienne,
notamment Ă travers la suppression de lâhistoire pour les terminales scientifiques, ou les projets de
réforme concernant la place du grec et du latin au collÚge.
Bruno Favel indique quâil nâexiste pas de site dĂ©diĂ© regroupant lâensemble des informations
disponibles, mais que lâidĂ©e est Ă creuser.
2 http://www.e-patrimoines.org/patrimoine/
7
Judith Kagan, Conservateur gĂ©nĂ©ral du patrimoine, ajoute que cette idĂ©e peut ĂȘtre envisageable Ă
travers le moteur de recherche « Collections » du ministÚre de la Culture3, qui regroupe sur une
plateforme un accĂšs Ă lâensemble des bases de donnĂ©es des organismes liĂ©s au ministĂšre. On a ainsi
récemment ajouté une fonction permettant de cibler les objets volés ou disparus en France.
Par ailleurs, le ComitĂ© français dâhistoire de lâart, association regroupant professeurs dâuniversitĂ© et
conservateurs du patrimoine, a proposé début mars un texte symbolique en direction de différentes
associations françaises de professionnels du patrimoine, qui a déjà été approuvé par plusieurs
associations de conservateurs, archivistes ou bibliothécaires. Les Architectes en chef des monuments
historiques et les Architectes du patrimoine doivent Ă©galement ĂȘtre sollicitĂ©s. LâidĂ©e est de sâentendre
sur un texte commun de mobilisation, qui pourrait permettre de fédérer un réseau pour mettre en
Ćuvre les actions Ă©voquĂ©es par Bruno Favel.
Par ailleurs, lâObservatoire du marchĂ© de lâart et du mouvement des biens culturels rĂ©unit tous les mois
le ministĂšre de la Culture, les douanes, la police, la justice et les syndicats de commissaires-priseurs et
dâantiquaires. DĂ©but avril, une sĂ©ance a portĂ© sur la lutte contre les trafics illicites au cours de laquelle
le Président du Syndicat national des antiquaires a fait part des instructions données à ses adhérents
(dont beaucoup situĂ©s Ă lâĂ©tranger) contre toute prise dâintĂ©rĂȘt concernant des objets venant des pays
en question.
Brigitte Arnould complÚte ces propos en soulignant la création par le MEDDE de la plateforme
Wikirésilience4 qui traite des capacités de résilience des territoires, notamment suite à des
catastrophes naturelles. Elle propose de mettre en lien le ministĂšre de la Culture avec la personne en
charge de ce site au CGDD.
Christiane Garnero Morena, analyste territoriale et membre de lâICOMOS, relĂšve lâimportance de la
question de la mĂ©moire de lâusage du patrimoine et des territoires par les populations. Cette mĂ©moire
nâest pas toujours prise en compte et peut disparaitre.
Valérie Vignaud, maire-adjoint à la culture de Vanves, souligne les difficultés dans les communes de
mettre en place les activitĂ©s pĂ©riscolaires. Il faut donc une volontĂ© politique large dâimposer le type
dâactivitĂ©s Ă©voquĂ©es, et que cela sâaccompagne des financements adĂ©quats.
Pascal Prunet relÚve quant à lui la difficulté constatée dans certains pays du Moyen-Orient tels que le
YĂ©men ou lâArabie Saoudite de traiter de la question des cultures prĂ©islamiques. En cela, lâidĂ©e du
renforcement de lâĂ©ducation Ă ces pĂ©riodes, ainsi quâĂ lâhistoire des Ă©changes entre lâoccident et
lâorient, va dans le bon sens et doit ĂȘtre menĂ©e tĂŽt, notamment pour aider Ă lutter contre de
potentielles tentations de radicalisation djihadiste de jeunes français.
Pierre Leriche, archĂ©ologue en charge de la mission dâEuropos Dura en Syrie, souligne lâintĂ©rĂȘt du
débat mais fait part du constat développé aprÚs de nombreux échanges en Syrie qui est celui que le
discours occidental, quelles que soient les intentions quâil porte, sera toujours compris sur place
comme une tentative de domination de lâoccident sur les pays arabes. Les occidentaux sont toujours
considérés comme des Croisés. Le vrai problÚme est donc de pouvoir se faire comprendre.
Patrice Mouchon, PrĂ©sident de lâassociation dâamitiĂ© France-Syrie, a relevĂ© lâimportance des questions
de mobilisation et de fédération des énergies. Il aimerait savoir qui peut jouer le rÎle moteur ou
3 http://www.culture.fr/Ressources/Moteur-Collections 4 http://wikiresilience.developpement-durable.gouv.fr/index.php/Accueil
8
dâensemblier pour la mobilisation de toutes ces Ă©nergies, face Ă lâimpression dâune atomisation des
initiatives qui peut nuire Ă lâaction.
Bruno Favel rĂ©pond quâune partie des coordonnateurs de lâaction sont ceux prĂ©sents aujourdâhui en
tribune. Par ailleurs, il prĂ©cise quâil a pu Ă©voquer les questions de patrimoine avec le groupe dâamitiĂ©
avec les ChrĂ©tiens dâOrient de lâAssemblĂ©e nationale. Toute initiative est la bienvenue. Des ONG de
professionnels spĂ©cialisĂ©es comme lâICOM ou lâICOMOS, ont des rĂ©flexions sur leur domaine
dâexpertise. Vincent Berjot, Directeur gĂ©nĂ©ral des patrimoines, a souhaitĂ© quâune coordination existe
au niveau du ministĂšre de la Culture sur ces questions pour faire des propositions Ă la ministre.
Cependant, le ministĂšre des Affaires Ă©trangĂšres nâa pas la mĂȘme position sur la Syrie que sur lâIrak. La
question des relations avec la Syrie est complexe, mais avec lâIrak, le gouvernement de Bagdad reste
un interlocuteur, tout comme le gouvernement autonome du Kurdistan, qui reconnait le régime de
Bagdad. Bruno Favel en profite pour rappeler le terrible sort des Yezidis, communautés animistes,
zoroastres, ou chrĂ©tiennes, dont les membres sont aujourdâhui vendus sur les marchĂ©s.
Au niveau europĂ©en, un effort conjoint dâharmonisation des textes au niveau de la lutte contre les
trafics illicites existe. Bien quâun consensus ne puisse ĂȘtre pour le moment atteint au niveau du Conseil
de lâEurope entre tous les ministres, la prĂ©occupation française est partagĂ©e par les comitĂ©s nationaux
de lâICOM et dâICOMOS en Europe, ainsi que par de nombreux ministres europĂ©ens, qui pour certains
ont eu des prises de position fortes.
