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Évaluation Conjointe de l’Appui Budgétaire Général Conclusions, recommandations et é l éments de réflexion Conclusions, recommandations et é l éments de réflexion Bruxelles, octobre 2006 Bruxelles, octobre 2006 Nele Degraeuwe Nele Degraeuwe Coopération Technique Belge Coopération Technique Belge Société anonyme de droit public à finalité sociale Société anonyme de droit public à finalité sociale Direction Générale de la Coopération au Développement Direction Générale de la Coopération au Développement Service Public Fédéral Affaires Étrangères, Commerce Extérieur et Service Public Fédéral Affaires Étrangères, Commerce Extérieur et Cooration au Développement Cooration au Développement Service Évaluation Spéciale Service Évaluation Spéciale Service Public Fédéral Affaires Étrangères, Commerce Extérieur et Service Public Fédéral Affaires Étrangères, Commerce Extérieur et Cooration au Développement Cooration au Développement

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Évaluation Conjointe de l’Appui Budgétaire GénéralConclusions, recommandations et éléments de réflexionConclusions, recommandations et éléments de réflexion

Bruxelles, octobre 2006Bruxelles, octobre 2006

Nele DegraeuweNele Degraeuwe

Coopération Technique BelgeCoopération Technique BelgeSociété anonyme de droit public à finalité socialeSociété anonyme de droit public à finalité sociale

Direction Générale de la Coopération au DéveloppementDirection Générale de la Coopération au DéveloppementService Public Fédéral Affaires Étrangères, Commerce Extérieur et Service Public Fédéral Affaires Étrangères, Commerce Extérieur et Coopération au DéveloppementCoopération au Développement

Service Évaluation SpécialeService Évaluation SpécialeService Public Fédéral Affaires Étrangères, Commerce Extérieur et Service Public Fédéral Affaires Étrangères, Commerce Extérieur et Coopération au DéveloppementCoopération au Développement

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ABG Appui budgétaire généralABG/P Appui budgétaire général en PartenariatAT Assistance techniqueCAD Comité (de l’OCDE) d’Assistance au Développement CASRP Crédit d’appui à la Stratégie de Réduction de la PauvretéCE Commission européenneCSLP Cadre stratégique de Lutte contre la PauvretéDFID Department for International Development (UK)FMI Fonds monétaire internationalGFP Gestion des Finances publiquesOCDE Organisation pour la Coopération et le Développement économiquePAF Performance Assessment Framework (Cadre d’évaluation de la performance)RC Renforcement de la capacité

LISTE DES PRINCIPAUX SIGLES UTILISÉS

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Le présent document a été réalisé par Nele Degraeuwe. De 2003 à 2006, elle a fait partie de la cel-lule Appui budgétaire de la CTB et elle a été membre du comité chargé de la gestion journalière de l’évalua-tion conjointe de l’appui budgétaire général dont il est question dans ce document. Comme elle a pu suivre de près tout le processus d’évaluation, elle était donc bien placée pour en faire une synthèse adaptée au contexte belge.

Le texte a été analysé par un groupe de travail mixte composé de représentants de la DGCD, du service Évaluation spéciale et de la CTB. Nous remercions tout particulièrement Johan Debar pour sa contribution.

Les deux adresses suivantes sont à votre disposition pour faire part de vos réactions ou de vos demandes d’information: [email protected]

[email protected]

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Sommaire

Liste des principaux sigles utilisés Couverture

Introduction 3

1 Conclusions et recommandations 61.1 Principales conclusions générales 61.2 Effets attendus de l’ABG/P 61.3 Conditions d’accès 71.4 Inputs - structure de l’ABG/P 91.5 Évaluation de la performance, conditionnalités et

modalités de décaissement 141.6 Dialogue politique et technique - suivi par les bailleurs 171.7 Approche graduelle 181.8 Problèmes de données 191.9 Coûts de transaction 19

2 Conclusions et recommandations au regard du contexte belge 22

2.1 Le cadre belge pour l’appui budgétaire 222.2. Questions soulevées par le Vademecum 22

Bibliographie 24

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En 2004, un groupe comportant 24 bailleurs1 et 7 gouvernements de pays partenaires2 a commandité une ‘Évaluation conjointe de l’Appui budgétaire général’ au Burkina Faso, au Malawi, au Mozambique, au Nicaragua, en Ouganda, au Rwanda et au Vietnam pour la période 1994 - 2004.

L’idée de soumettre l’appui budgétaire général à une évaluation d’une telle ampleur a vu le jour lors d’une réunion du ‘Development Evaluation Network’ de l’OCDE (OCDE/CAD). L’ABG/P (Appui budgétaire général en Partenariat) suscite de grandes attentes qui résultent de l’idée qu’il peut apporter une réponse à des faiblesses observées dans des formes antérieures de programmes d’aide (“Programmes d’ajustement structurel”) et dans d’autres modalités. L’objectif était d’analyser dans quelle mesure et dans quelles circonstances l’ABG/P peut être un moyen pertinent, efficient et efficace pour produire un impact durable sur la lutte contre la pauvreté, ainsi que sur la croissance.

L’étude s’est faite sous les auspices de l’International Development Department de l’Université de Birmingham, par un consortium regroupant Mokoro, Ecorys, Nordic Consulting Group et Development Research Network. Elle a débouché sur un rapport de synthèse et sept rapports nationaux3.

L’appui budgétaire général a été défini comme suit: “aid funding to government that is not earmar-ked to specific projects or expenditure items. It is disbursed through the government’s own financial management system. The finance is accompanied by other “inputs”: conditions and procedures for dialogue, donor efforts to harmonise their aid and align it with national policies and procedures, and technical assistance and capacity building.” Vers la fin des années 90, on a vu apparaître un ‘ABG nouveau’, également appelé ‘ABG en Partenariat’ (ABG/P), en réponse à l’insatis-faction suscitée par de précédents instruments. Ce partenariat s’oppose aux conditionnalités imposées durant la période des programmes d’ajustement structurels. L’ABG/P vise à soutenir les stratégies de réduction de la pauvreté des gouvernements des pays partenaires.

Les évaluateurs sont partis d’un cadre d’évaluation logique reflètant les effets potentiels de l’ABG/P. Ce cadre comportait 6 niveaux (contexte initial, inputs de l’ABG/P, effets directs, outputs, résultats, impact) ainsi qu’un schéma détaillé qui rendait compte des liens de causalité entre ces niveaux.

Le chapitre 2 contient les principales conclusions, réflexions et recommandations de l’étude. Au chapitre 3, celles-ci sont mises en regard avec le cadre belge en vigueur pour l’appui budgétaire. L’objectif est que ce docu-ment touche un public large en Belgique. Comme l’appui budgétaire belge sera évalué en 2007 et qu’un nouveau cadre est en préparation, le présent document doit aussi être vu comme un premier pas dans un processus plus global.

1. Allemagne, Australie, Autriche, Belgique, Canada, Danemark, Espagne, États-Unis, France, Irlande, Japon, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Portugal, Royaume Uni, Suède, Suisse, Commission européenne, Inter-American Development Bank, FMI, Japan Bank for International Cooperation, OCDE CAD et Banque mondiale.2. Burkina Faso, Malawi, Mozambique, Nicaragua, Rwanda, Ouganda et Vietnam.

3. Pour les rapports, voir: www.oecd.org/dac/evaluationnetwork

INTRODUCTION

Introduction

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Conclusions et recommandations

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1.1 Principales conclusions généralesLes conclusions générales sont basées sur des constatations faites au Burkina Faso, au Mozambique, en Ouganda, au Rwanda et au Vietnam4. Pour le Nicaragua, il a été décidé qu’il était prématuré de tirer des conclu-sions étant donné que l’ABG/P n’y a été introduit que récemment. Au Malawi, une première tentative d’ABG/P a immédiatement été suspendue en raison de prévisions trop optimistes quant à la discipline macro-économique, à des problèmes de gouvernance et au manque de discipline fiscale du gouvernement.

L’évaluation globale de l’ABG dans les cinq pays a été positive. Malgré de grandes différences de contexte et de structure de l’ABG/P, les évaluateurs ont pu dégager un certain nombre de constats généraux :(a) L’ABG/P peut apporter une réponse pertinente à certains problèmes bien connus touchant à l’efficacité de l’aide;(b) L’ABG/P peut être une manière efficiente, efficace et durable de soutenir des stratégies nationales de réduc-

tion de la pauvreté;(c) L’octroi de fonds discrétionnaires par des systèmes publics produit des effets systémiques sur la capa-

cité - surtout sur la capacité de Gestion des Finances publiques (GFP) - à l’échelle de l’ensemble du gouvernement;

(d) L’ABG/P tend à améliorer la qualité de l’ensemble de l’aide par les effets directs et indirects qu’elle exerce en terme de cohérence, d’harmonisation et d’alignement;

(e) L’efficacité de l’ABG/P pour réduire la pauvreté dépend de la stratégie soutenue. Étant donné le biais des premières stratégies de réduction de la pauvreté, qui étaient axées sur l’expansion des services publics, les effets de l’ABG/P ont surtout été d’élargir l’offre de services et l’accès à ceux-ci plutôt que d’accroître les revenus ou les moyens d’action des plus pauvres;

(f) En tirant des leçons de l’expérience, l’appui budgétaire peut devenir plus efficace et revêtir une portée plus large. Il est important de ne pas surcharger cet instrument d’objectifs irréalistes ou de réformes excessives;

(g) Les avantages de l’appui budgétaire ne sont pas éclipsés par des effets secondaires non désirés tels que la corruption, la fragilisation des recettes fiscales, un manque de prévisibilité ou un découragement de l’in-vestissement privé. Comme pour tous les instruments d’aide, il convient cependant de tenir compte de ces risques au moment de lancer des programmes d’ABG/P;

(h) Tel qu’il est utilisé pour l’instant, l’appui budgétaire est vulnérable face à certains risques - surtout politi-ques - qui compromettent sa capacité à constituer une modalité d’appui à long terme;

(i) L’appui budgétaire étant une forme d’approche-programme, les constats qui concernent l’ABG/P peuvent aussi s’appliquer à l’approche-programme en général.

