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8/10/2019 Un Disciple de Martinez de Pasqually
1/42
Antoine Faivre
Un martinsiste catholique : l'abb Pierre Fourni (premier
article)In: Revue de l'histoire des religions, tome 172 n1, 1967. pp. 33-73.
Citer ce document / Cite this document :
Faivre Antoine. Un martinsiste catholique : l'abb Pierre Fourni (premier article). In: Revue de l'histoire des religions, tome172 n1, 1967. pp. 33-73.
doi : 10.3406/rhr.1967.8516
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rhr_0035-1423_1967_num_172_1_8516
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/author/auteur_rhr_4661http://dx.doi.org/10.3406/rhr.1967.8516http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rhr_0035-1423_1967_num_172_1_8516http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rhr_0035-1423_1967_num_172_1_8516http://dx.doi.org/10.3406/rhr.1967.8516http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/author/auteur_rhr_46618/10/2019 Un Disciple de Martinez de Pasqually
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Un
martinsiste
catholique :
l abb
Pierre
Fournie
Parmi les personnages qui se runissaient autour
de
Martines
de
Pasqually, le
thosophe thaumaturge, plusieurs
ont
laiss un
nom ; l'histoire connat Louis-Claude
de
Saint-
Martin, Jean-Baptiste
Willermoz, Baudry
de
Balzac et
quelques autres.
Mais
certains,
qui
crivirent pourtant,
n'ont
pas encore fait l'objet d'tudes
particulires. C'est
le
cas de
l'abb Pierre Fournie, l'un
des principaux acteurs
du premier
martinisme.
S'il a t
frquemment mentionn, on ne
s'tait
encore
jamais livr
aucun
travail d'ensemble le concernant.
En traant
un
portrait
de Fournie,
en prsentant
son
livre
d'une manire
systmatique,
je m'attacherai
ici
mettre
en
relief
une
pense qui
s'inscrit
dans
la
gense
du romantisme
allemand, et
laquelle Franz
von
Baader, le
philosophe de
Munich, s'est tout particulirement intress1.
De Fournie, on connat surtout ce qu'ont crit ses
confrres
en Illuminisme ; quelques notes parses permettent
ainsi
de
tracer sinon une biographie d'ensemble, du moins
l)
Jacques
Matter,
dans Saint-Martin
le
philosophe
inconnu,
Paris,
Didier,
1862, p. .'55
54,
a
parl de
Fournie, mais
.seulement
d'aprs
les dernires pages
de
sun
livre. Ren
Le Forestier,
dans
La Franc-Maonnerie occultiste au
XVIIIe
sicle
et
VOrdre
des
lus
Cohens,
Paris,
Dorbon,
1928, p.
536
543,
s'est
servi
uniquement
du
livre
de
J.
Matter.
Paul
Vulliaud,
dans Les Rose-Croix
lyonnais, Paris, Nourry, 1929, p. 119
134,
a
consacr
un
court chapitre
Fournie
;
on
est
frapp par
le manque
d'objectivit, la partialit et l'aspect
faussement
scientifique de
cette tude. Il
faut
attendre
Auguste Viatte pour
lire quelques
payes
intressantes sur Fournie,
dans
Les
Sources
occultes
du Romantisme, Paris,
Champion, 1928,
rdit en 1965
(index des
noms
propres},
et plus tard Alice
Joly,
qui a utilis avec beaucoup
d'intelligence
un certain nombre le
documents des
archives lyimnaises le concernant :
cf.
Un
mystique
lyonnais [Willermoz] et les
secrets de
la Franc-Maonnerie,
Mcon, Protat,
193s,
et De l'Agent
Inconnu
au
philosophe
inconnu,
Paris,
Deno l,
1963 (table
des
matires et index
des
noms
propres). Je ne
cite pas
Alice Joly chaque fois qu'elle s'est servie d'un
document
dont je tire parti dans
le
prsent travail.
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34
REVUE
DE
L'HISTOIRE DES
RELIGIONS
les
grandes
lignes d'une carrire.
Il
est
n
vers 17381, et
vers l'ge
de
trente
ans
il semble qu'il fasse partie du diocse
de
Lyon2.
Aussi
bien est-ce
partir
de
cette
poque,
c'est--
dire
de
1770, qu'il nous intresse, car c'est ce
moment-l
qu'il fait
la
connaissance de
son matre. Depuis
1754
jusqu'
sa mort, survenue
en
1774,
Martines
de
Pasqually ne cesse
de travailler
la
construction de
son temple
Cohen.
En
1761,
il
est
affili
la Loge
La Franaise
Bordeaux,
o
il
construit son
Temple particulier . De 1761 1766,
il
demeure
en cette ville, puis
il
part pour Paris o
il
instruit de sa
doctrine Bacon
de
La
Chevalerie,
Jean-Baptiste
Willermoz,
et
plusieurs autres
personnages.
En
juin
1767,
il
est
de
retour
Bordeaux
et se
marie.
Son fils nat
en
1768, et Martines
fait
la
connaissance de Saint-Martin,
alors
officier
du
rgiment
de
Foix. Aussitt aprs le baptme, Martines donne son
fils la premire conscration dans la hirarchie Cohen ;
il
le
destine
devenir
son
successeur, mais ce
fils disparat
dans
la tourmente
rvolutionnaire.
Du
deuxime fils de
Martines,
n
au
commencement du
mois de juin 1771, on
ne
possde que
quelques renseignements fournis par Saint-Martin Willermoz
dans une lettre du 8
juin 17713.
Ce
rappel
historique est impor
tant n ce qui concerne Fournie, qui assume ce moment-l
des
fonctions
de secrtaire auprs de
son matre, et qui plus
tard dirigera
l'ducation d'un
des deux fils de ce dernier.
Jusqu'en
1768,
c'est Du Guers
qui
sert, Bordeaux,
de
secrtaire
Martines, et en
1768
et
1769, ce
sont
Grainville,
Champollon, Balzac, qui rdigent avec le matre les
cahiers
de grades. Mais
ce sont Fournie
et
Saint-Martin
qui
se
trouvent
auprs
de
lui
Bordeaux
au
moment
o
le
Trait
1)
Cet abb
en l'an
1819,
a
81
ans ;
cf.
note infra.
2) C'est ce
que
pense Matter,
qui put
utiliser
des sources
dont une
partie
seulement
a
t conserve :
Fournie
qui tait, je
crois,
du diocse de Lyon
et
qui
avait
peut-tre rencontr d'abord le mystrieux
Portugais
sur
les
bords du
Rhne,
avant
de le
suivre
Paris,
s'attncha ses
doctrines
spiritualistes de toute
la puissance
de sa
foi . J. Matter, op.
cit., p. . '35.
.'5) Cf.
Van Rijnberk, Un thaumaturge du XVIIIe sicle, Martines de Pas
qually, Paris, Alcan, 1935,
p.
20 s.
Pour
une biographie de Bacon de La
Chevalerie,
cf. Le Forestier,
op.
cil.,
p. 546
549.
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UN
MARTINSISTE
CATHOLIQUE I l'.VBB Pi FOURNIE ) -
de la
Rintgration
est compos1.. Fournie prcde d'ailleurs
Saint-Martinr dans
-ces fonctions
de
secrtaire, puisqu'il; est
nomm ds 1709
auprs
de
Martines.
Ce dernier
s'en
dclare
enchant,
Fournie
tant
fort
en
religion, crmonies- et
instructions particulires 2, et particulirement besogneux3.
A
cette poque, il n'a pas encore reu les ordres ecclsiastiques ;
Saint-Martin le
dpeint
d'ailleurs peinant beaucoup- pour
apprendre
un
peu;
de latin4.
L'abb
sert
volontiers d'inter-
1)
Trait
de la rintgration des tres dans
leurs
premires proprits, vertus et
puissance spirituelles et
divines,
compos
vers 1771 et
publi
seulement en
1889,
Paris,
Chacornac, 38* p.
Sur le
Trait,
ci. Von
Rijnberk,
up. cit., et R. Le
Forestier,
np.
cit.
2)
Alice
Joly, l'n mystique Ujonnais,
p.
32 s. MS Lyon, .Willermoz Turckheim,
1821,
et MS
5425, p.
57.
3) Van Rijnberk, pour
qui
Fournie tait
un vase lu le
l'esprit
[Marlines
de
Pasqually, t.
II,
Lyon, Derain, 11)38,
p.
28), a
reproduit les
lettres de Martines
le
Pasqually
Willermoz
(MS Lyon 5471) ; dans l'une d'elles,
le
thaumaturge
expose ce qu'il pense de son secrtaire
:
Je vous fait part que jay prit un secretaire
de
confience qui
sort des
coppyes
de mon
registre
de tous les
grades
soit
en
recep
tion eremonyes
et
instruction
particulliere enfin
il est
charg
dfinitivement de
secretaria general et
particullier,
cet un frre que jay au prts
de moy depuis
un
an
et plus
fort
intelligent, il
a
tout abandonn pour suivre la chose dans toute
les circonstence
il
se nomme le frre
Fournier
un
des bons
bourgeois
de
Bordeaux
propre oncle est prieur des grands Augustins de Paris ; se
frre
netant
point
extrmement
riche lorsque
l'on retire le
ses
mains toutes
les
critures qu'il
faut
pour
mener
un temple
on
lu
fait
present
de
quelques
honnorres
pour
quil
:
ne perde point
son temps absolument
;
il est trs instruit, si vritablement vous
tes dans
lintantion
le vouloir lever votre grand Tple marques le moy je le
fera y travailler tout
de suite pour vous,
il
y
a bien
pour
deux mois
derriture affaire
sans
trop
sarnuser pour vous envoyer
les choses en
rgles,
et
bien
intelligibles
(ibid.,
p.
