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Page 1: La Russie d'Aujourd'hui

Ce supplément est édité et publié par Rossiyskaya Gazeta (Moscou, Russie) qui assume seule l'entière responsabilité de son contenu

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Mardi 31 mai 2011

Chère restaurationLe théâtre lyrique du Bolchoï rouvrira ses portes en octobre, mais la polémi-que enfle sur les coûts.

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L’art engagé prend ses quartiers dans la citéUn groupe d’artistes replace la politique au centre du champ artistique et bouscule la société.

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GaLina MasterovaLa rUssie d'aUjoUrd'hUi

L’État a décidé d’investir 19,3 milliards d’euros dans l’amélioration des infrastructures et des services médicaux. enjeu : la sauvegarde d’un système de santé public et gratuit.

Quand Evguenia Ivanovna a été hospitalisée récemment, sa fille Zoïa savait intuitivement qu’il lui faudrait régler « au noir » une partie des frais à l’infirmière, bien que l’hôpital soit public. Elle a donné 500 roubles (12 euros). Ce n’est pas tant le montant qui pose problème, disent les sociologues, que la nature de ces pots-de-vin. Sur le papier, le système de santé russe est gratuit. La Constitution russe de 1993 garantit ce droit à chaque citoyen. En réalité, la mé-decine russe fonctionne à double vitesse, mêlant des services de santé privés et un système public à la traîne. Ce dernier, ravagé par des années de financement insuf-fisant, se caractérise par des hô-pitaux décrépits dont le person-nel déprimé et lamentablement sous-payé encourage souvent une rémunération ad hoc de son tra-vail.

Le gouvernement russe vou-drait voir les russes avoir plus d’enfants pour contrer le déficit démographique. Mais l’évolution des moeurs va dans le sens inverse.

Familles nombreuses

PaGe 3 PaGe 5

Îlot de puretéLe splendide et gigantesque lac Baïkal offre à ses visiteurs sa nature sauvage et les met en contact avec l’ancienne et riche culture sibérienne. Laissez-vous guider !

Yandex, le principal moteur de recherche russe loin devant Google, a fait son entrée en bourse à New York. Les investisseurs se sont rués sur les actions de cette société en plein boom.

Bourse en ligne

PaGe 4

Assaut créatif sur les friches industrielles de Moscou

PaGe 8

Laissez-nous vous présenter La russie !31 Mai/ 28 Juin

www.larussiedaujourdhui.be tous les derniers mardis du mois dans Le Soir

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suite en PaGe 3

sauver le système de santésécurité sociale Le kremlin s’attelle à la complexe réforme des soins publics hérités de l’époque soviétique

il ne suffit pas d’investir dans les équipements : c’est tout le système qui est à repenser pour notamment enrayer le déclin démographique.

En sortant de la gare Kourskaïa, traversez la place bruyante, en évitant les chiens errants, lon-gez la petite décharge improvi-sée, faufilez-vous entre les kios-ques déglingués de gadgets bon marché, entre deux murs aveu-gles, au bout de la rue, vous êtes arrivé. Devant vous : la nouvelle Mec-que de l’art contemporain !

une femme salue les partisans communistes défilant sous ses fenêtres lors du traditionnel dé‑filé du 1er mai dans le centre de

Photo du Mois

Le 1er mai rouge pour toujoursHalte aux extorsions, place à la rébellion

spécialisée dans la lutte contre la corruption se sont présentés avec des documents pour réquisition-ner sa société, ce fut un véritable choc. Les policiers se sont com-portés comme s’ils saisissaient un bien qui leur appartenait. À che-val sur ses principes, Yana a re-fusé de payer pour échapper à la tentative d’extorsion. Cette noble action lui a valu d’atterrir en pri-son, un univers qu’elle connais-sait pour avoir donné des cours de réinsertion dans un centre de détention pour femmes. « C’est une guerre terrible qui est livrée contre les femmes et hommes d’af-faires, conduite en premier lieu par certains fonctionnaires rus-ses », affirme Yana Iakovleva.

En 2006, Yana Iakovleva était une femme d’affaires ambitieuse, co-propriétaire de Sofex, une entre-prise de produits chimiques. Elle pensait maîtriser les rouages du business russe. Mais quand des membres d’une unité de police

vLadiMir rouvinskiyLa rUssie d’aUjoUrd’hUi

yana iakovleva a passé sept mois en prison pour avoir refusé de céder à la corruption. désormais, elle lutte contre ce fléau et vient en aide aux entreprises les plus vulnérables.

Corruption dans les milieux d’affaires, les victimes se rebiffent

iakovleva a été emprisonnée à tort pendant plusieurs mois. suite en PaGe 2

Moscou. réminiscence sovié‑ tique, le défilé continue de célébrer les droits du prolétariat international. PaGe 6

revue de presse : la mort de Ben Laden

oPinions

Loisirs

La presse s’interroge sur les conséquences de cette décapi-tation du terrorisme mondial, sur la capacité du monde à af-fronter le nouveau désordre et sur le nouveau djihadisme.

Candidats obligés aux présidentiellesPoutine et Medvedev n’ont pas d’autre choix que d’être candi-dats l’un contre l’autre car la concurrence aidera à stabiliser le régime, estime le politologue Georgy Bovt.

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02 LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI www.larussiedaujourdhui.Besupplément réalisé par rossiyskaya Gazeta et distriBué avec politique & société

les pme se rebiffent contreles fonctionnaires corrompus

Les investisseurs étrangers ne sont pas les seuls à craindre les fonctionnaires russes en quête de pots-de-vins et spécialistes des arrestations abusives. Selon une récente étude menée par le gou-vernement, 17% des entrepre-neurs russes ont l’intention d’émigrer, tandis que 50% disent vouloir refuser de céder au chan-tage. Au lieu d’abandonner son pays, Iakovleva a créé sa propre organisation, le Comité Solida-rité Business, pour soutenir les entrepreneurs victimes de ces pratiques. Récemment, Yana a

« Ils peuvent s’attaquer à n’im-porte quel entrepreneur, engager des poursuites pénales pour fi-nalement lui extorquer de l’ar-gent. Et la victime comprend qu’elle va devoir se battre contre cette machine bureaucratique jusqu’à sa mort », explique la femme d’affaires. Aujourd’hui âgée de 39 ans, elle a passé sept mois de sa vie en prison et at-tend toujours son jugement. « Je n’arrivais pas à croire ce qui m’arrivait. Ma réputation, et tout ce pour quoi j’ai toujours tra-vaillé menaçait soudain de s’écrouler ». Mais son cas a fini par attirer l’attention des défen-seurs des droits de l’homme. Cinq ans plus tard, Yana est de-venue une figure emblématique de la lutte contre la corruption. Les entrepreneurs en détention provisoire se compteraient par milliers, même si aucune statis-tique officielle n’existe. Rares sont ceux qui ont été acquittés.

également été nommée à la pré-sidence d’un centre anti-corrup-tion russe qui collabore depuis peu avec le syndicat des PME russe Delovaïa Rossia. « Il s’agit de l’union de deux forces, car les autorités sont à la fois contre la corruption et contre le monde des affaires », a annoncé Boris Titov, à la tête de Delovaïa Ros-sia, et qui co-préside le centre anti-corruption avec Iakovleva. Galina et Evgeni Konovalov font partie des tout premiers entre-preneurs à s’être adressés au cen-tre. Leur société implantée à

yana iakovleva est aujourd’hui une militante emblématique de la lutte contre la corruption.

17%des entrepreneurs russes ont l’intention d’émigrer, et 50% déclarent vouloir refu-ser de céder à la corruption.

70 000entreprises sont tou-chées chaque année par les demandes de pots-de-vin qui peu-vent atteindre 10% de leurs dépenses totales.

35%C’est la diminution du nombre de poursuites liées aux délits écono-miques en 2010, selon le ministère de l’Inté-rieur.

chiffres clés

bunal, mon mari a été arrêté sur de fausses accusations », racon-te Galina Konovalov. Les avo-cats lui ont dit que son cas était sans espoir, mais cette même année, le couple a enregistré deux victoires : en février, le tribunal a reconnu plusieurs violations à l’encontre de l’accusé, et en mars, l’entreprise a été rendue aux époux Konovalov. Pour autant, l’affaire contre Evgeni n’est tou-jours pas classée, et les biens de la société ont été vendus au cours de la procédure judiciaire. Le centre anti-corruption est la première initiative incitant les entreprises à combattre elles-mê-mes le fléau dont le noyau « ne faiblit pas et prend l’économie à la gorge », pour reprendre le dis-cours du 31 mars du président Dmitri Medvedev. « Chaque année, près de 70 000 entrepri-ses sont victimes de corruption en Russie. Les sommes versées en pots-de-vin peuvent atteindre jusqu’à 10% des dépenses tota-les. Il s’agit effectivement d’un racket à grande échelle et qui touche toutes les institutions du pays », précise le président de Delovaïa Rossia, Boris Titov. Yana Iakovleva estime que le droit pénal constitue actuelle-ment la voie principale de saisie des entreprises : « Auparavant, ces pratiques concernaient prin-cipalement les tribunaux d’arbi-trage parce que la qualité de la justice et l’indépendance des juges étaient faibles ».De nouveaux amendements du Code pénal atténuant les sanc-tions en cas de délits économi-ques sont entrés en vigueur le mois dernier. Les amendes de-vraient remplacer les peines de prison. « Nombre de nouvelles lois ont été adoptées. Le problè-me, maintenant, est de les faire respecter », insiste Yana. « Jusqu’à mon arrestation, je n’imaginais pas qu’une entreprise puisse avoir pour rôle d’ agir sur la so-ciété, ni qu’elle soit amenée à dé-noncer des injustices ».

suite de la premiÈre paGe

6 mesures De meDveDev contre la corruption

1 Réduire la charge fiscale dont le niveau élevé peut conduire les entrepreneurs à enfrein-

dre la loi afin de préserver une cer-taine rentabilité.