Ces conclusions sont valables pour l’appui budgétaire général au BURKINA FASO, au MOZAMBIQUE, en OUGANDA, au RWANDA et au VIETNAM !!!

Elles peuvent être utiles pour d’autres modalités et d’autres pays, mais la prudence reste de mise.

Les constatations et les conclusions de ces rapports sont celles des évaluateurs et ne peuvent en aucun cas être attribuées aux agences/bailleurs qui ont financé l’étude.

1.2 Effets attendus de l’ABG/P

L’évaluation a mis en évidence que l’appui budgétaire possède un potentiel (voir 2.1), mais qu’il doit être jugé en fonction de ses mérites propres, selon des attentes réalistes et un calendrier raisonnable pour permettre sa matérialisation. Les principaux effets positifs dans les cinq pays étudiés où l’ABG/P a bien démarré sont les suivants:

une forte incidence sur la promotion de l’harmonisation entre les bailleurs et de l’alignement de leurs pro-grammes sur la politique publique, telle qu’elle est définie dans les cadres stratégiques de lutte contre la pauvreté (CSLP). Ces effets d’harmonisation et d’alignement vont au-delà de l’ABG/P lui-même;

CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS

4. La Belgique a des programmes de coopération bilatéraux dans ces cinq pays, mais n’octroie un ABG qu’au Mozambique.

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un accroissement des fonds discrétionnaires dans le budget public;un effet sur le processus budgétaire et sur la politique menée (cohérence et qualité) grâce à une plus grande autonomie et à des incitants donnés à des organes de décision qui jouissent d’un plus grand nombre de garanties quant aux moyens disponibles pour renouveler leur politique5 ;la réorientation de ressources publiques vers des priorités stratégiques, un accroissement des moyens disponibles pour certains services ou un effet de rétablissement de l’équilibre budgétaire (efficience de l’allocation globale);un meilleur équilibre entre les investissements et les dépenses courantes, une baisse des coûts de tran-saction pour les pouvoirs publics (efficience opérationnelle);des effets systémiques sur les systèmes publics et les institutions qui recourent à l’appui budgétaire, surtout pour la GFP;des effets positifs sur les systèmes de GFP et sur la capacité, grâce à des inputs de l’assistance technique et du renforcement de la capacité, et une insistance sur la GFP dans le dialogue et la conditionnalité, avec pour conséquence une diminution du risque fiduciaire6 ;une plus grande transparence des dépenses publiques et des normes plus élevées en matière de compta-bilité et de reporting;des comptes plus clairs rendus par les agences sectorielles aux autorités centrales.

Un certain nombre d’effets attendus de l’ABG/P n’ont pas pu être vérifiés dans les pays étudiés:la stabilité macro-économique et la discipline fiscale avaient déjà été instaurées dans les cinq pays dans lesquels l’ABG a fait l’objet d’une évaluation positive. Ce résultat n’a donc pas pu être mis au crédit de l’appui budgétaire, d’autant plus que celui-ci a échoué à produire ces effets au Malawi. L’appui budgétaire (fonds et conditions) a toutefois contribué au maintien de la stabilité et de la discipline;l’ABG/P a eu peu d’impact sur la croissance économique et la pauvreté étant donné qu’il a financé des stratégies axées sur le développement des services;les évaluateurs n’ont pas pu isoler de lien clairement identifiable entre les inputs de l’ABG/P et la réduc-tion de la pauvreté, bien qu’il y ait manifestement des rapports entre l’ABG/P et un élargissement de l’éventail des services de base. Ce constat s’explique entre autres par la difficulté de pouvoir disposer de données fiables et par des problèmes de temps et de méthodologie. Cela ne signifie pas que l’ABG/P n’ait eu aucun effet sur la pauvreté, ou moins d’effet que d’autres modalités d’appui;on n’a pas observé d’effet immédiat de l’ABG/P sur l’amélioration de la pauvreté. Certains effets limités contribuent aux conditions de base d’une amélioration de la pauvreté, comme le financement et la recons-titution des systèmes de sécurité et de l’appareil judiciaire au Rwanda, et le soutien à la décentralisation en Ouganda. Les effets plus larges sur les mécanismes de contrôle et de transparence sont minimes. Dans la mesure où une amélioration est tout de même intervenue, elle était souvent d’ordre quantitatif plutôt que qualitatif et elle n’était pas nécessairement due à l’ABG/P.

L’évaluation a formulé des recommandations qui visent aussi bien à renforcer les effets positifs qu’à produire des effets qui n’ont pas pu être observés jusqu’ici (voir 1.4.2.).

1.3 Conditions d’accès

L’évaluation a conclu que les appuis budgétaires ont été fournis dans des contextes très différents. On observe que les bailleurs décident d’accorder ou de maintenir leur appui budgétaire en se basant sur la situation particulière d’un pays et pas sur le fait que celui-ci réponde ou non à une série de conditions requises (critères d’admission).

Les bailleurs procèdent fréquemment à des analyses techniques des systèmes de GFP, mais sans appliquer d’exi-gences absolues de qualité avant d’accorder un appui budgétaire. Ils s’intéressent moins au niveau absolu des performances qu’à l’évolution de la gestion du pays et à la probabilité d’une amélioration des normes ainsi qu’au rôle potentiel que les mesures d’ABG/P peuvent jouer à ce niveau7. La capacité d’un pays à bénéficier ou non de l’appui budgétaire peut aussi être évaluée différemment d’un bailleur à l’autre.

——

5. par l’effet systémique d’une injection de fonds discrétionnaires supplémentaires dans des pro-cessus de planification et de budgétisation.

6. Définition : “Fiduciary risks are commonly defi-ned as the risk that funds are not used for the intended purpose, do not achieve value for money, or are not properly accounted for “ (DFID)

7. Au Mozambique et au Rwanda, par exemple, l’ABG a entraîné des résultats positifs, avec une accélération des réformes et un renforcement des finances publiques, mais ces deux pays n’auraient sans doute pas satisfait à une liste standard de cri-tères d’admission pour pouvoir bénéficier de l’ABG.

Chapitre 1: Conclusions et recommandations

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Même si les études de cas n’ont pas permis de dresser une liste de conditions standard, l’évaluation montre que les bailleurs ont tenu compte (ou auraient dû tenir compte), implicitement ou explicitement, de certaines condi-tions que le pays et la relation d’aide doivent remplir avant de pouvoir entamer une politique d’appui budgétaire, au risque, sinon, que cet instrument perde de son efficacité.

Ces conditions fondamentales portent sur les aspects suivants:

VOLONTÉ ET ENGAGEMENT POLITIQUE= Un engagement sincère du gouvernement à élaborer et à mettre en œuvre une stratégie de lutte contre la pauvreté8;= Un engagement sincère du gouvernement à collaborer avec les bailleurs pour la mise en place des conditions préalables à l’appui budgétaire (entre autres dans le dialogue).

Cet engagement indispensable du gouvernement du pays partenaire ne peut pas être acheté avec l’appui budgé-taire, mais doit provenir de l’intérieur. Comme le disent les évaluateurs: “l’ABG/P ne transforme pas les réalités politiques sous-jacentes; ceci représente une aspiration irréaliste pour toute forme d’aide.”. Il est capital de construire et de maintenir une relation de confiance entre les bailleurs et le gouver-nement. Les bailleurs doivent avoir confiance dans l’engagement du gouvernement à combattre la pauvreté et le gouvernement doit avoir l’assurance que les bailleurs qui se lancent dans un programme d’ABG/P le font dans une optique d’engagement à long terme. Ce degré ‘d’appropriation’ et cet engagement à mettre effectivement en œuvre une politique sont difficilement mesurables. En outre, il est tout aussi crucial de savoir dans quelle mesure il s’agit d’une politique de qualité et opérationnelle. L’évaluation a mis en évidence une grande diversité d’un pays à l’autre sur le niveau auquel la politique est véritablement ‘portée’, a été correctement élaborée et est opérationnelle. Elle indique que l’ABG/P a contribué à un meilleur alignement de l’aide, mais encore faut-il connaître la valeur de ce sur quoi on s’aligne (voir 1.4.2.).

Remarque: Le ‘gouvernement du pays partenaire’ n’est pas une entité unique. La politique repose toujours plus ou moins sur un certain nombre d’institutions ou de ministères. Il faut cependant qu’il y ait une dynamique, ce qui implique que des individus doivent s’engager à mener la stratégie de lutte contre la pauvreté.

L’importance des analyses politiques

Les analyses politiques sont très importantes pour vérifier la volonté et l’engagement politique. Elles n’ont pas été effectuées de manière approfondie dans le passé et les risques politiques ont été insuffisamment calculés, ce qui peut entraîner un gaspillage des fonds consacrés au développe-ment. L’absence d’une définition explicite des ‘lignes rouges’ a souvent provoqué le retrait inopiné de bailleurs et a engendré des problèmes9. Cela soulève des questions quant à la compétence des bailleurs. Les ‘lignes rouges’ doivent être tracées de manière plus explicite afin que le gouverne-ment du pays partenaire sache clairement ce que les bailleurs considèrent comme une dérive de la situation politique (p.ex. des dépenses publiques en faveur de la défense nationale) (voir 1.5). La corruption peut également saper la confiance entre le gouvernement et les bailleurs, avec un risque d’incidence négative sur l’aide publique dans les pays donateurs. Les évaluateurs recommandent de procéder à davantage d’analyses (conjointes) de la corruption et de son impact sur les pauvres (p.ex. pour les services), même si elle est très difficile à mesurer. L’évaluation a constaté que l’ABG/P est vulnérable lorsque les relations politiques se détériorent, ce qui est de nature à compromettre le potentiel de l’appui budgétaire en tant qu’instrument à long terme10.

8. Même si celle-ci exige souvent de douloureuses et complexes mutations bureaucratiques, avec de profondes conséquences sociales, politiques et économiques.

9. Les analyses des bailleurs doivent dépasser les seuls aspects politiques: “Une meilleure compré-hension politique et une connaissance technique plus détaillée sont nécessaires pour informer les jugements des bailleurs sur ce qui est pertinent, ce qui est possible et ce qui va marcher.”10. On peut lire ce qui suit dans les directives du CAD à propos des bonnes pratiques: “Political conditionality should not be specifically linked to budget support or any individual aid instrument, but rather be handled in the context of the overar-ching policy dialogue between a partner country and its donors”. L’expérience montre que ce n’est pas faisable en pratique compte tenu de la sensibi-lité politique à ce sujet dans les pays donateurs.