128, 20
janvier
1770 ;
ce
texte
avait dj t
publi, mais avec
des modif
ications, par Papus, dans Marlines de Pasqualltj, Paris,
1*95, p.
176).
Le mois
suivant,
Martines
entretient Willermoz
des
mules
ayant
obtenu les
succs
thurgiques
;
ce sont
d*IIauterive,
Deserre,
et lautre
le frre
de
Fournier
ancien
bourgeois
vivant de
se* revenus
de
Bordeaux, neveux du Grand Prieur
des
August
ins
e Paris
. Ces gens
voyent
le nuit,
et
de
jour
?ans lumire,
ni
bougie ny autre
feu quelconque (Van
Rijnberk,
op. cit., t. II,
p. 132, 16
fvrier
1770).
Pendant
les annes 1762
1766, Martines avait
eu
pour secrtaire
un moine, le
P. Bullet
(ou Boull), aumnier du rgiment de Foix,
qui fut
donc
le
prlcesseur de Saint-
Martin et
de
l'abb
Fournie (ibid.,
t.
II,
p.
19).
Cf.
aussi
Papus,
Saint-Martin,
p.
87.
4)
Sitt
que
je l'aurai
[l'adresse
de
Martines
de
Pasqually]
je
vous
la
ferai
passer ou
plutt je
laisserai ce
soin
M.
l'abb Fournie. Je luy rserve cette
occasion
pour vous
remercier
de
l'intrt que
vous
prenez ses affaires. Il
est
enfin
tonsur depuis le mois dernier, il ne luy
faut
plus qu'une abbaye pour tre
tout
fait
tranquille, en
attendant il sue sanar
et eau aprs
son latin, car il n'en
sait
pas un mot, et il
voudrait
bien
ne
pas exposer l'honneur de sa robe
(Saint-
Martin Willermoz,
12
aot 1771), lettre
publie par Papts, .Louis-Claude
de
Saint-Martin, Paris, Charornac, 1902, p. 109 ..
Il
ne semble pas que
Fournie
ait
beaucoup
profit
du bnfice
jue Saint-Martin souhaitait pour lui.
Dans
Les
Luix
ecclsiastiques de
France, ouvraire publi la mme anne
(nouvelle
dition,
par feu
Me Louis de Hrioourt, Paris,
1771, (
IV, article I,
XVIII),
on voit
combien
l'un
se
mfiait
lu
rot les candidats
pour
les bnfice-*.
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38
REVUE
DE
L'HISTOIRE
DES
RELIGTONS
de rapprocher cet
aspect
auditif
du
terme auriculaire ,
dont Fournie se sert
frquemment dans
son
ouvrage
propos
des
esprits1.
Dans la
liste de mystiques
numrs par l'abb, nous
trouvons principalement
des
Illumins.
Sans doute connat-il
Bhme par les
rcentes
traductions
qu'en
a fait Saint-Martin
le
Philosophe Inconnu
a
dcouvert
le
Philosophe Teuto-
nique
Strasbourg, en 1788
bien
que
Fournie ait proba
blement cess de
frquenter le
thosophe
d'Amboise ds la
fin
des
annes quatre-vingts2. En
tout
cas, il
a entendu
parler
aussi
de William Law, ce qui
s'explique
par
le
fait que Fournie
vivait
Londres, mais
galement
par
les
visites
que Louis
de
Divonne
lui a rendues
dans cette capitale3.
C'est
peut-tre
en Suisse que
Fournie a
dcouvert les
uvres de Mme (juyon,
car
dans
ce
pays elles taient fort lues, les milieux
guyoniens
y taient
trs
actifs4. D'ailleurs,
c'est
par
le fameux
libraire
mystique Daniel
Ptillet,
de
Lausanne,
que
l'on
peut
se
procurer
l'ouvrage
de Fournie au dbut
du xixe
sicle5. On
ne
s'tonnera
pas, certes,
de
voir figurer
galement
dans cette
liste
le
nom de
Swedenborg
;
il
n'est
pas
surprenant, pour
peu
que
l'on ait
tudi les enseignements
martinsistes et
1} (X infra,
dans
le chapitre
consacr
la pense
le
Fournie.
2) Cf. infra, propos
de
Agent Inconnu .
3) Divonne a rencontr Fournie Londres. Il
est
l'auteur le La Voie de la
science divine,
traduite
de M. W. Law,
prcde
de
La Voix
qui crie dans
le
dsert,
par Lodo
,
Paris, 1805. Cf. infra, propos
de
Baader.
4) Cf.
Paul
We.inle, Der
schweizerische Protestantismus,
Tubingen,
1925,
t. III, index des noms propres, et
A.
Faivre,
Kirchberger
et Vllluminisme du
XVIIIe
sicle,
La Haye,
Nijhoff,
1966, p.
186 s. Si
l'on ouvre
le
Dictionnaire
de Moreri
(1759),
trs lu
cette poque,
l'article
(uyon,
on s'aperoit
que
les
auteurs
de
cette
rubrique
ne
semblent
pas
du
tout
hostiles
l'amie
de
Fnelon.
De
plus,
il
est
remarquable
que
l'ouvrage
alors
trs
connu
de
l'abb
Pujot>et
[Mmoires
pour
servir
Vhisloire
des garemens de
V
esprit humain par rapport
la
religion
chrtienne :
ou
dictionnaire
des hrsies, des erreurs et
des
schismes,
Paris,
2 vol.,
1762, anonyme], dlaisse les
ouvres
de Mme Guyon, de
Swedenborg,
de
Bhme et
de
Law au profit
garemens
dont
l'auteur dresse
une liste
au
demeurant impressionnante. Certains des auteurs, parfois
rcents, mentionns
dans
cet
ouvrage,
reprsentent mme
une
certaine
tendance cumnique, tel
Jonas
Conrad
Scharmius (ibid., t. I,
p.
321),
auteur
d'une Introduclio in dialeclicum
Caballaeorum, Brunswig,
1703,
qui dfend l'ide d'une
conformit entre
la
cabale
et
la
religion chrtienne. Sur cet fpcumnisme chez
Fournie,
cf.
infra,
dans
le
chapitre consacr son
catholicisme.
'| Cf. infra, propos
de
Baader.
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UN MARTINSISTE CATHOLIQUE
L'ABB
P. FOURNIE 39
saint-martiniens,
de
trouver
sous
la
plume
de
Fournie
la
trs nette distinction entre les bons et les
mauvais
esprits
ou
anges,
l'affirmation
d'un
discernement
ncessaire,
celui-l
mme qu'enseignait Jamblique, que recommandaient
tous ceux qui. pratiquant la thurgie, se
mfiaient
des formes
d'emprunt, dmoniaques ou impures, capables
de
se faire
passer
pour
des
anges
de lumire1.
Pour
Fournie,
le
magnt
isme
st un don
du
ciel,
qui doit montrer aux
hommes l exi
stence
de leur
tre
spirituel
distinct
de leur
enveloppe
matrielle .
Cet
intrt
de
l'abb
pour la science
de
Mesmer
n'est pas nouveau, au moment o il
crit
ces lignes. Ds 1785
en
effet, il
crit
Willermoz
qu'il
se
livre
Bordeaux
et
Rochemonts des
expriences
de
ce
genre2.
En
1778,
nous
trouvons Fournie
en
rapports
avec le
Substitut (inral
de Serre,
qui
a
la garde du jeune Pasqually3.
L'abb
reoit des ordres
pour
copier,
distribuer et
envoyer
les
documents
arrivant d'Amrique4.
A
vrai dire, il n'a
gure
quitte
Bordeaux
;
il
y
rside,
auprs de la veuve de
son
matre5,
et
continue donner
Willermoz,
qui demeure Lyon, des
nouvelles
de
la
famille
Pasqually6. L'abb Fournie
vit
grce
aux subsides
que
lui
envoient ses Frres martinsistes. Ds
le
mois de
mars 1781, il
touche
une
pension de 150 livres7.
Certes, Willermoz est le plus
gnreux
il
est
aussi l'un des
1)
Cf. A.
Faivre,
up.
cit.,
chap. III.
2) Le magntisme
Bordeaux
et ici par
nos bons amis se
trouve
port outre
les cures charmantes corporelles au plus haut
detrr
concernant notre affaire.
Je me trouve
avoir opr dans
cette partie
sans
manipulation
ordinaire,
in^rdiants
ny particulire volont. Lettre du .40 dcembre 1785 (MS Lyon 5472).
.'{) MS Lyon
f>472, Fournie,
de Bordeaux,
Willermoz, .'50 juin 1778 :
J'ay
reu lettre
samedy
dernier
du
ch. P. m;
f.
dsre,
qui
se portait
bien,
de
mme
ijue
le
petit
Pasqually
dont
il
me
donnait
des
nouvelles.
4) Ibid., 23 juillet 1778 : [Deserre]
m'a
donn de plus
ses
ordres pour
tirer
des coppies du
paquet
d'amerique, et par
ce
mme courrier
j'envoie
au p.
m.
de
saint-martin
une coppie, il est
le
premier
qui je
l'envoie . On
sait
nie
Martines
tait mort
Saint-Dominsme
en
1774.
Caiynet
de Lestre lui avait succd l-bas,
jusqu'en dcembre 1778, puis
Sbastien Las
Casas.
