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© 2 0 1 4 - 2 0 1 5 H i n a k o S u g i u r a - M S . H S / S a r u s u b e r i F i l m P a r t n e r s gratuit numéro 53 - septembre 2015 Miss Hokusai La femme au pinceau TRADITION Le tôfu made in France p. 20 VOYAGE La péninsule de Kii p. 26 www.zoomjapon.info

Zoom Japon 053

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Zoom Japon, numéro 53 (septembre 2015)

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© 2014-2015 Hinako Sugiura - MS.HS / Sarusuberi Film Partners

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Miss HokusaiLa femme au pinceau

TRADITIONLe tôfu madein France p. 20

VOYAGELa péninsulede Kii p. 26

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ZOOM ACTU

ÉDITOAnimationPour ce numéro derentrée, nous ne pou-vions pas passer à côtéde l’événement ciné-matographique dumoment. Nous ne par-lons pas de La Maison

au toit rouge de Yamada Yôji dont le dVdsort ces jours-ci, mais du nouveau chef-d’œuvre de l’animation japonaise MissHokusai signé Hara Keiichi. Cet hom-mage au travail de la mangaka Sugiura

Hinako trop méconnue en France nousplonge dans l’univers d’une période aucours de laquelle le Japon, malgré sa ferme-ture au monde, a su développer une cultureoriginale. Ce film nous montre une nou-velle fois que le cinéma d’animation japo-nais a su tourner la page miYazaKi avecdes réalisateurs de grands talents.

LA RÉ[email protected]

ECONOMIE Au secours, larécession revient !Avec un produit intérieur brut en recul

de 0,4% d'avril à juin par rapport au

trimestre précédent, une consommation

des ménages qui fléchit de 0,8%, et des

exportations de 4,4% inférieures à

celles du premier trimestre, le spectre

d’une nouvelle récession inquiète les

autorités. Un revers pour ABE Shinzô, qui

mise sur une politique de relance pour

redynamiser un tissu économique en

panne.

SOCIÉTÉ La traque desvoyageurs ivresPour éviter les risques d’accidents liés

au comportement de personnes

fortement alcoolisées, la compagnie

JR West a installé une cinquantaine de

caméras dans la gare de Kyôbashi à

Ôsaka. Ces appareils permettent de

repérer automatiquement les

mouvements incohérents et ainsi

alerter le personnel pour qu’il

empêche éventuellement le voyageur

de tomber sur les voies.

yens. Tel est le coût

de la coupe en

argent que le

gouvernement japonais offre chaque

année à ses centenaires. Mais avec plus

de 30 000 nouveaux centenaires

recensés cette année, les autorités

seraient prêtes à revenir sur cette

tradition par souci d’économies.

8 000

L E REGARD D’ERIC RECHSTEINER

Avec son chapeau, on aurait pu le prendre de loin pour Tora-san, le personnage créé par YAMADA Yôji et inter-prété avec tant de brio par le regretté ATSUMI Kiyoshi. En s’approchant, on découvre qu’il s’agit d’un simpledessinateur amateur qui s’applique avec son crayon à saisir la beauté des berges de la Sumida, un des endroitsles plus tokyoïtes de la capitale.

Arrondissement de Kita, Tôkyô

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Couverture : © 2014-2015 Hinako Sugiura - MS.HS /Sarusuberi Film Partners

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ZOOM ACTU

P lus de quatre ans après le séisme du 11mars 2011, on continue à découvrirsur les côtes d’Okinawa et de Hawaï

des épaves de bateaux de pêche emportés par letsunami. Pour ceux qui ont tout perdu lors duséisme, ces embarcations constituent une valeursentimentale précieuse. Le 13 avril, le petit bateau de pêche TokumaruN°5 amarré à Kumazawa, qui avait été emportépar le tsunami, a été retrouvé sur la plage de l’îled’Ikema à Okinawa. Son propriétaire est unmarin, FUjII Tokushirô. Le bateau était surtoututilisé par son père Tokuo, décédé à 88 ansquelques mois après le séisme. “Je suis surprisqu’il ait dérivé durant plus de quatre ans pour fi-nalement atteindre Okinawa. C’est peut-être notrepère qui l’a guidé à prendre le cap vers le sud pourfaire plaisir à la famille”, raconte-t-il.Le quartier de Kumazawa se trouve à la pointede la péninsule d’Ogatsu, réputée pour ses vaguesviolentes. Le lieu n’étant pas idéal pour la pisci-culture, les pêcheurs vivaient de la pêche auxormeaux, aux oursins ou encore de la récolted’algues sauvages. Chez les FUjII, Tokushirôs’absentait de longs mois pour travailler sur ungros navire de pêche et pendant ce temps-là,son père Tokuo, sa mère Tomeko et sa femmeMitsue se contentaient de pêcher à proximitéet leur petit bateau faisait partie de leur vie. C’est ainsi que la famille a vécu pendant plusieursdécennies. Le 11 mars 2011, lors du séisme,Tokushirô travaillait à bord d’un chalutier dansle sud du japon, alors que son père Tokuo, To-meko et Mitsue étaient chez eux. Ce tremblementde terre ne s’est pas manifesté comme à l’ordi-

naire; il a duré plus longtemps et a été plusviolent. Présentant l’arrivée d’un tsunami, Mitsue aquitté la maison située sur les hauteurs pouraller amarrer plus solidement le bateau. Unefois sa mission accomplie, elle s’est tournée versle large et a vu la marée se retirer de plusieurscentaines de mètres. Se disant que l’arrivée dutsunami était inéluctable, elle est allée se réfugierprès de leur maison. A peine, les vagues blanchesavaient envahi le quartier que le niveau d’eauest monté rapidement et les habitations sur lacôte ont été englouties et de nombreux bateauxemportés. Par chance, leur maison est restée intacte, maisle bateau s’était volatilisé. En apprenant la nou-velle, Tokuo, le père en est resté abasourdi.

On les croyait à jamais disparu, maiscertains réapparaissent à des milliers dekilomètres de leur port d’origine.

SÉRIE Ces bateaux qui n’ont jamais coulé

Puis, sa santé s’est dégradée et au bout de troismois, il est décédé. Toute la famille de Tokushirôa surmonté sa tristesse et a pu récupérer unnouveau bateau grâce à une aide extérieure. Ellea commencé à reprendre le rythme de sa vie ha-bituelle. C’est en mars que la famille a apprispar le syndicat maritime des pêcheurs de Miyagique leur bateau avait été retrouvé sur l’îled’Ikema à plus de 2 100 km de son port d’at-tache.Il avait perdu son moteur, mais son propriétairea pu être identifié grâce au numéro d’immatri-culation. Ce fut aussi le cas de nombreux débrisdu séisme retrouvés sur la côte ouest des Etats-Unis et il est bien probable que le bateau deTokushirô soit arrivé à Okinawa après avoirfait le tour de l’océan Pacifique. “Il a dû poursuivre

Le Tokumaru N°5 tel qu’il a été retrouvé à Okinawa à quelque 2 100 km de son port d’attache.

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Le monde de Ota Yoshiko 23/09-27/09Vernissage : jeudi 25 septembre 18h-20h30

Shirata CashmereL'Art du Tricot et des accessoires 30/09 - 04/10Vernissage: mardi 30 septembre18h-20h30

septembre 2015 numéro 53 ZOOM JAPON 5

sa dérive pendant quatre ans à travers toutes lestempêtes en haute mer ; c’est peut-être ce que sou-haitait notre père”, dit-il pour expliquer cetteretrouvaille miraculeuse. Dans l’impossibilité de ramener le bateau, il ademandé qu’on le détruise ou qu’on le conservesur place comme un monument. Actuellement,le syndicat des pêcheurs d’Ikema le conserve dansle jardin du Centre de Yabiji, juste à côté duport d’Ikema. Dans un avenir proche, un panneausera déposé avec le texte suivant : “En souvenirdu séisme du 11 mars”. Le bateau sera ensuite ex-posé comme un monument du souvenir.Un autre bateau de la ville d’ogatsu, dans lequartier de Namiita, utilisé par le défunt Itoh

Kyôichi, a été retrouvé, à la fin avril de cetteannée, à hawaï sur la plage de l’île d’o’hau. Lebateau qui porte le nom de Katsumaru N°2était utilisé comme bateau de pêche par M. Itoh,retraité qui avait longtemps travaillé sur un ba-

leinier. Décédé en 2003 des suites d’une maladie,son bateau avait été laissé à l’abandon. Aumoment du séisme, on ne connaissait pas sonpropriétaire. Quant à la femme de M. Itoh,takeno (68 ans au moment du séisme), elle aété emportée par le tsunami et reste toujoursportée disparue depuis.“Avec ce bateau, c’est notre père, maintenant auparadis, qui est venu chercher notre mère. Celanous ferait plaisir que le bateau revienne dans lequartier de Namiita et qu’on l’expose dans leCentre de la commune”, raconte leur secondefille, Sanae, après avoir appris la nouvelle de ladécouverte du Katsumaru N°2 sur l’île d’o’hau.Les autres habitants du quartier partagent lemême avis. “C’est un miracle d’avoir retrouvé lebateau quatre années après. Il faudrait l’exposerdans notre Centre pour nous souvenir du séisme”,déclare l’un d’eux.

HIRAI MICHIKO & AKIYAMA YUHIRO

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Le 11 mars 2011, le tsunami a tout balayé devant lui. Photo de FUJII Mitsue réfugiée sur les hauteurs.

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ZOOM DOSSIER

Hara Keiichi“Miss Hokusai rappelle uneépoque belle, douce et folle”récompensé au Festival d’annecy, le dernier film du réalisateur sort sur les écrans le 2 septembre. L’occasion de découvrir un personnagehaut en couleur : Katsushika O-Ei, fille du maître des estampes Hokusai et symbole d'Edo, période historique riche pour le pays.

S on nouveau film était très attendu. Aprèscinq ans d’absence dans le monde de l’ani-mation, HArA Keiichi est revenu avec Miss

Hokusai (Surusuberi - Miss Hokusai), une œuvreforte sur laquelle il s’est confié à Zoom Japon.

Comment le projet de Miss Hokusai vous estarrivé entre les mains ?Hara Keiichi : J’étais fan de l’œuvre de SugiurA

Hinako depuis de très nombreuses années. unjour, iSHiKAwA Mitsuhisa, le patron du studioi.g. Production, m’a proposé de réaliser Miss Ho-kusai. C’est comme ça que j’ai pu réaliser ce film.

En 2013, vous avez réalisé un film en prises devue réelles, Hajimari no michi. Grâce à cetteexpérience, n’avez-vous pas été tenté de tournerMiss Hokusai de cette façon ou était-ce une vo-lonté de I.G. Production de le faire sous formeanimée ?H. K. : Puisque la proposition venait de i.g. pro-duction qui est un studio d’animation, je ne mevoyais pas leur proposer un film en prises de vueréelles. Par ailleurs, s’agissant de Miss Hokusai, jepensais que la forme animée était plus pertinente.

Combien de temps a pris l’élaboration du projetlui-même ?H. K. : Trois ans.

C’est long…H. K. : (Rires) En fait, juste avant qu’on me proposede faire Miss Hokusai, j’avais déjà décidé de réaliserce film en prises de vue réelles. il m’a fallu plusieursmois pour que j’achève ce projet. C’est autant detemps pendant lequel je n’ai pas pu me consacrer àla mise en œuvre de la proposition de i.g. Production.

L’œuvre originale de SUGIUra Hinako sur la-quelle est basée Miss Hokusai est composée deplusieurs histoires qui mettent en scène différentspersonnages ayant évolué à l’époque Edo, mais

vous avez choisi de vous concentrer plus parti-culier sur O-Ei et O-Nao. Pourquoi ce choix ? H. K. : Parmi tous les épisodes figurant dans lemanga, je trouvais que l’épisode avec les deux sœursétait le plus dramatique. C’est la raison pour laquellej’ai décidé que le fil conducteur du film serait larelation entre les deux sœurs. A partir du momentoù j’ai effectué ce choix, j’ai commencé à élaborerl’histoire.

C’est vous seul qui avez choisi cet épisode ?H. K. : Oui.

Dans l’adaptation de cet épisode, y a-t-il deséléments qui vous ont posé des problèmes ?H. K. : (Rires) Mon principal problème, c’est monprofond attachement à cette œuvre. Aussi faire lechoix d’un épisode a été le plus difficile. Pour créerune œuvre cinématographique, il me fallait évi-demment choisir parmi tous les épisodes. Maiscomme j’aimais l’ensemble du manga, il m’a vraimentcoûté d’abandonner certains épisodes. D’autantque beaucoup sont vraiment extraordinaires.

Cela vous donne-t-il l’envie de faire un autrefilm à partir de ce manga ?H. K. : (Rires) Evidemment j'en ai très envie.

