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- 1 - UNIVERSITE DE ROUEN Année Universitaire 2012-2013 Travaux dirigés 2 ème année Licence Droit ACTE JURIDIQUE - Cours de Mme le Professeur Julie KLEIN ONZIEME SEANCE LA RESPONSABILITE CONTRACTUELLE (II) Cette séance s’inscrit dans le prolongement de la précédente. Outre la question du dommage réparable (séance précédente), la spécificité de la responsabilité contractuelle s’exprime également à travers l’étude du manquement contractuel, et des clauses portant sur la responsabilité. I.- LE MANQUEMENT CONTRACTUEL LA DISTINCTION DES OBLIGATIONS DE MOYENS ET DE RESULTAT La responsabilité contractuelle se rattache à un manquement dune partie à ses obligations contractuelles. Autrement dit, la responsabilité du débiteur va être engagée lorsquil aura méconnu une obligation contractuelle, quil sagisse dune obligation expressément prévue par les parties, ou dune obligation découverte par le juge. La difficulté porte alors sur la preuve du manquement : est-ce au créancier de prouver que le débiteur a commis un manquement ou au débiteur de prouver quil nen a commis aucun ? La doctrine (Demogue) a inventé une distinction capitale, celle des obligations de moyens (dites aussi de prudence et de diligence) et des obligations de résultat (dites aussi obligations déterminées). Cette distinction est très importante sur le terrain de la preuve de la faute contractuelle. Tantôt le débiteur sengage seulement à employer les moyens appropriés dans une tâche à accomplir, qui permettront au créancier datteindre peut-être le résultat quil souhaite, mais ce résultat nest en rien garanti par le débiteur (par exemple, le médecin ne promet pas au malade de le guérir, il sengage à lui apporter des soins consciencieux, attentifs, conformes, au moment où il soigne, aux données actuelles de la science). Tantôt le débiteur sengage à procurer au créancier un résultat précis : ainsi, dans le contrat de transport, le transporteur sengage à faire parvenir la personne transportée saine et sauve à destination.

UNIVERSITE DE ROUEN Année Universitaire 2012-2013 · Loiseau, RTDciv 2006, p.773, obs. P. Jourdain. Mais, dans cette démarche, la Cour de cassation va – et c’est le le 3 ème

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UNIVERSITE DE ROUEN Année Universitaire 2012-2013

Travaux dirigés – 2ème année Licence Droit

ACTE JURIDIQUE - Cours de Mme le Professeur Julie KLEIN

ONZIEME SEANCE

LA RESPONSABILITE CONTRACTUELLE (II)

Cette séance s’inscrit dans le prolongement de la précédente. Outre la question du dommage

réparable (séance précédente), la spécificité de la responsabilité contractuelle s’exprime également

à travers l’étude du manquement contractuel, et des clauses portant sur la responsabilité.

I.- LE MANQUEMENT CONTRACTUEL – LA DISTINCTION DES OBLIGATIONS DE

MOYENS ET DE RESULTAT

La responsabilité contractuelle se rattache à un manquement d’une partie à ses obligations

contractuelles. Autrement dit, la responsabilité du débiteur va être engagée lorsqu’il aura

méconnu une obligation contractuelle, qu’il s’agisse d’une obligation expressément prévue

par les parties, ou d’une obligation découverte par le juge.

La difficulté porte alors sur la preuve du manquement : est-ce au créancier de prouver que

le débiteur a commis un manquement ou au débiteur de prouver qu’il n’en a commis

aucun ?

La doctrine (Demogue) a inventé une distinction capitale, celle des obligations de moyens

(dites aussi de prudence et de diligence) et des obligations de résultat (dites aussi

obligations déterminées). Cette distinction est très importante sur le terrain de la preuve

de la faute contractuelle. Tantôt le débiteur s’engage seulement à employer les moyens

appropriés dans une tâche à accomplir, qui permettront au créancier d’atteindre peut-être

le résultat qu’il souhaite, mais ce résultat n’est en rien garanti par le débiteur (par exemple,

le médecin ne promet pas au malade de le guérir, il s’engage à lui apporter des soins

consciencieux, attentifs, conformes, au moment où il soigne, aux données actuelles de la

science). Tantôt le débiteur s’engage à procurer au créancier un résultat précis : ainsi, dans

le contrat de transport, le transporteur s’engage à faire parvenir la personne transportée

saine et sauve à destination.

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Mais comment décider si le débiteur doit être tenu d’une obligation de moyens ou d’une

obligation de résultat ?

Deux critères semblent pris en compte : celui de l’aléa, qui explique le fait que les activités

à risques ou dangereuses engendrent des obligations de moyens ; celui du rôle actif ou

passif du créancier. Si celui-ci s’en remet à son contractant, s’il perd toute autonomie, il a

un rôle passif, qui justifie que l’obligation soit de résultat. Dans le cas contraire - rôle actif

du créancier, qui joue un rôle dans la réalisation de l’obligation -, l’obligation sera de

moyens.

L’intérêt de la distinction des obligations de moyens et des obligations de résultat est un

intérêt de preuve : le propre des obligations de moyens est d’imposer au créancier

insatisfait la preuve de la faute du débiteur ; au contraire, s’il y a obligation de résultat, la

seule inexécution de l’obligation fait présumer la faute du débiteur qui ne peut alors se

dégager que par la preuve d’une cause étrangère exonératoire.

Document 1 : Cass. Civ. 1ère, 11 mars 2010, pourvoi n° 09-13197.

Document 2 : Cass. Civ. 1ère, 20 mars 2013, pourvoi n° 12-12300.

Document 3 : Cass. Civ. 1ère, 4 février 2003, Bull. civ. I, n° 40.

Document 4 : Cass. Civ. 2ème, 17 octobre 2012, pourvoi n° 11-17964.

