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Qu’est ce que la recherche communautaire et comment l’intégrer dans le domaine des dépendances?
Joanne Otis, Ph.D
Professeure, Département de sexologie, UQAM
Jorge-Flores Aranda, Ph.D.
Chercheur en établissement, Institut universitaire sur les dépendances, CIUSSS du Centre-sud-de-l’ile-de-Montréal, Professeur associé, université de sherbrooke
Perrine Roux, ph.d
chargée de recherche inserm-umr1252
Université d’été sur les dépendances,
université de Sherbrooke, 20 juin 2018
Objectifs de l’Atelier• A partir d’expériences de recherche communautaire menées dans le
domaine du VIH et dans celui de la consommation de substances, cet atelier vise à:
• Présenter la recherche communautaire et ses caractéristiques ainsi que son application dans le domaine des dépendances
• Identifier à partir de l’expérience des participants, quelques axes prioritaires de recherche communautaire dans le domaine des dépendances.
Plan de l’Atelier• 13h15-13h55 Les caractéristiques de la recherche
communautaire et l’exemple du projet Mobilise! Joanne Otis
• 13h55-14h35 L’exemple du projet Mon BUZZ Jorge Flores-Aranda
• 14h35-14h55 PAUSE
• 14h55-15h35 L’exemple du projet AERLI
• Perrine Roux
• 15h35-16h10 Ateliers et plénière
• 16h10-16h15 Mot de la fin
3
Tour de table
30 ans de recherche communautaire avec la communauté gaie en prévention du VIH:
constats et leçons tirées
Joanne otis
Plan de la présentation
• Volet 1
• Définitions et principes de la RC
• Un modèle de RC émergeant de la pratique
• Volet 2
• Un exemple actuel: le projet Mobilise!
• Pour conclure
• Enjeux et constats découlant de ces 30 ans de partenariat
6
Volet 1Caractéristiques de la RC et modèle
émergeant
Définir la recherche communautaire
• Selon les IRSC (2013), « la recherche communautaire (RC) est fondée sur la collaboration en recherche où tous les partenaires participent de manière équitable au processus de recherche et reconnaît les forces uniques que chacun apporte. La RC commence avec une question de recherche importante aux yeux de la communauté et dont le but est de combiner les connaissances et la pratique pour en arriver à des changements sociaux qui permettront d’améliorer la santé communautaire et d’éliminer les disparités sur le plan de la santé.
• La RC réunit les chercheurs et les membres de la communauté en vue de cerner les problèmes, de recueillir, d’analyser et d’interpréter les données, de déterminer la façon d’utiliser les résultats pour guider l’élaboration des politiques, changer les pratiques et améliorer les conditions dans la communauté. »
8
Définir la recherche communautaire
• Termes plus ou moins interchangeables:
• recherche-action
• recherche-action participative
• recherche communautaire
• recherche participative avec les communautés
• recherche participative communautaire
9
Racines et traditions de la RC
• Tradition de recherche-action du Nord• Kurt Lewin (fin des années 1940, raffinée par Stringer (années 1990)
• Planifier, implanter et évaluer l’action (cycle itératif de…)
• Valeur à la base de la participation: utilisation des connaissances pour orienter l’action
• Tradition émancipatoire du Sud• Paolo Freire (années 1970) Pédagogie des opprimés
• Empowerment
• Valeur à la base de la participation: justice sociale et environnementale
• Tradition plus récente émergeant du mouvement d’autodétermination et de souveraineté des peuples autochtones
• Valeur à la base de la participation: autodétermination
10
Principes de la RC
• Reconnaitre la communauté comme une unité identitaire
• S’appuyer sur ses forces et ses ressources
• Faciliter une implication équitable et collégiale entre partenaires et à toutes les étapes de la recherche
• Intégrer savoirs et actions pour que chaque partenaire en tire des avantages
• Promouvoir des processus de co-apprentissage et d’autonomisation sensibles aux inégalités sociales
• Favoriser un processus cyclique et itératif
• Aborder la santé selon un angle positif et écologique
• Partager les résultats et les connaissances acquises avec tous les partenaires
• Susciter un engagement à long terme de tous
11(Israel et al., 1998, 2001; Minkler, 2005)
éléments fondamentaux de la RC
• Confiance
• Respect mutuel
• Renforcement des capacités
• Pouvoir d’agir
• Droit de propriété
• Imputabilité
• Durabilité
12
(Cargo et Mercer, 2008)
La RC en réponse aux impératifs d’une épidémie dévastatrice
Moments forts/paradigmes dominants de l’épidémie
RC mises en oeuvre
Réponse communautaire forte(1980-1989)
Approches comportementales(1985-1990- …)
Au sauna, on s’emballe! (Montréal)De bar en bar (Montréal)Recherche-action dans les parcs (échelle provinciale)Évaluation du site internet RÉZO (Montréal)Évaluation du Projet 10Évaluation de Safe SpacesCohorte Oméga (1996-2003)Phénix
Approches structurelles(1990-1995-…)
Approches biomédicales(2005-2010-…)
Cohorte Maya (2002-2006)Projet SPOT (2009-2016)Ipergay (essai Clinique sur la PrEP
Approches combinées ou diversifiées(2010-…)
Projet Mobilise!Phénix 2.0 13
Un modèle de RC émergeant de la pratique
• Trois axes• Axe processuel (transversal) de mobilisation des savoirs et des communautés
• Au cœur: le partenariat• Pour coproduire des connaissances• Pour appliquer ces connaissances• En misant et valorisant le renforcement des capacités
• Axe temporel au fil de quatre étapes• Analyse des besoins et des ressources• Le développement et la validation du projet-pilote• La mise à l’échelle• La pérennisation
• Axe réflexif et évaluatif (transversal) pour chaque boucle constituée de la mobilisation des savoirs et des communautés à chacune des étapes (donc 4 boucles)
14
15Modèle systémique et dynamique de mobilisation des savoirs et des communautés vers une approche intégrée de prévention/promotion (Otis, 2015)
Axe processuelpartenariat
• « Le partenariat, c’est agir de concert et en complémentarité à partir des différences de chacun pour résoudre un problème reconnu comme commun, dans un ensemble de synergies et d’intérêts organisés ».
• (Mérini et de Peretti, 2002).
16
Axe processuelpartenariat• Principes régissant le fonctionnement entre partenaires (Mérini et Peretti,
2002):• Le principe de besoin :constat qu’on ne résoudra pas le problème, seul, avec les
moyens habituels;• Le principe d’association: s’associer = gain de pouvoir d’action;• Le principe d’identification: reconnaissance mutuelle du projet commun à
poursuivre;• Le principe d’inter-acteur: engagement de chacun à des positions et titres pluriels;• Le principe de rupture: accepter de perdre ses repères et de sortir de ses zones de
confort;• Le principe de risques: accepter de se rendre vulnérable devant des gens aux
agendas et logiques d’actions différents.