3) Projection sur lâĂ©tat des lieux, les acteurs et le rĂŽle de lâICOMOS
Samir Abdulac, secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral dâICOMOS France, Membre du groupe de travail ICOMOS pour la
sauvegarde du patrimoine culturel en Syrie et en Irak
1) La situation en Syrie
On dispose aujourdâhui de davantage dâinformations sur la Syrie que sur lâIrak. La nature des conflits
est en effet diffĂ©rente, et le travail de lâICOMOS en Syrie a dĂ©butĂ© plus tĂŽt quâen Irak. La situation
militaro-politique en Syrie est trÚs complexe. Les différents groupes en présence occupent le territoire
de maniĂšre trĂšs inĂ©gale. Les conflits ont causĂ© plus de 200 000 morts, et a provoquĂ© dâimportants
mouvements de population : 3 Ă 4 millions de personnes dans les pays voisins, et 6 millions de
personnes déplacées dans les migrations intérieures. La Syrie compte 6 sites inscrits sur le Liste du
patrimoine mondial qui illustrent la diversitĂ© du patrimoine syrien : les anciennes villes dâAlep, de
Damas, et de Bosra, le site de Palmyre, le Krak des Chevaliers et chĂąteau de Saladin, et les villages
antiques du nord de la Syrie. Dâautres sites importants sont par ailleurs prĂ©sents sur la liste indicative.
On compte dans le pays prĂšs de 10 000 sites archĂ©ologiques connus, et un nombre indĂ©terminĂ© nâont
pas encore été découverts.
Les sources de dommages sont diverses : tirs de lâarmĂ©e sur des forteresses, tirs dâinsurgĂ©s dans les
villes anciennes, cocktails molotov, transformation de tells archéologiques en sites défensifs,
destruction dâĂ©quipements et dâinfrastructures⊠Le Krak des Chevaliers a ainsi connu plusieurs vagues
de dommages de nature diffĂ©rente. En face de la Citadelle dâAlep, une mosquĂ©e a purement disparu
aprĂšs lâexplosion dâun tunnel souterrain chargĂ© dâexplosif. Les affrontements provoquent dans les
villes historiques des destructions considĂ©rables, Ă lâĂ©chelle de quartiers entiers.
9
Vue aérienne des dommages causés dans la ville historique d'Alep (2014)
Dans le désordre ambient, les pillages de sites archéologiques sont nombreux. Cela est
particuliÚrement visible à Apamée. Les réseaux de contrebande des artefacts ainsi retrouvés sont
difficiles à retracer, mais des objets sont retrouvés en Europe, aux Etats-Unis, dans le Golfe et en
ExtrĂȘme-Orient. Certains objets sont mĂȘme disponibles sur des sites marchands comme Ebay.
Autre danger : celui des constructions illicites dans les sites historiques. Un problĂšme nouveau et
grandissant est celui de la destruction volontaire dâĆuvres ou de monuments (assyriens notamment),
mouvement qui a commencĂ© Ă Raqqa, et qui sâĂ©tend et sâaggrave avec la domination territoriale de
Daech. Des tombeaux, mausolĂ©es et mosquĂ©es sont Ă©galement visĂ©s. A Deir-ez-Zor, lâĂ©glise
arménienne des martyrs (des massacres de 1915) a été en grande partie détruite.
Les territoires et paysages agricoles sont également touchés, la production agricole ayant chuté de
moitié, impactant nécessairement les paysages.
2) La situation en Irak
LâinstabilitĂ© et les dangers encourus par le patrimoine en Irak sont bien plus anciens quâen Syrie. On
peut remonter jusquâĂ lâinvasion amĂ©ricaine de 2003 et le pillage consĂ©cutif du musĂ©e de Bagdad, le
campement de troupes américaines puis polonaises sur le site archéologique de Babylone, les troubles
religieux entre sunnites et chiites Ă partir de 2006, accompagnent lâĂ©closion de Daech. Avec la
conquĂȘte de Mossoul par Daech en juin 2014, des mausolĂ©es (comme celui de Jonas) et monastĂšres
(comme celui de Mar Gorgis) ont été ciblés dans un premier temps, avant le patrimoine mésopotamien
10
avec les attaques contre le musĂ©e de Mossoul, puis les dynamitages des sites dâHatra et Nimroud. A la
suite de ces destructions, de nombreux experts et archéologues se sont penchés attentivement sur les
images disponibles pour tenter de discerner ce qui avait été réellement détruit. Des relevés réalisés au
prĂ©alable par des archĂ©ologues accompagnant lâarmĂ©e amĂ©ricaine ont notamment permis dâĂ©tablir
rapidement un Ă©tat des lieux.
Le patrimoine culturel est également touché quand ses défendeurs sont pris pour cibles. Samira al
Nuaimi, une avocate qui sâĂ©levait contre ces atteintes au patrimoine architectural a ainsi Ă©tĂ© torturĂ©e
puis exĂ©cutĂ©e publiquement par lâEtat islamique, devenant ainsi la premiĂšre « Monuments Women »
de la Région. AprÚs les Yézidis, les Chrétiens sont visés également (impÎts spéciaux, maisons marquées
ou confisquées, lieux de culte).
Par ailleurs, la Libye est Ă©galement visĂ©e par les attaques des fondamentalistes, qui sâen sont dĂ©jĂ pris
Ă des chaires ornĂ©es dans les mosquĂ©es (de nombreuses chaires ont dĂ» ĂȘtre dĂ©montĂ©es par prĂ©caution
puis placées en lieux sûr). Il convient par ailleurs de rester vigilant quant aux menaces pesant sur les
sites antiques. Les bombardements au Yémen sont également préoccupants.
3) Les actions en cours
La Direction générale des antiquités et musées de Syrie (DGAM) est encore relativement étoffée et
active. Elle compte prĂšs de 2500 fonctionnaires quâelle continue Ă rĂ©munĂ©rer et continue Ă suivre la
situation sur lâensemble du pays. Il existe en Syrie prĂšs de 38 musĂ©es relevant de la DGAM. Leurs
collections ont Ă©tĂ© globalement Ă©vacuĂ©es. PrĂšs de 300 000 piĂšces ont ainsi dĂ» ĂȘtre inventoriĂ©es, avant
dâĂȘtre mises en lieu sĂ»r. Certaines Ćuvres, trop grandes ou trop fragiles pour ĂȘtre dĂ©placĂ©es, comme
des peintures murales du musée de Damas, sont toutefois restées sur place. La DGAM a par ailleurs
développé des systÚmes informatiques pour numériser les collections, créer un site internet
dâinformation vers lâextĂ©rieur, et pour proposer un systĂšme dâinformation gĂ©ographique dotĂ© de
cartes interactives qui permet de connaßtre la situation de différents sites du pays5. Malgré la
protection des collections, certains vols ponctuels sont toutefois à déplorer. La collaboration qui existe
entre la DGAM et INTERPOL est en cela nécessaire. La DGAM mÚne par ailleurs des campagnes de
sensibilisation par la radio, la télévision, des conférences ou expositions. Elle tente aussi de mobiliser
les communautĂ©s locales autour des monuments. La formation dâarchitectes spĂ©cialistes du
patrimoine commencĂ©e avec lâEcole de Chaillot se poursuit sans elle, et lâuniversitĂ© organise des visites
de certains sites endommagés. Une campagne restauration du Krak des Chevaliers a été lancée.