Document 5 : Cass. Civ. 1ère, 28 novembre 2012, pourvoi n° 11-26814.

IV.- TROISIEME THEME : LES CLAUSES PORTANT SUR LA RESPONSABILITE

Au moment de la conclusion du contrat, les parties sont en mesure de prévoir les

conséquences que pourrait avoir l’inexécution par le débiteur de ses obligations. Puisque

l’obligation trouve sa source dans la volonté des parties, celles-ci peuvent parfaitement

décider d’aménager dès la conclusion du contrat les conséquences de son éventuelle

inexécution et, en particulier prévoir de limiter les conséquences d’une inexécution

défectueuse en-deçà du préjudice prévisible par la stipulation d’une clause limitative de

responsabilité.

Il existe toutefois une limite classique, prévue par l’article 1150 du Code civil : la clause ne

peut produire effet en cas de faute dolosive, à laquelle la jurisprudence assimile également

la faute lourde. A laquelle on ajoutera qu’une telle clause est nécessairement déclarée

abusive dans les rapports entre professionnels et consommateurs ou non-professionnels.

Au-delà, la question se pose plus généralement de savoir si la clause limitative de

responsabilité peut produire effet lorsqu’elle contrevient à une obligation essentielle du

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contrat : concrètement, la clause limitative de responsabilité qui fixe un plafond en cas

d’inexécution d’une obligation essentielle est-elle valable ?

Parce que de telles clauses portent atteinte au cœur même du contrat, et qu’elles sont

souvent imposées par le débiteur à son créancier dans le cadre de rapports contractuels

déséquilibrés, la Cour de cassation les regarde avec la plus grande méfiance. Elle a en

conséquence engagée une véritable politique jurisprudentielle en vue de les neutraliser.

Dans cette lutte, la jurisprudence de la Cour de cassation est apparue mouvante et n’a

cessé d’évoluer.

Document 6 : D. Mazeaud, « Clauses limitatives de réparation : les quatre saisons », D.,

2008, p. 1776 s.

Ce sont les différentes étapes de cette évolution qu’il faut ici retracer.

Dans un premier temps, elle a qualifié de faute lourde tout manquement à une obligation

essentielle. C’est difficile à saisir, car intellectuellement illogique : un contractant prévoit

n’être pas responsable en cas de manquement à une obligation. Cette stipulation est a

priori valable. Mais si elle porte sur une obligation essentielle, le juge procèdera de la

manière suivante en cas de litige : il constatera le manquement à l’obligation de la part du

débiteur ; il admettra l’existence d’une clause de responsabilité. Mais il estimera que le

manquement à l’obligation est constitutif d’une faute lourde, du seul fait que l’obligation

non respectée est essentielle : c’est l’importance de l’obligation inexécutée qui vient

déterminer la nature de la faute commise ! Par conséquent, utilisant l’assimilation admise

de la faute lourde au dol, il parviendra à paralyser les effets de la clause de non-

responsabilité sur le fondement de l’article 1150 du Code civil. Le tour est ainsi joué, et il

est efficace, même s’il ne trompe personne.

Document 7 : Civ. 1ère, 23 février 1994, JCP, 1994.I.3809, obs. G. Viney.

La jurisprudence a alors, dans un deuxième temps, changé de stratégie et tenté de

moraliser la question en supprimant les clauses trahissant une contradiction de

l’engagement du débiteur. Elle va alors opérer en 1996 un spectaculaire revirement de

jurisprudence en délaissant le passage par la faute lourde pour neutraliser directement la

clause limitative de responsabilité portant sur une obligation essentielle sur le terrain de la

cause. Le raisonnement peut alors être résumé en ces termes : en limitant à l’excès la

sanction de l’obligation qui constitue le cœur de l’opération, la clause dilue à ce point

l’objet de l’obligation du débiteur qu’elle prive de cause l’engagement corrélatif du

créancier. Corrélativement, le revirement de jurisprudence s’est traduit par un retour à une

lecture orthodoxe de l’article 1150 du Code civil : la faute lourde est de nouveau

subjectivement entendue.

Document 8 : Com., 22 octobre 1996, D. 1997, p. 175, obs. Ph. Delebecque et p. 121,

note A. Sériaux ; Defrénois, 1997, p. 333, obs. D. Mazeaud, JCP, 1997.I.4002, obs. M.

Fabre-Magnan, et 4025, obs. G. Viney, RTD Civ., 1997, p. 418, obs. J. Mestre.

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Document 9 : Ch. Mixte, 22 avril 2005, JCP, 2005.II.10066, obs. G. Loiseau, RDC, 2005,

p. 651, avis R. de Gouttes, p. 673, obs. D. Mazeaud, et 752, obs. Ph. Delebecque, RTD

Civ., 2005, p. 604, obs. P. Jourdain.

Document 10 : Com., 13 juin 2006, Bull. civ. IV, n° 143, JCP 2006, II, 10123, obs. G.

Loiseau, RTDciv 2006, p.773, obs. P. Jourdain.

Mais, dans cette démarche, la Cour de cassation va – et c’est le le 3ème temps de la lutte

contre les clauses limitatives de responsabilité – aller très loin – trop loin – dans sa chasse

aux clauses portant sur une obligation essentielle, au point de laisser entendre que le seul

fait que la clause porte sur une obligation essentielle suffirait à justifier sa mise à l’écart,

sans s’attarder sur le point de savoir si la clause prive effectivement de cause l’obligation

du débiteur.

Document 11 : Com., 13 février 2007, Defrénois, 2007, p. 1042, obs. R. Libchaber, JCP,

2007, I, 185, obs. Ph. Stoffel-Munck , et II, 10063, obs. Y.-M. Serinet, RDC, 2007, p. 707,

obs. D. Mazeaud, et 746, obs. S. Carval.