RUPTURE ET RISQUE = INNOVATION
17
Axe processuelpartenariat• Ces principes se formalisent autour de règles qui balisent le
fonctionnement du système partenarial: CONTRAT DE COLLABORATION (implicite ou explicite) limitant les zones de devoirs et responsabilités• Pôle décisionnel• Pôle de gestion et de développement des opérations• Pôle de la communication
• Type d’interactions caractérisant les jeux de pouvoir• Monopole• Concurrence• Complémentarité
18
Axe processuelpartenariat• Importance de créer des espaces et mécanismes de négociation tout
au long du processus
• Conditions favorables:• Une dynamique de participation suffisante des acteurs aux divers pôles de
manière à ce qu’ils puissent exercer une certaine influence;
• Des rapports de pouvoir où les principes d’équité et de réciprocité prédominent, dans le respect de l’autonomie de chacun;
• La combinaison des savoirs par la reconnaissance de leurs valeurs et leur mobilisation dans la production d’actions nouvelles/innovations
19(Otis, 2015; Bilodeau et al., 2003; Cargo et Mercer, 2008)
Volet 2
Un projet de recherche-action
avec, par et pour les HARSAH
Équipe
• Chercheurs principaux : Ken Monteith, COCQ-SIDA; Joanne Otis, UQAM (sexologie).
• Personnel : Thomas Haig, COCQ-SIDA; Gabriel Giroux, RÉZO; Jessica Caruso et Ludivine Veillette-Bourbeau, UQAM
• Co-chercheurs et utilisateurs des connaissances : Line Chamberland, Bertrand Lebouché, Aurélie Hot, David Thompson, Gabriel Girard, Cécile Tremblay, Roberto Ortiz, Maria Mensah, Jorge Flores Aranda, Marianne Beaulieu, Sara Mathieu-Chartier, Bruno Laprade, Pierre Henri-Minot, Alain Léobon, David Lessard
• Partenaires et collaborateurs : COCQ-SIDA; Département de sexologie, UQAM; RÉZO; ACCM; Chaire de recherche sur l’homophobie, UQAM; CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal; Clinique médicale L’Actuel; Clinique médical OPUS; Clinique médicale du Quartier Latin; Direction de la santé publique de Montréal-Centre; Fugues; Institut thoracique de Montréal; Maison Plein Cœur; Ministère de la santé et des services sociaux du Québec; Portail VIH/sida du Québec; Warning Montréal
• Soutien financier : Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC); Réseau Sida et maladies infectieuses du Fonds de recherche du Québec – Santé (FRQS); Centre PRATICS des IRSC sur le VIH/sida (PRATICS 2.0); Programme d’innovation Positive Action Canada, ViiV Soins de santé.
21
Inégalités sociales de santé
• Le VIH chez les hommes qui ont des relations sexuellesavec des hommes*
Persistance de l’épidémie
Surreprésentation
Syndémie
22
Santé mentale
Violence
Dépendance
DiscriminationVIH / ITSS
*HARSAH: hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes, peu importe leur orientation sexuelle ou leur identité de genre
Pertinence de la prévention combinée
La prévention combinée en théorie
23
A
Le recours simultané et stratégique à différentstypes d’interventions préventives…
B
Réalisées à demultiples niveaux…
C
Visant différents points dans le cycle de la transmission du VIH…
1. Biomédicales2. Comportementales3. Structurelles
1. Individuel2. Relationnel3. Communautaire4. Sociétal
1. Avant2. Pendant3. Après
ONUSIDA, 2010
La prévention combinée en pratique
L’intégration des nouvelles options préventives aux services existants
L’expansion de l’offre de services de proximité
Le maillage entre les stratégies préventives
La collaboration intersectorielle
L’engagement des populations affectées
L’identification de priorités communes
L’accès réel aux stratégies préventives …
24
Cadre conceptuel de l’accès aux services
Lévesque, Harris et Russel (2012)25
Le projet MOBILISE!
26
HARSAH, communautés
COALITION communautaire et intersectorielle
MOBILISATION
ACCÈS optimisé / coordonné
UTILISATION stratégies de prévention
Incidence VIH Santé Justice sociale
DEMANDE pour prévention /
services
Fournisseurs de services, décideurs
MOBILISE! – c’est quoi ?
• Intervenants
• Professionnels de la santé, intervenants communautaires
• Scan environnemental des services en prévention / santé sexuelle destinés aux HRSH
• Groupes de discussion
• Colloque (2017)
• Portrait des services offerts (retour vers chaque organisme (2018-…)
• Plan d’action (2018–…)
• Communautés
• Hommes qui ont des relations
sexuelles avec les hommes (HRSH)
• Site web : projetmobilise.org
• Équipes citoyennes
• Soirées MOBILISE!
• Questionnaire en ligne
• Forum communautaire (2016)
• Trousse d’animation (cartes, etc.)
• Énoncé + plaidoyer (2018-…)
MOBILISATION
Améliorer L’ACCÈS
27
Mobilisation communautaire : outils et strategies
28
Quelques résultats relatifs aux dépendances
L’enquête en ligne
• Questionnaire en ligne de mai 2016 à janvier 2017• Critères d’inclusion: homme (cis ou trans), relations
sexuelles avec un autre homme, 18 ans ou plus, comprendre le français ou l’anglais, vivre sur l’île de Montréal ou y utiliser les services
• Questionnaire en 5 sections: • Profil sociodémographique et empowerment communautaire• Connaissances des stratégies de réduction des risques• Utilisation des stratégies de réduction des risques• Utilisation des services de santé• Besoins en termes de santé
301028 répondants 70% ont répondu jusqu’à la fin
Méthodologie
L’Enquête en ligne Consommation de substances dans les 12 derniers mois
92%
45% 35% 25% 17% 16% 13% 12% 6% 6%
Catégories non mutuellement exclusives
• 27% des répondants ont une consommation à risque* (idem chez les personnes trans)
La marijuana et les poppers sont les drogues avec une proportion de consommation à risque plus élevée
• 9% des répondants ont un seuil potentiel de diagnostic de consommation abusive**
* Selon l’échelle DÉBA-Drogues; Tremblay, Rouillard et Sirois (2000); basé sur la fréquence de consommation de marijuana, poppers, cocaïne, ecstasy, speed, crystal meth, ketamine, crack, LSD et héroïne.** Selon l’échelle des Conséquences de la Consommation de Drogues (ÉCCD); Tremblay, Rouillard, April et Sirois (2000)
31
L’enquête en ligne Parcours d’accès aux services de dépendances
32
Ressentir le besoin
Chercherun service
Trouver un service
Prendre rdv Se rendre sur place
Recevoir le service
4% 3% 3%
17% Dû débourser de l’argent pour avoir le service
55% Peur d’être jugé par
ses proches
66%Honte d’avoir besoin
35% Difficulté trouver service répond mes
besoins*Revenu >40k
*Nbr partenaire 6+*ITSS 12 derniers mois
35% Peur d’être
discriminé*Habite CIUSSS
Est
35% Temps long entre
appel et rdv*Habite Mtl
17% Pas d’argent pour payer déplacement
26%Impression
pas pu contribuer décisions
32% Aurait aimé avoir références
autres services
35% Peur anonymat
brisé*Revenu >40k
L’enquête en ligne besoin non comblé
33
Ressentir le besoin,
chercher ou trouver un service en
dépendance 38%n=11/29
Recevoir un service en
dépendance
Qui sont les HARSAH qui ont un besoin non comblé?
