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Volvo Powertrain France – Usine Moteurs Renault Trucks SAS

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Volvo Powertrain France – Usine MoteursRenault Trucks SAS

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Respect et affection…

Je me souviens de ce jour de 1990 où je faisais mes premiers pas à l'usinage de l'usine

Moteurs. Mon guide se nommait Monsieur Broux. Il prenait un malin plaisir à passer par

les endroits les plus sales afin de tester les réactions du jeune ingénieur en costume-cravate

que j'étais !

Après un stage ouvrier, j'ai pris la responsabilité de la réorganisation de l'usinage des

couples de ponts. J'intégrais un monde masculin, emprunt de traditions, de fierté,

d'expertise et de convictions.

Toutes ces années, rythmées par des réorganisations, la recherche de toujours plus

de qualité… n'ont pas altéré ces valeurs fortes, véritable colonne vertébrale de l'Usinage.

Témoins les moteurs Legacy qui sont aujourd'hui, alors que les équipes ont beaucoup

bougé, à un niveau de performance exceptionnel.

Philippe Divry,directeur de Volvo Powertrain France

Chapeau ! Malgré les perturbations liées notamment au redéploiement, malgré un outil

de production vieillissant, les usineurs ont su relever un challenge : servir et protéger leur

client.

Cette culture de la rigueur, de la performance, ces valeurs, fortes, apportent déjà beaucoup

au montage. Souvent piliers de ces équipes en cours de constitution, ils apportent une

capacité à manager la qualité, à prendre des responsabilités, à se dépasser… qui nous

aideront, j'en suis persuadé, à réussir nos challenges.

Au moment de tourner cette page de notre histoire commune, nous souhaitions

simplement dire à tous ceux qui partent à la retraite ou qui vont rejoindre d'autres

secteurs de l'usine Moteurs, notre affection, notre respect et nos remerciements.

Christian Lalo,directeur de l'Usine Moteurs

“PréfacesP A R C H R I S T I A N L A L O

E T P H I L I P P E D I V R Y

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Un hommeAu commencement se trouve une passion, celle que Marius Berliet nourrit pour la mécanique.

Il construit son premier moteur en 1894 et le monte un an plus tard sur une voiturette.

En 1902, l'achat des ateliers Audibert et Lavirotte, situés à Monplaisir, ouvre la voie

à la production en grande série. Dès 1906, un parc de 500 machines-outils fait du site

un modèle pour l'époque. En 1913, le complexe industriel emploie 3 500 personnes.

Aux côtés des ajusteurs, dont la tâche était rendue essentielle par la faible précision

des machines, les usineurs, tourneurs, fraiseurs, perceurs et manœuvres tenaient leur rang

dans ce ballet réglé par les contraintes des temps modernes.

Un siteDésireux d'augmenter encore la production, Marius Berliet est décidé à construire l'usine de ses

rêves, lesquels sont largement inspirés par le taylorisme, quintessence de la division du travail et

de l'industrie automobile américaine. Les travaux du site de Vénissieux débutent et s'achèvent

avec la Grande Guerre. 100 ha, 5 000 personnes (en 1918)... Pour l'époque, ces chiffres

donneraient presque le tournis. Une sensation de vertige à laquelle n'échapperont pas les ouvriers

qui, dans les décennies qui suivirent, passeront de Monplaisir à Vénissieux. Tous furent frappés,

à l'instar d'Albert Levet, aujourd'hui monteur moteur, par "la taille du site tout d'abord, mais

aussi le bruit, un vacarme assourdissant [...]. C'était un grand saut dans l'inconnu".

Rationalisation de la production et progrès de l'usinage créent d'énormes besoins en ouvriers

spécialisés. Ceux-ci viennent en nombre du Rhône bien sûr, mais aussi de l'Isère toute proche.

Un savoir-faireLe constructeur lyonnais a besoin d'une main d'œuvre qualifiée, capable de répondre aux

exigences d'une usine moderne. Il institue donc, dès 1908, une école d'apprentis, future école

technique Berliet. Son journal, TAF (pour Tourneur Ajusteur Fraiseur) deviendra l'un des

principaux outils de communication du groupe. Possesseurs d'un véritable savoir-faire, précieux

4 MOTS CROISÉS M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E

Tout véhicule automobile possède un cœur : son moteur. Le rythme de ses battements, de ses mouvements, des pistons aux soupapes, exige l'emploi de pièces parfaites. Perfection que l'on doit aux usineurs, animateurs d'un autre cœur, celui de l'usine, où énergies manuelles et mécaniquess'entremêlent depuis plus d'un siècle. Retracer l'évolution de l'usinage au sein de la division Volvo Powertrain France revient à donner corps à une merveilleuse aventure, technique et humaine.

Pour que jamais la mémoire ne se perde…“

A Monplaisir...

Construction de Vénissieux en 1916

Monplaisir en 1912

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MOTS CROISÉS M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E 5

L’usinage à la VL des années 50, les tours Potter

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et unique, que les anciens se faisaient un devoir de transmettre aux plus jeunes, les usineurs

se font une haute idée de leur tâche. Précision du geste, sûreté de l'œil et sensibilité du toucher

définissent le parfait professionnel. Seule une grande technicité peut donner à l'ébauche, simple

bloc de fonte, l'apparence du moteur qu'il doit devenir.

Une stratégieL’État impose la séparation de Berliet du groupe Citroën-Michelin et sa cession à la Régie

Renault (décembre 1974), Berliet devient Renault Véhicules Industriels en 1978, puis

Renault Trucks en 2004.