Document 12 : Com. 5 juin 2007, JCP, 2007.II.10145, obs. D. Houtcieff, RDC, 2007,

1121, obs. D. Mazeaud et 1144, obs. S. Carval.

Une telle jurisprudence, que certains ont pu qualifier de liberticide, a suscité de vives

critiques. Aussi la Cour de cassation est-elle récemment revenue à plus de rigueur. Elle

exige désormais, pour neutraliser une clause limitative de responsabilité portant sur une

obligation essentielle, qu’elle « contredise la portée de l’obligation essentielle du débiteur ».

Document 13 : Com., 29 juin 2010, CCC 2010, p.28, obs. L. Leveneur, JCP E 2010, p.

25, obs. Ph. Stoffel-Munck, Gaz. Pal. n°216-217, p.22, obs. D. Houtcieff ; D. 2010,

p.1832, obs. D. Mazeaud, RTDciv. 2010, p.555, obs. B. Fages.

V.- EXERCICE

Commentez l’arrêt rendu par la chambre commerciale le 22 octobre 1996 (Document 11).

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Document 1 : Cass. Civ. 1ère, 11 mars 2010, pourvoi n° 09-13197. Attendu que Mme X... Z..., ayant heurté de son ski gauche une roche qui affleurait la surface enneigée, est tombée trente mètres plus loin en se blessant contre un piquet métallique, non matelassé, qui supportait, en bord de piste, un filet de protection ; que souffrant de fractures et d’un traumatisme crânien, elle a recherché la responsabilité de la société Méribel Alpina, exploitant du site, et la garantie de son assureur, la société Axa France IARD ; Attendu que ces deux sociétés font grief à l’arrêt (Chambéry, 3 février 2009) d’avoir dit la société Méribel Alpina responsable des conséquences dommageables de l’accident, et de les avoir condamnées à payer diverses sommes à Mme X... Z... et à la CPAM de Paris, alors, selon le moyen : 1° / que l’exploitant d’un domaine skiable est tenu d’une obligation de sécurité de moyens ; qu’en imposant à l’exploitant de sécuriser la piste en protégeant les piquets soutenant les filets bordant normalement les pistes de ski de descente, la cour d’appel a fait peser sur l’exploitant une obligation de sécurité de résultat, en violation de l’article 1147 du code civil ; 2° / que la cour d’appel qui n’a pas relevé que les piquets soutenant les filets de protection auraient présenté, en eux-mêmes, une dangerosité particulière, qu’ils auraient été placés dans une position anormale, ou que leur état revêtait un défaut d’entretien propre à occasionner un dommage, n’a pas caractérisé l’existence d’une faute de l’exploitant, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l’article 1147 du code civil ; 3° / que l’exploitant d’un domaine skiable est tenu d’une obligation de sécurité de moyens ; que ne commet pas de faute l’exploitant qui omet de matelasser les piquets supportant les filets en bordure d’une piste faiblement pentue, cette exigence ne résultant pas de l’arrêté municipal du 14 décembre 1987 relatif à la sécurité des pistes dans le domaine où sont survenus les faits litigieux ; qu’en retenant la responsabilité de la SA Méribel Alpina dans l’accident dont Mme X... Z... a été victime, la cour d’appel, qui a fait peser sur l’exploitant une obligation de résultat, a violé l’article 1147 du code civil ; 4° / que l’exploitant d’un domaine skiable est tenu d’une obligation de sécurité de moyens ; que la cour d’appel qui n’a pas recherché, malgré les conclusions qui l’y invitaient si la présence en bordure de piste d’un filet de protection soutenu par des poteaux métallique ne constituait pas un danger inhérent à la pratique du ski de piste contre lequel il appartenait à la skieuse de se prémunir, a privé de base légale sa décision au regard de l’article 1147 du code civil ; Mais attendu qu’après avoir exactement énoncé que la société d’exploitation du domaine skiable était tenue d’une obligation de moyens, la cour d’appel a relevé l’existence d’un risque tout particulier lié au positionnement du piquet litigieux, situé à un endroit où la piste était rétrécie, et retenu que la probabilité de survenance de chocs, objectivement non négligeable, avait été sous-estimée par l’exploitant du domaine skiable qui avait omis de matelasser le piquet ; qu’ayant, en outre retenu que rien n’établissait que la skieuse aurait adopté, lors du choc comme dans le moment qui l’a précédé, un comportement imprudent ou inadapté au regard des circonstances, la cour d’appel a pu en déduire que l’exploitant avait manqué à son obligation ; PAR CES MOTIFS , REJETTE le pourvoi ;

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Document 2 : Cass. Civ. 1ère, 20 mars 2013, pourvoi n° 12-12300.

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 5 novembre 2010), que Mme X..., souffrant d'un

déchaussement parodontal, a été soignée à partir de 1998, par M. Y..., lequel, le 27 décembre

2002, lui a soumis un devis pour deux inlays et quatre couronnes inlays-core, qu'il a mis en

place entre mai et juillet 2003, que Mme X..., se plaignant de douleurs persistantes, a

recherché la responsabilité de M. Y... ;

Sur le premier moyen :

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en réparation des préjudices

résultant, selon elle, de la mauvaise exécution du traitement pratiqué par M. Y..., alors, selon

le moyen, que le chirurgien-dentiste est, en vertu du contrat le liant à son patient, tenu de lui

fournir un appareillage apte à rendre le service qu'il peut légitimement en attendre, une telle

obligation, incluant la conception et la confection de cet appareillage, étant de résultat ; que

dès lors en l'espèce, se bornant à retenir l'absence de faute du M. Y... dans le choix du

traitement proposé et la qualité des soins dispensés, sans rechercher, comme il lui était

demandé, si les prothèses litigieuses fournies par ce dernier étaient aptes à rendre à Mme X...

le service qu'elle pouvait légitimement en attendre, la cour d'appel a privé sa décision de base

légale au regard de l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant constaté que les prestations de M. Y..., qui comprenaient la conception

et la délivrance d'un appareillage, étaient opportunes, adaptées et nécessaires eu égard à la

pathologie de Mme X..., que les soins avaient été dispensés dans les règles de l'art en fonction

de la difficulté particulière du cas de la patiente et que les résultats obtenus correspondaient

au pronostic qu'il était raisonnable d'envisager, la cour d'appel a, par ces motifs, exclusifs

d'une faute quelconque imputable à M. Y..., légalement justifié sa décision ;

Et attendu que le second moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

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Document 3 : Cass. Civ. 1ère, 4 février 2003, Bull. civ. I, n° 40.