Le
20
mars 1779,
Fournie
apprend
Willermoz
la mort
de
Caiyrnet ; Mme
de
Pasqually vient
de
l'apprendre
de
son propre frre,
rsidant
Saint-Domimrue.
5) Ibid., 7 aot 1779 : C'est pour vous apprendre
le
maria
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9/42
40
REVUE
DE
L'HISTOIRE
DES
RELIGIONS
plus riches .. mais; d'Hauterive, de
Toulouse,
et Saint-
Martin, de Paris, soutiennent
autant qu'ils
le peuvent, leur*
confrre-
de,
leurs
charits..
Cela devient,
indispensable
en-
novembre
1781, tandis qu'une pidmie
fait rage
Bordeaux5.
En
1
784, il remercie Willermoz
de lui
avoir, fait parvenir
150 livres6. Saint-Martin,
qui
est sans doute pour
quelque
chose
dans la
gnrosit
du
riche industriel
lyonnais,
crit de
Bor
deaux Willermoz le 6 juillet 1776,
et
ne tarit pas d'loges
sur
l'abb7. Cette lettre- est intressante, elle montre combien
les
Cohens
taient persuads
de
l'authenticit
des visions dont
l'abb tait
favoris ;
elle est un
document
de
premier
ordre sur
l'esprit
qui
rgnait
dans
ce
milieu,
sur
le
ct vraiment
pitto
resque de
la
personnalit de
Fournie ;
crite
par Saint-Martin,
elle n'est
pas dpourvue
de finesse
ni d'un certain humour1.
5)
Ibid., 5
novembre 1781. A
cette date,
Fournie
semble
recevoir
cet
annuel
depuis deux
ou trois ans au
moins ;
il reoit cent cinquante livres de Willermoz
et
de
ses
amis, mais
les
autres
Orients
lui
complettent six cents livres t. Sur
le verso
de
cette
lettre, Willermoz note
qu'il va
lui
envoyer
200 1
le
17 novembre.
6)
Ibid., 9 mars
1784.
7) Matter,
qui ne
connaissait pas cette correspondance, s'avance
un peu trop
lorsqu'il crit que Saint-Martin devait
mpriser
quelque peu
Fournie
cause de
l'admiration
de
ce
dernier
pour Mme
Guyon et Swedenborg. Il se trompe tout
fait
lorsqu'il
crit
que
les
deux
hommes n'ont
pas
d
se
connatre dans
les
runions
de
Bordeaux, mais
seulement
Paris
et
Lyon
;
cf.
Matter, op. cit.,
p.
50 s.
1)
C'est
un
ange pour la puret
du cur et
pour la charit,
c'est un lu
pour
l'intelligence ; quant
aux
faveurs
physiques
je ne
srais
si
notre
dfunt Mtre en a
jamais eu en aussi grand nombre et d'aussi directes. Je le regarde comme tant
un point d'lvation dans cecy que tous les R. >J< [Raux-Croixj de France et
peut-tre
-le souverain
leur tte
n'atteindraient
pas.
Ce qu'il
a eu
est
suivi,
consquent, et
beaucoup
plus
intelligible en discours
que
dans
ses
lettres o-
vraiment on
ne
sait
les
trois marts du tems
ce qu'il.
veut dire. Sa mort lui a1
t
figure
dans
toutes
les
rgles, ceux qui ne
l'ont pas quitt pendant
plusieurs
semaines, l'y ont
prpar.
Tout le crmonial funbre s'est opr sous ses
yeux
si bien qu'il a cru pendant 24 heures tre rellement
dans
l'autre
monde
et jamais
a-t-il dit il
n'a
connu
de
semblable flicit. Il a t ordonn pendant sept heures
de
suite par nombre d'agents spirituels dont' plusieurs
avaient
eu
des
liens trs
puissants
avec
lui
pendant
leur
vie
corporelle,
tels
que
le
Mtre
son
pre et
sa
mre,
etc. Aprs
avoir
subi plusieurs autres
preuves
en, tout. genre et qu'une
lettre
ne
pourrait pas
contenir on
l'a condamn toutes
les
observances de
l'glise
sans exception
; on
lui
a
mme prescrit d'entendre
la messe tous
les
jours
six
heures du matin et en
outre de
ne point boire
de
vin,
si
bien qu'il fut
tanc
l'autre
jour
de
la bonne manire
pour
avoir
mang de la
salade o il ne fit pas attention
qu'il
y
avoit du vinaigre
qui
vient du vin.
Cette
multitude d'attractions
et
de
faits
physiques
m'a
fait croire que le sujet tait plus digne qu'aucun d'tre admis au,
travail, en
consquence,
j'ay
crit
son
insu
au Mtre Caignet
et, sur le
compte-
que je lui rends, je l'engage
faire
pour lui
tout
ce qu'il croira convenable et tout
ce
qu'il
pourra.
Ce n'est point un travail
anticip
qui a
procur
au
sujet
tant
de
choses, ce sont de simples prires
et le
dsir
ardent
de sortir de dessus
luy quelques
8/10/2019 Un Disciple de Martinez de Pasqually
10/42
UN MARTINSISTEi CATHOLIQUE
: L'ABB P.
FOURNIE 41
On lve le fils
de
Martines
de
Pasqually
dans
l'espoir qu'il
succdera
un jour son
pre ; les
Cohens prennent
grand soin
de
son ducation1. Mais
cela
ne
va pas
sans
difficults,
l'lve
n'tant pas particulirement docile2. L'abb Fournie, pensionn
par la Loge
des
Amis Runis
de
Paris, est
son
instituteur3 .
taches, qu'il
y
avait laisser entrer. Ce n'est point dans sa quarantaine que
le
tout
est
venu,
ce n'est
que
depuis
et
quoiqu'il
soit beaucoup plus tranquille aujourd'huy
il n'y
a point
de jours qu'on ne
le
dirige
comme un
enfant dans toutes
ses
actions.
L'ordonnance de
la
messe
six heures du matin est ce
qui
l'empche de sortir
du
pays, parce
que
n'ayant
pas
de
voiture
luy,
il ne
pourrait disposer de son
temps dans
les
routes de manire
excuter les ordres qu'il a reues. Enfin
il
faudrait
des livres
pour contenir tout
ce
qu'il a vu,
entendu, senti, depuis six
semaines
et vous
savez
que les livres sont peu propres contenir de pareilles
matires. Ainsi
je
me bornerai
l'extrait
que
je
viens
d'en
faire
Saint-Martin
Willermoz,
de
.
de
Bordeaux,
le
6.
juillet
1776,
publi
par
Papus,
op.
cit.,
p.
143 s. J'ai utilis
ici
le MS original, Lyon,
5956,
le texte
de
Papus
comportant
quelques
lgres
erreurs.
1)
MS
Lyon 5472, Fournie
Willermoz, 27. novembre
1779, de Bordeaux
:
Je viens de
recevoir de
madame d'Olabarats linstruction que vous m'avez
demand, concernt son. fils, et que je vous envois,
gallement.
Elle la
mis
au
Collge
Iescar
prs
paux, ou
il y
un
matre de dessein,
un
Me
a
crire
et un
pour
les mathmatiques
et le latin usques ici il n'a rien apris
dans
les autres pensions.
Ses
noms
de baptme
sont, Jean Anselme, et
il aura onze
ans et demi le
17
dcembre
.
prochain
[...] Elle
a 1
perle des
maris,
elle
espre
qu'il
sera
des ntres.
Dans le
MS
de Lyon 5471,
on trouve
une intressante
lettre
de
Mme
de
Pasqually .
Willermoz du 14
mai 1779
concernant
son fils
Jean-Anselme
;
Willermoz crit au
dos
de la lettre reue
: n
17
juin
1768 est au college
Lescar
prs
de Pau. Elle;
recommande
l'abb
Fournie
.
Dans
Les
Eose-Croix
lyonnais,
Vulliaud,
dit
que
c'est
la
seule
lettre
qu'elle
ait
crite.
Cela
est
inexact,
car
dans
ce
MS
5471
on
trouve
une
autre
lettre du
mme
auteur,
bien
que
l'criture
soit srement
d'un copiste.
Dans
l'un et l'autre cas,
il
s'agit bien de Mme Collas, veuve de
Pasqually.
Vulliaud
a
copi
le passage
concernant Fournie
(ibid.,
p.
114) : II mrite beaucoup qu'on
senterece
a
sont triste
sort,
je
ne
pas bessoint de vous
en
dire
davantage en le
conservant vous coneses son
pris.
Vulliaud
ne
cite pas
la
phrase prcdente : Je
vous priye de
donner au
mettre
Fournier tout le ser.our que
votre
belle ame
poura
lui
donner
il
ne
retra
[?] plus avec moi je fait pour lui tout
ce
que je pouvet
faire
je
vous avertit qui
na
rien dans
ce bas monde...
Cette lettre a t cite galement
par Van
Rijnberk,
op. cit., t. II,
p.
166.
2)
Ibid., 5 mars 1781 ; le jeune Pasqually a
t
retir
de
Lesquart
o il
n'apprenait
que le
libertina tre
;
sa mre
donc mis dans
un
sminaire
; l'enfant
voudrait
quitter
ce
dernier, mais
elle reste
sourde toutes ses protestations,
e par la
s'il
plait
a
Dieu, il
deviendra
sage successeur de
notre
Gd. M.
.
Fournie
ajoute
:
Je
me rcommande
a
vos
prires
et
vos
travaux
d'quinoxe
et
vous
prie de
croire qui dieu merci je noublie point ceux
de votre
O.
dans les
miennes,
vous
remerciant
trs humblement et
tous
mes
ff.
des
cent cinquante livres que
vous mavs procur.
