Christiane BaileyDoctorante en philosophie
Université de Montréal
Anarchisme, féminisme et libération animale: un même combat contre les privilèges injustes
Comité végé antispéciste durable - Cégep de Saint-Laurent - 7 octobre 2016
Axelle PlayoustSociologie et Études FéministesUniversité du Québec à Montréal
Qu’est-ce que l’antispécisme?Les faits
Nous ne sommes pas les seuls animaux conscients sur la planète. Plusieurs animaux ressentent des expériences vécues (affects, émotions, etc.)Ils ont une vie psychologique et font l’expérience subjective du monde. Ils peuvent ressentir la joie, la souffrance, la solitude, l’attachement, etc.Ce sont des individus à part entière qui se soucient de ce qui leur arrive.
Photos : Jo-Anne Mc Arthur
Qu’est-ce que l’antispécisme?Les principes
Lorsqu’on peut faire autrement, on ne devrait pas faire de mal aux autres.
On ne devrait pas les tuer (égorger, etc.), violer leur intégrité physique (inséminer, mutiler, etc.) et les priver de leur liberté (attacher, enfermer, etc.)
● Peu importe leur degré d’intelligence (rejet du capacitisme).
● Peu importe leur groupe biologique ou social (espèce, race, sexe, nation).
Ce qui leur arrive importe parce que ce qui leur arrive leur importe à eux.
L’élevage repose sur le fait de :
● violer l’intégrité physique d’un individu (mutilation, castration, violences sexuelles, reproduction forcée, insémination artificielle, etc.);
● de le priver de sa liberté (l’enfermer, l’attacher, etc.) et
● de le tuer dès qu’il est
suffisamment engraissé ou moins productif
Leur corps, leur choix.
Enfermer, mutiler et tuer des animaux pour de la nourriture dont on a pas besoin est injuste.
L’antispécisme et la non-dominationAbolir l’exploitation et l’oppression des animaux
L’antispécisme, ce n’est pas un régime alimentaire, un mode de vie, un cruelty-free lifestyle, une forme de consumérisme sans cruauté.
Le problème de réduire le véganisme à un mode de vie, c’est de laisser entendre que c’est une question de choix personnel et non une question de justice fondamentale qu’on doit aborder en tant que sociétés qui vise à être juste.
L’anstipécisme est un mouvement politique visant à révolutionner nos rapports avec les autres animaux.
L’antispécisme : un combat politique
Qu’est-ce que l’anarchisme ?Théorie et pratique politique fondée sur :
● Le rejet de l’autorité étatique et religieuse.
○ L’anarchie (an-archê) n’est pas l’absence de règles,
mais l’absence de chef.
○ Pas le chaos social, mais l’auto-organisation fondée
sur la coopération égalitaire et libre
● La pratique de l’autogestion, de la solidarité ou
l’entraide (mutual aid de Kropotkine) et la démocratie
participative et consensuelle.
● L’opposition à la hiérarchie, la domination et
l’oppression.
● L’anti-militarisme (“pacifisme”) et l’anti-nationalisme
(“internationalisme”)
Divers courants anarchistesAnticapitalisme, féminisme et écologisme
Anarcho-syndicalistes : auto-organisation des travailleur.e.s et anticapitalisme (opp. au droit de propriété sur autrui et sur la terre: rejet de l’esclavage, du salariat, du colonialisme, du militarisme et de la propriété foncière).
Anarcha-féministes : contre la subordination (politique et économique) des femmes, liberté sexuelle et reproductive, rejet du mariage, etc.
Eco-anarchistes (green anarchism):● Rejet de la suprématie humaine et de la domination des
êtres humains sur les autres animaux et la nature.● Auto-organisation ou autogestion en éco-communautés.● Critiquent l’industrialisme, l’extractivisme et
l’exploitation des humains et des animaux domestiqués ou “sauvages”.
“C'est bien la contre tout pouvoir officiel qui distingue essentiellement les socialistes des
anarchistes; chaque individualité nous paraît être le centre de l'univers, et chacune a les mêmes
droits à son développement intégral, sans intervention d'un pouvoir qui la dirige ou la châtie.”
Élisée Reclus (1830-1905)Géographe anarchiste
Végétarien, fondateur avec Kropotkine de l’anarchisme
écologiste.