2 Le parquet doit réagir face aux cas de corruption publiés dans la presse. Il

s’en saisit parfois mais ne fait pas toujours redescendre l’information vers les médias.

3 Mettre fin à l’anarchie dans l’établissement des nor-mes. Souvent, les ministè-

res adoptent des dispositions lé-gales en contradiction avec une législation existante. Le ministère de la Justice doit y mettre bon or-dre.

4 Créer une institution res-ponsable des investis-sements qui suivra et

solutionnera les problèmes des in-vestisseurs.

5 Avant le 15 mai, consoli-der un graphique de la pri-vatisation des gros por-

tefeuilles d’actions au sein du domaine fédéral.

6 Les ministres et représen-tants de l’administration présidentielle doivent quit-

ter les conseils des chefs des en-treprises nationales avant le 1er oc-tobre 2011.

Krasnodar a subi une descente des autorités locales. « En 2008, nous avons appris que le proprié-taire avait mystérieusement été remplacé, et lorsque nous som-mes allés porter plainte au tri-

en Bref

Près de Tomsk, une ville d'un genre entièrement nouveau et réservée à l'intelligentsia verra bientôt le jour. Imaginée par l'homme d'affaires Alexandre Kravtsov, "Ruyan-ville" devrait être achevée d'ici 5 à 6 ans. La ville pourrait accueillir jusqu’à 2000 habitants et 10 000 tou-ristes. Cette ville sera avant tout une plateforme d’échanges in-tellectuels.

une ville utopique en sibérie

Le 18 mai dernier, Dmitri Med-vedev a tenu sa première gran-de conférence de presse dans la future Silicon Valley russe de Skolkovo. Lors de son interven-tion, le président russe est re-venu sur la nécessaire rénova-tion du gouvernement après 2012, et un possible retour aux élections pour les gouverneurs et les conseillers de la Fédéra-tion. Concernant la coopération avec les États-Unis autour du projet de bouclier anti-missile, le chef d’État a menacé ces der-niers et l’occident d’un retrait du traité Start si une entente n’était pas trouvée. Il a en outre promis de ne pas appuyer les sanctions de l’ONU concernant la Syrie. Le volet des deux gran-des affaires judiciaires de Kho-dorkovsky et Magnitsky a éga-lement été évoqué. Les résultats de l'enquête sur la mort en pri-son de l'avocat Sergeï Magnis-tky, arrêté après avoir dénoncé une affaire d'évasion fiscale au sein de l'Hermitage Capital or-ganisée par de hauts fonction-naires, devraient être connus sous peu.

medvedev passe le test de la presse

max seddonspécialement pour la russie D’aujourD’hui

de nombreux jeunes russes s’expatrient pour acquérir une précieuse expérience, voire pour émigrer définitivement. un grave problème de déficit de cadres se profile pour la russie.

La fuite des cerveaux continue d'accentuerle déficit des cadres

émigration les jeunes diplômés sont de plus en plus tentés par les perspectives offertes à l'étranger

que année, je demande à mes étu-diants ce qu’ils veulent faire dans 3 où 4 ans. En septembre 2010, ils ont été une bonne moitié à répondre qu’ils projetaient de déménager à l’étranger, notam-ment en Allemagne, en Grande-Bretagne, en Irlande et en Ar-gentine », note Alexandre Auzan, professeur d’économie.Dmitri Medvedev s’en inquié-tait en juillet 2008, lors d’un sommet du G8 : « Nous devons créer de bonnes conditions pour nos citoyens. C’est le manque de telles conditions qui les pousse à partir ». Selon les dernières indications, ce discours n’a pas convaincu. D’après Sergueï Stepachine, pré-sident de la Cour des comptes de Russie, plus de 1,25 million de Russes ont quitté le pays ces dernières années, ce qui, couplé à la chute de la natalité et au niveau élevé de mortalité, entraî-ne une importante baisse démo-graphique.L’émigration continue inquiète

Anton, 25 ans, occupe un poste clé à Moscou, dans un important groupe pétrolier. Mais il postule pour un emploi à Londres, qui sera moins rémunéré, ou pour une formation à l’étranger. Car pour lui, « la Russie est trop triste, surtout en hiver ».Les pays occidentaux attirent les jeunes diplômés russes qui y trouvent de plus grandes chan-ces, de meilleures formations, ou tout simplement un climat plus doux. Cette dernière raison peut pa-raître dérisoire, mais nombreux sont ceux qui plient bagage pour vérifier si l’herbe est effective-ment plus verte ailleurs. « Cha-

les autorités, alors que la Russie connaît une croissance constan-te sans précédent, avec un PIB en forte progression annuelle de-puis 1998, un niveau de pauvre-té réduit de moitié et une éco-nomie en hausse de 7% par an en moyenne.Mais selon les experts, c’est l’at-mosphère du pays qui fait fuir. « La raison principale est le man-que d’air frais, ainsi que le dé-crivait Blok dans son poème consacré à la mort de Pouchki-ne », estimait récemment Dmi-tri Orekhov dans le journal d’op-position Novaya Gazeta. « Il devient de plus en plus pénible pour une personne libre et indé-pendante de respirer dans la Rus-sie de Poutine. On n’y trouve pas sa place ». Qu'est-ce qui provoque cette lourde atmosphère ? Comme le montrent les résultats de l’étu-de accompagnant l’article de Dmitri Orekhov, 62,5% des lec-teurs de Novaya Gazeta attri-buent la vague d’émigration ac-

tuelle à la situation personnelle, notamment l’activité, l’âge, la connaissance de langues étran-gères, la situation familiale et le niveau d’éducation. Dans l’es-pace russophone du site Live-Journal, il existe même une com-munauté nommée « Time to go ? » où l’on s’échange expé-riences et conseils en matière d’émigration.

Le point de vue d’Anna, 32 ans, commissaire d’exposition dans un important centre d’art de Moscou, tranche avec cette vi-sion. Après plusieurs stages en Europe, elle est finalement ren-trée en Russie : « Cela peut pa-raître paradoxal, mais vous trou-verez plus de possibilités de carrière ici si vous le voulez vrai-ment. Quitter le pays pour un temps permet d’acquérir de l’ex-périence et d’élargir ses horizons, mais cela vaut vraiment la peine de rentrer ».

« la raison principale est le manque d'air frais, comme au temps du poète alexandre Blok »

« Quitter le pays permet d’acquérir de l’expérience [...] mais cela vaut la peine de rentrer »

1,25 million de russes ont quitté le pays ces dernières années.

Le nombre d’émigrants poten-tiels russes n’a pas augmenté de-puis 2000, d’après le Centre Leva-da. Mais les moins de 35 ans sont deux fois plus nombreux à vouloir partir. Certains citent les chances de carrière et un salaire plus élevé comme principales raisons d’émi-grer, tandis que la plupart mettent en avant les facteurs culturels et de meilleures conditions de vie.

« partir pour toujours ? »les sondaGes montrent que quatre russes sur cinq n’envisaGent pas de quitter le pays.

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03LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI WWW.LARUSSIEDAUJOURDHUI.BESUPPLÉMENT RÉALISÉ PAR ROSSIYSKAYA GAZETA ET DISTRIBUÉ AVEC Société

Le gouvernement russe doit inves-tir 19,3 milliards d’euros dans la ré-forme du système de santé.

Cure indispensablepour le système de santéC’est l’une des grandes contra-dictions de la société russe : elle compte de très bons médecins et chercheurs originaires d’un pays où, à quelques centaines de kilo-mètres de Moscou, les familles des patients sont tenues d’acheter à leurs frais les pansements, serin-gues, poches de solution saline et tout le nécessaire pour un séjour hospitalier. La presse décrit des hôpitaux où les instruments sont stérilisés dans des casseroles po-sées sur des serpentins électri-ques. Le gouvernement russe se lance donc dans une immense réforme qui prévoit d'injecter 19,3 mil-liards d’euros pour doter les hô-pitaux du pays d’équipements dernier cri et revaloriser les sa-laires du personnel médical. La Russie devrait accroître ses dé-penses de santé de 3,9% à 5% par an pour se rapprocher de l’Union européenne. Le piteux état du système de santé, doublé d’indices de mor-talité alarmants, ont servi de ca-talyseur. « La Russie a un taux

SUITE DE LA PREMIÈRE PAGEde natalité de pays développé, c’est-à-dire bas, et un taux de mortalité de pays en développe-ment, c’est-à-dire élevé », com-mente Macha Lipman, une spé-cialiste du centre de réflexion Carnegie de Moscou. Elle ajoute qu’il y a « plusieurs causes à la forte mortalité, dont l’une est la mauvaise qualité du système de santé ». Les démographes les plus pessimistes prédisent que la po-pulation russe pourrait chuter de 142 millions à 100 millions en 2050. Mais il n’y a pas de tendan-ce irréversible : si les Russes s’in-vestissaient dans une vie plus lon-gue et plus saine, ils seraient peut-être enclins à avoir plus d’enfants. Le gouvernement construit une série de centres médicaux dans tout le pays, en mettant l’accent sur la lutte contre les maladies cardio-vasculaires et les cancers. Dmitri Pouchkar, 47 ans, est le principal urologue de la Russie. Ce chirurgien de réputation in-ternationale est à l’avant-garde de l’utilisation de technologies pour le traitement du cancer, et en Russie, c’est un pionnier de la

médecine préventive pour les hommes. Il a obtenu des � nance-ments du ministère de la Santé et du Développement social pour importer des équipements opé-ratoires robotisés dans quatre hô-pitaux du pays, mais il estime que le problème n’est pas seulement � nancier. « Il revient à la société elle-même de délivrer le messa-ge », dit-il. « La société, c’est tout le monde, le président, le Premier ministre, les travailleurs. Une so-ciété unie doit déclarer que nous comprenons ce que cela signi� e d’être un bon docteur et à quel point c’est important ». Le système soviétique, gratuit pour tous, se concentrait sur les spécialistes et les soins, négligeant la prévention. Les Russes sont aujourd’hui peu nombreux à faire con� ance à leur système de santé. Les classes aisées préfèrent se faire soigner à l’étranger. Souli-gnant l’aspect moral du problè-me, Pouchkar conclut : « Il est impossible de réformer en un an, mais nous pouvons commencer par reconnaître qu’il y a de bons et de mauvais médecins. Nous de-vons soutenir les bons ».