3) C'est ce qu'crit le Prince
Chrtien
de Hesse-Darmstadt dans son carnet
de notes
autographes.
Ces
renseignements lui ont t
confis
par le marquis de
Chef
de Bien
Strasbourg
en
janvier
1782; le Prince Chrtien
les
a
rdigs en-
allemand,
puis les a plus tard rsums en franais dans
une communication
qu'il
fit au
snateur .W. F.
Metzler Francfort. Cf.
Van Rijnberk,
op.
cit., p.
84 et
139 s. Van Rijnberk a puis ses documents
aux
Archives du Grand-Orient
de
La
Haye,
et
dans
les archives personnelles
de S.
A. R. le Grand Duc de Darmstadt
(Cf. Van Rijnberk, op. cit., p. 183).
8/10/2019 Un Disciple de Martinez de Pasqually
11/42
42
REVUE
DE
L'HISTOIRE DES
RELIGIONS
Or, deux ans
plus tard,
un
vnement d'une
importance
considrable va; se
produire
dans le milieu des:
mystiques
de
Lyon:
Mme
de
Vallire
entre
en
rapports
avec
de
mystr
ieuses entits surnaturelles et rdige,
sous
leur-dicte,
un
nombre
impressionnant de
textes inspirs . Le
frre-
de-
cette dame, Alexandre
de-Monspey,
fait part
Willermoz
des rvlations de
cet
Agent
Inconnu
, dont les ense
ignements
semblent
confirmer,
ceux de Martines. Ds lors; les
disciples
de
Willermoz, les anciens -Elus Cohens, et d'autres
mystiques aussi,
adhrent
cette
Loge Elue
et
Chrie
qui
semble
si bien faite pour combler les
vux
des hommes
de
-dsir.1.
Un certain
nombre
de
candidats
cette
nouvelle
initiation, qui font connatre leur dsir d'y tre
admis,
ne
sont pas appels. L'abb
Fournie, de
Bordeaux;,
est
de
ceux-l. Il continue
toucher la petite
pension que lui
verse
Willermoz, et ce dernier
reoit
en remerciement,
des disser
tations
mystiques
et des prires . Fournie
avait
fait faire
au marquis Vialette
d'Aignan,
de
Montauban son
apprentis
s geystique dans les temples- Cohens dir Sud-Ouest ; ce
marquis
lui
apprend
un
jour
de
quelles
merveilles
les
initis
de
Lyon sont favoriss. Aussitt,
l'abb
se prpare
.
entre
prendre
-le voyage,
persuad que
Willermoz l'admettra dans
le nouveau
sanctuaire. Mais
le Rau-Croix
lyonnais
en
a dcid
autrement, car Fournie n'est pas
appel
par l'Agent.
L'abb voit Vialette d'Aignan Montauban le
27
avril* 1786,
avec le F.
Bruyset de
Sainte-Marie.
On fait valoir au Bordel
isue,
n'tant pas Maon,
il ne
peut. prtendre
tre
reu,
laLoge lue
et
Chrie,
et
que, de plus,
il
n'est pas
appel
.
Fournie rplique que
tout
lu
Cohen
est
Maon
;
lass
par
tant
d'insistance.
Vialette dcide de s'en remettre Willermoz2,
1) Sur toute
cette
affaire, cf.
Alice
Joly, Jean-Baptiste Willermoz
et
l'Agent
Inconnu
des
Initis de Lyon, in
De
l'Agent Inconnu au philosophe inconnu, par
Robert
Amadou et
Alice Joly, Paris, Denol, 1962.
2) Vialette d'Aignan > Willermoz, de Montauban,-
le 28
avril' 1786,
MS Lyon 5869.
Fournie prtend
que les
Cxn [=
Cohens] tant
les
enfants
du Christ
et
tant
en
union
avec
lui la nouvelle dispensation devant
ncessairement
avoir le mme chef
tout devoit
tre commun
entre
frres . Willermoz crit au
dos
de la
lettre :
Rep.
le 8/10
may
en le
blmant de
son
indiscrtion
.
8/10/2019 Un Disciple de Martinez de Pasqually
12/42
UN
MARTINSISTE
CATHOLIQUE
: L'ABB P. FOURNIE
43
non
sans
avoir
tenl
de
persuader Fournie que
l'on peut
remplir
une brillante carrire dans
l'Ordre des
G
x
n
[=
Cohens]
sans
pour
autant
tre
demand
pour
cette
nouvelle
dispensation
,
qui
ne
dpend
pas
de
Willermoz1.
Le 8 juillet de
la
mme anne, Bruyset de Sainte-Marie crit
Willermoz qu'il a t
du de
ne
pas rencontrer Fournie
lors
de son
passage
Bordeaux ;
l'abb
tait
la
c m
pagne
non
loin
de l, et Bruyset
s'apprtait le
consoler.
Les
Frres lus
Cohens de Lyon ont contribu rcemment
un
petit
annuel
pour
lui
dont
il
est priv ou craint d'tre
priv
, et
les Frres
de Toulouse
et
de
Bordeaux,
de leur
ct,
le
soutiennent de
leur gnrosit2.
Deux
jours
plus
tard, Fournie remercie Willermoz de ses
bienfaits
passs,
que
votre volontaire charit
avait
eu
la
bont de me faire en considration de notre Gd. Sn. de
pasqually
, s'tonne de
ne plus rien recevoir, et reproche
son
correspondant de
ne
pas l'avoir
prvenu
de la suspension
de son
annuel
;
il s'est
trouv,
en
effet, pris au dpourvu,
le
voici sans
ressources. L'abb prtend n'avoir
jamais
voulu
entrer
dans
le
rgime
rectifi
,
de
mme
qu'il
prtend
n'en
avoir jamais
dit de mal
; on ne
peut tout de
mme
pas lui
reprocher d'avoir vant les mrites de l'Ordre des Cohens,
dans lequel
il
a plu
Dieu
de
lui
faire voir par dessus
la
foi
les doutes
et
les mistres
toutes
les vrits
dont
il avoit
donn
les
ides aux hommes
et donn
de plus la
vision
claire de
la
dmonstration
d'une
autre
ide
qui
jusqu'
ce momt ntait
point venue a la connaissance des
hommes et
qui est la baze
de
toutes
les
autres
. Si Fournie n'est pas entr dans une
nouvelle
obdience,
c'est,
dit-il,
parce
qu'il
a
trouv
sa
voie.
Sur le
plan de
la puret du cur, il
s'estime
la dernire
des
cratures, mais sur le plan des
connaissances il
est
du
nombre
des premires cratures , grce l'Ordre des Cohens,
dans
lequel Dieu
lui
a accord la grace
de
voir la vrit vidente
1)
Ihid.
-Z)
MS Lyon
)*7.
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13/42
44
REVUE
DE :
L'HISTOIRE
DES RELIGIONS
de toutes
les ides qu'il. nous en
avoit
donn, et
de
la. voir
par dessus touts les mistres
et
la foi,
et
mme par dessus
une autre ide dont
jamais:
homme1
n'a
parl
.
Quant
au
nouvel Ordre,
puisqu'il
enseigne des vrits suprieures,
il
faut le faire connatre aux hommes
si,,
comme le pense
Willermoz, son
veritable
nom
crit
dans la nature
proclame
la. fin du
monde
et le
rgne de
l'ternit 1. Cette lettre est
habile, car. Fournie ne
fait
pas
directement
allusion
l'Agent
Inconnu, mais dsigne sous le
nom de
rgime
rectifi
l'ensemble des
rformes
lyonnaises survenues depuis la mort
de
Martines. Ces dernires ne sont pas toutes,
d'ailleurs,
d'une
stricte
orthodoxie
martinsiste,
et
l'abb
sait
le
rappeler
Willermoz
en
de
nombreuses
allusions. En
octobre,
ill crit
une
trs longue lettre Vialette
d'Aignan2,
qui lui
reproche,
dans, sa rponse, d'accuser Saint-Martin, et Willermoz de
manquer
de
charit
son
gard ;
alors
que Fournie est vnr
par eux,
ce dernier les accable
d'injures
;
comment auraient-ils
pu lui
communiquer
ce
qu'il
demande,
s'ils
n'en
ont
pas eu
la
permission
? Vialette pense
que
les jugements de Fournie
ne
font pas
honneur
son cur
; en
tout
cas,
ils tonnent de,
la.
part de
quelqu'un qui
semble
prtendre n'avoir pas besoin
d'instruction,
et
connatre
tout
ce qu'il est possible
l'homme
de connotre .
Sans
mnagements, Vialette dclare
Fournie qu'il
n'a-
pas t
satisfait
dmtout de
son
ptre ,
qui
est
remplie
desfoiblesses
de l'humanit,
et o l'amour: propre paroit
chaque ligne . Puis
il
ajoute
:
Mille
et mille pardons
si
un
novice
tel que moi s'avise
de dire un
homme
aussi
lev sa
manire
de
penser
;
mais
.
quelquefois
Dieu
suscite
les
choses
foibles pour redresser les fortes. Fournie
ne
s'est-il pas
vraiment cart un
peu
trop des gards dus
Grainville,
.
Saint-Martin et Willermoz ? Certes, il- n'est pas question
1)
MS Lyon 5472.
Fournie
Willermoz,
de
Bordeaux, le
10 juillet
1787.
2) Le 16
septembre
1787,
comme
cela
ressort
de la lettre de Vialette
Willer
moz,
7
septembre
;
Vialette copie sa rponse
Fournie
et l'envoie .Willermoz.
MS
Lyon
5870.
8/10/2019 Un Disciple de Martinez de Pasqually
14/42
UN MARTINSISTE CATHOLIQUE
: L'ABB P. FOURNIE
45
d'abandonner pour
autant
l'abb bordelais : Si je venois
ne
pouvoir plus vous payer le petit annuel
que
je remets
au
R.F.
de.Rochemonts
pour
vous,
je
manquerois
l hon
neur. Vialette a pourtant subi une injure grave,
il s'est
entendu; accuser
d'imposture
contre
l'Ordre
des
Cxn
[=
Cohens] ; mais
il
rpond
son interlocuteur
: Je ne
serai assailli
d'aucun
malheur
cet gard
,
et il
lui
rappelle
leur entrevue d'avril
1786
Montauban, aucours
de
laquelle
Fournie
a t instruit, des deux
conditions- requises : faire
partie
de
la Maonnerie
rectifie,
et
tre
appel . Afin;
de
mnager les susceptibilits
de
son, collgue, Vialette prend
soin
de
lui
rapporter
qu'il
reut
le 8
mai
1786
une
lettre
de
Lyon
prouvant
que les
Cohens n'ont
cess
de tenir
Fournie
en haute
estime.
L'abb aurait
srement t appel si la
chose
eut dpendu des frres de
cet
Orient,
mais ...
ne
l tant pas,
on ne
vous conseilloit pas:
d'y
venir,
parce
que
tous les
FF
Cn de Lyon ayant t runis
l'Initiation
gnrale,
il
ne se tenoit plus aucune assemble des
Cn
que
ce n'toit
pas ngli
gence, mais devoir
;
parce que
Initiation
avoit f ait connotre les
erreurs
qui
s'toient glisses dans
les travaux de
l'Ordre
des
Cxn et
mme le danger attach quelques
uns
des plus pratiques. Loin
que
l'Ordre
soit
aboli,
me disoit-on,
il
n'a
fait
que
se runir
au
tronc
dont il
s'toit
mal propos dtach; et de ce tronc il ressortira en
son
temps un nouvel Ordre
de
Cxn
plus
pur,
plus vrai,
et moins
mlang des ides humaines : le
nouveau
ne
sera
compos que de
ceux qui seront
lus pour cela, et
qui seront
pris parmi
les Initis
qui seront
destins
pour V uvre de la onzime heure .
De
plus,
Fournie
:
qui prtend que les connaissances
doivent
tre
communes entre les enfants
du
Christ,
Vialette
d'Aignan
rtorque
:
Le Christ seul doit rgler
la
mesure
qui
convient
chacun.
Enfin,
il
fait
part
son
correspondant
du plaisir qu'il
aurait
la rencontrer,
condition
toutefois
de
ne pas parler
de
l'objet
de
Lyon . Dans la lettre qu'il
destine
Willermoz,
Vialette est
encore plus
tranchant
; la
prose
pistolaire
du
Bordelais est qualifie de bien
exalte,
et bien . pitoable ; le Dr Archbold va porter Willermoz
un papier inintelligible
que
Fournie
lui
a dict, etc.
Pauvre
Fournie
Je
crains bien
que
la tte
de
ce pauvre homme
8/10/2019 Un Disciple de Martinez de Pasqually
15/42
46
REVUE
DE
L'HISTOIRE DES
RELIGIONS
n'en pte. Je dsire
que
vous
approuviez ce que je lui. ai
crit
. Et Vialette prend
un heureux
prtexte pour changer
de
sujet
:
Saint-Martin
vient
d'arriver
Lyon,
Archbold
se
rjouit
par avance
de
faire la connaissance du Philosophe
Inconnu1.
En
dcembre,
l'affaire
n'est pas close. Le Dr Archbold,
parti
Lyon s'entretenir avec Willermoz,
crit
ce dernier
ds son
retour
Bordeaux qu'il vient d'avoir avec l'abb
Fournie une conversation
de sept
quarts d'heure en pr
sence du
Chevalier de
La
Rigaudire. Il
relate
les difficults
auxquelles il
s'est heurt, ses efforts pour
ne
pas
blesser la
loi
de
charit
,
et
mme son emportement
en
voyant
que
Fournie entachoit mes amis les plus chers, des tres
que
j'aime
et
que
je
respecte
2.
Il s'tonne de
la folie
des
prtentions
de
l'abb, qui expose en outre des
ides
trs
incohrentes,
et
presque toujours inintelligibles . A la
dcep
tion
e
n'tre pas appel la Loge lue et Chrie, s'ajoute
le
mcontentement de
ne plus toucher
de pension
; Archbold
fait valoir
l'impossibilit o se trouve
Willermoz
de
fournir
une pareille dpense , et finit par
lui
offrir, non pas comme
une chose due. mais comme
un don
prsent par l'amiti,
comme
un pur
acte
de bienfaisance
les six louis
que
vous
m'aviez charg
de lui remettre,
quatre
de
vtre
part,
et deux
de
la
part de M. de St.
martin .
Mais
Fournie
a
refus
l'offre,
considrant
prcisment que cet argent
est d,
comme une
suite
de l'engagement pris
avec l'ternel, du
quel rien
ne
peut
jamais dispenser
que
l'impossibilit
3.
1)
Ibid.
2)
C/est--dire
Saint-Martin,
d'Hauterive
et
probablement
Willermoz.
3)
MS
Lyon 5870,
pice 6,
31
dcembre 1787. Tels
sont
les
derniers documents
de la correspondance qui
nous
est parvenue. Ceci est
dommage,
car
Fournie,
dans ses lettres prcdentes,
nous
donnait parfois
d'intressants
renseignements
sur ses
Frres. Le 5 novembre 1781,
il
crit
Willermoz combien il se
flicite
de
la
rception de Court de
Gbelin
chez les Grands Profs. Le 30 dcembre 1785,
il relate son entrevue
avec Tieman
Bordeaux,
et
semble avoir
beaucoup d'affec
tionour Saint-Martin
avec
lequel il
correspond
par l'intermdiaire de Savalette
de
Lan^e,
notamment
au
sujet de Dprmenil,
que Fournie
recommande
en vue
d'une admission dans
l'Ordre
(MS 5472,
qui
conserve dix
lettres
autographes
de
Fournie Willermoz).
Plusieurs
lettres
sont
perdues :
cf.
MS
5903,
I et II,
Carnet
des lettres reues et
rpondues, de
177 1783.
8/10/2019 Un Disciple de Martinez de Pasqually
16/42
UN
MARTINSISTE CATHOLIQUE l'aBR P. FOURNIE 47
Si cette affaire
l'attriste
autant, c'est qu'il se voit pour
la
premire fois
exclu des
mystres du
groupe
willermozien.
Selon
toute probabilit,
il
ne
l'avait
pas
t en
1772,
lors
du
dpart
du
matre
; il
semble mme qu'il ait pu profiter de tous
les
enseignements
secrets
que
les Lyonnais prodiguaient
alors aux Initis. On verra plusieurs reprises que
son
ouvrage
doit beaucoup
ces nouveaux
dveloppements thosophiques.
Ds
1774
en effet, les lus
Cohens
se sentent
isols
du
fait
de
l'loignement
de
Martines
de
Pasqually ;
on
dirait
qu'ils
apprhendent
de
ne plus jamais le
revoir,
et ils se mettent
au travail. A Lyon, ils rdigent
et
commentent
les enseigne
ments
u
thaumaturge, explicitant
plus
d'un
passage
du
Trait, rvlant
l'historien maint
dtail
qui n'apparat
pas
dans
ce
livre.
Document
capital,
chapp
la destruction
grce aux qualits d'archiviste
de
Willermoz lui-mme, qui
conservait
tout, et au hasard qui sauva ces
papiers
lors des
troubles
de Lyon
en
17941.
Ces explications, ces
commentaires
thosophiques
constituent un cahier dont
la
plupart des
pages,
rdiges de 1774 1776, s'intitulent Instructions.
Ils concernent
essentiellement
des points
de
doctrine,
l'exclusion, pratiquement,
de tout enseignement thurgique.
Il
faut voir l le travail d'Initis
tels
que
Willermoz, Saint-
Martin et
d'Hauterive.
Cela
prlude
l'enseignement ultime
que Willermoz
allait rserver aux
Maons
estims
dignes de
devenir
Grands
Profs
aprs
la fondation
des Chevaliers
Bienfaisants de la Cit Sainte, et dont Charles de Hesse-
Cassel, Charles de
Hesse-Darmstadt,
Ferdinand de
Bruns
wick
t
bien d'autres tenteront d'obtenir la communication.
C'est
encore
un
semblable
enseignement
que
Willermoz
1) Willermoz
perdit alors
une partie
importante
de
ses
archives.
Parmi
les
documents prservs, ceux auxquels il est fait allusion ici (les Instructions
aux
Elus Cohens)
sont
conservs
la
Bibliothque de
la Ville de Lyon sous la
cote
>476.
Paul VriLUAirD, op. cit., p. 225
252, en a
publi
quelques passatres.
Les
ense
ignements que contiennent ces
documents
se rapprochent beaucoup
de ce
qui sera
plus tard
les
Instructions aux
Profes (MS 5475, publies
par Vllliai.d, Joseph
de Maislre Franc-Maon, Paris,
Nourry, 1926,
cf. en particulier
p.
231 la lin].
Ce
furent probablement
Saint-Martin et
d'Hauterive
qui inspirrent
les
Instruc
tionux
Elus
Cohens,
du
moins en
partie (cf. A. Joly, Un mystique lyonnais,
p.