L’anarchisme anti-anthropocentristeÉcologie libertaire et green anarchism
L’anarchisme anti-anthropocentristeÉcologie libertaire et green anarchism
L’apologie de la suprématie humainedans les milieux anarchistes français aujourd’hui
Des convergences donc, et pourtant… En 2012, l’émission « Le Vivre Ensemble » est interdite sur Radio Libertaire.
Motif de suppression :« avoir invité un militant égalitariste, avoir diffusé des analyses critiques du spécisme, avoir cité le mot “antispécisme”»
Application stricte d’une motion adoptée au 52e Congrès de la Fédération Anarchiste en 1995 qui interdit toute « publicité favorable aux thèses anti-spécistes
et à la libération animale ».
Interdiction de critiquer le spécismeMotion de la Fédération Anarchiste adoptée en 1995
Selon la motion :
● L’antispécisme nie la valeur
suprême de la vie humaine en
comparant la mort et la
souffrance des êtres humains à
celle des autres animaux.
● L'antispécisme puise dans un
fond philosophique et
idéologique étranger aux
références historiques et
politiques de l'anarchisme.
Voir la réponse détaillée de Nadia Guédri, Guy Allouchery, Yves Bonnardel, David Chauvet, Vero Venouschka à la Fédération
anarchiste de France : (izuba.info/info/le-vivre-ensemble-supprime-de-radio,747.html)
L’antispécisme : une perspective anti-hiérarchiquePour un respect de tous les individus
Les antispécistes rejettent l’idée d’une hiérarchie métaphysique des
individus au sommet de laquelle trôneraient les “êtres rationnels et autonomes” qui auraient le “droit
naturel” de commander aux individus “inférieurs”,
“non-rationnels”, aux “êtres de nature”, programmés par des “déterminismes biologiques”.
Chaque individu devrait avoir droit au respect de sa vie, de sa liberté, de
son autonomie et de son intégrité physique, peu importe son degré
d’intelligence.
“Esclaves par nature” (Aristote)
La position dominante dans la pensée occidentaleLa domination “naturellement juste” des “hommes rationnels”
« Il est préférable pour tous les animaux domestiques d’être dirigés par des êtres humains.
Parce que c’est de cette manière qu’ils sont gardés en vie. De la même manière, la relation entre le mâle et la femelle est par nature telle
que le mâle est supérieur, la femelle, inférieure, que le mâle dirige et que la femelle est dirigée.
Il en est nécessairement de même chez tous les hommes. Ceux qui sont aussi éloignés des
hommes libres que le corps l'est de l'âme, ou la bête de l'homme [...], ceux-là sont par nature des
esclaves; et pour eux, être commandés par un maître est une bonne chose. »
Aristote, Politique, 1254 b 10-14
“Esclaves par nature” (Aristote)
La position dominante dans la pensée occidentaleLa domination “naturellement juste” des “hommes rationnels”
Les féministes antispécistesContre l’idée d’une domination “naturellement juste”
des “hommes rationnels”
“The animals of the world exist for their own reasons.
They were not made for humans any more than
black people were made for white, or women created
for men.”
- Alice Walker, préface à The Dreaded Comparison, Human
and Animal Slavery
L’antispécisme est-il antihumaniste? Les féministes/véganes haïssent les hommes/humains
L’antispécisme est-il antihumaniste? Les féministes/véganes haïssent les hommes/humains
S'opposer au patriarcat, ce n'est pas être “contre les hommes”, mais s’opposer aux privilèges injustes qu'ils se sont arrogés par la violence, la force, l'intimidation, le
droit et la tradition.
De même, s'opposer à la suprématie humain, ce n'est pas être « contre les humains », mais contre les privilèges
injustes qu’on arroge par la force sur les autres individus vulnérables qui partagent
la planète avec nous.
Malheureusement, certaines féministes ne s’opposent qu’à une seule de ces oppressions.
Comparer l’oppression des humains et des animaux Liens entre les oppressions sont reconnus depuis longtemps
Stratégie pour combattre l’animalisation des femmesRenforcer la hiérarchie de l’espèce ?
En raison de cette association aux animaux qui a facilité leur oppression, plusieurs femmes ont revendiqué leur appartenance au groupe dominant et aux privilèges qui y sont associés.