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CAPACITÉ= Une capacité institutionnelle suffisante pour offrir aux bailleurs une garantie raisonnable d’une utilisation efficiente et efficace de leurs fonds (‘value for money’), conformément à la stratégie de lutte contre la pauvreté et à la justification de celle-ci.

Le gouvernement du pays partenaire doit également disposer de la capacité nécessaire pour mettre en pratique sa stra-tégie de développement. Il faut que les bailleurs croient en la faisabilité des programmes de réformes en préparation ou en cours et soient convaincus que le gouvernement est en mesure de les réaliser, moyennant des programmes de ren-forcement de la capacité. L’évaluation a montré que les bailleurs analysent surtout les systèmes de gestion financière et s’intéressent plutôt aux évolutions des indicateurs qu’aux niveaux absolus de performance dans les différents domaines.

STABILITÉ MACRO-ÉCONOMIQUE= y compris une discipline fiscale élémentaire.

Des problèmes macro-économiques, tels qu’une forte inflation ou de graves déficits budgétaires, peuvent donner un caractère moins durable aux résultats des programmes de développement. Les pays où l’ABG/P a été appli-quée jouissaient déjà d’une stabilité macro-économique. Il n’existe pas encore d’exemples de pays où l’ABG/P a entraîné cette stabilité et il convient donc de faire preuve de prudence à cet égard. Des volumes importants d’appui budgétaire peuvent poser des problèmes dans des pays dépendants de l’aide si la stabilité macro-écono-mique est insuffisante. Le contrôle d’un équilibre macro-économique est un élément essentiel du dialogue entre bailleurs et pays partenaire. Au sein de la communauté internationale, la responsabilité du contrôle de la politi-que macro-économique est du ressort du Fonds monétaire international (FMI), qui émet chaque année à ce sujet une ‘consultation article IV’. L’évaluation recommande aux bailleurs d’exploiter la fonction de signal qu’exerce le FMI en termes de suivi, de reporting et d’avis relatif à la performance macro-économique11.

Les bailleurs doivent aussi tenir compte des éventuels coûts macro-économiques de l’aide: de grands volumes d’aide peuvent provoquer des problèmes tels que le Dutch disease12, dissuader le gouvernement de percevoir des recettes fiscales et décourager l’investissement privé.

La volonté et l’engagement politique d’une part, la capacité de l’autre sont donc considérés comme deux critères essentiels, mais difficilement mesurables, qui permettent à l’appui budgétaire de contribuer à lutter efficace-ment contre la pauvreté. En outre, le nouveau paradigme de l’aide, dont fait partie l’appui budgétaire, vise à ren-forcer aussi bien la capacité que l’engagement des pays partenaires13. C’est pourquoi il est important d’effectuer suffisamment d’analyses et de les interpréter en connaissant la situation de chaque pays concerné.

1.4 Inputs – structure de l’ABG/P

1.4.1 Inputs et structure

L’évaluation a observé une grande diversité dans la structure des opérations d’appui budgétaire d’un pays et d’une période à l’autre. On retrouve dans toutes ces ‘structures’ un ensemble d’éléments - fonds, dialogue, conditionnalités, harmonisation, alignement et assistance technique/renforcement de la capacité - qui consti-tuent un important dénominateur commun. Ils doivent tous être présents pour que l’on puisse parler d’ABG/P, qui est en fait un label de qualité pour un instrument d’aide (qui diffère qualitativement d’autres formes d’aide programme14). Cet instrument a pour principales caractéristiques son orientation de soutien à des stratégies nationales de réduction de la pauvreté (CSLP), son orientation vers le renforcement de la capacité du gouverne-ment à promouvoir un développement pro-pauvre, son approche systémique15 du renforcement de la capacité, l’accent qu’il met sur les résultats (par le lien entre la politique et sa mise en œuvre), son souci de la gestion des finances publiques16 et son intention explicite d’améliorer la qualité et l’efficacité de l’aide dans son ensemble par une meilleure harmonisation et un meilleur alignement, mais aussi, plus fondamentalement, en initiant un cercle vertueux entre le renforcement de la capacité du gouvernement et l’amélioration de la qualité de l’aide.

11. Voir 2.5. pour le lien entre les conditions du FMI et les décaissements d’appui budgétaire.

12. Dutch Disease: lorsque de grands volumes d’appui budgétaire entraînent une appréciation du cours de la devise et une demande accrue de bien non-commercialisables (par rapport aux biens commercialisables), deux effets apparaissent qui hypothèquent à leur tour la croissance du sec-teur privé. Cet effet n’a pas été observé dans les pays concernés par l’étude. En outre, il n’est pas propre à l’appui budgétaire, mais est une consé-quence possible du volume total des flux d’aide au développement.13. Molenaers et Renard (2006a)

14. La différence entre l’ABG/P et des formes anté-rieures d’aide programme réside essentiellement dans la liaison entre les moyens financiers et un ensemble plus large d’intrants afin d’assumer ensemble la responsabilité de parvenir à des résul-tats (partenariat).15. L’approche systématique repose sur le principe selon lequel des systèmes se renforcent lorsqu’ils sont utilisés.16. Ce souci résulte d’une part des risques fiduciai-res, lorsque des fonds sont confiés à des systèmes nationaux de GFP, et d’autre part de la fonction du budget, qui fait le lien entre la politique et sa mise en œuvre.

Chapitre 1: Conclusions et recommandations

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1.4.2 Possibilités d’amélioration des inputs & de la structureFeed-back et apprentissageDans tous les pays étudiés, la structure de l’appui budgétaire a été adaptée au fil de la période observée. Les systèmes de ‘revue de la performance’ et le dialogue sont importants pour faciliter un processus d’amélioration. Il convient surtout de renforcer les mécanismes nationaux de contrôle, par exemple par une meilleure adéquation entre les systèmes d’évaluation des performances de l’ABG/P et les systèmes nationaux, et par des mesures com-plémentaires qui renforcent la transparence (voir plus loin sous ‘complémentarité’). Pour le cercle vertueux entre le renforcement de la capacité du gouvernement et l’amélioration de la qualité de l’aide dont il a été question ci-dessus, il importe aussi de développer de solides mécanismes de remontée d’information permettant de vérifier si la spirale positive se maintient et si le gouvernement du pays partenaire ainsi que les bailleurs assument leurs responsabilités dans le partenariat.

Contenu et qualité de la politiqueL’ABG/P n’est pas en soi une stratégie de développement, mais un moyen d’appui à une stratégie nationale de réduction de la pauvreté. L’efficacité de l’appui budgétaire est donc fonction de la qualité de cette stratégie et des processus et institutions qui la sous-tendent17.

La qualité de la stratégie de réduction de la pauvreté dépend des éléments suivants:Son degré de faisabilité opérationnelle.Une stratégie réaliste de réduction de la pauvreté doit être basée sur des stratégies sectorielles opération-nelles et être correctement budgétisée. L’appui budgétaire - ou la stratégie elle-même - est souvent sur-chargé de programmes de réformes. Or, il y a des limites à la capacité d’absorption des réformes, quels que soient l’engagement et la motivation du gouvernement partenaire. La capacité disponible doit démontrer si une stratégie de réduction de la pauvreté est réalisable. Son équilibre (p. ex. entre croissance et services, entre secteurs…)Lorsque l’appui budgétaire est critiqué parce qu’il accorde une trop grande attention à l’extension des services sociaux – ce qui ne serait pas une stratégie de développement crédible - et parce qu’il néglige la croissance, le secteur privé et des secteurs productifs tels que l’agriculture, dont dépen-dent la croissance et la réduction de la pauvreté, ces critiques s’adressent en réalité à la politique du gouvernement. Les CSLP s’intéressent beaucoup aux services de base parce qu’ils sont politique-ment attrayants, tant pour les bailleurs que pour les gouvernements des pays partenaires (l’initiative des ‘Pays pauvres lourdement endettés’ a également contribué à cette distorsion), et on privilégie sou-vent la quantité sans améliorer la qualité de ces services et leur accessibilité pour les plus pauvres. Cet accent mis sur les dépenses pro-pauvres a fréquemment fait preuve d’un simplisme dangereux. Ainsi, la mise en œuvre d’un enseignement primaire généralisé a inévitablement entraîné un accroissement de la demande au niveau de l’enseignement secondaire, qui, lui, ne faisait pas partie de la stratégie.L’évaluation constate que cette distorsion était inévitable dans la première génération de CSLP et que le développement quantitatif des services passe de toute manière avant l’amélioration de leur qualité: pour ceux qui n’y avaient pas accès auparavant, la quantité est aussi un gage de qualité.

Les stratégies de réduction de la pauvreté restent très faibles dans la plupart des pays et il est peu probable que l’appui budgétaire puisse être rapidement généralisé. L’ABG/P peut favoriser la réorientation de futures stratégies de réduction de la pauvreté vers un meilleur équilibre entre stratégies de croissance et stratégies d’expansion des services, ce qui est d’ailleurs déjà le cas dans de nombreux pays18 (par exemple au Rwanda, en Ouganda, au Mozambique et au Vietnam). Il peut soutenir des mesures adéquates pour s’attaquer aux problèmes de qualité19,d’efficacité et de réactivité pro-pauvres des services. En outre, il est possible de débattre de mesures politiques qui favorisent la croissance et qui ne sont souvent pas coûteuses20. L’ABG/P a aussi les moyens de mettre à l’ordre du jour des questions transversales et des les harmoniser entre les bailleurs. Le suivi, le dialogue, les enquêtes de contrôle et les analyses peuvent être très utiles pour mettre en œuvre toutes ces améliorations (potentielles). Il faut cesser de promouvoir des dépenses pro-pauvres simplistes en effectuant des analyses sectorielles plus

17. “ABG is as good or as bad as the systems it uses and the PRSP it supports”.