Attendu que Mlle X... a subi, le 10 juillet 1991, à la clinique Milan une intervention chirurgicale consistant en l’exérèse d’un lipome intra-canalaire ; que M. Y..., anesthésiste a mis en place une sonde sous-clavière ; que la patiente est sortie de la clinique le 17 juillet 1991 ; que le lendemain, un faux anévrisme artériel sous clavier droit consécutif à une plaie de la sous clavière droite causée par la mise en place de la sonde, a été diagnostiqué et a nécessité une seconde intervention ; que les époux X..., agissant en leur nom personnel et en qualité d’administrateurs légaux de leur fille, ont assigné M. Y... en réparation des différents préjudices subis par leur fille ; que l’arrêt attaqué (Paris, 3 mars 2000) a débouté Mlle X..., devenue majeure et ayant repris l’instance en son nom, de ses demandes ; (…) Attendu qu’il est encore fait grief à l’arrêt d’avoir dit que M. Y... n’avait pas commis de faute lors de l’anesthésie, alors, selon le moyen : 1 / que dans le cadre de son obligation de moyens, le praticien répond de toute lésion survenue de son fait ; qu’en écartant en l’espèce toute faute d’imprudence et de négligence de M. Y..., quand il était constant que c’est la pose du cathéter Swann-Ganz par ce dernier qui a provoqué une plaie de la sous-clavière droite de la naissance de l’artère vertébrale et de l’artère mammaire interne, à l’origine de l’anévrisme , atteinte qui était dès lors indiscutablement de son fait, la cour d’appel a violé par refus d’application, l’article 1147 du Code civil ; 2 / que, tenu d’une simple obligation de moyen dans le diagnostic et la délivrance des soins, le médecin est tenu d’une obligation de sécurité-résultat dans l’utilisation de ses instruments et l’exactitude du geste médical ; qu’en excluant en l’espèce toute obligation de sécurité-résultat, quant il est constant que c’est la pose du cathéter Swann-Ganz par M. Y... qui a provoqué une plaie de la sous-clavière droite de la naissance de l’artère vertébrale et de l’artère mammaire interne, à l’origine de l’anévrisme pour lequel une seconde intervention a dû être pratiquée, la cour d’appel a violé par refus d’application, l’article 1147 du Code civil ; Mais attendu que le médecin est tenu d’une obligation de moyens lorsqu’il procède à la pose d’un appareil sur la personne du patient ; qu’il n’est tenu d’une obligation de sécurité de résultat qu’en ce qui concerne les matériels utilisés pour l’exécution d’un acte médical d’investigation ou de soins, sous réserve que le patient prouve qu’ils sont à l’origine de son dommage ; que la cour d’appel, se fondant sur les conclusions des experts, a retenu que la blessure subie par la patiente constituait un complication très rare provoquée par la mise en place de la sonde qui ne pouvait être évitée par un examen ou une manœuvre particulière et qu’aucun manque de précaution et aucune négligence ne pouvaient être reprochés au médecin ; qu’en l’absence de toute défectuosité de la sonde et de possibilité de prévenir la blessure, elle a pu en déduire que la responsabilité de M. Y... n’était pas engagée ; que le moyen, pris en ses troisième et quatrième branches n’est pas fondé ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

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Document 4 : Cass. Civ. 2ème, 17 octobre 2012, pourvoi n° 11-17964.

Vu les articles 1147 du code civil et 873 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., propriétaire d'un véhicule de marque Toyota qui,

en raison de la survenance d'une panne, avait été conduit chez le concessionnaire de la

marque le plus proche, la société Claverie automobiles, pour en diagnostiquer l'origine, a

assigné celle-ci en référé, en paiement d'une provision à valoir sur la réparation du préjudice

qu'il lui imputait à faute pour avoir émis une appréciation erronée sur l'origine de la panne et

procédé inutilement au démontage de la boîte de vitesses du véhicule ;

Attendu que pour rejeter cette demande, l'arrêt, après avoir rappelé les conclusions du

rapport d'expertise selon lesquelles les investigations menées par la société Claverie

automobiles n'avaient pas permis "d'établir un diagnostic fiable sur l'origine de la panne,

puisqu'il s'est effectivement avéré qu'elle avait une autre cause" que celle identifiée par cette

société retient que cette dernière n'était chargée que d'une obligation de moyens, laquelle

échappe à la compétence du juge des référés, puisqu'elle nécessite l'examen au fond des

prestations offertes à ce titre par le garagiste ;

Qu'en statuant ainsi, alors d'une part, que la société Claverie automobiles avait été chargée des

opérations de "diagnostic et de démontage", ce dont il résultait qu'elle était tenue d'une

obligation de résultat, d'autre part, qu'elle relevait que les opérations expertales, conduites

contradictoirement, avaient révélé le caractère erroné du diagnostic posé par ladite société, la

cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS,

CASSE ET ANNULE (…)

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Document 5 : Cass. Civ. 1ère, 28 novembre 2012, pourvoi n° 11-26814.

