Anesthésie pour chirurgiefonctionnelle chez le sujet âgé :
jusqu’où ?
Jeanne Barré DAR CHU Reims
sujet âgé
• âge légal ?• l’âge augmente l’incidence des co-morbidités = score ASA 75-84 ans : 30% F, 40 % H ≥ 85 ans : 45% F, 55 % H
• le vieillissement cérébral : altérations des fonctionscognitives cf maladie d’Alzheimer : 50% à partir de 90 ans
= confusion ou délire post opératoires > 60ans : OR = 2,1 / 10 ans = syndrome de glissement
→Le score ASA ne cote pas l’aptitude à l’hospitalisation
Auroy Y et al . AFAR 1998; 17: 1321-41 Moller JT et al. Lancet 1998;351:857-61
Aptitude à l’hospitalisation• Pertes des repères // durée hospitalisation Chirurgie ambulatoire ( cataracte, SLAAC, endoscopie) > hospitalisation conventionnelle (PTH, prostate, CLE, PTG)• Hospitalisations longues peuvent aboutir à la dépendance et au transfert dans une institution (3,5% après prothèses chez
des sujets âgés > 90 ans ) → à la consultation d’anesthésie - Qui demande la chirurgie réparatrice ? - quels mode de vie, accompagnement,aides, activités à la maison, à l’extérieur ? - consultation gériatrique, MMS ? → hospitalisation préopératoire de 2 jours ?
Sujet âgé
Envie de vivre > âge ou score ASA
Chirurgie fonctionnelle• Se situe entre la chirurgie obligatoire ( lésion vitale), la chirurgie quasi obligatoire ( traumatismes) et les actes mineurs mais -effet placebo de la chirurgie (lavage arthroscopique) -pas d’études contrôlées versus ttt médical exemple chir cardiaque n = 687 < 80 vs n = 96 > 80 ans mort ou non retour à domicile 14% vs 52%• = 2 000 000 soit 1/3 actes opératoires en constante augmentation ↔ allongement de la durée de vie H =77,5ans F =84 ans
↔ élévation du milieu socio-culturel
Rady MY et al. Am Heart J 2004;147: 347-53
Répartition quinquennale des 6989 PTH réaliséeschez des sujets âgés de 80 ans et plus
39,6%2000-200430,1%1995-1999
18,5%1990-1994
6,8%1985-1989
4%1980-1984
1980-2004 : x 2,35 nombre de sujets âgés de ≥80 ans x 16,45 nombre de PTH
Ogino D et al . JBJS 2008;90A : 1884-90
réflexions
• 1 Chirurgie des prothèses articulaires
• 2 Fractures du col du fémur
• 3 Amputations pour lésions infectieuses
1- Chirurgie des prothèses• Chirurgie choisie par les patients eux-mêmes
• Patients intégrés dans de très nombreuses études
• Acte opératoire standardisé
• Préventions infection, MTE
• Mortalité à 3 mois 0,8 - 1% + 0,1% puis ↓ mortalité ultérieure / population non opérée 4% série de 132 prothèses âgées de 90 ans et plus
Lie SA et al acta orthop scand 2003 Samama M et al J thomb Haemost 2007
Aubart F. abstract S261. RCO 2004; 90:151-2
prothèses articulaires
+++rareSéjour rééducation11,410,2Durée hosp chir (jours )
6,37,2Cl créat < 50 ( %)
1722,3Mal cardio-vasc ( %)
3722,6IMC >30 ( %)
6152F / H ( %)
71,366,1âge (ans)
60 000100 000n / an en FrancePTGPTH
Étude FOTO n= 1810 Samama M et al. J Thromb Haemost 2007
Consultation d’anesthésie pour PTH D• Mr W, 75 ans, IMC = 27,5, accompagné de sa femme• HTA = ARA II + diurétique + inhibiteur calcique• prothèse aortique sous rénale 2000 = AAS• IDM 2003 à J+3 hernie inguinale = stent nu coronaire D• AIT 2005 = déficit brachiocéphalique G• ACFA récente = AVK• dystrophie bulleuse pulmonaire : prednisolone + O2 2L• Cancer prostate• Diverticules coliques (chute 20 g /L Hb entre Cs et hospitalisation )
Gaz du sang après 1 h D latéral G : Pa CO2= 54, Ph = 7,42, bic = 34
Risques préopératoires et morbi-mortalité des prothèses
26Dialyse rénale 1,2 1,07Durée op
1,11Transfusion perop0,6% 2,41% 2ATCD inf op1,4%3% 1,67ASA IV10% 1,4215% 1,33dépendance4,9%4,8% 1,67AVC0,7%5% 1,65corticoides10% 1,3312% 1,5dyspnée
PTG n=11710 ORPTH n=6876 OR
l’âge n’apparaît pas dans cette étudeWeaver F et al . J of arthroplasty 2003 ; 18 : 693-708
Consultation pour PTH post clou de Ender 1992