18. Les services continueront de toute manière à absorber l’essentiel des dépenses publiques parce que ‘the demand for policy is not symmetrical with the demand for public expenditures’.19. L’accroissemement des dépenses publiques peut s’avérer inefficiente lorsqu’on ne remédie pas à temps à des facteurs limitatifs (comme la for-mation des enseignants) du côté de l’offre. L’appui budgétaire permet de s’attaquer à ces problèmes de capacité d’absorption.20. “Many of the things that a growth strategy requires (better business environment) depend on government actions and/or policy changes (rule of law, deregulation, anti-corruption measures). These are often cross-agency issues that can usefully be raised in cross-agency partnership forums, and supported by PGBS dialogue and conditionality”.

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approfondies et éviter de se concentrer sur des sous-secteurs sans envisager le contexte plus large, établir des stratégies durables à long terme et examiner leurs implications budgétaires. Les conditions de développement du secteur privé doivent être examinées pour que l’accent puisse être mis sur le manque de revenus et les répercussions des dépenses publiques sur la croissance. Enfin, il faut examiner comment l’appui budgétaire peut compléter d’autres mécanismes dans tous ces domaines (voir sous ‘complémentarité’).

Assistance technique / Renforcement de la capacité (AT/RC)21

L’une des idées-clés de l’appui budgétaire est de fournir une aide de manière à développer la capacité systé-mique du gouvernement. Dans tous les pays étudiés, le manque de capacité est perçu comme un problème. L’évaluation estime que l’AT/RC est l’input le moins bien intégré de l’appui budgétaire. Les initiatives d’AT/RC visaient essentiellement des instances (financières) centrales, surtout dans le contexte de la GFP. Étant donné que les réformes de GFP jouent un rôle central dans le développement de la capacité nationale à faire de la ges-tion axée sur les résultats et qu’un renforcement des systèmes de GFP réduit le risque fiduciaire (pour toutes les formes d’aide et pour les ressources du gouvernement lui-même), il faut exploiter le potentiel de l’ABG à agir dans ce domaine. Par ailleurs, l’AT/RC a été limitée pour les instances sectorielles et les autorités locales, en dépit des besoins.

L’évaluation recommande de:rechercher une plus grande cohérence et une meilleure coordination entre le gouvernement du pays par-tenaire et les bailleurs (d’ABG ou non) dans l’application d’une AT liée à la GFP (idéalement via une straté-gie cohérente et explicite de RC, pilotée par le gouvernement et en partie financée par les bailleurs);soutenir le renforcement de la capacité par l’utilisation de systèmes publics, et donc accroître les aides qui s’inscrivent dans les plans et les budgets élaborés22

accorder une plus grande attention, dans la stratégie AT/RC, aux ministères sectoriels, aux autorités loca-les23 et aux fournisseurs de services, et ne pas se focaliser sur les seules agences financières et les agences de planification;interpréter la GFP au sens large, en s’intéressant aussi à l’analyse politique, à la budgétisation et à la ges-tion des dépenses. Une mission importante consiste à améliorer le lien, souvent précaire, entre ces trois éléments en soutenant le développement d’une planification plus efficace des dépenses à moyen terme24.Cela permettra de remédier aux problèmes qui résultent d’une planification déficiente, par exemple une baisse de qualité des services au moment où leur quantité augmente. Au Rwanda et au Burkina Faso, une gestion inefficace des dépenses a affaibli les flux d’aide jusqu’au niveau des services.

L’évaluation préconise un suivi commun (bailleurs + gouvernement du pays partenaire) des normes de GFP plutôt que des évaluations parallèles faites par différents acteurs. Les indicateurs PEFA (Public Expenditure & Financial Accountability) constituent une méthode largement acceptée d’évaluation des systèmes de GFP. L’évaluation du risque fiduciaire devrait aussi se faire du point de vue de toutes les parties prenantes, et pas seulement des bailleurs.

Mesures d’accompagnementLe risque existe que les gouvernements des pays partenaires fournissent trop peu d’efforts pour s’assurer des recettes complémentaires (provenant par exemple de leur propre population) lorsqu’ils reçoivent des volumes importants d’appui budgétaire. Même si l’évaluation n’a pas trouvé de preuves en ce sens, il y a un risque qu’un flux garanti d’ABG/P sape ces efforts à long terme. C’est pourquoi l’évaluation conseille d’accompagner l’ABG/P de mesures visant à renforcer les institutions chargées de la collecte des recettes et d’inclure la ‘performance des recettes’ dans les indicateurs qui font l’objet d’un suivi.

Vision à long termeCertains des effets majeurs – parce que systémiques – de l’ABG/P sont intrinsèquement des effets à long terme. La persévérance est nécessaire pour obtenir des effets institutionnels.

21. L’assistance technique (AT) est incarnée par des personnes et peut mener ou non à un renfor-cement de la capacité (RC). Celui-ci peut aussi être obtenu sans AT. Bien qu’il s’agisse donc de deux concepts distincts, ils ont été regroupés lors de l’évaluation (AT/RC).

22. Cette relation est bidirectionnelle: comme d’autres mécanismes, l’appui budgétaire est vul-nérable si les systèmes de GFP sont faibles; d’un autre côté, les modalités de l’aide peuvent renfor-cer ou affaiblir ces systèmes, avec des implications pour toutes les dépenses publiques. L’existence à grande échelle d’une aide projet non budgétisée limite les effets potentiels de l’appui budgétaire sur la capacité23. Parallèlement à la mise en œuvre de processus de décentralisation, il est important de renforcer la capacité des autorités locales en matière de planification et de gestion des dépenses ainsi que de garantir des mécanismes adéquats et fonction-nels de suivi, de transparence et de redevabilité au niveau local. Même en Ouganda, où le processus de décentralisation est avancé, l’intérêt accordé aux problèmes de capacité au plan local n’est pas proportionnel aux responsabilités confiées à ce niveau. Il en va de même au Rwanda et au Burkina Faso.24. Il convient de souligner à cet égard l’impor-tance des « Cadres de Dépenses à Moyen Terme » (CDMT), qui sont une clé de la budgétisation basée sur des objectifs politiques. Seul l’Ouganda dispose d’un CDMT clair. Mais le recours à un CDMT n’est pas une simple réforme technique: il exige aussi un leadership solide de la part du gouvernement.

Chapitre 1: Conclusions et recommandations

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Souvent, des stratégies cohérentes à long terme de bailleurs sont compromises par un horizon à court terme au niveau de la gestion, par une rotation rapide du personnel et par d’autres éléments liés aux structures ins-titutionnelles d’incitation. De plus, les stratégies d’ABG/P sont soumises à des changements de régime ou de conception dans les pays donateurs. L’appropriation de l’appui budgétaire en tant que modalité varie fortement d’un donateur à l’autre, et même pour différentes interventions d’un même donateur. Ceux-ci ne sont d’ailleurs pas encore en mesure d’approuver des cycles d’appui budgétaire pluriannuels qui faciliteraient la planification des dépenses à moyen terme.

Les évaluateurs estiment qu’il faut des stratégies et des instruments (d’appui budgétaire) à long terme pour garantir aux gouvernements des pays partenaires qu’ils disposent d’une source de financement stable pour les dépenses liées aux Objectifs du Millénaire pour le Développement et destinées à des services publics sociaux ou autres (allant au-delà du moyen terme). Ces instruments doivent tenir compte de critères de durabilité, d’exigen-ces financières et d’une répartition équilibrée des dépenses entre différents sous-secteurs. La dépendance par rapport à l’aide et la capacité d’absorption sont deux aspects qui doivent certainement être pris explicitement en considération dans ces stratégies d’aide à long terme.

Un engagement à long terme est une condition indispensable pour accorder un appui budgétaire, même dans des états fragiles où le contexte politique est difficile. On a déjà dit plus haut que les risques politiques pou-vaient hypothéquer la possibilité d’utiliser l’appui budgétaire comme modalité à long terme. Ces risques résul-tent davantage de la relation politique sous-jacente entre les partenaires que d’aspects techniques de la per-formance. Ils doivent être pris en compte dès la conception des opérations d’appui budgétaire. Les bailleurs bilatéraux conditionnent l’aide officielle à des principes de base relatifs aux standards de gouvernance et de respect des droits humains. On observe une tendance à rendre ces principes plus visibles dans un Protocole d’accord (ou ‘Memorandum of Understanding’) et dans des accords bilatéraux. Pourtant, l’évaluation a observé que les risques politiques restent souvent sous-estimés et insuffisamment pris en compte dans la structure de l’appui budgétaire.

Interaction avec d’autres modalités de l’aide - complémentarité - portefeuilles d’aideOutre la cohérence entre les modalités de l’aide proprement dites, les effets de l’ABG/P ont amélioré le contexte pour utiliser toutes les formes d’aide (et les ressources du gouvernement lui-même), notamment en renforçant les systèmes de GFP et en améliorant les liens entre la politique et l’utilisation des fonds (meilleure efficience allocative et opérationnelle). Certains effets de l’ABG/P sont consolidés par des inputs d’autres modalités de l’aide, entre autres dans le renforcement de la capacité. Dans d’autres cas, des modalités se sont plutôt ren-forcées mutuellement, par exemple lorsque des inputs politiques de l’ABG/P ont favorisé une meilleure prise en compte de questions transversales (comme le VIH/SIDA).