Habite le territoire du CIUSSS du Nord-de-l’Île-de-Montréal (6,000)
34
63%53%
37% 37%
21% 21% 21% 16% 11%
Thérapie Rencontre prof. dela santé
Prise demédication
Programme org.communautaire
Service écoute,référence et info
en personne
Urgencepsychiatrique,centre de crise
Centre dedésintoxication
Service écoute,référence et info
au téléphone
Site web
Types de services utilisés 12 derniers mois parmi ceux ayant reçu un service
11% 11%
21%
11%
47%
Pas du tout Un peu Moyennement Assez Très
Satisfaction envers le service reçu
L’enquête en ligne
Le scan environnemental
• Développer un portrait de l’accessibilité des services actuellement offerts :
Dépistage VIH / ITSS
PPE, PrEP
Suivi médical et soutien aux PVVIH
Santé sexuelle (counseling, soutien)
Santé mentale
Dépendances
• Autres services:
• Vaccination hépatites A et B
• Violence conjugale
• Défense des droits, discrimination
• Soutien par des pairs; sensibilisation et éducation; activités sociales; dépannage alimentaire, etc.
35
Méthodologie
Le scan environnemental
• Critères d’inclusion:
1) Offrir des services aux HARSAH
2) Indiquer ou démontrer de l’inclusivité envers les HARSAH
3) Repérable (moteur de recherche, publicités, médias sociaux, etc.)
• Chaque service distinct offert par un organisme
• était documenté séparément36
Méthodologie
Introduction sur les données:Le scan environnemental
• Collecte de données:
1. Liste des organisations / services
2. Observation directe (Internet, documents, visites sur place)
3. Téléphone : simuler la façon dont un client appellerait
4. Courriel : simuler comment un client écrirait
5. Lettre officielle à chaque organisation
6. Informateurs clés / décideurs (à venir) :
a) informations qu'un client n'obtiendrait pas normalement
b) partage des résultats spécifiques à l’organisation
37
Méthodologie
Le scan environnemental
• Instruments de collecte de données:
• Formulaire permettant de recueillir des données afin de calculer des scores pour les 5 dimensions d’accès :
1. approchabilité
2. acceptabilité
3. disponibilité et accommodement
4. abordabilité
5. adéquation
Plusieurs indicateurs pour chaque dimension
• Plusieurs critères pour chaque indicateur
38
Méthodologie
39
Services en dépendances: scan environnemental
Emplacement des services
Services en dépendances: scan environnemental
40
65,5
77,4 75,7
50,2
97,5
72,9
91,787,5
62,0
100,0
48,3
59,1
77,1
30,1
92,4
75,069,5
62,558,3
100,0
0,0 0,0 0,0 0,0 0,0
Approchabilité Acceptabilité Disponibilité etaccommodement
Abordabilité Adéquation
Total (n=7) Communautaire (3) Privé (3) Public (1) Autre (0)
Pour concluresur la RC dans le champ du VIH avec la
communauté gaie
Acquis et avantages mutuelsRecherche = outil de pouvoir• Pour les membres de la communauté
• Faire part et permettre la prise en compte de leurs réalités• Réflexivité• Guider/influencer l’action• Reconnaissance et renforcement des capacités
• Pour les partenaires• Temps de réaction plus rapide• Crédibilité auprès des bailleurs de fonds, notoriété, reconnaissance• Données : appui au plaidoyer• Renforcement des capacités• Effet structurant sur l’action
• Pour le chercheur• Accès aux questions de recherche émergeantes et signifiantes• Assurer la faisabilité et le succès du déploiement de la recherche elle-même• Appropriation de nouveaux cadres, nouvelles méthodes• Impression de contribuer à faire une différence• Renforcement des capacités• Validité et signifiance des données recueillies
42
Défis, écueils et coûts
• Les enjeux partenariaux
• Divergences dans les logiques d’action et motivations, focus sur l’objectif commun
• Contrat de collaboration, leadership, etc.?
• Rapports de pouvoir?
• Accompagnement et suivi?
• Communication et circulation de l’information?
• Les enjeux liés au temps et à l’argent
• Les enjeux de méthodes, de scientificité et de reconnaissance (valeur de la recherche)
43
Défis, écueils et coûts
• Les enjeux éthiques
• Représentativité de la communauté et structure participative
• Représentativité des partenaires
• Tension insider-outsider
• Équité dans les bénéfices
• Équité dans le partage des pouvoirs
• Instrumentalisation possible
• Propriété intellectuelle
44
La recherche communautaire et les populations marginalisées : les HARSAH et le chemsex
La recherche communautaire et les populations marginalisées : les HARSAH et le chemsex
L’expérience de co-développement et d’implantation de :
Jorge Flores-Aranda, Ph.D. Chercheur, Institut universitaire sur les dépendances Professeur associé, Université de Sherbrooke
L’équipe MONBUZZ.ca
École d’été sur les dépendances, Longueuil, 20 juin 2018
Équipe
Co-chercheurs principaux : Mathieu Goyette et Jorge Flores-Aranda
Co-chercheurs universitaires : Karine Bertrand et Marianne Saint-Jacques
Co-chercheurs communautaires : Fédérick Pronovost et Alexandre Dumont-Blais
Coordination : Valérie Aubut
Agent de projet : Patrice Bécotte
La genèse du projet
La consommation de substances et les HARSAH : un buzz médiatique
La consommation de substances et les HARSAH : un (léger) buzz scientifique
Besoins de Rézo et observations sur le terrain
Recherche communautaire
Littérature
Observations terrain
Les défis de rejoindre cette population illustrés dans le cas de Mario
Mario (32 ans, célibataire, s’identifie comme gai)
• Consomme les fins de semaine plusieurs substances dans un contextesexuel (GHB, poppers, Kétamine, Crystal Meth, etc.)
• Mélange sa consommation à des médicaments pour les troublesérectiles lors de sex parties
• Sentiment d’appartenance au milieu festif gai où sa consommation luipermet d’augmenter son plaisir sexuel, d’explorer différents aspects desa sexualité et de socialiser
• Il est passé récemment à l’injection de crystal meth
It’s Me, Mario!
Mario
• Perçoit sa consommation comme récréative et s’inscrivant dans les normes dumilieu
• Il sent de plus en plus qu’il est difficile d’avoir du sexe sans consommer
• Étant donné que sa consommation est limitée dans le temps et à un contexte,il ne se perçoit pas comme un « drogué », un « toxicomane », surtout pas un« UDI »
• Il ne perçoit pas le besoin de recevoir des services spécialisés et est d’avis queles intervenants ne seraient pas en mesure de le comprendre
L’internet comme moyen de rejoindre Mario ?
Interventions en ligne
Efficacité des interventions ayant recours aux nouvelles technologies
1.Transfer d’information uniquement ≠ efficacité
2.Interventions en personne ≥ interventions en ligne ≥ aucuneintervention
3.Consommation à risque léger ou modéré ≥ consommationsévère
4.Intervention complète ≥ Screening et avis brefs uniquement
5.Interventions en ligne + un contact personnel ou en plus d’uneintervention en personne ≥ intervention seulement
6.Peu d’études sur l’efficacité des interventions ayant recours auxnouvelles technologies sur la consommation de substances chezles HARSAH (Project Tech Support)
(Cadigan et al., 2014; Litvin et al., 2013; Reback et al., 2012; Riper et al., 2008)
Goyette et al., 2016
Interventions en ligne auprès des HARSAH
Il est nécessaire :
1. Qu’il ne s’agisse pas uniquement d’un projet de recherche
2. Que l’interface soit adapté à la population (design, langage)
3. Que les interventions soient offertes par des professionnelsqui comprennent les enjeux avec les interventions en ligne(Reback et al., 2010; Schnall et al., 2014)
Goyette et al., 2016
L’expertise du milieu communautaire Depuis 2000, Rézo développe des interventions en ayant recours aux nouvelles technologies (ex. dans sites et applications de rencontre)
Entre 2013-15 : 1661 interventions en ligne auprès d’HARSAH La prévention de la consommation de SPA et le traitement de la consommation problématique devient un besoin central pour leur communauté
Le co-développement
Transfert de connaissances à partir du domaine de la recherche en VIH • Dans le domaine de la dépendance:
• Expertise des cliniciens est prise en compte(e.g. Recovery concept, Neale et al., 2006)
• L’expertise des utilisateurs de substances est rarement prise en compte (e.g. PROUDcohort study, Ottawa, Lazarus et al., 2014)
• Dans le domaine du VIH :• La recherche communautaire, qui inclut différents acteurs en tant qu’experts, favorise
l’adéquation des résultats aux besoins de la population (Otis et al., 2015; CIHR, 2016)
• Le principe GIPA (Greater Involvement of People Living with HIV/AIDS) devient centralau traitement et à la recherche
Utilisateur de substancesObjet d’étude et de
traitement
Utilisateur de substances Expert et acteur actif
Goyette et al., 2016
Rejoindre des HARSAH qui consomment des SPA, surtout ceux quifréquentent peu les services en dépendance ou ceux en santé sexuelle,particulièrement les personnes hors des grands centres, afin de leur offrirune intervention adaptée. Celle-ci a pour but de :
1. Sensibiliser cette population aux méfaits associés à la consommation deSPA, notamment sur le plan de la sexualité
2. Réduire les méfaits associés à la consommation de SPA
3. Favoriser une orientation vers des services adéquats
Méthodologie
Approche de recherche communautaire impliquant : cliniciens, chercheurs, intervenants communautaires, potentiels utilisateurs:
• Comités de travail pour le développement du portail
• Reconnaissance de la contribution des différentes expertises
• Assignation de rôles et de responsabilités pour chaque comité
• Processus itératif afin d’identifier les stratégies les plus appropriées pour rejoindre les HARSAH et pour développer un site adapté
• Intégration des concepts de la science de la mise en oeuvre pourguider l’évaluation du processus de développement ded’implantation (ex. modèle logique)
(Alkin, 2011; Chen, 2005; Ridde, 2004; Ridde et al., 2003)
Goyette et al., 2016
Mon Buzz
63
Échanges itératifs entre différentes instances
Documentation scientifique
• Modélisation des meilleures pratiques sur le plan de l’implantation et del’intervention
• Limitée, décontextualisée, non intégrée
Experts (utilisateurs potentiels, intervenants, etc.)
• Approche d’ouverture basée sur la RM, reconnaître les aspects positifs etnégatifs de la consommation et les différents niveaux de consommation
• Langage accessible, adapté et respectueux
• Bref, mais intégrant les différents aspects de la sexualité
• Adaptée l’IB à un format en ligne (idéalement application et site web,deux langues) et approche graphique non-médicalisée
Firme informatique
• Solutions intéressantes sur le plan graphique et de l’échange
• Sous-estimation ou incompréhension de certains besoins importants
Nom et identité visuelle Groupes de discussion avec des utilisateurs potentiels et consultations auprès des comités pour le nom et le logo
De “Égoportrait” à “MonBuzz”
• Aucune mention explicite à la consommation de substances, la sexualité ou les HARSAH
• Tenir compte des aspects positifs et négatifs de la consommation de SPA
• Éviter toute ressemblance avec des sites gouvernementaux en santé
Goyette et al., 2016
Contenu et format
• Approche: sans jugement, réduction des méfaits, reconnaissance du plaisir et des risques de la consommation, différents niveaux de gravité de la consommation
• Choix du langage: langage simple(vs médical), accessible, respectueux de la sous-culture LGBTQI2S
• Durée: bref mais précis et appuyé scientifiquement, tout en tenant compte des différentes dimensions de la sexualité
• Adaptation: aux normes culturelles et au format web
Goyette et al., 2016
Aspects sociodémographiques
• Exclusion de l’étude et du portail
• Âgés de moins de 18 ans
• Exclusion de l’étude, mais pas du portail, avec un avis surl’inadéquation de la rétroaction :
• Femmes
• Personnes vivant à l’extérieure du Qc
• Personnes ayant du sexe uniquement avec des femmes dansla dernière année
• Professionnels ou utilisant le portail pour un proche
Consommation
ASSIST – adapté format web et HARSAH
• Plusieurs catégories de substances / questions modulées aux réponses
• Détection des problèmes de consommation (faible risque, risque modéré, risqueélevé) - congruent à l’intensité de l’intervention
• Niveau de risque associé aux pratiques d’injection (récente et fréquence)
Questionnaire sur la motivation au changement – adaptation
• Précontemplation, contemplation, action
Bilan sur l’influence de la consommation sur la sexualité
• Questionnaire développé avec la contribution des utilisateurspotentiels et des cliniciens ainsi que de la documentationscientifique
• Aborde un ensemble d’association entre la consommation et lasexualité, mais adapté aux réponses antérieures
• Davantage un outil de réflexion (intervention) que d’évaluation
• Repose sur une perspective de RM et motivationnelle
• Généralement non normé, sauf pour certains comportements
• Langages accessibles et définis (« buzzé, « avoir du sexe, « SPA àconsidérer » « une « fois »)
• 10 dernières fois…
Rétroaction
1. Une rétroaction du niveau de risque pour chaque substance et sur l’injection
2. La possibilité de prendre connaissance des risques associés à sa consommation sursa santé et sa sexualité pour chaque substance présentant un certain niveau derisque
3. Un avis entourant la consommation
4. Une rétroaction de la motivation au changement en lien à la consommation
5. Une liste des comportements sexuels associés à la consommation
6. Un avis entourant l’influence de la consommation sur la sexualité
7. Avis final en lien à l’orientation
Orientation vers les services
Intervention en ligne par clavardage
• Si :
• Consommation à risque modéré ou élevé à une SPA hormis le tabac
OU
• Préoccupations ou besoins sur le plan de l’influence de la consommation sur la sexualité
Choix de la personne : ne pas clavarder, clavarder immédiatement (si intervenant disponible) ou en différé
Lien de retour envoyé par courriel avec plages horaires fixes
* Des critères plus restreints sont utilisés pour l’étude de faisabilité
Promotion et diffusion
Promotion
• Pour les utilisateurs de
MONBUZZ.CA
• Outils promotionnels imprimés
(distribués par Rézo)
• Réseaux sociaux (Rézo et
organismes partenaires)
• Applications de rencontres
(Scruff et bbrt.com)
• Publicité dans le magazine Fugues
• Pour les membres du comité de
développement
• Contact direct
Diffusion
• Direction de santé publique de Montréal
• Direction de santé publique de la Montérégie
• Direction de santé publique de l’Estrie
• www.pretpourlaction.com
• Réseaux de chacun des partenaires
• Associations étudiantes LGBTQI2SA
• Clinique de médecine urbaine du Quartier Latin
• Clinique L’Actuel
Rétroaction de la part de la communauté
Couverture médiatique
• Prêt pour l’action, repéré en ligne : http://www.pretpourlaction.com/tes-trips/sexe-et-conso/
• Le crystal meth, parlons-en. Blog CATIE http://blog.catie.ca/2017/11/07/le-crystal-meth-parlons-en/
• Chemsex et prévention du VIH, Roche, papier, ciseaux, CISM.
• Chemsex : sexe sous influence, RAD, Radio-Canada.
• MONBUZZ.ca. Disponible sur la chaîne Youtubehttps://www.youtube.com/watch?v=DuG_A5VF8dQ
• La sexualité et la consommation de substances licites et illicites, Radio Anonyme, CIBL
Difficultés à avoir une couverture médiatique étendue en raison du thème ou de la population
Que pensent les acteurs du projet du co-développement ?
Volet développement
• Objectif
• Documenter le processus collaboratif entourant le développement
du portail MONBUZZ
• Aspects méthodologiques
• Entrevue individuelle (60 à 90 minutes) auprès de 8 membres du
comité de développement
• Modifications apportées au protocole de recherche
• Thèmes abordés
• Expérience dans la mise en place et le développement
• Rôles et prises de décisions
• Pratiques influençant et renforçant l’implication des membres de la
communauté
• Analyse thématique sur audio
• Permet de faire ressortir les thèmes convergents, divergents et
émergents
1. Mise en place du comité de développement
• Forces
• Composition et pluralité des membres
• Diversification des expériences et des points de vue
• Représentation des milieux et des expertises
• Faiblesses
• Peu d’utilisateurs potentiels (HARSAH consommateurs)
• Manque de diversité des membres HARSAH (différentes origines ethniques,
tranche d’âge, profil de consommation, etc.)
• Équipe de recherche omniprésente
Résultats préliminaires
« Je l’ai trouvée (la
composition du comité)
intéressante parce qu’elle
était plurielle. Je trouve
qu’il y avait des gens de
différents secteurs qui
étaient bien représentés. »
« Il y aurait fallu plus
de gens issus de la
communauté toxicomane
HARSAH en
rétablissement dans le
projet pour assurer une
certaine validité au
processus. Ces gens-là
ont un bagage et des
informations qui sont
vraiment valables, non
seulement dans la
période où est-ce qu’ils
consomment, mais aussi
dans la période où ils se
rétablissent. »
2. Expérience dans le développement
• Climat, collaboration et organisation
• Leadership
3. Engagement et motivation
4. Rôles
• Clarté des rôles
• Enjeux liés aux multiples chapeaux
« Il n’y a personne qui n’a pas été
entendu, tout le monde a été écouté, le
temps d’échange était là, les rencontres
étaient quand même chargées, il y avait
beaucoup de contenu, beaucoup
d’éléments, mais on était dans l’accueil
par rapport à l’espace de discussion ou
pour donner son point de vue, lorsque les
gens n’étaient pas en accord, c’était posé
sur la table et c’était correct. » « Malgré qu’on pouvait arriver à un comité et que les choses
n’avaient pas avancé à cause des délais, on sentait que le travail
avançait quand même. La communication était fluide et on
savait ce qui se passait alors c’est encourageant, ça motive
quand on sait ce qui se passe. »
« Au début, c’était difficile. C’était plus ou moins
clair au début qu’elle serait ma contribution, alors
c’était difficile de savoir ce que je pouvais apporter
au projet en particulier. »
5. Influence du comité sur le développement du portail
6. Retombées de la participation au comité de développement
7. Pratiques qui influencent l’implication en recherche des membres de
la communauté
8. Autres résultats intéressants
« Plusieurs fois, il a fallu ramener la question du langage. Je crois que cela a été fait jusqu’à un certain
point. »
« C’était une clientèle que je connaissais moins, les HARSAH. Par leur présence, ça m’a permis d’avoir une meilleure idée de
leur point de vue et de leur expérience. […] C’est sur que j’ai transmis au niveau de mes équipes. »
« Les chercheurs représentent quelque chose aux yeux des gens… malgré l’ouverture des chercheurs et le lien de confiance
développé avec le milieu communautaire. Il y a toujours un clash entre les préoccupations des chercheurs et celles de la
communauté. Forcement, il y a une certaine négociation qui doit se faire pour pouvoir avoir un projet qui répondent aux besoins
de la communauté, mais aussi à ceux de la recherche. Ne serait-ce que cela, ce dialogue peut créer une certaine distance même si
n’est pas voulu. »
Volet d’implantation
- Itérations avec la
firme (intégration des
diverses composantes)
- Préparation de
l’intervenant en ligne
- Nb d’utilisateurs
limités
- Activités de
promotion
- Difficultés entourant
le clavardage
- Activités de
promotion
soutenue
(Facebook, Prêt
pour l’action) 89
Indicateurs liés à l’implantation
Implantation
CONDITIONS CRITIQUES
1. Appropriation du projet par les membres des différents comités
• Protocole d’entente entre RÉZO et UdeS
• Adhésion des membres aux objectifs du portail
2. Délimitation claire des rôles, des mandats et des responsabilités de
chacun
• Documentation issue du processus de développement;
• Post-mortem suite à la collecte de données (à faire)
Adhésion des membres aux objectifs du portail
• Taux de participation
• 10/30 ont rempli le questionnaire sur l’opinion des membres
40%
30%
20%
10%
Chercheur Gestionnaire ou coordonnateur
Intervenant Membre de la communauté
• Adhésion à la vision de MONBUZZ.ca
• 80 % adhère à la vision du changement proposé par MonBuzz.ca
• 20 % adhère, seulement si des conditions critiques sont mises en place
• Efforts considérables à déployer sur le plan de la promotion et de la
diffusion
• Lourdeur des questionnaires
• Cohérence du portail et du fonctionnement 55%
35%
10%
Oui, suffisamment Oui, à certaines conditions
Non
Considération pour les caractéristiques des utilisateurs
• 90 % des experts sont d’avis que le portail est suffisammentrespectueux du fait que les utilisateurs sont des HARSAH
• Longueur du questionnaire vs capacité de maintenir la concentrationdes utilisateurs de SPA
• Autonomie de choisir les composantes de détection
• 90 % trouvent que le portail est en cohérence avec les attentescliniques de l’intervention en ligne auprès des HARSAH
INTRANTS
1. Financement adéquat obtenu et consolidation du financement
Intervention
Recherche
Mobilisation des connaissances
2. Nombre suffisant d’intervenants nécessaires à la réalisation de
l’intervention en ligne durant l’ensemble du projet
• De 2 h à 12 h par sem. par l’intervenant responsable;
• Arrimer aux « push » Facebook
• Formation de deux autres intervenants
• Couverture adéquate, faible taux de demande
• Nécessité d’identifier précisément les plages horaires les plus achalandées
3. Maintien d’un niveau adéquat de compétences des intervenants et
de la conformité des interventions
• Formation d’un intervenant (vs bénévoles)
• Développement d’un protocole de gestion d’événements critiques
• Évaluation continue des interventions en ligne
PROCESSUS
1. Stabilité et capacité du portail à orienter de façon constante les
utilisateurs
• Journaux de bord/courriels; difficultés à l’utilisation du clavardage et en lien
aux questionnaires de satisfaction
2. Capacité du portail à rejoindre la clientèle visée
• Clientèle ayant des besoins sur le plan de leur consommation et de son
influence sur la sexualité
• Peu/pas en lien avec les services
• Vivant dans la région de Mtl, Rive-Sud
• Nb. Intéressant, mais limité d’utilisateurs rejoints vs stratégies déployées?
3. Convivialité du portail, fonctionnement et perception de l’utilité
• Données colligées auprès des experts
• Données à colliger auprès des intervenants
• Données limitées auprès des utilisateurs
4. Utilisation conforme aux attentes
• Nb limité d’utilisateurs
• Taux d’abandon comparable aux autres interventions en ligne
• Nb limité d’interventions par clavardage
Forces et faiblesses de MONBUZZ.ca selon les experts
Forces Éléments critiques Prochaines étapes
Convivialité globale d’utilisation « saillance » du volet recherche Site accessible dans les deux langues
Facilité générale de compréhension Promotion de l’utilisation hors des grands
centres
Ajout de composantes connexes (mixtes,
documents informationnels /
interventionnels)
Anonymat possible Niveau potentiel de littératie des utilisateurs Revoir le graphisme et le contenu pour
mettre l’accent sur le côté humain
Capacité de rejoindre les personnes où elles
sont et hors des milieux gais
conventionnels
Longueur / redondance perçues d’items
dans le questionnaire sur la sexualité
Diminuer le nombre de questions
Étendue de la clientèle visée par rapport au
niveau de consommation
Augmenter la flexibilité entre les étapes à
partir des choix des utilisateurs
Unicité du portail en soi et du format
conversationnel
Arrimer davantage l’orientation /
clavardage
Recours à des instruments validés
Le contenu et le format du bilan
Merci de votre intérêt et de
votre participation
Faire de la recherche avec les acteurs de terrain : l’exemple de
l’étude d’intervention ANRS-AERLI
Atelier 1 - Ecole d’été – Montréal – mercredi 20 juin 2018
Perrine ROUX, PhD, PharmDInserm U1252 (SESSTIM), Marseille
■ Principes de l’approche communautaire : « faire avec les personnes et non pas pour les personnes » (Guide ANRS, 2012)
Mobilisation des groupes concernés Approche ascendante Basée sur le savoir expérientiel et le vécu des personnes Transformation sociale
■ Un gradient d’implication des acteurs de terrain
Être présent dans les comités Participer à la définition des objectifs de la
recherche Transférer des missions de recherche aux acteurs
et usagers
Qu’est-ce que la recherche communautaire ?
Dominante communautaire
Dominante académique
Partenariat équilibré
Coordination scientifique
Conseil scientifique
Comité de pilotage
Groupe de travail
• Visibilité des acteurs communautaires• Terrain complexe à mettre en œuvre• Plaidoyer
• Enjeu méthodo-logique• Indépendance de l’évaluation• Aide à la décision publique
Qu’est-ce que la recherche communautaire ?
Les associations communautaires peuvent aider les chercheurs à recruiter des participants
…mais ils peuvent faire plus…
Jouer un rôle direct dans la mise en place de l’étude, le schémaet le déroulement du projet de recherche
…et aussi…
Être impliqués dans la diffusion des résultats et promouvoir l’utilization de ces résultats (plaidoyer, communication, …)
Comment faire de la recherche communautaire?
• Avantages Accès plus facile aux populations concernées Mobilisation des usagers grâce aux acteurs de terrain Savoir et langage du terrain pour adapter les outils de
recueil Contribution à une acceptation collective de la recherche
par les personnes des associations
• Inconvénients Manque de distance nécessaire à la recherche Réponses des participants influencées par les valeurs de
l’association (biais de désirabilité) Proximité entre participant et enquêteur
Avantages & inconvénients
■ Une étude française CAIRNET conduite en 2012 auprès de 581 chercheurs :
4 types de chercheurs en France:- Réservés : 26%- Réticents : 27%- Pragmatiques : 29%- Engagés : 18%
Réticence à impliquer les associations
■ Expérience de notre équipe de recherche SESSTIM: Parmi les HSH : dépistage rapide communautaire pour le VIH
(DRAG) Plos One, PrEP(IPERGAY) NEJM
Parmi les usagers de drogues : AERLI Addiction 2015
Les chercheurs et les associations de malades/usagers
Les autorités de Santé Publique sont de + en + en demande de résultats et de preuves scientifiques
Transformation sociale
Recherchecommunau-taire
Plaidoyer et mobilisation
Transformation sociale
Exemple d’une recherche communautaire :Etude d’intervention ANRS-AERLI
Contexte
Succès de la réduction des risques face au VIH mais :
• prévalence et incidence toujours élevées du virus de l'hépatite C Weill-Barillet 2016
• de nombreux dommages et infections associées à l'injection OFDT, 2008
Des parcours et des recours liés à l’injection qui évoluent avec les générations, les produits et les traitements
Les accompagnements à l’injection en squat (AAI), en milieu festif et dans le programme ERLI (MdM)
Pas de cadre légal qui autorise AERLI dans les centres de réductiondes risques
>>> Nécessité de mettre en oeuvre une recherche communautaire afinde valider l’efficacité de l’intervention : projet ANRS-AERLI
Construction et mise en œuvre du protocole de recherche AERLI
Principe d’une recherche communautaire associant :
- Des intervenants communautaires de AIDES et des intervenants de MDM
- Des chercheurs académiques (Inserm….)
- Support financier et institutionnel de l’ANRS
- Des personnes concernées par la pratique d’injection
L’intervention en pratique
- Espace calme, isolé et éclairé dans le Caarud
- Equipe communautaire (infirmiers, UDVI…)
- Equipe formée à l’AERLI, à la gestion des OD…
- Partenariat avec le SMUR
- Tous types de produits sont acceptés, s’ils sont utilisés habituellement
- Possibilité de venir à 2 (si pratique habituelle)
AERLI - Checklist standardisée au moment de la supervision de l’injection +
intervention individualisée pour réduire les risques
AERLI checklist
Hygiene (Whether/how cleaning site of injection/hands)
Preparation (syringe, spoon, fingers, type of product, acidification, water, heating, mixing, filtering, use of spared equipment)
Preinjection (how cleaning site/searching where to inject, leaking needle…)
Injection (arm, legs etc.., alternate site, number of attempts, right orientation, speed etc.)
Injection done or not (why not done-observations)
Post-injection (management of bleeding and of used equipment, clean hands)
AERLI checklist
Objectif principal: mesurer les effets d’AERLI auprès des personnes UDVI sur :
les pratiques à risque de transmission du VIH-VHCles complications au point d’injection
Objectifs secondaires : mesurer d’autres critèresd’efficacité
l’accès aux soins et aux dépistages (VHC)le renforcement des compétences des personnes
ayant bénéficié d’AERLI.
Objectifs de le recherche
Schéma de l’étude
Recherche interventionnelle multicentrique comparantl’évolution sur 12 mois des pratiques d’injection dansdeux groupes :
- Un groupe intervention : composé de personnes ayantbénéficié de AERLI dans 8 CAARUD sélectionnés (n=113)
- Un groupe témoin : composé de personnes qui fréquentent 9 CAARUD ne proposant pas l’intervention(n=127)
Inclusion M6 M12
Schéma de l’étude
Entretiens téléphoniques avec un enquêteur indépendant non impliqué dans les sessions éducatives
Sessions éducatives (SE) avec l’usager sur les pratiques d’injection et les risques associés (risque VHC, accès au dépistage et au soins VHC) et injection par l’usager en présence d’un intervenant formé
Groupe intervention
Groupe contrôle
Au moins 1 SE sur 5 mois
• Analyses statistiques• Critères étudiés :
• Avoir déclaré au moins une pratique à risque de transmission du VHC au cours du dernier mois
• Avoir déclaré au moins une complication au site d’injection
• Avoir été dépisté pour le VHC au cours des 6 derniers mois
• Modèle de Heckman pour limiter le biais lié à la non-randomisation
• Modèle logistique mixte pour identifier les facteurs associés au critère étudié
Méthodes
Article 1
Impact d’AERLI sur les pratiques à risque VHC et les complications au site d’injection
Control group n=127 Intervention group n=113 p-value†
Gender
male 99 (78) 88 (78) 0.99
Age§ 31 [26-37] 30 [25-37] 0.38
High School Certificate 23 (18) 36 (32) 0.01
Precarious housing 17 (13) 32 (28) 0.01
Age at first drug injection§ 19 [17-23] 19 [17-23] 0.73
Harmful alcohol consumption ⱡ 69 (54) 63 (56) 0.77
Heroin use* 32 (25) 46 (41) 0.01
Cocaine/crack use* 50 (39) 55 (49) 0.19
Sulfate morphine use* 36 (28) 60 (53) <0.001
Buprenorphine use** 67 (53) 30 (27) <0.001
Frequent daily injection 58 (46) 61 (54) 0.20
HCV screening 108 (85) 84 (74) 0.04
HCV risk practices1 34 (27) 49 (44) 0.01
Problems at the injection site2 71 (56) 75 (66) 0.10
HCV seropositivity 29 (23) 37 (33) 0.05
HIV seropositivity 5 (4) 2 (2) 0.35
Résultats (1) – description à l’inclusion M0
† Chi-squared test or Wilcoxon test; § in years ; ⱡ AUDIT score ≥3 for women; ≥4 for men; *during the previous 4 weeks; 1more than 1 HCV at-risk practice during the previous month; 2more than 1 problem at the injection site; self-assessment score of venous status < 7 (from 0 to 10)
Table 1. Baseline characteristics n(%) or median[IQR]), ANRS-AERLI study (n=240)
Participants inclus
n=144
Groupe intervention M0
n=113
Groupe intervention M6 n=75
Groupe intervention M12 n=44
Participants inclus
n=127
Groupe contrôle M0 n=127
Groupe contrôle M6 n=92
Groupe contrôle M12 n=71
Diagramme de l’étude
Participants n’ayant pas reçu
AERLI n=31
CAARUD intervention n=8 CAARUD témoins n=9
Résultats (2) – Evolution des critères
• % de participants ayant déclaré au moins une complication au site d’injection
• % de participants ayant déclaré au moins 1 pratique à risque VHC
Follow-up
*
*
Follow-up
•p<0.05 : significant difference between M0 and M12 in the intervention group
•p<0.05 : significant difference between M0 and M6 in the intervention group
Résultats (3) – Impact sur les pratiques à risque VHC
Multivariate model (n = 238, visits = 497)
Noofvisits(%)or
median[IQR]
multivariateanalysis
coef[95%CI]
p-
value
Age§ 31[26-38] -0.04[-0.06;-0.01] 0.01
MorphinesulfateuseNoYes
325(62)197(38)
1
0.41[-0.02;0.83]
0.06
InterventionNo
Yes
290(56)
232(44)
1
-0.81[-1.80;0.19]
0.11Follow-up
Baseline(M0)M6M12
240(46)167(32)115(22)
10.23[-0.19;0.64]0.14[-0.31;0.59]
0.290.53
InteractionIntervXBaseline
IntervXM6IntervXM12
1
0.13[-0.53;0.78]-1.01[-1.77;-0.24]
0.710.01
IMR 0.78[0.13;1.43] 0.02
Résultats (4) – Impact sur les complications veineuses
Multivariate model (n=240, visits=520)
Noofvisits(%)or
median[IQR]
multivariateanalysis
coef[95%CI]
p-
value