Ailleurs, des restaurateurs sont Ă©galement Ă lâĆuvre, comme pour la mosaĂŻque de la mosquĂ©e des
Omeyyades de Damas. Le directeur général des antiquités et musées de Syrie a reçu en 2014 à Venise
un prix européen pour son action en faveur de la sauvegarde du patrimoine culturel syrien6.
Par ailleurs, des activistes de lâopposition modĂ©rĂ©e (comme APSA) documentent la situation sur le
terrain dâune maniĂšre exhaustive et les prĂ©sentent sur internet. Ils ont Ă©galement contribuĂ© Ă des
actions ponctuelles de protection de monuments et de musées, notamment avec des murets de
parpaings et des sacs de sable.
4) Le rĂŽle de lâICOMOS
Samir Abdulac Ă©voque enfin le rĂŽle de lâICOMOS, notamment Ă travers ses comitĂ©s scientifiques
internationaux thĂ©matiques qui peuvent se mobiliser Ă un titre ou un autre, comme lâICORP (ComitĂ©
international pour la prévention des risques), avec lequel le groupe de travail ICOMOS pour la Syrie et
5 http://www.dgam.gov.sy/index.php?d=314&id=1595 6 http://www.unesco.org/new/en/safeguarding-syrian-cultural-heritage/cultural-heritage-rescue-prize/
11
lâIrak travaille. Son activitĂ© sâeffectue dans les domaines du suivi, de lâinformation, de la formation, u
conseil et de la programmation.
Une rencontre dâexperts avait Ă©tĂ© envisagĂ©e Ă Damas en 2012, mais nâa pas pu aboutir. Elle a
cependant pu ĂȘtre remplacĂ©e par des sĂ©minaires par internet (« e-learnnig »), qui met en contact les
diffĂ©rents experts dâICOMOS rĂ©partis dans le monde avec un auditoire rassemblĂ© dans une salle en
Syrie avec traduction simultanĂ©e. Il y a notamment Ă©tĂ© mis lâaccent sur lâimportance de faire des
relevĂ©s des Ă©lĂ©ments patrimoniaux tant quâil en est encore temps. Un sĂ©minaire a Ă©tĂ© organisĂ© en
janvier 2013 Ă Damas, puis en aoĂ»t 2013 Ă Idleb. ICOMOS est bien sĂ»r en lien rĂ©gulier avec lâUNESCO,
qui organise maintenant des formations Ă Beyrouth, auxquelles participent des membres de lâICOMOS.
SĂ©minaire de formation Ă distance de lâICOMOS en janvier 2013 Ă Damas
En dernier lieu, Samir Abdulac évoque les conseils donnés à la municipalité de Damas pour mieux se
préparer aux risques du conflit dans la vieille ville ainsi que la question de la reconstruction, qui certains
posent déjà pour Homs et Alep : comment reconstruire les quartiers anciens détruits ? Quelles sont
les erreurs Ă Ă©viter ?
La derniĂšre AssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale de lâICOMOS, en novembre 2014 Ă Florence, a adoptĂ© Ă lâunanimitĂ©
une résolution soutenue notamment par ICOMOS France en faveur de la sauvegarde du patrimoine
culturel en Syrie et en Irak et a officialisé le groupe de travail déjà actif sur la question.
Pierre-Antoine Gatier cĂšde ensuite la parole Ă Benjamin Mouton, Architecte en chef des monuments
historiques et Vice-prĂ©sident de lâICOMOS en charge de lâEurope de 2011 Ă 2014, pour introduire la
table-ronde à suivre. Ce dernier évoque les notions de « déni de patrimoine » voire de « déni de
civilisation » au regard des outrages subis par le patrimoine non seulement en Syrie et en Irak, mais
aussi Ă Bamiyan, Tombouctou, en Libye, en Tunisie, au YĂ©men, en AzerbaĂŻdjan. On pensait que le
patrimoine avait suffisamment diversifiĂ© ses champs dâintĂ©rĂȘt pour que les tĂ©moins des plus anciennes
civilisations soient définitivement considérés comme sauvegardés. Pourtant, un grand voile noir
recouvre aujourdâhui les lumiĂšres de civilisations quâon croyait Ă©ternelles. Il Ă©voque pour appuyer son
propos lâarticle de VĂ©ronique Grandpierre publiĂ© dans Le Monde du 13 avril suite Ă la destruction de
Hatra. Cet article relĂšve que les diffĂ©rents conquĂ©rants qui se sont succĂ©dĂ©s entre le Tigre et lâEuphrate
fondaient leur lĂ©gitimitĂ© sur lâanciennetĂ© des origines dont ils se rĂ©clamaient. Le patrimoine Ă©tait donc
mis Ă profit. Aujourdâhui cependant : « Le jardin dâEden se transforme ainsi peu Ă peu en un champ de
dĂ©combres et de ruines. Loin dâeffacer le temps de lâignorance, lâignorance est ainsi instaurĂ©e et rĂšgne
sans partage. »
La parole est ensuite donnée à Sophie Cluzan, archéologue, historienne, spécialiste de l'Orient ancien,
Conservateur du patrimoine, directeur de plusieurs missions archéologiques, membre du Laboratoire
Orient et Méditerranée du CNRS, Enseignante à l'Ecole du Louvre.
12
4) Les sites archéologiques syriens
Sophie Cluzan débute son expose en présentant le contexte du patrimoine archéologique en Syrie. Ce
patrimoine se distingue par sa quantité, sa diversité, et sa variété. Il est en effet quasi-omniprésent sur
le territoire. Dans la seule région de la Jezireh, on compte plus de 5000 sites archéologiques, ce qui
donne une idée de la quantité de ressources du pays.
Le patrimoine archéologique syrien est divers : il va du grand site antique (Bosra, Zenobia, Deraa), aux
tells archéologiques en passant par les sites omeyyades. La diversité de ces sites entre eux représente
autant de contraintes quand on Ă©voque les questions de leur sauvegarde, conservation et mise en
valeur.
On relÚvera enfin la qualité des restes de ce patrimoine archéologique, du point de vue esthétique et
historique. Le patrimoine de Syrie reflĂšte la place trĂšs particuliĂšre du pays dans lâhistoire comme terre
des origines. Notre monde y a puisé de nombreuses avancées (écriture, urbanisation, modes de
gouvernement, structuration des religions, sciences). Nous sommes aujourdâhui en partie les hĂ©ritiers
de ces civilisations, et nos Ă©lĂšves auraient tout intĂ©rĂȘt Ă apprendre la maniĂšre dont lâĂ©criture est nĂ©e
et dont lâalphabet est apparu.