Dépenses de santé jusqu’en 2020

des Russes décèdent suite à des accidents cardio-vasculaires, 24,4% de cancers. Viennent ensuite les accidents, les homicides, et les abus d'alcool.

51,6%CHIFFRES CLÉS

SOFIA IZMAÏLOVALA RUSSIE D'AUJOURD'HUI

Bruxelles réduit ses activités de financements des programmes d’assistance en Russie. L’aide financière européenne sera désormais remplacée par des fonds privés étrangers ou russes.

L'aide publique s'amenuise pour les défavorisés

Orphelinats La charité ne suffit pas

abouties. Le programme est tou-jours en vigueur, bien que les fonds proviennent désormais de la ville. « Lorsque les fonds pro-venant de Bruxelles sont rempla-cés par ceux d’une administra-tion locale à l’issue du projet, on peut dire que c’est une réussite », a-t-il déclaré. Depuis 2002, l’UE a dépensé 42 millions d’euros dans des pro-grammes d’assistance liés à la protection des droits des enfants en Russie. Mais les � nancements diminuent chaque année, expli-que M. Daniilidis. « Avant, la Rus-sie était considérée comme un pays en voie de développement, c’est pourquoi un budget impor-tant lui était allouée ». La deuxiè-me cause sont les révolutions ara-bes. La pauvreté dans laquelle ces populations vivent oblige la Com-mission européenne à faire de ces pays une priorité. Aujourd’hui, les organisations non gouvernementales russes trouvent de plus en plus de donateurs pri-vés. Cependant, les Russes ont commencé à compenser eux-mê-mes le manque de � nancement. « Ces derniers temps, on observe une préoccupation plus sérieuse vis-à-vis de la société civile. Des particuliers achètent des fauteuils roulants, un enseignement de base sur la vie en société se met en place dans les orphelinats », ex-plique Irina Yasina, économiste et membre du Conseil des droits de l’homme. « Des changements co-lossaux se sont produits ces der-nières années. Nous commençons à ressembler à l’Europe », conclut-elle.

Sacha a vécu jusqu’à l’âge de 16 ans dans les rues de Saint-Péter-sbourg. Son père est mort quand il était enfant, sa mère est alcoo-lique. Sacha a alors arrêté l’éco-le, s’est mis à errer de refuges en refuges, et puis ont commencé ses problèmes d’alcool. Au printemps 2007, Sacha a été recueilli par « Enfants des Rues de Saint-Pé-tersbourg », un programme de réadaptation des enfants et ado-lescents sans abris, subventionné par l’Union européenne. Sacha a été placé dans un centre de « Doctors to Children », une ONG à l’initiative de ce program-me. Médecins, psychologues et professeurs ont alors pris en char-ge l’adolescent. Très vite, Sacha est retourné à l’école. Au centre, il s’est découvert une passion pour la photographie. Aujourd’hui, il étudie à l’université d’État du Ci-néma et de la Télévision de Saint-Pétersbourg et vit avec sa grand-mère, retrouvée grâce au centre. L’UE a dépensé 300 000 euros pour soutenir ce programme qui est venu en aide à plus de 1 600 enfants russes. Selon Denis Da-niilidis, porte-parole de la Com-mission européenne à Moscou, le programme « Enfants des Rues de Saint-Pétersbourg » est l’une des initiatives européenne les plus

L'UE a dépensé 42 mln d'euros depuis 2002 pour l'aide à l'enfance.

Voir une famille de quatre enfants est désormais une rareté.

ELENA NOVIKOVALA RUSSIE D'AUJOURD'HUI

Le nombre de couples sans enfants augmente tandis que les familles nombreuses deviennent une exception.

Famille nombreuse, famille heureuse ?

Démographie Le gouvernement russe veut des familles plus nombreuses, mais l’évolution des moeurs a l’effet inverse

de deux garçons : Oleg a presque deux ans et Trofim a six mois. Avec son mari, ils envisagent d’avoir un troisième enfant. « Mon � ls aîné est né très faible, les mé-decins disaient qu’il ne survivrait pas. C’est là que nous avons com-pris que nous aurions beaucoup d’enfants. Un enfant unique de-vient égoïste ; deux deviennent rivaux ; mais trois forment une famille ». Mais Ipatova est déjà une exception. Seuls 3% des cou-ples en Russie ont plus de deux enfants et 48% - presque la moi-tié – n’en ont pas du tout, selon les statistiques. Psychologues et sociologues son-nent l’alarme depuis longtemps, en parlant d’une « crise » et même de l’extinction de la famille en tant qu’institution. Il ne s’agit pas que des divorces. De plus en plus

Dans un � lm soviétique de 1968, « Vivons au moins jusqu’à lundi », une écolière nommée Nadia ra-conte en classe que son idéal de bonheur, c’est d’avoir quatre en-fants. Cette affirmation audacieu-se met dans une colère noire sa prof, qui défend avec fermeté les valeurs soviétiques. Le � lm a plus de quarante ans aujourd’hui, le pays a radicale-ment changé. Néanmoins, les mères de familles nombreuses doivent toujours faire face à un mur d’indifférence.Maria Ipatova, 25 ans, est mère

de couples vivent en concubina-ge, plutôt que de se marier, ce qui était impensable en URSS. Une autre tendance récente parmi les mères est de faire des bébés toutes seules, sans mari ou com-pagnon : plus de 30% des enfants russes sont nés hors mariage. Ajoutez à cela une chute sérieu-se de la natalité, et l’avenir de la famille nucléaire parait sombre. Le nombre moyen d’enfant par femme en Russie est de 1,59, contre 1,9 en 1990. La Russie est toujours l’un des leaders mon-diaux en termes d’avortements, même tardifs ; 60 % des grosses-ses sont interrompues. Les sondages indiquent que les Russes refusent d’avoir des en-fants pour des raisons économi-ques et à cause d'aides insuffi-santes de l’État en terme

d'infrastructures. Il existe un dé-� cit énorme de place en mater-nelle. L’État encourage unique-ment la maternité en offrant un « capital maternel », un chèque de 8980 euros, à la naissance du deuxième et du troisième enfant. La natalité a augmenté de 22% depuis 2006, mais pas assez pour enrayer la crise démographique.

L’année dernière, des dé-putés de la région de Tcheliabinsk ont pro-posé de réintroduire l'impôt sur les fa-milles sans enfants qui existait entre 1941 et 1991. Signe qu'à ce jour, l’État n’a pas trou-vé d'idée plus efficace.

Combien de temps ensemble ?

entre 10 et 19 ans22%

après 20 ans

10%entre 5 e 9 ans

28%

des divorces ont lieu durant les 4 premières années de vie commune

40%

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04 LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI www.larussiedaujourdhui.Besupplément réalisé par rossiyskaya Gazeta et distriBué avec économie

tim GoslinGbusiness new europe

yandex prouve que l'économie russe n'est pas qu'une histoire de pétrole et de gaz. ni les risques politiques, ni la concurrence de Google n'ont eu raison de l'appétit des investisseurs.

yandex, moteur de recherche... et de profits

internet L'introduction en bourse à new York du principal moteur de recherche russe a rencontré un énorme succès

Ce fut la ruée. Les investisseurs ont demandé dix fois plus d'ac-tions que Yandex n'en proposait. Résultat, le "Google russe" a re-levé ses prix au dernier moment et est parvenu le 24 mai à lever 1,3 milliards de dollars sur le Nas-daq de New York.La franchise de Yandex a payé, car dans son prospectus de 2.000 pages destiné aux investisseurs potentiels, le groupe n'a pas caché encourrir des risques politiques, dont celui d'une OPA par des oli-garques proches du pouvoir. « Les entreprises russes de haut niveau comme la nôtre sont particuliè-rement vulnérables aux manoeu-vres politiciennes », précise Yan-dex. Il existe toujours le risque que quelqu'un interprête le trai-tement de l'actualité comme « po-litiquement biaisé, ce qui pour-rait entraîner des représailles », poursuit le prospectus.Yandex affirme concentrer 64% du trafic de recherche en Russie, contre 22% pour Google, et constitue la plus grande entre-prise Internet basée en Russie en termes de recettes. Ce qui place le groupe au sommet d'un sec-teur très porteur. Les dépenses de publicité surfent sur l'accé-lération de la reprise économi-que.Quoi qu'il en soit, le prix reste net-tement en dessous de ceux des mo-teurs de recherche d'autres mar-chés émergents, ce qui est lié en au risque découlant d'investisse-

ments dans une entreprise de ce type.Selon la loi russe, tous les four-nisseurs de services Internet doi-vent permettre au FSB, le Service russe sécurité, de fixer sur leurs serveurs une "boîte noire" capa-ble de surveiller le trafic e-mail. En avril, le FSB a fait monter la pression, en demandant l'interdic-tion de Skype et de Gmail, arguant prétexte qu'ils constituaient une grave menace pour la sécurité.Le président Dmitri Medvedev, réputé pour ses affinités avec le Web, a rejeté la demande, mais la discussion met en relief les re-lations complexes entre l'État et l'autoroute de l'information. Fi-gure de l'opposition, Boris Nemt-

sov a affirmé dans une interview que l'État fait pression sur les fournisseur d'accès à Internet pour qu'ils bloquent les sites d'op-position.Les choses ont pris une mauvai-se tournure début mai, quand Yan-dex a annoncé que le FSB l'avait contraint à fournir des détails concernant les utilisateurs de Yan-dex.Dengi, son système de trans-fert d'argent. Concrètement, le FSB réclamait des informations sur les contributeurs financiers du célèbre militant anti-corrup-tion Alexeï Navalny. Une semai-ne plus tard, le Comité d'enquête de Russie, le plus haut organisme d'enquête du pays, a ouvert une instruction sur Navalny, le soup-