(.i2:.
8/10/2019 Un Disciple de Martinez de Pasqually
17/42
48
REVUE
DE
L'HISTOIRE DES RELIGIONS
fait
allusion au? Convent
de
Wilhelmsbad- en
1782, au
moment
o* il
s'agit, pour
la plupart
des participants de
tendance
mystique,
d'changer
des
secrets
de
premire
importance.. C'est ainsi quela cration
du
Rgime Ecossais
Rectifi,
qui existe toujours,
a
pour origine
le
dsir,
chez
plus
d'un Franc-Maon;
de connatre
le
contenu
d'une doctrine que
Willermoz, jusqu' sa mort, distribuera parcimonieusement, et
qui reprsente l'enseignement mme
de Martines
Mort
en
1
774,
ce dernier ne laisse pas
de
successeur cout. Ni Caignet
de
Lestre,
ni Sbastien Las Casas, ne
collaborent
la rdaction
de
ces
Instructions.
'Mais les
Initis de
la
Mtropole,
et principa
lement
es
Cohens
de
la
premire heure, en prennent
connais
sance, u
moins
:
indirectement. C'est
ainsi
que l'ouvrage
de
Fournie,
compar
la doctrine expose dans le Trait,
semble
s'loigner
quelque
peu
du
martinsisme orthodoxe. Mais
ce
n'est
qu'en apparence,
et l'on verra*
combien les
ides
contenues
dans
les Instructions
du
MS 5476 sont
aussi
celles de
l'abb;
soit qu'il les ait reues de Martines
lui-mme,
soit
et
c'est plus probable
qu'il
ait
eu connaissance des travaux
auxquels les
mystiques lyonnais
se sont
livrs de 1774
1776.
Au moment de
la
Rvolution, Fournie migr
en
Anglet
erre.
Ds
lors,
il
n'est plus question pour lui d'aller Lyon1.
Et Willermoz, semble-t-il, l'oublie ; du moins cesse-t-ilide
lui crire et
d'en
recevoir des lettres. De
1818
1821; Fournie
correspond- avec
Baader2.
Le 7
septembre 1829,
Joseph-
Antoine
Pont,, Grand Profs,
crit au
Pr J.-F.
Molitor3,' dans
une lettre date
de
Lyon, qu'il a bien
connu
Willermoz4. Le
pasteur des
mystiques de
Lyon regrettait alors
de
ne savoir ce
qu'tait
devenu
le
fils
de
Martines
de
Pasqually
:
toutes
ses
recherches ont t vaines
,
rien
n'est venu
sa connaissance-
1)
Cf. note infra..
2) Sur cette
correspondance,
. et particulirement
la
lettre
de
Fournie date
du 25 mai 1818, cf.
infra, le
chapitre
sur Baader.
3) Van Rijnberk,
op.
cit., p. 143. Molitor est
l'auteur d'une
Philosophie
der
Geschichte, 1824, dans
laquelle
il pensait
retrouver
dans
le Trait
de Martines
des
donnes
kabbalUtiques
(cf.
chap. IV, p.
487).
4) Willermoz tait mort cinq
ans auparavant, en
1824.
J.-A. Pont n'crit pas
Willermoz , mais se sert du
nomen
maonnique
de ce
dernier
:
Ab Eremo .
8/10/2019 Un Disciple de Martinez de Pasqually
18/42
i:n martinsiste catholique : l abb p. fournie
49
depuis
le Trait
de
la
Rintgration,
si bien qu'il ignore le
sort
du
matre et celui de
l'enfant: Quanta Fourme1^ il
est
mort
Londres
il
y
a
une,
deux
ou,
trois
annes
,
dono
vers
18272.
* *
De
l'unique et rare' ouvrage
de Fournie,
je
connais
six
exemplaires.. Le Pr Susini en tient
un de
Sougey-Avisard.
Un- second appartient au Dr Philippe:
Eneausse,
le
fils
du
Dr
Grard
Encausse dit Papus.
Stanislas
de
Guata en poss
dait
n
autre3.
Il
y en
a.un
au British Museum. La Slaals-
1)
J.-A.
Pont
crit
Fournier
.
Cette
orthographe
est
frquente
dans
les
correspondances
de
l'poque.
La
reliure
d'un
exemplaire
de
Ce
que nous avons
t,
celui
que possde
le
Pr
Susini,
porte
galement cette orthographe
errone.
2) Van
Rijnberk,
op. cit.,
p.
113 : L'abb Fournier
qui
est mort Londres,
il
y a
une ou
deux
ou
trois
annes,
qui se disoit le
successeur de
M; P. et me semble
avoir
t
un
tre
extraordinaire a
d
en
connatre
plus que notre ami
sur le
sort
flu fils
de
Martines. Mr.
de
Vaucrose qui. a vu
M.
Fournier Londres, Mr.
de
Divonne,
pair
le France qui s'est
dit
disciple
de
Fournier,- pourroient
peut-tre:
en
dire
davantage. Notre ami, qui
avait
vu beaucoup l'abb
Fournie
auprs
de M. P.
et qui ne
voyait
qu'un bon homme,
notre amiWillermoz, sourioit ironi-
quement
quand on parloit
de
Fournier comme d'un homme distingu, comme
du successeur
de
M. P. et il disoit que
M.
P. le resrardoit comme un broyeur de
couleurs.
D'aprs
les
renseignements
fournis
par
Van
Rijnberk,
il
semble que
l'original
de
cette lettre se
trouve aux
Archives
granducales de
Darmstadt. Quant
J.-A.
Pont,
Grand
Profs, in
online
a
Ponte
alto
,
il
avait
fort
bien connu
YVllermoz,
pour avoir t
son
mi
de
longue date,
et
mme
son
proche voisin
jusqu'en 1824,
date laquelle
mourut
le
pasteur
des
mystiques lyonnais.
3)
On
peut
lire
dans une note de Ren
Philipon,
date du 19 juillet 1899
et
publie
dans
son Stanislas de Guaita et
sa Bibliothque
occulte,
Paris, Dorbon, 1899,
p. III
:
exemplaire provenant de la bibliothque du baron de Guldenstubb
et
aujourd'hui
en
notre possession
.
Puis Philipon
reproduit
un extrait de -
libris, en le modifiant
quelque peu ; c'est pourquoi il n'est pas inutile de reproduire
ce
dernier dans le prsent
article,
et ceci d'autant plus aisment que je suis
parvenu
retrouver cet exemplaire ;
aprs
avoir appartenu
Guaita,
puis
Philipon,
il se trouve maintenant square Rapp,
la Socit Thosophique, sous
la
cote
A.5.
1980. Derrire
la couverture,
on
peut voir les
armes
de
Stanislas
de
Guaita. Sur
la page de
garde, on
lit de
l'criture mme
de
Guaita
:
Sur
la
dernire
feuille
de ce
livre, on trouvera cette mention,
de la main
mme
de M. de Gulden-
slubb
:
Introuvable.
Voir
aussi
les
extraits
de
Matter,
y
transcrits.
EX
LIBRIS
KABBALISTICIS
STANISLAJ
DE
GUAITA.
Achet
5
francs
.
la
vente
iVOurches-
Guldenstubb (Ble 1890)
; mais
il vaut
beaucoup
plus
que
ce
prix.
.
(Bel
ex.. trrd de marges). C'est l'ouvrage de l'abb
Fournie,
l'lve du fameux
Kabbaliste
Martinez Pascalis,
et le
condisciple de Saint-Martin. Ce livre, devenu >
presque
introuvable, est
le
seul critrium
qui
nous reste des doctrines
originales
de
Martines, que
St
Martin a
notablement
dnatures, en les filtrant l'usage
des hommes de dsir. Les a
t'il
amliores,
ou
corrompues, en les
dnaturant?
That is the question... Voir les
dtails
nombreux et
piquants
fournis par
Matter
sur la personne et
la vie de
l'abb Fournie, sur l inskrne raret
de
cet
ouvrage
et
sur les doctrines
de
Martines. Sur l'avant-dernire pagre
de
la couverture,
on*
trouve
en effet
ces citations de Matter,
reproduites ailleurs
dans
le
prsent article.
Toutes
ces indications me semblent d'autant plus utiles que
les
livres et
les
archives
8/10/2019 Un Disciple de Martinez de Pasqually
19/42
50
REVUE
DE
L'HISTOIRE DES
RELIGIONS
bibliothek.
de
Munich conserve l'exemplaire- ayant appartenu
Franz von Baader
qui
a laiss
dans
les
marges
de nombreuses
notes manuscrites.
Enfin,
pour prparer
ce
travail;
j ai
surtout
utilis
l'exemplaire
de
la
Bibliothque
de
-la- Facult Libre
de
Thologie Protestante
de
Lausanne c'est--dire celui que
Matter
a consult
pour
son
livre
sur
Saint-Martin1.
de
Guaita
sont maintenant passablement
disperss,
et qu'il n'en reste plus beaucoup -
dans
son chteau, ainsi que j'en ai
eu
la confirmation lors
d'une
visite
Alteville
en
;
compagnie d'Alain
Mercier.
Sur
(luldenstubbe, cf.
Max Milner,
Le Diable
dans la
liliralure
franaise, Paris, Corti, 1960, t.
II,
p. 352.
l) L'exemplaire de la Slaalsbiblioihelc (section
des
manuscrits,
cote 8, L.
impr.
c.
n.
mss: 2)
ne
comporte qu'une partie de l'ouvrage
(p.
193
375).
Il a
t ver-
schossen
par
Baader
(cf. infra,
dans
le
chapitre
sur
Baader,
certaines des
anno
tations
manuscrites),
et
n'a
jamais
t
complet
la
bibliothque
(note
en
dbut
d'ouvrage : In der
Bibliothek war
nie mehr als das Fragment
p..
193-375 vor-
handen
). On a
vu
que
Matter s'tait
servi
de l'exemplaire de
Lausanne
(J.
Matter,
op. cit). Le titre
complet du livre
de
Fournie est
: Ce que
nous
avons t,
ce
que
nous sommes et ce que nous
deviendrons.
Par
Pierre
Fournie, Clerc
tonsur.
Premire
partie.
A
Londres. Chez A. Dulau
&
Cle,
Soho
Sq.
et chez les autres libraires. 1801.
L'ouvrage a
375 pages
et mesure
13
cm
de
largeur sur 20 cm
de hauteur. A la
pa^e
de
titre,
on peut
lire
une
citation
tire
de
Imitation : Ne vous arrtez point
considrer
la
personne
de celui
qui crit,
soit qu'il ait
eu peu
ou
beaucoup
de
science ; mais
que
l'amour pur de la
vrit
vous porte
lire
tout ce que vous
lirez
(Imitation
de Jsus-Christ,
L.
I,
chap.
V) .
A la
fin du
livre, p.
375, on
peut
lire :
De
l'Imprimerie d'A.
Dulau
&
C et
L.
Nardini, n 15. Poland Street
, rense
ignement
qui
se trouve
galement
l'avant-premire
page.
Cet
exemplaire
a
peut-
tre appartenu
un maon, car derrire
la
premire page de
couverture on
trouve
une signature
suivie
du
signe
.\ A la paa-e
de
garde,
en
regard
:
Fr.
Herbort,
Bibliothque
de
De.
Ptillet,
Lausanne.
Le nom
Herbort se retrouve plus loin,
mais d'une criture
diffrente. Il
semble tre de la mme plume que
les
initiales
suivies de
.*. Il
est possible que
ces dernires signifient
Fr.
Herbort . Matter
remarque
que
la note qu'on va lire, crite
sur le dos
de
la
couverture, est
de
la
;
main de .M.
d'Herbort,
de
Berne,
l'ami ;
d'un
: des
plus chers correspondants
de
M.
de
Saint-Martin
(Matter, op. cit.,
p.
47). Qui donc est
ce
correspondant ?
Est-ce
Kirchberger
? J'avoue
n'avoir jamais rencontr
ce nom dans mon
travail
sur
ce
dernier (cf. A.
Faivre, np. cit.). Notons
aussi
que Matter
ne
cite pas
exac
tement le
texte
manuscrit qu'il eut sous les yeux (cf. Matter, op. cit.,
p.
47}.
Le
voici,.
intgralement : Pierre Fournie, prtre
migr
lors
de
la
rvolution'
frse. a vcu depuis
Londres. Le 2d. . volume de cet ouvrage a t imprim-
longtemps
aprs
le 1er.
Avant la rvolution Fournie
a t instruit
quelques
temps
l'cole
de Don Martinez de Pasqualis.
Puis on lit les
liernes suivantes,
ajoutes
plus tard
de
la
mme
criture
:
D'aprs
une relation certaine,
que
j'ai
eue
de
l'abb Fournie par
Mr.
de V.
qui a
t
Londres
en
juin
1819 et a vu bien des fois
l'Abb,
celui-ci
n'a
point
jug
propos de
faire
imprimer le
2d.
volume disant;
qu'il
contenait
bien des
choses que l'on
ne
peut
point
publier. Cet Abb
Fournie
en l'an 1819
a
81
ans et se trouve encore bien portant et
fort
vif.
Rien
n'est crit
sur la page
de
garde de la fin. Dans l'ouvrage mme,
quelques phrases
ont t
soulignes au
crayon
et
la plume. Trois petites
remarques
la plume
(pp. 237,
339
et
352)
semblent
tre de la
mme
criture que
le texte
manuscrit
cit plus
haut.
Par V. ,
il
faut probablement
entendre
Vaucroze
(cf. note
supra,
la
lettre de J.-A. Pont Molitor). Sur Vernetti de
Vaucroze, cf.
Susmi, op.
cit.,
index des
noms propres. De
plus,
les
MS suivants,
conservs
Lyon
et
dont
j'ai
relev
la
liste,
concernent
ce personnage
: 54>6, >425, 5891; 5897, 589.
8/10/2019 Un Disciple de Martinez de Pasqually
20/42
UN MARTINSISTE
CATHOLIQUE
: L'ABB P. FOURNIE
51
L'tude
de
cet ouvrage
montre
bien l'influence profonde
exerce sur
Fournie
par l'auteur
du Trait
de
la
Rintgration1;
II-
est
peu
probable aussi-
que l'abb
ait
donn une
fausse
ide du
systme de Martines2.
Il
a crit
son*
livre ds 1
775,
au'plus.tard
en-17763.
Enl779,
le travailn'est pas termin ;
s'agit-il du mme ouvrage
? Cela est
probable, si
l'on
se rfre
aux dtails fournis par
l'abb
lui-mme4.
En
1784,
il
est
encore
au travail
; dans>
une lettre,
il
remercie Willermoz d'avoir
communiqu 1e
manuscrit
aux Frres
de Lyon,
qui y
ont'
trouv
de
bonnes ides
; certes, Fournie avoue ne
pas bien :
crire, mais
il
lui
sufft
de travailler
avec quelqu'un
qui corrige
son
texte
au
fur
et
mesure.
qu'il
le
rdige5.
Les dtails
que
l'auteur
nous-
donne
dans
cette
lettre
montrent
biem qu'il'
s'agit:
des ides
dveloppes dans Ce que nous avons t ; il'
y est beaucoup^ question du
rien:
devenu, dans l'ouvrage
imprim, le.
nant ,
terme
souvent employ
par; Fournie
dans le
jeu
de
ses concepts6. En 1775,
Saint-Martin
a publi
son premier
livre. Dps Erreurs
el
de laiVrit;. Cette anne-l,.
1)
Viatte
l'a
bien
vu
(op.
cit.,
t.
I,
p.
55).
2)
Ici,
je
souscris
encore
l'opinion
d'A.
Viatte,
ibid.,
p.
6.4
:
La
candeur
de
Fournie,
son
ignorance,
sa dvotion au martinisme,
interdisent de croire qu'il
l'ait modifi sciemment.
3)
Fournie, op.
cit., p. 36H
: il
dit
l'avoir crit
il
y a plus
de
vingt-cinq ans ,
et deux
ans aprs la mort de
Pasqually
[ibid., p.
1566).
Matter
suggre
une
date
-
fausse,
car
il ignore celle du
dcs de
Martines (cf. aussi Viatte, op.
cit., p.
65).
4)
MS
Lyon
5472, Fournie
Willermoz, 29 mars
1779,
de
Bordeaux
: Je vois
journellement le P.-.
M.
Orsel, qui
est
grandment intelligent et bien
beau
zle
pour la
chose, je luy ay donn
J4
feuilles du trait que
j'cris,
qui ne
sont
qu'un:,
petit
comancmt
En
gradation
de la mort
a
la vie, il doit son
arrive
. Lyon
vous le
remettre,
je vous seray oblig
de
me
faire
part
de
vos puissantes
reflections
sur
ce
que vous en
pansrs
pour
ou contre la
marche que
la
chose
nous
dicte
afin1,
de my conformer. Jexpere moyenant
d'un
pouvoir
vous faire
passer la suite
mais
comme
je
n'ay
personne
pour crire l'opration deviendra
longue,
d'autant qu'il
men
faudra
faire
passer
a
paris
a
proportion
que
je
le
rdigray
car,
j'ay
encore
entrpris
de
le
rdiger
pour le
rendre
moins
embarrass
au lecteur faute
de
franois.
5) Ibid., 9
mars
1784.
6) Je le communiquay ici trois personnes seulemt qui dabord ny conurent
pas les vrits
qu'il
dmontre
mais qui par laide de mes
discours verbeaux
les
conurent
toutes parce qu'ils se transportrent spirituellement dans le . susdit
rien, dans lequel, je metais vu mettre
corporellement
dedans f...| Quant au pre
malebranche dont vous me parls je
ne
connais point son ouvrasre, et
comme
vous
ne me
parls
de
ce
qu'il traite que comme netant qu'agrable lire je
soubconne
qu'il
raisonne suprieurement sur toutes les
denominations de la
divinit,
niais-
qu'il n'en dmontre
pas
les vrits comme
ce que
j'assure
que
le rien les dmontre :
quiconque
veut
faire tout disparaitre
(ibid.).
8/10/2019 Un Disciple de Martinez de Pasqually
21/42
52
REVUE
DE
L'HISTOIRE DES
RELIGIONS
qui
inaugure
le pontificat do Pic VI. paraissent les
Physio-
gnomische Fragmente
de
Lavatcr, von Waechter conjure les
esprits
et
Gassner,
Zurich,
se
livre
des
pratiques
d exor
cisme, tandis
que les Parisiens applaudissent au
Barbier de
Seville. En
1776 parat
Le Diable
Amoureux de
Cazotte,
Cagliostro est
Londres
et Klinger publie
son
Sturm und
Drang. Enfin, Fournie crit son livre en mme temps
que
Kleuker traduit en allemand le Zend-Avesta,
que
Gthe
commence le
Wilhelm
Meisler
et que
Rousseau rdige les
Rveries d'un promeneur solitaire.
Quel but
se propose-t-il ?