Par ailleurs, ce patrimoine archéologique porte une valeur universelle. Des sites du néolithique de plus
de 9000 ans comme Jerf el-Ahmar ou Tell Aswad sont ainsi des preuves du passage des groupes
humains du stade de chasseurs-cueilleurs Ă celui dâagriculteurs ou Ă©leveurs. On sait maintenant que
nous devons la rĂ©volution des modes de vie quâa reprĂ©sentĂ© le NĂ©olithique en Europe il y a 3000 ans Ă
ce que sâest passĂ© auparavant en Syrie, par le biais de mouvements de diffusion des populations. Ce
nouveau mode de vie sĂ©dentaire qui sâest dĂ©veloppĂ© au Levant a ainsi pris des formes dâexpression
symboliques, avec un culte des ancĂȘtres qui sâest diffusĂ© dans lâOrient ancien. La fragilitĂ© de ces sites
doit ainsi ĂȘtre mise en regard des processus historiques quâils nous permettent de reconstituer.
Le patrimoine syrien archéologique se singularise également par son imbrication dans le présent. Ainsi,
on peut trouver dans le musée archéologique de Mari des objets incrustés de nacre datant de 2400
avant notre Úre, tandis que la nacre est toujours travaillée par les artisans des environs. La continuité
des traditions artistiques est donc trÚs forte en Syrie. On peut retrouver cette continuité également
dans la linguistique. Les fouilles des archives royales dâEbla (-2400 av. JC) ont permis de mettre au
monde une langue sĂ©mitique auparavant inconnue, ancĂȘtre des
langues sĂ©mitique du 2Ăšme et du 1er millĂ©naire avant lâĂšre
commune, qui ont elles-mĂȘmes donnĂ© naissance Ă lâalphabet et Ă
lâaramĂ©en, toujours parlĂ© aujourdâhui en Syrie.
Lâusage fait du patrimoine caractĂ©rise aussi cette dimension de
continuité, avec des villages antiques comme Bosra encore
occupés. Cette utilisation du patrimoine a pu garantir
paradoxalement sa conservation, en y acceptant des
transformations.
La richesse archĂ©ologique de la Syrie reflĂšte lâouverture du pays, due Ă sa situation de carrefour de
trois continents. Cette ouverture a encouragé la création et le dynamisme dans cette région, et a
alimentĂ© la diffusion de sa culture. On pourra relever enfin lâimportance en Syrie dâun « patrimoine en
devenir » encore enfoui dans les sous-sols archéologiques, véritables réservoirs historiques.
PĂąturage de bovins dans le village antique de Bosra
13
La Syrie est donc un laboratoire de lâhistoire, intensĂ©ment exploitĂ© dĂšs la fin du XIXĂšme siĂšcle. Avec le
mandat français, un service des AntiquitĂ©s est mis en place Ă Beyrouth. Lâun des objectifs du mandat
français Ă©tait en effet de poser les bases dâun nouvel Ă©tat, notamment Ă partir dâune identitĂ© qui restait
Ă dĂ©finir, pour un pays dont les frontiĂšres ont Ă©tĂ© posĂ©es de maniĂšre arbitraire. LâĂ©tude du patrimoine
culturel de la rĂ©gion Ă©tait donc lâun de moyens de gĂ©nĂ©rer cette cohĂ©sion nationale. Cette attention
au patrimoine se poursuivra aprĂšs lâindĂ©pendance du pays, avec la crĂ©ation de la Direction gĂ©nĂ©rale
des antiquités et musées de Syrie, qui encouragera notamment les études archéologiques. Il y a aura
ainsi de nombreuses coopérations entre les missions étrangÚres en Syrie et la DGAM autour de la
valorisation ou restauration des sites, et dans les musées syriens.
La multiplication des projets a fait prendre conscience Ă la DGAM et lâEtat syrien de la nĂ©cessitĂ©
dâenvisager un projet global. Ce projet menĂ© en partenariat entre le MusĂ©e du Louvre et la DGAM visait
ainsi à repenser le réseau des musées syriens en lien avec les différents sites archéologiques. Quatre
conservateurs syriens avaient Ă©galement pu ĂȘtre accueillis Ă lâINP avant le dĂ©but du conflit.
Depuis 2011, la DGAM et de nombreuses associations ou ONG ont pu documenter les atteintes au
patrimoine syrien, archĂ©ologique notamment, comme lâAPSA7 (Association pour la sauvegarde du
patrimoine syrien), ASOR8 (American Schools of Oriental Research), Heritage for Peace9, ou encore
lâinitiative de lâUniversitĂ© de Pennsylvanie10.
En matiÚre de dangers pesant sur les sites patrimoniaux, le pillage des sites archéologiques est une
forme de destruction du patrimoine bien moins mĂ©diatisĂ©es que dâautres atteintes plus spectaculaires,
mais ses consĂ©quences sur la mĂ©moire et lâhistoire sont tout aussi importantes.
Si lâon devait catĂ©goriser les sites archĂ©ologiques syriens, on compterait tout dâabord les sites
archĂ©ologiques liĂ©s aux monuments historiques dans des zones urbaines, comme la citadelle dâAlep. Il
y aurait aussi ensuite les grands sites classiques relativement éloignés des centres urbains
contemporains, comme Palmyre ou Bosra, classés sur la Liste du patrimoine mondial. Cette catégorie
allie des monuments construits et un sous-sol archéologique. Les menaces sont donc multiples. On a
enfin les tells archĂ©ologiques, qui sont des empilements de couches successives dâoccupations,
souvent en architecture de terre, dâune extrĂȘme fragilitĂ©. Des milliers de ces tells nâont pas encore Ă©tĂ©
fouillés. Ces zones archéologiques trÚs nombreuses se trouvent souvent dans des milieux reculés, et il
est impossible de tous les faire garder. Par ailleurs, les grands sites archéologiques ou monumentaux
sont situĂ©s dans des positions stratĂ©giques, qui restent aujourdâhui trĂšs convoitĂ©es par les
combattants, comme le Krak des Chevaliers et la citadelle dâAlep, et sont donc immĂ©diatement
menacés.
Quant aux destructions des sous-sols archĂ©ologiques aujourdâhui, elles rĂ©sultent soit dâune utilisation
à des fins militaires quand les lieux ont une importance stratégique (tranchées creusées, équipements
construits), soit dâintenses campagnes de pillage. Ces pillages peuvent ĂȘtre le fait de villageois rendus
sans ressources par les événements, comme de bandes trÚs organisées qui alimentent un réseau
difficile Ă tracer.