Les évaluateurs constatent qu’il y a de grandes complémentarités potentielles entre les modalités de l’aide, mais qu’elles ne sont pas étudiées et exploitées de manière systématique dans les stratégies de gestion de l’aide, ni au niveau national ou sectoriel, ni à l’intérieur de portefeuilles de donateurs. Concrètement, on peut se baser sur les lignes directrices suivantes, inspirées de l’évaluation (et d’autres sources), pour rechercher une plus grande complémentarité entre l’ABG/P et d’autres modalités:

De nombreux bailleurs pensent que l’appui budgétaire sectoriel permet un engagement technique plus approfondi et plus large dans des questions de politique sectorielle et un dialogue plus efficace avec un éventail de parties prenantes sectorielles plus large qu’avec l’ABG25. L’évaluation a cependant observé que la distinction entre appui budgétaire général et sectoriel n’était pas toujours claire: on a plutôt affaire à un spectre qui passe progressivement d’une modalité à l’autre.Les bailleurs ont avancé les mêmes arguments pour les interventions au niveau des autorités locales (p. ex. au Mozambique)Les projets sont sans doute la meilleure forme d’appui pour des entités situées à l’extérieur du secteur public, comme les ONG et les associations du secteur privé. Mais au sein du secteur public aussi, des projets peuvent être appropriés pour des activités convenues d’un commun accord, lorsqu’un partenaire

25. Voir le texte du “SPA workshop on Sector Budget Support”, octobre 2005

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du développement est mieux placé pour les gérer: par exemple pour des projets d’AT, des projets d’in-frastructure à grande échelle ou des projets pilotes dans lesquels certaines innovations (améliorations de la qualité) au niveau de la fourniture des services doivent être testées avant d’être généralisées par le gouvernement26. Les retours d’information vers le niveau politique sont essentiels à cet égard. “SISTAFE” au Mozambique est un exemple de la façon dont un projet d’assistance technique en matière de GFP est introduit dans le contexte de l’ABG. L’impact et l’efficacité de tels projets dépendent de leur qualité et de leur intégration dans le fonctionnement des pouvoirs publics. Les projets d’AT/RC empiètent souvent sur l’input de AT/RC dans le cadre de l’ABG/P, ce qui rend difficile la distinction entre eux.Des projets similaires dans d’autres domaines que la GFP pourraient aussi être liés à l’ABG, par exemple pour développer des systèmes de Monitoring & d’Évaluation ou, de manière plus large, pour renforcer la capacité institutionnelle, un facteur crucial de mise en œuvre des programmes.L’appui budgétaire est le mieux placé pour financer des services publics (surtout des dépenses courantes). Il peut ainsi constituer l’instrument adéquat dans le cadre de la campagne pour les Objectifs du Millénaire pour le Développement. En effet, l’aide projet ne permet qu’une extension d’échelle très partielle des inter-ventions étant donné qu’un développement rapide des projets est difficilement maîtrisable. Il y a cependant une condition à remplir pour que l’appui budgétaire puisse réaliser cette extension d’échelle: il faut des garanties de qualité en matière de politique sectorielle et nationale27. De manière générale, l’appui budgé-taire est considéré comme un mécanisme extrêmement efficace dans le cadre de l’accroissement de l’aide.Les bailleurs doivent mener des stratégies ambitieuses de lutte contre la corruption en s’appuyant sur les possibilités de complémentarité entre des modalités. En conjonction avec d’autres instruments, ces stratégies doivent exploiter le potentiel de l’appui budgétaire à renforcer les systèmes de GFP, y compris au niveau des marchés publics. Des projets spécifiques et une AT sont aussi nécessaires pour soutenir les institutions chargées du contrôle des dépenses (agences d’audit, parlements, etc.) et les organisations concernées de la société civile. Les ONG sont les mieux placées pour cela. Il faut en outre davantage d’en-quêtes communes sur la corruption.

Comme les différentes modalités sont appréciées en fonction de leurs caractéristiques propres, l’évaluation recommande de développer des stratégies d’aide qui optimalisent la complémentarité entre les instruments tant au niveau national que sectoriel. Des portefeuilles d’aide comprenant un éventail équilibré d’opérations permet-tent d’aborder au travers d’autres modalités des problèmes que l’ABG/P ne peut pas traiter.

L’appui budgétaire s’inscrit dans un contexte où tous les bailleurs interviennent. Il est donc important de tenir compte des interactions et des chevauchements entre différents instruments et modalités (non seulement des variantes de l’aide programme, mais aussi des projets, etc.). Dans certains pays partenaires de la Belgique où les conditions préalables à l’appui budgétaire ne sont pas remplies (comme des pays fragiles qui ne font pas partie de l’évaluation), l’aide projet peut être une modalité de coopération utile pour d’autres buts que ceux décrits ci-dessus. Il se peut également que l’ABG/P ou d’autres formes d’appui budgétaire ne fassent pas partie du portefeuille d’aide.D’après l’évaluation, , il y lieu d’examiner les interactions entre différents mécanismes d’aide préalablement à l’octroi d’un ABG/P et d’en tenir explicitement compte.

La composition des portefeuilles d’aide peut s’inspirer des lignes directrices suivantes: un poids excessif des aides à l’investissement (notamment via des projets) peut avoir pour effet que le gouvernement bénéficiaire ne puisse pas mobiliser assez de moyens pour rendre ces investissements opérationnels ou pour les entretenir, à cause d’un manque de fonds discrétionnaires pour les dépenses courantes. Ceci peut compromettre la durabilité des projets. Un bon équilibre entre l’aide projet et l’appui budgétaire peut remédier à ce problème.Les bailleurs imposent souvent leurs propres priorités sectorielles dans leur aide projet. Faute d’une bonne coordination, aucun mécanisme ne garantit que la somme de toutes ces priorités particulières répond bien aux besoins globaux du pays. Une fois de plus, on ne peut que souligner l’importance de l’appui budgétaire et de ses mécanismes de dialogue pour assurer cet équilibre du portefeuille.

26. Voir le texte “New style projects – How to make projects more effective for development”, Paul Bossyns et al., BTC discussion and reflection paper, 2006.

27. Dans la plupart des pays bénéficiares, les stra-tégies de réduction de la pauvreté restent très faibles et il est donc peu probable que l’ABG sera rapidement généralisée.

Chapitre 1: Conclusions et recommandations

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Un nombre excessif de projets différents dans le portefeuille peut entraîner des coûts de transaction élevés et hypothéquer la durabilité de ces projets s’ils sont disproportionnés par rapport aux procédures de retour d’information et à la capacité d’absorption du gouvernement. Les projets pilotes susceptibles de contribuer à un réajustement politique doivent prévoir des mécanismes de retour d’information. Les projets AT/RC en matière de GFP ou de Monitoring & d’Évaluation supposent un bon niveau technique et doivent être bien intégrés. Cette discussion doit certainement amener la Belgique à remettre en question la multi-plicité de ses projets d’aide (mais non l’aide par projets en tant que telle), en particulier leurs mécanismes parallèles de gestion et leurs coûts de transaction et à rechercher la durabilité de ses inerventions.

En matière de ciblage des fonds, l’évaluation préconise de faire preuve de pragmatisme. L’ABG est politiquement très vulnérable parce qu’il identifie le bailleur à tout ce que fait le gouvernement du pays partenaire. Le ciblage sectoriel réduit cette vulnérabilité. Afin de renforcer le soutien politique et de montrer clairement les intentions du financement, les bailleurs peuvent procéder à un ciblage virtuel sur des secteurs tels que la santé et l’en-seignement où les besoins sont grands et le soutien politique solide. Le ciblage peut servir à rassurer l’opinion, dans les pays donateurs, que l’aide est affectée à des secteurs prioritaires, même si - pour des raisons de fongi-bilité - il s’agit d’un financement général du budget public.

Le ciblage virtuel de fonds permet d’exercer une certaine influence par le dialogue et par des objectifs de per-formance pouvant être évalués. Les bailleurs peuvent donc suivre ce que font les gouvernements des pays béné-ficiaires par rapport au financement total du secteur et en discuter, comme ils peuvent le faire pour les plans de dépenses sectoriels à moyen et à long terme (qui intègrent la perspective d’une diminution de la dépendance de l’aide à long terme) et pour le mécanisme sectoriel de dialogue et d’assistance technique complémentaire.

Le marquage (virtuel ou réel) n’est en aucun cas une garantie contre la fongibilité. Le ‘confort’ fiduciaire qui va de pair avec les contrôles distincts et le compartimentage de l’aide a des limites: ces contrôles distincts ne s’at-taquent pas aux faiblesses sous-jacentes des systèmes de GFP et peuvent mêmes les aggraver. Le ciblage réel peut d’ailleurs compliquer la gestion du Trésor public dans des pays où des économies doivent être effectuées dans le courant de l’exercice budgétaire. Dans ce cas, en effet, le Trésor est contraint d’imputer toutes les éco-nomies aux dépenses qui échappent à la ‘protection’ des bailleurs. Des comptes et des processus budgétaires distincts entraînent des coûts de transaction élevés et risquent de compromettre l’exhaustivité du processus budgétaire national.

Nombre de bailleursLe nombre de bailleurs fluctue fortement d’un pays à l’autre. Au Rwanda, il n’y avait que quatre bailleurs de l’ABG/P alors qu’au Mozambique on n’en dénombrait pas moins de seize. Si l’évaluation ne se prononce pas vraiment sur le nombre idéal de bailleurs, elle conseille néanmoins à ceux-ci de ne pas tous ajouter d’autres indi-cateurs au PAF (Performance Assessment Framework) dans le cadre du suivi et des décisions de décaissement.

1.5 Evaluation de la performance, conditionnalités et modalités de décaissementLa logique de l’appui budgétaire implique une harmonisation entre les systèmes d’évaluation de la performan-ce des bailleurs et ceux du gouvernement. La question qui se pose est de savoir ce qui doit être contrôlé et par qui, et comment des conditionnalités peuvent lier des décisions de décaissement à des évaluations de la performance.

Lorsque cette harmonisation se fait au moyen d’un CSLP, c’est l’Annual Progress Report (APR) qui devrait assu-mer la fonction d’évaluation de la performance. Les bailleurs ont peu recours aux APR parce que ceux-ci contien-nent surtout des indicateurs d’impact qui, par définition, envisagent des résultats à long terme mais ne don-nent pas d’indications annuelles de progression pouvant être liées à des décaissements. De plus, ces données

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sont en général difficilement disponibles et de médiocre qualité. Les résultats et l’impact sont importants, mais il faut aussi suivre d’autres stades dans la chaîne de développement qui va de la mise en œuvre des straté-gies jusqu’aux résultats obtenus28. C’est ce qui explique la création de ‘Performance Assessment Frameworks’ (les PAF) dans le cadre de l’appui budgétaire.