Le personnage de O-Ei est fascinant. Mais si onle compare aux personnages principaux desautres films que vous avez réalisés comme UnEté avec Coo ou Colorful, il s’agit d’une femme.Une première pour vous. Qu’est-ce qui vous aamené à choisir de travailler sur un personnageféminin ?H. K. : Mon état d’esprit pendant la réalisation dece film était tout à fait le même que dans mesœuvres précédentes qui, c’est vrai, étaient centréessur des personnages masculins. Cependant, pendantl’avancement de ce projet, j’ai beaucoup réfléchi aupersonnage de O-Ei qui est une femme de 23 ans,célibataire et qui travaille. J’ai pensé au publicféminin. Ça m’a donné l’envie d’attirer l’attention

BIOGRAPHIEHARA Keiichi est né en 1959 dans la préfecture deGunma, au nord de Tôkyô. Il a commencé sacarrière en tant qu’animateur avant de rejoindreShien-Ei Animation où il a notamment travaillé surla série Kaibutsu-kun avant de s’attaquer àDoraemon. Remarqué pour la qualité de sontravail, on lui confie de nouvelles réalisationsparmi lesquelles Crayon Shin-chan (1994-2005), UnEté avec Coo (2007), Colorful (2010).

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KATSUSHIKA O-ei, fille de Hokusai.

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ZOOM DOSSIER

Hara Keiichi“Miss Hokusai rappelle uneépoque belle, douce et folle”récompensé au Festival d’annecy, le dernier film du réalisateur sort sur les écrans le 2 septembre. L’occasion de découvrir un personnagehaut en couleur : Katsushika O-Ei, fille du maître des estampes Hokusai et symbole d'Edo, période historique riche pour le pays.

S on nouveau film était très attendu. Aprèscinq ans d’absence dans le monde de l’ani-mation, HArA Keiichi est revenu avec Miss

Hokusai (Surusuberi - Miss Hokusai), une œuvreforte sur laquelle il s’est confié à Zoom Japon.

Comment le projet de Miss Hokusai vous estarrivé entre les mains ?Hara Keiichi : J’étais fan de l’œuvre de SugiurA

Hinako depuis de très nombreuses années. unjour, iSHiKAwA Mitsuhisa, le patron du studioi.g. Production, m’a proposé de réaliser Miss Ho-kusai. C’est comme ça que j’ai pu réaliser ce film.

En 2013, vous avez réalisé un film en prises devue réelles, Hajimari no michi. Grâce à cetteexpérience, n’avez-vous pas été tenté de tournerMiss Hokusai de cette façon ou était-ce une vo-lonté de I.G. Production de le faire sous formeanimée ?H. K. : Puisque la proposition venait de i.g. pro-duction qui est un studio d’animation, je ne mevoyais pas leur proposer un film en prises de vueréelles. Par ailleurs, s’agissant de Miss Hokusai, jepensais que la forme animée était plus pertinente.

Combien de temps a pris l’élaboration du projetlui-même ?H. K. : Trois ans.

C’est long…H. K. : (Rires) En fait, juste avant qu’on me proposede faire Miss Hokusai, j’avais déjà décidé de réaliserce film en prises de vue réelles. il m’a fallu plusieursmois pour que j’achève ce projet. C’est autant detemps pendant lequel je n’ai pas pu me consacrer àla mise en œuvre de la proposition de i.g. Production.

L’œuvre originale de SUGIUra Hinako sur la-quelle est basée Miss Hokusai est composée deplusieurs histoires qui mettent en scène différentspersonnages ayant évolué à l’époque Edo, mais

vous avez choisi de vous concentrer plus parti-culier sur O-Ei et O-Nao. Pourquoi ce choix ? H. K. : Parmi tous les épisodes figurant dans lemanga, je trouvais que l’épisode avec les deux sœursétait le plus dramatique. C’est la raison pour laquellej’ai décidé que le fil conducteur du film serait larelation entre les deux sœurs. A partir du momentoù j’ai effectué ce choix, j’ai commencé à élaborerl’histoire.

C’est vous seul qui avez choisi cet épisode ?H. K. : Oui.

Dans l’adaptation de cet épisode, y a-t-il deséléments qui vous ont posé des problèmes ?H. K. : (Rires) Mon principal problème, c’est monprofond attachement à cette œuvre. Aussi faire lechoix d’un épisode a été le plus difficile. Pour créerune œuvre cinématographique, il me fallait évi-demment choisir parmi tous les épisodes. Maiscomme j’aimais l’ensemble du manga, il m’a vraimentcoûté d’abandonner certains épisodes. D’autantque beaucoup sont vraiment extraordinaires.

Cela vous donne-t-il l’envie de faire un autrefilm à partir de ce manga ?H. K. : (Rires) Evidemment j'en ai très envie.

Le personnage de O-Ei est fascinant. Mais si onle compare aux personnages principaux desautres films que vous avez réalisés comme UnEté avec Coo ou Colorful, il s’agit d’une femme.Une première pour vous. Qu’est-ce qui vous aamené à choisir de travailler sur un personnageféminin ?H. K. : Mon état d’esprit pendant la réalisation dece film était tout à fait le même que dans mesœuvres précédentes qui, c’est vrai, étaient centréessur des personnages masculins. Cependant, pendantl’avancement de ce projet, j’ai beaucoup réfléchi aupersonnage de O-Ei qui est une femme de 23 ans,célibataire et qui travaille. J’ai pensé au publicféminin. Ça m’a donné l’envie d’attirer l’attention

BIOGRAPHIEHARA Keiichi est né en 1959 dans la préfecture deGunma, au nord de Tôkyô. Il a commencé sacarrière en tant qu’animateur avant de rejoindreShien-Ei Animation où il a notamment travaillé surla série Kaibutsu-kun avant de s’attaquer àDoraemon. Remarqué pour la qualité de sontravail, on lui confie de nouvelles réalisationsparmi lesquelles Crayon Shin-chan (1994-2005), UnEté avec Coo (2007), Colorful (2010).

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du public qui ressemble à O-Ei. Et aujourd’hui, auJapon, il y en a beaucoup qui lui ressemblent.

Pendant la préparation ou la réalisation du film,avez-vous rencontré des jeunes femmes commeo-ei pour ajuster le comportement du person-nage ?H. K. : Je n’ai pas vraiment cherché à en rencontrer,mais j’étais très entouré de femmes pendant la réa-lisation du film. Elles étaient très nombreuses. il y ala productrice, la scénariste, la compositrice et aussiplusieurs animatrices. Je peux donc dire que c’estgrâce à la force des femmes que le film a été produit.

Comment cette force s’est-elle exercée ?H. K. : Certaines animatrices ont par exemplesuggéré des actions ou des attitudes auxquelles jen’avais pas pensé. Par ailleurs, comme le producteurde Miss Hokusai est une femme, elle a apportébeaucoup de soin et de délicatesse dans les procéduresde travail. Cela a beaucoup aidé à la réalisation.

Quand on regarde le générique du film, on nerencontre que des grands noms de l’animationjaponaise. Comment avez-vous réussi à réunirces personnes.H. K. : Elles sont venues grâce à MAtsushitA

Keiko, l’une des productrices de Production i.G.sans elle, nous ne les aurions pas réunis.

Comment s’est passé le travail avec elles ?H. K. : Quand on fait la première réunion, il y atoujours une certaine tension ou une certaine forme

O-Ei avance d’un pas décidé. Elle est représentative de l’époque d’Edo où la condition des femmes était bien meilleure.

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d’inquiétude ou de trac. Mais quand j’ai vu lespremiers éléments réalisés par cette équipe, c’étaittellement parfait que je n’ai rien eu à dire. Auniveau du travail, ça s’est extrêmement bien passé.

Pour l’animation, vous vous êtes appuyé surInoue Toshiyuki. H. K. : Encore une fois, c’est la productrice MA -tsushitA Keiko qui lui a proposé de nous rejoindre.C’était la première fois que je travaillais avec lui etj’ai été étonné par son talent. Quel que soit le dessinqu’il exécutait, c’était toujours parfait.

Pour revenir au personnage principal de MissHokusai, pourquoi avoir choisi d’affubler o-eide sourcils aussi proéminents ?H. K. : (Rires) Je cherchais un moyen de montrersa forte volonté et de souligner sa force intérieure.il fallait trouver un détail physique. Mon choixs’est donc porté sur les sourcils.

Les voix japonaises des personnages de MissHokusai collent parfaitement. Comment s’esteffectué le casting ?H. K. : Pour le casting des voix, c’est vraiment moiqui ai décidé. J’ai d’abord eu l’idée de la voix de O-Ei avec l’actrice An. Puis pour les autres voix, j’aifait des suggestions qui ont toutes été acceptées.Comme ces acteurs ont fini par se prendre au jeu etendosser le rôle des personnages animés, ça donneun résultat formidable.

Vous avez aussi choisi la voix d’uTagawa Ku-

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ninao interprétée par l’excellent KôrA Kengo ?H. K. : (Rires) Pour Kôra Kengo, c’est une autreproductrice, mme NiSHiKawa, qui a fait la propo-sition. Elle disait que l’acteur aimait beaucoupCrayon Shinchan que j’avais réalisé. C’est commeça qu’on s’est adressé à lui.

Pour la musique, pourquoi avez-vous misé surle rock ?H. K. : Parce que O-Ei est une femme qui a unerock’n’roll attitude ! (rires). Et puis, il se trouve queSugiura Hinako, l’auteur de l’œuvre originale,écoutait beaucoup de rock pendant qu’elle composaitson manga.

Je me demandais si vous aviez été influencé parSofia Coppola qui avait accompagné son filmMarie-Antoinette de musique rock.H. K. : Pas du tout, car je ne l’ai pas vu.

Quelques mots sur le choix de Sheena ringopour la chanson du générique ?H. K. : Ce sont les deux productrices qui en ontfait la proposition. Sugiura Hinako était aussi unegrande fan de Sheena ringo. Je suis ravi de ce choix,car c’est une des rares musiciennes de rock qui s’ex-priment avec une vraie conscience d’être Japonaise.Donc ça correspondait très bien à l’univers du film.

Elle a une force de caractère qui rappelle celuide O-Ei.H. K. : (Rires). C’est bien possible. C’est vrai qu’elle

a une forte personnalité, c’est vrai.

Avant d’entreprendre la réalisation du film,aviez-vous un intérêt pour l’époque d’Edo ?H. K. : Oui. De manière générale, je m’intéresseplus au passé qu’à l’avenir. Pour ce qui est de l’époqued’Edo proprement dit, la plupart des films et desromans qui lui sont consacrés évoquent surtout lavie des samouraïs. L’œuvre de Sugiura Hinako atotalement changé cette perception puisqu’elle s’estsurtout intéressée à la vie des petites gens, à leurquotidien ordinaire et paisible. C’est grâce à sontravail que j’ai pu découvrir cet aspect de l’époqued’Edo souvent négligé. Voilà pourquoi je suis devenuun grand fan de son travail. Les hommes et lesfemmes qui apparaissent dans son œuvre nous sem-blent aujourd’hui très feignants, mais je trouve queleur vie est extraordinaire et pleine de charme.

Ça rappelle le personnage plus contemporainde Tora-san, le héros de Otoko wa tsurai yo(C’est dur d’être un homme) de YAmAdA Yôji.H. K. : En effet, j’aime beaucoup. Je pense quepour créer ce personnage YamaDa Yôji a été inspirépar des histoires de rakugo (histoires humoristiques)dont le contenu reflète d’ailleurs bien le mode devie à l’époque d’Edo.

La famille telle que vous la décrivez dans MissHokusai ressemble beaucoup à une famille d’au-jourd’hui.H. K. : C’est vrai. il y a des points communs entre

O-Nao, la sœur malade de O-ei

Après la réalisation d’un film en prises de vue réelles, hommage au cinéaste KINOSHITA Keisuke, HARA Keiichi revient à ses premières amours : l’animation.

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ninao interprétée par l’excellent KôrA Kengo ?H. K. : (Rires) Pour Kôra Kengo, c’est une autreproductrice, mme NiSHiKawa, qui a fait la propo-sition. Elle disait que l’acteur aimait beaucoupCrayon Shinchan que j’avais réalisé. C’est commeça qu’on s’est adressé à lui.

Pour la musique, pourquoi avez-vous misé surle rock ?H. K. : Parce que O-Ei est une femme qui a unerock’n’roll attitude ! (rires). Et puis, il se trouve queSugiura Hinako, l’auteur de l’œuvre originale,écoutait beaucoup de rock pendant qu’elle composaitson manga.

Je me demandais si vous aviez été influencé parSofia Coppola qui avait accompagné son filmMarie-Antoinette de musique rock.H. K. : Pas du tout, car je ne l’ai pas vu.

Quelques mots sur le choix de Sheena ringopour la chanson du générique ?H. K. : Ce sont les deux productrices qui en ontfait la proposition. Sugiura Hinako était aussi unegrande fan de Sheena ringo. Je suis ravi de ce choix,car c’est une des rares musiciennes de rock qui s’ex-priment avec une vraie conscience d’être Japonaise.Donc ça correspondait très bien à l’univers du film.