7 http://www.apsa2011.com/index.php/fr/ 8 http://www.asor-syrianheritage.org/about/ 9 http://www.heritageforpeace.org/?lang=fr 10 http://www.pennchc.org/page/syria
14
Vue aérienne du site archéologique d'Apamée et ampleur des pillages (2012)
Il faut bien comprendre que pour un archĂ©ologue, la bonne lecture dâun site archĂ©ologique va
dĂ©pendre des conditions dans lesquels le site pourra ĂȘtre dĂ©gagĂ©. Ces dĂ©gagements sont lents,
dĂ©licats, mais eux seuls peuvent permettre la reconstitution de lâhistoire du site. LâarchĂ©ologie est un
processus de destruction, puisquâil faut pouvoir dĂ©gager diffĂ©rentes couches successives. Cela
implique donc de documenter et enregistrer au préalable toutes les données susceptibles de
permettre aux générations futures de reprendre le travail commencé. Il faut donc pouvoir constituer
une archive qui puisse ĂȘtre le reflet de ce qui a Ă©tĂ© dĂ©truit. Par ailleurs, pour reconstituer lâhistoire, il
faut pouvoir compter sur les objets en contexte, qui vont permettre de dater les couches
archĂ©ologiques et de reconstituer les phases dâoccupation du site. On peut ainsi trĂšs bien imaginer les
dommages causĂ©s par un trou creusĂ© dans un sous-sol archĂ©ologique. Les artefacts qui peuvent y ĂȘtre
trouvĂ©s par les pilleurs deviennent alors des Ćuvres dâart sans signification car sĂ©parĂ©es de leur
contexte, tandis que les sites archéologiques demeurent muets à jamais.
5) Un panorama sur lâaction actuelle de lâUNESCO au Proche-Orient en crise
Giovanni Boccardi, Chef de lâUnitĂ© de la prĂ©paration et des rĂ©ponses aux situations d'urgence au
secteur de la Culture de lâUNESCO, excuse les absences dâEdouard Planche et de Nada al Hassan, avant
de prĂ©senter lâapproche de lâUNESCO quant aux situations de crise, et la nature des actions menĂ©es en
Syrie et Irak.
En premier lieu, il fait part du constat que les situations de crise sont aujourdâhui devenues la norme,
alors quâelles Ă©taient ponctuelles il y a 10 ou 20 ans. Cela met donc lâUNESCO au dĂ©fi dâadapter
continuellement ses outils, méthodologies et approches. Cette nouvelle donne est le résultat de la
gĂ©opolitique du XXIĂšme s. qui se caractĂ©rise par des conflits dâun type nouveau, intra-Ă©tatiques, avec
une implication de la société civile et une dimension culturelle trÚs forte. La Directrice générale de
lâUNESCO a rĂ©cemment Ă©voquĂ© le concept de « nettoyage culturel » (cultural cleansing) pour Ă©voquer
15
certaines situations. Cette notion sous-entend une stratégie délibérée de certains groupes extrémistes
pour Ă©radiquer la diversitĂ© culturelle dâun territoire, par la persĂ©cution de peuples, de minoritĂ©s
culturelles, par la destruction de leurs références culturelles et de tout symbole de leur identité. Le but
nâest pas ici de dĂ©truire physiquement un peuple, mais de nier une identitĂ© culturelle, dans une
perspective totalitaire de domination dâun groupe.
La mise en Ćuvre de ce nettoyage culturel sâest bien entendu accompagnĂ©e dâattaques envers des
personnes. Les atteintes au patrimoine ne représentent donc plus une simple urgence culturelle, mais
une véritable question humanitaire et de sécurité. Les déplacements de population causés par les
conflits portent également atteinte à la diversité culturelle de certaines régions des pays concernés.
LâUNESCO est nĂ©e pour contribuer Ă la paix et la sĂ©curitĂ© mondiale dans le cadre des Nations-Unies. La
conservation du patrimoine nâest pas en soi un de ses objectifs.
Quatre conventions de lâUNESCO sont principalement concernĂ©es par la situation en cours :
Convention pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé - La Haye (1954) ;
Convention concernant les mesures Ă prendre pour interdire et empĂȘcher l'importation,
l'exportation et le transfert de propriété illicites des biens culturels (1970) ;
Convention pour la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel (1972) ;
Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel (2003).
Il faut cependant reconnaĂźtre que les conventions de 1972 et 2003 nâĂ©taient pas vĂ©ritablement
centrĂ©es sur les questions de paix et de sĂ©curitĂ©. La mise en Ćuvre de ces conventions demande Ă
lâUNESCO de mobiliser beaucoup de ressources. On peut alors dĂ©plorer que des rĂ©unions statutaires
comme celle de la convention de 2003 nâĂ©voquent pas les enjeux de la mise en cause de la diversitĂ©
culturelle dans les zones de conflits. La Convention du patrimoine mondial est Ă©videmment vigilante
en matiĂšre de destructions, mais se mobilise principalement sur la formation Ă la bonne gestion et Ă
la conservation des sites. Il était donc nécessaire de donner une réponse nouvelle à ces défis nouveaux.
Une unité pour la préparation et la réponse aux situations urgences, dirigée par Giovanni Boccardi, a
donc Ă©tĂ© crĂ©Ă©e. Son but est de dĂ©velopper une approche structurĂ©e au sein de lâUNESCO et avec ses
partenaires, au-delà des organisations consultatives, en se rapprochant des organismes de sécurité,
des armées, des organisations de maintien de la paix ou en charge des réfugiés, la Croix Rouge.
Un autre axe de travail est la mise en Ćuvre de la dimension opĂ©rationnelle des diffĂ©rentes
conventions, celles de 1954 et 1970 notamment. Un fonds spécial pour les urgences patrimoniales
(Heritage emergency fund) a par ailleurs été créé, et sera notamment abondé par le Qatar.
LâUNESCO joue sur quatre modalitĂ©s principales dâaction dans les situations dâurgence :
- La sensibilisation, avec des plaidoyers à tous les niveaux (Nations unies, société civile, médias) ;
- La coordination des efforts internationaux pour la protection du patrimoine, avec les autorités
nationales et dâautres institutions des domaines de la sĂ©curitĂ© ou de lâhumanitaire ;
- Le suivi de la situation, avec lâaide des partenaires de lâUNESCO ;
- Le renforcement des capacitĂ©s et lâassistance technique pour attĂ©nuer les risques.