çonnant d'avoir utilisé sa posi-tion en tant que conseiller d'un gouverneur régional pour forcer une entreprise de scierie à conclu-re un accord défavorable.Avides de se lancer sur un Inter-net russe à forte croissance, les investisseurs attendaient depuis trois ans que Yandex mette en vente ses fonds propres. Cepen-dant, ils souhaitent un rabais en raison du risque lié à la Russie, plusieurs compagnies ayant été forcées d'annuler leurs IPO sur les marchés internationaux cette année. « Le risque politique lié à Yandex est déjà intégré via la réduction russe plus générale, que nous comptabilisons à hauteur de 37%

yandex a été fondée en 1993 et le moteur de recherche proprement dit en 1997. l'essentiel des revenus du groupe proviennent de la publicité. la société vient d'ailleurs de relever ses tarifs de 30% cette année.

le fondateur de yandex arcadi voloj vient d'empocher plus de 96 millions de dollars grâce au placement.

de l'ensemble du [marché émer-gent] », estime le stratège d'Otkri-tie Financial, Tom Mundy. Alexan-der Vengranovich, analyste chez Otkritie, abonde dans ce sens. « Les investisseurs avec lesquels nous avons parlé n'attachent pas beaucoup d'attention aux histoi-res de risque politique. Ils sont plutôt intéressés par la croissan-ce de Yandex. Les parts de Yan-dex rattrapent celles de Mail.ru. En novembre, ce dernier à enre-gistré le seul résultat vraiment impressionnant d'une IPO russe au cours des trois dernières an-nées. Tous deux offrent une ex-position au segment russe d'In-ternet, qui devrait afficher une croissance rapide et soutenue ».

de Russes, soit 40% de la popula-tion, utilisent Internet, soit la 7ème audience mondiale.

des Russes utilisant internet pré-fèrent Yandex, très loin devant le leader mondial Google (22%).

60 mios

64%

chiffres clés

Ben arisbusiness new europe

la russie n'est plus un marché émergent. c'est du moins l'opinion de l'ue, qui cherche à mettre fin au traitement commercial de faveur mis en place dans les années 1990.

Mieux qu'un simple marché émergent

échanges La perception de la russie auprès de ses partenaires

économique croissante de la Rus-sie. L'Union Européenne est de loin le partenaire commercial le plus important de la Russie et le volume des échanges a aug-menté bon train au cours des dix dernières années. L'UE repré-sentait 49% des échanges com-merciaux de la Russie en 2010, après que le chiffre d'affaires total eut plus que quadruplé, passant de 46,8 milliards d'euros en 2000 à 216 milliards en 2010.

L'exécutif de l'Union européen-ne a annoncé son intention d'ex-clure les pays à revenu intermé-diaire comme la Russie et le Brésil des droits de douane spé-ciaux introduits conformément au Système de préférences gé-néralisées (SPG) de l'UE. « Les équilibres économiques mondiaux ont connu d'énormes bouleversements », a déclaré le Commissaire européen au Com-merce Karel De Gucht aux jour-nalistes. « Si nous accordons des préférences douanières dans cet environnement concurrentiel, ce sont les pays les plus nécessi-teux qui doivent obtenir le plus d'avantages ». 176 pays ont ac-tuellement droit à des tarifs douaniers spéciaux qui, au total, représentent 4% de l’ensemble des importations vers l’UE. Selon les propositions de Bruxelles, cela permettra de purger la liste d'environ 80 pays.Cette proposition constitue la re-connaissance la plus explicite par Bruxelles de la puissance

Le revenu par tête de la Russie a été multiplié par près de dix au cours de la dernière décen-nie, pour atteindre 15.900 dol-lars à la fin de l'année 2010, selon le CIA Factbook, faisant de la Russie un «pays développé à re-venu moyen».Les entreprises d'Europe occi-dentale ont réagi à la hausse du revenu disponible par une ruée sur la Russie et en tirant profit d'un marché de la consomma-tion à croissance rapide.

Balance commerciale des échanges de la russie

Ben arisbusiness new europe

avec l'acquisition de la Banque de moscou, vtB confirme la consolidation du secteur financier au profit de l'état, au détriment du secteur privé et des établissements étrangers.

Retour en force de l'État dans le secteur bancaire

finance Les banques étrangères continuent à quitter la russie

alors impliqué dans une enquête pour corruption à hauteur de 440 millions de dollars autour de prêts flous à une société immobilière contrôlée par l'épouse de Loujkov, Elena Batourina. Convoqué pour un interrogatoire en avril, Boro-dine s'est enfui à Londres et a été hospitalisé. Une semaine plus tard, il acceptait de vendre sa par-ticipation à un prix que les ana-lystes disent inférieur aux taux du marché.

« Ce qui s'est réellement passé est clair », a déclaré une source. « Les anciens dirigeants n'étaient pas contents d'être évincés de la ban-que et insistaient sur un prix élevé pour leur part, un prix que VTB n'était pas prêt à payer. La direc-tion a tenté de jouer le bras de fer, mais ils ont eu les yeux plus grands que le ventre ». L'acquisition de VTB suit la re-prise par Sberbank du leader russe de la banque d'investisse-ment, Troika Dialog. Les deux

La banque d'État VTB, deuxième établissement du pays après Sber-bank, a finit par prendre le contrô-le de la Banque de Moscou, la cin-quième banque du pays. Cette dernière était depuis les années 1990 la banque de poche du gou-vernement de Moscou. Suite au limogeage en septembre de l'an-cien maire Iouri Loujkov, l'ave-nir de la banque était incertain. VTB-24, la filiale de détail de VTB, est déjà leader dans l'octroi de crédits et d'hypothèques aux par-ticuliers. L'absorption des 500 agences de la Banque de Moscou placerait VTB juste derrière Sber-bank, qui possède la part du lion sur le marché de la banque de détail en Russie. Mais l'accord autour de la Ban-que de Moscou n'allait pas de soi, la direction de l'établissement ayant ralenti un accord sur la vente de 20,3% de ses parts à VTB. Le président de la Banque de Moscou Andreï Borodine était

banques d'État ont adopté des stratégies très agressives après la crise de 2008, tandis que plusieurs banques étrangères ont déjà quit-té la Russie en raison d'une concurrence croissante. La der-nière en date est HSBC. Cette ten-dance a semé l'inquiétude dans le secteur. Oleg Viouguine, PDG de la banque privée MDM, esti-me que l'expansion de l'État frei-ne la croissance des banques privées. Il souligne que les éta-blissements publics profitent d'un accès bien plus facile au crédit bon marché que les banques pri-vées.Certains experts se réjouissent toutefois de voir les deux ban-ques d'État augmenter en taille. « D'un côté, l'État rend plus dif-ficile le fonctionnement des ban-ques privées, mais de l'autre, nous commençons à voir les prémisses d'une consolidation qui faisait cruellement défaut dans le sec-teur bancaire », estime Roland Nash, PDG de Verno Capital. « La reprise de banques qui n'étaient clairement pas administrées dans une optique commerciale mais pour le bénéfice de ses proprié-taires est, quoi qu'on en dise, une bonne chose ». Des sources au Kremlin affirment que l'augmentation de la part de l'État dans le secteur n'est que temporaire et que la direction de l'État est impuissante à l'empê-cher. «Techniquement, cette opé-ration a augmenté la part de l'État dans le secteur bancaire, mais l'objectif est de vendre les parts de l'État [dans VTB et Sberbank] et d'accroître la concurrence dans le secteur », a indiqué Arkadi Dvorkovitch, conseiller du prési-dent Dmitri Medvedev.

« Le rachat par l'État des banques de poche est, quoi qu'on en dise, une bonne chose pour le secteur bancaire »

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05LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI WWW.LARUSSIEDAUJOURDHUI.BESUPPLÉMENT RÉALISÉ PAR ROSSIYSKAYA GAZETA ET DISTRIBUÉ AVEC Régions

Niché dans le sud de la Sibérie, loin des destinations touristiques classiques, le lac Baïkal offre à ses visiteurs un paysage excep-tionnel, avec près de 31 000 ki-lomètres carrés de pureté et de charme naturel. Sur ce site co-habitent des dizaines d’espèces de � ore et de faune sauvages uni-ques, dont les fameux phoques sans oreilles ou encore l’omul, un poisson qui constitue l’une des principales ressources alimen-taires des riverains.

Réputé le plus profond du monde (1 637 mètres), le lac Baïkal constitue aussi un cinquième des réserves d’eau douce de la pla-nète. Classé au patrimoine mon-dial de l’Unesco en 1996, il est ainsi devenu un lieu d’expédition pour les scienti� ques. Ce qui a provoqué un engouement touris-tique pour la région, et certains habitants craignent que les nom-breux voyageurs ne détruisent à terme la beauté sauvage du site. Aujourd’hui, la haute saison tou-ristique débute en juin pour se terminer en août. Une période qui offre aux visiteurs des conditions idéales pour la randonnée, le vélo, le camping, le canoë-kayak et la pêche. Mais l’activité favorite reste le traditionnel « bania », un sauna à la russe, avec toute la culture qui lui est propre. En hiver, les

touristes peuvent pro� ter des pro-menades en traîneau et de la pêche sur glace.Pour certains, le lac Baïkal sera l’une des escales du voyage à bord du Transsibérien. Le plus souvent, les voyageurs descendent à

Irkoutsk et choisissent le village le plus développé de la région, Listviyanka. Ce lieu est presque devenu le confluent de deux continents, car on y croise de nombreux Asiatiques et Euro-péens. L’île d’Olkhon, située à en-

Surnommé « la perle de Sibérie » et connu dans le monde entier pour ses richesses naturelles, le lac Baïkal demeure un lieu intemporel mais menacé par le développement.