Les PAF ont deux fonctions distinctes et pas toujours compatibles. D’une part, ils permettent de suivre les pro-grès et, en fonction de cela, d’ajuster la politique et la mise en œuvre. D’autre part, ils fournissent une base pour les décisions de décaissement des bailleurs. L’évaluation a identifié quatre approches pour lier l’évaluation de la performance à des décisions de décaissement:

La Commission européenne et certains bailleurs bilatéraux (comme la Suisse) utilisent un ‘mécanisme de réponse différencié’. Ce mécanisme combine une tranche fixe virtuellement garantie, qui est versée tant que les exigences en termes de politique nationale, de politique macro-économique et de GFP sont respectées, et une tranche variable dont la valeur est déterminée par la performance réalisée selon des indicateurs quantitatifs au niveau des résultats. Il y a une discussion sur l’utilité de ces tranches variables et la CE elle-même ne se montre pas unilatéralement positive à propos de ce mécanisme. L’utilisation d’indicateurs de résultats pour les tranches variables fait aussi l’objet de débats. En effet, ces indicateurs posent des problèmes de disponibilité des données, il faut du temps pour que les effets soient mesurables à ce niveau et il est difficile d’éliminer l’influence de facteurs externes. L’existence parallèle d’un appui budgétaire général et sectoriel facilite aussi l’utilisation de réponses graduelles.Le FMI analyse les conditions structurelles et macro-économiques pour les programmes de réduction de la pauvreté et de croissance (PRGF);La Banque mondiale recourt à un système d’actions politiques préalables pour les Crédits d’Appui à la Stratégie de Réduction de la Pauvreté;Des bailleurs bilatéraux procèdent à des évaluations générales des progrès dans la stratégie de lutte contre la pauvreté et basent leurs décisions de décaissement sur cette évaluation globale. À l’intérieur de cette approche, il y a toutefois des différences entre bailleurs (p.ex. Danida a décidé, contrairement aux autres bailleurs, de ne pas faire de versement au Mozambique en raison d’un audit défavorable).

Ces différentes approches coexistent et peuvent être toutes liées à un seul et même PAF (comme au Mozambique). Les bailleurs peuvent se faire leur propre opinion sur les informations des PAF qui servent à établir une série commune d’indicateurs de performance. Même si les décisions de décaissement de différents bailleurs se basent toutes sur cet instrument, elles n’en sont pas moins prises indépendamment les unes des autres. La question de savoir dans quelle mesure les indicateurs de performance doivent aussi conditionner les décaissements est fondamentale dans la structure de l’ABG/P et pour la nature du partenariat qu’il incarne. La diversité dans l’ap-plication des conditionnalités, de l’évaluation de la performance et des décaissements a pour effet que l’ABG/P n’est pas vraiment harmonisé. On pourrait donc en conclure qu’il y a encore moyen de pousser beaucoup plus loin cette harmonisation, mais il convient aussi de se demander si une harmonisation complète est souhaitable. Il y aurait un grand risque pour le pays partenaire si tous les bailleurs mesuraient les mêmes indicateurs de la même manière et s’en servaient de manière unanime pour baser leurs décisions de décaissement29. Certains éléments gagneraient certainement à être harmonisés, comme le fait que les conditionnalités soient liées au même PAF, mais la non-harmonisation d’autres éléments (procédures de décaissement) est moins importante et réduit le risque d’une volatilité extrême.

En plus des approches décrites ci-dessus pour lier l’évaluation de la performance à des décisions de décaisse-ment, l’évaluation a trouvé de grandes différences dans la nature des conditionnalités entre les différents pays. Plutôt qu’une dichotomie stricte entre conditionnalité “ancienne” (imposée) et “nouvelle” (en partenariat ou par consensus30), c’est plutôt un spectre de nuances diverses qui a été observé. La notion d’autonomie du partenaire comporte aussi une tension étant donné que le gouvernement du pays partenaire et les bailleurs peuvent avoir des priorités stratégiques différentes et que les bailleurs sont plus préoccupés par la réduction de la pauvreté que le gouvernement du pays partenaire. Le passé a démontré que les bailleurs ne peuvent pas imposer leurs stratégies à des partenaires qui ne sont pas convaincus31. Il est donc important que les bailleurs et les gouver-nements conviennent d’objectifs (de performance) communs, qui ont une fonction de signal plutôt que de moyen

28. Les PRSP sont peu opérationnels parce qu’ils passent précisément à côté de ce lien entre les intrants et les résultats, et donc aussi de la succes-sion d’actions à entreprendre pour atteindre les résultats. Par conséquent, les APR ne peuvent pas non plus fournir ces informations indispensables pour suivre les progrès accomplis.

29. On parle parfois de ‘menace nucléaire’ pour désigner le risque que tous les bailleurs suspen-dent leurs décaissements.

30. Conditionnalité par consenus: lorsqu’il existe une convergence de vues entre le bailleur et le pays bénéficiaire et qu’elle s’inscrit dans le PAF ou un autre document qui fait l’objet d’un dialogue politique. Voir Molenaers et Renard (2006b).31. Sans compter qu’il est un peu rapide de présup-poser d’office que les bailleurs externes savent ce que les gouvernements devraient exactement faire pour favoriser la croissance, le développement et la réduction de la pauvreté.

Chapitre 1: Conclusions et recommandations

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de pression politique. La conditionnalité peut aider à maintenir l’élan des réformes, mais elle ne crée pas, auprès du gouvernement, la volonté de les mettre en œuvre (alors que cette volonté est supposée présente lorsque les conditionnalités sont négociées). Quant à savoir si les conditionnalités ont vraiment évolué et sont désormais ‘consensuelles’ au lieu d’être imposées, c’est un point de discussion.

L’utilisation de PAF comporte plusieurs risques:“La coexistence d’un CSLP et d’un PAF met l’accent sur la redevabilité vis-à-vis des bailleurs et peut com-promettre l’appropriation du processus”; “La prolifération d’indicateurs dans les PAF reflète le manque d’harmonisation des bailleurs, accroît les coûts de transaction et démontre que la conditionnalité traditionnelle se maintient”;

C’est pourquoi il faut éviter autant que possible que les PAF subsistent comme mécanisme distinct et axé sur les bailleurs. Il est possible de les intégrer dans la nouvelle génération de Stratégies de Réduction de la Pauvreté (le Mozambique et l’Ouganda s’engagent déjà dans cette voie).

Un aspect important pour l’alignement du PAF sur les documents stratégiques du gouvernement est de savoir comment les indicateurs sont choisis et quelles peuvent être les exigences des bailleurs pour ajouter des indica-teurs en termes de détail et de fréquence du suivi ainsi que pour en faire des conditions de décaissement. L’idée directrice devrait être de lier plus systématiquement le PAF à des stratégies visant à développer des systèmes nationaux de Monitoring & d’Évaluation. Il importe aussi de créer des liens entre le dialogue et le suivi central et sectoriel (pas trop d’indicateurs dans un seul PAF central, mais plutôt intégrer des conditions sectorielles dans le PAF central qui conserve un indicateur sectoriel sur la performance globale de ce secteur).

“L’utilisation d’indicateurs de processus tels que les “actions préalables” liées aux Crédits d’Appui à la Stratégie de Réduction de la Pauvreté de la Banque mondiale révélerait des tentatives des bailleurs de fonds pour gérer le processus de développement dans ses moindres détails au lieu de laisser la possibilité au gouvernement du pays partenaire de mettre en œuvre ses propres stratégies (policy interference)”.

C’est un argument pour utiliser plutôt des indicateurs d’output puisque les gouvernements peuvent alors décider eux-mêmes de la manière dont ils veulent parvenir aux résultats à atteindre. Selon ses partisans, ce système est transparent et prévisible dans la mesure où le lien entre les décaissements et la performance est claire-ment défini - mais d’un autre côté, le reporting risque alors d’être davantage une préoccupation que la politique suivie32 . Il n’en reste pas moins important de suivre des indicateurs de processus: les gouvernements en ont besoin pour réajuster leurs propres stratégies. Ces indicateurs peuvent donc parfaitement faire partie d’un sys-tème commun d’évaluation de la performance.

Complémentairement à un PAF contenant des conditions spécifiques pour l’appui budgétaire, un Protocole d’ac-cord décrit les principes sous-jacents33, qui font aussi partie des conditionnalités liées à l’appui budgétaire. Il s’agit surtout de préoccupations politiques et d’exigences de base, telles qu’une gestion macro-économique adé-quate ou la recherche de la réduction de la pauvreté. L’appui budgétaire a déjà été suspendu en raison de fac-teurs politiques qui n’avaient pas été clairement débattus au préalable (cf. Ouganda, Mozambique, Rwanda). Cela a conduit à rendre les accords plus explicites dans le Protocole ou dans une matrice de gouvernance (Ouganda).

Les Protocoles deviennent plus transparents à propos des décisions de décaissement et ont renforcé les procé-dures de dialogue à ce sujet. Les décisions de décaissement prises par les bailleurs deviennent ainsi plus prévisi-bles pour les gouvernements des pays partenaires. Ceux-ci sont moins préoccupés par la multiplicité des règles de décision que par la fiabilité/prévisibilité34 des versements de l’ABG à moyen et à long terme. L’un des objectifs de l’appui budgétaire était de remédier à l’imprévisibilité chronique de l’aide, ce qui permet une affectation plus efficace des moyens disponibles et augmente la crédibilité des procédures de planification et de budgétisation. La prévisibilité de l’aide est d’autant plus cruciale que celle-ci constitue une part importante des ressources du gouvernement.

32. Voir aussi la discussion sur les indicateurs d’ac-tivités (output) et les tranches variables de la CE

33. Au Mozambique, des conditions macro-écono-miques sont aussi intégrées dans le Protocole d’ac-cord sous forme de ‘principes sous-jacents’.

34. Directives OCDE/CAD pour l’aide budgétaire: “aid is predictable when partner countries can be confident about the amounts and the timing of aid disbursements. Aid is volatile when fluctua-tions in aid flows are large, relative to the volume involved”.

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La pratique montre toutefois que la prévisibilité de l’appui budgétaire laisse souvent à désirer. Comme cet appui renforce directement le budget, le non-versement des moyens promis engendre des conséquences immédiates au niveau macro-économique, étant donné l’ampleur des sommes en jeu et leurs effets sur l’économie intérieure et sur les taux d’intérêt (quand un gouvernement souscrit un emprunt auprès de sa population, les taux réels sont poussés à la hausse, ce qui entraîne un surcoût fiscal pour le gouvernement, contraint de payer des intérêts plus élevés sur des montants plus grands). Si le gouvernement ne veut pas recourir à l’emprunt, il doit réduire les dépenses inscrites au budget.