Age§ 31[26-38] -0.04[-0.06;-0.01] 0.01
MorphinesulfateuseNoYes
325(62)197(38)
1
0.41[-0.02;0.83]
0.06
InterventionNo
Yes
290(56)
232(44)
1
-0.81[-1.80;0.19]
0.11Follow-up
Baseline(M0)M6M12
240(46)167(32)115(22)
10.23[-0.19;0.64]0.14[-0.31;0.59]
0.290.53
InteractionIntervXBaseline
IntervXM6IntervXM12
1
0.13[-0.53;0.78]-1.01[-1.77;-0.24]
0.710.01
IMR 0.78[0.13;1.43] 0.02
Résultats (4) – Impact sur les complications veineuses
Multivariate model (n=240, visits=520)
Article 2
Impact d’AERLI sur l’accès au dépistage VHC
UDVI groupe intervention + contrôle
n=144 + 127 = 271
UDVI groupe intervention
n=113 + 127 = 240
UDVI intervention éligible au dépistage VHC
n=88 +114 =202
UDVI intervention éligible au dépistage VHC
n=48 +67
UDVI intervention éligible au dépistage VHC n=27+54
Sélection de la population
Figure 1. Flow chart (ANRS-AERLI, n=271; analyse depVHC, n=202 )
no interventionn=31
Eligibilité:
• être à risque de VHC ou ne pas savoir son statut
• ne pas déclarer de données discordantes d’une visite à l’autreM12
M6
M0
M0
Résultats (1) – Caractéristiques des participants
Tableau 1. Caractéristiques à M0 (n (%) or median [IQR]) (n=202): étude ANRS-AERLIGroupe contrôle
(n=114)
Groupe intervention
(n=88)
P-value
Genre 0.99
Homme 88 (77) 68 (77)
Femme 26 (23) 20 (23)
Age§ 30 [26-37] 30 [25-34] 0.36
Baccalauréat 21 (18) 27 (31) 0.04
Vie en couple 27 (24) 27 (31) 0.27
Activité rémunérée 42 (37) 25 (28) 0.21
Logement stable 75 (66) 36 (41) <0.001
Age à la 1ère injection de drogue§ 19 [17-23] 20 [17-25] 0.82
Alcool à risqueⱡ 64 (56) 47 (54) 0.77
Héroïne* 29 (25) 40 (45) 0.003
Cocaine/crack* 46 (40) 40 (45) 0.47
Sulphate de morphine* 34 (30) 43 (49) 0.006
Buprénorphine* 59 (52) 81 (40) <0.001
Injection pluriquotidienne 53 (46) 49 (56) 0.20
Dépistage VHC 97 (85) 68 (77) 0.15
Pratiques à risque VIH-VHC1 33 (29) 37 (43) 0.05
Complications au site d’injection2 62 (54) 60 (68) 0.05
§en années; ⱡAUDIT-C ≥ 3 femmes et ≥4 hommes; *au cours du dernier mois; 1au moins 1 pratique à risque au cours du dernier mois; 2 au moins 1
complication au cours du dernier mois.
Résultats (2) – Dépistage VHC au cours de l’étude
Figure 2. Pourcentage de participants ayant fait un dépistage VHC au cours des 6 derniers mois, n (%)
0
10
20
30
40
50
60
70
80
90
groupe contrôle groupe intervention
M0 M6/M12
64 (85.3)
58 (50.9)
94 (78.3)
39 (44.3)
Résultats (3) – Impact sur le dépistage VHC
Tableau 2. Facteurs associés au dépistage VHC : modèle logit mixte, analyses univariées et multivariées, étude ANRS-AERLI (n=202 participants, N=395 observations)
Analyses univariées Analyses multivariées
OR [95%IC] p-valeur OR [95%IC] p-valeur
Logement stable
Non 1
Oui 0.58 [0.26; 1.28] 0.18
Traité par TSO
Non 1
Oui 1.84 [0.80; 4.22] 0.15
Crack*
Non 1 1
Oui 0.13 [0.02; 0.84] 0.03 0.11 [0.02; 0.80] 0.030
Buprénorphine*
Non 1 1
Oui 2.53 [1.07; 5.98] 0.04 2.85 [1.08; 7.53] 0.034
Groupe intervention
Non 1 1
Oui 0.85 [0.38; 1.90] 0.69 0.72 [0.24; 2.13] 0.547
Suivi
M0 1 1
M6 ou M12 1.13 [0.61; 2.12] 0.69 0.67 [0.28; 1.59] 0.362
Interaction
Groupe intervention à M0 1
Groupe intervention à M6 or M12 4.13 [1.03; 16.60] 0.046
• Limites• Difficile d’avoir un groupe contrôle comparable à cause de la
clusterisation : grande diversité de populations d’UDVI
• Perdus de vue
• Self-reports
• Chez les UDVI, impact positif de cette interventionpédagogique sur les pratiques d’injection en termes de :
- Diminution des pratiques à risque VHC
- Réduction des complications locales au point d’injection
• Mais aussi en termes d’accès au dépistage VHC :- Augmentation du nombre d’UDVI ayant été dépistés pour le VHC
Discussion
• Aspects innovants de cette intervention:• Intervention proposée aussi par les pairs
• Durée brève
• Peu coûteuse
• Intervention pouvant être proposée dans différents contextes:• PES, salles de consommation, intervention sur les lieux de vie des usagers
• Surtout dans les populations où la prévalence VHC est élevée et l’accès au dépistagelimité
Conclusions
Impacts pour la recherche
2 projets de recherche ont suivi
>>> projet OUTSIDER (Inserm/AIDES)
évaluer AERLI sur les lieux de vie des UDIs
>>> projet EUROSIDER (Inserm/AIDES/Correlation)
transférer AERLI dans 4 pays européens
(Bulgarie, Grèce, Portugal et Roumanie)
Transformation sociale
Plaidoyer >>> modification de la loi de modernisation 2016 >>>possibilité de proposer AERLI dans les centres RdRD
https://www.legifrance.gouv.fr/eli/loi/2016/1/26/AFSX1418355L/jo/texte
Impacts du projet
Remerciements
Personnes ayant accepté de participer à l’étude
Le groupe « ANRS-AERLI study group »
Tous les centres participants et leur personnel: M. Debrus (Paris (bus)); G. Boyault(Nevers); G. Penavayre (Pau); Céline Labbé (Lille); C. Urdiales (Nîmes /Alès (bus)); J. Murat (Toulouse); C. Saramago (Grenoble); F. Tempez (Rennes); N. Perrin (Clermont Ferrand); G. Dubosc (Avignon); N. Rodier (Limoges); M. Louanges (La Roche sur Yon); F. Rigaud (Béziers); M. Alvès Da Costa (Nancy)
Financement: ANRS
MERCI À TOUS POUR VOTRE ATTENTION !
Discussion en groupe
• 3 vignettes sur différents enjeux de la recherche communautaire
• Discuter sur une des vignettes et répondre aux questions
• Revenir en grand groupe avec vos réponses
• Discussion en grand groupe