EVA HUALA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

viron 300 km au nord d’Irkoutsk, reste l’un des sites les plus purs et sauvages de la région. Acces-sible en bus ou en taxi, Olkhon est la plus grande des 27 îles qui entourent le lac Baïkal. Pour at-teindre Khoujir, la capitale de l’île, il faut compter une demi-journée sur des routes rocailleu-ses, ainsi qu’une traversée en bac. Pourtant, ceux qui se sont aven-turés sur l’île d’Olkhon ne l’ont jamais regretté. Le temps semble y avoir retenu son souffle, proté-geant ses quelques 1 500 habi-tants de la vie stressante et mou-vementée des grandes villes et de la civilisation. Ici, l’électricité n’est installée que depuis 2005. Les peuples de Sibérie se diffé-rencient des autres habitants de la Russie par leur exposition per-manente aux éléments naturels.

Tourisme Dans son écrin de beauté, le mythique et gigantesque plan d’eau place les visiteurs au contact de la riche culture sibérienne

Ils disent vivre en harmonie avec la nature, respecter les traditions. Sa situation géographique fait d’Olkhon le lieu idéal pour ren-contrer de tels individus, de même que les peuples du Baïkal comme les Bouriates d’Asie. Selon leur culte, le Rocher Chamanka alen-tours serait sacré. En respect pour les croyances locales, les touris-tes ne peuvent pas prendre de photos des chamans ni endom-mager les marquages sur les ar-bres, ou autres symboles sacrés. L’île d’Olkhon offre aussi des pay-sages contrastés : des montagnes rocheuses et des forêts, mais aussi des steppes à perte de vue, et même un petit désert. Mais ces lieux préservés ne sont pas pour autant dépourvus de tout confort : de nombreux hôtels ac-cueillent aujourd’hui les touris-tes, et l’île a son propre musée. Elle offre également des aires de jeux pour enfants, une bibliothè-que comportant des livres en an-glais et en allemand, et un zoo. L’hôtel Nikita, dirigé par Nikita Bentcharov, résident de l’île et fervent écologiste, reste de loin le plus connu de la région. Contrairement aux stéréotypes sur les Russes et la vodka, Niki-ta Bentcharov a privilégié un ac-cueil pour le moins différent de la tradition : l’alcool au sein de l’établissement est interdit. À la place, le gérant offre à ses visi-teurs une délicieuse cuisine si-bérienne, dans la plus pure tra-dition. Les habitués de la vie chère de Moscou sont souvent étonnés par les prix locaux : 750 roubles (20 euros) pour une nuit d’hôtel et trois repas au buffet en libre-ser-vice. Si vous choisissez de pren-dre une chambre au Nikita, vous recevrez un repas offert par l’éta-blissement. Le développement du tourisme dans la région, notamment l’hé-bergement, a cependant contri-bué à la destruction des ressour-ces naturelles. Le risque serait qu’à terme, le tourisme submer-ge l’île et la fasse disparaître. Mais, donnant raison aux ancien-nes légendes, c’est l’esprit du lac qui attire les visiteurs, venus de plus en plus nombreux du monde entier contempler le site et com-munier avec la nature : le signe, peut-être, que quelque chose res-tera éternel...

Le futur super-télescope, qui en-trera en service d’ici six ans, de-vrait offrir une vision plus pré-cise des phénomènes cosmiques. Orienté vers le grand trou noir au centre de notre galaxie, il pourrait en extraire des neutri-nos, ces particules issues de dif-férentes réactions atomiques et porteuses d’informations. « En une année de travail, on ne par-vient à récupérer que quelques dizaines de particules uniques », explique Alexandre Avrorine, in-génieur en chef du projet. Mais elles peuvent fournir nombre d’explications sur la formation du cosmos. Le physicien russe Pavel Tcherenkov a découvert qu’à travers une certaine épais-seur d’eau ou de glace, ces par-ticules émettent une légère lueur

Le lac Baïkal est sur le point d’accueillir l’un des plus grands télescopes du monde, qui devrait aider à percer l’un des mystères de notre galaxie.

Un super-télescope au fond du lacpour scruter les trous noirs du cosmos

L’eau du Baïkal, gelée pendant 6 mois, supportera la plateforme.

ANTON KOUTOUZOVLA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

bleue. Ce qui explique le choix d’un plan d’eau comme base du futur télescope.Les anciens modules n’ont per-mis d’enregistrer que les neutri-nos nés dans notre atmosphère. Le nouveau télescope, perfection-né et 100 fois plus grand, repé-rera des objets plus éloignés. La forme du télescope rappelle celle d’un � let de pêche. Les mo-dules optiques, qui peuvent être

plongés à plus de 1 500 mètres de profondeur, sont disposés sur un � l, comme un énorme collier de perles transparentes. À l’inté-rieur se trouvent des photo-élé-ments qui � xent la lumière des neutrinos et transmettent des in-formations par câble au centre d’analyses, situé près du lac.

Un engin 100 fois plus grand captera la lueur d’objets très éloignés émise dans l’épaisseur aquatique

Ceux qui sont venus sur l'île d'Olkhon ne l’ont jamais regretté. Le temps semble y avoir retenu son souffle

En raison des conditions natu-relles uniques du lac Baïkal, le télescope russe reste moins cher que ses analogues étrangers. Deux télescopes comparables sont déjà en activité dans le monde : An-tares en Méditerranée, construit par la France, la Russie, les Pays-Bas, l’Espagne et la Grande-Bre-tagne, et Amanda en Antarctique,

développé par des spécialistes américains, suédois et alle-mands. Selon Igor Belolaptikov de l’Ins-titut russe des recherches polai-res, l’observation ne peut se faire que dans une direction, et les ob-jets les plus intéressants sont pré-cisément dans la future ligne de mire du télescope du Baïkal.

Les amateurs de voyages ferroviai-res pourront, dès le 14 août pro-chain, embarquer pour « l’Odys-sée transsibérienne », du nom de la nouvelle liaison en train Moscou-Pékin. Le trajet empruntera notam-ment la fameuse ligne historique Krougobaïkalskaïa, construite sur les rives du lac Baïkal.

DÉCOUVERTE

Voyage rétro autour du Baïkal

Tous les détails surlarussiedaujourdhui.be/12242

5 RAISONS

DE SE RENDRE

AU LAC BAÏKAL

1 C’est le plus grand lac d’eau douce au monde et le plus profond. Il abrite 848 espèces

animales et 133 espèces végétales endémiques.

2 Il est l’une des destinations touristiques les plus réputées pour ses circuits aventure :

randonnées pédestres et VTT, bai-gnade, rafting, équitation, excursions en jeep, pêche, ou encore séjour exotique dans une yourte conforta-ble au bord du lac.

3 C’est un lieu mythique à la fois du bouddhisme et du chamanisme en Russie. Des

centaines de visiteurs viennent dé-couvrir les danses rituelles des cha-mans, ou méditer dans un monastère bouddhiste.

4 La route menant au lac Baï-kal vous fera découvrir des paysages splendides et pro-

fiter des équipements offerts par la Sibérie.

5 En 1996, le lac Baïkal a été classé au Patrimoine mondial de l’humanité par l’UNESCO,

et nominé au concours des sept merveilles naturelles du monde en 2008.

Voir un diaporama surlarussiedaujourdhui.be

Le lac Baïkal entre nature et civilisation

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06 LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI www.larussiedaujourdhui.Besupplément réalisé par rossiyskaya Gazeta et distriBué avec opinions

Deux canDiDatures inéluctables

Georgy Bovtspécialement pour

la russie d’aujourd’hui

les analystes politiques de Russie et du monde entier s’interrogent : qui sera le lo-cataire du Kremlin en 2012,

pour six ans contre quatre actuel-lement (en raison d’ un amende-ment à la Constitution, adopté au tout début de la présidence de Dmi-tri Medvedev et portant le mandat présidentiel à six ans, et à cinq ans pour les députés de la Douma) ? Les membres du tandem dirigeant semblent tout faire pour mainte-nir le suspense à son paroxysme. Les observateurs politiques ne ta-rissent pas de commentaires sur les divergences supposées entre Poutine et Medvedev. Les deux hommes se sont retrouvés dans une situation complexe, découlant des particularités de la politique russe. Quand un président sortant ne se représente pas, il se produit une vacance qui n’a rien à voir avec la situation américaine. Ce n’est pas un « canard boiteux » (lame duck), c’est un cheval mort, dont le ca-davre est piétiné. La politique russe est traditionnellement centrée sur le premier personnage de l’État (ou, dans le cas présent, sur les deux premiers personnages). L’ensem-ble de la bureaucratie s’articule non pas autour des institutions, des lois et des règles écrites, mais avant tout autour du Chef, de son style, de ses désirs, ses habitudes, ses caprices, ses points forts et fai-bles. Dès que le Chef part ou lais-se entendre qu’il part, il cesse d’exister. Ainsi, si Medvedev déclare aujourd’hui qu’il ne se présente-ra pas, cela signifiera en pratique que la Russie se retrouvera sans président à un an du scrutin. Si c’est Poutine qui annonce qu’il quitte la politique, cela provoque-ra une situation dans laquelle toute la machine hiérarchique gouvernementale, déjà peu effi-cace, cessera complètement de fonctionner. Une machine, qui plus est, bâtie selon les principes d’une stricte centralisation. Poutine et Medvedev ne le com-prennent que trop bien, et ne sou-haitent visiblement pas prendre un tel risque. Sans oublier qu’ils ont tous deux des ambitions po-litiques et des visées personnel-les sur le siège présidentiel. Une autre question, moins évi-dente, serait de savoir quelle conception les membres du tan-dem avaient de cette situation quand ils l’ont créée en 2008. Comment Poutine avait-il prévu les événements ? Medvedev, « gar-dant au chaud » le siège prési-

candidats au scrutin présidentiel de 2012. Le problème ne réside pas tant dans l’identité des candidats que dans leur message. La priorité du message permettrait de stabiliser le pays, actuellement en proie à de grandes difficultés en raison de la crise mondiale et de la sta-gnation du programme de mo-dernisation. Une campagne opposant Poutine et Medvedev, centrée sur les prin-cipaux points de divergence les séparant, permettrait au pays de maintenir le cap sur son déve-loppement, et de conserver intact son système politique.

dentiel, devait-il quitter volon-tairement le pouvoir, en laissant entendre qu’il ne prétendait pas à un deuxième mandat ? Ce n’est pas un hasard si, au début de la présidence de Medvedev, des ru-meurs laissaient entendre qu’il devait renoncer au pouvoir avant terme, afin d’éviter la perpétra-tion d’un « président impuis-sant ». Mais pourquoi Poutine discréditerait-il la présidence, qu’il avait lui-même conscien-cieusement renforcée et à laquel-le, selon l’hypothèse énoncée plus haut, il comptait revenir ? Pou-tine n’imaginait-il pas qu’en conservant si longtemps le fau-teuil de Premier ministre et, constatant que Medvedev s’ac-quittait de ses fonctions et des engagements pris, il risquait de se retrouver sur le bas-côté bien avant 2012 ? Une telle hypothè-se rend toutefois incompréhen-

sible cette forme d’« exil » pour un homme politique encore re-lativement jeune. Il se peut que le scénario de la « tandemocratie » et la façon d’en sortir en 2012 n’aient pas été pen-sés en détail en 2008. Il se peut que les circonstances aient en-traîné des ajustements imprévus du programme. On ignore par exemple si les deux hommes ont pris en compte un facteur crucial de la politique moderne au sein d’un monde changeant : la lassi-tude de l’électorat face à un pou-voir qui s’éternise. La mentalité moderne privilégie l’évolution permanente. Selon certains son-dages, 25% des Russes préfére-raient que ni Poutine, ni Medve-dev, ne figure dans la liste des

Georgy Bovt est un commenta-teur politique basé à Moscou.

aborDer la Douce province

darrell stanaford

the moscow times

historiquement, Moscou a absorbé la plus grosse partie des investisse-ments et du développe-

ment en Russie. Nulle surprise que 90% des investissements na-tionaux ont été effectués dans la capitale, en 2010. Mais certains signes présagent de la fin de cette hégémonie. Des infrastructures surchargées, une nouvelle équi-pe au pouvoir, avec d’autres prio-rités, et des coûts élevés de vie et de business exorbitants sont autant de facteurs qui poussent les entreprises à explorer la Rus-sie au-delà de Moscou. Grâce à la combinaison des for-ces du marché et de politiques prudentes, en 2020, l’économie sera beaucoup plus moderne, ré-partie avec plus d’égalité à tra-vers le pays. La capitale elle-mê-me en profitera, en devenant une ville où il fait mieux vivre, et par conséquent plus compétitive en tant que centre financier mon-dial. Alors que la Russie entre dans une nouvelle phase de moderni-sation, le mouvement hors de Moscou a déjà commencé, mené par le secteur économique le plus innovant, les TIC. Au moins douze des plus importantes entreprises de TIC ont développé ou déloca-lisé leurs centres de recherche dans des villes de province, dont Accenture à Tver, Hewlett-Pac-kard à Saint-Pétersbourg, Oracle à Saint-Pétersbourg, Novossi-birsk, Toliatti et Riazan, et Intel à Saint-Pétersbourg, Nijni-No-vgorod et Novossibirsk.Pourquoi ? Le facteur clé est la possibilité d’embaucher et rete-nir des employés formés et édu-qués selon les besoins de l’entre-prise. Comme le savent bien les DRH, les meilleures candidatures vien-nent souvent des instituts de haut niveau régionaux. Ces écoles for-ment des spécialistes en s’alignant sur les exigences des établisse-ments moscovites, mais avec des exigences de salaires moindres. Par conséquent, c’est beaucoup plus avantageux de s’installer dans une ville de région, sur le même trottoir que l’institut d'où sortent les spécialistes, sans concurrents et avec un immobi-lier bon marché. En général, le mouvement des mé-gapoles vers les régions commen-ce quand ces dernières offrent un cadre de vie et de travail meilleur. De toute évidence, les entre- prises ont déjà des raisons de vou-loir quitter Moscou. Dans le même temps, le gouvernement est en train de se rendre compte qu’une croissance infinie de la capitale est mauvaise et pour la ville et pour la Russie dans son en semble. En effet, si Moscou veut devenir un centre international moderne

de décision et de finance, elle ti-rera profit d’une pression dimi-nuée sur les infrastructures, d’une baisse de la concurrence parmi les travailleurs au sein d’entre-prises et industries qui seraient économiquement plus efficaces dans d’autres régions, où plus d’investissements sont néces- saires. Qu’ont besoin de faire les régions pour attirer les entreprises ? Les risques et coûts pour les entre-prises doivent être plus attractifs que ceux de Moscou. Les risques sont réduits et les coûts sont calculables quand les infrastructures et le parc immo-bilier sont en place : routes et lo-caux pour les usines ; routes, élec-tricité et fibre optique pour les bureaux. Les régions qui propo-sent cela dans un processus trans-

parent et sans corruption gagnent dans la course aux investisse-ments des entreprises en Rus-sie. Kalouga est devenu l’exemple n°1. Quatre parcs industriels, avec des infrastructures financées par l’État à l’aide d’un emprunt à VEB, alliés à une approche trans-parente d’une équipe impliquée et dirigée par le gouverneur Ana-toli Artamonov, ont attiré plus de 3,5 milliards d’euros d’investis-sements tout en créant un poten-tiel de 25 000 nouveaux em-plois. Des emprunts-logements abor-dables sont essentiels pour ac-croître la mobilité. Les grandes entreprises ouvrent des bureaux et des usines dans les régions, tan-dis qu’une population croissante de professionnels a besoin de toute une série de services mo-dernes. Cette demande, à son tour, représente une opportunité pour le secteur tertiaire, qui appelle ses propres biens immobiliers, infras-tructures et création d’emplois. Ainsi, la spirale économique as-cendante est lancée. Tandis que de plus en plus de régions cherchent à faire les pre-miers pas pour mettre en place les infrastructures nécessaires, elles peuvent déjà attirer les en-treprises qui peuvent convaincre les jeunes talents de rester sur place plutôt que de voler vers la capitale. Les compagnies ne doi-vent donc pas attendre que la Russie se modernise avant de se plonger dans les régions. Leur entrée accélérera la modernisa-tion.

Darrell Stanaford est directeur chez CB Richard Ellis Russie.

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lu dans la presseQuels seront les eFFets de la mort d'oussama Ben laden ?

Le président dmitri medvedev redoute que l’élimination d’ous-sama ben Laden n’ait des réper-cussions sur la sécurité dans son pays, al-qaida opérant aussi sur le territoire russe. La presse s’in-terroge sur les effets réels de cette décapitation du « terroris-me mondial », sur la capacité du monde à affronter le nouvel ordre (ou désordre) qu’il a instauré et sur l’avenir du djihadisme.

une mort symBoliqueLa rédactionvedomosti

un personnaGe secondaire Fedor Loukianovgazeta.ru

Ben laden n’est pas mortMikhail Rostovskymoskovski komsomolets

En Russie, nous savons que la li-quidation d’un Bassaïev n’a pas réduit la terreur dans le Caucase du Nord. La structure en réseau du terrorisme moderne ne repose pas sur une direction centrale - les combattants sont financés par des sources différentes et visent des objectifs ciblés. La mondialisation est aussi celle des méthodes et les kamikazes du métro moscovi-te ressemblent à ceux qui faisaient exploser les bus israéliens il y a 20 ans. Ils n’ont rien à voir avec Al-Qaida et n’ont pas d’objectifs pla-nétaires. La déclaration de guerre au terrorisme mondial remonte à George Bush mais le symbole de ce terrorisme a été éliminé par Ba-rack Obama.

Ben Laden a créé l’image de l’en-nemi idéal, du mal absolu. Tout gouvernement raisonnable se de-vait de soutenir les Américains dans leur volonté d’en débarras-ser la planète. Le leadership des États-Unis, après la fin de la Guerre froide, a revêtu une forme concrè-te. Dix ans plus tard, le « terroris-me international » quitte la scène politique, mais les questions qui troublent l’ordre mondial ne sont pas résolues. Les institutions inter-nationales du XXème siècle sont inadaptées. L’Amérique va devoir chercher de nouveaux moyens d’assurer sa domination. Ben La-den, légende vivante, puis morte, restera dans l’Histoire comme un moment de transition.

Que nous donne la mort de Ben Laden, au-delà de la satisfaction morale ? Les débats sur les consé-quences de cette mort portent en fait sur la vieille querelle du rôle de l’homme dans l’Histoire. Ben La-den a su faire du djihadisme mon-dial un modèle international. Il est moins l’organisateur de la terreur que son idéologue et inspirateur. Il continuera à tuer longtemps après sa mort. Il est devenu le symbo-le de ceux qui ont la vocation du martyre. Le ben-ladisme vivra et vaincra tant que n’apparaîtra pas un anti-Ben Laden, un leader spi-rituel qui pourra apporter une ré-ponse moins sanguinaire aux ques-tions de jeunes gens qui se sentent laissés pour compte.

dans les dix années à venir, on attend une chute drastique de l’afflux des travailleurs régionaux vers moscou

25% des russes préféreraient que ni poutine, ni medvedev, ne soit candidat au scrutin de 2012

medvedev, « gardant au chaud » le siège présidentiel, devait-il quitter volontairement le pouvoir ?

présidentielle de 2012 : qui choisira ?le futur président russe sera-t-il choisi par les électeurs, par le tandem poutine-medvedev, ou par poutine tout seul ?

sondaGe

préparé parveronika dorman

© dmitry divin

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07LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI WWW.LARUSSIEDAUJOURDHUI.BESUPPLÉMENT RÉALISÉ PAR ROSSIYSKAYA GAZETA ET DISTRIBUÉ AVEC Culture

ANASTASIA GOROKHOVALA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

Entre un phallus de près de 65 mètres sur un pont et une voitu-re de police renversée dans la rue, le collectif Voïna donne du fil à retordre aux autorités. Et reçoit un prix officiel !

Place à l’art engagé Art contemporain Un groupe d’artistes replace la politique dans le champ artistique

Rendre à la provocation ses lettres de noblesse. Pour la police péter-sbourgeoise, la nuit du 14 juin 2010, qui a coïncidé avec le 82ème an-niversaire de la naissance de Che Guevara, fut tourmentée. Neuf jeu-nes artistes masqués, vêtus de noir et armés d’un pot de peinture blan-che, prirent d’assaut le pont Li-teyni de Saint-Pétersbourg. Il ne leur fallut que 23 secondes (sur les 40 que prend le levage des ponts de la ville le soir) pour y peindre un énorme phallus de 65 mètres, lequel s'est ainsi dressé juste en face du siège du FSB (ex-KGB) local.

L’action « révolution du palais »Revendiquée par les activistes du collectif artistique Voïna (« la guerre »), l’œuvre intitulée « Pénis prisonnier du FSB » � t la une des journaux. Si les autres actions du collectif comme « Partouze au Musée biologique » ou « À l’as-saut de la Maison Blanche » ont moins fait couler d'encre, cette fois, les exécutions des jeunes ar-tistes attirèrent l’attention du pays tout entier.Créé en 2007, ce collectif d’une soixantaine de membres est di-rigé par le philosophe Oleg Voro-tnikov et sa femme, la physicien-ne Natalia Sokol, ainsi que Leonid Nikolaev, un ex-employé de bureau. Ce dernier a passé 48 heures au poste de police, puis il a été relâché, accusé de vanda-lisme léger. Difficile d’intimider le jeune homme. Peu de temps après, Leonidiona le dingue (son surnom) a été � lmé grimpant sur

Banquet dans le métro de Moscou en l'honneur du poète et artiste Dmitri Prigov.

Leonid Nikolaev, un seau bleu sur la tête pour singer le gyrophare des autorités, bloque une voiture officielle au pied du Kremlin.

sévir. Oleg et Leonid ont passé quatre mois en détention provi-soire. Sans la lourde caution ver-sée par le célèbre artiste de rue britannique Banksy, ils seraient encore derrière les barreaux. Ils sont en attente de jugement.

Un débat agité sur l’art« Voïna ne fait que re� éter l’opi-nion du peuple », explique le phi-lologue Plutser Sarno, lui aussi membre du collectif artistique, mais qui désormais ne participe que de manière passive aux ac-tions du groupe.Sur Internet, une polémique est née lorsque des artistes qui n’avaient rien à voir avec Voïna prirent l’initiative de nominer son œuvre phallique pour un prix na-tional organisé par l’État : celui de l’Innovation... qui lui a été at-tribué ! Andreï Erofeev, respon-sable de l’exposition « Attention ! Religion ! », lui aussi récemment appelé à comparaître devant un tribunal, a déclaré : « Un graffiti géant, c’est un symbole de pro-testation digne d’un prix ». Les militants de Voïna ont boycotté la remise de ce prix décerné par le ministre russe de la Culture, ennemi juré du collectif. De son côté, le ministère a souligné qu’il n’avait pas pris part aux délibé-rations ni au choix du lauréat. De grands artistes russes se sont joints à la polémique. Le peintre Ilya Glazounov, dont la galerie est située dans l’enceinte du Kremlin, s’est indigné : « Dessi-ner un sexe sur un pont, de l’art ? Cela n’a rien à voir avec l’art ! ». Mais le critique d’art Joseph Backstein voit les choses autre-ment : « Les actions des groupes artistiques ne sont pas toutes uni-voques. Beaucoup ont un carac-tère provocateur, mais Voïna ren-voie à la Russie des signaux forts ». Oleg Vorotnikov enfonce le clou : « Nous voulons bouscu-ler la société ».

une voiture officielle au gyropha-re bleu, un seau bleu sur la tête. Une dénonciation burlesque de l’abus de pouvoir quotidien de milliers d'officiels russes qui, à l'aide de leur gyrophares, enfrei-gnent le code de la route et pro-voquent régulièrement des acci-dents graves.À ce jour, son plus gros coup a été réalisé sur la place du Palais de Saint-Pétersbourg pour dé-noncer la réforme du ministère

de l’Intérieur. Un soir, le � ls de deux ans d’Oleg et Natalia jette son ballon sous une voiture de police. Pour le récupérer, quatre activistes du collectif renversent le véhicule. On ne sait combien de voitures ont subi le même sort cette nuit-là. Le but des artistes: réformer à leur manière la poli-ce. L’affaire a donné lieu à des poursuites judiciaires. Après avoir feint l'indifférence, les autorités ont donc décidé de

La Tête de mon père est le cin-quième roman d’Elena Botchori-chvili, jeune auteure russophone d’origine géorgienne et émigrée au Québec, tout comme le narra-teur, auteur de cette longue lettre en réponse à son � ls, conduit en Géorgie pour son voyage de noce et qui veut en savoir plus sur ses racines. Point de départ des sou-venirs, une blessure : « Entre le pays où je suis né et moi il n’y a pas des années et des distances, il y a la mort de mon père, sa tête enterrée séparément de son corps sous un arbre arraché avec ses racines dans un village qui n’exis-te plus… Ce sentiment me déchi-re en morceaux ».Ce sont pourtant des moments de vie lumineux que le narrateur choisit ensuite d’évoquer : ses pa-rents, couple improbable, dont l’insouciance et la fantaisie rap-pellent les héros de Fellini ; la mère, interprète d’un rôle unique et sulfureux, autant que le per-mettait le cinéma de l’époque, « la plus grande de toutes les actri-

CHRONIQUE LITTÉRAIRE

Roman en noir et blanc

Christine Mestre

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TITRE : LA TÊTE DE MON PÈREÉDITIONS : BORÉALAUTEUR : ELENA

BOTCHORICHVILITRADUIT PAR BERNARD

KREISE

ces méconnues » ; le père, « citoyen soviétique on ne peut plus ordinai-re », rédacteur de discours officiels qui, un jour, ne revient pas d’une banale promenade et dont la tête est enterrée à quarante pas de la datcha qu’il a reconstruite avec les rondins de sa maison natale. Le narrateur déroule le � lm des souvenirs en noir et blanc comme son sentiment de haine et d’amour pour l’URSS, comme la relation orageuse des parents, entre dispu-tes et réconciliations, comme le ci-néma de l’époque auquel il fait ré-férence, comme la nostalgie d’un temps révolu, comme l’URSS même : « Dans le � lm noir et blanc de l’Union soviétique… les gens travaillaient tous ensemble, ils étaient joyeux… Un sentiment d’unité et d’égalité face à notre ave-nir, un sentiment de désolation et d’impasse nous unissait. Et la joie de vivre pouvait atteindre des som-mets incroyables… ce sentiment d’unité entre les gens, quelle que soit son explication, me manque. Cette frénétique joie de vivre me manque ».La forme « sténographique » (ainsi que l’auteure dé� nit ses romans) permet le « montage » cinémato-graphique d’une narration parfai-tement adaptée aux chamboule-ments de l’Histoire et aux mécanismes de la mémoire : dis-continuité, oublis, répétition d’ima-ges, d’objets, de bouts de phrases qui reviennent en boucle, points d’ancrage emblématiques qui cam-pent les personnages et contribuent à donner son charme à ce court roman qui évoque des pans tragi-ques de l’Histoire avec la légèreté, la drôlerie et la poésie d’un � lm d’Otar Iosseliani.

À L’AFFICHEEXPOSITION DE L'ASSOCIATION" LE CARRÉ DU SOLEIL "JUSQU’AU 5 JUINCENTRE CULTUREL ET SCIENTIFIQUE RUSSE, BRUXELLESL'Association Internationale des Artistes Peintres "Le car-ré du Soleil" réunit une cen-taine d'artistes, de renommée internationale pour certains, et représentatifs d'une gran-de variété de courants artisti-ques, du post-modernisme à l'abstrait ou à l'expressionisme. Présentant de nombreuses ex-positions à l'international, c'est cette fois au Centre Culturel et Scientifique de Bruxelles que l'organisation viendra présen-ter les œuvres de ses mem-bres. Une occasion de décou-vrir des peintres, débutants ou chevronnés, de différents ho-rizons.

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PANORAMA DU CINÉMA RUSSE DOCUMENTAIREDU 6 AU 10 JUINCENTRE CULTUREL ET SCIENTIFIQUE RUSSE, BRUXELLESDans le cadre du Festival in-ternational du film documen-taire « Millenium » organisé en Belgique, le Centre culturel et scientifique pour la Russie de Bruxelles présente un panorama du cinéma russe documentai-re avec une projection de réa-lisations contemporaines. Une rencontre avec Pavel Petchen-kine, réalisateur et président du Festival international de ci-néma documentaire de Perm « Flahertiana » dédié à Robert Flaherty qui réalisa en 1922 le premier essai du genre, aura également lieu.

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MORITZ GATMANLA RUSSIE D'AUJOURD'HUI

L'illustre monument de l'opéra russe sera bientôt inauguré après de très longs travaux de rénovation. Les polémiques se sont enchaînées pendant que les mélomanes s'impatientaient.