Des mesures visant à pallier ces problèmes ont déjà été prises, tant par des bailleurs que par des gouvernements de pays partenaires. On a ainsi établi des plans de décaissement plus clairs, mieux adaptés aux cycles budgétai-res du pays partenaire et mieux coordonnés entre les bailleurs. Il est important que les conditionnalités soient concrètement et clairement mesurables. Des dispositions empêchent également de suspendre le financement dans l’année, sauf dans ces circonstances extrêmes. Les décaissements sont dès lors liés à la performance de l’année précédente (ces mécanismes de retard ont été intégrés dans le Protocole d’accord au Mozambique) alors qu’aujourd’hui, les décisions de décaissement dépendent souvent du respect des conditions durant l’année en cours. Les gouvernements des pays partenaires prennent également des mesures, par exemple en constituent des réserves qui peuvent être mobilisées pour faire face aux fluctuations de l’aide ou en revoyant systématique-ment à la baisse les prévisions des bailleurs (cf. Ouganda).

L’évaluation de l’ABG (ainsi que d’autres études – SPA Accra) a mis en évidence que, si ces mesures améliorent la prévisibilité à un an, il n’en va pas de même pour la prévisibilité à moyen terme, malgré les tentatives entreprises pour porter l’horizon de planification à 3 ans (p. ex. Mozambique).

L’évaluation recommande de réduire autant que possible le nombre de conditions liées au décaissement et d’en convenir honnêtement avec le gouvernement. Elle déconseille de lier l’ABG à des indicateurs de résultats. Selon les évaluateurs, la décision d’augmenter ou de diminuer l’appui budgétaire devrait reposer principalement sur des évaluations générales de la performance à moyen terme.

Si les conditions auxquelles l’aide est accordée sont clairement établies, le non-versement de l’appui budgétaire est aussi prévisible. Mais dans ce cas, l’appui budgétaire peut devenir volatile, à plus forte raison si les bailleurs harmonisent leurs décisions de décaissement (voir ci-dessus). Un risque particulier apparaît lorsque les bailleurs lient leurs décisions, de manière rigide, aux conditions macro-économiques du FMI. C’est un cas de figure fré-quent, qui a déjà entraîné une volatilité inutile des flux d’aide à court terme. La suspension des décaissements peut encore aggraver une situation macro-économique déjà instable, comme ce fut le cas au Malawi. Des retards bureaucratiques dans l’approbation formelle par le FMI peut aussi ralentir les décaissements d’ABG. Les évalua-teurs, mais aussi le FMI lui-même, demandent dès lors de ne pas suspendre dans l’immédiat les décaissements d’appui budgétaire lorsqu’un pays est menacé de dérapage ou que le FMI ne donne pas tout de suite son aval. Le FMI fait lui-même une distinction entre sa fonction de signal et de facilité financière. Cependant, l’exemple du Malawi montre l’importance de la discipline fiscale comme condition indispensable à l’appui budgétaire. C’est pourquoi on recommande aux bailleurs d’écouter l’avis du FMI, mais de décider en toute indépendance si le non-respect éventuel de certaines conditions doit ou non entraîner une suspension de l’appui budgétaire. Les évalua-teurs préconisent de regarder la performance à moyen terme, d’utiliser l’avis du FMI et d’adapter les volumes d’appui budgétaire en conséquence.

1.6 Dialogue politique et technique - suivi par les bailleurs

L’appui budgétaire accordé sous le label de qualité ‘ABG/P’ n’a pas créé de politiques ou de finalités nouvelles, mais permet un forum pour dialoguer sur la façon de mettre en œuvre la politique. C’est le lieu où il est possible de tendre vers une plus grande cohérence des politiques en utilisant des mécanismes d’action publique. L’ABG/P prévoit aussi des forums pour discuter de questions transsectorielles et coordonner des stratégies sectorielles.

Chapitre 1: Conclusions et recommandations

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Le dialogue accroît la transparence des engagements politiques, que les bailleurs peuvent soutenir et suivre collectivement au moyen des objectifs convenus dans les PAF.

L’évaluation estime que le dialogue lié à l’appui budgétaire sectoriel empiète sur celui relatif à l’appui budgé-taire général, mais qu’ils peuvent aussi être complémentaires (voir la complémentarité sous 1.4.2 possibilités d’amélioration des inputs & de la structure). Comme l’appui budgétaire réunit les fonds des bailleurs et des gouvernements et que le principe de fongibilité joue de toute manière - même si les bailleurs tentent de cibler leur aide - les bailleurs doivent renoncer à vouloir suivre ou contrôler l’usage qui est fait de ‘leurs’ fonds. C’est pourquoi l’évaluation leur conseille de suivre avec le gouvernement du pays partenaire la mise en œuvre de toute la stratégie convenue en commun.

L’approche basée sur le partenariat est très exigeante pour les bailleurs, et surtout pour leurs représentants dans les pays partenaires. Une bonne compréhension du contexte politique et social et du fonctionnement du gouvernement est indispensable, de même que de solides compétences interpersonnelles, une capacité de réflexion à long terme et la faculté de laisser une place à l’autonomie du partenaire. L’évaluation est cepen-dant parvenue au constat que les bailleurs présents sur le terrain manquaient souvent de la compréhension du contexte local pour pouvoir participer à des discussions stratégiques approfondies. L’explication tient certaine-ment à la rotation rapide du personnel et à un manque de mémoire institutionnelle.

C’est la raison pour laquelle la Déclaration de Paris relève le défi suivant: “Une délégation insuffisante de l’auto-rité au personnel sur le terrain des bailleurs, une attention inadéquate portée aux incitations pour des partena-riats de développement efficaces entre bailleurs et pays partenaires”. L’évaluation conseille aussi aux bailleurs qui accordent un appui budgétaire d’accroître le pouvoir de décision de leurs représentations locales.

1.7 Approche graduelle

On a expliqué plus haut qu’il n’était pas possible de définir une liste claire de conditions auxquelles un pays devait satisfaire pour pouvoir bénéficier de l’appui budgétaire. Les évaluateurs ne plaident donc pas pour des critères d’admission stricts. Ils ont cependant défini deux dimensions cruciales lorsqu’on commence à accorder un appui budgétaire dans un pays: la volonté et l’engagement d’une part, la capacité de l’autre (voir 1.3).

Les pays qui souffrent de graves lacunes par rapport à une au moins de ces deux dimensions peuvent générale-ment être regroupés dans l’une des catégories suivantes: état fragile, pays à faible revenu mis sous pression, partenariat difficile, société post-conflit, etc. Selon le raisonnement ci-dessus, ces pays ne peuvent donc pas entrer en ligne de compte pour bénéficier de nouvelles modalités de l’aide, comme l’appui budgétaire général. Des études influentes ont également défendu l’idée que l’aide ne pouvait être efficace que dans des pays bien gouvernés (‘selectivity approach’ - Burnside & Dollar, 2000; Collier & Dollar, 2002) et qu’une bonne gouvernance ne pouvait pas s’acheter avec l’argent des donateurs (Banque mondiale, 2002). Si on peut adhérer à cette posi-tion d’un point de vue analytique, le fait qu’un si grand nombre de pays africains à faible revenu soient exclus de grands volumes d’aide octroyée par le secteur public est politiquement et moralement inacceptable, surtout dans le contexte des Objectifs du Millénaire pour le Développement. Le conseil qui consiste à fournir à ces pays une assistance sous la forme d’une aide projet (Radelet, 2004) est tout aussi décevant pour les partisans du nouveau paradigme (favorisant l’appui budgétaire), pour qui l’aide projet est un échec. L’argument de Radelet (2004) est que les bailleurs doivent mieux adapter leurs modalités d’aide aux conditions spécifiques des pays bénéficiaires. Les instruments d’aide et les stratégies dans les pays ‘bien gouvernés’ et ‘mal gouvernés’ doivent différer sensiblement35 : dans les premiers, les bailleurs doivent accorder l’essentiel de l’aide sous la forme d’en-gagements à long terme pouvant aller jusqu’à l’appui budgétaire général; dans le second cas, de petits projets à court terme mis en œuvre par des ONG seraient plus adaptés.

Même si ces études (comme celle de Burnside & Dollar) ont été mises en doute et si d’autres études ont trouvé une corrélation positive entre l’aide et la croissance36, indépendamment de l’environnement politique, l’idée

35. L’application de stratégies différenciées par les bailleurs entraînera sûrement des changements importants dans les organisations donatrices.

36. Avec des plus-values en diminution.

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selon laquelle l’aide est plus efficace dans les pays qui bénéficient d’une bonne gouvernance et d’une adminis-tration solide a influencé la politique de la Banque mondiale, des banques de développement et des bailleurs bilatéraux. La Banque mondiale a ainsi mis au point, pour la répartition des fonds IDA, un ‘Performance Based Allocation System’ qui repose sur l’évaluation de la politique, des institutions et de la gouvernance37. Comme les pays les plus riches obtiennent de meilleurs scores par rapport à l’indicateur ‘bonne administration’ que les pays pauvres, les bailleurs risquent – en accordant leur aide aux pays les mieux administrés – d’éliminer systémati-quement les pays les plus pauvres, qui sont moins bien gérés mais qui ont le plus besoin d’aide.