Elle a une force de caractère qui rappelle celuide O-Ei.H. K. : (Rires). C’est bien possible. C’est vrai qu’elle

a une forte personnalité, c’est vrai.

Avant d’entreprendre la réalisation du film,aviez-vous un intérêt pour l’époque d’Edo ?H. K. : Oui. De manière générale, je m’intéresseplus au passé qu’à l’avenir. Pour ce qui est de l’époqued’Edo proprement dit, la plupart des films et desromans qui lui sont consacrés évoquent surtout lavie des samouraïs. L’œuvre de Sugiura Hinako atotalement changé cette perception puisqu’elle s’estsurtout intéressée à la vie des petites gens, à leurquotidien ordinaire et paisible. C’est grâce à sontravail que j’ai pu découvrir cet aspect de l’époqued’Edo souvent négligé. Voilà pourquoi je suis devenuun grand fan de son travail. Les hommes et lesfemmes qui apparaissent dans son œuvre nous sem-blent aujourd’hui très feignants, mais je trouve queleur vie est extraordinaire et pleine de charme.

Ça rappelle le personnage plus contemporainde Tora-san, le héros de Otoko wa tsurai yo(C’est dur d’être un homme) de YAmAdA Yôji.H. K. : En effet, j’aime beaucoup. Je pense quepour créer ce personnage YamaDa Yôji a été inspirépar des histoires de rakugo (histoires humoristiques)dont le contenu reflète d’ailleurs bien le mode devie à l’époque d’Edo.

La famille telle que vous la décrivez dans MissHokusai ressemble beaucoup à une famille d’au-jourd’hui.H. K. : C’est vrai. il y a des points communs entre

O-Nao, la sœur malade de O-ei

Après la réalisation d’un film en prises de vue réelles, hommage au cinéaste KINOSHITA Keisuke, HARA Keiichi revient à ses premières amours : l’animation.

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la famille Hokusai et une famille d’aujourd’hui.Mais je pense qu’il y avait une plus grande proximitéentre les individus à l’époque d’Edo. On dormaitpar exemple tous ensemble dans la même pièce.Cela dit, le rapport entre Hokusai et sa fille est trèsparticulier. On ne peut dire qu’il s’agit d’une relationordinaire entre père et fille puisque, en tant qu’artistes,il existait une relation de rivalité entre eux commeil y avait aussi un rapport de maître à disciple.Plusieurs scènes dans le film soulignent cette rivalitéentre les deux personnages.

La relation mère-fille dans le film est aussi inté-ressante. O-Ei incarne la femme moderne, in-dépendante, et sa mère étant l’archétype de lafemme soumise.H. K. : En effet. Mais il ne faut pas oublier qu’àl’époque d’Edo, la condition des femmes était biendifférente. Elles étaient plus libres. C’est quelquechose qui est peu connu aujourd’hui et le filmreflète cette réalité. En ce temps-là, il y avait beaucoupd’hommes célibataires à Edo, car il y avait moins defemmes que d’hommes. Elles étaient donc très pré-cieuses et très bien traitées par les hommes. Ellesavaient le privilège de choisir. C’est pour ça quel’on rapporte qu’elles se comportaient avec beaucoupde fierté et de force de caractère. un peu comme lesParisiennes peut-être (rires).

Vous abordez aussi de façon un peu rapide lasexualité, notamment au travers du personnagede O-Ei.H. K. : Dans le film, on voit O-Ei se rendre dansune sorte de maison close, mais je pense que cetacte était un peu naïf de sa part. Elle est allée là-bas parce que les gens appréciaient beaucoup letravail de Zenjirô et ses peintures érotiques alorsqu’elle pensait qu’il était moins doué. Elle s’estmise en colère et s’est dit que si elle était inférieureà lui, c’est parce qu’elle n’avait eu aucune expérienceavec des hommes. C’est pour cela qu’elle est alléedans cette maison close. Dans le film, cela restetrès flou et je ne montre rien de ce qui se passe.

Mais je pense qu’il ne s’est rien passé entre elle etle garçon avec qui elle a choisi de passer la nuit. Enrepartant le lendemain matin, elle a sûrement re-gretté cet acte, mais ce côté très impulsif correspondbien au personnage de O-Ei. Je crois que Sugiura

Hinako a évoqué cet épisode pour souligner le ca-ractère de la jeune femme comme elle a insisté surle fait qu’elle aimait regarder les incendies, ce quicaractérise aussi son impulsivité.

O-Ei est une femme de tête. Il se trouve que legouvernement actuel souhaite accorder davantagede place aux femmes. Qu’en pensez-vous ? Sa-vez-vous si le Premier ministre AbE a vu votrefilm ?H. K. : (Rires). il ne l’a sûrement pas vu. Cela dit,je ne comprends pas bien où le gouvernementveut en venir avec cette politique. Dans l’universde l’animation, il n’existe guère de différences destatut entre les hommes et les femmes. Quand j’aidébuté, il y avait beaucoup d’hommes dans ce sec-teur, mais aujourd’hui, les femmes y sont de plusen plus nombreuses. ici c’est la compétence quiprime et peu importe si c’est un homme ou unefemme.

Votre film est en fait une sorte de passerelleentre le Japon du passé et celui d’aujourd’hui.Il suffit de regarder l’affiche avec la présence dela tour Tokyo Sky Tree.H. K. : Je pense que le passé et le présent sont bienliés. Ce qui m’intéresse beaucoup, c’est que tous lesJaponais, s’ils font leur arbre généalogique, ilstombent sur quelqu’un qui a vécu à l’époque d’Edo.Ce n’est donc pas une époque fictionnelle, c’estune époque qui a réellement existé. Je me rappelled’une phrase de Sugiura Hinako pour évoquercette période. Elle disait de l’époque d’Edo qu’elleétait “belle, douce et folle”. Je trouve que c’est trèsbien dit. J’aimerais bien qu’on retrouve cet étatd’esprit qui a bien du mal à s’imposer à notreépoque corrompue par trop d’obscénité.

PROPOS RECUEILLIS PAR ODAIRA NAMIHEI

La chanson du générique a été confiée à la

chanteuse Sheena Ringo, l’une des artistes les

plus intéressantes de la scène rock japonaise.

Sa forte personnalité rappelle celle du person-

nage principal de Miss Hokusai.

CRITIQUE

A près s’être essayé, en 2013,au cinéma avec de vrais

acteurs pour un hommage aucinéaste KINOSHITA Keisuke donton célébrait le centenaire de lanaissance, HARA Keiichi est revenuà ses premières amours : l’anima-tion. Et quel retour ! Tous simple-ment magistral. On avait déjàapprécié sa sensibilité dans Un Etéavec Coo, sa délicatesse avecColorful. Avec Miss Hokusai, le réa-lisateur nous montre sa maîtrisetotale d’un projet très ambitieux.Le studio Production I.G. lui adonné les moyens de réaliser une

œuvre forte centrée autour d’unpersonnage Katsushika O-Ei, fillede Hokusai, qu’il va suivre dansla période de sa vie au cours delaquelle elle cherche à s’affirmeren tant qu’artiste et en tant quefemme. HARA Keiichi est à l’aise dans cettehistoire parce qu’il y a retrouvél’ambiance qui règne dans les stu-dios d’animation ou de mangakaavec le sensei (maître), ici Hokusai,entouré d’assistants, ici O-Ei, et dedisciples qui font leur classe.Il réussit ainsi à mettre en évidenceles relations particulières qui exis-

tent entre eux tout en s’attachantà montrer lors de magnifiquesplans le processus de création. C’est dans cet univers que O-Eidoit trouver sa place. Unegageure quand on est la fille dumaître et une femme. S’appuyantsur un très bon scénario signéMARUO Miho, le réalisateur par-vient à faire partager les diverssentiments qui habitent la jeunefemme et son extraordinaire forcede caractère. Une très belle réus-site à ne pas manquer.

O. N.En salles le 2 septembre.

Présenté en sélection lors du Festival internatio-

nal du film d’animation au mois de juin der-

nier, Miss Hokusai a reçu le Prix du jury.

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Q ui était KAtSUSHIKA O-Ei dont le nomd’artiste était KAtSUSHIKA Oi, l’héroïnedu manga et de Sarusuberi Miss Ho-

kusai ? Si les grandes lignes de sa vie sont connues,il reste cependant de nombreux points à élucider.Fille de l’illustre KAtSUSHIKA Hokusai (1760-1849), elle fut la seule de ses cinq enfants (certainsdisent qu’il en eut un sixième) à hériter du talentde son père et à choisir la même voie. On ignoresa date de naissance et de décès, mais des écritsprouvent qu’elle travailla aux côtés de son père,qu’elle prit soin de lui jusqu’à son dernier souffleet qu’elle donna ensuite des cours de dessin touten continuant de peindre pour gagner sa vie. Ellefut proche de son père, et lui ressemblait, disait-on par son caractère volontaire, sa passion pourle dessin et son désintérêt des tâches ménagères.Son visage n’était guère gracieux et son père lasurnommait Ago, “menton”, à cause de son mentonanguleux. Elle prêtait peu d’importance à sa mise.Elle tenait cependant à être toujours parfaitementcoiffée, sa seule coquetterie !Hokusai disait de O-Ei qu’elle le surpassait pourles peintures de beautés féminines et de nombreuxchercheurs s’accordent pour dire qu’elle aida sonpère pour certaines œuvres peintes. Sa signaturen’apparaît pas, sans doute parce que la notoriétéde son père permettait de vendre les œuvres à unmeilleur prix. On ne sait précisément quelle futl’étendue de son œuvre. Seule une dizaine de pein-tures de O-Ei sont répertoriées à travers le monde.Le musée Ôta possède l’une des plus intéressantes :Yoshiwara koushi saki no zu - À travers les barreauxdu Yoshiwara.Le Yoshiwara, le quartier des plaisirs de la capitaleEdo, vit le jour en 1617. Détruit par le grandincendie de 1657, il fut reconstruit, sous le nomde Shin-Yoshiwara (nouveau Yoshiwara), lamême année, dans un endroit plus éloigné ducentre de la ville. Entouré d’un fossé et ceintd’une palissade, le Yoshiwara n’avait qu’uneseule porte que les courtisanes ne pouvaientjamais franchir, sauf si un riche clientles achetait à leur tenancier. Venduespar leur famille et enfermées danscette citadelle des plaisirs depuis leurtendre enfance, elles recevaient uneéducation extrêmement poussée. Unguide imprimé du Yoshiwara étaiten vente, il décrivait chaque maison,indiquait le nom et le rang des cour-tisanes qui y exerçaient. Lieu d’un

grand raffinement, les codes du Yoshiwara étaientstricts et tous les clients, du plus riche au pluspauvre, devaient s’y plier. Les luxueux atours descourtisanes, si bien rendus dans les peintures et es-tampes japonaises font parfois oublier la vie péniblede ces malheureuses jeunes filles. Celles qui, maladesou qui n’avaient pas de succès auprès des meilleursclients, étaient renvoyées dans des maisons de basétage où elles mourraient jeunes et misérables.O-Ei, comme son père et bien d’autres peintres,s’intéressa à l’art occidental. De nombreusesgravures européennes circulaient à travers l’archipel.Hokusai étudia la perspective occidentale qu’ilreprésenta dans plusieurs pages de sa célèbre Manga(ensemble de 15 carnets de dessins sur de multiples

DESTIN Portrait d’une femme au pinceauL’œuvre de O-Ei, personnage central deMiss Hokusai, reste méconnue. Nousavons enquêté pour vous la présenter.

sujets publiés à partir de 1814, destinés à sesdisciples ou à tous ceux qui voulaient apprendre àdessiner). Il s’intéressa aussi aux ombres portéesqu’il reproduisit dans certaines estampes. Il en futde même pour O-Ei. Paysage fantastique d’ombre et de lumière, O-Eipeint ici une maison du Yoshiwara. Elle joue avecl’ombre des clients, simples silhouettes, au premierplan, et les courtisanes assises dans la vaste pièceéclairée. Au fond de la salle se tiennent les oiran,courtisanes de haut rang, tandis que sur les côtés,attendent les plus jeunes, moins titrées. L’entréeest située sur la droite. Une courtisane précédéed’une jeune apprentie kamuro semble rentrer desa promenade officielle, oiran dôchû, qui attire lafoule des potentiels clients dans l’allée centrale duYoshiwara. Cette peinture de O-Ei est différentedes autres œuvres sur le même sujet. Elle nes’attache pas à la beauté particulière d’une courtisane,les visages éclairés sont ici stéréotypés. Elle nepeint pas l’intérieur d’une pièce ou clients, geishaset courtisanes s’amusent ensemble. Elle peint cesjeunes femmes à travers les barreaux et quoiqueles visages des clients restent dans la pénombre,on imagine facilement leur convoitise. C’est l’at-mosphère particulière du Yoshiwara qu’elle tented’exprimer. Peintre, O-Ei était aussi une femmeet si le Yoshiwara était un lieu où l’on se rendaitlibrement sans risquer l’opprobre, nul doute qu’ellene pouvait s’empêcher de penser au sort des cour-tisanes enfermées. Cette œuvre n’est pas signée,pourtant O-Ei a dissimulé les idéogrammes deson prénom et nom d’artiste dans les trois lanternes.Cette remarquable peinture d’ombre et de lumièreaux coloris doux mais aussi chatoyants fut reprisepar SUgIUrA Hinako dans son manga Sarusuberi.