Stratégie pour combattre l’animalisation des femmesRenforcer la hiérarchie de l’espèce ?
Andrea Dworkin lors d’une manif contre la porno
En raison de cette association aux animaux qui a facilité leur oppression, plusieurs femmes ont revendiqué leur appartenance au groupe dominant et aux privilèges qui y sont associés.
Stratégie pour combattre l’animalisation des femmesRenforcer la hiérarchie de l’espèce ?
Le concept “animal” ici n’est pas un concept biologique.
C’est une construction sociale, un trope, une étiquette, un stéréotype qu’on accole
à des individus pour légitimer, rendre moralement acceptables, normales et naturelles, leur subordination et leur
exploitation.
Andrea Dworkin lors d’une manif contre la porno
En raison de cette association aux animaux qui a facilité leur oppression, plusieurs femmes ont revendiqué leur appartenance au groupe dominant et aux privilèges qui y sont associés.
Stratégie pour combattre l’animalisation des femmesRenforcer la hiérarchie de l’espèce ?
Écoféministes manifestant avec 50 membres du “Feminists for Animal Rights” (FAR) lors de la Marche à
Washington (1990)
Plusieurs féministes se sont opposées à cette volonté de s’émanciper au détriment d’un groupe encore plus marginalisé et vulnérable.
Stratégie pour combattre l’animalisation des femmesRenforcer la hiérarchie de l’espèce ?
Écoféministes manifestant avec 50 membres du “Feminists for Animal Rights” (FAR) lors de la Marche à
Washington (1990)
Plusieurs féministes se sont opposées à cette volonté de s’émanciper au détriment d’un groupe encore plus marginalisé et vulnérable.
1) Injuste (et contraire au féminisme en tant combat contre toutes les formes d’oppression)
2) Impossible (liens entre les oppressions qui se renforcent mutuellement)
Les féministes antispécistes
Plusieurs formes d’oppression humaine (patriarcat, esclavage, colonialisme,
capacitisme) sont liées à la domination considérée "naturellement juste" des
humains sur les autres animaux.
Dans notre culture patriarcale, les femmes sont “animalisées”, réduites à leur corps, leurs fonctions biologiques
et leur utilité pour les hommes.
De même, les animaux destinés à la boucherie sont “féminisés”,
“sexualisés” et “pornographiés”.“Je suis une pub spéciste”
Carol Adams, The Sexual Politics of Meat“In patriarcal cultures, women are animalized and animals feminized”
Oppressions des humains et des autres animauxLiens matériels et idéologiques
Animalisation et racialisation
Claire Jean KimProfessor of Political Scienceand Asian American StudiesUniversity of California, Irvine
Dangerous Crossings.Race, Species, and Nature in
a Multicultural AgeCambridge UP, 2015
Qu’est-ce qu’animaliser un individu ?
1. Le faire apparaître comme étant différent de nous
Qu’est-ce qu’animaliser un individu ?
1. Le faire apparaître comme étant différent de nous2. Le dépersonnaliser (représentant interchangeable d’un groupe)
Qu’est-ce qu’animaliser un individu ?
1. Le faire apparaître comme étant différent de nous2. Le dépersonnaliser (représentant interchangeable d’un groupe)3. Le faire apparaître comme étant inférieur
Qu’est-ce qu’animaliser un individu ?
1. Le faire apparaître comme étant différent de nous2. Le dépersonnaliser (représentant interchangeable d’un groupe)3. Le faire apparaître comme étant inférieur 4. Le faire apparaître comme ayant une valeur instrumentale
Qu’est-ce qu’animaliser un individu ?
L’antispécisme : Étranger aux sources historiques de l’anarchisme ?
Le mouvement anarchiste et la cause animaleÉlisée Reclus et le souci pour les animaux
« Une de mes fortes impressions d’enfance est d’avoir assisté à l’un de ces drames ruraux : l’égorgement d’un cochon, accompli par toute une population insurgée contre une bonne vieille, ma grand’tante, qui ne voulait pas consentir au meurtre de son gras ami.
De force la foule du village avait pénétré dans le parc à cochon; de force elle emmenait la bête à l’abattoir rustique où l’attendait l’appareil d’égorgement, tandis que la malheureuse dame, affalée sur un escabeau, pleurait des larmes silencieuses.