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1147 du Code civil, ensemble l'article L. 1321-1 du Code de la santé publique ;

Attendu, selon le jugement attaqué, que se plaignant de la mauvaise qualité de l'eau distribuée

en régie par la commune de Saint-Hilaire-de-Lavit, Mme X. l'a assignée devant une juridiction

de proximité en paiement de dommages-intérêts et en remboursement du coût d'installation

sur sa propriété d'un système de filtration de l'eau par lampe UV ;

Attendu que pour rejeter l'ensemble de ses demandes, le jugement, après avoir relevé que la

commune n'était pas soumise à une obligation de résultat quant à la qualité de l'eau fournie et

constaté qu'elle avait entrepris divers travaux de nature à remédier à la mauvaise qualité

microbiologique de l'eau distribuée, dont la mise en œuvre avait été retardée en raison d'une

action introduite par Mme X. devant la juridiction administrative, retient que la commune a

satisfait à son obligation contractuelle de moyens ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la commune était tenue de fournir une eau propre à la

consommation et qu'elle ne pouvait s'exonérer de cette obligation contractuelle de résultat,

que totalement, par la preuve d'un événement constitutif d'un cas de force majeure, ou,

partiellement, par celle de la faute de la victime, la juridiction de proximité a violé les textes

susvisés ;

Par ces motifs, Casse et annule, (…)

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Document 6 : D. Mazeaud, « Clauses limitatives de réparation : les quatre

saisons », D., 2008, p. 1776 s.

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Document 7 : Civ. 1ère, 23 février 1994, JCP, 1994.I.3809, obs. G. Viney. Attendu que la ville de Montpellier a confié à la Société montpelliéraine des transports urbains (SMTU) l’exploitation d’un parc de stationnement souterrain ; que l’ouvrage réalisé par la Société d’équipement de la région montpelliéraine a été réceptionné le 21 septembre 1982 ; que, le 28 octobre suivant, des pluies torrentielles, qui ont fait l’objet d’un arrêté de catastrophes naturelles, se sont abattues sur la région de Montpellier ; que le parc de stationnement a été inondé et que le véhicule de Mme X..., placé en stationnement, ainsi que divers matériels qu’il contenait appartenant à M. Y... et à la clinique de Lavalette ont été endommagés ; que Mme X..., M. Z... et la clinique de Lavalette ont assigné la SMTU en réparation de leur entier dommage ; que la SMTU s’est prévalue de la clause exonératoire de responsabilité mentionnée sur le billet d’accès et selon laquelle : " les usagers circulent et stationnent à leurs risques et périls. L’utilisation du présent ticket donne droit au stationnement du véhicule mais ne constitue nullement un droit de garde et de dépôt du véhicule, de ses accessoires et des objets laissés à l’intérieur " ; que l’arrêt attaqué (Montpellier, 27 novembre 1991), retenant que la SMTU avait commis une faute lourde, faisant échec à l’application de la clause précitée, l’a déclarée responsable du sinistre ; Attendu que la SMTU reproche à l’arrêt d’avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, d’une part, qu’en soulevant d’office le moyen tiré de la faute lourde, sans provoquer au préalable les explications des parties, la cour d’appel a violé l’article 16 du nouveau Code de procédure civile, alors, d’autre part, que la faute lourde, excluant le bénéfice d’une clause d’irresponsabilité, suppose une négligence d’une extrême gravité, confinant au dol et dénotant l’inaptitude du cocontractant à accomplir la mission contractuelle qu’il a acceptée ; qu’en retenant une faute lourde à la charge de la SMTU, sans caractériser que l’omission de s’assurer du verrouillage de deux des dix-huit regards du siphon, constituait, de sa part, une négligence d’une extrême gravité confinant au dol et dénotait son inaptitude à exécuter son obligation contractuelle consistant à mettre à la disposition de l’utilisateur du parking un emplacement de stationnement, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1150 du Code civil ; et alors, enfin, que la cour d’appel ne pouvait retenir une faute lourde à la charge du concessionnaire du parking pour n’avoir pas vérifié le verrouillage des regards sans répondre aux conclusions du concessionnaire faisant valoir que les contrôles des regards incombaient au Bureau de contrôle et au maître d’ouvrage délégué ; qu’ainsi, la cour d’appel a violé l’article 455 du nouveau Code de procédure civile ; Mais attendu qu’ayant constaté que la SMTU avait manqué à son obligation essentielle de mettre à la disposition de l’utilisateur la jouissance paisible d’un emplacement pour lui permettre de laisser sa voiture en stationnement, la cour d’appel a exactement retenu que sa responsabilité contractuelle était engagée envers les propriétaires des véhicules endommagés par une inondation qui ne présentait pas, pour elle, les caractères d’une cause étrangère ; qu’ainsi, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par le moyen, qui tendent à écarter l’application d’une clause dont l’objet était de décharger la SMTU des obligations, étrangères au litige, d’un gardien ou d’un dépositaire, la décision se trouve légalement justifiée; d’où il suit que les trois branches du moyen sont inopérantes ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi.

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Document 8 : Com., 22 octobre 1996, D. 1997, p. 175, obs. Ph. Delebecque et p. 121,

note A. Sériaux ; Defrénois, 1997, p. 333, obs. D. Mazeaud, JCP, 1997.I.4002, obs.