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Elle ressemblait beaucoup à son père par son caractère et sa passion pour le dessin.

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Q ui était KAtSUSHIKA O-Ei dont le nomd’artiste était KAtSUSHIKA Oi, l’héroïnedu manga et de Sarusuberi Miss Ho-

kusai ? Si les grandes lignes de sa vie sont connues,il reste cependant de nombreux points à élucider.Fille de l’illustre KAtSUSHIKA Hokusai (1760-1849), elle fut la seule de ses cinq enfants (certainsdisent qu’il en eut un sixième) à hériter du talentde son père et à choisir la même voie. On ignoresa date de naissance et de décès, mais des écritsprouvent qu’elle travailla aux côtés de son père,qu’elle prit soin de lui jusqu’à son dernier souffleet qu’elle donna ensuite des cours de dessin touten continuant de peindre pour gagner sa vie. Ellefut proche de son père, et lui ressemblait, disait-on par son caractère volontaire, sa passion pourle dessin et son désintérêt des tâches ménagères.Son visage n’était guère gracieux et son père lasurnommait Ago, “menton”, à cause de son mentonanguleux. Elle prêtait peu d’importance à sa mise.Elle tenait cependant à être toujours parfaitementcoiffée, sa seule coquetterie !Hokusai disait de O-Ei qu’elle le surpassait pourles peintures de beautés féminines et de nombreuxchercheurs s’accordent pour dire qu’elle aida sonpère pour certaines œuvres peintes. Sa signaturen’apparaît pas, sans doute parce que la notoriétéde son père permettait de vendre les œuvres à unmeilleur prix. On ne sait précisément quelle futl’étendue de son œuvre. Seule une dizaine de pein-tures de O-Ei sont répertoriées à travers le monde.Le musée Ôta possède l’une des plus intéressantes :Yoshiwara koushi saki no zu - À travers les barreauxdu Yoshiwara.Le Yoshiwara, le quartier des plaisirs de la capitaleEdo, vit le jour en 1617. Détruit par le grandincendie de 1657, il fut reconstruit, sous le nomde Shin-Yoshiwara (nouveau Yoshiwara), lamême année, dans un endroit plus éloigné ducentre de la ville. Entouré d’un fossé et ceintd’une palissade, le Yoshiwara n’avait qu’uneseule porte que les courtisanes ne pouvaientjamais franchir, sauf si un riche clientles achetait à leur tenancier. Venduespar leur famille et enfermées danscette citadelle des plaisirs depuis leurtendre enfance, elles recevaient uneéducation extrêmement poussée. Unguide imprimé du Yoshiwara étaiten vente, il décrivait chaque maison,indiquait le nom et le rang des cour-tisanes qui y exerçaient. Lieu d’un

grand raffinement, les codes du Yoshiwara étaientstricts et tous les clients, du plus riche au pluspauvre, devaient s’y plier. Les luxueux atours descourtisanes, si bien rendus dans les peintures et es-tampes japonaises font parfois oublier la vie péniblede ces malheureuses jeunes filles. Celles qui, maladesou qui n’avaient pas de succès auprès des meilleursclients, étaient renvoyées dans des maisons de basétage où elles mourraient jeunes et misérables.O-Ei, comme son père et bien d’autres peintres,s’intéressa à l’art occidental. De nombreusesgravures européennes circulaient à travers l’archipel.Hokusai étudia la perspective occidentale qu’ilreprésenta dans plusieurs pages de sa célèbre Manga(ensemble de 15 carnets de dessins sur de multiples

DESTIN Portrait d’une femme au pinceauL’œuvre de O-Ei, personnage central deMiss Hokusai, reste méconnue. Nousavons enquêté pour vous la présenter.

sujets publiés à partir de 1814, destinés à sesdisciples ou à tous ceux qui voulaient apprendre àdessiner). Il s’intéressa aussi aux ombres portéesqu’il reproduisit dans certaines estampes. Il en futde même pour O-Ei. Paysage fantastique d’ombre et de lumière, O-Eipeint ici une maison du Yoshiwara. Elle joue avecl’ombre des clients, simples silhouettes, au premierplan, et les courtisanes assises dans la vaste pièceéclairée. Au fond de la salle se tiennent les oiran,courtisanes de haut rang, tandis que sur les côtés,attendent les plus jeunes, moins titrées. L’entréeest située sur la droite. Une courtisane précédéed’une jeune apprentie kamuro semble rentrer desa promenade officielle, oiran dôchû, qui attire lafoule des potentiels clients dans l’allée centrale duYoshiwara. Cette peinture de O-Ei est différentedes autres œuvres sur le même sujet. Elle nes’attache pas à la beauté particulière d’une courtisane,les visages éclairés sont ici stéréotypés. Elle nepeint pas l’intérieur d’une pièce ou clients, geishaset courtisanes s’amusent ensemble. Elle peint cesjeunes femmes à travers les barreaux et quoiqueles visages des clients restent dans la pénombre,on imagine facilement leur convoitise. C’est l’at-mosphère particulière du Yoshiwara qu’elle tented’exprimer. Peintre, O-Ei était aussi une femmeet si le Yoshiwara était un lieu où l’on se rendaitlibrement sans risquer l’opprobre, nul doute qu’ellene pouvait s’empêcher de penser au sort des cour-tisanes enfermées. Cette œuvre n’est pas signée,pourtant O-Ei a dissimulé les idéogrammes deson prénom et nom d’artiste dans les trois lanternes.Cette remarquable peinture d’ombre et de lumièreaux coloris doux mais aussi chatoyants fut reprisepar SUgIUrA Hinako dans son manga Sarusuberi.

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A u cœur du quartier de Shibuya, à quelquespas du sanctuaire Meiji, du quartier chicd’Omote-sandô et de l’effervescence de

Takeshita-dôri, la rue bruyante de la mode jeuneet colorée, le musée Ôta offre un havre de tranquillité.Ouvert depuis 1970 par les descendants du collec-tionneur ÔTa Seizô V, le Ôta Ukiyo-e MemorialMuseum of art possède l’une des plus belles col-lections de peintures et d’estampes représentativesde l’ukiyo-e, Monde flottant, miroir de la vie desJaponais à l’époque d’Edo (1603-1868). Plus de14 000 œuvres d’artistes les plus célèbres et dansun remarquable état de conservation y sont pré-sentées. C’est le seul musée de Tôkyô où l’on peutadmirer, tout au long de l’année, des expositionsthématiques sur l’art de l’ukiyo-e. L’autre charmede ce musée, c’est son décor traditionnel. Les plusbelles peintures sont admirées, assis sur des tatamis.Un minuscule jardin de pierres décoré de planteset situé au milieu de la salle principale, permet aux

visiteurs de prendre quelque repos. Parmi les œuvressignées Hokusai, Utamaro, Hiroshige, etc., la col-lection comporte une œuvre rare de KatsushikaO-Ei, la fille du peintre japonais le plus connu au

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monde, Katsu shika Hokusai. C’est elle, O-Ei, l’hé-roïne du manga et du dessin animé Sarusuberi,Miss Hokusai.

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Yoshiwara koushi saki no zu - À travers les barreaux du Yoshiwara (peinture sur papier, 26.3 x 39.4 cm, entre 1818-1844) de KATSUSHIKA O-Ei.

TRÉSORS A la découverte du musée ÔtaDepuis 1970, l’établissement permet dedécouvrir l’extraordinaire collectiond’estampes réunies par ÔTA Seizô V.

Plus de 14 000 œuvres des principaux artistes de l’ukiyo-e sont présentées dans ce musée.

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N ée à Tôkyô dans une famille traditionnellede créateurs de kimonos, Sugiura Hi-nako se passionna très jeune pour le

dessin, le design et pour le Japon de l’époque d’Edo.Mangaka de renom, elle obtint plusieurs prix aucours de sa carrière, mais c’est aussi en tant quespécialiste de l’histoire et de la société japonaise del’époque d’Edo, qu’elle fut connue du grand publicpour ses prestations dans des émissions téléviséesconcernant ce domaine. Elle publia également denombreux livres sur le Japon d’Edo. ravissante,cultivée, elle jouissait d’une grande popularité. aujourd’hui, son frère SuzuKi Masaya et sonépouse Hiroko entretiennent pieusement sa mé-moire. ils parlent chaleureusement de leur parenteet c’est avec émotion et fierté qu’ils m’ont montréles dessins originaux ainsi que la riche bibliothèquequ’elle a laissés.

Son manga Sarusuberi parut, sous forme de feuilletondans le magazine, hebdomadaire à l’époque, MangaSunday, entre 1983 et 1988. il comporte 30 chapitreset décrit la vie à l’époque d’Edo. Les mangas qui yavaient été publiés jusque-là s’adressaient surtoutà un public masculin. Sugiura Hinako choisit deprésenter un manga résolument nouveau. S’adressantaussi bien aux lecteurs masculins que féminins,l’auteur prit pour protagoniste une jeune femme

PORTRAIT Incroyable Sugiura HinakoGrâce à son immense talent et saconnaissance précise des mœurs d’Edo,la mangaka est devenue une référence.

d’exception, O-Ei, la fille de Hokusai. Difficiled’être la fille d’un père aussi célèbre et talentueux.Mais Sugiura Hinako sait nous la rendre attachantepar ses imperfections. Loin de la jeune fille modèleque l’on cherche à marier pour assurer la descendance,O-Ei vit, comme son père, pour son art. Tant pispour le ménage, cela ne l’intéresse pas. Elle estcomme elle est et ne cherche pas à plaire. Elle s’ex-prime comme un homme et ne craint pas de bous-culer et de taquiner les disciples de son père ou lesautres peintres. C’est aussi une jeune femme pleinede vie qui se pose, comme toutes les jeunes filles,des questions sur l’amour. Si la vraie O-Ei se mariapuis divorça rapidement, le manga et le films’arrêtent avant cette partie de sa vie.Sugiura Hinako a emprunté le titre Sarusuberi àun haikai de la poétesse Kaga no Chiyojo (1703-1775). Dans son poème, cette dernière chantait labeauté des sarusuberi, lilas des indes .Chireba saki, chireba saki, sarusuberiTombent puis refleurissent, tombent puis refleurissentles fleurs de lilas des Indes

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L’une des caractéristiques du travail de SUGIURA Hinako repose sur sa recherche du détail comme l’illustre ce dessin en hommage à KATSUSHIKA O-Ei (voir p. 11).

Couvertures de la première édition en format

poche du manga Sarusuberi de SUGIURA Hinako.

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SuzuKI Masaya raconte que sa sœur appréciait cesarbustes et le tapis de fleurs que formaient leurspétales qui jonchaient le sol.En japonais, les trois idéogrammes utilisés pour lenom de cet arbuste sarusuberi, se traduisent litté-ralement par : “Cent jours de floraison”. C’est lesens du titre du manga de SugIurA Hinako. Elledécrit cent jours de la vie d’Edo, l’animation desquartiers, les relations humaines, etc. Le surnaturelavec ses revenants, yôkai et autres entités estégalement très présent. O-Ei vit avec son père aucœur même du monde de la peinture et de l’estampejaponaise. On croise des grands noms de l’estampecomme KItAgAwA utamaro, KEISAI Eisen, KAt-SuKAwA Shunsho, utAgAwA Kuninao. Les moin-dres détails de la vie quotidienne des gens de cetteépoque sont rendus avec naturel et nous font re-monter le temps et retrouver l’atmosphère que lespeintres de l’ukiyo-e, en particulier Hokusai, ont sibien rendue dans leurs estampes. SuzuKI Masaya, qui fut très proche de sa sœur, etson épouse Hiroko ont été émus lorsqu’ils ontreçu une lettre de HArA Keiichi, passionné desmangas de SugIurA Hinako, leur exprimant sondésir de faire de Sarusuberi un dessin animé. “Lefilm d’animation qu’il a réalisé est magnifique et jesuis certain que ma sœur, de là où elle se trouve, doiten être profondément heureuse”, assure-t-il.Il est rare qu’un manga trouve encore les faveursdu public trois décennies après sa publication. Celaprouve la qualité et l’originalité du travail deSugIurA Hinako. Son manga Sarusuberi prendune nouvelle ampleur avec l’œuvre réalisée parHArA Keiichi. grâce à ce manga et à ce film d’ani-mation, les passionnés du Japon traditionnel etcontemporain pourront se replonger avec délicedans cette époque révolue. B. K-R.

O n ne peut pas évoquer l’existence desartistes comme Hokusai sans parlerdes éditeurs qui ont joué un rôle consi-

dérable dans la diffusion de leurs œuvres. DansMiss Hokusai, il est question à plusieurs reprisesde leur relation parfois tendue, car, en tant quecommerçant, ils se montrent très exigeants surla qualité du travail. C’est au début de l’époque d’Edo que l’édition acommencé à prendre son envol dans le pays.D’abord à Kyôto où l’on trouvait les lettrés et lesreligieux, puis progressivement à Edo où s’est dé-veloppée une culture plus urbaine et plus populaire.Autant les premiers ouvrages édités étaient presqueexclusivement composés de textes et réservés à unlectorat peu nombreux. Publiés à Saga, à l’ouestde la capitale impériale, ces livres portaient le nomde Sagabon [Livres de Saga]. Peu d’entre euxcontenaient des illustrations, mais devant le succèsde ses ouvrages illustrés et la nécessité de conquérirune audience plus large pour de simples raisonséconomiques, les éditeurs ont entrepris de proposerdes livres à l’intérieur desquels l’image était plusprésente voire sans texte à l’exception d’une préface.Ce type de livres a pris son envol à partir du débutdu XVIIIe siècle et n’a cessé de se développer parla suite. Profitant de l’engouement du public, les éditeursont mis en place une relation privilégiée avecleurs lecteurs suscitant chez ces derniers une dé-pendance très lucrative. Au début du printemps,les maisons d’édition avaient pour habitude d’an-noncer leurs nouveaux titres afin d’amener lesamateurs à se rendre dans les librairies. Cesdernières étaient bien achalandées et recevaientune nombreuse clientèle désireuse de découvrirles dernières nouveautés. Le piratage était aussifréquent malgré l’existence d’un droit à publier(hankabu) qui leur réservait en principe l’exclusivité.L’existence d’éditions pirates prouve que le livreétait un commerce profitable.Le système de distribution des livres s’est aussirapidement développé grâce à l’amélioration desmoyens de communication dans l’archipel sousl’impulsion des autorités shogunales. Outre lescolporteurs spécialisés, des librairies se sont ouvertesun peu partout, certaines d’elles pratiquant la lo-cation de livres (kashihonya). Ce système, qui alongtemps perduré dans le pays, a permis l’accès àla lecture à un nombre chaque jour plus élevé deJaponais qui n’auraient jamais eu sinon les moyensde se payer des livres.

Au fil du temps, les artistes du “monde flottant”se sont davantage impliqués dans le travail éditorialcompte tenu du succès populaire des ouvrages il-lustrés. Les éditeurs, quant à eux, ont commencéà prendre l’habitude de publier indépendammentdes feuilles simples reprenant le travail de sesartistes grâce à l’amélioration des techniques de

reproduction. A Edo où la population dépasse lemillion d’habitants, la demande est forte. L’éditiondevient pour les artistes un complément de revenusnon négligeable. Les livres contribuent à les rendrecélèbres puisque leur nom apparaît désormais, cequi n’était pas le cas dans les premières années decette aventure éditoriale. Hokusai et sa fille y ontlargement participé leur permettant non seulementde mieux vivre, mais aussi de gagner leurs lettresde noblesse auprès d’un lectorat qui appréciait laqualité de leur travail. O. N.

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O-Ei observant son père Hokusai, dessin original

de SUGIURA Hinako pour son manga Sarusuberi.

HISTOIRE Le rôle des éditeursLe talent de Hokusai et de sa fillen’aurait pas atteint une telle réputationsans l’existence des maisons d’édition.

Le travail de l’éditeur TATSUYA vu par KATSUSHIKA

Hokusai en 1802.

Tôshisen ehon shichigonritsu illustré par KATSU SHIKA

Hokusai en 1836.

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14 ZOOM JAPON numéro 53 septembre 2015

ZOOM CULTURE

h uMeuR par KoGA Ritsuko

Je rêvais d’habiter dans cette France ressem-blant à un conte de fée. Depuis que je vis ici,je me suis habituée à la plupart des chosesmême les plus surprenantes, mais il y a unsujet qui m'ébranle toujours. il s'agit de lamendicité que je n'ai pas connue dans monpays alors qu'on y compte aussi des SDF oudes chômeurs. personne ne mendie malgré laprécarité, conformément à la loi qui l'interditdans la mesure où la constitution stipule ledroit et l'obligation de travailler pour toutcitoyen. (J'ai découvert dans la constitutionfrançaise la phrase suivante : chacun a ledevoir de travailler. oh ! est-ce aussi valablepour les salariés en cDi ? Bon, ça fait long-temps que j'ai compris que le droit était plusfort que le devoir dans ce pays).Ainsi je ne sais pas comment réagir face auxmendiants. leur situation me touche, mais jen'ose pas leur donner d'ar-gent parce que, d'une part,si je le fais, j'ai l'impressiond'être supérieure à eux.D'autre part, je pense ne paspouvoir faire la charité à toutle monde. Je peux avoir 2 €à ce moment-là, alors quej'ai moi-même besoin de 1000 € pour payermon loyer, mes impôts, mon titre de transport,etc. ce n'est pas toujours facile. D’ailleurs,beaucoup d'entre eux sollicitent "une petitepièce de monnaie, un ticket de métro ou un ticketresto", mais il y a une grande différence entreces trois trucs ! Si je leur partage mes 5 cen-times, ils vont sans doute faire la grimace. Voilàpourquoi je n'arrive à rien leur donner et je mesens coupable chaque matin quand j'en croisedans les transports et dans la rue. Récemment, en suivant l'exemple d'un ami,j'ai réussi à donner une pièce à un SDF. cejour-là, j'ai marché d'un pas allègre ! une nou-velle barrière dans ma vie parisienne a été fran-chie ! Mais serais-je capable de mendier moiaussi si un jour je suis sans le sou ? A vrai dire,je me suis entraînée à imaginer cette situationdès mon arrivée à paris et j'ai souvent réfléchiau discours que je ferais dans le métro. il estpresque au point…

Donner, oui mais…

ciNéMA Mizoguchi avantMizoguchiAprès s’être principalement intéressé

aux films de l’âge d’or du cinéma

japonais, c’est-à-dire celui des années

1950, on découvre petit à petit des

chefs-d’œuvre plus anciens réalisés par

Ozu ou encore KUROSAWA dont

plusieurs moins connus sortiront cet

automne. MIZOGUCHI Kenji n’échappe

pas à cette règle et on ne peut que se

féliciter de l’initiative de Carlotta qui

propose Contes des chrysanthèmes

tardifs (Zangiku monogatari) réalisés en

1939. A cette époque, le cinéaste

venait de tourner Roei no uta (Le chant

de la caserne), un film de commande

exaltant le patriotisme dans un pays

en guerre depuis huit ans. Aussi

voulait-il

réaliser une

œuvre plus

personnelle.

Il y parvint

et en fut

très

satisfait. “Je

pense que j’ai

pu tourner ce

film à ma

guise”, dira-

t-il par la

suite. Ce drame psychologique sur la

vie d’un acteur de kabuki inspiré par

le grand ONOE Kikunosuke est

l’occasion pour le cinéaste de prouver

une nouvelle fois son talent de

conteur subtil grâce à une mise en

scène très fluide adaptée au monde du

théâtre qu’il saisit parfaitement. Un

film qui se déguste comme un bon vin.

Contes des chrysanthèmes tardifs (Zangiku

monogatari, 1939) de MizoGuchi Kenji.

en salles le 9 septembre.

SpectAcle L’awa odorienflamme ParisVéritable institution au Japon, symbole

de l’esprit des matsuri (voir Zoom Japon

n°52), l’awa odori

débarque à Paris

les 1er et 2 octobre.

Trente des

meilleurs danseurs

et musiciens de

Tokushima,

berceau d'Awa

Odori, viendront

pour la première

fois à Paris donner

une initiation et une démonstration

gratuites de leur art au public français.

Ils seront le 1er octobre de 19h à 20h30 à

la Maison de la culture du Japon à Paris

avant de se produire, le 2, place des

Vosges qui prendra pour l’occasion des

airs de petit Japon. Une façon originale

de se plonger dans l’univers des matsuri

si cher aux Japonais.

101bis, quai branly, 75015 Paris

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MANGA Branchez-voussur ArteDepuis que Komikku

publie des mangas, la

jeune maison d’édition

s’attache à nous offrir

des œuvres originales et

attrayantes. Après Le

Maîtres des livres de SHINOHARA Umiharu,

il nous propose Arte d’ÔKUBO Kei,

l’histoire d’une jeune aristocrate bien

décidée à devenir peintre malgré la

misogynie ambiante.

Arte de Ôkubo kei, trad. de Ryoko Akiyama,

komikku éditions, 7,90 €

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Le 3 septembre, la Chine populaire célèbrerade façon ostentatoire la fin de la SecondeGuerre mondiale en Asie. Une date choisie,

pour la première fois l’année dernière, pourmarquer la fin de ce que les Chinois appellentcommunément “guerre de résistance contre l’oc-cupation japonaise”. En Europe, on oublie souventque le conflit mondial n’a pas commencé le 1er

septembre 1939 lorsque l’Allemagne a envahi laPologne, mais qu’il a débuté en 1931 en Chineavec “l’incident de Mandchourie” qui a servi deprétexte à l’armée impériale pour mener uneguerre qui n’avait pas de nom. Dans leur remar-quable ouvrage Le Japon en guerre, Haruko TayaCook et Theodore F. Cook rappellent d’ailleurs

que “aussi étrange que cela puisse paraître, plusd’un demi-siècle après la fin du conflit, la guerren’a même pas un nom unique sur lequel toute lanation s’accorde. Pendant nos entretiens, les gensparlaient de la guerre du Pacifique, “la guerre de laGrande Asie orientale, “l’incident de Chine”, “laguerre sino-japonaise”, “la guerre de quinze ans”,ou nous expliquaient que la guerre en Asie n’avaitrien à voir avec le reste de la “Seconde Guerre mon-diale”.” Le principal intérêt de ce livre repose sur les nom-breux témoignages recueillis par ce couple de pro-fesseurs à la William Patterson University grâceauxquels on saisit mieux comment le Japon avécu “la guerre”. Ils ont rencontré des gens ordinairesou des officiers présents à Nankin, un cadet de lamarine devenu abbé bouddhiste zen, un ingénieursur la ligne de chemin de fer Birmanie-Siam, unpilote de chasse sur la frontière soviétique ou

Tandis qu’on commémore le 70e

anniversaire de la fin de la guerre, deuxouvrages nous éclairent sur cette période.

HISTOIRE Dans la spirale infernaleencore des victimes du premier bombardementatomique de l’histoire à Hiroshima, le 6 août1945. Chacun d’entre eux livre sans ambages sonexpérience et apporte un éclairage intéressant surcette période. Dans Les Japonais et la guerre 1937-1952 (Fayard, 2013), Michael Lucken nous avaitdéjà offert une vision de l’intérieur, en explorantla manière avec laquelle la population avait réagià cette situation. L’historien français avait no-tamment souligné les sentiments contradictoiresqui agitaient alors la société japonaise, contredisantainsi l’idée d’unanimité de tout un peuple prêt àmourir sans sourciller pour l’empereur. Constance Sereni et Pierre-François Souyri s’in-téressent aussi à cet aspect des choses par le biaisdes “unités spéciales d’attaque” (tokubetsu kôgeki-tai ou tokkô) plus connues sous le nom de kamikazes.Les deux spécialistes du Japon à l’université deGenève reviennent en détail sur la manière dontces “bombes humaines” ont été recrutées et com-ment l’état-major japonais a imaginé de recourirà cette stratégie alors que la défaite du pays étaitinéluctable. Ils démontent de façon implacable le

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L’armée impériale triomphe en 1937 à Shanghai.

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septembre 2015 numéro 53 zooM JAPon 17

zooM cuLTuRe

mythe fondateur du premier kamikaze sur lequelÔnishi Takijirô se serait appuyé pour imposercette tactique. En effet, ce dernier part du sacrificedu vice-amiral ArimA masafumi qui aurait jetéson avion contre le porte-avions Uss Franklin.“Une histoire qui a largement été embellie par lamarine japonaise”, assurent les deux auteurs. sielle permet de valider la création des tokkô, ellen’est pas suffisante pour convaincre les hommesqui seront désignés pour accomplir les missionssuicides. Aux Philippines, entre décembre 1944et janvier 1945, environ 650 sont menées et27 % d’entre elles parviennent à endommagerun navire ennemi. “Le taux de succès est assezélevé pour justifier l’utilisation continue de latactique kamikaze”. malgré le conditionnementidéologique, tous les pilotes ne sont pas prêts àmourir. “Je le dis clairement : je ne meurs pasparce que j’en ai envie”, écrit ÔTsUkA Akioquelques jours avant de mourir le 28 avril 1945.Grâce à ces deux ouvrages qui se complètent, onappréhende beaucoup mieux pourquoi ce conflitpèse encore sur le Japon 70 ans après. Un poidsdont il a beaucoup de mal à se séparer.

ODAIRA NAMIHEI

RéféRencesLe Japon en guerre de Haruko Taya cook &Theodore f. cook, trad. de l’anglais Danièle

Mazingarbe, editions de fallois, 22 €Kamikazes de constance sereni & Pierre-françois souyri, éd. flammarion, coll. Au fil del’histoire, 22 €

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A Chiran, des jeunes filles saluent le départ des pilotes kamikaze avec des branches de cerisiers.

Hiroshima dévastée après le premier bombardement atomique de l’histoire, le 6 août 1945.

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L a famille ne correspond pas du tout à monidée du cinéma. Je crois seulement au principede la nature selon lequel tout homme est

mortel, toute chose qui a une forme est amenée à dis-paraître un jour de ce monde. Et l’espoir que jetraduis dans mes films est basé sur la reconnaissancede cette réalité.” Ces propos de kurosAwA kiyoshicités en introduction de l’excellente étude queDiane Arnaud lui a consacrée en 2007 (KiyoshiKurosawa, mémoire de la disparition, éd. rougeprofond, 20€) sont confirmés dans la dernière réa-lisation du cinéaste Vers l’autre rive (Kishibe notabi) qui sortira sur les écrans français le 30 septembre.Présenté à Cannes dans la section un certainregard, le film a obtenu le Prix de la mise en scène,récompense méritée pour cette histoire de fantômesqui, à la différence de ses premières œuvres, ne faitplus peur. Ce long-métrage marque une sorted’aboutissement dans sa carrière entamée il y adéjà plus de 30 ans. Depuis le succès de Shokuzai (2012), qui était àl’origine une mini-série télévisée pour la chaînecryptée wowow, Version originale Condor adécidé de suivre le travail du cinéaste comme unbon éditeur suit un écrivain auquel il croit. Jusque-là, l’œuvre de kurosAwA kiyoshi nous arrivait augré des modes sans nous permettre de vraimentcomprendre comment elle avait évolué. A l’occasionde la sortie de Vers l’autre rive, le distributeur encollaboration avec le cinéma reflet Médicis proposeune rétrospective de ses films les plus marquants

du 16 au 22 septembre. une bonne opportunitépour ceux qui ne connaissent pas ses longs-métragesplus anciens de les découvrir grâce à des discussionsmenées par des spécialistes de son œuvre qui inter-viendront après chaque projection. Il sera ainsi possible de voir ou revoir Kaïro (2000)avec le formidable YAkusho kôji, l’acteur fétichedu cinéaste, qui l’a accompagné dans de nombreusesaventures cinématographiques. Dans cette œuvrecomme dans beaucoup d’autres à l’instar de TokyoSonata (2008), sans doute le meilleur film japonaisde ces 25 dernières années, le cinéaste profite deson histoire pour dresser un portrait sans fard deson pays en train de perdre son âme. C’est tout àfait flagrant avec ce drame où il décrit la déchéanced’un homme privé de travail qui n’existe plus auxyeux d’une société dont le comportement se résumeà des migrations quotidiennes vers les gares pendantque les exclus s’inventent des existences sociales

virtuelles ou finissent par se supprimer. Avec Cha-risma sorti en 1999, il avait abordé de façon dé-boussolante la prise de distance avec la réalité enexilant YAkusho kôji dans une forêt où uneétrange société s’est créée et se déchire. Il y a unevolonté de frapper les esprits, de réveiller sescontemporains. kurosAwA kiyoshi a le don deles entraîner dans des directions inattendues afinde les sortir de leur petit confort. Shokuzai participede cette approche en brassant une nouvelle foisles genres. Le film policier se transforme par mo-ments en film fantastique et offre un regard parfoisglaçant sur les rapports humains. C’est peut-êtrepour cette raison qu’il tourne ensuite Real (2013),une romance fantastique qui permet au cinéastede se montrer plus optimiste. Vers l’autre rives’impose comme une synthèse de l’ensemble deson œuvre.

GABRIEL BERNARD

A l’occasion de la sortie de Vers l’autre rive,une rétrospective de l’œuvre du cinéaste estorganisée au Reflet Médicis, à Paris.

CINÉMA Kurosawa Kiyoshi se réinvente

INFOS PRATIQUESRétrospective Kurosawa du 16 au 22 septembre au Reflet Médicis, 3, rue Champollion, 75005 Paris.Réservations à compter du 14 septembre.

Avec Tokyo Sonata, sorti en 2008, le cinéaste signe le meilleur film japonais de ces 25 dernières années.

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S uzu Tofu, petit fabricant de tôfu artisanalapparu il y a 11 ans dans les Yvelines, à20 km de Paris, est devenu une référence

pour la qualité incomparable de ses produits.En les commercialisant dans des épiceries ja-ponaises de Paris, sa réputation lui a permis defournir son tôfu ou lait de soja à de grandesmaisons de la gastronomie française. Cetteannée, le fondateur SUzUKI Akira, l'unique ar-tisan de tôfu japonais en France, s’est retiré dumétier à l’âge de 70 ans. Avant son retour défi-nitif au Japon, il a légué son savoir-faire à la gé-nération suivante, en choisissant TAKAYANAGI

Masatoshi, surnommé Taka, un pâtissier installéau Mans, comme son unique successeur.

Pourquoi avez-vous commencé ce métier ?SUZUKI Akira : Pourquoi le tôfu ? Ce n’étaitqu’un hasard, comme tout mon parcours (rires).J’ai vécu en France pendant 51 ans et je fais cemétier depuis 2004, j’avais 60 ans. Avant, j’aitravaillé dans une entreprise française et aussi ja-ponaise. Au bout de 20 ans dans cette boîte, onvoulait me renvoyer au pays. Lorsque j’ai décidéde rester ici, un ami japonais tenant une épicerieparisienne m’a conseillé de me lancer dans laproduction de tôfu. Puisque je ne trouvais nullepart de bon tôfu en France à l’époque, je me suisdit que ce secteur avait de l’avenir.SUZUKI Shigeko : Il s’est lancé dans cette aven-ture sans me demander mon avis et en se char-geant tout seul de la fabrication, de la livraisonet de la distribution, en interdisant à sa femmede s’en mêler! Pourtant, je suis là aujourd’huidans ce garage et je m’occupe de beaucoup depetites tâches (rires). Mais c’est toujours luiqui gère la partie fabrication.

Comment avez-vous appris la technique ?S. A. : Avant le lancement de l’entreprise, j’aieu deux ans de préparation. Je me suis initié à latechnique au Japon dans la région de Kôbe,Nara et de Yamagata. Puis j’ai fait plus de 150 es-sais afin d’obtenir un tôfu d’une certaine qualité.Sinon je continue encore ma recherche pour un“bon tôfu”. Jusqu’à aujourd’hui, en profitant demes vacances au Japon, je me suis rendu chezplus de 100 producteurs de tôfu du pays

Où trouvez-vous les ingrédients du tôfu ?S. A. : Comme j’ai testé des graines de soja dedifférentes origines sans succès, j’importe du Japonceux qui sont destinés à la fabrication de tôfu, bioet sans OGM. Dans l’archipel, il existe des grainesde soja cultivées pour la sauce ou bien pour lemiso, elles sont différentes les unes des autres.

Vous ne vouliez pas cultiver de soja japonaisen France ?

Le fondateur de Suzu Tôfu, SUZUKI Akira atransmis son savoir-faire à un pâtissierjaponais prêt à développer la marque.

TRADITION Tôfu un jour, tôfu toujoursS. A. : Si. J’aurais bien voulu, mais je n’avais pas lacapacité à le faire. Je laisse ce défi à la prochainegénération !

Vous n’avez jamais eu d’apprenti ?S. A. : Non. Mon affaire était tellement modesteque je n’avais pas le moyen d’engager un employé.Avec le tôfu, je voulais juste compléter notrepension de retraite qui n’était pas très élevée. Jen’avais pas l’ambition d’en faire une grosse entreprise.Je n’ai pas fait de démarche publicitaire non plus.

Comment avez-vous connu Taka ? Vous avezrecruté un successeur ?S. A. : Il y a quelques années, j’ai cherché un suc-cesseur et j'ai mis une annonce dans un journal ja-ponais. A ce moment-là, j’ai eu une trentaine decandidatures, même des Etats Unis. Certainsd’entre eux étaient assez âgés. Finalement, rienn’a été conclu. J’avais presque renoncé à mon rêvede transmettre mon savoir-faire. Ça ne fait paslongtemps que Taka est venu visiter mon garageavec ses collaborateurs, une Japonaise et un Français.Quand ils m’ont demandé ce que j’allais faire deSuzu Tôfu, l’idée de la succession m’est revenue.

Pourquoi vous avez retenu Taka ?S. A. : Déjà en raison de son métier. La fabricationde la pâtisserie demande plus de délicatesse quecelle du tôfu. Puis son collaborateur est un inves-tisseur ayant différentes expériences comme l’im-portation d’une grande marque de glace italienneen France. C’est important, on ne peut pas selancer dans un nouveau business sans financement.Moi aussi, j’ai beaucoup investi.

Combien de temps de formation avec Taka ?S. A. : On s’est fixé 2 mois. Il m’a fallu 2 ans, maiscelui qui est intelligent peut apprendre plus vite.Mais si on est vraiment intelligent on évite cemétier (rires).

L’emballage de tôfu dans le garage de Suzu Tôfu.

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Les regards du maître SUZUKI Akira, et son successeur TAKAYANAGI Masatoshi observent avec attention la consistance du tôfu.

TAKAYANAGI Masatoshi : C’est vrai. On dit aussique ceux qui sont intelligents ne font pas le choixd’être pâtissier. Mais si on n’est pas intelligent, onne peut pas réussir dans ce milieu non plus (rires).

Pendant votre formation, y a-t-il des choses àtransmettre à part la technique ?S. A. : Moi, je montre juste le processus. AuJapon, on comptait environ 150 000 fabricants

de tôfu il y a 25 ans. Aujourd’hui parmi 8 000qui restent, il n’y a que 10 % qui préparent le tôfutraditionnel, ça veut dire avec que des graines desoja et du sel nigari, coagulant naturel. La tradition,c’est ce qui est difficile à reproduire lorsqu’oncesse de transmettre. Surtout le goût, ce n’est pasla recette écrite qui nous aide à retrouver le goûtoriginal. Je veux que mon successeur l’expérimentetout au long de sa formation. C’est peut-être un

peu prétentieux à dire, mais personne ne pourracopier le goût de mon tôfu en observant justeune fois le processus de fabrication. T. M. : Il y a la quantité de soja et d’eau àrespecter, mais ça ne veut rien dire. Il faut ap-prendre le bon réglage. Le processus principalest très simple, or il faut faire attention à beaucoupd’éléments, c’est ce qui fait la différence. C’estla même chose pour la fabrication du pain qui

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donne des résultats différents chaque fois malgréla même quantité de farine et de sel. Ça fait partiedu charme du métier et, moi, je n’apprends pasuniquement la technique par mon maître, maisaussi sa façon de penser. Sans le comprendre, jeserai incapable de reproduire son tôfu.

Mme et M. SUZUKI, êtes-vous tristes de vouséloigner de Suzu Tôfu ?S. S. : Mon mari a l’air un peu triste mais moi, çame soulage. Je ne conseille à personne de faire cemétier. (rires)S. A. : Moi, j’ai été un pionnier en France et j’airempli mon rôle. J’ai mis du temps à faireconnaître mon tôfu, alors il ne sera pas oubliéfacilement, je pense. Je compte beaucoup sur lanouvelle génération pour réaliser ce que je n’aipas pu faire. J’ai trouvé une expression décrivantbien ma façon de considérer le tôfu : Takagatôfu, saredo tôfu, qu’on peut traduire littéralementpar “ça n’a beau être que du tôfu, c’est quandmême du tôfu”. Ça veut dire que le tôfu n’estqu’un simple aliment et pas cher, pourtant celaa un sens considérable pour moi.

La marque Suzu Tôfu va continuer d’exister ? T. M. : Oui, je veux préserver le goût de SuzuTôfu. Je ne veux pas laisser se perdre ce que j’ap-précie. Je vais également garder le design de l’em-ballage et le logo. Suzu Tôfu existera toujours. Et à côté, il serait possible que nous montionsune autre affaire avec le tôfu. Une fois acquis lesavoir-faire, je vais le transmettre à un futur jeuneemployé et je veux m’occuper de la possibilité dela culture de soja dans la Sarthe et la fabricationde sel nigari à guérande. Ce serait idéal. Ça faitpartie du développement du Slow food - l’élogede la lenteur, puis cela pourra également favoriserl’essor de ces régions. Tout en restant pâtissier, jeveux profiter de ma présence en France pourdiffuser mon métier.(http://www.corporesanosas.fr/)

KOGA RITSUKO

REPORTAGE Les secrets du bon tôfu

1) Laisser tremper les sojas secs dans l’eaupendant une nuit, jusqu’à ce qu’ils soiental dente. Cette étape influe sur la consistancedu tôfu à la fin. L’état du soja change avec lechangement de température, celle de l’eau etaussi le temps de trempage dans l’eau.

2)Passer dans un blender qui les transformeen purée avec de l’eau. “Cet appareil vient duJapon. J’avais enlevé le moteur pour passer ladouane”, se souvient M. SUzUki en riant.

3) Cuire la purée de soja dans une cocotteavant de la filtrer. Ce qui reste dans l’éta-mine est appelé okara, on peut l'utiliser pourfaire la cuisine.

4) Le liquide filtré est le lait de soja. On y ajoute du sel nigari et on mélange.“Ce n’est qu’une question de calcul chimique,en résumé, on fige de la protéine avec du chlo-rure de sodium. Pourtant c’est la partie la plusdifficile”, explique Takayanagi Masatoshi.

5) Une fois la texture figée, on la verse dansun moule couvert d’une étamine en cotonet on évacue le liquide à l’aide d’un poidspour obtenir du tôfu ferme.

6) On coupe le tôfu fragile en le posant surune planche qui flotte sur l’eau. “Il faut10 ans d’apprentissage pour cela.Taka le maî-trise déjà !” constate fièrement M. SUzUki.

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servie à part), facile à préparer. Mais puisque lesnouilles se digèrent rapidement, les petits monstresréclament le goûter tout de suite après. Etant pâtis-sière moi-même, il m’est impossible de préparerdes gâteaux tous les jours à la maison ! Alors j’aitoujours mon sauveur qui s’appelle le supermarché!On y trouve des pâtisseries variées toutes faites :choux à la crème, éclairs, flans, gâteaux au fromage,etc. Je suis consciente que la qualité est meilleuredans les vraies pâtisseries, mais comment puis-jeme permettre d’y aller 40 jours de suite ? Chez eux,un chou à la crème coûte de 200 à 250 yens tandisque mon sauveur le propose à moins de 100 yens.Parmi les petits plaisirs sucrés du supermarché, lefameux flan au caramel avec un petit bouton à cas-ser au dos pour vider parfaitement le récipient esttoujours populaire. Et il est très à la mode de lemanger congelé au lieu de le consommer frais tout

ZOOM GOURMAND

Ayant duré 40 jours, les vacances scolairesse terminent fin août. Malgré un tas dedevoirs à rendre le 1er septembre, cette

période estivale est la plus joyeuse de l’année pourles écoliers japonais qui en profitent pleinementpour aller à la mer ou à la montagne, voir lesgrands-parents éloignés, participer à des matsuri.En revanche, c’est une période très dure pour lesparents qui doivent réfléchir tous les jours au goû-ter en plus de trois repas à préparer. D’autant plusque nous sommes privés de calme à cause de laprésence continuelle des enfants. Chez moi lematin, à peine terminé le petit-déjeuner, ils medemandent ce qu’on va manger au déjeuner, alorsque j’ai encore le ménage à faire. Au déjeuner, comme il fait extrêmement chaudau Japon en été, je sers des nouilles froides tellesque somen (nouilles très fines et blanches de farinede blé), zaru soba (nouilles de sarrasin froides), rei-men (nouilles d’origine coréenne servies dans unesoupe froide) ou encore la nouveauté zaru-tsukemen (une sorte de ramen froide mais la sauce est

Pour assouvir l’appétit successif des enfantspendant leurs vacances, Haruyo n’a pas hésitéà se rendre chez son sauveur.

FAMILLE C’est l’heure du goûter !

simplement. Ce fabricant a suffisamment d’hu-mour pour sortir le kit à pudding en version formatgéant, plus grand que ma tête. Sinon, il ne faut pasoublier le sucré de la saison: le kakigôri (glace pilée)qu’on peut trouver lors des matsuri, dans des salonsde thé ou des restaurants familiaux. Il est égalementfacile à faire chez soi avec un petit appareil fami-lial. Chacun s’amuse à le napper à son gré : sirop,an (pâte de haricot rouge), kinako (poudre de soja),du miel, lait concentré sucré, etc.Une fois passée la canicule, je serai plus motivéepour préparer des goûters, notamment à mangerchaud : pancake à la saucisse, pain perdu appeléfrench toast au Japon, daigaku-imo (voir la recette),ou crêpes... Contrairement aux enfants ayant lanostalgie des vacances, j’attends l’arrivée de l’au-tomne, la saison des gourmands !

MAEDA HARUYO

Le rayon des pâtisseries fraîches dans un supermarché dépanne souvent Haruyo malgré son métier.

Le flan est l'ami des Japonais depuis plus de 40 ans.

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ZOOM GOURMAND

L A RECETTE DE HARUYO

PRÉPARATION1 - Découper les patates douces en bâton.2 - Bien essuyer puis frire dans l'huile à 160° pendant

15 minutes.3 - Bien égoutter. 4 - Cuire le sucre et l’eau dans une casserole. 5 - Quand le sirop s'épaissit, ajouter la patate douce

cuite.

6 - Bien mélanger puis ajouter le sésame noir. 7 - Déguster chaud ou froid.

INGRÉDIENTS (pour 2 personnes)

2 patates douces50 g de sucre15 ml d’eau5 g de sésame

DAIGAKU-IMO(Patate douce frite)

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O ccupant une position idéale au fondd’une large baie, la charmante ville deKii-Katsuura s’étend en demi-cercle,

colorée par les nombreuses coques aux couleursvives de ses thoniers à quai. Fière de ses traditionsmarines, elle abrite un spectaculaire port de pêcheainsi que le marché au thon frais le plus animédu pays (7h le matin, sauf le week-end). Certainsspécimens déchaînent les passions pour leur

rareté. Il n’est pas rare de voir des commanditairesde grandes chaînes de restaurants de sushis lesacquérir à prix d’or pour ensuite les envoyer dansdes caisses au grand marché de Tsukiji à Tôkyô.A 300m de la gare sur le chemin du port, stoppossible aux relaxants et dépaysants bains de piedspublics. En périphérie de la ville, accès à deuxfabuleux onsen présents dans deux grands hôtelsprivés mais parfaitement accessibles au public etaux touristes. Le premier situé en bout depresqu’île, l’hôtel Urashima (1165-2 Katsuura,Higashimuro-gun, Nachikatsura-chô) apparaîtcomme un dédale d’escaliers et de tunnels amé-

nagés dans un bloc rocheux. Il dispose de bainsjudicieusement aménagés dans des grottes débou-chant sur la mer, un vrai dépaysement !Le second, le ryokanNakanoshima (HigashimuroDistrict, Nachikatsuura) jouit d’une situationexceptionnelle sur une île privée fermant la baiede Kii-Katsuura. Accès en ferry privé depuis l’em-barcadère du port. Bassins intérieurs et extérieursalimentés par des sources chaudes, le onsen exté-rieur étant une petite perle à dimension paradi-siaque. Repas traditionnels kaiseki en sus si sou-haités au restaurant. Agréable jardin boisé enterrasse sur le toit de l’hôtel surplombant la mer.

En suivant la ligne Kisei qui longe toutesa côte, vous verrez toute la richesse decette région qui vaut plus qu’un détour.

Après une visite matinale de son marché au thon, Kii-Katsuura vous offre la possibilité de vous ressourcer dans un de ses nombreux onsen.

DÉCOUVERTE Wakayama en train

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ZOOM VOYAGE

Le phénomène géothermique lié à la beauté despaysages de collines, vallées et forêts, assure à cetterégion un cachet et une manne touristique incon-testable. Les Français n’ont plus la tradition desthermes, aussi faudra t-il qu’ils se soumettent àun rituel d’initiation de l’art du bain avant touteentrée dans un bassin japonais.On se lave soigneusement au savon dans unespace dédié avant de rentrer dans l’eau, on serince abondamment en s’aidant des baquets enbois. Afin de n’offenser personne, il faudra tou-jours avoir à l’esprit qu’il ne s’agit pas de faire satoilette mais de se prélasser, se relaxer, se ressour-cer et de profiter de la symbiose avec la nature.L’eau peut être plus ou moins saline, sulfureuse,ferrugineuse ; certaines personnes peuvent êtreau début incommodées par les vapeurs de soufremais n’ayez aucune crainte, cela ne présente aucundanger et s’estompe au bout de quelques minutes.Dans ces bains règnent toujours, esthétisme, har-monie de la pierre, du bois et du végétal. Détail important, il faudra se résoudre au fait quel’on se baigne totalement nu ! Les plus pudiquesrentreront dans le bassin, équipés d’une petiteserviette blanche qu’ils poseront sur la tête unefois totalement immergés! Femmes et hommesiront systématiquement chacun de leur côté! Der-nière recommandation, ne restez pas plus de20 minutes dans une eau à plus de 50 degrés, lasensation de bien-être qui vous envahit n’est pasproportionnelle au temps resté dans le bassin, ellereste constante!A une trentaine de minutes de Kii-Katsuura, setrouve Kushimoto. Au sortir de la petite gare, àl’extrémité sud de la péninsule, de surprenantesformations géologiques vous attendent sur lerivage. Cet étrange et harmonieux alignement derochers émergeant de la mer, Hisha Gui Iwa, setrouve intimement associé à une légende. Autrefois, la population de Kushimoto auraittenté de construire un pont reliant la presqu’îlede Kii à l’île de Kii-Oshima juste au dessous. Maisla construction achevée était systématiquementdétruite par Amanojaku, gigantesque créature

aquatique. Pour venir en aide aux habitantsdémunis, l’éminent Kôbô-Daishi, grand religieuxet saint fondateur de l'école bouddhiste Shingonessaya alors d’intervenir en proposant ses servicespour l’édification du pont. Le monstre Amano-jaku accepta en posant l’incroyable condition :“Kôbô-Daishi devra construire l’ouvrage seul ! Jevais lui donner la force de 100 chevaux et lui accor-der une journée et une nuit de travail, pas plus ! Al’aube, au chant du coq, il devra s’arrêter !”. Le célèbre moine se mit à jeter de grands blocsrocheux dans la mer dans la direction de l’île deKii-Oshima. Devant la réussite et la bonne avan-cée du projet de Kôbô-Daishi, Amanojaku pritpeur ! Pour gagner son pari, il décida alors de tri-cher en imitant le chant du coq bien avant le leverdu jour. Le pont ne fut ainsi jamais fini !A seulement 30 minutes de bus de la gare, on peutrejoindre l’île de Kii-Oshima par un pont contem-porain bien réel celui-là ! Ce morceau détaché dela grande île principale se brise en une myriadede petites îles baignées par l’océan. Du haut du

phare d'Oshima, la vue sur le Pacifique s’avèresplendide ! C’est sur la côte est de l’île Kii-Oshima, dans lanuit du 18 septembre 1890, que s’échoua l’im-posante frégate turque l’Ertuğrul. Cette dernièrevenait de quitter le port de Yokohama en direc-tion de Constantinople. Pris au piège dans unetempête effroyable et soudaine, l’équipage tentacoûte que coûte en réduisant la voilure de gagnerle port de Kôbe pour se mettre à l’abri.Arrivé à hauteur du cap de Kashinozaki déjàsignalé à l’époque par le phare d’Oshima, lesassauts répétés de hautes vagues déchaînées bri-sèrent le mât de 40 mètres de la frégate. Le navirene disposant plus de propulsion, se mit à dériverdangereusement et heurta les récifs. L’eau envahitalors rapidement la salle des machines et une seulesolution s’offrit à l'amiral Ali Osman Pasha avantque le niveau n’atteigne le pont : l'évacuation etla mise à l’eau des radeaux de survie.Suite au naufrage, 50 officiers et 533 marins trou-vèrent la mort, mais six officiers et 63 marins

C’est sur les récifs de Kushimoto que la frégate turque Ertuğrul s’est échouée en 1890.

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O ccupant une position idéale au fondd’une large baie, la charmante ville deKii-Katsuura s’étend en demi-cercle,

colorée par les nombreuses coques aux couleursvives de ses thoniers à quai. Fière de ses traditionsmarines, elle abrite un spectaculaire port de pêcheainsi que le marché au thon frais le plus animédu pays (7h le matin, sauf le week-end). Certainsspécimens déchaînent les passions pour leur

rareté. Il n’est pas rare de voir des commanditairesde grandes chaînes de restaurants de sushis lesacquérir à prix d’or pour ensuite les envoyer dansdes caisses au grand marché de Tsukiji à Tôkyô.A 300m de la gare sur le chemin du port, stoppossible aux relaxants et dépaysants bains de piedspublics. En périphérie de la ville, accès à deuxfabuleux onsen présents dans deux grands hôtelsprivés mais parfaitement accessibles au public etaux touristes. Le premier situé en bout depresqu’île, l’hôtel Urashima (1165-2 Katsuura,Higashimuro-gun, Nachikatsura-chô) apparaîtcomme un dédale d’escaliers et de tunnels amé-

nagés dans un bloc rocheux. Il dispose de bainsjudicieusement aménagés dans des grottes débou-chant sur la mer, un vrai dépaysement !Le second, le ryokanNakanoshima (HigashimuroDistrict, Nachikatsuura) jouit d’une situationexceptionnelle sur une île privée fermant la baiede Kii-Katsuura. Accès en ferry privé depuis l’em-barcadère du port. Bassins intérieurs et extérieursalimentés par des sources chaudes, le onsen exté-rieur étant une petite perle à dimension paradi-siaque. Repas traditionnels kaiseki en sus si sou-haités au restaurant. Agréable jardin boisé enterrasse sur le toit de l’hôtel surplombant la mer.

En suivant la ligne Kisei qui longe toutesa côte, vous verrez toute la richesse decette région qui vaut plus qu’un détour.

Après une visite matinale de son marché au thon, Kii-Katsuura vous offre la possibilité de vous ressourcer dans un de ses nombreux onsen.

DÉCOUVERTE Wakayama en train

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wakayama).ce dernier édifié en 1585 en haut d’une forma-tion rocheuse, le mont Torafusu, est visible depuistoute la ville avec ses jolis toits en auvent et sesmurs blancs. Sa particularité : le concept archi-tectural nommé Renritsu-shiki. il se composed’un donjon de trois étages, de liaisons couvertesentre les tours et le donjon ainsi que deux portesremarquables dont la porte okaguchi classée aupatrimoine culturel national. au XViie siècle, ila su résister aux grandes batailles de Sekighara etde Kashii (siège d’Ôsaka). La construction d’origine fut malheureusementdétruite à la fin de la Seconde Guerre mondiale,mais reconstruite à l’identique en 1958. au cœurde l’édifice, dans la cour principale, siège le jardinzen momijidani avec son salon privé. De toutebeauté, il provoque à coup sûr chez chaque visi-teur désirant s’initier au wabi-sabi, une réelleémotion esthétique.autre style, le musée d’art moderne dewakayama (1-4-14 Fukiage wakayama). L’ar-

chitecture moderne du bâtiment avec ses célèbrespans de toiture béton élancés en porte à faux,tranche avec le style traditionnel classique du châ-teau juste en arrière à 200 mètres. Ses lignes géo-métriques audacieuses, ses transparences et salégèreté, ses grands volumes intérieurs sont l’œu-vre de l’architecte japonais KuroKawa Kishô,qui a également conçu la nouvelle aile du muséeVan Gogh à amsterdam.a travers ses salles d’exposition, il délivre une trèsbonne synthèse de l’art japonais contemporainavec la présence de nombreuses œuvres d’artisteslocaux, parmi lesquels les réputés KawaGuchi

Kigai, NoNaGaSe Banka, hamaGuchi Yozo,TaNaKa Kyokichi, oNchi Koshiro. Des toilesde grands artistes internationaux y sont égalementprésentes. on peut ainsi y voir des Picasso, redon,rothko, Frank Stella ou George Segal. en aparté,le musée expose sur tout un étage, des peinturestraditionnelles, des dessins, des sculptures del’époque meiji (1868-1912).

MANUEL SANCHEZ

ZOOM VOYAGE

Le château de Wakayama a été reconstruit à l’identique en 1958 après sa destructions treize ans plus tôt.

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Guides pour réussir votre voyage au Japon

En librairie 18€ ttc28 ZOOM JAPON numéro 53 septembre 2015

ZOOM VOYAGE

furent sauvés grâce à l’intervention des habitantsde l’île et à l’opération de sauvetage de la marinejaponaise. De cet événement naquit une rareentente cordiale entre les deux nations et un élande sympathie entre les deux peuples. Le grandsultan de Turquie alla jusqu’à recevoir à Constan-tinople les officiers japonais des navires de sau-vetage pour leur remettre des décorations. L'em-pereur en personne est venu se recueillir sur leslieux en 1929 ainsi que plus récemment, le pré-sident turc Abdullah Gül en 2008.A côté du phare d’Oshima furent aménagés enmémoire de la catastrophe, un cimetière avec lesdépouilles des marins turcs, un monument com-mémoratif, ainsi qu’un musée (Kushimoto Tur-kish Memorial and Museum 1025-26 Kashino,Kushimoto 649-3631) ! Un projet de renfloue-ment, puis d’exposition de l’Ertuğrul restauré esten cours.En poursuivant le long de la côte, on finit paratteindre shirahama (littéralement ‘plageblanche’), le bord de mer sauvage, d’un sable blancimmaculé (importé d’Australie), contraste avecles nombreuses constructions hôtelièresmodernes, parcs d’attraction, aquarium... enarrière de la ville. La grande plage en demi luneaux eaux bleues transparentes offrira une char-mante halte baignade et rafraîchissement avantde poursuivre l’exploration de cette côte ouest.Attention! La première station balnéaire du Kan-sai se retrouve chaque année bondée en juillet etaoût, saison des bains de mer, et quasi déserte lereste de l’année.Pour les amateurs de randonnées ou d’expériencesspirituelles, rendez-vous à Tanabe. Point d’accèset de départ aux chemins de pèlerinage millénairesdu Kumano Kodo (inscrits au Patrimoine mon-dial de l'UNEsCO), la station balnéaire deTanabe doit aussi sa renommée aux nombreuxpetits restaurants ou gargotes, appelées izakaya.Ainsi avant de partir à la recherche des kamis(divinités shintoïstes) dans les forêts de la pénin-sule, les pèlerins peuvent prendre des forces ensavourant poissons et fruits de mer.

En empruntant à pied la rue principale, on rejointaprès 5 minutes la statue du fondateur (UEshIbA

Morihei) de l’aïkido qui trône devant la grandeplage d’Ogigahama. Dans le temple Kôzan-ji voi-sin, il sera également possible de se recueillirdevant sa tombe. Le charmant parc Kagura àproximité pourra conclure la promenade.La fabrique d’umeshu de Nakata (1475 shimo-misu, Tanabe) située à 8 minutes en bus de la sta-tion JR Kiitanabe) vaut aussi le déplacement.Célèbre depuis l'ère de Nara (710-794) pour sonbienfait pour la santé et son taux élevé d'acidecitrique, l’ume de la province de Kishû est récoltéchaque année au mois de juin, pas encore tout àfait mûr. Dans le but de conserver les vertus decette prune à l’apparence d’un abricot, les Japonaisont inventé au début de l’ère Edo, la liqueurumeshu. Le processus d’élaboration du précieuxnectar : stockage au préalable dans du sel, rinçage,

macération avec adjonction de sucre kori-zato etd’alcool de riz ou saké, puis maturation.Tout proche, le village de Yuasa demeure le ber-ceau de la sauce soja au Japon. De grands chefscuisiniers de Tôkyô mais aussi Français viennentsur place pour s’approvisionner avec la meilleureproduction artisanale datant de trois siècles etn’ayant jamais dévié de sa composition originelle.Visite de la fabrique de la sauce soja Kadocho -La préparation de la sauce shôyu s’effectue tou-jours de manière artisanale par un procédé dechauffage au bois. Le décorum ressemble à unevieille grange abritant de profondes cuves en cèdredans lesquelles se joue la réussite de la fermenta-tion. Des ouvriers mélangent à la main selon unplanning bien précis, peu l’hiver et régulièrementl’été, l’assemblage de blé, de soja, de sel et d'eau.Après filtrage et extraction à l’aide d’une anciennepresse, on obtient le graal : une sauce onctueuse,odorante, à la couleur d’ambre, le tamari. Plusrecherchée et raffinée encore, la nigori, accom-pagne parfois les mets de poissons et légumes gril-lés des grands restaurants parisiens. La productionde Kadocho reste confidentielle au regard de laconsommation nationale de sauce de soja. Unpetit musée juste en face (7 Yuasa-chô Arita-gun).Il est ouvert uniquement le week-end et sur réser-vation au 0737-62-2035.Dernière étape de ce périple dans la péninsule deKii, Wakayama. En sortant de la gare moderneintégrée au grand complexe commercial, quittezle brouhaha urbain en empruntant le bus jusqu’àl’arrêt Kôen-mae au pied du très bel ensemblepaysager composé de cerisiers et pruniers entou-rant le célèbre château de la ville (3 Ichibanchô,

POUR S’Y RENDRELe voyage que nous proposons ici s’effectue entrain au départ de Shin-Ôsaka, gare dushinkansen en provenance de Tôkyô ou deFukuoka. Il faut compter environ 3h45 pourrejoindre Kii-Katsuura via la ligne Kisei. Ils’agit d’une des plus belles lignes de l’archipel.Elle longe à de nombreuses reprises la côte etoffre de très belles vues sur la mer.

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Les plus grands cuisiniers se déplacent jusqu’à

Yuasa pour s’approvisionner en sauce de soja.

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wakayama).ce dernier édifié en 1585 en haut d’une forma-tion rocheuse, le mont Torafusu, est visible depuistoute la ville avec ses jolis toits en auvent et sesmurs blancs. Sa particularité : le concept archi-tectural nommé Renritsu-shiki. il se composed’un donjon de trois étages, de liaisons couvertesentre les tours et le donjon ainsi que deux portesremarquables dont la porte okaguchi classée aupatrimoine culturel national. au XViie siècle, ila su résister aux grandes batailles de Sekighara etde Kashii (siège d’Ôsaka). La construction d’origine fut malheureusementdétruite à la fin de la Seconde Guerre mondiale,mais reconstruite à l’identique en 1958. au cœurde l’édifice, dans la cour principale, siège le jardinzen momijidani avec son salon privé. De toutebeauté, il provoque à coup sûr chez chaque visi-teur désirant s’initier au wabi-sabi, une réelleémotion esthétique.autre style, le musée d’art moderne dewakayama (1-4-14 Fukiage wakayama). L’ar-

chitecture moderne du bâtiment avec ses célèbrespans de toiture béton élancés en porte à faux,tranche avec le style traditionnel classique du châ-teau juste en arrière à 200 mètres. Ses lignes géo-métriques audacieuses, ses transparences et salégèreté, ses grands volumes intérieurs sont l’œu-vre de l’architecte japonais KuroKawa Kishô,qui a également conçu la nouvelle aile du muséeVan Gogh à amsterdam.a travers ses salles d’exposition, il délivre une trèsbonne synthèse de l’art japonais contemporainavec la présence de nombreuses œuvres d’artisteslocaux, parmi lesquels les réputés KawaGuchi

Kigai, NoNaGaSe Banka, hamaGuchi Yozo,TaNaKa Kyokichi, oNchi Koshiro. Des toilesde grands artistes internationaux y sont égalementprésentes. on peut ainsi y voir des Picasso, redon,rothko, Frank Stella ou George Segal. en aparté,le musée expose sur tout un étage, des peinturestraditionnelles, des dessins, des sculptures del’époque meiji (1868-1912).

MANUEL SANCHEZ

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Le château de Wakayama a été reconstruit à l’identique en 1958 après sa destructions treize ans plus tôt.

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• Cours de japonais pouradultes et enfants à ParisJournées porte ouvertemerc. 9 sept. 15h-19hsam. 12 sept. 14h-18h• Cours d'essai gratuit • Test de niveau • Rencontre avec les pro-fesseurs Espace Japon 12 rue de Nancy75010 Paris www.espacejapon.com

• Cours de japonais jour-nées portes ouvertes.Lyon : le samedi 12 septem-bre de 10h à 19h www.espa-celyonjapon.com Un momentd’accueil pour rencontrernos professeurs, testez votreniveau et s’inscrire à noscours et ateliers. De nom-breuses activités seront pro-posées : atelier chant, dé-gustations, Calligraphie, etc. Grenoble : le samedi 12septembre de 14h à 19h gre-

noble.ecole-japonais.fr Décou-vrez nos formules, rencon-trez nos professeurs, testezvotre niveau et inscrivez-vous à nos cours de japo-nais.Nice : mardi 22 septembrede 18h à 21h nice.ecole-japo-nais.fr Découvrez nos for-mules, rencontrez nos pro-fesseurs, testez votre niveauet inscrivez-vous à nos coursde japonais

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•Paris Fudosan le spécia-liste de l'immobilier franco-japonais à Paris recherchedes STUDIOS à louer pourses étudiants et expatriés ja-ponais. 18 rue de Richelieu75001 Tel : 01 4286 8739 [email protected]

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Mettent leurs compétences à votre dispo-sition en matière de :

• Droit du séjour et du travail des étrangers• Droit du travail (individuel et collectif)• Droit de la famille• Droit médical et réparation de préjudices corporels• Droit pénal Conseil et assistance devant les juridictions.Résolution amiable des conflits

Notre atout : notre expérience des relations franco-japonaises

Les honoraires sont déterminés en commun accord avec le client selon la na-ture du dossier. N’hésitez pas à nous contacter pour plus de renseignements.

HODEZ ROUFIAT AVOCATS ASSOCIES (A.A.R.P.I.)25 boulevard Voltaire - 75011 Paris

Tél. 01 55 80 57 40, [email protected]

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Les places réservées serontlibérées à partir de 20h20.Espace Culturel Bertin Poirée

8-12, rue Bertin Poirée75001 Paris

Métro : Châtelet, Pont-Neuf

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