Je me tenais à côté d’elle et je voyais ces pleurs, ne sachant si je devais compatir à sa peine ou croire avec la foule que l’égorgement du porc était juste, légitime, commandé par le bon sens aussi bien que par le destin. »
Reclus, On Vegetarianism
Élisée Reclus (1830-1905)Géographe anarchiste
Végétarien, fondateur avec Kropotkine de l’anarchisme
écologiste.
Le mouvement anarchiste et la cause animaleÉlisée Reclus et le souci pour les animaux
« Il n’est pas besoin d’aller dans telle Porcopolis de l’Amérique du Nord ou dans un saladero de La Plata pour y contempler l’horreur des massacres qui constituent la condition première de notre nourriture habituelle.
Mais ces impressions s’effacent avec le temps : elles cèdent à cette éducation funeste de tous les jours qui consiste à ramener l’individu vers la moyenne (...).
Les parents, les éducateurs, officiels et bénévoles, les médecins, sans compter le personnel si puissant qu’on appelle « tout le monde », travaillent de concert à endurcir le caractère de l’enfant à l’égard de cette « viande sur pied », qui pourtant aime comme nous, sent comme nous. »
Reclus, On Vegetarianism
Élisée Reclus (1830-1905)Géographe anarchiste
Végétarien, fondateur avec Kropotkine de l’anarchisme
écologiste.
Le mouvement anarchiste et la cause animaleÉlisée Reclus et le souci pour les animaux
“Cette morale est qu’il y a deux droits des gens, l’un qui s’applique aux jaunes, l’autre qui est le privilège des blancs. Assassiner, torturer les premiers semble désormais permis, tandis qu’il serait mal de le faire aux seconds. Mais à l’égard des animaux, la morale n’est-elle pas également élastique ? En excitant les chiens à déchirer le renard, le gentilhomme apprend à lancer ses fusiliers sur le Chinois qui fuit. Les deux chasses ne sont qu’un seul et même sport.
Ce n’est point une digression de mentionner les horreurs de la guerre à propos des massacres de bétail et des banquets pour carnivores. Le régime d’alimentation correspond bien aux mœurs des individus.”
Élisée Reclus (1830-1905)Géographe anarchiste
Végétarien, fondateur avec Kropotkine de l’anarchisme
écologiste.
« On m’a souvent accusée de plus de sollicitude pour les bêtes que pour les gens : pourquoi s’attendrir sur les brutes quand les êtres raisonnables sont si malheureux ? C’est que tout va ensemble, depuis l’oiseau dont on écrase la couvée jusqu’aux nids humains décimés par la guerre [...]. Le cœur de la bête est comme le cœur humain, son cerveau est comme le cerveau humain, susceptible de sentir et de comprendre. »
Louise Michel, Mémoires
Le mouvement anarchiste et la cause animaleLouise Michel et le souci pour les animaux
Le mouvement libertaire et la cause animaleLeon Tolstoy – végétarien pacifiste anarchiste
« L’homme qui comprend toute l’importance morale de la pitié ne reculera pas devant la crainte que ses manifestations puissent le rendre ridicule
aux yeux des autres. Que lui importe, qu’en lâchant une souris prise au piège au lieu de la tuer,
il provoque les railleries ou la désapprobation, quand il sait que non seulement il a sauvé de la
mort un animal qui tenait à la vie autant que lui, mais encore qu’il a laissé librement se manifester le sentiment de la compassion….et la pitié reste
toujours le même sentiment, qu’on l’éprouve pour un homme ou pour une souris. ».
Léon Tolstoï (1828-1910)Écrivain Russe
Anarchiste végétarien (éventuellement végétalien)
Le végétalisme chez les anarchistes françaisLes milieux libres au début du XXe siècle
Les anarchistes individualistes tentent de créer des « milieux libres » mettant en pratique la
libération immédiate des individus et les principes de non-domination, non-oppression
et non-exploitation.
Ces communes étaient des tentatives de vivre autrement sans attendre une hypothétique
révolution prolétaire.
De 1890 à 1930, plusieurs communautés ou « colonies » vont voir le jour et le végétalisme
était au centre de plusieurs de ces communautés auto-gérées.
Féministe et anarchiste individualiste française (d'origine polonaise).
Adepte des milieux libres, elle diffuse le végétalisme dans le mouvement
libertaire.
Elle convaincra Georges Butaud (un anarchiste français qui deviendra
son mari), de l’importance de l’activisme végétalien.
Sophie Zaïkowska (1800-1939)féministe anarchiste,
militante végétalienne
Les communautés anarchistes-végétaliennes L’école végétalienne de Sophie Zaïkowska et Georges Butaud
Dans les milieux anarchistes, Butaud et Zaïkowska soutiennent la réduction des
besoins individuels (“faux-besoins”) comme moyen de s’affranchir de la
logique de production et de consommation.
Les végétalien.ne.s anarchistes veulent vivre « ici et maintenant » leurs principes
et valeurs. Le but est était d’expérimenter des façons
alternatives de vivre permettant aux individus de se libérer immédiatement et
de ne plus dépendre du capitalisme, du colonialisme et de l’exploitation des
humains et des autres animaux.
En 1917, elle fonde avec Butaud une colonie anarchiste végétalienne à Bascon (en France)
Les communautés anarchistes-végétaliennes L’école végétalienne de Sophie Zaïkowska et Georges Butaud
Les communautés anarchistes-végétaliennes L’école végétalienne de Sophie Zaïkowska et Georges Butaud
En 1923, Zaïkovska et Butaud fondent le premier foyer
végétalien à Paris.
● On y sert des repas végétaliens à bas prix.
● Offre des chambres.
● Donne des conférences gratuites.
Les communautés anarchistes-végétaliennes L’école végétalienne de Sophie Zaïkowska et Georges Butaud
Le végétalisme doit être propagé « pour le bien de l’humanité et de l’animalité »
● Argument éthique (respect des animaux)
● Argument santé et environnemental
● Argument économique ● Permet d’éviter « l’esclavage salarial »● Éviter de gaspiller les ressources (perte
métabolique)
« Il faut à un cheval et à une vache un hectare de terre pour vivre. Sur un hectare 3 hommes y vivraient, mais on donne à l’animal du grain, des produits de toutes sortes, et des kilos qu’il consomme il nous rend des grammes. »
(Georges Butaud, 1922)
Butaud dirige et imprime la revue "La Vie Anarchiste" (1912-1914) et
fonde en 1924 "Le Végétalien".
Les communautés anarchistes-végétaliennes L’école végétalienne de Sophie Zaïkowska et Georges Butaud
Les élevages sont des « lieux de tourment » :
“Les bêtes sont enchaînées nuit et jour, les boeufs, les chevaux s’exténuent sous le joug, dans les brancards le jour, la nuit on les rive au mur ! Ah elle est belle la paix des campagnes. Les poètes peuvent la chanter! Allons donc, ouvrons les yeux, arrière le mensonge ! [...] Le végétalien ne reconnaît pas à l'homme le droit de dominer, d'abuser de sa force sur des êtres sensibles au même titre lui.”
George BUTAUD (1922)
La Vie AnarchisteÉditée par Georges Butaud
Communauté de Bascon dans l'Aisne (France)
L’anarchisme n’est pas un « lifestylism », un simple mode de vie individuel, mais un projet
social et politique révolutionnaire.
Concevoir l’anarchisme, le féminisme, l’antispécisme, l’antimilitarisme, etc. comme des luttes politiques ne signifie pas ne rien
changer dans nos comportements individuels.
Bien au contraire, s’opposer à toute forme de domination, d’oppression et de violence et
prendre au sérieux l’égalité et liberté de tous les individus implique de transformer
fondamentalement notre manière de vivre et d’être en relations avec les autres.
L’anarchie comme mode de vie ?L’anarchisme entre la théorie et la pratique
« École de pratique végétalienne », enseignant la non-violence (pacifisme), les « techniques bienveillantes et utiles », le rejet de l’exploitation des animaux et des êtres humains (dont
le rejet des produits issus du capitalisme et du colonialisme).
« Terre Libérée » de Louis RimbaudUne cité véganarchiste
« Terre Libérée » de Louis RimbaudUne cité véganarchiste
“Le Végétalisme n'affranchit pas qu'une classe, qu'une secte, qu'une race ou qu'une espèce, mais tout ce
qui vit, tout ce qui est sensible et souffre de l'injustice, de l'iniquité, de
l'abus, et de la perversion des hommes.”