M. Fabre-Magnan, et 4025, obs. G. Viney, RTD Civ., 1997, p. 418, obs. J. Mestre.

Vu l’article 1131 du Code civil ; Attendu, selon l’arrêt infirmatif attaqué, que la société Banchereau a confié, à deux reprises, un pli contenant une soumission à une adjudication à la société Chronopost, venant aux droits de la société SFMI ; que ces plis n’ayant pas été livrés le lendemain de leur envoi avant midi, ainsi que la société Chronopost s’y était engagée, la société Banchereau a assigné en réparation de ses préjudices la société Chronopost ; que celle-ci a invoqué la clause du contrat limitant l’indemnisation du retard au prix du transport dont elle s’était acquittée ; Attendu que, pour débouter la société Banchereau de sa demande, l’arrêt retient que, si la société Chronopost n’a pas respecté son obligation de livrer les plis le lendemain du jour de l’expédition avant midi, elle n’a cependant pas commis une faute lourde exclusive de la limitation de responsabilité du contrat ; Attendu qu’en statuant ainsi alors que, spécialiste du transport rapide garantissant la fiabilité et la célérité de son service, la société Chronopost s’était engagée à livrer les plis de la société Banchereau dans un délai déterminé, et qu’en raison du manquement à cette obligation essentielle la clause limitative de responsabilité du contrat, qui contredisait la portée de l’engagement pris, devait être réputée non écrite, la cour d’appel a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi : CASSE ET ANNULE (…)

Document 9 : Ch. Mixte, 22 avril 2005, JCP, 2005.II.10066, obs. G. Loiseau, RDC, 2005, p. 651, avis R. de Gouttes, p. 673, obs. D. Mazeaud, et 752, obs. Ph.

Delebecque, RTD Civ., 2005, p. 604, obs. P. Jourdain.

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 7 février 2003), que le 31 décembre 1998, la société Dubosc et Landowski (société Dubosc) a confié à la société Chronopost un pli destiné à la ville de Vendôme, contenant son dossier de candidature à un concours d’architectes ; que le dossier qui aurait dû parvenir au jury avant le 4 janvier 1999, a été livré le lendemain ; que la société Dubosc, dont la candidature n’a pu de ce fait être examinée, a assigné la société Chronopost en réparation de son préjudice ; que cette dernière a invoqué la clause limitative d’indemnité pour retard figurant au contrat-type annexé au décret du 4 mai 1988 ; Attendu que la société Dubosc fait grief à l’arrêt d’avoir condamné la société Chronopost à lui payer seulement la somme de 22,11 euros, alors, selon le moyen, "que l’arrêt relève que l’obligation de célérité, ainsi que l’obligation de fiabilité, qui en est le complément nécessaire, s’analysent en des obligations essentielles résultant de la convention conclue entre la société Dubosc et la société Chronopost ; que l’inexécution d’une obligation essentielle par le débiteur suffit à constituer la faute lourde et à priver d’effet la clause limitative de responsabilité dont le débiteur fautif ne peut se prévaloir pour s’exonérer de la réparation du préjudice qui en résulte pour le créancier ; qu’en décidant que faute d’établir des faits précis

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caractérisant la faute lourde du débiteur, le créancier ne peut prétendre qu’à l’indemnisation du prix du transport, la cour d’appel a violé les articles 1131, 1134, 1147 et 1315 du Code civil, 8, alinéa 2, de !a loi du 30 décembre 1982, 1 et 15 du contrat messagerie établi par le décret du 4 mai 1988" ; Mais attendu qu’il résulte de l’article 1150 du Code civil et du décret du 4 mai 1988 portant approbation du contrat-type pour le transport public terrestre de marchandises applicable aux envois de moins de trois tonnes pour lesquels il n’existe pas de contrat-type spécifique que, si une clause limitant le montant de la réparation est réputée non écrite en cas de manquement du transporteur à une obligation essentielle du contrat, seule une faute lourde, caractérisée par une négligence d’une extrême gravité confinant au dol et dénotant l’inaptitude du débiteur de l’obligation à l’accomplissement de sa mission contractuelle, peut mettre en échec la limitation d’indemnisation prévue au contrat-type établi annexé au décret ; Qu’ayant énoncé à bon droit que la clause limitant la responsabilité de la société Chronopost en cas de retard qui contredisait la portée de l’engagement pris étant réputée non écrite, les dispositions précitées étaient applicables à la cause, et constaté que la société Dubosc ne prouvait aucun fait précis permettant de caractériser l’existence d’une faute lourde imputable à la société Chronopost, une telle faute ne pouvant résulter du seul retard de livraison, la cour d’appel en a exactement déduit qu’il convenait de limiter l’indemnisation de la société Dubosc au coût du transport ; D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

Document 10 : Com., 13 juin 2006, Bull. civ. IV, n° 143, JCP 2006, II, 10123, obs. G.

Loiseau, RTDciv 2006, p.773, obs. P. Jourdain.

Vu l’article 1150 du code civil, l’article 8, paragraphe II, de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 et les articles 1er, 22-2, 22-3 du décret 99-269 du 6 avril 1999, applicable en la cause ; Attendu, selon l’arrêt attaqué, que la société Dole froid service a confié à la société Chronopost l’acheminement d’un pli contenant une soumission pour un marché d’équipement de matériel de rafraîchissement et portant la mention : "livraison impérative vendredi avant midi" ; que ce délai n’ayant pas été respecté, la société Dole froid service, dont l’offre n’a pu être examinée, a assigné la société Chronopost service en réparation de son préjudice ; Attendu que pour dire inapplicable la clause légale de limitation de responsabilité du transporteur résultant de l’article 8, paragraphe II, de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 et du contrat type messagerie applicables en la cause et condamner en conséquence la société Chronopost à payer à la société Dole froid service la somme de 6 000 euros en réparation de son préjudice, l’arrêt retient que la société Chronopost, spécialiste du transport rapide garantissant la fiabilité et la célérité de son service, s’était obligée de manière impérative à faire parvenir le pli litigieux le vendredi avant midi à Champagnole, localité située à 25 kilomètres du lieu de son expédition, où il avait été déposé la veille avant 18 heures, qu’elle n’avait aucune difficulté à effectuer ce transport limité à une très courte distance et que, au regard de

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ces circonstances, sa carence révèle une négligence d’une extrême gravité confinant au dol et dénotant l’inaptitude du transporteur, maître de son action, à l’accomplissement de la mission qu’il avait acceptée ; Attendu qu’en statuant ainsi, alors que la faute lourde de nature à tenir en échec la limitation d’indemnisation prévue par le contrat type ne saurait résulter du seul manquement à une obligation contractuelle, fût-elle essentielle, mais doit se déduire de la gravité du comportement du débiteur, la cour d’appel a violé les textes susvisés ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE

Document 11 : Com., 13 février 2007, Defrénois, 2007, p. 1042, obs. R. Libchaber,

JCP, 2007, I, 185, obs. Ph. Stoffel-Munck , et II, 10063, obs. Y.-M. Serinet, RDC, 2007, p. 707, obs. D. Mazeaud, et 746, obs. S. Carval.

