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TDAH et troubles bipolaires :diagnostics différentiels et co-morbidités
Jean-Michel Aubry
Département de Santé Mentale et PsychiatrieService des Spécialités Psychiatriques
Association TDAH-ImPulse08 février 2018
1. Rappel Trouble Bipolaire
2. TDAH et TB chez l’enfant/adolescent
3. Diagnostic différentiel TDAH et TB chez l’adulte
4. Diagnostic différentiel TDAH, TB et Trouble depersonnalité borderline chez l’adulte
5. Screening
6. Traitement de la comorbidité TDAH-TB
Prévalence des troubles bipolaires
Données actuelles : 2 à 3 %, plus si l’on tient compte detous les sous-types du « spectre bipolaire ».
Goodwin et Jamison, 2007
Bipolaire IBipolaire II
Manie
Hypomanie
Normothymie
Dépressionlégère à modérée
Dépressionsévère
CyclothymieVariationsd'humeurnormales
Geoffroy, Encéphale, 2014
Spectre bipolaire et fréquences des épisodes
In: MacKinnon DF, Bipolar Disord 2006, 8, 1-14
Pourquoi changer?§ Status peu clair du
symptômed’hyperactivité motrice.
§ Exclusion arbitraire desépisodes maniaques sousantidépresseurs.
§ Définition peu précise dutrouble bipolaire nonspécifié.
§ Critères trop restrictifspour les épisodes mixtes.
Structure du DSM-5
n Disparition du chapitre Trouble de l’humeur
n Création de deux nouveaux chapitres:
Trouble bipolaire et troubles apparentés
Troubles dépressifs
Introduction d’une nouvelle catégorie “Autres troublesbipolaires spécifiques et apparentés”
Introduction de 4 nouvelles entités diagnostiques:
2) Episodes hypomaniaques avec symptômes insuffisants etantécédent d’épisode majeur dépressif.
1) Episodes hypomaniaques de courte durée (2 à 3 jours) avecantécédent d’épisode dépressif majeur .
Introduction d’une nouvelle catégorie:“Autres troubles bipolaires spécifiques et apparentés”
3) Épisodes hypomaniaques sans épisodes dépressifs majeursantérieurs
4) Cyclothymie de courte durée (moins de 24 mois).
13
Co-morbidités troubles bipolaires et autres diagnosticspsychiatriques
Troubles bipolaires
Troubles liésà l’abus
desubstances
Troublepanique
Phobiesociale
Troubleanxieux
généralisé
Troubleobsessionnel
compulsif
Troublesalimentaires
Troublesde
personnalité
TDAH
5-10%
8-20%
3-15%
8-30%Boylan et al 2004
39-55%
9-20%
25-38%
13-25%
TB et abus de substance (sur la vie)
• Alcool 20-46 %• Cannabis 30-64 %• Cocaïne 15-39 %• Polytoxicomanie 6-44 %• Amphétamines 21-39 %• Héroïne/opiacés 6-25 %
Weissman Mm et al. NY State J. Med. 1991;91(suppl):195-235.
Troubles bipolaires: évolution et pronostic
Potentiel très élevé de récurrence :
• Après la fin de l’épisode onset, les patients vont avoirdes symptômes résiduels pendant environ 5 mois.
• Même avec un traitement, 37% de récidive dépressiveou maniaque après 1 an et 60% après 2 ans !
Gitlin et al Am J Psy 1995; Judd et al Arch Gen Psy 2002
Troubles bipolaires: évolution et pronostic
• Entre 30 et 50% des patients avec un TBn’atteignent pas la rémission fonctionnelle, même sila rémission syndromique est présente.
• Les déficits cognitifs semblent augmenter avec lenombre d’épisodes.
• La majorité des patients avec un TB prend au moins3 psychotropes.
Samamé et al., JAD 2014; Muru et al., JAD 2011
Troubles bipolaires: évolution et pronostic
• Récurrence et chronicité peuvent se conjuguer pourdonner des évolutions psycho-socialesdéfavorables chez certains patients (plus marquéchez les TB I).
• Risque suicidaire très élevé: plus que dans ladépression unipolaire (sur la vie entière 10 à 15%).
Geddes et Miklowitz, Lancet 2013
Humeur normale
Hypomanie
Manie
Dépression
Episode mixte
1. Rappel Trouble Bipolaire
2. TDAH et TB chez l’enfant/adolescent
3. Diagnostic différentiel TDAH et TB chez l’adulte
4. Diagnostic différentiel TDAH, TB et Troublepersonnalité borderline chez l’adulte
5. Screening
6. Traitement de la comorbidité TDAH-TB
Le diagnostic du TB chez lesenfants/adolescents
• Jusqu’à 60% des adultes avec TB rapportent le début deleur maladie avant l’âge de 18 ans.
• Mais encore manque de consensus et controverses surla manière de définir et interpréter les symptômesd’hypomanie et manie pour les enfants/adolescents.
Baldessarini et al 2010; Diler et Birmaher 2012; Birmaher 2013
Geoffroy, Encéphale, 2014
TDAH et TB chez l’enfant/adolescent
• Prévalence de la co-morbidité TDAH et TB controverséemais des données récentes suggèrent qu’elle n’est«que» d’environ 15%.
• Pas d’évidence bien démontrée que le TDAH est unfacteur de risque pour développer un TB. Par contrefacteur de risque pour qu’un TB commence plus tôt.
• La co-occurence des 2 troubles est associée avec unmoins bon fonctionnement global, des symptômes plussévères et plus de co-morbidités additionnelles que pourchaque trouble séparément.
Arnold et al 2011;Yen et al 2016
TDAH et TB chez l’enfant/adolescent
• Les enfants avec un TDAH, dont 1 des parents a un TB,présentent des symptômes de TDAH plus sévères queles enfants avec un TDAH dont les parents n’ont pas detroubles psychiques.
• Ils présentent également une prévalence sur la vie plusélevée de TB, de dépression et de troubles anxieux
Kim et al, J Clin Psy 2015
1. Rappel Trouble Bipolaire
2. TDAH et TB chez l’enfant/adolescent
3. Diagnostic différentiel TDAH et TB chez l’adulte
4. Diagnostic différentiel TDAH et Trouble personnalitéborderline chez l’adulte
5. Screening
6. Traitement de la comorbidité TDAH-TB
Katzman et al 2017
2017
Lenet AE, Biol Psychiatry, 2017
Interactions du réseau contrôle exécutif et cortico-cerebelleux pour réaliser les tâches liées aux fonctionsexécutives impliquent multiples structures avec overlappartiel.Dans TDAH, ces réseaux montrent une connectivitédéfaillante et niveau activation plus faible lors de tâchesavec fonctions exécutives
1. Rappel Trouble Bipolaire
2. TDAH et TB chez l’enfant/adolescent
3. Diagnostic différentiel TDAH et TB chez l’adulte
4. Diagnostic différentiel TDAH, TB et Troublepersonnalité borderline chez l’adulte
5. Screening
6. Traitement de la comorbidité TDAH-TB
Diagnostic différentiel TB II-TBdlAge de début:
• Classiquement à la fin de l’adolescence ou âge adultejeune. Episode index bien identifiable.
• Début précis non identifiable dans le TBdl.Affects négatifs qui remontent à un âge précoce avecimpression d’humeur dépressive de très longue date.
Diagnostic différentiel TB II-TBdlDysrégulation émotionnelle:
• Fluctuations de l’anxiété ou de la colère plus importanteschez les TBdl.
• Oscillations entre dépression et anxiété également plusmarquées chez les TBdl.
• Comparé aux variations entre élation et humeurdépressive du TB II, oscillations entre anxiété, colère,irritabilité et humeur dépressive chez les TBdl.
Diagnostic différentiel TB II-TBdl
Variations d’humeur:
• Variations plus importantes de l’humeur entre le matinet le soir, avec une présentation imprévisible del’humeur ds le TBdl le matin comparé aux patientsavec TB.
• Variations d’humeur chaotiques chez les TBdl etévoluant en minutes ou heures mais pouvant dureraussi quelques jours…mais variations ultradiennes del’humeur parfois décrites chez des patients avec TB.
Diagnostic différentiel TB II-TBdl
• Impulsivité avec scores plus élevés sur échelle deBarratt chez les TBdl que TB II.
• Evolution plus favorable à long terme du TBdl.
• Auto-mutilations fréquentes ds le TBdl mais aussi lorsde TB II avec état mixte !
Paris et Zweig-Franck 2001; Bassett 2012; Bayes et al 2014
Comorbiditéscommunes
TBip
TBdl
TDA-H
1. Rappel Trouble Bipolaire
2. TDAH et TB chez l’enfant/adolescent
3. Diagnostic différentiel TDAH et TB chez l’adulte
4. Diagnostic différentiel TDAH et Trouble personnalitéborderline chez l’adulte
5. Screening
6. Traitement de la comorbidité TDAH-TB
WURS Wender Utah Rating Scale for the Attention DeficitHyperactivity Disorder (WURS)
1. Rappel Trouble Bipolaire
2. TDAH et TB chez l’enfant/adolescent
3. Diagnostic différentiel TDAH et TB chez l’adulte
4. Diagnostic différentiel TDAH et Trouble personnalitéborderline chez l’adulte
5. Screening
6. Traitement de la comorbidité TDAH-TB
Traitement de la co-morbidité TB-TDAH
• Traiter d’abord la condition la plus sévère (presque toujours leTB).
• Le traitement du TDAH doit être considéré quand lessymptômes persistent après la stabilisation de l’humeur et ontun impact modéré à sévère sur le fonctionnement global et laqualité de vie.
• Si un TDAH est clairement identifié et un TB seulementsuspecté, traiter le TDAH d’abord. Surveiller attentivement lessymptômes sub-syndromaux d’hypomanie/manie quipourraient être péjoré par le traitementpsychostimulant/atomoxétine.
Asherson, Young et al 2014
Traitement de la co-morbidité TB-TDAH
• Si des symptômes bipolaires émergent durant le traitementdu TDAH, stopper le traitement jusqu’à ce que le TB sestabilise et revoir le diagnostic du TDAH avant de reprendre letraitement.
Asherson, Young et al 2014
Traitement de la co-morbidité TPBdl-TDAH
• La psychothérapie est le traitement de choix pour le TPBdl.Les principes de la DBT pour le TPBdl peuvent avoir un effetbénéfique sur le TDAH, en association avec la pharmacothérapie.
• Pas d’evidence based pharmacothérapie pour les TPBdl, bien qu’uneprescription puisse être nécessaire ponctuellement.
• Le traitement du TDAH devrait toujours être considéré lors detraitement de TPBdl co-morbide. Quand les symptômes clés duTDAH s’améliorent, les patients avec TPBdl auront un meilleurfonctionnement dans la vie quotidienne et un meilleur contrôle deleur comportements. Ils auront aussi plus tendance à s’engager etbénéficier des traitements psychologiques pour el TPBdl.
Vignette clinique (1)
• Patiente âgée d’une quarantaine années,d’origine sud-américaine, ainée d’unefratrie de 4.
• Ne se rappelle pas bien de son enfance…àl’âge de 8-9 ans, était d’humeur triste et« mangeait beaucoup ». Dépression chezle père.
• A l’adolescence, dit avoir fait denombreuses « crise de nerfs », se montrait« agressive » avec l’entourage et fugue dudomicile familial.
Vignette clinique (2)
• 1ere relation sentimentale à 15 ans.• Arrête l’école car voulait travailler
comme mannequin. Se décrit commeélève « intelligente » mais peustudieuse.
• Consommation d’alcool et abusmédicamenteux à 16 ans lors d’unerupture affective.
Vignette clinique (3)
• Se marie à l’âge de 20 ans mais son marimeurt accidentellement dans un accidentd’avion 6 semaines plus tard…
• 1er épisode dépressif au décès de son mari.Tentative de suicide.
• 2 ans plus tard, s’inscrit à l’Université mais netermine pas après avoir essayé différentesfilières.
Vignette clinique (4)
• Nouvelle relation affective, et découvre aprèsplusieurs mois que son ami est marié…
• 2eme épisode dépressif qui sera suivi par unephase hypomane, pendant laquelle elle vients’installer à Genève et travaille au noir.
• Se remarie et le couple aura une fille.• Divorce quelques années plus tard. Phase
dépressive avec prescription de citalopram.
Vignette clinique (5)
• Phase hypomane sous citalopram (dort 4hrs/nuit, travaille énormément). Décide departir à St-Domingue au Club Med pour 3semaines. Va rester 4 mois sur l’île. Plusieurspartenaires, rapports non protégés.
• Revient brièvement en Suisse et partfinalement au Mexique pour travailler dansl’hôtellerie à Cancun.
Vignette clinique (6)
• Revient en Suisse après plusieurs années auMexique et un ouragan dévastateur àCancun.
• Ne trouve pas de travail et s’endette.
• Début du suivi psychiatrique après uneattaque de panique qui l’amène à consulteraux urgences puis orientée sur un CAPPI etconsultation de secteur.
Vignette clinique (7)
• Sera ensuite adressée à l’unité des TH pourune évaluation et une prise en charge dans leprogramme, il y a environ 3 ans.
• A l’entrée dans le programme, la patiente estau bénéfice d’une rente A.I. + prestationscomplémentaires depuis quelques années.
Vignette clinique (8)
• Au plan diagnostic, on retient aprèsl’évaluation à l’entrée:
• Autres troubles affectifs bipolaire (Type II)F31.8
• Troubles mentaux et du comportement liésà l’utilisation de sédatifs ou hypnotiques,sans précision F 13.9
• Trouble de personnalité, sans précision F 69(avec traits Borderline et Histrioniques)
Vignette clinique (9)
• Traitement à l’entrée :
• Lithiofor 2cp/j• Paroxétine 20 mg/j• Oxazepam 50 mg ½ cp/j
• Avait pris du citalopram dans le passé
Vignette clinique (10)
• Diminue ensuite spontanément le lithium.
• Introduction de quétiapine jusqu’à 200mg/j pour symptomatologie légèrementhypomane. Diminution de la paroxétine.
• Normalisation progressive de l’humeurmais continue à avoir une certaine labilité.
Vignette clinique (11)
• Durant les premiers mois de suivi, se plaint d’unediminution de la capacité de concentration. Lediscours est souvent « dispersé » pendant lesentretiens.
• Anamnèse révèle des troubles de concentrationprésents déjà depuis la scolarité avec tendance às’ennuyer, sans hyperactvité notable.
• Questionnaire d’évaluation (ASRS-1) compatibleavec un diagnostic de TDAH.
Vignette clinique (12)
• Début traitement Méthylphénidate 18 mg/j.
• Pas d’amélioration significative rapportée par lapatiente et les soignants.
• Augmentation à 27 mg/j. Dans les jours etsemaines suivantes, signale une meilleurecapacité de concentration. Le discours est moinsdispersé.
• Meilleures gestions des questions administratives,d’après l’assistante sociale
Vignette clinique (fin)• Quitte l’unité quelques mois plus tard pour un
suivi en privé.• La quétiapine a été stoppée et de la
lamotrigine 200 mg/j a été introduite pendantle suivi.
• Prennait toujours le méthylphénidate 2 ansplus tard.
• Evolution globalement favorable avec humeurrelativement stable.
Merci pour votre attention