Il
nous l'explique : son
propos n'est
pas
de
s'adresser
seulement
aux
vivants, mais
aussi
aux
morts
.
Par
l,
il
entend
les
cratures
de
vie ternelle, qui depuis les fautes
de
Lucifer
et d'Adam sont
toutes
mortes la vie
de
Dieu .
Mais
ce
programme
n'est
pas exempt d'ambiguts car, on le
verra,
il nous
dit
plusieurs
reprises
que l'homme peut
encore se
perfectionner
aprs
la mort charnelle,
cette dernire
ne
scellant pas dfinitivement
le
destin de l'individu.
Il
s'adresse
donc
tous les dfunts du Royaume
de
Dieu, mais afin que
sans
tarder
davantage, ils
travaillent par la pratique de
la
morale chrtienne s'attirer
Jsus-Christ l. Nous savons
ainsi
que
son
propos
se situe; dans une perspective
essentiell
ement
hrtienne.
Il
est indispensable, pour la clart
de
l'expos,
de
mettre
un peu
d'ordre dans les ides qu'exprime
Fournie.
L ou
vrage,
en el'fet,
se prsente comme une
masse
confuse de
raisonnements parfois difficiles
saisir, de
penses que
ne
relie la
plupart
du temps aucun lien logique. L'abb
ignore
ce
qu'est
un
chapitre,
un
plan,
un
discours.
Ses
redites
sont
multiples
et flagrantes. Nanmoins, le
style
se
veut clair,
et l'ouvrage
termin,
on s'aperoit que l'on
a compris
ce
qu'il voulait dire,
si bien
qu'il
est possible,
dans
ce
ddale
confus
d'clairs
inattendus, d'illuminations
ingales,
de
paroles
inspires,
de
dmler
une conception
du
monde,
un
1) Fournie, up. cl.,
p.
120 s.
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UN
MARTINSISTE CATHOLIQUE : L'ABB P. FOURNIE 53
systme. Que
pense-t-il de Dieu, des
esprits,
de la
chute,
de
l'homme
primitif et
de l'homme
actuel?
Une telle
enqute
nous
permettra
de
mieux
comprendre
son
christianisme,
voire son
catholicisme,
les
ides
qu'il
professe
sur la rint
gration et la
venue
rcipiscenee,
et
de terminer par l'tude
de ses conceptions
millnaristes
et arithmosophiques.
Pour parler
de Dieu,
il se
sert
jusqu' l'excs d'une compar
aison
qu'il
n'hsite
pas
rpter
de nombreuses
reprises
presque mot pour mot. Comment savoir ce
que
les
mathmat
iques sont en
elles-mmes
, se demande-t-il ? C'est en
suivant
les
enseignements
qu'elles
ont donns d'elles-mmes
.
De
mme pour Dieu : si nous voulons le
connatre
en
lui-
mme
,
il faut suivre les
enseignements
qu'il nous a donns
de
lui1)).
Et cela
ne saurait
se faire
qu'en
pratiquant
assid
ment ces
derniers2.
Dieu est
un
3,
et c'est une illusion
de
croire qu'il y
a deux
Dieux. Satan
s'emploie
nous procurer
cette illusion,
en nous
donnant l'impression d'tre
comme
actionns
intrieurement
par deux Dieux4. On
ne saurait
souponner Fournie de manichisme
: il
n'est pas plus dualiste
que
Saint-Martin,
ou
Martines. Non seulement
Dieu
est
un,
mais
encore il
est l'unique chose relle . Sans lui,
nous
ne
pourrions ni
nous
mouvoir, ni
mme exister5.
Si
nous
avons
l'ide de Dieu,
nous
avons
du
mme coup celle
dt^
choses
spirituelles et
divines6
. Et
si
nous en parlons, c'est qu'elles
existent. Parlerions-nous
de
la terre,
de
l'eau
et du
feu, s'ils
n'existaient
pas7
? Les Livres Saints contiennent ces choses ,
de
mme
que
l'univers corporel contient
ces
trois lments.
Ainsi,
il
n'y a pour l'homme
que
deux ordres de ralit,
et
1)
Cf.
par exemple ibid., p. I.
2)
Ibid.,
p. 2.
3) II
est
un
pur et simple dans son essence et dans ses uvres, ainsi que
la
rgulire harmonie de
l'univers corporel et
de chacun
des tres qui
l'habitent
corporellement
le
publie dans un silence
plein
d'nergie. Ibid., p. l .)9.
4)
Ibid., p. 30 s. et 271.
5)
Ibid.,
p. 1.
6)
Fournie
affectionne
tout
particulirement
cette expression, qui
revient
sous sa plume
un nombre
considrable
de
fois.
7)
Ibid.,
p.
284.
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54
REVUE
DE
L'HISTOIRE
DES RELIGIONS
rien d'autre : le spirituel,
contenu
dans
les
critures,
et
le
corporel,
dcrit dans
l'univers1. Nous voyons les objets
parce
qu'ils
existent
;
verrions-nous donc
les
choses
spiri
tuelles et divines , si
elles
n'existaient pas2 ? On pourrait
objecter
que ces
dernires sont
une invention
de
nos
anctres
;
mais Fournie dtruit l'argument
:
s'il
en
tait
ainsi, explique-t-il,
nous
aurions pu notre tour en imaginer
quantit d'autres du mme genre, et
il
semble bien
que
nous
ne
l'ayons pas
fait3.
Dieu est donc la seule chose
relle. Il
s'ensuit que
si nous nous dirigeons d'aprs ses voies, nous
finissons par
lui
ressembler, et
il en
rsulte un continuel
et
inaltrable
bien-tre 4.
Fournie emploie
souvent
le mot manation , mais il
prend soin de
l'associer
parfois au
mot
cration . C'est au
sens
de
Martines qu'il faut
entendre
manation
, c'est--dire
point
comme
un
acte divin qui
aurait
le
panthisme
pour
consquence. Le
Dieu
de l'auteur est
absolument
transcen
dant,ans
qu'on
puisse dceler chez
lui
aucune allusion
une immanence spinoziste5.
Il
s'agit donc bien du Dieu
de
la Bible,
et
Fournie
professe une
conception rsolument
trinitaire. Si
nous
faisons
la
volont de Dieu,
nous
devien
drons
un comme Dieu est un , mais dans la Trinit
; et
l'auteur
ne
manque pas
de citer
les Trois personnes6, ce que
Martines n'aurait pas fait. Recevoir l'Esprit
de Dieu,
c'est
1)
Ibid., p. 286.
2)
Ibid.,
p. 2b7.
3)
L'argument surprend un peu, mais il
vaut
surtout par l'esprit qui
l'anime.
Or
comment se
fait-il
que
nous
soyons tombs dans l'impuissance absolue de rien
imaginer
de
nouveau sous
ce
rapport, sinon parce
que nous
ne sommes
que de
simples cratures
et
non
pas
des crateurs
?
Ibid.,
p.
289.
4)
Ibid.,
p.
218.
>)
Cf. le
dbut du
Trait
de Martines :
Avant le temps, Dieu
mana des tres
spirituels, pour sa
propre
gloire, dans
son
immensit
divine ; mais ils ont t
mans avec
un
libre arbitre et se
distinguent
rsolument de la personne du
Crateur (Trait,
p.
7). Il faut prendre garde que l'on a parfois utilis le mot ma
nation avec le
dsir de
rejeter tout monothisme, au
profit de
immanence. Cf. par
exemple
l'expos d'un
thosophe
moderne. J.-J.
Chatagnier-Hoste,
V
manant
et les
transmutations
de Vman, Mtaphysique
solrique
du Cosmos, Genve,
Kundig,
s.
d.
(1964). Fournie,
lui, crit : Le
Dieu
unique existant de lui-mme,
comme le seul crateur et manateur
d'tres de
vie ternelle
(Fournie,
op.
cil., p. 25).
6)
Ibid.,
p.
37.
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DE L'HISTOIRE- DES RELIGIONS
confessent
leur erreur et tiennent la-
promesse
qu'ils avaient
faite
avant leur mancipation. De plus, .
il
leur laissa le libre
arbitre
dont
il
les
avait
pourvus
en
les
mancipant1.
Le
libre-
arbitre des tres mans est d'ailleurs l'un des points essentiels
de
la
doctrine3 martinsiste2. Ainsi, Lucifer se croit galt
Diem
: premire
erreur,
faute contre l'esprit, origine
de tout
mal3; II' s'est envelopp dans une irralit, dans une
appar
ence4. Ce fut un acte draisonnable, qui; n'est autre
que
la. contradiction
de
la. raison
de
Dieu
; mais on
comprend,
en quelque
sorte,, cette rvolte5 par
laquelle'
Lucifer
est
devenu
Satan* .
Pour
avoir;
voulu tre Dieu,
. il
/ lui
fallait
une
connaissance
prliminaire
>
de
Dieu, mais
il
tait
incapable
de
la trouver
en, lui-mme; n'tant pas
Dieu6.:
Et l'on peut rsumer ainsi
le
double argument de l'ange dchu
:.
premirement, Dieu
a
d tenir
son
existence d'un autre
que
lui-mme ;
deuximement,
les esprits
mans
ont la facult
de vouloir et d'agir eux-mmes,
indpendamment
de toute
autorit7.
Satan our
contradicteur
se
sert
d'une ralit pour
1) Fournie, op. cit., p. 27 s. C'est prcisment en vertu de ce libre
arbitre,:
prtend
Fournie, que
Dieu
laisse agir
sur
nous les organes de Satan
(ibid.,
p.
259).
2)
Ils taient libres
et distincts