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que la société Faurecia sièges d’automobiles (la société Faurecia), alors dénommée Bertrand Faure équipements, a souhaité en 1997 déployer sur ses sites un logiciel intégré couvrant principalement la gestion de production et la gestion commerciale ; que conseillée par la société Deloitte, elle a choisi le logiciel V 12, proposé par la société Oracle mais qui ne devait pas être disponible avant septembre 1999 ; qu’un contrat de licences, un contrat de maintenance et un contrat de formation ont été conclus le 29 mai 1998 entre les sociétés Faurecia et Oracle, tandis qu’un contrat de mise en oeuvre du "programme Oracle applications" a été signé courant juillet 1998 entre les sociétés Faurecia, Oracle et Deloitte ; qu’en attendant, les sites ibériques de la société Faurecia ayant besoin d’un changement de logiciel pour passer l’an 2000, une solution provisoire a été installée ; qu’aux motifs que la solution provisoire connaissait de graves difficultés et que la version V 12 ne lui était pas livrée, la société Faurecia a cessé de régler les redevances ; qu’assignée en paiement par la société Franfinance, à laquelle la société Oracle avait cédé ces redevances, la société Faurecia a appelé en garantie la société Oracle puis a assigné cette dernière et la société Deloitte aux fins de nullité pour dol ou résolution pour inexécution de l’ensemble des contrats signés par les parties ; (…) Mais sur le moyen unique du pourvoi principal : Vu l’article 1131 du code civil ; Attendu que, pour limiter les sommes dues par la société Oracle à la société Faurecia à la garantie de la condamnation de cette société au paiement de la somme de 203 312 euros à la société Franfinance et rejeter les autres demandes de la société Faurecia, l’arrêt retient que la société Faurecia ne caractérise pas la faute lourde de la société Oracle qui permettrait d’écarter la clause limitative de responsabilité, se contentant d’évoquer des manquements à des obligations essentielles, sans caractériser ce que seraient les premiers et les secondes et dès lors que de tels manquements ne peuvent résulter du seul fait que la version V 12 n’ait pas été livrée ou que l’installation provisoire ait été ultérieurement "désinstallée" ;

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Attendu qu’en statuant ainsi, alors qu’elle avait, d’abord, constaté que la société Oracle s’était engagée à livrer la version V 12 du progiciel, objectif final des contrats passés en septembre 1999 et qu’elle n’avait exécuté cette obligation de livraison ni en 1999 ni plus tard sans justifier d’un cas de force majeure, puis relevé qu’il n’avait jamais été convenu d’un autre déploiement que celui de la version V 12, ce dont il résulte un manquement à une obligation essentielle de nature à faire échec à l’application de la clause limitative de réparation, la cour d’appel a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE (…)

Document 12 : Com. 5 juin 2007, JCP, 2007.II.10145, obs. D. Houtcieff, RDC, 2007,

1121, obs. D. Mazeaud et 1144, obs. S. Carval.

Vu l’article 1131 et l’article 1134 du code civil ; Attendu, selon l’arrêt attaqué, que la société Thales communications (la société Thales) a confié à la société Extand, devenue la société General logistics systems France, commissionnaire de transport, le soin d’acheminer des colis vers deux de ses sites où ils ne sont jamais arrivés ; que, contestant l’application de la clause de limitation d’indemnisation stipulée par la convention qui les liait, la société Thales a assigné la société Extand en paiement d’une indemnité égale au prix de ces marchandises ; Attendu que pour rejeter la demande de la société Thales, l’arrêt se borne à retenir que la faute lourde s’entend d’une négligence d’une extrême gravité, confinant au dol et dénotant l’inaptitude du transporteur, maître de son action, à l’accomplissement de la mission contractuelle qu’il a acceptée, que la perte de la marchandise n’est pas considérée comme une faute lourde, spécialement lorsque ni l’expéditeur, ni le transporteur ne connaissent les conditions de cette perte et, enfin, que par suite, le fait qu’un transporteur exagère ses performances dans ses documents publicitaires ou même les contrats qu’il signe, ne suffit pas, tant qu’on ne sait rien de certain sur les raisons de la perte de la marchandise, à constituer une faute assez considérable pour permettre d’écarter la clause limitative de responsabilité qu’il inclut dans les mêmes contrats ; Attendu qu’en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l’impossibilité de localiser les marchandises remises à la société Extand pendant leur acheminement ne constituait pas un manquement de celle-ci à une obligation essentielle permettant de réputer non écrite la clause limitative d’indemnisation, contenue non dans un contrat-type, s’agissant d’un commissionnaire de transport, mais dans la convention liant les parties, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ; PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur la première branche : CASSE ET ANNULE

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Document 13 : Com., 29 juin 2010, CCC 2010, p.28, obs. L. Leveneur, JCP E 2010,

p. 25, obs. Ph. Stoffel-Munck, Gaz. Pal. n°216-217, p.22, obs. D. Houtcieff ; D. 2010, p.1832, obs. D. Mazeaud, RTDciv. 2010, p.555, obs. B. Fages.