• Mme M, 70 ans , IMC = 32• Adressée par rhumatologue• Névrose hystérique + alcool = tercian + athymil• Épilepsie non équilibrée = gardénal• Érésypèle avec hospitalisations en 02 et 11 2006
• Scoliose thoracique avec PaCO2=55 et dextorotationdu cœur
• Notion de valvulopathie et d’HTAP• Seule à la Cs ( curatelle UDAF) , douleur ????• Hospitalisée depuis 6 mois CHU pour x raisons dont
une fracture du bassin Dossier médical énorme , 2 heures de Cs = problème social
patient ASA IV à la CS d’anesthésie pourprothèse articulaire ou CLE = mission du CHU
• Le patient doit être demandeur et prêt à coopérer la chirurgie a souvent été découragée auparavant par le
spécialiste médical ttt de la douleur > fonction • Ou mortalité évaluée à < 5 % ∗ et acceptée par le
patient (et sa famille)• Ou mortalité évaluée à > 5 % ∗ Le patient est récusé sous couvert d’un « ttt antalgique
adapté » ET lui dire qu’il peut cependant « supporter »une anesthésie pour fracture ou lésion vitale
Caracciolo B et al. Arch of gerontology and geritrics 2005;41:169-76 Saidani N, Aubart F. abstract SOFCOT 2004
Chirurgie fonctionnelle une partie du corps réparée grâce à la chirurgie - avec 17 % non satisfaits après PTH ou PTG - au prix, chez les nonagénaires, d’une mortalité (4%) ou d’un non retour à domicile (4,5%) dû à une dépendance
acquise pendant les hospitalisations ( ↑ transfusions, complications médicales, chirurgicales, neuro-
psychiques, séjours en soins de suite)
d’un médiocre résultat fonctionnelKaruppiah SV et al Eur Jorthop Surg Tr 2008;18:461-65 n=58Saidani N Aubart F 2004 abst 261 SOFCOT n =132Alfonso DT J Arthroplasty 2007; 22: 807-11 n = 25
2 - Les fractures du col• Chirurgie subie et même non perçue par les déments• Patient inconnu : semi urgence, interrogatoire ? ordonnance
des médicaments ← médecin traitant, famille ?• Cause de la chute : maladresse ou malaise (20%) ? ECG, souffle systolique, proBNP, troponinémie
• Groupe de patients non étudiés car jamais inclus dans essaisthérapeutiques
= pas de médecine fondée sur les preuves = 28 % hospitalisations dues aux effets adverses des mdts
Rochon P A et al .BMJ 1997;15:1096-9
Essai thérapeutique PROPICE
• Inclusion : chirurgie orthopédique ET clairance à la créatinine = 20-50mL / min = 58% de notre recrutement de fractures du col
• Fondaparinux à la dose de 1,5 mg débuté à H +8 / fin de la chirurgie• 3 dosages post opératoire de l’activité anti-Xa• Consentement éclairé, signé par patient ou sa famille
PROPICE dans la vraie vie
• Aucun vieillard victime d’une fracture du col nepeut s’asseoir en préopératoire pour ( lire ) etsigner : ils sont prévenus oralement
• La famille n’est présente au cours de la visitepréopératoire que dans quelques cas
→ les signatures sont faites à J +1-2 → aucun ne sait l’objet de mes visites ultérieures
Surmortalité pendant1an / population générale
médiane de survie H 1,6 / 5,2 ans, F 2,8 / 6,6 ansPetersen MB et al. Inj Int J Care Inj 2006;37 : 705-11Roberts S , Goldacre M et al , BMJ 2003 ; 327 : 771-5
Courbes de mortalité 1968 - 1998
pas de progrès depuis 1980
Roberts S , Goldacre M et al , BMJ 2003 ; 327 : 771-5
question- ou taux de mortalité irréductible ?- ou taux de mortalité améliorable ? par de meilleurs soins péri-opératoires qui
doivent encore prouver leur influence sur la stratégie de prise en charge sur la morbi-mortalité tout en sachant qu’un délai préopératoire > 3 jours augmente la mortalité ( et le coût )Moran CG et al . JBJS 2005 . 87A ; 3 : 483-92903 F du col consécutives dont 81% jugées aptes à la chirurgie
exemple du souffle systolique• entendu chez 17 % des vieillards• échographie = 3,3% RAC < 0,5cm2 ou gradient > 50mm Hg
• AG avec étomidate
exemple des coronaropathies• troponinémie élevée + anomalies ECG• Cs cardio (clopidogrel + béta-bloquant etc)• Chirurgie sous AG si troponinémie en voie de ↓ ???
Heyburn G et al.Cur Anaesth Crit care 2005,16:2-10Ricci WM et al. Injury 2007;38S3:49-52
ttt chirurgical des fractures du col• Standard de soins depuis 1970 études : 5-10% exclus car non opérés si non opéré , pas de service d’aval en cas de survie
complications chirurgicales = 19 % dans les 6 moisreprise OS=15%, luxation, immobilisation, infection, chute
• 2 études récentes de fractures du col non opérées - Prospective avec recul d’un an : ou prothèse n = 80
ou non opéré n = 22 par choix ou à cause de comorbidités - rétrospective avec recul de 2 ans: > 90 ans ou opérés = 46 ou non opérés = 38, seul critère prédictif de DC = confusion
Foss NB Injury Int J care Inj 2007;38:780-4 Gregory JJ abstract 2007 Ooi LH Injury Int J care Inj 2005 ; 36: 142-7
Fractures du col• Études randomisées impossibles à réaliser dans les
conditions actuelles• La plupart des vieillards ne nous donnent pas
de mandat pour l’acte chirurgical Les familles et /ou le référent sont le plus souvent absents• Les sujets antérieurement grabataires et/ou ASA IV (OR de mortalité à 1 mois = 6,6) et/ou déments ( OR = 4,4 ) doivent-ils être opérés ?• Beaucoup de travail ( diagnostic et ttt des maladies ayant
entraîné la chute en préop, perop , postop ) non gratifiant et sans aide d’autres spécialistes médicaux
O’hara D A et al.Anesthésiology 2000;92:947-57
3 - amputations pour lésions infectieuses chezdes patients hospitalisés en médecine
3-1 Diabétiques = amputations métatarso-phalangiennesitératives→ transmétatarsienne avec un bloc sciatique
neuropathie responsable de plus d’hospitalisations que les autres complications de réponses atypiques à la neuro-stimulation électrique
permet l’acte chirurgical sans anesthésie : 2 /10
Sites BD et al. Reg Anest and Pain 2003;28: 479-82
3-2 sujets en fin de vie ayant des escarres,
escarres talonnières = calcanéectomie partielle, puis totale, puis amputation de jambe
De nos jours, tous les patients sont aptes à l’anesthésie, ce qui autorise des actes techniques dénués de sens clinique
( futile care)
le MAR doit intervenir sur l’indication chirurgicale
Mr T 72 ans IMC 38
• 20 09 2008 hospitalisation pour érésypèle du membre inférieur restant (amputation 1997), pontages coronaire,
aorto-bifémoral , Saint Jude aortique, Tr rythme à typede flutter, éventration sus et sous ombilicale
• J+25 « chirurgie réparatrice » par VAC = échec local et douleurs +++• J+ 56 appel du bloc : le patient est à l’artériographie !• J+ 61 amputation
Jusqu’où ?
• La prolongation de la quantité de vie est devenue lebut suprême de la médecine à cause des progrèstechniques. Mais quelle qualité ?
• L’offre de soins est différente d’un pays à l’autre• Pas d’études coût-efficacité pour gérer les ressources
médicales (ex EDoppler post op des prothèses articulaires)• 50% dépenses de santé d’un individu concernent son
dernier mois de vie
Bernard Debré dictionnaire amoureux de la médecine PLON 2008
Pourquoi ?
• Acte technique pour l’individu qui ne l’a pas choisi :est-ce encore une personne ou un objet de soins ?
formation des juniors ? accroissement activité d’un service ? donner du travail à une partie de la société ? éviter les guerres de succession ?
• Loi Léonetti 2005 relative aux droits de fin de vie encore inconnue : La voyageuse de nuit Françoise Chandernagor Plon 2007 La vie en sourdine David Lodge Payot Rivages 2008
conclusions
Faites votre testament de fin de vie