Après s’être rapproché de Mack (1992), Renault V.I. devient une filiale du groupe suédois AB

Volvo (2001). Ainsi se met en place une stratégie industrielle industrielle caractérisée par

la mise en commun des ressources humaines, techniques et commerciales. L'usine de Vénissieux

entre alors dans une nouvelle ère, celle de Renault VI Powertrain et, à partir de 2005, celle de

Volvo Powertrain France.

Ces mouvements de surface s'accompagnent d'une profonde évolution de l'usinage que symbolise

l'arrivée, début 1972, des machines à commandes numériques. Quant à l'instauration des UP

(unités de production) et de leurs composantes, les UEP (unités élémentaires de production)

courant 2001, elle constitue un indéniable tournant dans l'organisation du travail. Objectifs :

répondre mieux et plus vite au client, prendre en compte les idées de chacun, développer

les compétences individuelles et collectives. D'où une responsabilisation accrue des ouvriers,

sous la conduite d'un manager, véritable "patron" de l'atelier. De quoi relever avec optimisme

les défis du troisième millénaire.

Une nouvelle page d'histoireLe transfert des Essieux et Ponts à Saint-Priest N° 2 en 1972 et le transfert des boîtes

de vitesses à Andrézieux-Bouthéon ouvrent la voie au projet de réimplantation d'un grand

nombre de postes. Plus d'espace, meilleures conditions de travail, sécurité et efficacité accrues.

L'équation parfaite. "L'usinage fait peau neuve" titre alors Contacts (n° 17, juin 1999),

journal interne de l'usine. Mais le 2 mai 2002, le personnel apprend que Vénissieux devra

se résoudre à conjuguer l'usinage au passé. Évolution inéluctable (l'usine de Skövde en Suède

possède l'ensemble des équipements adéquats) que les décisions relatives à l'avenir industriel

des sites de production des moteurs ne font qu'officialiser. Des stages de découverte des ateliers

de montage sont organisés à l'intention des usineurs. Pour eux, une nouvelle vie commence.

Et pour le site aussi, avec la construction de la nouvelle usine Moteurs, un investissement

de 42 millions d'euros qui permet à Vénissieux de devenir le centre d'excellence pour le montage

des moteurs de 9 à 11 litres destinés aux différentes entités commerciales du groupe Volvo.

Pour l'usinage et le site de Vénissieux, un chapitre de l'histoire s'est définitivement fermé.

Rempli de gestes, de mots, de courage, d'abnégation, de sueurs. De mémoires. D'êtres humains et

de machines dont les relations oscillèrent sans cesse entre lutte et complicité. L'usinage, par lequel

la main de l'homme, façonnant le métal brut et inerte, lui donnait un rôle à défaut d'une vie,

symbolise merveilleusement le triomphe de la civilisation industrielle. Une civilisation dont

l'essor, dans la région lyonnaise, restera à jamais lié aux usines Berliet et Renault Trucks. Mais

derrière cet illustre patronyme se “cachent” des milliers de salariés. C'est à ces femmes et hommes

que cet ouvrage entend rendre hommage. Pour que jamais ne se perde la mémoire de l'usinage.

6 MOTS CROISÉS M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E

Vénissieux en 1960

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MOTS CROISÉS M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E 7

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8 MOTS CROISÉS M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E

Les gestesde l’usinage“

Convoyage du bloc F3 24 soupapes sur le premier tronçon

Fraisage de la face latérale d’un bloc F3 24 soupapes

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MOTS CROISÉS M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E 9

MOTS CROISÉS M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E

Perçage et taraudage

Bloc F3 24 soupapes en cours d’usinage

Fraisage de la face de la culasse Etape intermédiaire d’usinage d’un bloc sans perçage

Bloc terminé en cours de bouchonnage des circuits d’eau et d’huile Bloc en cours de transfert vers l’Ingersoll 2 et 3

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“AMBIANCE

Cédric Favot

"Je suis entré en 2001 après avoir répondu à une annonce. Je connaissais l'entreprise

de nom. Mes parents sont originaires de Lyon et Berliet était dans la famille une

référence, un mythe. Ma première entrée dans les ateliers s'est faite à l'usinage des

blocs F2, après 3 entretiens de recrutement à la porte A. Bruit, vieilles machines,

bleus de travail noirs de poussière, immensité du cadre et des machines. Je passais

de l'atelier de 15 personnes de mon précédent employeur à l'industrie lourde !

J'ai été accueilli par deux chefs d'équipes, anciens de l'école Berliet (Gaston

Roussilloux et Michel Gallien). On sentait toute une histoire derrière eux. Sans y

être allé, elle a déteint sur moi. Ils m'ont transmis le flambeau. Je suis aujourd'hui un

maillon de la chaîne, un maillon d'une famille et d'une histoire."

Albert Levet

"L'usinage des culasses dégageait une poussière noire qui collait partout.

Les bleus tenaient tout seuls ! On se lavait les mains et 3 minutes après, elles étaient

à nouveau noires… D'où l'expression de village nègre."

Gérard Guet

"Il fallait à l'époque mesurer 1,70 m minimum pour travailler à l'usinage sur les

Ingersoll. L'atelier ne comptait que des jeunes et on faisait la java ensemble…

Il nous arrivait de rentrer au petit matin, directement pour travailler !

Les machines étaient neuves, complexes, les montages difficiles, avec des

manipulations nombreuses, des modifications de programmes avec changements

de bandes informatiques… Mais 40 ans après, elles tournent encore !"

Dorian Cochet

"Seuls quelques anciens pratiquent encore des mots de patois comme craspouillat

(un ouvrier sale, comme on l'était à l'usinage de la fonte il y a quelques années),

Cont tec te vé ? (comment ça va ?), Tu drum ? (tu dors ?), Ya soin ? (t'as sommeil ?),

On va s'nala (on va s'en aller)…"

10 MOTS CROISÉS M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E

Gilbert François-Brazier

"Pour les départs à la retraite, on dressait une table au milieu de l'atelier et tout

le monde participait, ouvriers et encadrement réunis. L'un d'entre nous faisait

le barman. Il était chargé de tout organiser, sur son temps de travail ! Et ça durait

bien 2 ou 3 heures puisque tout le monde ne venait pas à la même heure. Cette

tradition est finie depuis bien longtemps. Il faut dire que le flux tendu nous oblige

à respecter une certaine cadence. Et puis, il faut bien avouer qu'il y avait des abus…"

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Sébastien Gomez

"À l'heure de la sortie, on se

massait derrière les portes. Mon

car partait de la porte L. On se

retrouvait au café à la sortie

de l'usine. Le patron servait les

verres sur de grandes tables,

au kilomètre. Et pour gagner

2 minutes et éviter de faire le

tour, il ouvrait ses fenêtres que l'on

enjambait afin de rejoindre le car."

René Barbier

"Porte L, le bistrot "Chez Juju" remportait tous les suffrages à la sortie. Les tables

étaient alignées avec des verres de vin remplis. On buvait son coup en discutant et on

mettait la pièce avant de regagner son car."

MOTS CROISÉS M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E 11

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Michel Gallien

"Il y avait un marché porte B, avenue Pierre Côté, l'un

des plus grands de la région les jours de paye ! Il y

avait aussi des buvettes clandestines… dans l’usine !

ce qui nous obligeait à faire la chasse à l’alcoolisme."

Charles Paillet

"On faisait la queue pour pointer à l’entrée de l’usine, c’était noir de monde plus

de cent personnes dans chaque file. On prenait les cars, parce que la voiture ça coûtait

cher. Le parking des cars était près du château d’eau et il y en avait des dizaines…

C’était impressionnant. Il faut dire que l’usine Berliet était le centre industriel

de la région."

Michel Bournaix

"En 1971, j'ai pris la place de contremaître à l'atelier décolletage. Le jour où cette

activité s'est délocalisée à Blainville, j'ai vu des gens pleurer quand les machines sont

parties... Je ne me doutais pas de l'attachement que les ouvriers portaient à leurs

machines et, au-delà, à leur métier… Et pourtant, je suis né dans une caisse à outil !"

Bernard Perrot-Minot

"À l'époque de la chasse, de la pêche et des foins, l'absentéisme montait en flèche.

Nous avons atteint 22% ! Il faut dire que de nombreux ouvriers étaient d'origine

paysanne. Ceux qui ne s’absentaient jamais avaient la récompense d’un jour de congé

"Bon soldat" qu’on appelait entre nous "jour des cons" car finalement, il valait mieux

se tirer 2 ou 3 jours de "macadam de fantaisie". Ceux-là étaient gagnants mais ils

l’avaient aussi sur la conscience !"

12 MOTS CROISÉS M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E

Michel Regnier

"L'usine de Monplaisir rythmait la

vie du quartier. Tout au long de

l'avenue Berthelot, les bistrots

avec jeux de boules se succé-

daient. À la sortie du travail,

la partie de cartes ou de boules

faisait partie du rituel.

À 10 heures, c'était le casse-

croûte que la plupart prenaient

dans les bistrots alentours."

AMBIANCE

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“”

Nicolas Pinero

"J'ai connu à l'époque des gens qui avaient jusqu'à un mois d'avance de production.

Il faut dire que l'on ne fonctionnait pas en flux tendu et qu'il y avait des aires de

stockage partout ! Tout le monde notait dans un carnet sa fabrication de façon à

contrôler sa paie mais aussi à gérer son temps. Cette avance nous permettait d'être

plus cool les jours où l'on avait moins la forme mais aussi de prendre du temps

pour aider les plus jeunes ou un collègue."

René Barbier

On attendait tous le coup de corne qui annonçait la fin du travail. Il faut s'imaginer

une marée humaine de 10 000 personnes courant vers la sortie ! À l'époque, en 1963,

on travaillait à la journée, de 7h15 à 17h15, soit 9 heures et une heure de pauses

(déjeuner, casse-croûte). Le tout 5 à 6 jours sur 7. Le samedi, c'était de 6 heures à

midi. Soit de 45 à 51 heures par semaine.

Daniel Bergery

"Comme j’avais 17 ans, ils m’ont embauché en tant que jeune ouvrier !

En 1963, il y avait chaque jour des dizaines d’embauches, ça faisait beaucoup

de va-et-vient. À l'époque nous faisions des semaines de 45 heures, de 5 heures à 14 h

et de 15 h à 23 h. Je travaillais même 50 heures parfois…On trouvait un vrai plaisir à

venir travailler, c’était comme ça !

Avoir du travail était important, et travailler

pour la grande maison nous donnait une sorte

de fierté."

Charles Paillet

"On avait un nombre de pièces

à faire. C’était payé à la pièce.

On s’arrangeait entre nous pour

que tout le monde puisse avoir

son quota de pièces et être

payé dignement. Ca créait de la

solidarité entre les gars."

MOTS CROISÉS M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E 13

CADENCES

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14 MOTS CROISÉS M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E

Sébastien Gomez

"On nous avait appris à l'école que la fonte s'usinait à sec. Résultat, à l'usinage, la

poussière de fonte volait partout et se collait à toutes les surfaces. On nettoyait une

table, elle était à nouveau noire 15 minutes après. D'où l'expression de village nègre

pour parler de l'atelier. À partir des années 1985, on a utilisé du lubrifiant et les

conditions de travail en ont été beaucoup améliorées."

Gaston Roussilloux

"Usineur, il y a 20 ou 30 ans était un métier dur, très physique. Il fallait

soulever et transporter des blocs cylindres sur des diables. Des charges qui

pouvaient peser jusqu'à 450 kilos !"

Damien Pinero

"Quand j'ai été embauché en 1967, il n’y avait pas un mètre carré de libre !

Chaque machine avait son opérateur. Il y a aujourd’hui 5 machines pour un

seul homme, et de l’espace tout autour. Les méthodes de travail ont d'ailleurs

complètement changé. Avant, c’était beaucoup de manuel, cela demandait de la

dextérité, du talent, du savoir-faire, tandis que maintenant on appuie sur un bouton,

et le tour est joué… Quand je suis entré à l’usine, je voyais un ouvrier qui “ébavurait”

les dentures des pignons avec une lime à main ! On en est plus là heureusement."

Michel Gallien

"Sur un bloc moteur, le perçage réclamait beaucoup de précision. Le bras de la

perceuse tournait autour d’un axe et il fallait une grande dextérité pour manier la

“radiale” sans utiliser de frein, à la volée, avec toute la force d’inertie de la machine.

Une vraie prouesse ! Aujourd’hui, c’est impensable. On a vu des gars se faire prendre

la manche dans un outil. J’ai même vu un ouvrier se faire proprement déshabiller par

la machine ! Et c’est d'ailleurs ce qui l'a sauvé. Il y avait aussi des machines à laver les

pièces qui dégageaient des émanations qui piquaient les yeux. On rentrait les moteurs

dans la machine (plus de 300 kilos par pièce), le tonneau tournait et, à la fin, l’opérateur

soufflait les trous du moteur un à un, à la soufflette, pour chasser les résidus.

Il y avait plus de 100 trous sur un bloc moteur ! Ça faisait un bruit épouvantable.

Toute la journée, on entendait souffler les gars."

André Desbos

"Mon premier travail était à l'atelier vilebre-

quins. J'avais 17 ans et c'était la première fois que

je me retrouvais entouré de "vieux" ! Mon contremaître

était Louis Bouc et mon chef d'atelier Monsieur Frizon. On était payé au boni,

c'est-à-dire qu'il fallait produire en un temps donné, un nombre de pièces minimales.

Tout ce qui était au-dessus était intégré dans le boni. Et le travail était dur. Le tour

faisait 2,5 mètres de long et il fallait soulever des vilebrequins de plus de 200 kilos

pour les monter sur le tour. Le tout avec un seul palan à chaîne ! Autant vous dire

que le soir, on était content de se coucher…"

““CONDITIONS DE TRAVAIL

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”“

René Barbier

"C'étaient les anciens qui nous "dressaient". Ils nous

montraient les astuces pour devenir un bon usineur

et aller plus vite. Si on était bien vu, ils nous faisaient

voir leurs combines. Sinon, on s'en voyait pour faire

nos pièces. Tout était manuel."

Dorian Cochet

"L'entraide est de plus en plus présente. Avant, c'était

un peu chacun dans son coin. Depuis que nous avons

été labellisés UEP, fin 2003, beaucoup de choses

ont changé. On fait plus confiance aux personnes,

les responsabilités sont plus importantes à tous les

niveaux, le travail est plus valorisant…

Et l'entraide revient car nous sommes dans un vrai

travail d'équipe, avec des missions et des objectifs."

MOTS CROISÉS M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E 15

ENTRAIDEM O T S C R O I S É S - M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E

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François Brazier

"J'ai 23 ans d'usinage sur le site… Mon frère, qui a 5 ans de plus que moi, travaillait

ici. Il me parlait de son métier d'usineur, il me montrait les appareils de mesure, les

pieds à coulisse… Ça a fait “tilt” dans ma tête. Je voulais fabriquer des moteurs, des

pièces, les contrôler !

Après un CAP de fraiseur et mon service militaire, mon frère m'a conduit au bureau

d'embauche de la porte B et j'ai été pris."

Albert Levet

"Je suis entré en 1971 chez Berliet à Monplaisir. Ils venaient à l'époque chercher

les ouvriers dans les campagnes ce qui explique la très forte proportion de personnes

originaires de l'Isère, voire d'une même famille, sur le site."

Bernard Bouvier

"Le jour de mes 18 ans, j'ai rejoint l'usine où travaillaient déjà mon père, mon frère

et mes oncles ! D’abord en stage durant les vacances puis en intérim et enfin

en contrat de six mois jusqu’à mon service militaire. J’ai débuté à l’emboutissage

des cabines à BC3 à Vénissieux."

Gérard Guet

"L'esprit Berliet est encore là. J'ai conduit de nombreux entretiens d'embauche et,

pour beaucoup, le mythe Renault, c'est important. Nous avons l'image d'une grande

maison, d'une grande famille."