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 26 novembre 2008), que la société Faurecia sièges d’automobiles (la société Faurecia), alors dénommée Bertrand Faure équipements, a souhaité en 1997 déployer sur ses sites un logiciel intégré couvrant principalement la gestion de production et la gestion commerciale ; qu’elle a choisi le logiciel V 12, proposé par la société Oracle mais qui ne devait pas être disponible avant septembre 1999 ; qu’un contrat de licences, un contrat de maintenance et un contrat de formation ont été conclus le 29 mai 1998 entre les sociétés Faurecia et Oracle, tandis qu’un contrat de mise en oeuvre du "programme Oracle applications" a été signé courant juillet 1998 entre ces sociétés ; qu’en attendant, les sites ibériques de la société Faurecia ayant besoin d’un changement de logiciel pour passer l’an 2000, une solution provisoire a été installée ; qu’aux motifs que la solution provisoire connaissait de graves difficultés et que la version V 12 ne lui était pas livrée, la société Faurecia a cessé de régler les redevances ; qu’assignée en paiement par la société Franfinance, à laquelle la société Oracle avait cédé ces redevances, la société Faurecia a appelé en garantie la société Oracle puis a assigné cette dernière aux fins de nullité pour dol ou résolution pour inexécution de l’ensemble des contrats signés par les parties ; que la cour d’appel a, par application d’une clause des conventions conclues entre les parties, limité la condamnation de la société Oracle envers la société Faurecia à la garantie de la condamnation de celle-ci envers la société Franfinance et rejeté les autres demandes de la société Faurecia ; que cet arrêt a été partiellement cassé de ce chef (chambre commerciale, financière et économique, 13 février 2007, pourvoi n° Z 05-17.407) ; que, statuant sur renvoi après cassation, la cour d’appel, faisant application de la clause limitative de réparation, a condamné la société Oracle à garantir la société Faurecia de sa condamnation à payer à la société Franfinance la somme de 203 312 euros avec intérêts au taux contractuel légal de 1,5 % par mois à compter du 1er mars 2001 et capitalisation des intérêts échus dans les termes de l’article 1154 à compter du 1er mars 2002 ; Sur le premier moyen : Attendu que la société Faurecia fait grief à l’arrêt d’avoir ainsi statué, alors, selon le moyen : 1°/ que l’inexécution, par le débiteur, de l’obligation essentielle à laquelle il s’est contractuellement engagé emporte l’inapplication de la clause limitative d’indemnisation ; qu’en faisant application de la clause limitative de responsabilité après avoir jugé que la société Oracle avait manqué à l’obligation essentielle tenant à la livraison de la version V 12 en 1999, laquelle n’avait pas été livrée à la date convenue, ni plus tard et que la société Oracle ne démontrait aucune faute imputable à la société Faurecia qui l’aurait empêchée d’accomplir ses obligations, ni aucun cas de force majeure, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, violant ainsi les articles 1131, 1134 et 1147 du code civil ; 2°/ qu’en jugeant que la clause limitative de responsabilité aurait été prétendument valable en ce qu’elle aurait été librement négociée et acceptée et qu’elle n’aurait pas été imposée à Faurecia, la cour d’appel s’est prononcée par un motif inopérant, violant ainsi les articles 1131, 1134, 1147 du code civil ;

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3°/ qu’en jugeant que la clause, qui fixait un plafond d’indemnisation égal au montant du prix payé par Faurecia au titre du contrat des licences n’était pas dérisoire et n’avait pas pour effet de décharger par avance la société Oracle du manquement à une obligation essentielle lui incombant ou de vider de toute substance cette obligation, la cour d’appel a violé les articles 1131, 1134, 1147 du code civil ; Mais attendu que seule est réputée non écrite la clause limitative de réparation qui contredit la portée de l’obligation essentielle souscrite par le débiteur ; que l’arrêt relève que si la société Oracle a manqué à une obligation essentielle du contrat, le montant de l’indemnisation négocié aux termes d’une clause stipulant que les prix convenus reflètent la répartition du risque et la limitation de responsabilité qui en résultait, n’était pas dérisoire, que la société Oracle a consenti un taux de remise de 49 %, que le contrat prévoit que la société Faurecia sera le principal représentant européen participant à un comité destiné à mener une étude globale afin de développer un produit Oracle pour le secteur automobile et bénéficiera d’un statut préférentiel lors de la définition des exigences nécessaires à une continuelle amélioration de la solution automobile d’Oracle pour la version V 12 d’Oracles applications ; que la cour d’appel en a déduit que la clause limitative de réparation ne vidait pas de toute substance l’obligation essentielle de la société Oracle et a ainsi légalement justifié sa décision ; que le moyen n’est pas fondé ; Sur le troisième moyen : Attendu que la société Faurecia fait encore le même grief à l’arrêt, alors, selon le moyen, qu’après avoir constaté que la société Oracle n’avait pas livré la version V 12, en considération de laquelle la société Faurecia avait signé les contrats de licences, de support technique, de formation et de mise en oeuvre du programme Oracle applications, qu’elle avait ainsi manqué à une obligation essentielle et ne démontrait aucune faute imputable à la société Faurecia qui l’aurait empêchée d’accomplir ses obligations, ni aucun cas de force majeure, la cour d’appel a jugé que n’était pas rapportée la preuve d’une faute d’une gravité telle qu’elle tiendrait en échec la clause limitative de réparation ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, violant les articles 1134, 1147 et 1150 du code civil ; Mais attendu que la faute lourde ne peut résulter du seul manquement à une obligation contractuelle, fût-elle essentielle, mais doit se déduire de la gravité du comportement du débiteur ; que le moyen n’est pas fondé ; Et attendu que les deuxième et quatrième moyens ne seraient pas de nature à permettre l’admission du pourvoi ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi.