Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
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Développer les entreprises
inclusives du secteur de
l’énergie solaire au Sénégal
Vers la création d’un écosystème favorable
Pierre Coetzer Jakob Schmidt-Reindahl Tsholofelo Mpshe-Khoza
Nicolas Pascarel
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
2
RESUME 4
LISTE DES ABREVIATIONS 7
1. CONTEXTE ET MOTIVATION DU CHOIX DE PROJET, DE PAYS ET DE SECTEUR 11
1.1 CONTEXTE DE L’INITIATIVE EN FAVEUR D’UN ECOSYSTEME 11
1.2 MOTIVATION DU CHOIX DU PAYS ET DU SECTEUR 14
2. BREF APERÇU ECONOMIQUE ET DEMOGRAPHIQUE 22
2.1 POPULATION 23
2.2 ECONOMIE 24
3. ANALYSE SITUATIONELLE: LE SECTEUR DE L’ENERGIE RENOUVELABLE ET DE
L’ENERGIE SOLAIRE AU SENEGAL 28
3.1 LE SECTEUR DE L’ENERGIE RENOUVELABLE ET DE L’ENERGIE SOLAIRE 28
3.2 LES ACTEURS CLES 30
3.3 L’ENVIRONNEMENT REGULATOIRE 34
3.4 PERSPECTIVES 38
4. CARTOGRAPHIE D’UN ECOSYSTEME FAVORABLE AUX ENTREPRISES
INCLUSIVES : ANALYSE DES FAIBLESSES 41
4.1 INFORMATION 41
4.2 INCITANTS 43
4.3 INVESTISSEMENT 45
4.4 APPUI A LA MISE EN ŒUVRE 47
5. ROLE DES ACTEURS ET INTERVENTIONS POSSIBLES : QUI PEUT FAIRE QUOI
POUR METTRE EN PLACE UN ECOSYSTEME FAVORABLE ? 50
5.1 INTERVENTIONS PROPOSEES EN MATIERE D’INFORMATION 50
5.2 INTERVENTIONS PROPOSEES AU NIVEAU DES MESURES D’INCITATION 53
5.3 INTERVENTIONS PROPOSEES DANS LE DOMAINE DE L’INVESTISSMENT 54
5.4 INTERVENTIONS PROPOSEES DANS LE DOMAINE DE L’APPUI A LA MISE EN OEUVRE 58
VUE D’ENSEMBLE DES INTERVENTIONS PROPOSEES 60
6. PROCHAINES ETAPES ET CALENDRIER PROPOSE 65
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
3
7. ANNEXES 70
7.1 PLAN D’ACTION: CADRE PRELIMINAIRE 70
7.2 ENTRETIENS 71
7.3 VISITE DE TERRAIN A SINE MOUSSA ABDOU, DANS LA REGION DE THIES 100
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
4
Résumé
Des arguments forts plaident en faveur du développement d'un écosystème plus
favorable au secteur de l'énergie solaire au Sénégal. L’accès à l'énergie pour tous est un
élément clé du plan de développement national du Sénégal, le Plan Sénégal émergent (PSE).
A l’échelle mondiale, le coût de l'énergie solaire diminue rapidement par rapport aux sources
d’énergie traditionnellement utilisées au Sénégal, telles que les combustibles fossiles;
renforçant ainsi l’argument économique en faveur du solaire, et éveillant l’intérêt des
investisseurs. Les conditions climatiques du pays sont aussi particulièrement favorables au
développement de l’énergie solaire comme source d’énergie primaire. Les investisseurs
publics et privés, ainsi que les principales institutions de financement du développement (IFD),
ont déjà investi dans le secteur de l’énergie du Sénégal à hauteur de plus de 500 millions de
dollars au cours des 10 dernières années. Fondamentalement, un meilleur accès à une source
d’énergie propre et abordable pourrait considérablement stimuler une croissance économique
inclusive au Sénégal ; autrement dit, une croissance qui intègre les populations pauvres en tant
que clients, en tant qu’entrepreneurs et en tant que prestataires de services. Le PNUD, fort de
son expertise et de ses réseaux, peut jouer un rôle clé dans le développement et le soutien
d'un écosystème favorable à une croissance inclusive et aux modèles d’entreprises inclusives.
Malgré ces conditions a priori favorables, plusieurs obstacles empêchent actuellement
le secteur de l'énergie solaire de tirer pleinement parti de ces conditions :
Au niveau de l’information, les avantages et les fonctions de l’énergie solaire sont
encore mal connus et parfois mal compris. Les usagers ne disposent pas toujours
d’informations claires sur la qualité ou la fiabilité des produits solaires sur le marché.
Enfin, la visibilité sur les revenus des ménages, ainsi que sur leur capacité et leur
volonté à payer pour les dispositifs solaires, reste limitée.
Au niveau des mesures d’incitation, l’environnement régulatoire du secteur de
l’énergie solaire est en plein remaniement, et fait actuellement l’objet de grandes
incertitudes. Il existe des incohérences en matière de droits de douane et de taxes
applicables aux appareils et composantes d’appareils solaires, par exemple. Le
modèle des concessionnaires, qui a été conçu à l’origine il y a une dizaine d’années
(2005) pour encourager l’investissement privé dans l’électrification rurale en accordant
des concessions dans certaines régions à des opérateurs privés, n’a pas répondu aux
attentes. Les écarts de prix importants selon les régions et les fournisseurs ont semé
la confusion et l’incompréhension des utilisateurs finaux, et créé une frustration chez
les opérateurs du secteur privé.
Au niveau des investissements, les ressources financières disponibles ne
correspondent pas toujours aux besoins réels des opérateurs ou utilisateurs finaux.
Les acteurs du secteur privé, en particulier les petites et moyennes entreprises (PME),
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
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estiment qu’il est extrêmement difficile d’accéder à des financements auprès des
institutions financières ordinaires, tandis que les utilisateurs finaux n’ont que rarement
accès au crédit à la consommation à des conditions raisonnables.
Enfin, il existe des obstacles au niveau de l’appui à la mise en œuvre: une capacité
de recherche et développement existe, mais un meilleur soutien institutionnel et
politique pourrait la rendre plus efficace. Les PME et les petits commerçants manquent
de services d’appui. Dans un autre registre, des systèmes de paiement innovants
pourraient également permettre de créer des conditions plus favorables, ainsi que le
développement de réseaux de distribution du dernier kilometre permettant de mieux
desservir des populations rurales.
Ces obstacles pourraient être surmontés par une série d’interventions ciblées. Ces
interventions pourraient être pilotées ou appuyées par le PNUD, en partenariat avec des
acteurs spécifiques du secteur privé, du secteur public ou les partenaires au développement :
Sur le plan de l’information, les interventions pourraient se concentrer sur des
campagnes de sensibilisation pour le secteur public et privé, sur le développement de
labels de qualité, et des études permettant de mieux comprendre les cycles de revenus et
de dépenses des ménages.
En matière de mesures d’incitation, les interventions pourraient porter sur une révision
du système actuel de fiscalité et de tarifs douaniers, l’élaboration de mécanismes
permettant de mieux appuyer les entreprises formelles dans l’approvisionnement de
produits fiables, une refonte du cadre juridique régulant l’électrification des zones rurales
avec des mini-réseaux, et la definition d’une grille tarifaire pour le rachat de la production
domestique d’électricité (feed-in tariffs).
Dans le domaine de l’investissement, les interventions proposées portent sur le
développement d’outils financiers innovants, tels que les lignes de crédit vertes et les fonds
d’investissement sur concours, le développement de fonds d’impact, et la mise sur pied de
systèmes de crédit répondant aux besoins des consommateurs finaux et des opérateurs
privés. Enfin, une dernière intervention se propose d’aider les banques à mieux évaluer les
risques dans le secteur énergétique.
Dans le domaine de l’appui à la mise en œuvre, les interventions pourraient inclure le
soutien au développement des services de développement des affaires, le pilotage de
modèles de distribution plus adaptés, et le développement des capacités de recherche et
développement et de capacités techniques au niveau local.
Le PNUD, par le biais de son Centre Régional pour l’Afrique et de sa division pour le secteur
privé, a donné une forte impulsion au développement de modèles d’entreprises inclusives à
travers le continent africain. Son expertise locale et continentale ainsi que ses relations
privilégiées avec tous les acteurs clés de la chaîne de valeur de l'énergie solaire permettent au
PNUD de jouer un rôle clé en vue de la création d'un écosystème favorable au secteur de
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
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l’énergie solaire au Sénégal dans les trois prochaines années (2017-2020). Cet objectif s’aligne
également avec les objectifs énoncés dans le programme pays (Country Programme 2012-
2018), qui mentionne explicitement la promotion des «emplois verts» et les énergies
renouvelables, y compris l’énergie solaire.
Une initiative réussie en matière d’écosystème pourrait, par ailleurs, promouvoir la notion
d’entreprise inclusive dans d’autres domaines au Sénégal. Ces modèles permettraient à des
populations à faible revenu, notamment dans les regions rurales, de se sortir de la pauvreté
grâce à des activités génératrices de revenus, et d’améliorer leurs conditions d’existence grâce
à des sources d’énergie plus saines, plus propres et plus abordables.
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
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Abréviation Nom complet
AECF The Africa Enterprise Challenge Fund
AFIM African Facility for Inclusive Markets (UNDP)
ANER Agence nationale pour les énergies renouvelables
ANSD Agence nationale des statistiques et de la démographie
APIX Agence de promotion des investissements et grands travaux
ASER Agence sénégalaise d’électrification rurale
BDS Business Development Services – Services d’appui aux
entreprises
CEDEAO Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest
CERER Centre d’études et de recherche sur les énergies renouvelables
CIEFJ Centre d’incubation d’entreprise de femmes et de jeunes
CIER Comité interministériel sur les énergies renouvelables
COMASEL Compagnie marroco-sénégalaise d’électricité
CRSE Commission de régulation du secteur de l’électricité
OSC Organisation de la société civile
EEG Erneuerbare Energien Gesetz
(Loi sur les énergies renouvelables de la République fédérale
d’Allemagne)
ENCO Energy & Construction Service Company
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
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ENERSA
Energie Rurale Sahélienne
ERA
Education and Research in Agriculture
ERIL Électrification rurale d’initiative locale
FMI Fonds monétaire international
GPF Groupement pour la promotion féminine
IDE Investissement direct étranger
IDH Indice de développement humain
IFC International Finance Corporation – Société Financière
Internationale
IMD Inclusive market development
LPDSE Lettre de développement du secteur de l’énergie
MEDER Ministère de l’énergie et du développement des énergies
renouvelables
NGO Non-governmental organisation
PASER Plan d’action sénégalais pour l’éléctrification rurale
PERACOD Programme pour la promotion de l’énergie renouvelable,
l’éfficacité énergétique et l’accès aux services énergétiques
PIB Produit intérieur brut
PME Petites et moyennes entreprises
PNUD Programme des Nations Unies pour le développement
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
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PPA Power Purchase Agreement (Accord de rachat d’énergie)
PPA Parité de pouvoir d’achat
PPER Programme prioritaire d’électrification rurale
PPP Partenariat public-privé
PREM Programme énergétique multisectoriel
PUDC Programme d’urgence de développement communautaire
PV Photovoltaïque
R & D Recherche et développement
SENELEC Société nationale d'électricité du Sénégal
SHS Solar Home Systems (Systèmes solaires à usage domestique)
UEMOA Union économique et monétaire ouest-africaine
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
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1. Contexte et motivation du choix de projet, de pays et de
secteur
1.1 Contexte de l’initiative en faveur d’un écosystème
Le secteur privé est le moteur de la croissance économique, et crée des opportunités
pour la population sur l’ensemble d’une chaîne de valeur
La croissance écomique est avant tout générée par le secteur privé. A travers l’ensemble du
continent africain, des entreprises créent des produits et des services. Par leurs activités, elles
intègrent les personnes en tant qu’employés, entrepreneurs, fournisseurs ou clients, et créent
des opportunités pour générer des revenus et permettre d’améliorer la qualité de vie des gens.
Cependant, les personnes à bas revenus restent souvent exclues de ces chaînes de
valeur, en raison de nombreux obstacles
La pauvreté est notamment caractérisée par un cercle vicieux qui renforce et nourrit les
mécanismes de l’exclusion. Les bidonvilles et autres quartiers habités par des populations à
bas revenus ne disposent que rarement d’une infrastructure physique permettant aux
entreprises d’y accéder facilement. En outre, les marchés y ont tendance à être informels, et
le cadre régulatoire est souvent appliqué de manière aléatoire, ce qui augmente les risques
pour les entreprises. Des informations fiables sur la taille des marchés, sur le pouvoir d’achat
des ménages, leurs besoins et leurs attentes sont souvent difficiles à obtenir. Enfin, les
populations à bas revenus ne disposent la plupart du temps ni de l’éducation ni de l’information
leur permettant de participer directement à la création de valeur économique. Par conséquent,
ces populations sont souvent cantonnées à des activités comme l’agriculture ou le micro-
entreprenariat, et se voient exclues des services de santé, de l’accès à l’éducation, de l’accès
à l’eau et à l’assainissement, à l’énergie, ou aux services financiers qui permettraient
d’augmenter leur productivité.
Les entreprises inclusives cherchent spécifiquement à intégrer les populations à
bas revenus dans les chaînes de valeur. Elles représentent une opportunité clé pour
atteindre les objectifs de développement durable
Au cours des 4 dernières années, l’unité du secteur privé du PNUD a cherché à promouvoir le
concept d’entreprise inclusive en Afrique (voir Encart 1). Plusieurs recommandations
concrètes ont été formulées sur la manière dont les entreprises inclusives pourraient être mises
en avant, dans le rapport « Réaliser les richesses cachées de l’Afrique – Créer des entreprises
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
12
inclusives pour une prospérité partagée », publié en 20131. Ce rapport développe notamment
le concept du « diamant inclusif » (voir Illustration 1). Les « entreprises inclusives », sont
définies comme des entreprises qui intègrent des personnes à faible revenus dans leur chaîne
de valeur en tant que consommateurs (du coté la demande) ou bien en tant qu’employés,
fournisseurs, producteurs et entrepreneurs (du côté de l’offre). Les entreprises inclusives
permettent de connecter les entreprises aux personnes vivant dans la pauvreté, pour le
bénéfice des deux parties. Le développement d’entreprises inclusives vise à faire en sorte que
la croissance économique bénéficie directement aux communautés à bas revenus. Les
entreprises inclusives jettent les bases d’une rentabilité économique et une croissance durable,
en mettant fin à l’exclusion économique des plus pauvres.
Encart 1 : Qu’est-ce qu’une entreprise inclusive ?
Les entreprises inclusives cherchent à intégrer des personnes à bas revenus dans leur chaîne
de valeur comme producteurs, consommateurs, employés et entrepreneurs, au benefice de
toutes les parties.
Source: PNUD 2008, “Creating Value for All”.
Le PNUD est de mieux en mieux positionné pour appuyer le développement de
marchés inclusifs
Le PNUD est de mieux en mieux placé pour appuyer des approches innovantes en matière de
développement de marchés inclusifs (DMI), à travers l’implication du secteur privé et d’autres
acteurs dans la recherche d’opportunités permettant aux personnes à bas revenus de participer
dans les chaînes de valeur, en tant que producteurs, employés ou consommateurs. Cette
approche est directement alignée avec la stratégie du PNUD pour le secteur privé.
L’Afrique reste au coeur des préoccupations du PNUD. Un projet régional pour la promotion
des marchés inclusifs en Afrique (AFIM) a été créé en novembre 2010 dans le cadre de la
stratégie de réduction de la pauvreté et du développement du secteur privé et des marchés
inclusifs en Afrique. Depuis janvier 2015, ce projet est intégré au programme régional du PNUD
pour l’Afrique. L’unité qui le gère – unité Secteur Privé AFIM - fait partie du pôle Croissance
inclusive et développement durable du Centre régional pour l’Afrique du PNUD, situé à Addis
Abéba en Ethiopie.
1 http://www.undp.org/content/undp/fr/home/librarypage/poverty-reduction/realizing-africa-s-wealth--building-inclusive-businesses-for-sha.html
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
13
Illustration 1: Le diamant des écosytèmes d’entreprises inclusives
Pour surmonter les conditions de marché difficiles dans lesquelles évoluent les
communautés à bas revenus, un environnement et un écosystème plus favorable
doivent être créés pour permettre à des entreprises inclusives de prospérer
Un écosystème pour les entreprises inclusives est un réseau d’acteurs interdépendant, dont
l’action est coordonnée pour permettre à des entreprises inclusives de prospérer et de générer
un impact positif à grande échelle. Le diamant des écosytèmes d’entrprises inclusives (voir
schéma) met en perspective les quatre domaines fonctionnels indispensables à
l’épanouissement de modèles inclusifs :
L’information, qui fournit aux entreprises la connaissance, l’expertise, la technologie
et le savoir-faire requis pour fonctionner dans les marchés à bas revenus;
Les mesures d’incitation, qui encouragent les entreprises à développer leurs
relations avec les communautés à bas revenus en récompensant les externalités
positives et en réduisant les risques et les coûts d’un tel engagement ;
L’investissement, qui procure les ressources financières permettant aux entreprises
de s’engager dans le développement de leurs marchés à la base de la pyramide;
L’appui à la mise en œuvre, qui comprend des aspects tels que la logistique, les
transactions, le marketing et la communication, ainsi que les services de soutien aux
micro-entreprises permettant aux entreprises inclusives de fonctionner dans une
variété d’environnements dynamiques.
Les initiatives de mise en place d’écosystèmes d’entreprises inclusives sont
encourageantes
Les acteurs de l’écosystème d’entreprises inclusives, à savoir les entreprises, les
gouvernements, les partenaires au développement, les organisations de la société civile
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
14
(OSC), les institutions de recherche et les intermédiaires, peuvent tous contribuer à renforcer
chacune des quatre fonctions du diamant inclusif. Cependant, mettre en place un écosystème
favorable aux entreprises inclusives est une tâche complexe. Les acteurs doivent pouvoir
collaborer et leurs rôles se compléter mutuellement. Les entreprises jouent naturellement un
rôle clé dans la création de modèles inclusifs, mais les autres acteurs (organisations
multilatérales, gouvernements, organisations de la société civile) doivent faire preuve
d’innovation et d’esprit d’entreprise pour soutenir ces efforts. La mise en place d’écosystèmes
inclusifs exige donc un «esprit d’entreprise collaboratif». Les initiatives de mise en place
d’écosystèmes ont été particulièrement efficaces en ce qui concerne les écosystèmes
d’entreprises inclusives. Ces initiatives permettent de coordonner l’action des différents acteurs
afin créer une synergie positive.
1.2 Motivation du choix du pays et du secteur
Un certain nombre de facteurs ont contribué à selectionner le Sénégal et le secteur de l’énergie
solaire pour concevoir et mettre en place un écosytème favorable à des modèles d’entreprises
inclusives.
Ces facteurs comprennent notamment le rôle du bureau pays du PNUD au Sénégal, le potentiel
encore inexploité de l’énergie solaire au Sénégal, et le potentiel de voir émerger des entreprises
inclusives dans le secteur grâce à un écosystème favorable. Ces facteurs sont encourageants,
certes, mais la transformation de ce potentiel en réalité tangible ne se fera pas sans un effort
soutenu.
Le bureau pays du PNUD au Sénégal a été selectionné à travers un processus de
sélection compétitif
Les pays partenaires pour piloter les initiatives de mise en place d’écosystèmes d’entreprises
inclusives ont été selectionnés par l’unité Secteur Privé AFIM du pôle Croissance inclusive et
développement durable du Centre régional pour l’Afrique du PNUD, à travers un processus de
sélection compétitif. Le bureau pays du PNUD au Sénégal a manifesté son intérêt et déposé
un dossier détaillé sur le secteur de l’énergie solaire au Sénégal, et l’intérêt d’y développer un
ecosystème d’entreprise inclusive.
Le bureau pays du PNUD fut en outre en mesure de contribuer des ressources humaines et
logistiques pour effectuer cette étude.
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
15
L’énergie est un domaine clé du plan de développement du Sénégal
Le Plan Sénégal émergent (PSE) est le plan de développement économique à long-terme du
Sénégal.2 Sa version actuelle a été finalisée et annoncée par le gouvernement en février 2014.
Le secteur de l’énergie apparaît dans diverses parties du document comme une part essentielle
des programmes et des objectifs de développement. Le « changement de cap » du secteur
est présenté comme l’un des 8 piliers de l’émergence économique3.
Dans le cadre du changement de cap, le PSE décrit un certain nombre d’objectifs clés à
atteindre, notamment4 :
L’élargissement de l’accès à l’énerge pour « une disponibilité parfaite en quantité et en
qualité suffisantes »
La réduction du prix de l’électricité de l’ordre de 50% par rapport aux niveaux de 2014, à
une fourchette de 60-80 CFA / KWh (US $ 0.10), comparé à un niveau actuel se situant
aux alentours de 120 CFA / KWh (US $ 0.20)
La réduction du nombre de coupures de courant
L’élargissement de l’accès à l’électricité pour la population rurale du Sénégal à 60% d’ici à
2017, avec l’ambition d’une couverture universelle de la population à une date non
spécifiée
La restructuration de SENELEC, la Société nationale d’électricité du Sénégal
Le renforcement de l’intégration régionale de l’infrastructure énergétique
L’incitation des opérateurs et investisseurs privés à développer et produire des unités de
production privées
Le plan spécifie également, et c’est un point fondamental, que le « mix énergétique » devrait
comprendre des sources d’énergies renouvelables, y compris le solaire, à hauteur de 10,2 %
du total. La chute rapide des prix du pétrole en 2015 et 2016 semble toutefois avoir ralenti
l’urgence de diversifier le mix énergétique du Sénégal et réduire sa dépendance envers le
pétrole, qui compte actuellement pour plus de 80% du mix total5.
L’objectif d’élargir la part des énergies renouvelables semble réaliste, mais il reste à voir si le
Sénégal sera en mesure de réduire le coût de l’électricité à hauteur de ses ambitions. L’énergie
solaire pourrait apporter des solutions dans ce cadre.
2 http://www.gouv.sn/-Plan-Senegal-Emergent-PSE,65-.html 3 Plan Sénégal Emergent, p67 4 Plan Sénégal Emergent, p67 5 Plan Sénégal Emergent, p93
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
16
Le plan d’action 2014-2018, c’est-à-dire la phase actuelle du PSE, prévoit de dépenser 304
milliards de francs CFA de fonds publics sur une période de quatre ans (environ 523 millions
de dollars au taux de mars 2016)6.
Le bureau pays du PNUD a des partenariats existants avec des acteurs locaux, et
est déjà impliqué dans des campagnes d’électrification rurale telles que comprises
dans le PUDC
Le bureau pays du PNUD, dans son rôle de partenaire actif du développement au Sénégal, a
noué des relations et des partenariats avec plusieurs des acteurs clés de la chaîne de valeur
de l’énergie solaire, particulièrement dans le secteur public, et avec notamment l’Agence
Nationale pour les énérgies renouvelables (ANER) et l’Agence sénégalaise pour l’électrification
rurale.
Le PNUD est le partenaire privilégié du gouvernement dans le Programme d’urgence de
développement communautaire (PUDC), un programme ambitieux de 113 milliards de francs
CFA (195 millions de dollars) du secteur public visant à accélerer le développement de
communautés rurale 7 . L’une des composantes du PUDC est l’électrification de 325
communautés rurales du Sénégal en les reliant au réseau national, ou par la fourniture
d’énergie solaire8.
L’initiative pour l’écosystème peut être intégrée dans le programme pays du PNUD
pour la période 2012-2018
L’initiative pour le développement d’un écosystème favorable, telle que proposée, peut être
intégrée au programme pays du PNUD pour la période 2012-2016, prolongée jusqu’en 2018.
La composante accès à l’énérgie du programme pays 2012-20169 mentionne spécifiquement
l’objectif de « développer des sources d’énergie alternatives compatibles avec la protection de
l’environnement, la création de richesse et d’emplois verts » 10 . Le programme pays est
désormais prolongé jusqu’en 2018.
L’objectif clé du PNUD à cet égard est la promotion et le développement d’emplois verts, c’est-
à-dire « d’emplois dans les services de production primaires permettant de contribuer à la
protection et la regénération de l’environnement11 ».
6 Ministère de l’économie et des finances du Sénégal, Plan Sénégal Emergent, Plan d’actions prioritaires 2014-2018. Available on http://www.gouv.sn/IMG/pdf/PAP_2014-2018_du_PSE_version_definitive_commentaires_et_ANNEXES.pdf 7 http://www.gouv.sn/Programme-d-urgence-de.html 8 Also see UNDP’s information folder: “Programme d’urgence de developpement communautaire”: http://www.undp.org/content/dam/senegal/docs/pauvrete/undp-sn-Xelu_pnud_fiche.pdf 9 UNDP-PNUD, “Plan d’action du Programme Pays 2012-2016, PNUD Sénégal, p 17 10 UNDP-PNUD, “Plan d’action du Programme Pays 2012-2016, PNUD Sénégal, p 17 11 UNDP-PNUD, “Plan d’action du Programme Pays 2012-2016, PNUD Sénégal, p23
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
17
Le marché de l’énergie solaire au Sénégal présente un potential clair de croissance
inclusive
Le potentiel de croissance du marché de l’énergie solaire au Sénégal est convaincant. Sur une
grande partie du territoire, l’irradiation solaire dépasse les 2.000 kWh /m2/an pour ce qui
concerne l’irradiation globale horizontale, et les 1.800 kWh/m2/an pour ce qui concerne
l’irradiation directe normale (Ministère de l’énergie et du développement des énergies
renouvelables, 2011). Cet ensoleillement présente donc de bonnes perspectives pour des
projets d’énergie solaire photovoltaïques12.
De plus, l’énergie solaire peut contribuer de manière significative au développement
d’entreprises inclusives et d’autres formes d’impact positif dans des communautés à bas
revenus, telle qu’illustré notamment par le PERACOD (voir Encart 2 ci-dessous) et les
plateformes multifonctionnelles du PNUD en Afrique de l’Ouest (voir Encart 3).
Encart 2: Le potentiel de l’énergie solaire pour stimuler des activités génératrices de
revenu et d’emploi à la base de la pyramide: l’exemple du PERACOD
L’exemple du PERACOD, un programme d’énergie renouvelable, pour la promotion des
énergies renouvelables, de l’efficacité énergétique et de l’accès aux services énergétiques mis
en œuvre, au Sénégal, par la coopération allemande depuis 2011, permet d’illustrer le potentiel
de retour sur investissement dans l’énergie solaire, même à petite échelle13. Un des projets les
plus récents du programme GIZ / PERACOD est une installation de solaire de 7,5 Kw et une
pompe à eau de 13m3 / jour dans le village de pêcheurs de Félane, à environ 120km au sud-
est de Dakar. L’installation a permis au Groupement pour la promotion féminine local (le GPF)
de faire fonctionner une machine à glace d’une capacité de production de 375 kg de glace par
jour. La machine à glace a permis d’assurer une bonne conservation du poisson dans le village
et d’en tirer plus de profits. Au début de 2016, l’installation a permis de créer 3 emplois fixes,
ainsi que de générer des revenus additionnels pour le GPF, qui sont ensuite réinvestis dans
de nouvelles activités génératrices de revenus. Etant donné que le produit de la pêche peut
être conservé plus longtemps, les surplus peuvent être écoulés à un meilleur prix sur les
marchés des localités voisines telles que Kaolack. De plus, l’électricité produite par l’installation
solaire a eu un effet de diversification économique et de création de valeur ajoutée dans
l’économie locale. La pompe à eau, par exemple, a permis à environ 120 femmes agricultrices
locales d’augmenter le rendement et la qualité de leurs légumes bio, qui sont ensuite vendus
à un prix plus élevé que la moyenne sur les marchés. Parmi les projets en cours en 2016
figurent une boutique énérgie et une offre de services financiers14.
12 IRENA, 2012, 31 13 GIZ, PERACOD (Programme de promotion des énergies renouvelables, de l’efficacité énergétique et de l’accès aux services énergétiques. Rapport de mission de suivi et d’évalutaion à Félane – Projet de mise en place d’une unité de fabrication de glace alimenté à 100pc par un système solaire”. February 2016. p8 14 GIZ PERACOD, ibid. pp11-14
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
18
Il y a également de très forts effets multiplicateurs qui peuvent être générés en appuyant le
secteur de l’énergie, et de l’énergie solaire en particulier. En effet, des investissements
relativement modestes peuvent générer des retours significatifs, en particulier dans les
domaines agricoles et du commerce au détail, qui réprésentent la colonne vertébrale de
l’économie rurale du Sénégal. La part de la population active dans le secteur agricole est en
effet estimée à 40-46% du total en 201615. Les appareils fonctionnant avec de l’énergie solaire,
comme les pompes à eau, peuvent augmenter les rendements en permettant d’irriguer les
champs plus efficacement, et les décortiqueuses solaires peuvent augmenter la valeur d’une
récolte pour des villageois en leur permettant de transformer leurs produits sur place. D’autres
appareils solaires, comme des glacières et des frigidaires peuvent permettre à des petits
commerçants des régions rurales d’augmenter leur chiffre d’affaires en leur permettant de
conserver des aliments et des boissons au frais, tout en réduisant leurs frais de transport. Les
moulins, chaudières, séchoirs et refroidisseurs solaires ont eux aussi des applications directes
dans le secteur agricole, peuvent générer des revenus et stimuler l’actiivité économique des
producteurs agricoles. La promotion des activités agricoles et des activités d’agro-
entrepreneurs fait partie intégrante du plan d’action pays du PNUD pour la période 2012-
201616.
Encart 3: Comprendre le potentiel des solutions d’énergie solaire : L’impact des
plateformes multifonctionnelles du PNUD en Afrique de l’Ouest17
Les plateformes multifonctionelles (PMF), développées par le PNUD en Afrique de l’Ouest,
permettent de démontrer le potentiel de l’énergie solaire en matière de développement
économique, de création d’emplois, d’activités génératrices de revenu et d’émancipation des
femmes. Grâce à un parteneriat avec la fondation Bill et Melinda Gates, et en collaboration
avec les gouvernements du Mali, du Sénégal et du Burkina Faso, le PNUD a établi des
initiatives PMF dans plus de 1.000 villages à travers la région, dont 375 au Sénégal.
Les PMF sont des micro-centrales utilisant des sources d’énergies renouvelables tels que le
biogaz et des huiles végétales (notamment l’huile de jatropha) ainsi que des appareils solaires
(pompes, moulins, et générateurs solaires). Les impacts directs et indirects des PMF semblent
concluants, d’après les rapports internes du PNUD : rien qu’au Sénégal, les PMF existantes
ont permis de créer 2.250 emplois et de bénéficier à 13.000 personnes.
Le secteur informel au Sénégal représente une part significative de l’activité économique du
pays, et joue un rôle clé pour assurer des moyens de subsistance des personnes vivant à la
base de la pyramide économique. En effet, selon une étude récente de l’agence nationale de
la statistique et de la démographie (ANSD), le secteur informel représente 2 millions d’emplois
15 http://data.worldbank.org/indicator/SL.AGR.EMPL.ZS 16 UNDP-PNUD, “Plan d’action du Programme Pays 2012-2016, PNUD Sénégal, p23 17 UNDP Regional Service Center for Africa – RSC-A, Multi-services energy enterprises enhance womenb empowerment in rural Africa !”, UNDP Regional Energy Project, March 2015.
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
19
et contribue à hauteur de 39,8% au produit intérieur brut (PIB)18. Compte tenu de l’importance
et du rôle du secteur informel, il sera essentiel de le prendre en compte dans la conception et
l’élaboration d’une politique et d’une stratégie pour la création de richesses, d’activités
génératrices d’emploi et la promotion de modèles de croissance inclusive et d’entreprises
inclusives dans le secteur de l’énergie solaire au Sénégal.
Le présent rapport s’intéressera tout particulièrement à des aspects spécifiques de l’énergie
solaire décentralisée, notamment le « pico solar », les systèmes solaires domestiques, les
mini-réseaux et la notion d’auto-production. L’encart 4 ci-dessous propose de définir ces
notions et de passer en revue les principales facettes de l’énergie solaire pertinents dans le
contexte de cette cartographie:
Encart 4: Petit glossaire du solaire
Introduction
L’énergie solaire, l’une des énergies renouvelables les plus fondamentales, se décline
principalement en deux grandes catégories19:
Le solaire dit « photovoltaïque », qui résulte de la conversion directe de l’énergie solaire en
électricité, et le solaire dit « thermique », qui résulte de la conversion de l’énergie solaire en
chaleur. Les applications les plus courantes du solaire photovoltaïque servent à alimenter une
gamme d’appareils électriques individuels à la consommation relativement faible (lampes,
petits appareils à usage domestique, pompes, décortiqueuses, etc…). Dans certains cas, les
installations photovoltaïques plus grandes peuvent alimenter des mini-réseaux, voire des
centrales électriques bien plus conséquentes : le plus grand projet de centrale solaire
actuellement en cours au Sénégal est d’une capacité de 200 MW, soit l’équivalent de près de
28% de la capacité totale installée actuellement. Le solaire thermique permet quant à lui
d’alimenter des chauffe-eau solaires, des systèmes de climatisation, des fours, des séchoirs
ainsi que le pompage de l’eau, des applications qui sont particulièrement d’à propos dans le
contexte sénégalais, notamment en milieu rural.
Pico solar
Les systèmes de pico solar (Solar Pico Systems - SPS) désignent les petits appareils prêts à
l’emploi équipés d’une batterie rechargeable et d’un contrôleur de charge. Ces appareils
fournissent en général de la lumière (lanternes solaires) ou permettent de faire fonctionner une
radio, un petit ventilateur ou de recharger un téléphone mobile. Des systèmes de pico solar
18 Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie, « Enquête Nationale sur le Secteur informel au Sénégal », Dakar, Novembre 2013. p 9, p 16. See also: Mohamed GUEYE, “Le Senegal est informel”, Seneplus Economie, 2 December 2013. http://www.seneplus.com/article/le-s%C3%A9n%C3%A9gal-est-informel 19 PERACOD, « Les énergies renouvelables – Les bases, la technologie et le potentiel au Sénégal », Dakar, 2011, pp.66-67
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
20
plus sophistiqués commencent à faire leur apparition sur le marché, permettant aux ménages
de brancher plusieurs lanternes et appareils simultanément, y compris des téléviseurs20.
Le voltage (pas plus de 12V) et la watt-crête (0.3- 10Wp) des SPS sont relativement bas. Le
coût des SPS varie entre 2 et 200 dollars21.
Les SPS permettent à des personnes vivant dans des régions qui ne pas connectées au réseau
d’avoir accès à des services d’énergie modernes. Les SPS sont en général peu coûteux, et
constituent une alternative viable aux systèmes solaires domestiques (SHS) dans les ménages
où la demande ou la capacité de paiement est trop faible pour un SHS22.
Systèmes solaires domestiques (Solar Home Systems)
Les systèmes solaires domestiques (SSD) sont des systèmes photovoltaïques autonomes,
permettant d’équiper, à un coût raisonnable, des ménages non reliés au réseau électrique avec
des lampes et autres appareils électriques. Dans les zones rurales non connectées au réseau,
les SSD permettent de satisfaire les besoins de base d’un ménage en matière d’électricité.
Les SSD fonctionnent en général sur un courant direct de 12V et fournissent suffisamment
d’énergie pour équiper des appareils à basse consommation d’énergie en courant direct (DC),
tels que des lampes électriques, radios, et petits postes de télévision avec une autonomie
d’environ trois à cinq heures par jour. Ces systèmes sont parfois accompagnés de cables,
interrupteurs et onduleurs permettant de convertir des tensions continues de 12/24 V de
puissance en 240VAC pour des appareils (charges) fonctionnant au courant alternatif.
Un SHS comprend généralement un ou plusieurs modules photovoltaïques montés sur le toit,
un contrôleur de charge de la batterie, qui protège les batteries et les appareils d’éventuels
dommages, et d’au moins une batterie pour stocker l’énergie lorsque le soleil ne brille pas. Les
SHS trouvent souvent une application dans des régions rurales faiblement peuplées où les
mini-réseaux ne sont pas viables économiquement. Etant donné que la capacité de production
d’énergie des SHS est fixe, le potentiel d’utilisation productive est limité aux activités à petite
échelle.
Mini-réseaux
Les mini-réseaux sont des petites centrales (jusqu'à 1 MW) fournissant de l’électricité aux
ménages, ainsi qu’à des utilisateurs publics our privés à travers un réseau de distribution local.
Ces mini-réseaux sont le plus couramment installés dans des communautés isolées. Dans la
plupart des cas, ils ne sont pas connectés à des réseaux nationaux et donc exploités en mode
autonome. Dans certains cas, les « mini-réseaux interconnectés » peuvent fonctionner (à
temps partiel) en connexion avec un réseau de transmission ou de distribution plus large, en
20 IEA International Energy Agency, Pico Solar PV Systems for Remote Homes A new generation of small PV systems for lighting and communication, pg, 5 , 2013 21Alternative Energy Grids, 2012, Pico PV: a real solution for rural electrification?, http://www.energy4humandevelopment.com/2012/02/pico-pv-real-solution-for-rural.html 22 Alternative Energy Grids, 2012, Pico PV: a real solution for rural electrification?, http://www.energy4humandevelopment.com/2012/02/pico-pv-real-solution-for-rural.html
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
21
particulier si le réseau principal n’est pas en mesure de fournir une alimentation électrique fiable
aux communautés rurales ou péri-urbaines ciblées.
Un mini-réseau peut être alimenté par une gamme de ressources énergétiques et de centrales
électriques (alimentées au diesel, hydrauliques, biomasse, solaire, éolienne, hybrides). La
plupart du temps, un mini-réseau utilisera un couplage en courant alternatif (AC) de basse
tension (220-380V) avec une production centralisée et un système de stockage (pour la plupart
des installations de batteries électrochimiques)23.
Les sources d'énergie classiques, tels que groupes électrogènes alimentées au diesel, ont
souvent été utilisées dans le passé pour alimenter des mini-réseaux. Grâce à l’évolution du
secteur des technologies renouvelables et les baisses de prix qui en ont résulté sur les
composantes d’énergies renouvelables (tels que les modules photovoltaïques et onduleurs),
les sources d’énergie renouvelables sont désormais la source d’énergie la plus viable
économiquement pour les mini-réseaux dans la plupart des endroits, et remplacent les groupes
électrogènes alimentés au diesel. Les mini-réseaux peuvent s’avérer être des investissements
porteurs (notamment pour des investisseurs privés) dans les régions où l’extension du réseau
national ne peut être justifiée sur le plan économique, mais dans lesquelles il existe une
demande et une capacité de paiement de la part des populations visées.
Systèmes d’auto-production
Les systèmes d’auto-production permettent de convertir de l’électricité produite à partir de
sources renouvelables (solaire photovoltaïque, éolien, biomasse, hydraulique…) et de la
réinjecter sur le réseau principal au moyen d’un onduleur. La capacité de production de ces
systèmes varie de quelques kilowatts (par exemple des systèmes photovoltaïques montés sur
un toit ou des petites turbines éoliennes) jusqu'à plusieurs mégawatts (par exemple des parcs
éoliens ou de grands systèmes photovoltaïques).
Dans la plupart des cas, l’énergie est principalement utilisée pour la consommation locale (en
général les ménages), tandis que seulement le surplus (à savoir l’énergie produite mais non
consommée) est «réinjectée» dans le réseau, mesuré par un compteur électrique spécial. Ces
systèmes permettent aux consommateurs d’économiser l’énergie en réduisant leur
dépendance sur le réseau, et d’injecter l’énergie produite en surplus dans le réseau24.
23 Alliance for Rural Electrification, 2011, Rural electrification with renewable energy. Pg 27 Available at http://www.ruralelec.org/fileadmin/DATA/Documents/06_Publications/ARE_TECHNOLOGICAL_PUBLICATION.pdf 24 A.S. Elhodeiby, H.M.B. Metwally and M.A. Farahat, 2011, “Performance Analysis Of 3.6 Kw Rooftop Grid Connected Photovoltaic System In Egypt”, presented at the International Conference on Energy Systems and Technologies (ICEST 2011) 11-14 March 2011, Cairo, Egypt, available at: http://www.physicsegypt.org/icest2011web/icest11019.pdf
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
22
2. Bref aperçu économique et démographique
Avec une population estimée à 14,8 millions d’habitants en 2016, le Sénégal est un marché
relativement petit. Son économie se situe au quatrième rang régional en Afrique de l’Ouest
(après le Nigéria, le Ghana et la Côte d'Ivoire). Avec une moyenne de 3,8 % par an, le pays a
connu une solide croissance économique au cours de la décennie 2005-201525. Le pays a
aussi connu une série de transitions politiques réussies, appuyées notamment par un cadre
institutionnel solide. Ces facteurs ont renforcé la réputation de stabilité du Sénégal, et en ont
fait une destination de choix pour les investissements directs à l’étranger (IDE).
Le Sénégal (voir carte admministrative dans l’illustration 2 ci-dessous) est également l’une des
principales plaques tournantes aériennes, maritimes et routières d’Afrique de l’Ouest. Le pays
est un membre important des deux grandes organisations économiques régionales, à savoir
l’Union économique et monétaire Ouest-africaine (UEMOA) et la Communauté économique
des Etats d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), dont la présidence sera assurée par le Sénégal entre
2016 et 2018.
La monnaie locale, le franc CFA, est rattachée à l’euro sur base d’une parité fixe de 655,957
francs CFA pour 1 euro. L’union monétaire réunit également 7 autres pays de la région (le Mali,
le Burkina Faso, la Guinée Bissau, le Bénin, le Togo, la Côte d'Ivoire et le Niger).
Illustration 2 : Carte du Sénégal26
25 African Development Bank, Senegal Economic Outlook, http://senegal.opendataforafrica.org/ & 26 Credit: http://www.nationsonline.org/oneworld/map/senegal-administrative-map.htm
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
23
2.1 Population
Tableau 1 : Données démographiques de base27
Population 14.799m Croissance démographique 2.9%
Proportion de
femmes
50.4% Population urbaine (en % du total) 42.9%
Proportion
d’hommes
49.6% Croissance annuelle de la
population urbaine
3.32%*
Tranche d’âge :
0-14 ans
42.16% Indice de développement humain 0.466
15- 24 ans 20.4% Rang mondial IDH (sur 188) 170
25-54 ans 30.67% Taux d’alphabétisation en % (total) 57.7
55-64 ans 3.84% Taux d’alphabétisation masculine
%
69.7
Plus de 65 ans 2.29% Taux d’alphabétisation féminine % 46.6
Taux de pauvreté 46.7% Indice d’inégalités de genre (GII) 0.528
La population du Sénégal (voir données démographiques de base dans le Tableau 1 ci-dessus)
était estimée à 14,8 millions de personnes en 2016, selon l’agence nationale des statistiques
et de la démographie (ANSD). L'âge médian est de 18 ans, et l’espérance de vie à la naissance
est 64,8 ans28.
Les grands centres urbains du pays sont principalement situés dans les zones côtières, en
particulier la région du grand Dakar, qui regroupe 3,4 millions de personnes29. Malgré un exode
rural important, le Sénégal reste un pays majoritairement rural, avec 57% de la population
vivant en hors des grandes concentrations urbaines. Selon la Banque mondiale, la migration
vers les villes comme Dakar, et dans une moindre mesure vers l’étranger, s’est accélérée en
27 United Nations Department of Economic and Social Affairs (2015), Population Division, World Population Prospects: The 2015 Revision and UNDP; Human Development Report 2015. Briefing note for countries on the 2015 Human Development Report, Senegal;
indexmundi, http://www.indexmundi.com/senegal/demographics_profile.html
CIA World Fact Book, 2016 https://www.cia.gov/library/publications/the-world-factbook/geos/sg.html 28 Source: Agence Nationale de la Statistique et de la démographie (ANSD), Dakar, 2016. (National Agency for Statistics and Demography) http://www.ansd.sn/ 29 ANSD. 2016.
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
24
raison du déclin du secteur arachidier et le mauvais état général des infrastructures publiques
dans les zones rurales, en particulier en matière d’enseignement et de soins de santé30.
La croissance rapide de la population urbaine ne se traduit pas toujours en meilleure qualité
de vie : en effet, la pauvreté, l’exclusion sociale et la marginalisation touchent une grande partie
de la population des villes. L’économie formelle, en particulier le secteur des services, connaît
une croissance soutenue, mais peine à absorber tous les demandeurs d’emplois31. Le PNUD
estime que 46,7% de la population totale du Sénégal vit en dessous du seuil de pauvreté. Cette
moyenne générale masque toutefois des différences très marquées entre les régions côtières
relativement prospères (telles que Dakar, Thiès, Louga et Saint-Louis) et les régions beaucoup
plus pauvres du sud et de l’est du pays. A Dakar et Louga par exemple, le seuil de pauvreté
avoisine le quart de la population (respectivement 26,1% et 26,8% de la population). En
revanche, dans les régions du sud et de l’est, l’incidence de pauvreté dépasse les deux tiers,
voire les trois quarts de la population, atteignant jusqu'à 76,6% de la population dans la région
de Kolda et 71% dans la région de Kédougou, par exemple32.
Ces chiffres signifient également que l’objectif de développer un écosystème favorable pour
les modèles d'entreprises inclusives au Sénégal devrait être dirigé en priorité vers les zones
rurales les plus pauvres.
2.2 Economie
Le Sénégal est fait partie des pays à revenu moyen inférieur, avec un revenu par habitant
estimé à 2.333 dollars par an en parité de pouvoir d’achat (PPA) en 2015 33 (Voir Tableau 3
pour une vue d’ensemble des données économiques de base). En 2014, le PIB total du
Sénégal était estimé à 15,66 milliards de dollars34 . Une nette embellie économique s’est
produite en 2014 avec une croissance de 4,7%, la plus rapide depuis 200835. En termes de
valeur ajoutée (voir Tableau 2), l’économie du Sénégal est dominée par le secteur des services,
qui contribue à hauteur de 58,6% du PIB, suivi par l’industrie (24,3%), et l’agriculture (17,1%)36.
En ce qui concerne l’emploi, le secteur agricole domine nettement, occupant 77% de la
population en âge de travailler37.
30 World Bank, 2016, Doing Business 2016, Senegal Economy profile 2016, pg. 15 available at http://www.doingbusiness.org/reports/global-reports/~/media/giawb/doing%20business/documents/profiles/country/SEN.pdf 31World Bank, 2016, Doing Business 2016, Senegal Economy profile 2016, pg. 15 available at http://www.doingbusiness.org/reports/global-reports/~/media/giawb/doing%20business/documents/profiles/country/SEN.pdf 32 ANSD. 2016: Interactive map available on: http://www.ansd.sn/ 33 http://data.worldbank.org/indicator/NY.GDP.PCAP.PP.CD 34World Bank data. Last accessed on 2016-02-15 available at:http://data.worldbank.org/country/senegal 35World Bank, 2015, Senegal Country Overview available at http://www.worldbank.org/en/country/senegal/overview 36 CIA, 2015, World Fact Book, Senegal, available at https://www.cia.gov/library/publications/the-world-factbook/geos/sg.html 37 African Economic Outlook: Senegal Report, African Development Bank (AfDB) (2015). /www.africaneconomicoutlook.org/en/country-notes/west-africa/senegal
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
25
Tableau 2 : Contribution des différents secteurs de l’économie au PIB38
Les flux d’investissements directs étrangers (IDE) ont atteint 342,7 millions de dollars en
201439. La France, ancienne puissance coloniale, reste un partenaire économique clé du
Sénégal et compte pour un tiers (34%) de ce montant. Ces dernières années ont aussi été
marquées par l’émergence du Maroc comme nouveau partenaire commercial et économique
privilégié: les sociétés marocaines comptent aujourd’hui pour 4% des flux d’IDE. Parmi les
autres sources d’investissements figurent les États-Unis (pour 3% du total) et l’île Maurice (pour
2%), qui, dans son rôle de plaque tournante des services financiers, est surtout un intérmédiaire
pour les investissements en provenance du Moyen-Orient et de l’Asie, dont la Chine4041.
Le Sénégal reçoit un appui technique du FMI pour la mise en œuvre du Plan Sénégal
Emergent. L’assistance du FMI, ainsi que l’émission réussie d’emprunts obligataires sur les
marchés des capitaux internationaux, ont encore renforcé la confiance des investisseurs42.
Les envois de fonds étrangers, dont le volume représente presque 5 fois les flux d’IDE,
constituent une source essentielle de revenus pour le pays, avec un impact beaucoup plus
direct et immédiat sur les secteurs les plus pauvres de la population. Selon la Banque mondiale,
les envois de fonds ont atteint les 1,6 milliard de dollars en 2014, soit 11% du PIB, et une
moyenne de 110 dollars par habitant43. Ces envois de fonds constituent une source vitale de
revenus pour les nombreux Sénégalais qui ont des parents vivant et travaillant à l'étranger, très
souvent au sein des populations les plus démunies. Il s’agit là d’un facteur très important à tenir
en compte pour le développement d’un écosystème propice à l’énergie solaire au Sénégal:
38 World Development Indicators, World Bank (2015). Cited by Dalberg, 2016: “The Landscape for Impact Investing in West Africa. Understanding the current status, trends, opportunites and challenges”, Chapter on Senegal, Dalberg, December 2015. 39 African Development Bank AFDB, 2016. http://www.africaneconomicoutlook.org/en/countries 40 U.S. Department of State, 2015, Senegal Investment Climate Statement 2015, pg 5-6 41 IMF Coordinated Direct Investment Survey available at http://data.imf.org/?sk=40313609-F037-48C1-84B1-E1F1CE54D6D5&sId=1390030109571 42 CIA World Fact Book, 2016 https://www.cia.gov/library/publications/the-world-factbook/geos/sg.html 43 http://data.worldbank.org/indicator/BX.TRF.PWKR.CD.DT
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
26
Selon une étude menée par la Banque mondiale en 2011, une part importante des envois de
fonds est consacrée aux dépenses des ménages, y compris dans l’énergie44. Les envois de
fonds ont également ouvert la voie à de modèles d’entreprise innovants tels que Niokobok45,
une boutique en ligne permettant aux populations émigrées d’acheter une gamme de produits
ménagers en ligne, notamment des lampes solaires, et de les faire livrer directement à leurs
familles ou amis.
La taille du marché de l’énergie: Une étude de la Banque mondiale46 sur les dépenses des
ménages en 2010 a estimé que les dépenses totales en énérgie des ménages sénégalais
s’élevaient à 364 millions de dollars. Les ménages les plus pauvres, qui représentent 77% de
la population totale, comptent pour 153,3 millions de dollars de ce montant. Cela équivalait, en
2010, à une dépense par habitant de 16 dollars par an dans les couches de revenus les plus
faibles. La part de l’énergie dans les dépenses totales de ces ménages réprésentait 4% du
total.
Facilité de faire des affaires : L’environnement des affaires et l’environnement régulatoire du
Sénégal reste difficile: Le pays fait partie du peloton de queue du classement « Ease of Doing
Business » (facilité de faire des affaires) de la Banque mondiale, se situant au 161è rang sur
181 pays en 2015. Le coût élevé de l’énergie et le manque d’accès à l’électricité font justement
partie des plus grands freins aux entreprises: D’après ce rapport, il faut en moyenne 114 jours
et compléter 8 procédures pour obtenir une connexion électrique47.
Pour autant, et à son grand mérite, le Sénégal a engagé des réformes sérieuses pour relever
ces défis, et a introduit des mesures concrètes pour améliorer son classement. Ces mesures
ont permis au Sénégal de figurer parmi les meilleurs pays « réformateurs » du monde entre
2013 et 2015. Ainsi, par exemple, le temps requis pour inscrire une société au registre de
commerce a été réduit de 122 à 60 jours entre 2013 et 2015. L’infrastructure
physique, notamment, s’est aussi visiblement améliorée.
Tableau 3 : Données économiques de base4849
Indicateur Valeur
PIB (2014) US $ 15,6 milliards
PIB per habitant (2014) US $ 1.054
44 “Leveraging Migration for Africa: Remittances, Investments, and Skills,” World Bank (2011). Available at: http://siteresources.worldbank.org/EXTDECPROSPECTS/Resources/476882-1157133580628/AfricaStudyEntireBook.pdf. 45 www.niokobok.com 46 http://datatopics.worldbank.org/consumption/country/Senegal 47 World Bank, 2016, Doing Business 2016, Senegal Economy profile 2016, available at http://www.doingbusiness.org/reports/global-reports/~/media/giawb/doing%20business/documents/profiles/country/SEN.pdf 48 Source: World Bank 2016. http://www.worldbank.org/en/country/senegal 49 ANSD, “A l’ecoute du Senegal”, 2015. http://www.ansd.sn/ressources/rapports/Rapport%20L2S%20consolide-preliminaire.pdf
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
27
Taux de croissance du PIB (2014) 4.7%
Flux d’investissements directs étrangers (2014)
US $ 342,7 millions
Envois de fonds étrangers (2015) US $ 1,6 milliard
Inflation (2015) 0,1%
Indice de facilité de faire des affaires (2015)
161/188
Montant total de dépenses des ménages en énergie (2010)
US $ 364 millions
Montant total des dépenses des ménages les plus pauvres en énergie (77% de la population) (2010)
US $ 153,3 millions
Montant total des dépenses en énergie par habitant par an (2010)
US $ 16
Montant des dépenses en énergie des ménages en proportion du total (2010)
4%
Proportion de la population ayant un accès à l’électricité, Dakar
96%
Proportion de la population ayant un accès à l’électricité, autres régions urbaines
83%
Proportion de la population ayant un accès à l’électricité, régions rurales
32,4%
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
28
3. Analyse situationelle: Le secteur de l’énergie
renouvelable et de l’énergie solaire au Sénégal
3.1 Le secteur de l’énergie renouvelable et de l’énergie solaire
Le secteur des énergies renouvelables en général, et de l’énergie solaire en particulier,
joue encore un rôle marginal en tant que sous-secteur du secteur de l’électricité au
Sénégal (Voir Illustration 3). En 2013, la production totale d’électricité au Sénégal s’élevait à
3,7 TWh. Les combustibles liquides importés, qui alimentent les centrales au diesel et au fuel,
dominent très largement cette production, avec 84% du total. Le gaz contribue à hauteur de
4%, suivi par les biocarburants (1,6%). Les centrales hydroélectriques (8,3%) et d’autres
sources renouvelables (1,8%) fournissent donc une contribution limitée. Les applications
photovoltaïques décentralisées comptent pour à peine 4 GWh / an, soit 0,11% du total.
Illustration 3: Alimentation des sources d’électricité au Sénégal en 201350
50 Chiffres de l’Agence internationale pour l’Energie (International Energy Agency): http://www.iea.org/statistics/statisticssearch/report/?year=2013&country=Senegal&product=ElectricityandHeat
84.26%
4.02%
1.59%8.30%
0.11% 1.72%
Oil Gas Biofuels Hydro Solar PV Other sources
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
29
La capacité totale installée de production d'électricité est de 690 MW, dont 94% est relié
au réseau national. Environ 26 MW sont reliés aux centres régionaux isolés de Ziguinchor et
Tambacounda dans les régions du sud et du sud-est du pays, et 15 MW de plus sont installés
dans divers petits systèmes autonomes dans les régions éloignées 51. Environ 60% de la
capacité totale est détenue et exploitée par la compagnie nationale SENELEC. Le GTI-Dakar,
l’un des producteurs indépendants (IPP) du pays, exploite une centrale électrique mixte gaz /
vapeur à cycle combiné de 53 MW, et le restant est exploité par le consortium ESKOM-
Manantali. Enfin, la centrale hydroélectrique de Manatali (à la frontière avec le Mali), contribue
à hauteur de 10% de la capacité totale installée52.
SENELEC, la compagnie nationale d'électricité du Senégal, exploite l’ensemble du réseau de
transmission du pays, soit 733 km de lignes de 225 kV et de 90 kV. La distribution est assurée
par un réseau de 8.886 km de câbles à basse tension de 30 kV et de 6,6 kV, et 8.081 km à
380 kV53. Les pannes de courant sont fréquentes, notamment en raison d’une faible capacité
de réserve et de problèmes structurels. La forte dépendance à l’égard de combustibles fossiles
importés, et des pertes en ligne sur le réseau à haute tension de l’ordre de 16% ou plus,
entraînent des coûts moyens de production élevés.
La consommation d'électricité au Sénégal reste encore relativement faible en dépit d’une
croissance annuelle moyenne d’environ 10% depuis 2000. Le Sénégal se situe au quatrième
rang en Afrique de l’Ouest, avec une consommation annuelle de 218 kWh par habitant en 2013,
environ moitié de la moyenne continentale de 536 kWh, et bien au-dessous de la moyenne
mondiale de 2.740 kWh. En revanche, les taux d'électrification sont relativement élevés par
rapport aux autres pays de la région. Environ 45% des ménages sénégalais ont accès à
l’électricité. Les taux d’accès sont trois fois plus élevés dans les zones urbaines (75%) que
dans les zones rurales (25%)54. La demande devrait augmenter de façon continue, tirée par la
croissance économique et démographique. En 2030, la demande atteindra environ trois fois
celle de 201055.
Le Sénégal présente un excellent potentiel pour les énergies renouvelables et l’énergie
solaire en particulier. L’irradiation solaire moyenne est d'environ 5,5 kWh/m²/ jour, avec une
irradiation directe de 65%. Le long du littoral entre Dakar et Saint Louis, dans le nord-ouest, les
conditions de vent sont relativement bonnes, avec une vitesse de moyenne de 6,5 m/s ou
davantage à une altitude de 75 m 56. Les fleuves Sénégal et Gambie offrent un potentiel
hydroélectrique total d’environ 1,4 GW57. La biomasse solide (sous-produits de l’agriculture et
51 BMZ: Analysis of System Stability in Developing Countries, Country Chapter: Senegal, 2014 52 Le barrage est géré par la Société de gestion de l’énergie de Manantali (SOGEM) créée en 1997. La SOGEM a signé une concession de 15 ans avec la société privée EEM, une filiale de l’entreprise nationale sud-africaine ESKOM. 53 Voir http://www.senelec.sn/content/view/17/67/ 54 The World Fact Book, CIA (https://www.cia.gov/library/publications/the-world-factbook/geos/sg.html) 55 SNC-Lavalin International Inc., “PLAN D’EXPANSION PRODUCTION-TRANSPORT (RAPPORT FINAL),” 11/2010. 56 Deutsche WinGuard: Feasibility study for Potou wind park, 2010 57 International Renewable Energy Agency (IRENA), 2012, Senegal Renewables Readiness Assessment, p 32
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
30
de l’agro-business) et les biocarburants liquides présentent à leur tour des opportunités de
développement.
Conscient du fait que la demande pour l’électricité croît plus rapidement que l’offre, le
gouvernement sénégalais a introduit d’importantes mesures de politique énergétique pour
augmenter les capacités de production et les taux d'électrification. L’objectif stratégique est de
réduire la dépendance envers les carburants liquides importés, d'augmenter la part des
énergies renouvelables dans le mix énergétique, et d’atteindre un taux d’électrification de 60%
d'ici 201758.
Compte tenu d’une part de la capacité de production insuffisante, des coûts de
production élevés et de l’augmentation prévue de la consommation d’énergie, et d’autre
part du grand potentiel de l'énergie solaire, plusieurs formes d’énergie solaire pourraient
contribuer au mix énergétique du Sénégal. Des centrales photovoltaïques d’envergure (à
savoir plusieurs MW) sont en passe d’être connectées au réseau national, et contribueront de
manière substantielle dans un futur proche à l’augmentation de la capacité de production. Les
mini-réseaux solaires photovoltaïques (d’une capacité de 5 à 100 kW) contribueront eux aussi
à atteindre les objectifs d'électrification rurale à moindre coût que toute autre source
d'alimentation. Les systèmes solaires domestiques (SHS – Solar Home Systems) de 50 à 500
W permettent à des utilisateurs individuels d’avoir accès à l'électricité, tandis que le pico solaire
permet de fournir un éclairage abordable et sûr pour les habitations isolées, et permet aussi de
recharger des téléphones ou de faire fonctionner de petits appareils comme des radios ou mini
ventilateurs.
Alors que les grandes centrales photovoltaïques raccordées au réseau présentent relativement
peu d’opportunités pour les entreprises inclusives (en dehors des ressources humaines
indispensables à leur installation et leur fonctionnement), les mini-réseaux solaires, les SSD et
les solutions pico solaires présentent toute une série d’opportunités intéressantes.
3.2 Les acteurs clés
Les décisions importantes liées à l’énergie, en particulier celles concernant le réseau
électrique, sont prises par le Conseil des ministres. Le CIER, ou Comité interministériel sur
les Energies Renouvelables, est chargé de la coordination et la facilitation des décisions
portant sur les sources d'énergie renouvelables raccordées au réseau et de toutes les
questions d'énergie renouvelables, en consultation avec les acteurs clés respectifs (MEDER,
SENELEC, CRSE, ASER) 59.
Le ministère de l’Energie et du Développement des Energies Renouvelables (MEDER)
est l’institution principale en charge de la formulation, la définition et la coordination des
politiques, des stratégies, des objectifs et des directives générales pour l’ensemble du secteur
de l’électricité. Le ministère est habilité à émettre des directives à la SENELEC.
58 Plan Sénégal Emergent, République du Sénégal 59 International Renewable Energy Agency (IRENA), 2012, Senegal Renewables Readiness Assessment, pg 34
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
31
La Commission de Régulation du Secteur de l’Electricité (CRSE) est responsable de la
régulation du secteur de l’électricité, avec pour tâche principale la régulation des tarifs de vente
d'électricité de la SENELEC, ainsi que des ventes des producteurs indépendants (IPP) et des
autres opérateurs, y compris dans le secteur de l’électrification rurale. La CRSE cherche aussi
à créer des conditions favorables pour le secteur privé et de créer les conditions d’une saine
concurrence entre opérateurs sur le marché, tout en protégeant les intérêts des
consommateurs en matière de prix, d'accès et de qualité.
L’Agence Sénégalaise d’Electrification Rurale (ASER) fut créée en 1999, et devenue
pleinement opérationnelle en 2005. L’agence est chargée de l’ensemble du secteur de
l’électrification rurale et la mise en œuvre des stratégies d’électrification rurale du
gouvernement. Le rôle principal de l’ASER est de développer les appels d’offres, attribuer les
marchés des projets d’électrification rurale financés par des bailleurs de fonds, et de
sélectionner des fournisseurs compétifs. Toutefois, les fonctions réglementaires relèvent de la
CRSE, et la SENELEC continue à contrôler certains aspects du marché de l’électricité, aussi
bien sur le réseau qu’au niveau du « off-grid » (hors réseau).
L’Agence Nationale pour les Energies Renouvelables (ANER) a été créée en 2013 dans le
but de promouvoir l’utilisation des énergies renouvelables dans tous les secteurs économiques
du Sénégal. L’ANER appuie le MEDER, dont elle dépend, dans la formulation des politiques
portant sur les énergies renouvelables, et apporte un soutien en matière de recherche, de
formation et de d’information sur tous les aspects liés aux énergies renouvelables à tous les
intervenants, y compris au secteur privé.
La Société nationale d'électricité du Sénégal (SENELEC) est une entreprise d’Etat, chargée
des opérations de production d’électricité et de la gestion du réseau de transmission. La
SENELEC contrôle également la majeure partie du réseau de distribution, et opère dans une
situation de monopole pour l’achat et la vente d'électricité en gros. À ce jour, (2016) toute
l’électricité injectée dans le réseau national doit être vendue à la SENELEC. Après l’échec de
plusieurs tentatives de privatisation, la SENELEC fait actuellement l’objet d’un processus de
renforcement des capacités de production d’énergie d’une restructuration organisationnelle60.
L’illustration 4 (voir page suivante) ci-après est une cartographie simplifiée des principaux
acteurs du secteur de l’électricité solaire au Sénégal.
60 Boston Institute for Developing Economies (BIDE): Privatization of Senegal Electricity, October 2006
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
32
Illustration 4: Cartographie simplifiée des principaux acteurs du secteur de l’électricité solaire au Sénégal
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
33
En plus des grands acteurs du secteur public sénégalais, les partenaires au développement
internationaux, en particulier la SFI (Sociéte financière internationale – Groupe Banque
mondiale), la banque de développement allemande KFW, et le français PROPARCO (Groupe
Agence française de développement AFD), investissent chacun dans une série de projets à
grande échelle dans l’énergie solaire au Sénégal:
- La Société financière internationale61 finance la construction d’un parc solaire de
200 MW sur la période 2015-2020. Il est prévu que la moitié de cette capacité soit
disponible à la consommation en 2018. Ce projet, signé en 2015, fait du Sénégal le
deuxième pays à rejoindre l’initiative « Scaling Solar » de la SFI, après la Zambie.
Dans le cadre du projet, la SFI, en tant que partenaire financier, aidera à organiser des
ventes aux enchères concurrentielles, et fournira des garanties financières. La
première vente aux enchères, portant sur 100MW de capacité, est prévue en 2016.
Les soumissionnaires sélectionnés seront soumis à des conditions strictes, notamment
un accord d’achat d’électricité et un accord de soutien du gouvernement. Il s’agit là
d’une approche nouvelle pour le gouvernement sénégalais qui, dans le passé, a choisi
de négocier de nouveaux projets d'énergie directement avec les constructeurs.
KFW, la banque allemande de financement du développement62, exécute, pour le compte
du Ministère allemande de la Coopération (BMZ), la coopération financière entre l’Allemagne
et le Sénégal, en étroite synergie avec la GIZ, agence d’exécution de la coopération technique
allemande.
La KfW coopère avec d’autres IFD comme la Banque Mondiale et l’AFD, pour soutenir
l’expansion des énergies renouvelables au Sénégal et développer un réseau d’énergie
performant, autonome et durable. Elle apporte des subventions au profit du Gouvernement du
Sénégal.
Les projets actuels d’énergie solaire de la KfW sont :
1. Le Programme « Energies renouvelables » avec les composantes suivantes :
1 centrale photovoltaïque à Diass d’une capacité installée de 15 MW interconnectée au réseau de Senelec
7 centrales par système photovoltaïque hybride, avec une capacité solaire installée d’environ 2 MW dans les centres secondaires de Senelec situés à Medina Gounass, Goudiry, Kidira et dans les Îles du Saloum.
Ce programme est exécuté en EPC, en étroite collaboration avec Senelec. L’apport financier de la KfW de 27 millions d’euros.
61Renewable Energy.com 2016, Senegal to Add 200 MW of Solar Through IFC Program, disponible sur: http://www.renewableenergyworld.com/articles/2016/02/senegal-to-add-200-megawatts-of-solar-through-ifc-program.html (last visited 13-04-16) 62 Source: Bureau pays du KFW Dakar, & KFW, Financing Renewable Energies Financing Renewable Energies the Case of Senegal, disponible sur http://fss.plone.uni-giessen.de/fss/fbz/fb07/fachgebiete/physik/einrichtungen/2pi/ag/ag-dueren/docs/kfwgihr/file/kfw_gihr.pdf
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
34
2. La Concession d’Electrification rurale Kaolack, Nioro, Fatick et Gossas :
Ce programme a pour objectif le raccordement de 27.000 ménages au total, dont 10.000 par
unité solaire indépendante. Le montant du financement s’élève à 6,6 millions d’euros.
-
- PROPARCO, la branche secteur privé de l'Agence française de développement (AFD),
est un autre acteur clé parmi les grands investisseurs du secteur de l’énergie solaire
au Sénégal. A travers les sociétés d’investissement Meridiam et FONSIS (le fonds
souverain du Sénégal), l’organisation finance à hauteur de 41,16 millions d'euros la
construction d'une installation solaire de 30 MW près de la ville de Méouane dans la
région de Thiès. Il s’agit de la plus grande installation solaire du genre en Afrique de
l’Ouest à ce jour (2016)63.
Enfin, l’AFD a lancé son initiative SUNREF (« Sustainable use of natural resources
and energy finance » - Utilisation durable des ressources naturelles et financement
de l'énergie) en Afrique de l’Ouest en 2015. SUNREF est le label énérgie verte de
l’AFD, cherchant à promouvoir les investissements dans l’énergie et les services
environnementaux, notamment en fournissant une ligne de crédit administrée par les
banques commerciales partenaires pour le financement de projets d'énergie
renouvelable et d’efficacité énergétique. En soutien à la ligne de crédit, une assistance
technique a été mise en place, couplée d’un fonds d’appui à la préparation des projets
et d’une dotation pour le versement de primes sous forme de subventions aux projets
financés.64.
3.3 L’environnement régulatoire
Suivant des recommandations venant de la Banque mondiale, le gouvernement
sénégalais a commencé à restructurer en profondeur le secteur de l’électricité dès 1997.
Une stratégie fut définie dans un document intitulé « Lettre de Développement du Secteur de
l'Energie » (LPDSE), et le processus fut entériné dans la législation par les lois du 29 Janvier
1998, et du 14 Avril 1998 sur le secteur de l’électricité. Cela a conduit à un démantèlement
partiel et la privatisation de la SENELEC (privatisation qui aura été de courte durée). La réforme
du secteur a aussi conduit à l’établissement de l’ASER et de la CRSE, et à la libéralisation
partielle du secteur de l’électricité à travers l’ouverture du secteur aux investisseurs privés pour
63 Amadou Oury Diallo and Joel Te-Lessia, “Meridiam lance un projet solaire de 41 millions d’euros au Senegal”. Jeune Afrique, 15 January 2016. http://www.jeuneafrique.com/294242/economie/meridiam-lance-projet-solaire-de-41-millions-deuros-senegal/ 64 AFD. “SUNREF – AFD’s Green Finance Label”. AFD, Paris, 2014. http://www.afd.fr/webdav/site/afd/shared/PUBLICATIONS/THEMATIQUES/AFD_SUNREF_VA.pdf
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
35
ce qui concerne la production d’électricité. En 2002, la loi 98-29 fut amendée, pour accroître la
transparence des procédures d’appel d'offres et de les rendre plus attrayants pour le secteur
privé.
Le cadre fourni par la LPDSE a été reformulé en 2003 et une nouvelle fois en 2008, avec
un accent beaucoup plus fort sur la promotion des énergies renouvelables. Le PASER
(Plan d'action sénégalais d’électrification rurale), l’ambitieux programme de vingt ans (2002-
2022) pour l’électrification des régions rurales, vise à augmenter le taux d’électrication rurale
d'environ 8% en 2000 à 62% en 2022, a fait de l’électrification rurale et l’application du pouvoir
décentralisé une priorité nationale65.
Le PASER est structuré autour de trois programmes complémentaires:65
Le Programme Prioritaire de l’Électrification Rurale” (PPER), qui coordonne les
concessions régionales pour les services d’électricité;
Les électrifications rurales d’initiative locale (ERIL), qui visent à procurer un accès à
l’energie à des communautés ne bénéficiant pas du PPER, à travers des « mini-
concessions » (voir Encart 5 pour une étude de cas sur l’exemple d’ERIL ENERSA);
Le Programme énergétique multisectoriel (PREM), qui vise à élargir les bénéfices
sociaux et économiques de l’électrification.
Pour la mise en œuvre du PPER, le Sénégal a été divisé en 10 zones de concession (voir
Illustration 5) destinées à être octroyées aux entreprises privées comme opérateurs des
régions devant être électrifiées à travers un processus d’appel d’offre compétitif.
Pour chaque concession, un plan d'électrification local est développé, définissant les objectifs
de l’opérateur en termes de technologie à appliquer (y compris les applications d'énergies
renouvelables décentralisées telles que les mini-réseaux ou SHS alimentés au photovoltaïque),
le type d'investissement, les mesures à mettre en place pour faciliter une utilisation productive,
ainsi que la connexion de l’infrastructure publique et sociale. L'investissement initial est couvert
à hauteur d’un maximum de 80% par des donateurs internationaux, le restant, pour un
minimum de 20%, devant être apporté par l’opérateur privé.
65 Mawhood, Gross: Institutional barriers to a `perfect` policy: A case study of the Senegalese Rural Electrification Action Plan, October 2014
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
36
Illustration 5: Carte des concessions d’électrification rurale au Sénégal66
En mars 2016, 6 des 10 concessions ont été allouées :
(1) St. Louis/Dagana: COMASEL67
(2) Podor/Louga/Linguère: COMASEL
66 from http://www.aser.sn/templates/template-aser2011/mediator/frame.htm 67 Compagnie Marocco-Sénégalaise d’Electricité/ Louga SAU (Comasel Louga S.A.), a wholly-owned subsidiary of Office National de l’Electricité (ONE), Morocco’s electricity utility
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
37
(3) Kaffrine/Tambacounda/Kédougou: ERA68
(4) Mbour: STL
(5) Kolda/Vélingara: ENCO69
(6) Kaolack/Nioro/Fatick/Gossas: ENCO
Plusieurs années après la signature des contrats de concession avec le MEDER, seuls deux
des opérateurs, à savoir COMASEL et ERA, ont fait des progrès significatifs en matière de
connexion des utilisateurs ruraux au réseau national ou dans la fourniture de solutions
décentralisées. Des processus administratifs longs, et un modèle tarifaire défavorable qui rend
une opération rentable difficile, sont les deux principales causes de ce problème. Il apparaît
clairement, sur base des consultations menées dans le cadre de ce rapport avec les parties
prenantes respectives des secteurs public et privé, ainsi que les partenaires au
développement, que le modèle des concessions est actuellement remis en cause et en passe
d’être remanié en profondeur.
Encart 5: Etude de cas: ENERSA S.A.
L’opérateur ENERSA est une mini-concession tombant dans la catégorie des ERIL. Il s’agit
d’une joint-venture de la société allemande INENSUS GmbH et de la société sénégalaise
MATFORCE CSI. Elle a mis en oeuvre un projet pilote dans le village Sine Moussa Abdou dans
la région de Thiès (zone de concession 9) en 2010. Le projet applique un modèle commercial
et est basé sur une structure de financement PPP (60% de financement privé). Il a fallu 4 ans
au gouvernement pour délivrer ce premier ERIL. A la mi-2016, Sine Moussa Abdou reste la
seule concession ERIL active.
La société a mobilisé dans un premier temps 4 millions d'euros (dont 60% fournis par des
investisseurs privé) pour électrifier 30 villages, avec 5 systèmes mis en place à ce jour.
Cependant, aucune autre concession ou permis ERIL n’a été délivré à ce jour (2016), ce qui a
conduit à un retrait des investisseurs en 2015. Par conséquent, ENERSA a été contrainte de
mettre fin à ses activités de développement de projets de ERIL au Sénégal.
L’approche des ERIL, à savoir les « mini-concessions » pour l'électrification de villages
individuels, a été développée pour accélérer le processus d’électrification basée sur des
solutions décentralisées, et pour tenter de compenser le blocage du PPER.
Dans le cadre du programme des ERIL, les opérateurs sont accompagnés par l’ASER pour
postuler pour un contrat renouvelable portant sur une licence de 15 ans pour les ventes
d'électricité, et d'une concession de 25 ans pour la distribution de l’électricité, délivrée par le
MEDER. En principe, un tarif maximum est fixé pour chaque projet individuellement par la
68 Energie Rurale Africaine ERA SA, Senegalese jointventure of the France’s electricity utility EDF and the Senegalese company MATFORCE CSI (http://www.erasenegal.com/) 69ENCO is a multinational firm headquartered in Dakar, Senegal (http://www.enco-services.com/)
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
38
CRSE, de telle manière à ce que l’opérateur puisse dégager un bénéfice raisonnable.
Cependant, en raison de l’absence d'un régime tarifaire clairement défini, une seule concession
ou licence ERIL a été délivrée au Sénégal à la mi-2016. Il s’agit là d’un aspect fort dissuasif
pour les investisseurs privés.
De nombreux opérateurs sont actifs au Sénégal, avec environ 150 systèmes actuellement en
service, et un portefeuille de plusieurs centaines de mini-réseaux en projet. Cependant, ces
projets ont en général été quasi intégralement subventionnés (au minimum à hauteur de 90%)
et par conséquent, ne dépendent pas de de sources d’investissement privés. Le fait que ces
systèmes fonctionnent en pratique sans que le contrat de licence ou de concession n’ait été
signé, semble être toléré dans la pratique par les autorités respectives pour le moment.
À la fin de 2010, une nouvelle loi sur la grille connectée technologies des énergies
renouvelables est entrée en vigueur, la loi 2010-21 (Loi sur les énérgies renouvelables). Le
texte de loi couvre les lignes directrices, et les détails de la mise en œuvre sont contenus dans
une série de règlements. Les règlements les plus importants datent de décembre 2011, portant
sur les conditions de rachat de l’énergie produite par les centrales d'énergies renouvelables,
les conditions de connexion de ces centrales, ainsi que les conditions pour le rachat du surplus
provenant des centrales électriques captives renouvelables (autoproduction). D’après les
entretiens menés avec les différentes parties prenantes (voir annexes), il semblerait que
l’application pratique de ces règlements soit encore loin d’être adoptée par tous les acteurs du
marché. A la mi-2016, les principaux accords de PPA (accord de rachat d’énergie) avec la
SENELEC concernaient encore principalement un petit nombre d’installations photovoltaïques
et d’énergie éolienne de taille moyenne ou grande. Toutefois, la loi constitue une bonne base
pour le développement d’un futur marché de consommation pour les systèmes photovoltaïques
à petite échelle connectés au réseau, ouvrant ainsi de nouvelles opportunités pour les
entreprises y compris des entreprises inclusives, dès lors que des mesures concrètes soient
prises dans ce sens par les pouvoirs publics.
3.4 Perspectives
Le gouvernement du Sénégal a adopté une nouvelle LPDSE en 2012 avec les objectifs
suivants:
a) Assurer la sécurité énergétique et accroître l’accès à l'énergie pour tous;
b) Développer un mix énergétique combinant la génération thermique, la bio-énergie,
le charbon, le gaz et les énergies renouvelables et saisir les opportunitiés
d’interconnexions régionales;
c) Poursuivre et accélerer la libéralisation du secteur de l’énergie en encourageant la
production indépendante et la réforme institutionnelle du secteur;
d) Améliorer de la compétitivité du secteur, afin de réduire le coût de l'énergie et réduire
les subventions du secteur; et
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
39
e) Renforcer la réglementation du secteur.
Le plan couvre la période de 2013 à 2017, et fixe l’objectif de réduire le coût de production
d’électricité à une moyenne de 60 à 80 francs CFA / kWh (ce qui ramènerait le prix au plus bas
de la sous-région), d’augmenter la capacité installée, avec plus de 673 MW, et d’augmenter la
part des énergies renouvelables à 10%.
Le nouveau mix énergétique comprend une nouvelle usine à charbon de 125 MW, plusieurs
centrales électriques à gaz, et de nouvelles capacités de production d’énergie renouvelable
sous la forme d'une centrale hydroélectrique et de plusieurs centrales solaires et éoliennes.
En outre, environ 400 mini réseaux décentralisés (principalement à énergie solaire ou énergie
hybride solaire-diesel) doivent être installés par le biais de marchés publics. Combinés, ces
efforts d’électrification rurale sont censés ramener le taux d’électrification rurale à 60% de la
population. Ces projets sont en revanche tous financés par des bailleurs de fonds, ce qui
constitute un obstacle majeur pour tout investissement du secteur privé. Dans ces conditions,
le fonctionnement des systèmes sera également très difficile, car l’expérience démontre que
les modèles d’opérateurs recontrant le plus de succès sont ceux où les investissements privés
sont impliqués.
Le gouvernement a chargé la CRSE de développer un nouveau modèle tarifaire à l'échelle
nationale sur la base d’un tarif « harmonisé » pour l’utilisateur final, permettant à tous les
consommateurs finaux de bénéficier du même tarif, indépendamment du lieu et du type de
système auquel il est connecté. A la mi-2016, la mise au point d’un système de compensation
des opérateurs était à l’étude, visant à prendre en charge la différence entre le nouveau tarif
harmonisé et le prix requis pour assurer la rentabilité financière d’une entreprise de fourniture
d’électricité en milieu rural.
Au vu des développements récents en matière de politique dans le secteur de l’électrification
rurale, la marge de manœuvre est limitée pour le développement d’entreprises inclusives à
travers des investissements venant du secteur privé dans des installations décentralisées.
Toutefois, des acteurs du secteur privé sont indispensables pour assurer le fonctionnement
opérationnel des systèmes. Un écosystème plus favorable pourrait, en revanche, augmenter
les chances de succès des modèles d’opérateurs privés si l’utilisation productive de l’énergie
électrique dans les communautés était stimulée par des mesures ciblées (voir chapitre 5 pour
un aperçu des interventions proposées).
La situation dans d'autres secteurs, tels que la vente et le service après vente de
systèmes pico solaires ou Solar Home Systems (SHS) semble en revanche bien plus
prometteuse pour les entreprises inclusives. Ce sous-secteur n’est pas confronté à
l’obstacle de la surréglementation et la distorsion du marché créée par les subventions et les
bailleurs de fonds. Les principales préoccupations pour les acteurs de ce marché sont, d’une
part, la fiscalité élevée, qui a un impact négatif sur les prix de vente et qui crée également des
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
40
distortions de prix importantes avec les niveaux pratiqués dans les pays voisins où la fiscalité
est nettement plus faible ; et, d'autre part, l’absence de normes de qualité, qui crée des
conditions de concurrence déloyale par des produits de qualité inférieure souvent écoulés dans
le secteur du commerce informel. Cette absence de normes génère aussi des problèmes de
confiance de la part des consommateurs.
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
41
4. Cartographie d’un écosystème favorable aux
entreprises inclusives : Analyse des faiblesses
L’écosystème actuel au Sénégal présente certaines faiblesses dans chacune des quatre
dimensions du « diamant d’écosytème d’entreprises inclusives » (voir chapitre introductif), à
savoir l’information, les mesures d’incitation, l’investissement et l’appui à la mise en œuvre.
4.1 Information
Le public sénégalais est généralement conscient des bénéfices sociaux et
environnementaux des solutions solaires, mais de nombreux consommateurs
continuent à percevoir le solaire comme un substitut de moindre qualité à une
connection au réseau
Si de nombreux consommateurs sénégalais sont conscients des avantages de l'énergie
solaire, la plupart des acteurs du solaire, aussi bien dans le secteur public, le secteur privé et
parmi les partenaires du développement, s’accordent pour dire que des efforts supplémentaires
pourraient être faits en matière de promotion des avantages économiques, sociaux et
environnementaux de l'énergie solaire. De nombreux utilisateurs potentiels ont tendance à voir
les applications de l’énergie solaire comme étant limitées aux systèmes d’éclairage et de SHS,
et sont plus rarement conscients de la diversité des utilisations possibles de l’énergie solaire
en matière de petits appareils ménagers, par exemple, ou du potentiel d’équipements solaires
dans la stimulation d’activités économiques génératrices de revenus dans les domaines de
l’agriculture, du commerce ou de l'industrie légère.
«A l’heure actuelle, je dirais que les acteurs du secteur privé, dont nous sommes, ont parfois
du mal à faire prendre conscience aux gens des avantages des dispositifs solaires », explique
Boubacar Sow, directeur de Solène-ESE, un distributeur de systèmes solaires. « Dans l’esprit
de nombreuses personnes, le nec plus ultra est d’être raccordé au réseau classique, parce que
c’est ce dont les gens disposent dans les villes. L’idée que l’électricité solaire puisse être une
alternative complète au raccordement au réseau, même dans les villes, doit encore vraiment
prendre racine. L’état d’esprit et les attentes doivent changer », poursuit-il. Moussa Seck,
directeur des programmes et projets de l’ANER, fait écho à cette analyse: « D’une manière
générale, beaucoup de gens ne sont pas encore pleinement informés des avantages de
l’énergie solaire et ne se rendent pas nécessairement compte que l’énergie solaire va bien au-
delà des lampes solaires. Nous devons poursuivre les efforts engagés pour promouvoir
l’énergie solaire et les autres forme d’énergies renouvelables auprès du sénégalais ».
Les utilisateurs potentiels disposent de peu de moyens de vérifier la qualité des
appareils solaires sur le marché
L’absence d’un système de contrôle de qualité normalisé des dispositifs solaires au Sénégal
signifie que les utilisateurs potentiels ont un accès limité à l’information sur la qualité. La quasi-
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
42
totalité des acteurs consultés du secteur privé pour cette analyse estiment que la concurrence
des appareils solaires non conformes et de piètre qualité, souvent disponibles sur les marchés
informels, créait des problèmes importants, non seulement en termes de pertes d’opportunité,
mais parce que la disponibilité de dispositifs de faible qualité a des répercussions sur l’image
et la crédibilité des appareils solaires et de tout le secteur de l’énergie solaire: «Parfois, la
présence sur le marché de dispositifs de qualité inférieure à bas prix sont à l'origine de
problèmes importants et des pertes de ventes », explique Mme. Diaty Coulibaly, directrice de
Station Energie, une entreprise d’installations solaires de Dakar. «Les gens ne comprennent
pas toujours le lien entre les bas prix et la faible qualité, et quand leurs appareils bon marché
cessent de fonctionner, ils ont tendance à perdre confiance dans le concept même de l’énergie
solaire plutôt que de d’accepter qu’ils ont acheté des appareils de faible qualité », poursuit-elle.
« Mais les commerçants informels fonctionnent par définition sous le radar, et il n’y a donc
aucun moyen pour le consommateur lambda de vérifier la qualité des produits achetés ».
Les opérateurs du secteur manquent de visibilité sur les cycles de revenu des
ménages, ainsi que sur leur capacité et leur volonté de payer pour des solutions
solaires, particulièrement en mileu rural
D’un point de vue général, des informations mises à jour et détaillées sur les cycles de revenus,
et en particulier sur les cycles de revenus des ménages en milieu rural, ne sont pas toujours
disponibles ; pas que l’information sur la capacité et la volonté des ménages de payer pour des
solutions d’énergie solaires. Les données existantes sont partielles et ne permettent pas
d’évaluer avec précision la taille du marché de l’énergie solaire. L’expérience sur le terrain de
certains des concessionnaires et des opérateurs d’ERIL 70 permet de penser que non
seulement la volonté, mais aussi la capacité de payer est présente au sein des ménages, mais
à la condition expresse qu'ils y voient clairement une valeur ajoutée par rapport aux solutions
existantes (qui comprennent actuellement les lampes à paraffine, les bougies, le bois, ou les
appareils alimentés par batterie).
Cependant, la situation est compliquée par le fait que dans de nombreux cas, des villages
relativement proches les uns des autres vivent des conditions d’accès à l'énergie totatement
différentes, selon qu'ils soient connectés ou non au réseau SENELEC. Le tarif de base de la
SENELEC est de 118 francs CFA / KWh (0,20 dollars), à mettre en rapport avec les tarifs
typiques de concessoinaires se situant dans une fourchette de 300-600 francs CFA / KWh
(0.50 - 1.00 dollars). Lorsque les villageois savent que les communautés voisines ont accès au
réseau électrique à un prix bien plus bas, ils peuvent se montrer, sans surprise, plutôt réticents
à payer des prix bien plus élevés pour avoir accès à l’énergie, fût-elle solaire. Les acteurs du
secteur sont conscients de cette distortion dans le marché, et des mesures sont à l’étude pour
70 Interview with ENERSA, Dakar, March 2nd, 2016.
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
43
harmoniser les conditions d’accès. En attendant, la situation a sans aucun doute créé une
certaine confusion dans l’esprit des consommateurs ordinaires en milieu rural.
4.2 Incitants
L’environnement régulatoire du Sénégal portant sur l’énergie solaire reste encore très
générique et parfois peu adapté aux besoins du sous-secteur. Le secteur public est conscient
des limites des régulations actuelles, et des changements importants sont en cours, dont les
contours et le calendrier restent cependant encore flous à la mi-2016. Plusieurs grands
chantiers sont à l’étude dans le secteur énergétique dans son ensemble, notamment
l’harmonisation des tarifs d'électricité. Cette harmonisation aura un impact direct sur les acteurs
du secteur privé, mais aussi sur l’écosystème dans son ensemble.
Les lampes solaires et certaines composantes d’appareils solaires ne bénéficient
pas d’exemptions fiscales, et des incohérences de tarifs douaniers causent des
distortions sur le marché
Les lampes solaires et dispositifs solaires sont actuellement soumis à une fiscalité élevée (qui
existe également pour d’autres produits de consommation): La taxe sur la valeur ajoutée (TVA)
est de 18%, et les produits importés (autrement dit la grande majorité des produits solaires)
sont soumis à une taxe à l’importation supplémentaire de 25%71. Cette fiscalité, qui peut se
justifier du point de vue des impératifs budgétaires du secteur public, a cependant pour effet
de rendre plus difficile l’accès aux produits solaires aux ménages, en particulier aux ménages
à bas revenu : Même lorsque la population est consciente des économies à long terme et des
autres avantages de l’énergie solaire, elle n’est pas en mesure de s’offrir des appareils solaires.
Du point de vue des dépenses du ménage, il peut parfois être bien plus rationnel, du moins à
court terme, d’encourir les frais récurrents d’alternatives énergétiques à très faible coût tels que
les bougies, le bois, la paraffine ou les piles.
Pour rajouter à cette difficulté, certains Etats voisins, notamment le Mali et le Burkina Faso, ont
décidé de ne pas appliquer le tarif extérieur commun de la CEDEAO sur les dispositifs et
composantes solaires, créant ainsi une distorsion sur le marché qui est préjudiciable aux
commerçants et aux consommateurs sénégalais. Il revient en effet moins cher au
consommateur final aujourd’hui de se procurer une lampe solaire à Bamako qu’à Dakar, alors
que ces produits sont souvent dédouanés à Dakar et doivent encore être acheminés par
chemin de fer ou par voie routière pour être vendus au Mali ou au Burkina.
71 “Mapping the Supply Chain Catering to the Base of the Pyramid in Senegal” – Final Report, July 2012. Dalberg, Dakar, p2.
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
44
Les entreprises formelles fournissant des produits de qualité font face à la
concurrence des commerçants informels, créant une situation de concurrence
déloyale de fait sur le marché sénégalais
Les acteurs du secteur privé informel rencontrent beaucoup de difficultés pour faire face à la
concurrence des produits de mauvaise qualité non régulés souvent vendus à travers les circuits
de l’économie informelle. Qui plus est, le secteur informel échappe par définition à la fiscalité,
lui donnant ainsi un avantage supplémentaire sur les distributeurs du secteur formel.
Le cadre actuel de l’électrification rurale à travers des mini-réseaux n’a pas répondu
aux attentes
A ce jour, un seul projet d’électrification rurale d’initiative locale (ERIL) a été officiellement mis
en place en dehors du PERACOD (voir page 14) : L’harmonisation des tarifs, qui est à l’étude
à la mi 2016, n’est pas encore en place et pourrait, selon le niveau auquel cette harmonisation
est fixée, rendre difficile l’accès aux sources de financement pour les acteurs privés s’étant
déjà engagés dans le processus.
Il n’existe pas encore de grille tarifaire pour l’autoproduction
Une grande incertitude règne encore sur les éventuelles grilles tarifaires pour l’autoproduction.
A la mi-2016, le ministère de l’énergie et du développement des énergies renouvelables, ainsi
que la SENELEC, n’avaient pas encore développé de position officielle sur les tarifs pour
l’autoproduction. L’impact potentiel de l’autoproduction reste encore à déterminer.
Les subventions à la SENELEC créent des distortions sur le marché et grèvent le
budget de l’Etat
Les pouvoirs publics ont continué, ces dernières années, à subventionner le prix de l’électricité,
même si cette subvention sera à terme éliminée. Selon le Plan Sénégal Emergent (PSE), cette
subvention s’élevait à 105 milliards de francs CFA en 2012 (180 millions de dollars). Le PSE
souligne en outre l’inefficacité de ces subventions : le prix de l'électricité au Sénégal demeurait
il y a encore quelques années (2009) parmi les plus élevés au monde : le prix du KWh au
Sénégal, à 115 CFA, était deux fois plus élevé qu’en Côte d'Ivoire (63 CFA) et 6 fois plus élevé
qu'en Afrique du Sud (20 francs CFA), selon les données de la Banque mondiale et du FMI
cités dans le document (voir Illustration 6) 72 . A ce niveau de coût, la compétitivité des
entreprises est inévitablement impactée. Il convient cependant de noter que le gouvernement
a signalé, par l’entremise d’une déclaration en avril 2015 du ministère de l’énergie et du
développement des énergies renouvelables, son intention d’éliminer progressivement la
subvention à la SENELEC73. De fait, l’enveloppe a diminué de moitié entre 2014 et 2015,
passant de 123 milliards de francs CFA à 61 milliards de francs CFA74.
72 Plan Senegal Emergent, page 32 73 http://fr.allafrica.com/stories/201504110106.html 74 http://www.dakaractu.com/SENELEC-la-subvention-de-l-Etat-passe-de-123-a-61-milliards-de-francs_a83224.html
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
45
Illustration 6: Prix moyen et perception de qualité de l’électricité au Sénégal comparé à
d’autres pays émergents (2009/2010)
Le système des concessions n’a pas donné les résultats escomptés
La stratégie du Sénégal pour accélérer l'électrification des zones rurales à travers le système
des concessions n'a pas donné les résultats escomptés. Seules 6 des 10 concessions
originales ont été allouées, et l’exploitation des concessions existantes s’avère difficile.
L’écart de prix entre les tarifs que les concessionaires sont tenus d’appliquer pour être
commercialement viables et les structures tarifaires subventionnées de la SENELEC est un
facteur déterminant dans les difficultés rencontrées par les concessionnaires. Les pouvoirs
publics reconnaissent volontiers ce problème, et le consensus qui se dégage au sein des
acteurs du secteur est que le modèle de concessionnaire n'a pas donné les résultats
escomptés.
4.3 Investissement
Même si en théorie, des ressources financières conséquentes sont disponibles au Sénégal,
l’offre de moyens ne correspond pas aux besoins de financements des acteurs. Une série
d’obstacles empêche les fournisseurs et distributeurs de produits solaires d’obtenir le bon type
de financement, tandis qu’en aval de la chaîne de valeur, les consommateurs et les utilisateurs
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
46
finaux estiment en général qu'il est difficile d'accéder à des outils financiers innovants pour se
procurer des équipements solaires et pour assurer leur bon entretien.
Les opérateurs n’ont pas accès à des options de financement adaptées ou
innovantes (fonds de roulement, financement commercial, private equity ou capital
risque)
Les opérateurs du secteur privé sur le marché de l’énergie rencontrent des difficultés sérieuses
pour accéder à des sources de financement commercial ordinaire, tels que des lignes de crédit
destinés à procurer des fonds de roulement ou des crédits commerciaux. « Les banques
comprennent souvent mal le marché de l’énergie solaire, et il y a une réelle réticence de leur
part à accorder des crédits ou des financements à des opérateurs du secteur privé comme
nous », explique encore Diaty Coulibaly. En outre, avec des taux d’intérêt annuels de l’ordre
de 14 à 15%, le crédit est onéreux au Sénégal, poussant même certains acteurs économiques
sénégalais à dénoncer les banques commerciales comme des « agents de prédation»75. Il
existe, en tout état de cause, un écart très important, de l’ordre d’une centaine de points de
base, entre le taux interbancaire à trois mois de la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de
l’Ouest76, qui était de 5% à la mi 2016, et les taux commerciaux pratiqués par les grandes
institutions financières.
Les investisseurs extérieurs manquent eux aussi à l’appel : La plupart des entreprises actives
dans le secteur de l’énergie solaire sont capitalisées par les fondateurs eux-mêmes ; et l’accès
au capital-risque est, dans les faits, inexistant.
• Les utilisateurs potentiels n’ont pas accès à des produits de crédit adaptés (prêts
abordables ou crédits subventionnés).
Si le crédit commercial pour les PME est cher, le crédit à la consommation est presque prohibitif
au Sénégal. Les banques commerciales ne proposent pas de crédits adaptés aux groupes à
faible revenu, ce marché étant en grande partie le domaine réservé des opérateurs de
microfinance. Ces dernières pratiquent généralement des taux d’intérêt de l’ordre de 25% ou
davantage. Cela revient à exclure une proportion importante de la population qui pourrait
grandement bénéficier d’un meilleur accès à l’énergie solaire mais qui n’est pas, aujourd’hui,
en mesure de se procurer des équipements solaires à un coût abordable.
Reste que les formes de crédit informel, telles que les groupements d’épargne collectives,
souvent gérés par des femmes, et le microcrédit, sont largement utilisés au Sénégal rural.
75 See for example: “Senegal’s commercial banks are predatory agents”, Mourides Infos, September 8, 2015. http://www.mourides.info/senegal-les-banques-commerciales-sont-des-agents-de-predation/ 76 Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) http://www.bceao.int/IMG/pdf/05-situation_des_prets_interbancaires_par_maturites-118.pdf
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
47
Les banques manquent de capacités techniques et d’outils d’évaluation de risque
pour mesurer les risques des projets d’énergie solaire.
Le manque de capacité technique et d’outils d’évaluation de risque adaptés explique une bonne
part de la réticence des institutions financières à accorder des crédits à des fournisseurs ou
des utilisateurs d’équipements solaires. Une exception notable, en ce sens, est la Banque de
l'habitat du Sénégal (BHS) 77, qui se spécialise dans le financement du logement et notamment
le logement à faible coût. La clientèle de la BHS est essentiellement composée de
fonctionnaires, qui ont généralement des revenus stables et prévisibles sur la durée. La banque
cherche cependant à élargir sa base de clients au-delà de cette catégorie et pourrait devenir
un partenaire clé dans l’apport de solutions financières à l’accès aux solutions d'énergie solaire
pour les ménages à faible revenu.
Il n’existe pas de « fonds verts » ou de fonds d’impact focalisés sur les énergies
renouvelables en mesure de fournir des financements ciblés au secteur
Les instruments de financement novateurs et les nouvelles classes d’actifs tels que les fonds
verts ou fond d'impact sont, pour l’instant, très peu présents au Sénégal. Selon M. Patrice
Gomis, gestionnaire d’actifs chez Investissements & Partenaires, l’un des plus grands
gestionnaires de fonds indépendants du Sénégal, cette situation est en grande partie liée à la
taille encore trop limitée du marché: « À l'heure actuelle, il n'y a pas encore assez de masse
critique en termes de sensibilisation, et les « tickets », c’est-à-dire la taille des investissements
indivuels envisageables, sont encore trop petits pour nous permettre d'investir dans l’énergie
solaire. Cela peut changer, bien sûr, mais il est difficile pour le moment d’avoir une visibilité
claire du retour sur investissement potentiel de l'énergie solaire», explique t-il78.
4.4 Appui à la mise en œuvre
Plusieurs obstacles sont présents en matière d’appui à la mise en œuvre du secteur de
l'énergie solaire. L’expertise technique et le savoir-faire pourraient être développés davantage,
tandis que des systèmes transactionnels et des modèles de distribution plus performants
pourraient aussi permettre au secteur de prospérer.
• Une capacité de recherche et développement existe, mais le soutien institutionnel et
politique est nécessaire pour l’améliorer
Même si le Sénégal possède déjà une capacité locale de recherche et développement dans le
domaine des énergies renouvelables, l’infrastructure existante a besoin d’un soutien plus
poussé. L’institution clé pour la recherche sur les énergies renouvelables est le CERER (Centre
d'études et de recherche sur les énergies renouvelables), rattaché à l'Université Cheikh Anta
77 https://www.bhs.sn/qui-sommes-nous 78 Patrice Gomis, Investment Manager for I & P Partners, entretien le 3 mars 2016 in Dakar.
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
48
Diop de Dakar, le plus grand établissement d’enseignement supérieur du Sénégal. Le CERER
mène la recherche et l’expérimentation, et contrôle également la qualité des installations
d’énergie solaire. Il s’agit du seul centre de ce genre en Afrique de l’Ouest, et il couvre
également les pays tels que le Mali et le Burkina Faso. Le CERER effectue également le
contrôle qualité des systèmes solaires pico pour le compte de Lighting Africa (le programme
phare du Groupe de la Banque mondiale pour équiper les ménages à travers le continent avec
des dispositifs d’éclairage solaire).
Le CERER pourrait jouer un rôle clé en termes de contrôle qualité et pour développer un
système de certification. Son directeur, le professeur Issakha Youm, estime que le CERER
pourrait prendre en charge cette responsabilité si le soutien institutionnel et politique était
accordé par les pouvoirs publics : «Nous devons aligner la vision du secteur public et des
autres acteurs du secteur solaire en matière de recherche et de développement. Nous avons
déjà mis au point un programme d'études, et un laboratoire d’essais sur le campus. Mais nous
avons besoin d’améliorer la formation et les capacités techniques, et de développer un système
de certification reconnu ».
• Les PME et les micro-entreprises manquent de savoir-faire technique
Beaucoup de PME et de micro-entreprises dans le secteur de l’énergie solaire manquent
d’expertise technique, ce qui se traduit par des difficultés pratiques saisir les opportunités du
marché. « A ce stade, nous ne serions pas en mesure de répondre adéquatement aux plus
grands appels d’offre au Sénégal, parce qu’en tant que PME, nous n’en avons pas la capacité
technique », explique Diaty Coulibaly de Station Energie.
Les services spécialisés d’appui aux PME et aux start-ups sont limitées
Il existe peu d’organisations offrant des services de développment et de formation aux
entreprises du Sénégal, à l’exception de quelques incubateurs. L’un de ces incubateurs est
Innodev79, rattaché à l’école polytechnique de l’université Cheikh Anta Diop de Dakar, qui
fournit un soutien aux jeunes entrepreneurs, notamment en matière de formulation de plans
d’affaires, de conseils juridiques et d’enregistrement de brevets, et travaille principalement
dans le secteur agricole. Un autre incubateur panafricain, le réseau Jokkolab80, offre des
espaces de « coworking » (espace de travail partagé) pour les start-ups à Dakar,
principalement dans le secteur des technologies de l’information; tandis que le Centre
d’incubation d'entreprise de femmes et de jeunes81 (CIEFJ) propose des modules de formation
de base dans des domaines tels que la gestion des affaires, la comptabilité et les techniques
de vente.
79 http://www.innodev.sn/ 80 http://jokkolabs.net/ 81 http://www.incubateursenegal.org/?p=0
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
49
Ces incubateurs, cependant, visent essentiellement une population de jeunes urbanisés,
principalement celle de Dakar, loin du monde des PME rurales et des commerçants informels
qui ont besoin de services spécifiques pour développer leurs compétences de base.
Les systèmes de paiements innovants et fonctionnels ne sont pas assez répandus
Des systèmes de paiement innovants, notamment les systèmes de facturation prépayés pour
les achats d’éléctricité, existent depuis de nombreuses années au Sénégal, mais ne sont pas
assez répandus. SENELEC a introduit Woyofal, un système de prépaiement d’électricité, en
2005, mais le service n’a pas été plébiscité par la clientèle: En 2008, à peine 23.000 clients de
SENELEC avaient adopté le système82, et en 2015 la clientèle ne semblait guère dépasser
25.000 personnes à Dakar. La majorité des clients de la SENELEC continue donc à recevoir
des factures papier à des adresses fixes, un système lent et coûteux à administrer, notamment
au niveau du traitement et du suivi des paiements. Chaque mois, de longues files d’attente se
forment dans les bureaux de la SENELEC à travers le pays pour régler des questions de
facturation. Les concessionnaires et les ERIL, comme le mini-réseau de Sine Moussa Abdou
dans la région de Thiès, utilisent pour leur part une technologie plus récente, notamment des
cartes à puce prépayées, sur laquelle une quantité donnée de kilowatts est «chargée», et qui
permettent ensuite de se raccorder au mini-réseau83. Les particuliers ont tendance à payer en
espèces, surtout dans les régions rurales, mais les téléphones mobiles sont de plus en plus
souvent utilisés pour les transactions monétaires simples (paiements et transfert d’argent). Le
marché de la téléphonie mobile est dominé par deux opérateurs, Orange Telecom et Tigo, qui
proposent tous deux des systèmes de paiement et de transfert d’argent depuis 2014.
Ces services transactionnels pourraient être exploités au cours des prochaines années pour
rendre les systèmes de paiement plus efficaces et moins coûteux à exploiter, aussi bien pour
les clients que les fournisseurs. De fait, Tigo a déjà conclu un partenariat avec la SENELEC
pour l'électricité prépayée, aidant ainsi à générer des revenus pour les petits détaillants à
travers le Sénégal84.
Les systèmes de distribution du dernier kilomètre sont coûteux et peu efficaces
Le défi est de distribuer des produits ou services d'une manière rentable pour les populations
à faibles revenus est l'un des obstacles pérennes aux approches commerciales inclusives. Une
grande proportion des personnes à faibles revenus vivent dans des communautés rurales, loin
des routes principales, et difficiles à atteindre. Ceci augmente le coût de la livraison du dernier
kilomètre et constitue un moyen de dissuasion pour les acteurs du secteur privé. Des
approches novatrices et inclusives peuvent être développés à cet égard, par exemple grâce à
des modèles hub-and-spoke (autour de centrales de distribution) et en mettant à profit les
réseaux de commerçants informels existants.
82 http://www.senelec.sn/sitesnlc072012/images/communiques/lumiere13nv.pdf 83 Field visit to Sine Moussa Abdou, March 7th, 2016 84 http://www.lejecos.com/Electricite-Prepayee-Tigo-et-Senelec-nouent-un-partenariat_a6024.html
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
50
5. Rôle des acteurs et interventions possibles : Qui peut
faire quoi pour mettre en place un écosystème favorable ?
Une série d’interventions ciblées pourraient aider à créer un écosystème favorable au
développement des entreprises inclusives du secteur de l’énergie solaire au Sénégal. Les
interventions proposées dans ce chapitre sont catégorisées autour des quatre domaines clés
du « diamant d’écosystème d’entreprises inclusives », à savoir l’information, les mesures
d’incitation, l’investissement et l’appui à la mise en œuvre (voir p7). Il est bien entendu que ces
domaines d’intervention sont étroitement liés les uns aux autres, et que la plupart des
mesures proposées dans un domaine donné auront un impact sur les autres domaines.
Du point de vue opérationnel, il est donc important de considérer les interventions individuelles
dans leur contexte plus général et de prendre en compte la manière dont les interventions
possibles se chevauchent.
5.1 Interventions proposées en matière d’information
Comme souligné dans le chapitre précédent, de nombreux acteurs évoquent le manque
d’information sur les équipements solaires comme étant l’un des freins au développement du
marché de la technologie solaire au Sénégal, malgré l’excellent potentiel du solaire dans tout
le pays. D’une manière générale, les acteurs du secteur public sont les mieux placés pour jouer
un rôle moteur dans ce domaine, notamment à travers des campagnes d’information et de
sensibilisation portant sur les bénéfices du solaire et la qualité des équipements. Ces mesures
pourraient avoir avoir un impact très positif sur la réputation de l'équipement solaire et la
perception des utilisateurs et des clients potentiels.
Intervention 1: Campagnes de sensibilisation à l’attention des particuliers
Les campagnes d’information et de sensibilisation, conçus et mis en oeuvre par des acteurs
du secteur public, comme l’ANER, doivent être effectués avec les objectifs suivants:
• Campagnes de sensibilisation générale pour promouvoir le concept de l’énergie solaire et
encourager son utilisation, pour influencer de manière positive la perception du solaire dans le
chef des usagers et des particuliers, et promouvoir l’énergie solaire comme une source
d’énergie moderne, adaptée aux besoins et fiable. Ces campagnes générales pourraient aussi
être adaptées en fonctions des populations urbaines et rurales.
• Campagnes d'information spécifique sur les technologies solaires tels que les chauffe-
eau solaires, les systèmes SHS, les equipements pico solaires et les systèmes solaires
photovoltaïques connectés au réseau, visant à augmenter les connaissances de certains
groupes de clients sur la gamme d’équipements solaires disponibles et leurs avantages
économiques, sociaux et environnementaux respectifs.
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
51
• Des campagnes d'information spécifiques sur le potentiel économique des
technologies solaires pourraient aussi encourager les entreprises à intégrer de nouveaux
produits dans leurs chaînes de valeur, par exemple dans l’industrie légère ou le commerce au
détail, ainsi que les prestataires de services et les micro-entrepreneurs dans les collectivités
isolées.
• Des informations spécifiques sur les incitations fiscales et autres mesures d’incitation
qui pourraient être développées par le gouvernement : si le gouvernement développe
des mesures d’incitation pour encourager l’utilisation de l'énergie solaire, y compris des
éxonérations fiscales et des grilles tarifaires pour l’autoproduction, il conviendra
d’accompagner ces mesures d’une communication très claire (voir section suivante sur les
incitants).
Dans tous les cas de figure, les campagnes devront être développées en concertation avec le
secteur privé, par exemple à travers les organisations collectives telles que le Conseil patronal
des énergies renouvelables du Sénégal (COPERES) ou la Fédération des entreprises
d’éléctricité au Sénégal (FESELEC), pour assurer l’efficacité des campagnes et éviter des
erreurs qui pourraient conduire à l'effet inverse de ceux recherchés, à savoir une
désinformation et une perception négative des équipements l'énergie solaire par les utilisateurs
et clients potentiels.
Intervention 2: Labels de qualité et certification des équipements
Le gouvernement du Sénégal pourrait développer un label de qualité et de certification des
technologies solaires, afin de réduire la prolifération d’appareils de faible qualité ou non
conformes qui sont certes souvent moins coûteux, mais dont la fiabilité souvent douteuse nuit
souvent à la réputation des équipements solaires.
Des modèles de certification introduits avec succès dans d’autres pays pourraient être adaptés
aux spécificités sénégalaises, et contrôlées par des institutions telles que le CERER. Les
capacités de ces institutions en termes de ressources humaines et techniques doivent être
renforcées en conséquence.
Des règles spécifiques pourraient être développées pour étiqueter tout équipement solaire
vendu sur le marché à des particuliers. De cette façon, l’utilisateur final bénéficie de la garantie
qu'un dispositif particulier qui porte un label officiel répond bien aux exigences des normes de
qualité définies et testées par le CERER (ou, le cas échéant, d’autres organisations habilitées).
Une façon de permettre aux utilisateurs de vérifier très efficacement la qualité d'un dispositif
particulier peut être une application smartphone, qui peut permettre des vérifier l’authenticité
d’un appareil sur base d’un code QR (ou code barres standard UPC). Les informations fournies
peuvent, par exemple, contenir le nom et l’origine du fabricant, ainsi que le type et les
principales spécifications de l'appareil.
Il reviendra aux pouvoirs publics de veiller à ce que ce type de procédure soit mis en œuvre de
manière à ce qu'aucune charge supplémentaire ne soit créé pour le secteur privé sous la forme
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
52
de retards ou de coûts. Le développement et la mise en œuvre de cette stratégie devra aussi
être étroitement coordonné avec toutes les parties prenantes des secteurs public et privé, tout
en tenant compte des besoins spécifiques qui pourraient être exprimées par les
consommateurs eux mêmes.
Intervention 3: Faire des études de marché pour mieux comprendre la clientèle
Une meilleure visibilité de la segmentation et des revenus des ménages, de la capacité et de
la volonté à payer pour certains services, permettrait aux entreprises du secteur de mieux
comprendre et analyser les besoins de la clientèle, et donc d’adapter leur stratégie d’affaires
et améliorer leur gamme de produits et de services.
De nombreuses études de marché ont été menées au cours des dernières années par diverses
organisations et cabinets de conseil. Cependant, même si ces études ont permis d’en savoir
plus sur le comportement du marché, une approche beaucoup plus concertée, intégrant les
acteurs de l’ensemble du secteur (pouvoirs publics, acteurs privés, communauté de l’aide au
développement, universités et société civile), permettrait d’avoir une bien meilleure
compréhension du marché de l’énergie et de l'électrification rurale solaire au Sénégal.
Une telle étude globale devrait couvrir tous les aspects du marché afin d’évaluer avec précision
la situation économique des utilisateurs et des clients potentiels. Les enquêtes et
questionnaires devront être adaptés en fonction du contexte urbain ou rural, du type
d'utilisateur ou client (usage domestique/usage productif/ usage industriel/ usage public), de la
catégorie de produits et de services (consommation d'électricité / leasing / achat de produits
ou services).
L’étude devra permettre notamment d’obtenir:
Une visibilité globale des cycles de revenus des usagers, de leur capacité et de leur volonté
à payer pour des produits ou services d’énergie solaire,
Une visibilité sur le potentiel de marché pour les différents produits et services solaires
Une meilleure compréhension des circuits de distribution les plus adaptés aux produits
solaires en zone urbaine et rurale
Permettre de formuler des recommandations sur les méthodes de paiement et les grilles
tarifaires les plus adaptés (pour les modèles se basant sur l’extension du réseau, les mini-
réseaux ou les solutions individuelles).
L'objectif global de l'étude proposée est d’augmenter les chances de succès de modèles
d’entreprise inclusives au bénéfice de toutes les parties concernées : accès à des équipements
et services solaires de haute qualité, création d'emplois, augmentation des revenus et des taux
d’électrification.
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
53
5.2 Interventions proposées au niveau des mesures d’incitation
Compte tenu des obstacles identifiés dans le chapitre précédent en matière de cadre
régulatoire, une série d’interventions ciblées dans ce domaine pourraient permettre au secteur
de l’énergie solaire de jouer un plus grand rôle dans l’accès à l’énergie.
Intervention 1: Revoir le régime fiscal actuel
Le gouvernement du Sénégal pourrait envisager de revoir le régime fiscal actuel applicable aux
équipements solaires, et de développer une réglementation plus transparente et équitable
(pour l'instant, seuls les équipements affectés aux projets du PASER sont entièrement
exemptés de droits de douane et de TVA). Comme cela a des implications politiques au niveau
régional, le gouvernement sera certainement tenu de coordonner étroitement toute mesure
dans ce domaine avec les pays voisins membres de l’UEMOA, dans lesquels d’autres régimes
fiscaux sont en vigueur.
Si l’augmentation de la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique et
l’accélération de l’électrification rurale par le biais de solutions solaires sont des priorités
nationales, les pouvoirs publics se doivent d'envoyer un signal très clair en ce sens, et donner
à l’utilisation de technologies solaires un traitement favorable sur le plan fiscal, avec à tout le
moins une baisse, voire l’élimination complète, des tarifs douaniers. Cela permettra de baisser
le prix des équipements à l’achat, et donc de rendre plus accessible l’énergie solaire et
d’atteindre plus facilement les objectifs souhaités.
Ces mesures devraient elles aussi, naturellement, être étroitement coordonnées avec les
acteurs du secteur privé.
Intervention 2: Développer des mécanismes pour assurer la qualité des
produits et équipements solaires
Le secteur public devrait chercher à développer des conditions de concurrence équitable pour
les entreprises du secteur formel, notamment face à la concurrence déloyale créée par la
présence sur le marché de produits ne correspondant pas aux normes acceptables de qualité
et de fiabilité.
Les mesures prises dans ce sens devront être étroitement liées aux interventions proposées
dans le domaine de l’information, notamment l’intervention 1 : Campagnes de sensibilisation
à l’attention des particuliers, et l’intervention 2 : Labels de qualité et certification des
équipements. Plus les usagers seront informés, plus ils seront en mesure de s’assurer de la
qualité des produits qu’ils achètent, et au mieux les les entreprises du secteur formel pourront-
elles contrer la concurrence déloyale du secteur informel.
Le gouvernement devrait coordonner étroitement cette intervention avec le secteur privé afin
d'identifier conjointement les mesures les plus adaptées, et élaborer et mettre en œuvre la
stratégie adoptée.
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
54
Intervention 3: Revoir le cadre régulatoire pour l’électrification rurale
La stratégie du secteur public pour l’électrification rurale devrait faire l’objet d’une révision en
profondeur. En effet, si l’approche a pu permettre, il y a quelques années, d’augmenter le taux
d’électrification rurale à une fourchette de 25 à 30%, les conditions de participation du secteur
privé, telles que prévues à l’origine, et des entreprises inclusives en particulier, ne sont
aujourd’hui plus favorables. Au contraire, les conditions d’exploitation pour le secteur privé se
sont plutôt empirées.
Si l’approche, à la mi-2016, est de développer un tarif « harmonisé » pour permettre à tous les
consommateurs de bénéficier du même tarif, et de payer des compensations aux opérateurs
privés qui subissent des coûts unitaires d’exploitation bien plus élevés (ce qui est le cas par
exemple pour les mini-réseaux), il sera essentiel de développer un mécanisme de
compensation extrêmement fiable, permettant d’attirer des investisseurs internationaux. Il
faudra veiller à ce que le mécanisme de compensation soit aussi fiable et efficace dans sa
gestion, afin d’éviter que des lourdeurs administratives ou des lenteurs dans les paiements des
compensations ne remettent en cause la viabilité commerciale des opérateurs indépendants.
En outre, des mesures ciblées pour faciliter l’utilisation productive de l’énergie dans les
collectivités éloignées devraient être intégrées dans le mécanisme de compensation
réglementaire et financier, afin d'accroître la rentabilité des modèles d’entreprises (de
préférence d’entreprises inclusives).
Intervention 4: Définir un tarif pour l’autoproduction (feed-in tariffs)
La loi sur les énérgies renouvelables (loi 21 de 2010) fournit un cadre régulatoire de base pour
le développement d’un marché pour les petits systèmes photovoltaïques connectés au réseau,
ouvrant ainsi de nouvelles opportunités pour des modèles d’entreprise inclusive, pour autant
que des mesures adaptées soient prises par le gouvernement. Cela passe notamment par une
grille tarifaire pour l’autoproduction (feed-in tariffs) comparable à celle en vigueur en Allemagne
dans le cadre de sa loi sur l'énergie renouvelable (loi EEG) permettant à des particuliers
d’installer des systèmes photovoltaïques solaires sur leurs toits et de réinjecter l'électricité
produite dans le réseau national. Une compensation équitable pour l'électricité vendue doit
rentabiliser un investissement à long terme et déboucher sur une forte augmentation de la
capacité de l'énergie solaire photovoltaïque, et une baisse des prix pour les produits et services.
5.3 Interventions proposées dans le domaine de l’investissment
Un meilleur accès au financement aux deux extrémités de la chaîne de valeur du solaire
(fournisseurs et revendeurs, ainsi que les utilisateurs finaux) pourrait grandement bénéficier à
l’écosytème de l’énergie solaire au Sénégal. Les interventions ci-dessous pourraient y
contribuer.
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
55
Intervention 1: Etudier, concevoir et développer des outils financiers adaptés
aux besoins des opérateurs
Une étude pourrait être menée auprès des principaux opérateurs d’énergie solaire du secteur
privé en vue d’obtenir une visibilité claire de leurs besoins et attentes en matière
d'investissement et de financement. Les solutions possibles doivent être conçues et
développées en collaboration avec les acteurs du secteur financier du Sénégal et de l’étranger,
ainsi que les partenaires au développement, et pourraient inclure notamment les outils
suivants:
Des garanties financières, qui pourraient, par exemple, être apportées par les partenaires
du développement en échange de prêts à taux bonifié de la part de banques
commerciales ;
Des lignes de crédit vertes, par le biais desquelles des partenaires au développement
tels que l’AFD incitent des institutions financières commerciales à explorer les marchés
des énergies renouvelables (une approche qui a notamment été explorée dans des
marchés tels que l'Afrique du Sud)85 ;
Les challenge funds, ou fonds investis sur base de candidatures à des appels d’offre pour
mener à bien des projets spécifiques et nécéssitant des fonds d’appoint. L’Africa
Enterprise Challenge Fund (AECF) est un exemple de cette catégorie d’instruments
financiers, actif dans le domaine des énergies renouvelables sur le continent, mais pas
encore présent au Sénégal86 ;
D’autres outils financiers innovants, à explorer
L'acteur principal, tout au moins dans la première phase de cette intervention, serait le PNUD,
qui dispose des réseaux et des relations avec les parties prenantes, et de l'expertise nécessaire
pour procéder à l'analyse des besoins.
Intervention 2: Attirer davantage d’investisseurs d’impact au Sénégal
Les investisseurs d'impact ont déjà une présence importante au Sénégal, mais leur présence
dans le secteur de l’énergie solaire pourrait être renforcée, et davantage axée sur les petits
exploitants. Selon une étude du cabinet Dalberg datant de 2015, 23 investisseurs d’impact sont
«actifs» au Sénégal, dont 11 institutions de financement du développement (IFD)87. En termes
de volume, les principaux acteurs sont la Banque africaine de développement (BAD), l’Agence
Française de Développement / Proparco, le fonds ARIZ (fonds de garantie de l’AFD) et la SFI.
Ces institutions cumulent 535 millions de dollars d’investissement d’impact au Sénégal, contre
16 millions de dollars pour les autres catégories d’acteurs. L’énergie et l’électrification rurale
85 http://www.afd.fr/lang/en/home/pays/afrique/geo-afr/afrique-du-sud/projets-afrique-du-sud/energie-et-climat/pid/15793 86 http://www.aecfafrica.org/windows/general-window 87 Dalberg & Global Impact Investing Network (GIIN), “The Landscape for Impact Investing in West Africa – Senegal Chapter”, December 2015, p10
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
56
est un secteur clé de l'investissement pour ces investisseurs d'impact, avec un volume cumulé
de 109 millions de dollars investis sur la période 2005-201588.
Cependant, l’on pourrait attirer davantage d’investissements d’impact pour aider les petits
opérateurs du secteur privé à devenir «investissables», en leur permettant de développer leurs
capacités et leurs processus internes, notamment en matière de gestion, de comptabilité, et
d’assistance technique. Ces opérateurs pourraient également être mieux informés des
opportunités et des avantages potentiels offerts par l’investissement d’impact.
Le PNUD, en collaboration avec l’agence de promotion de l'investissement (APIX), pourrait
jouer un rôle de catalyseur pour cette intervention proposée89. Le PNUD a, en outre, effectué
la première étude continentale du secteur de l’investissement d’impact90, et pourrait mettre à
profit l’expertise et la connaissance du secteur de l’investissement d’impact développées ces
dernières années.
Intervention 3: Créer des outils pour renforcer la capacité des banques à
évaluer les risques en matière de projets d’énergie solaire
Cette intervention est étroitement liée à l'intervention précédente. Les banques commerciales
montrent en général une grande réticence à accorder des prêts à des taux raisonnables aux
opérateurs privés dans le secteur de l’énergie solaire. Les raisons sont parfaitement rationelles
d’un point de vue bancaire : les banques manquent de visibilité sur les processus de gestion
interne de cette catégorie d’acteurs et peuvent raisonnablement avoir des inquiétudes sur la
viabilité à long terme d’acteurs individuels, et sur les retours incertains d’investissement
potentiels.4
Ces défis peuvent être partiellement surmontés à l’aide d’outils d’évaluation de risques
spécialisés, qui pourraient aider les banques commerciales à faire des évaluations plus
précises sur les perspectives du marché, mais aussi des forces et faiblesses individuelles de
leurs clients potentiels.
Intervention 4: Etudier, concevoir et développer des outils financiers adaptés
aux besoins de financement des utilisateurs potentiels
Pour remédier au problème du faible pouvoir d’achat des ménages à faible revenu du Sénégal,
une meilleure compréhension des dépenses et des habitudes au quotidien des ménages est
indispensable. Bien que l’agence nationale pour les statistiques et la démographie (ANSD)91
et la Banque mondiale publient tous deux des données quantitatives extrêmement utiles en ce
sens92, ces données devraient être enrichies et complétées par des études quantitatives et
88 Dalberg & GIIN, op. cit., pp11-13 89 http://investinsenegal.com/ 90 United Nations Development Programme (UNDP): “Impact Investment in Africa: Trends, constraints and opportunities”. New York, November 2015. 91 http://www.ansd.sn/ 92 http://datatopics.worldbank.org/consumption/country/Senegal
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
57
qualitatives spécifiques dans les communautées visées, afin d’obtenir un aperçu précis des
différentes sources de revenu et des habitudes de dépenses des ménages, ainsi que des
dynamiques qui influencent les choix de dépenses. Ce type de données permettra ensuite de
mieux concevoir des produits financiers adaptés aux besoins des usagers.
Les outils financiers qui pourraient découler de cette étude pourraient, par exemple,
comprendre:
Des prêts de microfinance à des taux bonifiés, éventuellement grâce à des
subventions ;
Des solutions de crédit-bail (« lend-lease »), telles qu’utilisées avec succès dans des
pays comme la Zambie, permettant aux usagers de se procurer des équipements
solaires à travers un système de crédit-bail sur une période prédéfinie de quelques
semaines à 24 mois, qui se clôture par un transfert de la propriété de l’équipement ;
La mise à profit des réseaux existants de financement informels, tels que les tontines
et les groupements d’épargne, et les systèmes et les envois de fonds venant de
parents et amis ;
D’autres formes innovantes de crédit ou de prêts, à développer en fonction des
informations collectées.
Intervention 5: Introduire un système de subventions intelligentes ou un
système de bons d’achat pour favoriser l’achat d’équipements solaires
Les systèmes de « subventions intelligentes » et de bons d’achat ciblés consistent à fournir
des biens et services subventionnés à des populations spécifiques, tout en développant
simultanément les marchés pour ces produits93. Les bons d’achat ou coupons ont été utilisés
avec succès dans plusieurs pays émergents, notamment dans le domaine de l’agriculture: Au
Rwanda, par exemple, des bons d’achat d'engrais ont permis d’augmenter les rendements et
les revenus de milliers de petits agriculteurs. Un système de bons d’achat visant à encourager
l’achat de d’équipements solaires pourrait être un moyen relativement simple d’aider des
ménages à faibles revenus, des PME ou des coopératives agricoles à avoir accès à des
équipements solaires et notamment des réfrigérateurs, des pompes à eau et des
décortiqueuses. Ce genre de stratégie ainsi que des systèmes de tarification différenciée sont
actuellement en cours d’essai dans d’autres parties du continent, notamment au Kénya grâce
au Abdul Lateef Jamal Poverty Action Lab94.
Ce genre de subventions intelligentes et systèmes de bons d’achat pourraient non seulement
apporter des réponses innovantes aux questions du financement de l'achat de dispositifs
solaires, elles pourraient avoir aussi l’avantage supplémentaire de promouvoir les solutions
solaires par rapport aux alternatives et sensibiliser davantage la population visée aux
93 UNDP, “Realising Africa’s wealth – Building Inclusive Businesses for Shared Prosperity”, New York, 2013, p44 94 https://www.povertyactionlab.org/evaluation/powering-small-retailers-adoption-solar-energy-under-different-pricing-schemes-kenya
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
58
avantages du solaire. Cela pourrait également stimuler les économies locales, en incitant des
petits commerçants à stocker des produits solaires.
Le financement d'un tel système de coupons pourrait provenir au moins partiellement du
secteur public, des partenaires du développement ou une combinaison des deux.
5.4 Interventions proposées dans le domaine de l’appui à la mise
en oeuvre
Intervention 1: Inciter les universités et autres centres d’apprentissage à former
davantage de techniciens
Un marché pour les produits solaires ne peut se développer uniquement si le personnel
technique nécessaire est disponible et suffisamment formé pour livrer des services
d'installation et effectuer l’entretien garantissant le bon fonctionnement des appareils. Les
partenaires du développement peuvent fournir un soutien important, notamment en matière de
« formation des formateurs », en collaboration avec toutes les universités concernées, écoles
polytechniques et autres instituts d’enseignement supérieur au Sénégal. L’expérience d’autres
pays pourrait être utilisée pour transmettre des connaissances à des formateurs sénégalais,
qui auront la tâche de former la prochaine génération de techniciens solaires. Ce concept a fait
ses preuves dans le passé, notamment un programme conjoint du gouvernement sénégalais,
de la GIZ et ENDA, qui a permis de former plus de 30 techniciens solaires et a abouti à la
fondation de la FOPEN (Fédération des Organisations Paysannes pour la Promotion des
Energies Renouvelables) dans les années 1990.
Intervention 2: Soutenir le développement de services de soutien aux
entreprises et d’incubateurs
L’offre de services de d’appui aux entreprises pourrait être considérablement renforcée au
Sénégal, en particulier pour appuyer les petits commerçants informels desservant les
communautés à bas revenus, aussi bien en milieu rural qu’en milieu urbain ou péri-urbain. Les
incubateurs d’entreprises pourraient aussi développés davantage. Cette forme d’appui peut
notamment prendre la forme d’un réseau d’agences de développement des PME, dans
lesquelles des entrepreneurs informels, notamment, pourraient recevoir des formations
adaptées, comprenant des modules et des cours portant sur la gestion de base, la comptabilité,
ou les techniques de vente et de marketing.
Une telle organisation pourrait être soutenue financièrement par le secteur privé, les
partenaires au développement, le secteur public ou une combinaison des trois. L’Agence de
développement et d'encadrement des petites et Moyennes Entreprises (ADEPME) 95 pourrait
95 http://www.adepme.sn/
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
59
être un partenaire clé à cet égard, ayant déjà une visibilité, une expertise et des ressources qui
pourraient être mises à profit.
Au-delà de l'expansion des services de soutien aux entreprises, des incubateurs
d’entreprises pourraient mettre en œuvre et tester des modèles d’entreprises inclusives
innovantes dans le secteur de l’énergie solaire. Comme mentionné dans le chapitre précédent,
quelques incubateurs sont déjà actifs au Sénégal, principalement dans le domaine de la
technologie: il s’agit notamment d’Innodev96, de Jokkolabs Dakar97, et de CTIC98.
Intervention 3: Développer et tester et normaliser des modèles de distribution
du dernier kilomètre
Un certain nombre de modèles innovants de distribution dite du « dernier kilomètre » pourraient
permettre de réduire le coût des équipements solaires sur le marché. Etant donné que les
produits solaires ne sont pas des achats récurrents mais des dépenses uniques et de faible
volume au niveau des ménages individuels, cela n’a pas de sens de faire usage des réseaux
de distribution du secteur des produits alimentaires, par exemple.
D'autre part, les modèles de distribution de type plaques tournantes («hub-and-spoke»)
pourraient, surtout lorsqu’ils fournissent une opportunité de former des entrepreneurs locaux à
devenir revendeurs et techniciens, et desservant des communautés dans un périmètre
suffisament étendu pour atteindre une échelle suffisante. Ces modèles permettent en outre de
créer des emplois locaux et de favoriser l’esprit d'entreprise.
Un autre approche consiste à fournir des services plutôt que des produits: c’est notamment le
cas de Station Energie, dont le modèle économique repose sur la location de dispositifs
d'énergie solaire tels que des kits solaires, des réfrigérateurs et des pompes.
Intervention 4: Soutenir le développement d’acteurs locaux dans le domaine de
la rercherche et du développement
Les capacités de recherche et développement du Sénégal pourraient être renforcées : dans un
premier temps, par l'évaluation des capacités et des ressources de recherche existantes, et
ensuite par l'approfondissement de réseaux et la collaboration entre les acteurs existants à
l'intérieur et à l'extérieur du Sénégal, et en intégrant les meilleures pratiques d’autres pays.
96 http://www.innodev.sn/ 97 http://dakar.jokkolabs.net/ 98 http://www.cticdakar.com/fr/
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
60
Vue d’ensemble des interventions proposées
Domaine Type d’intervention Acteur
principal
Commentaires
Information
Campagnes de sensibilisation à l’intention des
usagers et du secteur privé
ANER Campagnes de sensibilisation générales pour notamment changer
les perceptions sur l’énérgie solaire
Développement d’un label de qualité et d’un
système de certification des équipements
solaires
CERER, ANER Informer les usagers de l’existence et de l’utilité de produits solaires
Effectuer des études de marché afin de mieux
comprendre les besoins et attentes des usagers
Informer des boutiquiers sur les avantages économiques du solaire
pour mieux desservir leurs clients
Revoir le regime fiscal actuel
Ministère des
finances
Créer des conditions de concurrence équitable pour le secteur
formel et combattre la diffusion d’équipements de mauvaise.
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
61
Mesures
d’incitation
Développer des mécanismes de contrôle qualité
des équipements solaires
MEDER - CERER
Développer une grille de compensation fiable permettant d’assurer
la viabilité des entreprises privées actives dans le secteur.
Revoir le cadre régulatoire de l’électrification
rurale
MEDER
Définir des grilles tarifaires pour
l’autoproduction
(feed-in tariff)
CRSE Une grille tarifaire pour l’autoproduction, peut-être inspirée du
modèle allemand permettant aux particuliers de réinjecter de
l’électricité dans le réseau
Investissements Etudier, concevoir et développer des outils
financiers adaptés aux opérateurs.
Secteur
financier,
Banque de
l’habitat
Attirer davantage d’investisseurs d’impact au
Sénégal
APIX 23 investisseurs d’impact dont déjà actifs au Sénégal, mais
davantage doivent être attirés pour bénéficier des opportunités
solaires
Développer des outils pour renforcer la capacité
des banques à évaluer les risques en matière de
projets solaires
Banques
commerciales
et partenaires
Les banques commerciales sont réticentes à accorder des prêts aux
opérateurs du secteur solaire à cause du manque de visibilité sur les
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
62
du
développement
processus de gestion interne et de la rentabilité à moyen ou long
terme des opérateurs.
Etudier, concevoir et développer des produits
financiers adaptés aux utilisateurs potentiels
Une meilleure compréhension des modes de dépenses des
ménages est nécessaire afin de mieux comprendre l’impact du
faible pouvoir d’achat sur les décisions de dépenses.
Introduire un système de « subventions
intelligentes » ou un système de bons d’achat
pour l’aquisition de produits solaires
Ministère des
finances,
MEDER, ANER
Des subventions « intelligentes » sont consistent à subventionner
certains biens et services à des populations spécifiques, tout en
développant des marchés
Appui à la mise en
oeuvre
Fournir un appui aux universités et autres
instiutions d’enseignement supérieur pour
former davantage de techniciens
Partenaires du
développement
Soutenir le développement de services d’appui
aux entreprises et incubateurs
Secteur privé et
partenaires du
développement
Développer, tester et normaliser des systèmes
de distribution du dernier kilomètre
Soutenir le développement d’acteurs locaux
dans le domaine de la rercherche et du
développement
Les capacités existantes pourraient être améliorées, en
renforçant les réseaux et la collaboration entre les acteurs
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
63
existants à l’intérieur et à l’extérieur du Sénégal, et en
intégrant les meilleures pratiques venant d’ailleurs.
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
65
6. Prochaines étapes et calendrier proposé
Dans l’ensemble, les conditions sont favorables au développement de l’énergie solaire
au Sénégal. Les pouvoirs publics et le gouvernement sont largement favorables à ce
développement, et la multiplication de grands projets solaires ces dernières années, soutenus
par les institutions de financement du développement, est un signal fort qui a permis de lancer
la dynamique et l’impulsion essentielles pour ancrer l’énergie solaire dans le mix énergétique
du pays. L’enjeu est désormais de traduire cette dynamique en bénéfices tangibles pour les
entreprises inclusives du secteur et donc pour les populations sous-desservies en matière
d’accès à l’énergie. L’existence de modèles intéréssants, tels que M-KOPA en Afrique de l’est,
(voir Encart 6 ci-dessous) pourrait servir d’inspiration de ce qu’il est possible d’atteindre :
Encart 6 : M-KOPA (Entreprise inclusive d’énergie solaire en Tanzanie, Ouganda et
Kénya
M-KOPA est un modèle d’entreprise inclusive permettant à des particuliers sans accès au
réseau électrique d’acquérir des équiements solaires domestiques (SHS) en Tanzanie,
Ouganda et au Kénya. Les clients paient une caution d’environ 35 dollars et font ensuite des
versements quotidiens de l’ordre de 0,50 dollars leur donnant accès à un système solaire
comprenant un panneau solaire, trois ampoules pour l’éclairage, une radio et une prise pour
recharger des téléphones mobiles. La valeur totale de l’équipement est d’environ 200 dollars.
Les versements réguliers sont effectués au travers de plateformes d’argent mobile tels que M-
PESA99.
Chaque système M-KOPA est équipé d'une carte SIM, qui permet d’assurer le suivi des
paiements réguliers. En cas de non-paiement, le système peut être débranché à distance100.
Un des éléments clés pour inciter les usagers à faire la transition vers le solair est que les
paiements quotidiens ou mensuels reviennent à moins cher que le coût équivalent de sources
d’énergie alternatives utilisées jusque là, comme le charbon de bois ou la paraffine. Les clients
sont en général capables de rembourser l’équipement endéans une année, leur permettant
ensuite d’avoir accès à l'énergie solaire sans autre frais pour la durée de vie du produit
(généralement quatre ans) 101.
99 The Shell Foundation, 2014, M-KOPA Summary, available at: http://www.shellfoundation.org/Our-Focus/Partner-Profiles/M-KOPA/Summary 100 Stephen Farris, Bloomberg, 2015, “The Solar company making profit of poor Africans, available at: http://www.bloomberg.com/features/2015-mkopa-solar-in-africa/ 101 The Shell Foundation, 2014, M-KOPA Summary, available at: http://www.shellfoundation.org/Our-Focus/Partner-Profiles/M-KOPA/Summary
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
66
M-KOPA a été lancé en 2011 et à permis de connecter plus de 330.000 foyers en Afrique de
l’est à l'énergie solaire à la date de Janvier 2016. M-KOPA estime que 80% de ses clients
vivent avec moins de 2 dollars par jour102103.
La vision sous-tendue par ce document est donc d’améliorer l'accès des populations à
faible revenu aux services d'énergie solaire, grâce à la création d'un écosystème de
soutien favorable aux entreprises inclusives dans le secteur de l'énergie solaire.
Les indicateurs suivants pourront être utilisés pour la vision, avec des objectifs spécifiques
à définir lors de l’atelier de lancement de la plateforme en septembre 2016:
L’accès à l'énergie solaire augmenté de manière significative pour les populations à
faible revenu d’ici à 2018
Opportunités génératrices de revenus significatifs et mesurables créées grâce à des
modèles d'entreprise inclusifs, les emplois verts et les activités génératrices de revenus
d’ici à 2018
Cet écosystème peut être créé en :
Engageant les acteurs clé identifiés du secteur de l’énergie solaire au Sénégal dans
une plateforme de l’écosystème
En alignant ces acteurs autour d'une vision commune pour la plateforme de
l’écosystème
En s’accordant sur des interventions spécifiques à réaliser et l’engagement des
membres de la plateforme sur qui fait et finance quelles interventions
Un tel écosystème favorable, permettant d’atteindre ces indicateurs alignés avec la vision
proposée, est à portée de main, mais nécessitera la participation active des acteurs clés.
Une plate-forme, appuyée par une structure de gouvernance spécifique (par exemple un
secrétariat ou un comité de pilotage) avec des ressources humaines et financières propres,
devront être mis en place afin d’orienter le processus, avec des étapes claires et des délivrables
définis, ainsi que des mécanismes de participation et de reporting.
Les prochaines étapes clés sont les suivantes:
Inviter des acteurs clés dans l'écosystème à mettre en place une plate-forme
représentative des parties prenantes de l’écosystème (pour fin septembre 2016)
102 M-KOPA, 2016, “Our impact”, available at: http://solar.m-kopa.com/about/our-impact/ 103 Tom Jackson, Disrupt Africa, 2016, “Kenyan pay-as-you-go solar provider M-KOPA Solar extends product offering”, available at: http://disrupt-africa.com/2016/01/kenyan-pay-as-you-go-solar-provider-m-kopa-solar-extends-product-offering/
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
67
Définir une vision commune (pour fin Septembre 2016)
Définir et convenir d’un plan d’action commun et des tâches spécifiques pour atteindre
la vision (pour fin Septembre 2016 – Voir cadre préliminaire du plan d’action en
annexe).
Mettre en place une structure dédiée de l'écosystème (Comité de pilotage et / ou secrétariat
composé de représentants clés des acteurs au sein du gouvernement, des partenaires au
développement, du secteur privé ...) avec des procédures de rencontre, de rapport et de
mise en œuvre clairement définies pour le dernier trimestre de 2016.
Mettre en œuvre conjointement le plan d'action sur une période de 3 ans (2016-2018)
Calendrier propos
Septembre 2016 Dernier trimestre 2016 2017 2018
Lancement d’une
plateforme représentative
des acteurs de
l’écosystyème (PNUD)
Définition d’une vision
commune
(Membres de la
plateforme)
Définition d’un plan
d’action commun
(Membres de la
plateforme)
Mise en place d’une structure spécifique /
Secrétariat (Membres de la plateforme)
Mise en oeuvre conjointe Mise en
oeuvre
conjointe
Mise en
oeuvre
conjointe
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
68
Acteurs proposés pour la plateforme
Groupe d’acteurs Nom Participant-clé au comité de pilotage ?
Autorités publiques ANER Oui
ASER
Senelec
CRSE
Ministère Energie (MEDER)
CIMES
Agence pour l’Economie et la Maitrise d’Energie
Association des Maires du Sénégal
Association des Présidents de conseil departementaux
Association des elus locaux
Entreprises privées du secteur de l’énergie solaire et organisations représentatives
COPERES Oui
FESELEC
Association des Professionnels du solaire (ASPESOL)
Association des Métiers de l’Energie
Prestataires de services au secteur privé, y compris les organisations de soutien aux entreprises et institutions financières
FONSIS
FONGIP
Banque de l’habitat du Senegal
BICIS
SGBS
CBAO
BSIC
Microfinance Institutions
Microcred
Institutions de recherche
CERER
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
69
Organisations de la société civile
ENDA Oui
Partenaires au développement
Banque mondiale et SFI
KfW
AFD Proparco
GIZ Oui
UNDP Oui
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
70
7. Annexes
7.1 Plan d’action: Cadre préliminaire
Résultat: Mesures d’incitation: Environnement régulatoire amélioré
Activités Indicateur
Situation
de
référence
Cible
Calendrier Acteur
responsable
de la mise en
oeuvre
Ressources indicatives
2016 2017 2018
Produit 1:
Régime fiscal favorable aux
équipements solaires amélioré
A définir A définir A définir A définir A définir
Produit 2:
Mécanismes de contrôle qualité pour
équipements solaires en place
A définir A définir A définir A définir A définir
Produit 3:
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
71
…
7.2 Entretiens
Tous les entretiens inventoriés ci-dessous ont été conduits à Dakar et Thiès du 29 février au 8 mars 2016.
Catégorie Organisation Nom de la personne Poste Courriel
Autorités Publiques ANER Moussa Amadou SECK Directeur des Projets et
Programmes
Djiby NDIAYE Directeur Général [email protected]
ASER Ousmane Fall Sarr Directeur des Etudes et du
Système d’Information
CRSE M. TOURE Directeur
Alexandre BODIAN Expert économiste [email protected]
Mme LAKH Paule Marie Expert électricien [email protected]
Ministère de
l’énergie
Ibrahima NIANE Directeur de l’électricité [email protected]
Mamadou Faye Conseiller technique
Entreprise publique
d’électricité
SENELEC Bakary DIOP Directeur des Etudes
Générales
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
72
Entreprises du secteur privé
du secteur de l’énergie
solaire et organisations
représentatives du secteur
privé
Bonenergie Maguette THIANDOUME Directeur Senegal [email protected]
Gabriele SCHWARZ Directrice Internationale [email protected]
ENERSA Mady MBODJI Directeur Général [email protected]
Solar KA Mady DIOUGA Directrice [email protected]
SOLENE Afrique
de l’Ouest
Boubacar SOW Directeur [email protected]
Station Energy Diaty COULIBALY Directrice [email protected]
Total Energy
COPERES Abdou FALL PCA [email protected]
ERA Léopold Mbar J. FAYE Directeur Général [email protected]
Rayon Vert Romuald TAYLOR Directeur Général [email protected]
Philip ATKINSON Administrateur [email protected]
Prestataires de services au
secteur privé, y compris les
institutions financières et
les services d’appui aux
entreprises
Investisseurs et
Partenaires
I & P
Patrice GOMIS Gestionnaire d’actifs [email protected]
Mamadou NDAO Gestionnaire d’actifs [email protected]
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
73
Innodev Pr. Ibrahima THIOUB Président
Organisations
d’enseignement et de
recherche
CERER – Centre
d’Etudes et de
Recherche sur les
Energies
Renouvelables
Prof. Issakha YOUM Directeur [email protected]
Amadou Tidiane NIANG Ingénieur [email protected]
Organisations de la société
civile
ENDA Energie Secou SARR Directeur [email protected]
GVEP Louis Seck Directeur pays [email protected]
Partenaires au
développement
GIZ Oumou DIOP SY Conseiller technique [email protected]
Mame Bineta Aïda DIOUF
DIALLO
Conseiller technique [email protected]
Mireille Afoudji EHEMBA Conseiller technique [email protected]
Markus HAGENAH Conseiller technique [email protected]
Dr. Jörg BAUR Senior Manager [email protected]
Dr. Jörg OELSCHLAEGER Conseiller Technique Principal [email protected]
SFI – Banque
mondiale
Nicolas SOUCHE Chief Investment Officer &
Hub Leader, Infrastructure
Africa
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
74
KFW Marième KANE Directrice adjointe pays [email protected]
PNUD Pape Momar NGOM Expert Energie PUDC [email protected]
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
75
Entité Agence Nationale pour les Énergies Renouvelables (ANER)
Catégorie Autorités publiques
Nom de la personne interrogée Djiby Ndiaye et associés
Courriel / Téléphone [email protected]
Fonction Directeur général
Date 29 FÉVR. 2016
Interrogateurs Jakob Schmidt-Reindahl, Pascale Bonzom, Alioune Badara,
Pierre Coetzer
1. Brève description de l’entité et de son rôle dans la chaîne de valeur
Nouvelle institution : créée en 2013.
L’Agence Nationale pour les Énergies Renouvelables (ANER) est désormais le principal acteur du secteur public dans le cadre du soutien à l’écosystème.
Relève du ministère de l’Énergie.
Son rôle clé consiste à promouvoir l’utilisation des énergies renouvelables, notamment le solaire (également l’éolien et la biomasse).
Le développement rural est un domaine d’intervention clé.
2. Évaluation du paysage actuel
L’énergie solaire suscite un certain attrait et le Sénégal offre des perspectives évidentes pour le développement du solaire avec plus de 3 000 heures d’ensoleillement par an.
Le gouvernement a introduit des avantages fiscaux et des subventions : à préciser.
Parmi les autres acteurs, citons les ONG (LifeDay, GICA, etc.).
Depuis les années 1980, le gouvernement a progressivement évolué vers une approche plus commerciale en impliquant le secteur privé. L’ANER est tout à fait enclin à voir le secteur privé jouer un rôle dans la fourniture d’énergie propre et abordable aux segments à faible revenu. Le marché se répartit entre fournisseurs officiels et fournisseurs non officiels d’appareils alimentés
à l’énergie solaire. Les fournisseurs non officiels sont par définition non réglementés. Il est rare
d’obtenir des données fiables à leur égard, mais il est reconnu qu’ils « introduisent toutes sortes
de produits dans le pays, et nous avons peu ou pas de contrôle sur leur qualité ou leur quantité ».
3. Enjeux et contraintes
Au niveau de l’information : les consommateurs ne disposent pas de suffisamment de connaissances sur le potentiel des lampes et des installations solaires. Ils sont souvent incapables de faire la distinction entre des produits de qualité et des produits de qualité inférieure.
Appui à la mise en œuvre : manque de savoir-faire technique relatif à l’entretien des installations solaires, ce qui conduit à une perte de confiance.
Investissement : les banques sont réticentes à soutenir le solaire en raison d’un manque de compréhension et de leur perception de risque élevé.
Mesures d’incitation : une architecture institutionnelle complexe, et des retards dans la définition de politiques claires en matière de tarifs de distribution et d’harmonisation des tarifs pour les
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
76
usagers.
4. Solutions possibles pour améliorer l’écosystème actuel
Pallier le manque de capitaux privés : manque de crédit à la consommation, de fonds d’investissement, de capitaux pour le développement commercial. Fonds d’investissement ?
Contrôle qualité : un système de certification serait peut-être souhaitable.
Besoin d’harmoniser les tarifs entre les pays de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UMEOA), le Burkina et le Mali sapant le tarif commun et faussant le marché
Cartographie du secteur de l’énergie solaire au Sénégal
77
Entité Ministère de l’Énergie et du Développement des énergies
renouvelables
Catégorie Autorités Publiques
Nom de la personne interrogée Ibrahima Niane
Courriel / Téléphone [email protected]
+ 221 77 565 87 50
Fonction Directeur de l’électricité
Date 29 FÉVR. 2016
Interrogateurs Pascale Bonzom, Jakob Schmidt, Alioune Badara, Pierre Coetzer
1. Brève description de l’entité et de son rôle dans la chaîne de valeur
Principale entité du secteur public chargée de l’orientation de la politique énergétique globale.
Cette politique s’inscrit dans deux optiques différentes : les énergies renouvelables et le développement durable.
2. Évaluation de la situation actuelle
La loi sur les énergies renouvelables et ses « décrets d’application » constituent la principale législation en la matière.
Le gouvernement essaie de mobiliser le secteur privé par des mesures d’incitation et en tentant de promouvoir la production d’excédent d’électricité par les usagers.
Le gouvernement a investi des sommes considérables et attend du secteur privé qu’il apporte sa contribution.
Nous avons instauré un système de « concessions ».
L’Allemagne est l’un de nos principaux partenaires financiers et techniques (KFW) + Peracod/GIZ.
Parmi les mesures pratiques visant à promouvoir les énergies propres figure l’interdiction des ampoules à incandescence.
3. Enjeux et contraintes A. Appui à la mise en œuvre :
Contrôle qualité
Entretien et installation
Les acteurs du secteur privé national manquent de capacité pour bénéficier du système de concessions.
B. Mesures d’incitation
L’harmonisation du système tarifaire est une priorité clé pour 2016, mais « les intérêts des usagers consommateurs contrastent avec le niveau de prix exigé par les acteurs du secteur privé ».
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Entité Station Energy
Catégorie Secteur privé et organisations représentatives du secteur privé
Nom de la personne interrogée Diaty Coulibaly, Directeur
Courriel / Téléphone
Fonction Directeur
Date 1er MAR 2016
Interrogateur Pierre Coetzer
1. Brève description de l’entité et de son rôle dans la chaîne de valeur
Station Energy Sénégal est entrée en activité en 2012. C’est la filiale d’une société française qui exerce également ses activités au Burkina Faso, en Côte d’Ivoire et au Mali.
Elle fournit de petits kits solaires et des batteries BBOXX par le biais d’un réseau de 13 franchises installées au Sénégal.
Produits principaux :
Kit BB5 : 2 lampes, 1 panneau solaire et 1 chargeur de téléphone
Kit BB120 : 4 lampes, 2 tubes dotés de 15 ampoules et d’un chargeur de téléphone
Installations solaires hybrides et installations autonomes
L’idée de base est de fournir de « l’électricité communautaire » aux consommateurs des communautés déconnectées du réseau.
Situé près de la frontière gambienne, Masariko est une région où Station Energy est active.
Là-bas, Station Energy a monté une activité commerciale inclusive offrant une gamme d’appareils solaires à louer, notamment : chargeurs de téléphone, kits et réfrigérateurs solaires permettant de congeler des blocs de glace pour maintenir des boissons au frais.
Ce concept de type « mini kit pour monter son entreprise » requiert l’emploi de trois salariés : un directeur, un technicien chargé de l’entretien et un installateur. Le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a aidé Station Energy à monter certaines de ces activités, pour un coût initial de 7 millions de francs CFA (10 600 euros).
2. Enjeux et contraintes
Les gens sont tout simplement trop pauvres pour prétendre à ces services.
Le financement pose problème, les banques commerciales du Sénégal n’étant pas prêtes à soutenir une telle initiative.
Un soutien très ferme est nécessaire pour diriger une microentreprise, car elle a besoin d’une attention constante.
La tarification de Senelec est problématique, car, comme ses tarifs sont subventionnés, les usagers ont du mal à comprendre les tarifs commerciaux.
Les mini-réseaux ne sont pas réellement viables en termes de retour sur investissement : ils ne fonctionneront sur une base commerciale qu’à condition que les usagers ne se contentent pas d’utiliser les lampes à énergie solaire, mais utilisent également des pompes à eau, des micro moulins, etc.
Avec l’accroissement de la pauvreté au Sénégal, les lampes et appareils solaires représentent un gros investissement pour les populations sénégalaises les plus démunies.
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3. Solutions possibles pour améliorer l’écosystème actuel
Réglementation/mesures d’incitation : le succès de l’écosystème repose essentiellement sur un cadre de tarifs de distribution clair.
Financement : nous avons également besoin de davantage de soutien de la part de l’État (c.-à-d., de subventions) pour l’installation de mini-réseaux ; l’objectif est de couvrir 50 villages à l’horizon 2017.
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Entité ENDA
Catégorie Société Civile
Nom de la personne interrogée Secou Sarr
Courriel / Téléphone [email protected]
Fonction Directeur
Date 1er MAR 2016
Interrogateur Pierre Coetzer
1. Brève description de l’entité et de son rôle dans la chaîne de valeur actuelle
ENDA est une ONG internationale basée au Sénégal dont la mission principale est la lutte contre la pauvreté ; elle s’intéresse en priorité aux enjeux environnementaux, notamment aux énergies renouvelables.
Elle s’autoproclame « unique ONG basée au Sud et active au-delà des frontières du Sénégal ». Elle bénéficie de financements en provenance du Luxembourg, de l’Italie, des Pays-Bas et de la Suisse.
La mission d’ENDA Énergie, qui consiste à fournir un accès universel à l’énergie, s’articule autour de trois axes :
o accès aux sources d’énergie renouvelable ; o renforcement de la résilience communautaire et des écosystèmes ; o développement durable fondé sur une bonne gouvernance.
« Cela fait 15 ans que nous sommes convaincus qu’il nous faut changer notre manière d’aborder l’accès à l’énergie, en apportant notre soutien aux petites et moyennes entreprises (PME) qui fournissent des produits solaires sur une base commerciale »
2. Enjeux et contraintes
Le secteur public n’a pas encore exposé clairement ce qui devait être fait en vue d’améliorer l’accès à l’énergie. Son approche s’est caractérisée par de nombreuses initiatives qui ne semblent pas toujours très coordonnées ou cohérentes.
Environnement réglementaire : le cadre principal repose sur la loi de 2010 sur les énergies renouvelables, mais le décret d’application n’est pas encore en place.
La Commission sénégalaise de Régulation du Secteur de l’Électricité (CSRE) ne joue pas vraiment son rôle.
On observe beaucoup de chevauchements institutionnels (ASER, ANER, etc.) et une rivalité institutionnelle qui en découle.
Les instruments financiers appropriés susceptibles d’appuyer le développement du secteur des énergies renouvelables font défaut : microfinance, prêts bonifiés, capitalisation sur les groupes d’épargne, etc. Les taux d’intérêt sont en général de 25 %, alors que les banques imposent aux PME des taux d’intérêt d’au moins 15 %.
3. Solutions possibles pour améliorer l’écosystème actuel
Nous avons besoin d’un « fonds d’impulsion » ou d’un fonds de développement consacré aux énergies renouvelables.
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Il nous faut également un meilleur mécanisme de coordination entre les parties prenantes dans le cadre du programme national de « décentralisation » : un lien doit être établi entre le programme de décentralisation et les énergies renouvelables.
Il convient d’améliorer la concertation avec les citoyens afin qu’ils comprennent que l’électricité solaire ne s’applique pas qu’aux lampes et aux lanternes.
De manière générale, le PNUD n’a qu’une vision globale de la situation et considère les partenariats entre secteur public et secteur privé comme une panacée. Or, ils ne contribuent pas toujours à la création de PME. Les partenariats entre secteur public et secteur privé s’inscrivant dans une perspective communautaire mériteraient peut-être notre attention : des mécanismes pourraient y être établis afin de créer des modèles d’entreprises inclusives.
Le besoin d’un incubateur spécialisé se fait ressentir.
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Entité ENERSA
Catégorie Secteur privé et organisations représentatives du secteur privé
Nom des personnes interrogées Mady Mbodji, Directeur
Fine Diouf, Conseiller technique
Courriel / Téléphone [email protected]
Fonction Directeur
Date 1er MAR 2016
Interrogateurs Alioune Badara, Pierre Coetzer
1. Brève description de l’entité et de son rôle dans la chaîne de valeur
Fondée en 2008, ENERSA a pour mission la mise en place de projets d’électrification rurale d’initiative locale (ERIL) dans les villages sénégalais mal desservis. La mise en œuvre de ces initiatives bénéficiant du soutien du secteur public est assurée par des partenaires du secteur privé, notamment des concessionnaires.
ENERSA soutient la mise en place de projets ERIL dans la région de Thiès, Bakal et Matam avec pour objectif d’alimenter en électricité six villages, soit 30 000 habitants.
Des projets complémentaires ont été confiés à l’Agence Sénégalaise d’Électrification Rurale (ASER), mais, en raison du retrait du principal investisseur, Sun Edison, le projet a été en grande partie suspendu.
2. Enjeux et contraintes
Bien qu’ENERSA ait déposé sa candidature en 2014, le secteur public n’a pas encore attribué officiellement de contrat de concession. Par conséquent, l’entreprise demeure dans l’incertitude quant à la tarification. Par défaut, elle applique les mêmes tarifs que ceux pratiqués actuellement à Sine Moussa Abdou, dans la région de Thiès.
Système de tarification Quatre niveaux de tarification sont utilisés à Sine Moussa Abdou :
Niveau Quantité d’énergie par
mois
Prix en francs CFA Prix en dollars US
S 1 50 kWh 4 400 7,50 USD
S 2 100 kWh 8 200 14 USD
S 3 150 kWh 12 300 21 USD
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S 4 200 kWh 16 600 28 USD
Cependant, ces tarifs sont bien plus élevés que ceux de Senelec (le prix de la compagnie d’électricité publique). Les habitants des villages savent que les personnes raccordées au réseau Senelec bénéficient de tarifs bien inférieurs et se montrent alors réticents à payer les tarifs offerts par les concessionnaires et les projets ERIL. « Les gens sont trop pauvres pour payer », explique Mady Mbodji. Pour le moment, le taux d’impayés oscille entre 55 et 60 %.
Par ailleurs, le système de tarification ne s’applique qu’à Sine Moussa Abdou, les autres projets ERIL imposant différents niveaux de tarification, en partie parce que la subvention publique n’est pas la même. Ce principe est incohérent et se heurte à l’incompréhension des usagers.
À présent, pour donner suite au Programme d’urgence de développement communautaire (PUDC), ENERSA déposera directement sa candidature pour les marchés publics, sans prendre la peine de postuler pour l’électrification dans le cadre du système concessionnaire.
3. Solutions possibles pour améliorer l’écosystème actuel
Harmoniser les tarifs.
Lever le plafond de 200 foyers pour les projets ERIL afin d’accroître leur viabilité.
Assurer une formation financière et technique, et apporter une aide aux entrepreneurs.
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Entité : Total
Catégorie Secteur privé et organisations représentatives du secteur privé
Nom de la personne interrogée Vincent Couvelaere
Courriel / Téléphone [email protected]/+221 33 864 90 09, +221 77 631
05 78
Fonction Directeur commercial, Comptes d’entreprises & Spécialités
Date 2 mars 2016
Interrogateurs Pascale Bonzom, Charlotte Sow
1. Brève description de l’entité et de son rôle dans la chaîne de valeur
Total Sénégal commercialise des produits solaires dans la gamme du pico solaire : 1) lampes solaires d.light (le modèle le moins cher est à 8 700 francs CFA [TTC], il a une autonomie de quatre à huit heures, est garanti deux ans et a une durée de vie d’environ cinq ans ; un autre modèle comprend un chargeur de téléphone portable) ; 2) kit solaire (mini système solaire à usage domestique) pour une à quatre lampes, doté de hubs de connexion ; 3) lancement à venir d’un nouveau kit (12 V) comprenant l’éclairage, le chargement, une petite télévision et un ventilateur ; 4) système solaire à usage domestique sur réseau doté de deux panneaux photovoltaïques, d’un onduleur et d’un régulateur qui, le jour, est alimenté à l’énergie solaire pour l’éclairage, la télévision et le réfrigérateur, la batterie prenant le relais, la nuit, en cas de coupure de courant. (Ce produit est essentiellement destiné aux zones urbaines et périurbaines, mais s’avère moins populaire/intéressant depuis que le réseau Senelec s’est amélioré et est plus fiable : moins de coupures de courant.)
En 2015, 25 000 lampes ont été vendues.
S’agissant des systèmes solaires à usage domestique, Total s’approvisionne auprès de Sunpower. Total est un actionnaire.
Total distribue ses produits pico par le biais de ses stations-service. En s’appuyant sur des accords de partenariats, la compagnie livre jusqu’au « dernier kilomètre » dans les zones rurales (GVEP, Mayagro). GVEP recourt quant à lui à des groupes de femmes à qui sont accordés 25 % d’avance sur les produits ainsi qu’un paiement à 60 jours. En plus de ses propres produits (graines), Mayagro commercialise des produits solaires par le biais de ses circuits en zones rurales. En raison de taux d’intérêt qu’il juge prohibitifs, Total ne collabore pas avec des institutions de microfinance (IMF). Il sait pertinemment toutefois que Microcred a récemment lancé un produit adapté à l’achat de produits verts. Concernant la gamme des systèmes solaires à usage domestique, Total répond aux appels d’offres ou se voit directement confier des projets par des acteurs majeurs, notamment un important exploitant minier qui souhaite équiper la collectivité dans laquelle il travaille.
2. Évaluation de la situation actuelle
Nécessité de recourir à des partenariats pour la distribution au dernier kilomètre et de combiner la distribution et le crédit. Pas de partenariats avec des IMF, car les taux d’intérêt sont prohibitifs. Collaboration avec Lighting Africa sur une étude ayant pour thématique l’impact des campagnes
de communication sur l’adoption des lampes solaires.
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3. Enjeux et contraintes
Les appels d’offres pour les systèmes solaires à usage domestique favorisent généralement les options les moins chères plutôt que de prendre en compte les aspects qualitatifs.
La concurrence de produits de qualité médiocre n’est non seulement pas heureuse, mais elle suscite une certaine méfiance vis-à-vis de l’énergie solaire, qui n’apparaît pas comme une bonne option d’électrification.
Il n’existe pas encore de tarif de distribution pour les systèmes solaires à usage domestique raccordés au réseau.
Le cadre réglementaire doit proposer des mesures d’incitation (réduction des taxes ou détaxe sur les lanternes, entre autres… Ces réductions de coûts seraient ensuite répercutées sur les consommateurs, qui pourraient ainsi en profiter).
4. Solutions possibles pour améliorer l’écosystème actuel
Initiative visant à mettre fin à la commercialisation de produits de mauvaise qualité.
Tarifs de distribution.
Campagnes portant sur les lanternes solaires.
Services financiers destinés aux clients.
Détaxes/déductions sur les lanternes et autres produits solaires.
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Entité : Agence Française de Développement (AFD)
Catégorie Partenaires au développement
Nom des personnes interrogées Esther Haftendorn, Moustapha Ibrahim Malloum et Magay
Ndiaye
Courriel / Téléphone [email protected] ; [email protected] ;
Fonction Esther : en charge du secteur public/de l’énergie ; Moustapha :
chargé de projet, secteur privé/financier ; Magay :
coordonnateur de Sunref au Sénégal.
Date 2 mars 2016
Interrogateurs Pascale Bonzom, Moussa Habou
1. Brève description de l’entité et de son rôle dans la chaîne de valeur
L’Agence Française de Développement (AFD) soutient le secteur de l’énergie au Sénégal de plusieurs façons : 1) Secteur public : soutien au renforcement de la capacité de production et de transmission de Senelec ; soutien au ministère de la part d’experts en énergies renouvelables ; financement de l’interconnexion régionale ; soutien à ERA en matière d’électrification rurale (8 millions d’euros, financement du concessionnaire sur trois ans avec pour objectif de raccorder 18 000 personnes au réseau dans la vaste concession de Kaffrine - Tambakunda – Kédougou) sous forme de subvention (sans passer par l’ASER). ERA fournit un mini-réseau solaire. Elle est entrée en activité en 2014 et devait enregistrer un taux de pénétration du marché de 70 %, mais ce dernier oscille actuellement entre 20 et 30 %, en raison, en partie, d’un tarif supérieur à celui du Senelec et de la réticence des usagers à payer ce prix. 2) Secteur privé : soutien aux IMF et à la stratégie d’inclusion financière ; ligne de crédit verte : Sunref. Sunref a été lancé en avril 2015 ; c’est une ligne de crédit de 30 millions d’euros pour l’Afrique de l’Ouest passant par la Société Générale de Banque au Sénégal (SGBS) et l’Oragroup/Ora Banque, administrée depuis Abidjan avec des coordinateurs de pays. Elle appuie des projets dans les domaines suivants : énergies renouvelables, efficacité énergétique, gestion des déchets/environnement. Le projet peut avoir n’importe quelle envergure. Les particuliers et les entreprises peuvent postuler. Le taux d’intérêt est de 8 %. Le prêt est de 4 ans minimum et de 12 ans maximum. Le montant maximal du prêt s’élève à 3 millions d’euros. Ceux qui terminent la mise en œuvre de leurs projets se voient accorder un taux préférentiel : 10 à 15 % du montant du prêt sous forme de bourse. Le portefeuille actif compte 29 projets : deux en phase de mise en œuvre et trois en phase d’étude. Exemples de projets dans l’énergie solaire : une organisation de trois agriculteurs spécialisée dans les pompes solaires (15 000 ; 39 000 et 67 000 euros) ; ERA : pour le remplacement du diesel par des mini-réseaux solaires : 787 000 euros.
2. Évaluation de la pratique actuelle
Groupe de coordination des donateurs dans le domaine de l’électricité.
ENDA Énergie joue un rôle informel de coordination. Elle organise régulièrement des dialogues
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publics-privés (PPD) sur des thèmes spécifiques.
Enjeux et contraintes.
Encourager les clients potentiels à souscrire au service (faible pénétration du marché).
Réticence des usagers à payer pour les installations intérieures.
Les tarifs ne sont pas suffisamment alignés sur ceux de Senelec, ce qui dissuade les particuliers de souscrire aux services.
Le remboursement de la TVA pour les installations intérieures est possible, mais il n’est pas immédiat et reste difficile à obtenir.
La coordination du programme est problématique.
Mauvaise qualité des matériaux sur le marché, ce qui dissuade les particuliers d’adopter des solutions solaires.
Absence de mise en œuvre.
Capacité technique des banques à évaluer les projets liés à l’énergie.
3. Solutions possibles pour améliorer l’écosystème actuel
Il est nécessaire de financer les installations intérieures destinées aux foyers (concernant le raccordement à l’électrification rurale). Le Fonds carbone de la Banque mondiale (CISEF) travaille sur ce point.
Les subventions aux concessionnaires doivent être harmonisées.
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Entité : Centre de service régional du PNUD pour l’Afrique (RSCA)
Catégorie Partenaires au développement
Nom des personnes interrogées Bouba Oualy, Charles Bounkoungou
Courriel / Téléphone Bouba Oualy <[email protected]> ; Harouna Charles
Bonkoungou <[email protected]>
Fonction Bouba : coordinateur régional des projets relatifs aux
plateformes multifonctionnelles
Charles : expert en renforcement des capacités internationales
Date 2 mars 2016
Interrogateur Pascale Bonzom
1. Brève description de l’entité et de son rôle dans la chaîne de valeur
Le Centre de service régional du PNUD pour l’Afrique (RSCA) met actuellement en œuvre un programme régional sur les plateformes multifonctionnelles avec l’aide de la Fondation Bill et Melinda Gates. Depuis le début du programme, ce sont 3 500 plateformes multifonctionnelles qui ont été installées dans 15 pays. Son élargissement est en cours, plusieurs pays et régions (par exemple, la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale [CEMAC] et la République démocratique du Congo) l’ayant intégré à leurs initiatives pour l’« Énergie durable pour tous ».
Bien que la plupart des plateformes fonctionnent au diesel, il en existe de nouvelles alimentées par les énergies renouvelables, notamment le solaire.
Les plateformes fournissent différents services de production ainsi que de l’éclairage, dans certains cas.
Des artisans locaux fabriquent les plateformes (à l’exception du moteur). Des techniciens locaux sont formés à cette tâche ainsi qu’à leur entretien. Gérées par des comités locaux, les plateformes fournissent des services payants. Lorsqu’une plateforme est introduite dans un village, un contrat de deux ans est signé pour assurer le renforcement des capacités en matière de création, d’entretien et d’utilisation de la plateforme jusqu’à ce que le village soit entièrement viable et indépendant. Les programmes de plateformes multifonctionnelles sont considérés comme un « promoteur de projets énergétiques multisectoriels » (PREM) par l’ASER, et, à ce titre, peuvent bénéficier d’une subvention de la part de celle-ci. (L’ASER doit financer le PREM à hauteur de 80 % et le concessionnaire, à hauteur de 20 %.) Ce dernier, en collaboration avec le Programme des domaines agricoles communautaires (PRODAC), utilise les plateformes multifonctionnelles déjà en place et les relie aux mini-réseaux ruraux. S’il existe des mini-réseaux ruraux, mais aucune plateforme multifonctionnelle, le programme en met une en place pour assurer un usage productif de l’énergie fournie par les mini-réseaux ruraux.
2. Enjeux et contraintes
Les modèles de paiement de l’électrification rurale ne sont pas adaptés aux cycles de revenus des agriculteurs. Ces derniers n’ont des rentrées d’argent que pendant la récolte et ne peuvent pas
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payer de facture mensuelle. La facturation doit être adaptée à ce problème de flux de trésorerie.
Les batteries solaires sont onéreuses. Les modèles hybrides, qui, le jour, fonctionnent à l’énergie solaire, sans batterie, et, la nuit, sont alimentés au diesel ou par un autre système, sont plus économiques et, de ce fait, plus facilement accessibles.
3. Évaluation de la situation actuelle
Bouba considère les plateformes multifonctionnelles comme une bonne pratique de prestation de services énergétiques aux communautés à la vase en vue d’un usage productif en zone rurale.
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Entité Centre d’Études et de Recherche sur les Énergies
Renouvelables (CERER)
Catégorie Instituts d’enseignement et de recherche
Nom des personnes interrogées Prof. Issakha Youm
Amadou Tidiane Niang
Courriel / Téléphone
Fonction Directeur
Date 2 MARS 2016
Interrogateurs Pierre Coetzer, Jakob Schmidt-Reindahl
1. Brève description de l’entité et de son rôle dans la chaîne de valeur
Le CERER est un centre de recherche rattaché à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar. Nous menons des activités de recherche et d’expérimentation, de démonstration et de contrôle qualité des installations solaires.
Le CERER est le seul centre de ce type en Afrique de l’Ouest ; il couvre également d’autres pays, tels que le Burkina Faso, le Mali, etc.
Contrôle qualité des systèmes pico solaires pour le compte de Lighting Africa (Banque mondiale).
2. Enjeux et contraintes
Informations : le solaire est perçu comme la source d’énergie des pauvres
Mesures d’incitation : des normes de qualité existent sans être obligatoires. Appui à la mise en œuvre : manque de formation et de capacité. Le CERER a déjà mis en place un programme d’enseignement et un laboratoire d’analyses, mais nous avons besoin de renforcer l’assurance-qualité
3. Solutions possibles pour améliorer l’écosystème actuel
Nous devons renforcer le contrôle qualité et veiller à ce que le secteur de l’énergie solaire applique les normes professionnelles.
Nous avons besoin d’un système de certification technique.
Nous avons besoin d’un système de label qualité officiel.
Le PNUD peut faciliter la relation avec les usagers ainsi que celle avec les autres parties prenantes de la chaîne de valeur.
Il est possible de nouer davantage de partenariats entre secteur public et secteur privé afin de tirer parti de leur collaboration.
Nous devons également tirer parti de la collaboration entre les institutions de microfinance.
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Entité Commission Sénégalaise de régulation de l’électricité (CSRE)
Catégorie Autorités publiques
Nom des personnes interrogées M. Touré
M. Alexandre Bodiau
Mme Lakh
Courriel / Téléphone
Fonction Directeur
Date 2 MARS 2016
Interrogateurs Pierre Coetzer, Jakob Schmidt-Reindahl
1. Brève description de l’entité et de son rôle dans l’écosystème actuel
La Commission Sénégalaise de régulation de l’électricité (CSRE) est une organisation indépendante du secteur public, créée par une loi d’orientation (décret) en 1998, à une période où la privatisation de Senelec était d’actualité.
Elle a deux rôles clés :
un rôle décisionnel concernant les tarifs de l’électricité et l’allocation de concessions ;
un rôle consultatif auprès des systèmes de réglementations et de législation liés à l’électricité (lois, décrets et décisions).
Ses membres sont nommés par le gouvernement et son budget, approuvé par le ministère de l’Énergie, provient de fonds publics.
2. Enjeux et contraintes
Harmonisation des tarifs : la CSRE procède actuellement à une consultation auprès de l’ensemble de ses parties prenantes à cet égard ; il s’agit de la tâche majeure à laquelle elle s’attelle en ce moment. « Les disparités tarifaires s’expliquent essentiellement par le cadre juridique actuel, et notamment la fragmentation des fournisseurs publics et privés dont les objectifs et missions diffèrent. » La CRSE, par le biais de services consultatifs externes, mène actuellement une étude sur l’harmonisation. Le tarif officiel est de 118 francs CFA /kWh, mais le coût réel avoisine en réalité les 667 francs CFA/kWh. La différence est couverte par des subventions.
Lents progrès de l’électrification rurale : la CSRE essaie de trouver un équilibre entre les intérêts des populations rurales et ceux des opérateurs privés. Le système concessionnaire n’a pas fourni les résultats escomptés. Senelec devrait certainement reprendre les quatre concessions restantes.
Calcul de la contrepartie due au titre de l’harmonisation des tarifs pour les opérateurs privés : l’harmonisation se soldera par un alignement sur un niveau qui pourrait être supérieur aux tarifs actuels de Senelec, mais encore nettement inférieur aux tarifs que les opérateurs privés considèrent comme commercialement viables. Il a été convenu que les opérateurs privés obtiennent des contreparties pour la différence, mais le problème majeur consiste à savoir comment les financer.
3. Solutions possibles pour améliorer l’écosystème actuel
Il convient de veiller à ce que, quel que soit le modèle, l’électricité soit accessible en permanence
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et non de manière intermittente.
Un renforcement des capacités est nécessaire, notamment en matière de contrepartie financière due au titre de l’harmonisation des tarifs.
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Entité GIZ-PERACOD
Catégorie Partenaires au développement
Nom des personnes interrogées Mame Bineta Aïda Diouf Diallo
Mireille Afoudji Ehemba
Mamadou Sambou
Oumou Diop Sy
Markus Hagenah
Courriel / Téléphone
Fonction Conseillers techniques – PERACOD
Date 2 MARS 2016
Interrogateurs Pierre Coetzer, Jakob Schmidt-Reindahl
1. Brève description de l’entité et de son rôle actuel dans la chaîne de valeur
PERACOD est un programme bilatéral germano-sénégalais d’électrification rurale. Il relève du ministère sénégalais de l’Énergie.
La GIZ et PERACOD apportent leur appui au ministère à deux niveaux : les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique.
Nous collaborons étroitement avec l’ANER, l’ASER ainsi que certains acteurs du secteur privé par le biais de la Fédération des entreprises sénégalaises d’électricité (FESELEC).
Nous sommes également un partenaire contribuant largement aux projets ERIL. En coopération avec l’ASER, la GIZ apporte un appui technique et financier aux opérateurs en vue de l’installation de systèmes dans les projets ERIL et les concessions.
L’objectif consiste à disposer de structures communautaires, de systèmes d’éclairage public et de mini centrales, tout cela étant censé favoriser les activités génératrices de revenus.
Nous disposons de trois technologies :
les systèmes solaires à usage domestique (c.-à-d., les installations domestiques) ;
les mini-réseaux ;
les villages raccordés au réseau.
2. Enjeux et contraintes
Le système concessionnaire n’a pas très bien fonctionné. Nous nous trouvons actuellement dans une situation où les projets ERIL ont raccordé plus d’usagers que les concessions. Dans certains cas, les contrats entre les opérateurs et le secteur public ne sont officialisés que maintenant.
Tout le monde ne joue pas son rôle sur le plan institutionnel.
La cohabitation entre les projets ERIL et les concessions est difficile.
Un problème d’acceptation se pose. S’agissant des systèmes solaires à usage domestique, la situation est problématique ; les usagers veulent Senelec. Une fois qu’un consommateur est habitué au niveau S1, il veut passer au niveau S4. Les particuliers ont du mal à accepter qu’il puisse y avoir un juste milieu entre ne pas avoir d’électricité du tout et être parfaitement bien équipé.
Le différentiel tarifaire entre Senelec et les concessionnaires/projets ERIL a un sérieux effet dissuasif. Les usagers ne comprennent pas pourquoi ils doivent payer 500-600 francs CFA alors que
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les habitants des villages des environs paient 118 francs CFA pour le même service. La CSRE est extrêmement lente.
Capacités techniques : mauvaise utilisation par les usagers et manque d’entretien.
3. Solutions possibles pour améliorer l’écosystème actuel
Il nous faut redéfinir la question de l’accès à l’électricité – ce n’est pas un problème rural ; l’énergie renouvelable et solaire concerne au moins autant les zones urbaines que rurales.
Informations : les consommateurs ont besoin d’être mieux informés, et de davantage de transparence quant à la gamme de produits et à leur performance, etc.
Mesures d’incitation : le décret d’application de la loi sur les énergies renouvelables doit encore être adopté.
Investissement : nous avons besoin de plus de capital initial pour aider les micro-entrepreneurs à créer leur entreprise. Cela ne peut pas être gratuit, il convient de définir des conditions de crédit favorables.
Écosystème : une organisation représentant les usagers.
Il convient de résoudre le problème des différentiels tarifaires.
Il nous faut une plateforme favorisant le dialogue entre les parties prenantes.
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Entité InnoDev
Catégorie Prestataires de services au secteur privé, y compris les
institutions financières et les services d’appui aux entreprises
Nom des personnes interrogées Pr. Ibrahima THIOUB
Courriel / Téléphone
Fonction
Date 2 MARS 2016
Interrogateurs Pascale Bonzom, Pierre Coetzer, Jakob Schmidt-Reindahl
1. Brève description de l’entité et de son rôle dans l’écosystème
InnoDev est entré en activité en 2009. Il s’agit d’un incubateur d’entreprises rattaché à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar.
Il offre une formation et un soutien aux étudiants et aux start-ups, en particulier dans le secteur de l’agriculture, même si l’énergie est l’un de ses domaines d’intervention.
2. Enjeux et contraintes
L’écosystème ne constitue pas en environnement favorable :
il n’existe pas de « business angels » (ou investisseurs start-ups) au Sénégal et pas de mécanismes financiers novateurs ;
nous manquons de ressources humaines et financières ;
nous avons peu de moyens permettant de « détecter » les idées de génie et les personnes talentueuses à même de concrétiser ces idées.
3. Solutions possibles pour améliorer l’écosystème actuel
Des crédits d’énergie sur le modèle de Sunref (style AFD).
Les banques doivent considérablement augmenter le soutien financier qu’elles apportent aux PME.
Une « académie » intégrant davantage les petites entreprises et les entrepreneurs.
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Entité Investisseurs & Partenaires (I&P)
Catégorie Prestataires de services au secteur privé, y compris les
institutions financières et les services d’appui aux entreprises
Nom des personnes interrogées Patrice Gomis
Mamadou Ndao
Courriel / Téléphone [email protected]
Fonction Directeurs des investissements
Date 2 MARS 2016
Interrogateurs Pierre Coetzer, Jakob Schmidt-Reindahl
1. Brève description de l’entité et de son rôle dans l’écosystème
I&P est le seul gestionnaire d’actifs important au Sénégal qui investit selon les principes de l’investissement d’impact.
La taille de son ticket moyen (investissement) oscille entre 100 000 et 300 000 euros.
L’énergie relèverait de notre fonds pour la petite infrastructure, qui tourne actuellement autour de 10 à 50 millions d’euros.
2. Enjeux et contraintes
A. Mesures d’incitation
Des tarifs commerciaux contre-productifs : il s’agit d’une situation absurde où il est plus économique d’acheter des éclairages solaires à Bamako qu’à Dakar, même si les produits sont déchargés sur place, puis transportés de l’autre côté de la frontière.
Des règles fiscales contre-productives : les batteries d’un certain type ne sont pas considérées comme de l’équipement solaire et font l’objet de taxes élevées.
Des rivalités institutionnelles opposent les organismes du secteur public qui sont censés réglementer le secteur énergétique.
Les conditions commerciales pour exploiter l’énergie ne sont pas favorables : plusieurs initiatives du secteur privé n’ont pas abouti en raison d’une mauvaise conception. Ainsi, on suppose que les producteurs doivent pouvoir vendre à Senelec, mais les coûts de production s’avèrent plus élevés que le prix que Senelec est prêt à payer.
B. Investissement
Manque d’envergure : la principale conclusion ressortant d’une étude récente sur l’énergie et les énergies renouvelables (2014), menée afin de comprendre les besoins du secteur énergétique en Afrique subsaharienne, est la suivante : la plupart des opérateurs sont trop petits pour survivre.
Le crédit n’est pas disponible à des conditions raisonnables : les banques sénégalaises ne consentiront pas aisément de crédit à des conditions raisonnables, en partie aussi parce que l’organe régulateur a durci les conditions après la crise bancaire des années 1990.
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3. Solutions possibles pour améliorer l’écosystème actuel
A. Mesures d’incitation
Nous devons créer des conditions plus favorables pour les investisseurs et les investisseurs d’impact. Les défis suivants doivent être relevés : harmonisation des tarifs, mise en place de politiques fiscales claires, etc.
B. Investissement
Il faut que de meilleures conditions de crédit soient consenties (taux d’intérêt plus faibles et partenariats stratégiques avec des IMF).
Il devrait être possible de recourir aux « tontines » (groupes informels d’épargne collective) pour l’achat de produits et d’instruments solaires.
C. Appui à la mise en œuvre
Une amélioration de la formation et du savoir-faire technique est nécessaire.
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Entité SOLENE ESE
Catégorie Secteur privé et organisations représentatives du secteur privé
Nom de la personne interrogée Boubacar Sow
Courriel / Téléphone [email protected]
Fonction Directeur
Date 3 MARS 2016
Interrogateur Pierre Coetzer
1. Brève description de l’entité et de son rôle dans l’écosystème
Opérateur privé, créé en 2014, qui commercialise des systèmes solaires et des appareils alimentés à l’énergie solaire.
Achat et vente d’équipement photovoltaïque destiné à des systèmes domestiques, mais également d’équipement professionnel, tels que des pompes à eau et des antennes relais de téléphonie mobile, etc.
Sa clientèle compte de grands groupes comme Orange, mais aussi des ONG, des institutions et des particuliers.
Il mène de nombreux projets en zones rurales et répond à des offres de marché locales.
2. Enjeux et contraintes
A. Mesures d’incitation
Manque de perspective et pas de réelle harmonisation sur le plan politique.
Manque de contrôle réglementaire et de contrôle qualité.
Des politiques fiscales incohérentes : par exemple, les batteries solaires sont assimilées aux batteries de voiture et taxées au même taux.
Les utilisateurs finals et les consommateurs ont fini par s’attendre à ce que l’énergie soit pour ainsi dire « sur demande », autrement dit, disponible en permanence. Il n’existe pas forcément d’objectif réaliste pour le Sénégal, ni même pour le monde. Nous avons besoin que l’état d’esprit des gens change, y compris dans le milieu décisionnel.
B. Investissement
Malgré l’enthousiasme qui règne sur le marché, le fait est que la plupart des foyers sénégalais n’ont tout simplement pas assez de moyens pour acheter des équipements solaires domestiques.
L’investissement existant n’est pas adapté au marché. Par exemple, la Banque du logement a introduit une ligne de crédit pour les énergies renouvelables, mais les conditions sont bien trop strictes.
C. Appui à la mise en œuvre :
Trop d’acteurs sont présents sur le marché et doivent faire face à la concurrence du secteur informel.
Une entreprise privée et indépendante aura de grandes difficultés à atteindre la viabilité commerciale sur le marché rural. Les coûts sont trop élevés et l’échelle trop réduite, surtout si nous sommes en compétition avec Senelec, qui est subventionné.
Nombreux sont ceux qui pensent à tort que l’énergie solaire ne nécessite aucun entretien, et ce,
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aussi bien chez les utilisateurs finals que dans le secteur public. Bien entendu, ce n’est pas vrai. Comme toute autre installation technique, les systèmes solaires ont besoin d’un entretien régulier, faute de quoi les installations tombent en panne. La crédibilité du concept même d’énergie solaire s’en trouve alors entachée.
3. Solutions possibles pour améliorer l’écosystème actuel
A. Mesures d’incitation :
Nous devons mettre en place une réglementation permettant d’éliminer progressivement les chauffe-eau électriques et proposer des mesures d’incitation pour les remplacer par des chauffe-eau solaires. Par exemple, aucun plan de construction ne devrait être validé si le bâtiment en question ne comporte pas de chauffe-eau solaire.
Il convient de mettre en place des mesures d’incitation réglementaires pour encourager l’adoption de l’énergie solaire, ou même en faire la norme dans les zones rurales. L’introduction de normes juridiques s’avère également nécessaire.
B. Investissement
Nous avons besoin de fournir aux foyers les moyens ou le pouvoir d’achat nécessaire pour investir dans l’énergie solaire. Cette mesure peut s’accompagner d’une forme quelconque de subvention ou de bons d’achat. Sinon, nous avons besoin de projets de plus grande ampleur.
Il est absolument impératif d’améliorer les conditions d’accès au financement imposées aux utilisateurs finals des zones rurales. Par exemple, la ligne de crédit de la Banque du logement peut être améliorée.
C. Appui à la mise en œuvre
Il est nécessaire de renforcer le partage du savoir-faire technique et des connaissances, notamment concernant l’entretien des installations.
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7.3 Visite de terrain à Sine Moussa Abdou, dans la région de Thiès
Sine Moussa Abdou est un village de 2.000 habitants, situé au nord-ouest de Thiès (à environ
70 km), la deuxième plus grande ville du Sénégal.
Plus de 80 % de l’activité économique locale est liée à l’agriculture et à l’élevage, contre 7 %
lié au commerce local.
Les envois de fonds par de la famille travaillant en zone urbaine ou à l’étranger viennent
compléter les revenus locaux. Ce revenu supplémentaire semble, dans certains cas, améliorer
considérablement le niveau de vie et la qualité de logement de certains foyers.
Le mini-réseau a été inauguré en 2010 dans le cadre de la campagne d’électrification rurale
menée au Sénégal.
Tous les foyers du village sont désormais connectés au mini-réseau.
D’après une étude empirique et les entretiens menés auprès de cinq foyers, la plupart des
ménages utilisent le réseau principalement pour s’éclairer et, dans une moindre mesure, pour
recharger leurs téléphones ou écouter la radio.
Photo 1: Vue de l’unité principale de production photovoltaïque de Sine Moussa
Crédit Photo : Pierre Coetzer
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Photo 2: Vue partielle du mini-réseau de Sine Moussa Abdou
Crédit Photo : Pierre Coetzer
Entretien 1 :
Mama Awa Wade
La famille Wade compte huit enfants et huit adultes. Les hommes sont en majorité des
pêcheurs.
« Nous dépensons environ 4 400 francs CFA par mois en électricité (7,70 dollars US) : c’est
tout ce que nous pouvons nous permettre.
Nous n’utilisons l’électricité que pour nous éclairer. »
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Photo 3: Mama Awa Wade et sa famille, habitants de Sine Moussa Abdou
Crédit Photo : Pierre Coetzer
Photo 4 : Activité de couture artisanale à Sine Moussa Abdou
Crédit Photo : Pierre Coetzer
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Entretien 2 :
M. Ibrahim Wade
Mme Seynabou Wade
Mme Radhi Thioun
Mama Umwade
12 enfants, 5 femmes
« Nous utilisons principalement l’électricité pour nous éclairer. Nous cuisinons avec du bois de
chauffage que nous ramassons dans la brousse ou que nous achetons. »
Photos 5 et 6 : La famille Wade utilise l’électricité pour s’éclairer et le charbon de bois pour la
cuisine. Crédit Photos : Pierre Coetzer
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Photos 5 et 6 : La famille Wade utilise l’électricité pour s’éclairer et le charbon de bois pour la
cuisine. Crédit Photos : Pierre Coetzer
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Entretien 3 : Petits commerçants
Mme Fatou Cissé
M. Sergei Guey
« L’électricité solaire est très pratique et nous l’apprécions. C’est vraiment formidable pour les
enfants aussi, car ils peuvent étudier le soir, grâce aux lampes. Nous dépensons également
moins d’argent en énergie que par le passé. C’est donc un avantage ».
« Ici, à notre magasin, nous aimerions avoir un réfrigérateur, mais nous ne disposons pas du
capital initial nécessaire pour cela ».
« D’autres bonnes idées sont à creuser, comme des machines à coudre, des pompes et une
fabrique de savon que nous pourrions construire, ici dans le village. »
Photo 7 : Mme Fatou Cissé et M. Serguey Guey, boutiquiers de Sine Moussa Abdou
Crédit Photo : Pierre Coetzer
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Entretien 4 : Dirigeante communautaire locale (vice-présidente du Groupement
Takoulegue, groupe d’épargne local)
Mme Dabba Gueye
« L’électricité solaire a été très utile ici, même si la plupart des gens ne l’utilisent que pour
s’éclairer. Des possibilités existent probablement, mais l’argent du groupe d’épargne ne peut
pas servir des à des dépenses individuelles ».
« Nous aimons l’idée que des appareils ménagers soient alimentés à l’énergie solaire : des
réfrigérateurs solaires, par exemple, seraient une bonne idée ».
« Le moulin est formidable, mais son utilisation nous revient également assez cher ».