Giovanni Boccardi constate un intĂ©rĂȘt sans prĂ©cĂ©dent des mĂ©dias pour la situation du patrimoine
culturel menacĂ©. LâUNESCO a donnĂ© prĂšs de 5000 interviews au cours des derniĂšres annĂ©es et est
continuellement sollicitĂ©e par les mĂ©dias du monde entier. LâUNESCO travaille Ă©galement avec les
Etats-parties pour sensibiliser dans les écoles, les médias, avec récemment la campagne
#Unite4Heritage, reprise par les réseaux sociaux. Le but est de faire passer un message différent que
16
celui de la propagande de lâEtat islamique auprĂšs des jeunes du monde musulman, pour que ces
derniers puissent se reconnaĂźtre dans leur patrimoine et se lâapproprier.
Il y a Ă©galement un travail de mobilisation politico-institutionnelle, notamment auprĂšs du Conseil de
SĂ©curitĂ© des Nations unies. Lâadoption de la rĂ©solution 2199 a ainsi Ă©tĂ© le rĂ©sultat de ce travail de
lâUNESCO avec les membres permanents du Conseil de SĂ©curitĂ© (la rĂ©solution a Ă©tĂ© prĂ©sentĂ©e par la
Russie, une semaine aprĂšs une visite dâIrina Bokova Ă Moscou pour plaider en faveur de cette
initiative).
Pour lâadoption de cette rĂ©solution, un travail avait Ă©tĂ© menĂ© par lâUNESCO avec une « Equipe dâappui
analytique de surveillance des sanctions ». Le Conseil de sĂ©curitĂ© de lâONU a en effet adoptĂ© des
rĂ©solutions visant Ă empĂȘcher le financement des groupes terroristes, et a crĂ©Ă© cette Ă©quipe pour
surveiller les sanctions prises et faire en sorte que la communauté internationale reste vigilante.
LâUNESCO a donc collaborĂ© avec ce groupe puisque le trafic dâĆuvres culturelles peut participer au
financement de groupes terroristes. Un travail est menĂ© pour obtenir le mĂȘme type de rĂ©solution pour
la Libye, voire le YĂ©men.
Un paragraphe de la résolution 2199 demande aux Etats des rapports réguliers au Conseil de sécurité,
et demande Ă lâUNESCO dâaider les Etats-membres dans lâapplication de la rĂ©solution. Une rĂ©union de
haut niveau au siĂšge de lâUNESCO a Ă©tĂ© tenue le 1er avril, avec les chefs dâorganisations comme
INTERPOL, lâorganisation internationale des douanes, des organisations de lutte contre le crime
organisé, UNIDROIT, ICOM, ICOMOS et tous les partenaires dans la lutte contre les trafics illicites. Une
feuille de route a été menée avec des actions pour mieux aider les Etats à réagir et à répondre à la
résolution 2199, comme renforcer les bases de données nationales et internationales et faciliter leur
accĂšs pour les douaniers situĂ©s autour de la Syrie et de lâIrak.
Des projets gĂ©rĂ©s par le bureau de lâUNESCO Ă Beyrouth et financĂ©s par lâUnion europĂ©enne et le
gouvernement de Flandres traitent plus particuliĂšrement du suivi de la situation en Syrie. Un
observatoire du patrimoine culturel syrien11 a ainsi été mis en place.
Des cours de formation sont menĂ©s auprĂšs de la DGAM et les membres dâune « task force » de
lâopposition syrienne, qui travaille cependant de maniĂšre non officielle avec la DGAM. LâUNESCO a
ainsi permis Ă ces anciens collĂšgues aujourdâhui dans deux camps diffĂ©rents de se retrouver et de
travailler ensemble pour la conservation du patrimoine.
LâUNESCO a Ă©galement tissĂ© un partenariat avec UNOSAT12, organisation de lâONU en charge de prises
de vues par satellite, qui livre des images actualisĂ©es et trĂšs utile sur lâĂ©tat des sites patrimoniaux.
Un rĂ©seau dâexperts a Ă©tĂ© mis en place pour la Syrie, dans lequel les membres de lâICOMOS jouent un
rĂŽle important, et quâil est possible de rejoindre pour partager informations et compĂ©tences13. Le
mĂȘme type de rĂ©seau est en train de se former pour lâIrak et la Libye. Des sĂ©ances de « brainstorming »
avec les experts ont eu lieu pour proposer des actions pour aider les gestionnaires de sites Ă la
prĂ©vention des risques lĂ oĂč il est encore possible dâagir, et Ă la lutte contre les trafics illicites dans les
pays voisins.
11 https://fr.unesco.org/syrian-observatory/ 12 http://www.unitar.org/unosat/ 13 https://fr.unesco.org/syrian-observatory/news/rejoignez-le-r%C3%A9seau-pour-aider-%C3%A0-prot%C3%A9ger-le-patrimoine-culturel-syrien
17
En Irak Ă©galement, un plan dâaction dâurgence a Ă©tĂ© mis en place par lâUNESCO et ses partenaires. Plus
de 34 millions de dollars avaient déjà été distribués depuis 2003 pour une diversité de projets, dont le
soutien aux musées de Bagdad et Suleymanyia, la reconstruction de la mosquée Al Askari à Samarra
dĂ©truite en 2006, la conservation de la citadelle dâErbil, ainsi que de nombreux projets de formation
et sensibilisation.
Le nouveau plan dâaction dâurgence a Ă©tĂ© adoptĂ© en juillet 2014 avec les responsables irakiens, pour
lequel lâUNESCO a tentĂ© de mobiliser de nouveaux moyens. Ainsi lâaide du Japon permet des travaux
de conservation préventive des collections muséales et de renforcer la sécurité de certains sites
patrimoniaux encore accessibles. Une campagne de suivi par images satellitaires a également été
lancée avec UNOSAT. Des fonds norvégiens permettent de travailler à la sensibilisation auprÚs des
écoles, des étudiants et des médias.
Vue aérienne des destructions de la Citadelle de Nimroud (Images UNOSAT, mars-avril 2015)
Des initiatives existent Ă©galement pour la Libye et le YĂ©men, comme des formations, et dâautres projets
initialement prĂ©vus qui sont en train dâĂȘtre rĂ©orientĂ©s pour sâadapter Ă lâĂ©volution de la situation. Des
médiations sont menées avec les dirigeants libyens - le gouvernement légitime et les membres de
lâopposition Ă la fois - pour quâils se parlent et travaillent ensemble. Des fonds sont rĂ©unis pour la
sĂ©curisation des sites et des musĂ©es, comme celui de Tripoli. Des travaux dâinventaire et de suivi par
satellite sont également menés. Au Yémen, certains rapports font état de dommages, mais sans
informations plus précises.
Il reste enfin pour lâUNESCO de nouvelles pistes Ă explorer pour adapter les mĂ©thodes Ă un contexte
en Ă©volution :
- Le concept de « zones culturelles protégées » a été évoqué en décembre par Mme Bokova et
Staffan de Mistura, envoyĂ© spĂ©cial de lâONU pour la Syrie. Il sâagit de mettre en Ćuvre des
modalités déjà prévues par la Convention de 1954, qui visent à négocier avec les parties
lâimmunitĂ© de certains lieux culturellement significatifs. Ainsi Ă Bosra et Idleb en Syrie, les deux
parties ont pu trouver un terrain dâentente, grĂące notamment Ă lâactivisme en coulisses de
lâUNESCO.
- IntĂ©gration du patrimoine dans les missions de maintien de la paix ou dans lâaide humanitaire :
ainsi au Mali, le mandat de la MINUSMA comprend notamment la protection du patrimoine
18
culturel. LâUNESCO travaille donc avec la MINUSMA pour aider Ă la formation des militaires. Il
sâagit lĂ dâune mĂ©thodologie qui serait Ă rĂ©pĂ©ter dans chaque thĂ©Ăątre dâopĂ©ration oĂč une force
armĂ©e de lâONU a Ă©tĂ© mandatĂ©e.
- Engager les groupes armés non-étatiques : un travail a été entamé avec des ONG telles que
Geneva Call, qui essaient de promouvoir le respect des droits humains en cas de conflits, afin
dâorienter le dialogue sur la protection du patrimoine culturel. Ce dialogue est possible avec
des groupes moins radicaux que Daech.
- Suivi du « nettoyage culturel » comme outil dâalerte prĂ©coce pour la prĂ©vention des gĂ©nocides :
la destruction intentionnelle du patrimoine peut en effet ĂȘtre un signal avant-coureur dâun
potentiel gĂ©nocide (cf. ex-Yougoslavie). Des rapports peuvent ĂȘtre rendus par lâUNESCO
auprĂšs de la Cour pĂ©nale internationale. Toutes les opportunitĂ©s doivent ĂȘtre exploitĂ©es pour
rapprocher le patrimoine de la dimension sécuritaire et humanitaire.
- LâidĂ©e de Casques Bleus pour le patrimoine a Ă©tĂ© Ă©voquĂ©e. Sa mise en place pourrait sâavĂ©rer
difficile, et nĂ©cessite Ă©videmment une dĂ©cision du Conseil de sĂ©curitĂ© de lâONU.
Il reste par ailleurs dâautres pistes que lâUNESCO pourrait mettre en Ćuvre avec ses partenaires, dont
lâICOMOS et ses experts.
Questions et débat
Pierre Leriche revient sur les peintures dâEuropos Doura au musĂ©e de Damas, Ă©voquĂ©e par Samir
Abdulac, qui est un document exceptionnel dont la perte serait un désastre. Les archéologues français
ont mis au point avec la DGAM un plan de protection des panneaux dans le cas dâune attaque ou dâun
danger encouru par le musĂ©e. Ces protections sont trĂšs lourdes. Tout est prĂȘt, mais le projet nâa
toujours pas abouti, faute de financement. Claude Leriche lance donc un appel Ă la protection de ces
peintures qui ne peuvent ĂȘtre dĂ©placĂ©es.
Marion Woynar, membre dâICOMOS France, et Ă©galement reprĂ©sentante du groupe de travail
dâICOMOS « Patrimoine et droits humains », qui est trĂšs sensible Ă la situation du patrimoine en Irak
et en Syrie. Le groupe a tenu des ateliers pour suivre des cas de gestion de sites qui protĂšgent les droits
humains et culturels. Elle indique que le groupe de travail est prĂȘt Ă collaborer avec lâUNESCO sur ces
questions.
Nathalie Brat, ConseillĂšre auprĂšs de la dĂ©lĂ©gation française Ă lâUNESCO, se fĂ©licite de toutes les
initiatives dont il a Ă©tĂ© question. Il est en effet important pour la dĂ©lĂ©gation française dâĂȘtre informĂ©e
des diffĂ©rentes actions menĂ©es pour en faire lâĂ©cho auprĂšs de lâambassadeur de France.
Claude Leriche se pose la question de lâaccueil des archĂ©ologues et des chercheurs syriens en France.
Le Louvre en accueille, tout comme lâENS. Il est important de pouvoir recevoir ces chercheurs afin de
les former, mais aussi afin de leur donner lâopportunitĂ© de sensibiliser sur la situation dans leur pays.
Une journĂ©e de dĂ©bats a Ă©tĂ© organisĂ©e par lâENS, accompagnĂ©e dâune exposition sur lâarchĂ©ologie
française en Syrie14. Cette exposition est prĂ©sentĂ©e au 29 rue dâUlm Ă Paris.
Christiane Delplace Ă©voque le sort des chercheurs syriens actuellement en France qui ne savent pas
sâils pourront rester sur le territoire une fois leur thĂšse soutenue.
Pascal Prunet demande en quoi les Architectes en chef des monuments historiques peuvent aider. Ils
sont en effet prĂȘts Ă envisager diffĂ©rentes formes de mobilisation : interventions si nĂ©cessaire,
intĂ©gration dâarchitectes syriens dans les agences⊠les possibilitĂ©s sont ouvertes.
14 http://www.ens.fr/actualites/agenda/article/la-preservation-du-patrimoine
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Mireille Grubert rappelle quâil existe 70 architectes syriens formĂ©s par lâEcole de Chaillot qui sont
aujourdâhui dispersĂ©s dans le monde et dont la localisation est inconnue. Un travail pourrait ĂȘtre
amorcé pour aider à retrouver ces architectes. Il y a eu en 2012 et 2013 quelques contacts de la part
de ces professionnels qui cherchaient Ă pouvoir faire une thĂšse en France. LâEcole de Chaillot et
diffĂ©rentes Ă©coles dâarchitecture ont tentĂ© de leur trouver une bourse et des conditions de logements,
sans toutefois pouvoir y parvenir. Ces architectes ont finalement trouvĂ© des conditions dâaccueil
ailleurs en Europe (Allemagne et Italie). Il serait intéressant de pouvoir recontacter ces architectes,
surtout si lâon peut leur donner la possibilitĂ© dâexercer en France, que ce soit auprĂšs dâarchitectes du
patrimoine ou dâACMH.
Benjamin Mouton conclue la table-ronde en revenant sur deux idées-forces évoquées par les
intervenants. La premiĂšre idĂ©e est la gravitĂ© de la situation qui sâĂ©tend sur plusieurs territoires. Le conflit
est profond, extrĂȘmement grave. Comme lâa dit Sophie Cluzan, un objet nâa de signification que sâil est
insĂ©rĂ© dans son contexte dâorigine, son sol. Ce sol, quant Ă lui, trouve sa signification dans lâHistoire qui
lâaccompagne. Cela relativise donc la lĂ©gĂšrement avec laquelle on pourrait considĂ©rer un objet isolĂ©.