L’approche à adopter dans ces pays a récemment donné naissance à une vision nouvelle qui recherche un moyen terme entre le nouveau paradigme de l’aide (CSLP, ABG, etc.) et la poursuite de l’aide projet (Radelet, 2004). Le nouveau paradigme ne peut pas être purement et simplement copié dans ces états fragiles, mais cela ne signifie pas que l’on doive y perpétuer l’aide projet actuelle. L’idée que les principes d’harmonisation et d’alignement puissent au moins s’appliquer dans ces pays est acceptée. Pour peu qu’il y ait un engagement politique et un niveau correct de gouvernance (Grindle, 2004), il est permis d’expérimenter la nouvelle approche même dans des pays où Radelet n’interviendrait qu’au moyen de l’aide projet, mais à une échelle restreinte et de manière graduelle. Dans cette approche incrémentale, le volume et la structure de l’appui budgétaire doivent être adap-tés au contexte du pays. L’augmentation des risques peut être compensée en prévoyant une intensification des contrôles. Dans un pays ‘débutant’, la portée et l’échelle de l’appui budgétaire peuvent être étendues proportion-nellement à l’expérience acquise et au renforcement de la capacité du gouvernement. Il est ainsi possible d’évo-luer graduellement vers un appui budgétaire tel qu’il existe au Mozambique, par exemple, avec des montants plus élevés et qui est basé sur des ‘revues conjointes’ et sur la performance générale.

La Belgique pourrait appliquer ce développement graduel de l’appui budgétaire dans des pays parfois ‘fragiles’ et dépendants de l’aide où elle est un donateur relativement important (comme le Burundi, le Rwanda et le Niger). Certains de ces pays ne peuvent pas bénéficier pour l’instant d’un appui budgétaire belge parce que leurs systèmes de GFP ne sont pas assez performants ou que le gouvernement y est trop faible. Cette approche permettrait de rompre la situation dite de ‘catch 22’: d’une part, ces pays ont un gouvernement et des systèmes trop faibles pour pouvoir bénéficier de l’appui budgétaire, mais d’autre part ils réalisent peu de progrès dans ces domaines parce que la multiplicité des aides projet parallèles ne stimule pas le développement de systèmes publics et peut même parfois l’entraver.

1.8 Problèmes de données

L’évaluation reconnaît le problème des données disponibles, qui sont rares et de médiocre qualité. C’est avant tout un grand problème pour les gouvernements, qui devraient pouvoir réajuster leur politique en se basant sur le suivi des résultats des programmes. D’autre part, le manque de données n’a pas permis non plus aux évaluateurs de démontrer avec certitude l’incidence de l’appui budgétaire sur la pauvreté. Il est important de faire la distinction entre les effets qui ne peuvent pas être démontrés (mais qui sont peut-être réels) et ceux qui sont inexistants. Les maigres données sur les niveaux de pauvreté (enquête de ménages) et les dépenses des pauvres (‘expenditure trackings’) ne permettent pas de mesurer un effet de l’ABG/P sur la pauvreté, ce qui ne signifie pas pour autant que l’ABG/P n’a pas d’effet, ou en a moins que d’autres modalités de l’aide.

1.9 Coûts de transaction

Le caractère très fragmenté de l’aide internationale, avec une multitude de structures de gestion distinctes, de procédures, d’envois, de contraintes de reporting parfois très lourdes etc., entraîne des coûts de transaction38

très élevés pour le pays bénéficiaire. Si la négociation et le suivi de l’ABG/P nécessitent d’importants “coûts de transaction” , ceux-ci sont faibles pour sa mise en œuvre. Toutefois, les coûts de transaction totaux supportés par les gouvernements des pays partenaires ne diminueront pas tant que d’autres modalités restent utilisées parallèlement à grande échelle.

37. Un autre exemple est le récent ‘Millennium Challenge Account’ des États-Unis. Ce nouvel ins-trument permet de fournir une assistance publique au développement à un très petit groupe de pays à faibles revenus qui ont un solide passé en termes de bonne gouvernance, d’investissements sociaux et de politique économique.

38. Dans quelle mesure les coûts du monitoring et du dialogue politique peuvent-ils être assimilés à des coûts de transaction? Ces activités peuvent en effet constituer une importante valeur ajoutée.

Chapitre 1: Conclusions et recommandations

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Conclusions et recommandations au regard du contexte Belge

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2.1 Le cadre belge pour l’appui budgétaireEn 2005, les Ministres de la Coopération au développement et du Budget ont souscrit à un Vademecum de l’appui budgétaire décrivant des lignes directrices et un cycle de gestion. Ce cadre pour la gestion de l’appui budgétaire belge est valable pour la période 2005-2007. Il s’applique aussi bien à l’appui budgétaire général que sectoriel, mais durant cette période, la Belgique a choisi d’accorder surtout un appui budgétaire sectoriel en raison de la nature de ses pays partenaires, qui font principalement partie du groupe des pays à faible capacité institution-nelle, de l’expertise sectorielle belge et du manque d’expérience que la Belgique a de ce nouvel instrument.

La définition de l’appui budgétaire qui est utilisée dans l’évaluation correspond à la manière dont l’appui budgé-taire est défini dans le Vademecum.

2.2 Questions soulevées par le Vademecum

Les recommandations de l’évaluation de l’ABG suscitent un certain nombre de questions à propos du Vademecum et de son application. Ces points devront faire l’objet d’une concertation dans les mois à venir, en vue d’adapter éventuellement le cadre politique belge relatif aux programmes d’appui budgétaire.

La présente note se contente de faire l’inventaire de ces questions:

Critères de sélection des dossiersLe Vademecum propose six critères d’évaluation pour les programmes d’appui budgétaire. Des check-lists ont été établies pour préciser ces critères. L’évaluation recommande de ne pas définir de critères, mais de juger plutôt la volonté politique et la capacité dans les pays partenaires et de les considérer comme des conditions d’admission. Il convient donc de vérifier si les six critères et les check-lists traduisent correcte-ment ces conditions.

L’évaluation préconise aussi de ne pas utiliser de normes absolues, mais de s’intéresser plutôt aux réfor-mes et aux évolutions en cours. Le Vademecum suit cette recommandation.

Prévisibilité de l’aideL’évaluation constate que de nombreux bailleurs ont du mal à assurer la prévisibilité de leur appui bud-gétaire. La ‘bonne pratique’ recommandée consiste, pour les donateurs, à effectuer durant l’année t une évaluation des réalisations pendant l’année t-1 et de communiquer à ce moment-là quelle sera leur inter-vention durant l’année t+1. Le pays partenaire peut alors inscrire ce montant à son budget.

En pratique, la coopération belge éprouve elle aussi des difficultés à donner à ses interventions un carac-tère prévisible. Il faut se demander dans quelle mesure ces difficultés sont dues aux procédures spéci-fiques de mise en œuvre imposées dans le Vademecum et si la ‘bonne pratique’ suggérée ci-dessus est acceptable pour les instances chargées du contrôle budgétaire.

D’autres techniques permettant d’assurer une meilleure prévisibilité, comme le décaissement de l’aide en tranches fixes d’une certaine importance (complétées par de plus petites tranches, variables en fonction de certaines réalisations spécifiques) doivent également être examinées.

Engagement à long terme L’évaluation plaide en faveur de programmes que les bailleurs soutiennent à long terme, c’est-à-dire sur une période supérieure à deux ou trois ans. En effet, beaucoup de réformes ne produisent des résultats mesurables qu’une fois arrivées à leur terme. De plus, comme elles entraînent en général des frais plus élevés dans certains secteurs, un gouvernement a tendance à ne s’engager dans ces réformes que s’il a la garantie de disposer des fonds suffisants sur toute la période concernée.

CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS AUREGARD DU REGARD DU REGARD DU CCCONTEXTEONTEXTEONTEXTE BBBELGEELGEELGE

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Le Vademecum limite la durée des programmes à trois ans. Il convient d’examiner s’il est possible de tra-vailler sur des échéances plus longues et à quelles conditions.

Ciblage et additionnalitéLe cadre politique belge accorde la préférence à l’appui budgétaire sectoriel. Le Vademecum n’indique pas si cette préférence doit se traduire par un ciblage réel ou virtuel des interventions. L’évaluation avance plusieurs arguments pour éviter un ciblage.

Faute de ligne politique en la matière, les instances de contrôle imposent régulièrement comme condition que les fonds belges doivent avoir un caractère “additionnel”. En pratique, il s’avère extrêmement difficile de définir l’additionnalité de manière précise et mesurable. Il s’agit également d’un point qui doit être clarifié par le cadre politique.

Structure des programmesL’évaluation constate que les bailleurs n’ont pas unifié le format de leurs programmes d’appui budgétaire: la structure de ceux-ci diffère d’un pays à l’autre et évolue au fil du temps.

En ce qui concerne le Vademecum, il faut poser la question de savoir s’il est conçu avec suffisamment de flexibilité pour que la Belgique puisse s’adapter aux règles propres à chaque programme particulier. On peut aussi se demander si un cadre politique unique peut comprendre aussi bien l’appui budgétaire général que des fonds communs plus nettement ciblés. Ne court-on pas le risque d’imposer de la sorte des procédures et des critères trop restrictifs pour certains programmes?

Dialogue politique et organismes donateursLe dialogue politique (et, dans le prolongement de celui-ci, une conditionnalité harmonieuse) est au centre de la nouvelle approche de l’appui budgétaire. Les bailleurs attendent de leur partenaire qu’il se montre disposé à et capable de nouer le dialogue sur des projets, des budgets et des résultats. Les évaluateurs font observer que les représentants locaux des bailleurs ne sont pas toujours bien équipés pour s’enga-ger dans un tel dialogue politique: rotation trop rapide du personnel et, par conséquent, mémoire insti-tutionnelle insuffisante du programme, manque de connaissances techniques sur certains aspects des programmes.Le Vademecum contient des indications sur la manière dont la Belgique peut s’organiser pour prendre part à la concertation locale. Il convient d’examiner si ces indications suffisent.

Cohérence entre l’appui budgétaire et les programmes nationauxUne des remarques faites dans l’évaluation est que les bailleurs ont souvent du mal à rechercher une cohérence entre les programmes d’appui budgétaire et le reste de leurs programmes nationaux. Cela peut être lié au fait que l’expérience et les enseignements des projets ne remontent pas suffisamment jusqu’au dialogue politique ou que les actions de renforcement de la capacité sont mal adaptées aux programmes d’appui budgétaire. Le Vademecum n’aborde pas cette question de cohérence. C’est donc un point à appro-fondir à l’intérieur du cadre politique.

Chapitre 2: Conclusions et recommandations au regard du contexte Belge

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www.oecd.org/dac/evaluationnetwork pour tous les rapports et les documents relatifs à l’évaluation

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