“FAMILLE

Gérard Guet

"Mon père travaillait à l'usinage, aux blocs 635. Mon frère travaillait à

St-Priest. Je suis tout naturellement entré chez Berliet. Dès mon premier

contact avec l'usinage, je me suis dit que je ne pouvais pas rester.

Le bruit, les odeurs, la poussière… Je l'ai immédiatement dit à mon père et…

je suis resté 37 ans !"

16 MOTS CROISÉS M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E

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“Sébastien Gomez

"Les grandes grèves ont été des moments marquants. Il faut s'imaginer une marée

humaine traversant les ateliers en hurlant des appels à la grève. Même les chefs

d'équipe nous demandaient de stopper le travail afin de ne pas les provoquer."

Gérard Guet

"En 68, les grévistes ont soudé les portes afin que le travail s'arrête. Pour beaucoup,

bloqués à l'intérieur du site, ça a été la grève forcée. Heureusement, comme nous

étions près des portes, nous avons pu sortir avant leur fermeture. On était jeunes,

on avait besoin d'argent, et 6 semaines sans paye, ça a été dur."

Michel Gallien

"Les conditions de travail étaient dures autrefois. Il y avait une forte solidarité entre

les gars et les banderoles étaient déployées dans l’usine pour un oui ou pour un non.

On était dans un système hiérarchique pyramidal et, avec les syndicats, le rapport de

force (et parfois l'affrontement) était permanent. Les relations étaient tendues, les

gars réagissaient au quart de tour.

Une fois j’ai vu une poupée de chiffon à l’effigie du patron se balancer sur un palan

pour montrer la contradiction des ouvriers avec les décisions prises par la direction…

Charles Paillet

"Les grèves, j’en ai connu plusieurs. Il faut dire que l'on faisait grève pour beaucoup

de raisons dont certaines nous dépassaient largement. Le Chili en 1972, par exemple,

pour protester contre le coup d’état de Pinochet."

Francisco Da Silva

"J'ai été embauché à Monplaisir en avril 1968 ! J'ai donc vécu mes premiers jours de

travail puis mes premiers jours de grève quasiment le même mois… Au bout de 15

jours de grève, je connaissais tout le monde dans l’usine. Il faut dire que ce genre

d’événement rapproche les gens. Les cadres voulaient travailler, bien sur, mais le

piquet de grève les en empêchait.

On se relayait, mais sans casse. On avait le respect de l’outil de travail."

MOTS CROISÉS M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E 17

GRÈVES

André Desbos

En 1968, j'étais dans l'équipe des négociations comme délégué CFDT. La CGT était,

à l'époque, la courroie de transmission du Parti Communiste et ils avaient une

revanche à prendre sur l'histoire après la gestion ouvrière et la restitution à Paul

Berliet de son usine après la guerre. Henri Goutanier, à la porte K, avait déplacé

les grandes lettres lumineuses qui formaient la marque Berliet pour former son

anagramme Liberté ! Nous étions très clairement en conflit avec la CGT qui réclamait

des augmentations de salaire alors que nous nous battions, de notre côté, pour

plus de démocratie dans l'entreprise, condition préalable à une meilleure défense

des salariés. Nos revendications ayant été acceptées, nous avons signé la reprise

du travail."

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“Gérard Guet

"Jusqu'en 1972, la paie était donnée en liquide, tous les

15 jours, dans des enveloppes. Le comptable arrivait

avec une grosse sacoche, il recomptait l'argent de

l'enveloppe et nous la donnait. C'était l'entreprise

qui payait le mieux de la région. Il y avait 3 couleurs

d'enveloppes, en fonction de la somme. L'argent en

poche, on allait faire la java. Mais avant, on passait

au marché de midi pour acheter des objets, de la

nourriture et boire un canon.

En mai 1963, Robert Actis et l'un des ouvriers ont

fait un hold-up. Actis a tué le convoyeur de fonds

puis s'est fait prendre."

Charles Paillet

"Ça payait bien chez Berliet, on ne venait pas par hasard.

On était payé à la quinzaine, avec une enveloppe.

Et puis tous les jours, y avait le marché où l'on trouvait

de tout : fruits et légumes, boulanger, des vendeurs

de journaux, de vêtements, des boissons."

René Benassie

"Autant dire que les jours de paye, la rue entre les

portes B et C était noire de monde. Ouvriers, bien

sûr, mais aussi camelots, paysans venus vendre leur

production, stands d'outillage, de tissus, buvettes…

Une mini ville !"

18 MOTS CROISÉS M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E

JOUR DE PAIEM O T S C R O I S É S - M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E

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MOTS CROISÉS M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E 19

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Albert LevetOn arrivait à Vénissieux en car puis on prenait une navette direction Monplaisir.

Le premier jour, j'étais un peu paumé. J'avais 21 ans et je me retrouvais pour la

première fois dans un grand atelier. Nous usinions de petites pièces, des petites séries,

des prototypes… C'était plus proche de l'artisanat que de la grosse production comme

à Vénissieux. Il n'y avait pas une machine-outil identique."

Claude Gennardi"À Monplaisir, on était en famille. Il faut dire qu'il y avait moins de monde qu'à

Vénissieux. On se connaissait pratiquement tous.

Les anciens nous racontaient les grandes heures de l'entreprise comme la sortie des T 100,

ces camions énormes destinés au désert, pour qui il a fallu abattre des murs

afin de pouvoir les faire sortir du site tellement ils étaient gros.