Lâatteinte est bien plus profonde quâon ne pourrait penser. Benjamin Mouton nous renvoie Ă Françoise
Choay, qui prĂŽnait la nĂ©cessitĂ© dâun combat et dâune prise de conscience des menaces qui pĂšse non sur
le patrimoine culturel, ni sur la diversitĂ© culturelle, mais sur notre identitĂ© humaine elle-mĂȘme.
Lâhomme qui perd ses repĂšres culturels perd son identitĂ© dâhomme. Par ailleurs, dans cet Ă©tat de guerre,
les valeurs de la culture deviennent une arme de combat, de résistance contre toutes les formes de
négationnisme. Le premier combat à mener est donc contre le silence, la désinformation, pour rétablir
la dignité humaine. Les armes par lesquelles il faut répondre sont celles de la culture et de la
connaissance. La mobilisation dâaujourdâhui reprĂ©sente ainsi un cran supplĂ©mentaire dans la
mobilisation des consciences.
6) Quâest-il possible de faire ? Conclusions
Pierre-Antoine Gatier voudrait, en guise de conclusion, construire avec les participants une liste de
propositions dâactions Ă partir de ce qui a Ă©tĂ© Ă©voquĂ© au long de la matinĂ©e. Il prĂ©cise quâun groupe
sâest constituĂ© aujourdâhui, Ă©videmment en coordination avec les initiatives de lâUNESCO et en accord
avec les propos de Bruno Favel pour le ministĂšre de la Culture, ainsi quâavec le ministĂšre des Affaires
Ă©trangĂšres. La prĂ©sence de la dĂ©lĂ©gation française Ă lâUNESCO aujourdâhui comptait Ă©galement
beaucoup. Par ailleurs, les relations avec ICOMOS International sont toujours fortes. Ce groupe qui se
constitue autour de cette réunion doit continuer le travail et les échanges.
- Pierre-Antoine Gatier propose que sur le site dâICOMOS France, une page dĂ©diĂ©e puisse ĂȘtre
créée pour y rassembler des informations et des liens sur les initiatives autour du patrimoine
en péril.
- Il rappelle lâimportance des ComitĂ©s scientifiques internationaux de lâICOMOS dans la
formulation de nouvelles philosophies et doctrine. Il souligne que le Comité scientifique de
lâICOMOS sur la prĂ©paration aux risques (ICORP15), qui travaille notamment sur les questions
Ă©voquĂ©es aujourdâhui, accueille en son sein peu de reprĂ©sentants français. Il serait donc
souhaitable que de nouveaux membres puissent faire acte de candidature, en se mettant en
lien avec Samir Abdulac.
- Il Ă©met Ă©galement le souhait quâun comitĂ©-miroir ICORP puisse se constituer en France, pour
servir de plateforme dâintermĂ©diation entre les discussions qui ont lieu au niveau international
dans le CSI ICORP, et au niveau français avec des initiatives telles que celle dâaujourdâhui, et
15 http://icorp.icomos.org/
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qui pourrait notamment traiter du problĂšme de lâaccueil des jeunes professionnels et
chercheurs. Mireille Grubert prĂ©cise quâelle est volontaire pour tenter de rĂ©activer le rĂ©seau
des architectes formés à Chaillot, et de revenir vers ICOMOS France avec les informations qui
pourront ĂȘtre rassemblĂ©es.
Patrice Mouchon ajoute que son association travaille activement avec le Préfet nommé par le
PrĂ©sident de la RĂ©publique pour lâaccueil des rĂ©fugiĂ©s syriens. Il doit le rencontrer prochainement et
propose quâune liste de jeunes professionnels en France puisse lui ĂȘtre transmise afin de faire avancer
leur situation.
Pierre-Antoine Gatier rappelle quâil sera diffusĂ© aux participants de la rĂ©union une invitation Ă
rejoindre le comitĂ©-miroir du comitĂ© français de lâICOMOS sur ces questions, et il sera Ă©galement
attendu dâeux des sous-thĂšmes de travail sur lesquels ils souhaiteraient se pencher en particulier.
Samir Abdulac prĂ©cise par ailleurs quâil est essentiel quâil continue dâexister des comitĂ©s nationaux de
lâICOMOS et des membres dans les pays oĂč le patrimoine est en pĂ©ril, car ils sont un relais
dâinformation et dâĂ©change trĂšs important. Le souhait nâest donc pas de dĂ©localiser le dialogue et le
dĂ©bat en Europe, mais il faut pouvoir tenir compte de la situation de ces pays et quâun Ă©change puisse
sâinstaller.
Il ajoute que dâautres comitĂ©s internationaux peuvent ĂȘtre mobilisĂ©s et avoir un rĂŽle Ă jouer dans la
situation, dont lâICAHM (ComitĂ© international pour la gestion du patrimoine archĂ©ologique), et le CIPA
(Comité international pour la documentation du patrimoine et la photogrammétrie). Il faut donc
pouvoir se coordonner, au niveau national comme au niveau international.
Pierre-Antoine Gatier Ă©voque ensuite lâidĂ©e de la constitution dâun fonds dâurgence pour aider Ă
lâaccueil de jeunes professionnels ou chercheurs en France. Les modalitĂ©s de construction dâun tel
fonds doivent ĂȘtre approfondies. Il Ă©voque par ailleurs le travail de sensibilisation auprĂšs des diffĂ©rents
acteurs du milieu patrimonial français, dans lequel Judith Kagan est notamment impliquée. Cette
derniĂšre prĂ©cise lâexistence du site « Circulation des biens culturels »16 du ministĂšre de la Culture, qui
aborde la question du trafic illicite. Elle évoque également la possibilité de créer une page qui
rassemble les initiatives des différents acteurs mobilisés sur ces questions.
Pascal Prunet met en garde contre le risque de dispersion des forces vives en multipliant des groupes
de travail ou de réflexion au sein de différentes organisations, qui traitent au final de sujets proches. Il
faut alors peut-ĂȘtre envisager une mutualisation des compĂ©tences pour gagner en cohĂ©rence.
Giovanni Boccardi souligne que des rĂ©unions telles que celle dâaujourdâhui sont en train de se mettre
en place dans de nombreux autres pays : Allemagne, Italie, Espagne, Etats-Unis⊠Toutes ces initiatives
dâacteurs qui souhaitent agir Ă leur niveau sont difficiles Ă suivre. Il propose quâICOMOS France puisse
assurer la coordination de ces diffĂ©rentes initiatives, en liaison avec lâUNESCO, pour assurer la
cohĂ©rence de lâaction globale.
Pierre-Antoine Gatier accepte cette proposition. Il rappelle enfin que la prochaine Assemblée générale
dâICOMOS France se tiendra le 27 mai, et quâun temps de lâordre du jour sera consacrĂ© aux sujets
Ă©voquĂ©s aujourdâhui.
16 http://www.culturecommunication.gouv.fr/Politiques-ministerielles/Circulation-des-biens-culturels