L. Rimbault, « Le problème de la viande», Le Néo-Naturien, 1923. « L’individualiste anarchiste éclairé
pratiquant le végétalisme transforme le milieu en se transformant lui-même …
Soit végétalien! Libère toi! »
- Louis Rimbaud
Louis Rimbaud – Vivre en anarchiste
« La vraie non-coopération aux forces d’oppression ne peut être efficace que par le moyen du végétalisme, qui fait
qu’un homme n’a plus besoin de rien ou presque, qui fait qu’un capitalisme ne
trouve plus assez de ressources d’exploitation. »
Louis Rimbaud
Après la guerre, Gandhi enverra des émissaires visiter Terre Libérée et Rimbaud leur expliqua le lien entre la résistance pacifiste (non-coopération) et le végétalisme :
But : Donner la possibilité aux gens de « se suffire à eux-mêmes sans le secours de l’industrialisme qui restreint plus la liberté et l’individualité qu’il n’en donne ».
Le végétalisme comme praxis anarchisteLe principe de non-coopération à l’oppression,
à la violence et au capitalisme
L’anarchie comme mode de vieLe principe de non-coopération à l’oppression
« Le végétalisme n’est pas qu’une question d’hygiène alimentaire pour constipés comme le végétarisme, c’est une pratique de non-coopération
formelle et absolue contre toutes les forces sur lesquelles repose l’Etat et ses satellites : Eglise, Argent, Salariat, Armée, Justice. »
« Les végétaliens sont des anarchistes en actions, qui ne coopérent en rien que ce soit, par notre méthode de vie, aux forces sur lesquelles reposent le
principe d’Etat ou de simple autorité .».
Louis Rimbaud
Rimbaud considère la pratique végétalienne comme essentiel à l’engagement anarchiste et la distingue du simple végétarisme :
L’anarchie comme mode de vie?Le principe de non-coopération à l’oppression
Source : « Louis Rimbault & Terre » Libérée, brochure, texte intégral
infokiosques.net/IMG/pdf/Louis_Rimbault.pdf
Rejet du consumérisme,du capitalisme et du colonialisme
● Les produits de l’exploitation des animaux
● Les produits de luxe
● Les produits importés (issus du colonialisme, du militarisme, de l’esclavagisme et de l’exploitation des pays les plus pauvres)
● Les produits polluants
● Les produits du capitalisme et de l’industrie extractiviste (mines, etc.)
La libération animale au-delà du véganismeDe la non-coopération aux actions directes
La libération animale au-delà du véganismeDe la non-coopération aux actions directes
Être végane au sens de s’abstenir de faire du mal aux animaux est essentiel.
Il ne suffit pas de minimiser les torts qu’on cause personnellement, on a le devoir de dénoncer et d’éduquer en de cherchant à convaincre les autres de cesser de coopérer aussi avec l’exploitation des animaux. On doit s’opposer activement aux violences que nos sociétés infligent aux animaux et interférer pour venir en aide aux animaux.
La libération animale au-delà du véganismeLes actions directes pour les animaux
- kiosques d’info et distribution de tracts- manifestations- vigiles (devant les abattoirs, etc.)- organisation de conférences- pétitions aux “puissants” (élus et entreprises)- articles dans les médias et les revues- boycotts économiques- caméras cachées et whistleblower- sauvetage d’animaux légaux (chats errants)- interférer avec les torts (Sea Shepherd)- vandalisme et destruction de propriété (dommages économiques)- création de sanctuaires- sauvetage d’animaux illégaux dans les élevages, laboratoires et abattoirs (ALF et « Open rescue »)
“Open Rescues” (sauvetage à découvert): actions directes pour venir en aide aux animaux.
● Actions faites à visage découvert.
● Aucun dommage à la propriété (on n’a même déjà remplacer un cadenas brisé).
Elle permet de « mettre un visage sur la libération animale » : ● le visage des activistes (le plus souvent des
femmes) et ● le visage de ces animaux qu’on ne voit
jamais, mais qui sont pourtant des miliards à vivre dans nos cages et nos prisons et à mourrir dans nos abattoirs.
Le mouvement pacifiste
« Putting a Face on Liberation » (Karen Davis)
De la désobéissance sociale à la désobéissance civileLes actions directes : venir en aide aux animaux
Le mouvement pacifiste
Les actions directes illégales« Open Rescues »
Le mouvement pacifiste
Les actions directes illégales« Open Rescues »
L’activiste australienne pour les droits des animaux, Patty Mark, a été arrêtée en 2015 pour avoir sauver des poules dans une usine à oeufs.
Elle fait face à des accusations de cambriolage, vol et dommages criminels.
Elle a fondé Animal Liberation Australia.
Elle est une des pionnières des « open rescues » (sauvetage à visage découvert).
Le mouvement pacifiste
Le mouvement pour les droits des animaux est largement pacifiste et non-violent.
Être pacifiste ne signifie pas obéir aux lois, au contraire.
C’est un devoir de citoyen.ne de s’opposer aux injustices, de les dénoncer publiquement et de refuser d’obéir aux lois injustes.
Le juste et le légal : Désobéir aux lois injustes est un devoir.
Un devoir de désobéissance civile Les actions directes pour aider les animaux
Animal Liberation Front Guidelines
● To liberate animals from places of abuse, i.e., laboratories, factory farms, fur farms, etc., and place them in good homes where they may live out their natural lives, free from suffering.
● To inflict economic damage to those who profit from the misery and exploitation of animals.
● To reveal the horror and atrocities committed against animals behind locked doors, by performing nonviolent direct actions and liberations.
● To take all necessary precautions against harming any animal, human and non-human.
Un devoir de désobéissance civile Les actions directes pour aider les animaux
Toute personne faisant des actions directes pour venir en aide aux animaux selon les
principes du ALF peut se considérer membre du ALF.
Le mouvement pacifiste
L’écoterrorismeLa criminalisation des activistes
Les activistes pour les droits des animaux et lesÉcologistes (ALF et ELF) sont au sommet des menaces terroristes intérieures aux États-Unis et au Canada.
Des lois (comme l’Animal Enterprise Terrorism Act ou AETA) criminalisent même les dommages économiques à l’industrie.
« Ces activistes menacent les profits des corporations des entreprises les plus puissantes du monde. » (Will Potter)
Industrie agro-alimentaire, pharmaceutique, minière, forestière, pétrolière, etc.
Le mouvement pacifiste
Les lois “ag-gag” criminalisent le fait d’interférer et de chercher à nuire aux élevages, couvoirs et abattoirs.
Ces lois interdisent de produire desenregistrements en image ou son dans un élevage (“animal facility”) sans le consentement du propriétaire.
Il est également criminel posséder ou de distribuer cet enregistrement.
Criminalisation des whistleblowers.
L’écoterrorismeLa criminalisation des activistes
Combattre les valeurs patriarcalesMachisme, virilité, domination, hiérarchie
et dévalorisation de la sensibilité et de la compassion
Les hommes sont majoritaires dans les activités impliquant de la violence envers les animaux (chasse, rodéos, expérimentations, etc.) et les femmes sont majoritaires dans le
mouvement de protection animale.
La violence envers les animaux : des attitudes profondéments genrées
Les femmes et la protection animaleUne autre forme de “division sexuelle” du travail de care
Le mouvement de défense des animaux est largement un mouvement de femmes (“women’s movement”) : elle représentent entre 68% et 80% des activistes
Frances Power CobbeMembre du conseil exécutif de la London
National Society for Women's Suffrage et
fondatrice de la British Union for the
Abolition of Vivisection en 1898.La démographie de ce mouvement explique
peut-être l’hostilité à son endroit...
Les femmes et la défense des animaux Les suffragettes à l’avant-plan du mouvement de défense des animaux
Se soucier des animaux : une pathologie ?Les féministes ont souvent été “diagnostiquées” d’hystérie (“la maladie de l’utérus”)
lorsqu’elles refusaient de se soumettre à l’autorité des hommes. On a également tenté de “diagnostiquer” le souci pour les animaux comme une pathologie mentale affectant particulièrement les femmes: la psychose de l’amour des animaux (“zoophil-psychosis”)
De la pathologisation à la criminalisationSe soucier des animaux : un crime ?
● Vigile devant les Abattoirs à Montréal
Two and a half weeks later, Alaska Wildlife Troopers cited her for the hindrance of lawful trapping. She now faces a potential $500 fine and 30 days in jail.
“A bald eagle was lying on the ground, each leg shut
inside traps. The eagle was alive and looking at her. She
spent an hour freeing it.”
Se soucier des animaux : un crime ?
Tandis qu’une personne a le droit de perturber un animal [sauvage] dans le but de le tuer, elle ne doit pas le faire dans l’intention d’essayer de l’aider; il est interdit de déranger les animaux « en vue d’empêcher ou de gêner des activités licites de chasse ou de pêche »; toucher ou enrayer tout piège tendu.
– Lesli Bisgould (2011), Animals and the Law, p. 241
La criminalisation de l’aide aux animauxou comment protéger les agresseurs
Abolir l’État patriarcal, anthropocentriste et capitalisteCriminalisation de l’aide aux animaux ou comment protéger les agresseurs
L’État criminalise moins la violence envers les animaux que le fait de leur venir en aide et de nuire à ceux qui les exploitent.
L’État ne criminalise pas le fait de détruire et de polluer les habitats des animaux sauvages, mais le fait de s’opposer activement et de nuire aux sables bitumineux, aux pipelines, à l’industrie minière et forestière, etc.
Les droits (et les lois) sont des outils de l’État pour protéger les privilèges des dominants et leur "droit de propriété" sur autrui (femmes, esclaves, enfants, animaux, etc.) et sur la terre (propriété foncière).
Abolir l’État patriarcal, anthropocentriste et capitalisteCriminalisation de l’aide aux animaux ou comment protéger les agresseurs
On ne demande pas plus de lois pour “protéger les animaux” parce que cela signifie en réalité “mieux réglementer leur commerce”.Ce qu’il faut ce n’est pas de mieux réglementer le commerce des animaux, mais de l’abolir.Les animaux ne sont pas des marchandises que l’on devrait pouvoir acheter et vendre.Ils ne sont pas nos propriétés, ils sont des individus à part entière, dotés d’une vie psychologique, une vie de conscience, comme chacune et chacun de nous et devrait pouvoir vivre leur vie comme ils l’entendent.
Des individus appropriés Abolir le statut de propriété des animaux domestiqués
Selon le Living Planet Index (LPI 2014), les populations d’animaux vertébrés (mammifères, oiseaux, reptiles, amphibiens et poissons) ont déclinés de 52% depuis 1970.
Il y aura bientôt plus de plastique que de poissons dans l’océan.
On doit cesser de polluer, détruire et coloniser les habitats des animaux sauvages.
→ Les animaux, qu’ils soient appropriés ou appropriables, sont des marchandises cruciales dans le système capitaliste, qui en tire des profits considérables.
Des individus appropriablesLes animaux sauvages ne sont pas “ressources”
Le mouvement de libération animaleS’opposer aux industries les plus puissantes
Industrie agro-alimentaire(élevage, pêcherie, monocultures, etc.)
Industrie pharmaceutique (expérimentations sur les animaux, antibiotiques, engrais chimiques, pesticides, etc.)
Industrie des armes (NRA)
Industrie pétrolière, minière et forestière
Industrie de la mode“Pig Breeding Facility”
Le mouvement de libération animaleApproches politiques anarchistes (études animales critiques)
Le mouvement de libération animaleApproches politiques marxistes et socialistes
Le mouvement de libération animaleApproches politiques marxistes et socialistes
On n’abolira pas l’exploitation des animaux domestiqués et le génocide des animaux sauvages tant qu’on vivra dans un système socio-économique capitaliste, productiviste et extractiviste, militariste et patriarcal. Les antispécistes doivent fonder leurs revendications sur des bases politiques, communes à l’anarchisme.
Plaidoyer pour un anarchisme antispéciste(et vice versa)
De même, l’anarchisme doit s’inscrire dans une démarche de solidarité vis-à-vis du mouvement antispéciste, en raison de son principe de refus de l’oppression et des privilèges injustes.
● Venue de Yves Bonnardel à Montréal
● 1er novembre: Conférence-discussion sur l’oppression des mineurs
● 2 novembre: Le spécisme et la question animale
● 3ème édition du Festival Végane de Montréal
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