Il y avait aussi les plaisanteries, comme les batailles d'eau les jours de grand nettoyage

ou les pétards à mèche que l'on mettait sur les butées.

Nous avions aussi nos grandes figures comme M. Chausson dit La Gonfle. Il était très

imposant et fort en gueule. Toujours en tricot de peau, même l'hiver. Il avait été en Russie

et ses doigts de pied avaient gelé. Son contremaître lui avait interdit de se balader en vélo

sans veste l'hiver ! Résultat, le lendemain, il était enrhumé ! Il avait toujours un tas de

bois derrière son vélo."

Michel Regnier"La discipline était l'une des caractéristiques de l'Ecole Berliet. C'était quasi militaire.

Par exemple, nous n'avions pas droit aux cheveux longs. Sinon, on avait un bon de

sortie pour aller chez le coiffeur du coin de la rue. L'atelier de l'école était scindé en

quatre secteurs (tournage, fraisage, ajustage et tôlerie) et on tournait par trimestre

la première année.

On se partageait 50/50 entre l'atelier et les cours : mathématiques, français, technologie

et les bases de la métallurgie et de la mécanique.

À l'issue du CAP, 80% des élèves rejoignaient l'usine, le reste partant en perfectionnement

avant de passer le Bac Pro ou le Brevet Industriel."

20 MOTS CROISÉS M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E

“A MONPLAISIR, L'ECOLE BERLIET

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”MOTS CROISÉS M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E 21

André Desbos"Le choc en arrivant à mon premier jour d'école, à Monplaisir, a été de découvrir des

ateliers en plus des traditionnelles salles de cours. Avec des machines inconnues, du bruit,

des bleus de travail. J'avais 14 ans et j'entrais de plain-pied dans la vie active…

On avait une indemnité horaire qui permettait de couvrir les frais de cantine à midi et le

tramway pour rentrer le soir. La première année était partagée en quatre parties de deux

mois et demi. On découvrait alternativement l'ajustage, le fraisage, la chaudronnerie et

le tournage. En plus des cours en salle de classe."

Michel Bournaix"Je suis rentré à l'usine à 14 ans, en culottes courtes ! Mon père m’a posé le 23 septembre

1960 à 8h30 à l’Ecole Technique Berliet, rue Audibert et Lavirotte. Il y avait trois écoles

de mécanique de bonne renommée dans la région : celle de la SNCF, l’école de la

Métallurgie… et Berliet. Comme j’avais eu l’occasion de visiter l’usine, j’ai pu choisir

en connaissance de cause. À l'époque, on se faisait adopter comme dans une famille."

Michel Bournaix"L'école Berliet était vraiment avantageuse. Elle m’a tout appris : ski, voile, nage,

course à pied, spéléo et… un peu à travailler ! Tout était gratuit, jusqu’aux habits pour

travailler. Ne pas s’inscrire dans les activités de loisirs n’était pas très bien vu.

C’était une école paternaliste. Paul Berliet venait remettre les prix en personne. On nous

inculquait la culture du résultat. Pour entrer à l’école technique, il y avait un concours.

J’ai été reçu 39ème sur 64. En fonction des notes obtenues pendant le cycle court (CAP), on

vous emmenait jusqu’au Brevet Professionnel, mais ils n’en prenaient que 32 sur 64.

J’étais 27ème ! J’ai ainsi pu obtenir 3 CAP : Dessin, Fraiseur, Tourneur ainsi que le

BP de Fraiseur. La mentalité de l’école nous poussait à aller toujours plus loin.

D'ailleurs, sur les 5 collègues qui partageaient le même banc, deux sont devenus

directeurs et deux autres techniciens. Le 5ème, c'était moi !"

Christian Honoré

"À 14 ans, j'ai intégré le Centre d’Apprentissage

Berliet. C’était très familial. C’était l’époque où les

gens rentraient chez Berliet par famille entière.

La discipline était forte ! Un élève qui rentrait

avec les cheveux un peu longs était directement

envoyé chez le coiffeur de la rue Berthelot ! Un

jour, Monsieur Jaboulay, le Directeur de l’école, a

rassemblé tous les élèves devant la Vespa d’un

ouvrier qui y avait collé des décalcomanies. Il les

a gratté devant toute l’école. Au départ, Monplaisir

était un centre d’Apprentissage. C'est devenu une école vers 1956. La France se trouvait

en plein changement au niveau de l’éducation et les Centres d’Apprentissages ont dis-

paru… En 1960, Paul Berliet voulait créer son université. Il avait invité un ministre qui lui a

fait comprendre qu’il n’en était pas question."

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Paul Gibert

"Fin 68, je voulais absolument quitter le massif central pour travailler en ville.

Je revenais du service militaire et j’avais un CAP de fraiseur en poche. J’ai pris mon

sac et je suis venu à Lyon où j’ai passé deux jours et une nuit à la belle étoile. Je me

suis présenté au bureau d’embauche de l’usine Berliet qui jouissait d’une fort bonne

réputation… On m’a fait faire un essai de fraiseur et voilà !"

José Maghalaes

"À 20 ans, j’étais charcutier. Je ne voulais pas travailler le week-end et mon père

travaillait chez Berliet. J’ai donc décidé de changer de métier ! j’ai rejoint l’usine

de Monplaisir où j’ai appris le métier de rectifieur."

Daniel Rey

"J’ai été embauché par Paul Berliet en personne. Je l’ai rencontré grâce à mon chef

de travaux de l’époque, dans l’actuel musée. Je travaillais alors dans l’enseignement

technique auxiliaire et comme j’étais originaire de la Loire, je n’ai pas maîtrisé

l’ampleur de cette rencontre sur le coup… Le plus impressionnant, les premiers

jours, c'était de se retrouver porte B à l’heure du départ. On devait être 12 000

et il y avait 200 cars. J’arrivais de ma campagne, j'étais ébahi !"

Nicolas Pinero

"J'ai démarré sur une Radiale

et je n'arrivais pas à faire mes

pièces. Le régleur est venu me

donner un coup de main et m'apprendre les techniques du métier. Je crois que

j'ai gardé cet état d'esprit. Même si aujourd'hui, les charges de travail sont plus

importantes et que l'on n'a plus vraiment de temps pour les coups de main.

Mais nous sommes tous dépendants les uns des autres."

22 MOTS CROISÉS M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E

“PREMIER CONTACT

Michel Montmain

"Je me souviendrais toujours du jour où j’attendais

de passer au bureau d’embauche de l’immense

porte B. Quand elle s’est ouverte pour l'heure

du déjeuner, j’ai vu arriver de front une "meute"

d’ouvriers qui couraient comme des gamins sauf

qu’ils avaient de 30 à 50 ans !

C’était impressionnant !"

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Jean-Pierre Pontvianne

"À l'Ecole Berliet, l'ambiance

était stricte. Tout le monde

en blouse, interdiction des

cheveux longs. C'était le

formatage Berliet. Mon

premier travail à Monplaisir

consistait, sur un petit tour,

à redresser la face avant

et à faire un chanfrein

sur de petites bagues en

acier. 8 heures de travail,

30 secondes par pièce…

Faites le calcul pour connaître

les volumes quotidiens !"

Frédéric Perrot

"En arrivant ici, tout juste sorti de l'école, j'ai été frappé par les mains des anciens : il

leur manquait fréquemment des bouts de doigts. Je me suis alors dit que c'était peut-

être le prix à payer pour devenir un bon usineur."

Albert Levet

"Le transfert à Vénissieux, deux ans avant la fermeture de Monplaisir, a été un

choc. La taille du site, tout d'abord, mais aussi le bruit, un vacarme assourdissant,

la poussière de fonte, noire, les copeaux… C'était un grand saut dans l'inconnu.

L'usinage des culasses de fonte dégageait une poussière noire qui collait partout."

Claude Gennardi

"Ma première pièce, en 1971, à Monplaisir, était un arbre de pivot. Je travaillais

sur une vieille machine, une Gendron, avec de grandes manettes. Il fallait bien l'avoir

en main et, les premiers jours, je n'ai pas fait beaucoup de pièces bonnes."

MOTS CROISÉS M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E 23

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Gaston Roussilloux

"Dans les années 60, Paul Berliet a décidé d'investir dans des machines Ingersoll.

La rolls des machines-outils de l'époque. A terme, nous avions 21 machines

d'Ingersoll 1 à Ingersoll 21. Et certaines de ces machines tournent toujours…"

Michel Montmain

"Peu après les évènements de 1968, en septembre, j’étais engagé sur la ligne Ingersoll.

Une nouvelle ligne de fabrication des blocs-cylindres à commandes numériques.

Le fleuron de l’usine à l’époque ! J’ai intégré la “dream team”, car on triait les jeunes

qui allaient travailler sur cette ligne. Je me suis retrouvé au milieu d’une équipe dont

l’âge variait de 19 à 25 ans. J’ai vraiment attaqué par le must, il y avait urgence et ces

nouvelles commandes numériques semblaient difficiles aux anciens.

Pris en main par des régleurs (ou techniciens d’atelier à l’époque) pour ma formation

sur machine, je faisais de la mise au point, c’était passionnant !"

24 MOTS CROISÉS M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E

“PROGRÈS

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Gérard Magnard

"J'ai vécu la fin de l'usinage des blocs au "quartier nègre". C'étaient de grosses

machines, pour la plupart spécifiques et elles n'étaient pas dotées d'aspiration.

Or l'usinage de la fonte se faisait à l'époque sans lubrification, la poussière régnait en

maître. Noire, grasse, elle se collait partout."

Frédéric Perrot

"L'évolution du métier depuis 15 ans ? Sans nul doute la sécurité et la qualité.

On a plus que doublé en exigence et en résultats !

L'automatisation a aussi énormément fait évoluer notre métier même s'il existe encore

des machines d'usinage qui nécessitent du doigté et de l'expérience, comme celles

pour les tronçons de finition (alésage des emplacements du vilebrequin et des

chemises)."

Albert Levet

"La première machine à commandes numériques a été livrée à Monplaisir en 1974.

C'était une petite fraiseuse verticale. Ces machines étaient confiées aux jeunes.

Nous avons vite eu un atelier entier de machines à commandes numériques."

Bernard Perrot-Minot

"Lorsque j'ai expliqué à ma famille l'arrivée de la ligne à commandes numériques,

mon père, qui était un bon mécano, était très impressionné et même un peu dépassé.

Quelle fierté pour moi !"

Gérard Guet

"La création des UEP, Unités Elémentaires de Production, a été une véritable

révolution. Les tâches se sont élargies, avec plus de responsabilités. Avec mon équipe

de nuit, on a fait un boulot monstre. Le manager est le "patron" de son atelier.

Avec des responsabilités que l'on partage en équipe. Chez nous, on avait 20 missions,

et chacun a choisi sa mission. Une adhésion totale de l'équipe !"

MOTS CROISÉS M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E 25

Gérard Guet

"L'arrivée de Volvo a jeté

un froid au départ. On a

repris espoir lorsqu'on

nous a dit que l'on allait

construire la nouvelle

usine. On a cravaché fort,

fait des efforts, avec un

investissement exception-

nel des gens. Mais on y

croyait. La chance était à

portée de main, il fallait

la saisir."

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26 MOTS CROISÉS M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E

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“Gérard Guet

"En 1975, on a créé le premier groupe de travail,

ancêtre des cercles de qualité. Il avait pour thème la

reconversion sur les Ingersoll. On mettait 15 jours

pour effectuer cette opération et nous ne trouvions

pas de solutions pour réduire ce délai. On a créé un

groupe de travail fédérant tous les métiers concernés

(Méthodes, Fabrication, Maintenance…) et des jeunes

qui venaient d'intégrer l'équipe. L'un de ces jeunes,

Jourdan dit Bibi, nous a suggéré de supprimer le

cimblot de guidage du bridage. Pourquoi pas…

Après essais, la reconversion était passée de 80 heures

à 8 heures !"

Michel Gallien

"À partir de 1990, nous avons franchi un cap. La qualité

est devenue remarquable comme, sur les vilebrequins.

Pour le parallélisme sur les lignes d’arbres, on était

assisté par le service Métrologie. On mesurait la pièce

à température constante et plus à 0° degré l’hiver ou

à 35° l’été !

La mise en œuvre d’une vraie action pour la propreté

a également été déterminante. Il fut un temps où les

gars fumaient au poste et leurs cendres allaient dans

les pièces des moteurs…

Autre exemple, le lavage. Une saleté dans la pièce

pouvait avoir des conséquences lourdes pour la mise

en route du moteur. Qualité géométrique, qualité de

l’outil métrologique et qualité de la propreté de la

pièce le cap de la qualité était franchi..."

Gaston Roussilloux

"L'usinage, c'est le point de départ de la qualité du

produit final. Un seul petit problème sur une cote, un

raccordement… et il peut y avoir, au final, un produit

non conforme ou qui casse."

MOTS CROISÉS M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E 27

QUALITÉM O T S C R O I S É S - M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E

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Yann Laigron

"Usineur est un métier passionnant. On travaille avec du matériel de précision, au

micron près. C'est quasiment de l'artisanat. Chaque pièce est unique même si elle

est semblable aux autres. Un bon usineur sait d'ailleurs reconnaître si une pièce est

conforme à l'œil ou au toucher. Jusqu'au 10ème, on ressent les choses.

On sait si ça passe ou pas."

François Brazier

"Dans notre métier, les deux outils les plus importants sont l'œil et la main,

le visuel et le toucher. Comme un artisan."

Dorian Cochet

"Chacun des gestes de l'usinage revêt une importance : tournage, fraisage, alésage,

taraudage… De l'ébauche, avec une tolérance importante, au bloc prêt à partir au

montage, à la tolérance proche du micron, la main et l'œil sont deux "outils"

de base d'un bon usineur. Même un taraudage, qui peut paraître simple, est très

technique. Surtout lorsqu'il est effectué à la main.

En fait, l'usinage, c'est une somme de gestes qui paraissent simples mais qui sont

en fait éminemment techniques. C'est un métier de précision.

Régler une plaquette de finition, c'est une compétition avec soi-même.

La précision est extrême, et même si nous avons des outils à notre disposition,

le savoir faire et l'expérience sont irremplaçables."

28 MOTS CROISÉS M É M O I R E S D E L ' U S I N A G E

“SAVOIR-FAIRE

Daniel Bergery

"La transformation d’un bout de ferraille en une pièce utile sur un

moteur, c’est quelque chose de fort ! Un geste noble. J’avais la

chance de travailler au secteur arbres à cames qui était une sorte

d'accomplissement du métier.

Ils arrivaient brut, de forges brésiliennes, et subissaient plusieurs

stades de transformation à l'usine. La première ébauche prenait

environ 7 minutes. Puis suivaient une opération de traitement

thermique, une trempe à haute fréquence, la pièce était chauffée à

800° puis il y avait l’opération de finition, de rectification.

Un ouvrier “tombait” entre 60 et 80 pièces par jour. Le redressage

était l’opération la plus compliquée car il fallait le faire en manuel, à

la masse."

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Gérard Magnard

"Avec le redéploiement de l'usinage vers le montage,

on a le sentiment de perdre un métier.

Nous avons des liens de clients fournisseurs, mais il

faut bien voir qu'une pièce bien usinée est une pièce

qui se monte toute seule.

Une erreur à l'usinage, c'est un bloc moteur ou une

culasse à reprendre ou à rebuter."

Dominique Terrier

"Je n’aime pas le mot usineur, je trouve qu’il est restrictif et pas représentatif

de ce que l’on fait ! Je préfère dire : "Je travaille à l’outillage"

Claude Giraud

"Aujourd’hui je suis obligé de changer de métier et ça me rend un peu nostalgique…

L’assemblage nous fait un peu peur, les gens du montage nous semblent éloignés,

mais je suis persuadé qu’une bonne base en usinage est un plus en assemblage."

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