Le Bolchoï est restauré, l'addition astronomique

Architecture Le théâtre lyrique doit rouvrir en octobre après 6 ans de travaux

porteurs », raconte Mikhail Sido-rov, le porte parole de la société Summa Capital, en charge du pro-jet de rénovation depuis 2009. « Il y avait un vrai danger d’effon-drement », ajoute-t-il. La première phase de reconstruc-tion a donc consisté dans un pre-mier temps à sauver le bâtiment. Sept mille pieux en acier ont été enfoncés dans le sol, les fonda-tions ont alors pu être retirées. « Le bâtiment tout entier � ottait dans l’air », explique Sidorov. Les nouvelles fondations ne furent achevées qu’en septembre 2009, date à laquelle les pieux purent en� n être retirés. À partir de ce moment-là, le chantier s’est trans-formé en une véritable fourmi-lière, avec quelque 3 200 ouvriers attelés au même projet, en plein coeur de Moscou, à deux pas du Kremlin. Le théâtre sera doté de la plus grande scène hydraulique d’Eu-rope. Fabriquée par la société al-lemande Brosch Rexroth, elle s’étend sur une surface de 21 mè-

Au cours de son illustre histoire, le Théâtre du Bolchoï a vu dan-ser Maya Plisetskaya, chanter Féo-dor Chaliapin et déclamer Léni-ne. Il y a près de six ans, un projet de rénovation de grande envergure débutait pour remet-tre à neuf le monument mythi-que érigé en 1776. Mais c’est seu-lement en mai 2009 que les travaux ont réellement démarré. Le théâtre rouvrira ses portes le 28 octobre 2011.La restauration du monument a été longue et parsemée d’embû-ches. Des rénovations partielles et inadaptées ont causé des dom-mages terribles. « Il y avait d’énor-mes � ssures de plus de 30 centi-mètres de longueur sur les murs

tres carré. À cette occasion, la fosse d’orchestre a également été agrandie et pourra désormais abriter 130 musiciens.Concernant la décoration inté-rieure, le plan de rénovation vi-sait à recréer l’atmosphère du théâtre durant son apogée au 19ème siècle. Emblèmes du Parti et revêtements de sol soviétiques ont été remplacés par les armoi-ries du Tsar et un parquet en chêne massif. Le nombre de siè-ges dans le hall principal a été ramené de 2 100 à 1 700 places. Début 2009, Dmitri Medvedev

con� a personnellement la tâche à un conseiller, avec pour consi-gne d’achever le théâtre d’ici 2011. Dans le courant de la même année, des poursuites judiciaires ont été engagée à l’encontre de plusieurs parties pour dilapida-tion des ressources. La Cour des comptes russe a statué que les coûts pour la restauration du pro-jet avaient explosé plus de 16 fois le budget initial prévu. Le sus-pense est toujours total sur le coût � nal de ce projet. Il y a encore peu, certaines estimations le chif-fraient à 1,5 milliards d’euros.

Le célèbre théâtre rouvrira ses portes en octobre 2011.

LA JOURNÉE DU RUSSELE 6 JUINCENTRE CULTUREL ET SCIENTIFIQUE RUSSE, BRUXELLESCette manifestation est dédiée à la langue russe mais aussi à la cultu-re et à l'histoire de la Russie. Un concours de langue, d'histoire et de culture est ainsi organisé parmi les auditeurs des cours de russe du Centre culturel et scientifique de Russie de Bruxelles. Une projection du film " Le Russe - première lan-gue de communication dans l'es-pace " est également prévue. Enfin l'évènement sera aussi l'occasion de visiter deux expositions : la pre-mière sera réservée aux livres is-sus de la littérature classique et contemporaine et la deuxième pré-sentera tableaux et photographies autour du thème de l'histoire de la langue et de la littérature.

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« RENDEZ-VOUS AVEC LA RUSSIE »LE 12 JUINBRUXELLESLa journée « Rendez-vous avec la Russie » propose une rencontre multilingue et inter-culturelle afin de mieux connaître et apprécier les différentes cultures, leurs influen-ces et apports réciproques à tra-vers un programme varié alliant concerts, expositions, ateliers et artisanat. Un Concert de Gala aura lieu à 17h avec entre autre la vio-loniste Polina Lapteva et le saxo-phoniste Frank Vaganée. Une ex-position d’art décoratif appliqué, une cérémonie d’habillage du Man-neken Pis en costume russe et une dégustation de plats traditionnels complèteront ce voyage.

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Page 8: La Russie d'Aujourd'hui

08 LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI WWW.LARUSSIEDAUJOURDHUI.BESUPPLÉMENT RÉALISÉ PAR ROSSIYSKAYA GAZETA ET DISTRIBUÉ AVEC Loisirs

Assaut créatif sur les usines en fricheArt L’apparition de centres artistiques génère une nouvelle économie extrêmement dynamique

Ces entreprises sont souvent � nan-cées par de richissimes mécènes comme Alexandre Mamut et Ser-guei Adoniev (Strelka). D’autres (Artplay et Winzavod) affichent des résultats équilibrés en sous-louant leurs locaux. De vastes espaces d’exposition ac-cueillent des rétrospectives pres-tigieuses (Ilya Kabakov en 2008 à Winzavod) ou des expos-ventes pour artistes débutants : le salon annuel « Student Artfair » de Art-play expose des étudiants, en sol-licitant galeristes, experts et mé-dias. Ces clusters réunissent des professionnels sous les mêmes toits

Winzavod est une oasis exubéran-te au cœur d’un quartier indus-triel lugubre proche du centre. Bri-ques rouges et architecture industrielle, graffitis et jeunes branchés, c’est l’un des clusters ar-tistiques de la capitale, né dans la foulée des Biennales d’art contem-porain de 2005 et 2009 et fondé sur le modèle occidental de la transformation d’une fabrique abandonnée en un haut lieu cultu-rel. Moscou, jadis capitale mon-diale du prolétariat, abrite nom-bre d’usines désaffectées, souvent situées dans le centre ville, car la mégapole a depuis longtemps avalé ses premières couronnes. L’État n’a pas encore mis en route de politique économique et cultu-relle pour une « industrie créati-ve » en Russie, fondée notamment sur la petite et moyenne entrepri-se, explique Elena Zelentsova, di-rectrice de l’agence de conseil Industries créatives. Ce qui n’em-pêche pas l’essor de divers centres artistiques d’un type nouveau pour le pays, hybrides, polyvalents, ré-solument modernes. À Moscou, Winzavod, Strelka, Artplay, Ga-rage, Proekt Fabrika ou encore Flakon, ont investi avec succès des fabriques, s’appropriant des mil-liers de mètres carrés de hangars.

et ambitionnent de sortir la Rus-sie de son « provincialisme cultu-rel » pour l’intégrer à la scène in-ternationale. Ils entendent promouvoir et populariser l’art contemporain et ses applications. L’innovation et le design, leur va-leur marchande, et les probléma-tiques socio-économiques conne-xes, sont le ressort de spécialistes qui se sont investis d’une mission civilisatrice. L’Institut média, de-sign et architecture Strelka, pré-sidé par Ilya Oskolkov-Tsentsiper, a ouvert l’an dernier un program-me d’enseignement supérieur. « Avant de pouvoir parler d’une

industrie, il faut former une cou-che solide de professionnels de haut niveau », explique-t-il, ins-tallé dans le café cossu de Strel-ka, autour duquel se structure la vie du centre, tissée de manifes-tations ouvertes au public. « Notre système éducatif ne prépare pas à penser globalement. Nous fai-sons appel à des spécialistes de renommée mondiale, Rem Kool-haas ou Reinier De Graaf ». Mais il ne suffit pas de former des créateurs performants. Il faut aussi instruire la société dans son en-semble et susciter une demande pour ces produits nouveaux.

Winzavod. Fondé en 2007, dans une ancienne brasserie et dirigé par Sofia Trotsenko, ce centre d’art contem-porain se consacre à tous les arts visuels, en réunissant des galeries privées, des showrooms et des boutiques.

Strelka. L’Institut médias, architecture et design occupe l’un des bâti-ments d’une splendide ancienne usine de chocolat, Octobre rouge.

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« Nous devons éduquer le regard. L’art contemporain ne va pas de soi », explique Alena Saprykina, directrice artistique d’Artplay, qui rassemble les grandes agences de design et architecture. Les clus-ters accordent une place de choix aux projets interactifs a� n de ne pas devenir des réserves introver-ties d’experts, mais des fabriques culturelles populaires, des lieux ouverts de transmission. Malgré tous ces obstacles, les cen-tres moscovites sont en dévelop-pement constant. Le centre de ré-� exion Strelka a été choisi par la mairie de Moscou pour l’aider à la restructuration de l’immense parc Gorki. « Il y a deux ans, nous avions l’impression d'être les seuls à avoir besoin de cette aventure. Ni la société, ni les autorités n’étaient particulièrement intéres-sées », se réjouit Ilya. « Le pouvoir comprend qu’il faut évoluer, se mo-derniser, mais il ne sait pas com-ment s’y prendre, et c’est là que nous intervenons ».

VERONIKA DORMANSPÉCIALEMENT POUR LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

Depuis quelques années, la Russie s’est éveillée au concept d’industrie créative. Les projets de réhabilitation des friches industrielles se font une place dans le monde des affaires.

GALINA MASTEROVALA RUSSIE D'AUJOURD'HU

Sur les rives de la Moskova, le site de la célèbre chocolaterie « Octobre Rouge » offre un délicieux mix de jolies filles et de clubs branchés. Mais gare aux videurs !

Derrière l'épauledu physionomiste, le paradis

Vie nocturne Descente dans les clubs les plus chics de la trépidante nuit moscovite

presse ce soir semble indiquer le contraire. L’entrée est gratuite, mais la sé-lection est féroce. Le club est connu pour son « face control » impitoyable, un anglicisme deve-nu le maître mot des nuits mos-covites. Votre chance dépend du physionomiste, qui d'un coup d'oeil détermine ce que vous êtes en mesure de claquer ce soir. Une belle jeune femme s’appro-che de l’entrée du « Raï » et scru-te le videur Vladimir du regard.« Pouvez-vous nous laisser entrer, moi et mon amie », demande plaintivement la jeune femme. « Je voudrais aller à l’espace VIP ». « Vous pouvez entrer, mais vous devez réserver une table », ré-pond-il. Une table coûte au mi-nimum 1 250 euros. « On a mal aux pieds », gémit-elle, consciente que mis à part le coin VIP, il n’y a nulle part où s’as-seoir. « Où est ton amie ? Peut-être qu'elle ne va pas me plaire »,

Nous sommes samedi, il est 2 heu-res du matin. Un cortège de 4x4, de luxe et de voitures sportives rutilantes longe l’usine de cho-colat désaffectée et transformée en club le plus « hype » de la ca-pitale. Un lieu dégoulinant d’opu-lence, qu’un blogueur a surnom-mé, « le cauchemar d’un enfant de 7 ans qui a mangé trop de bon-bons et s'est endormi ». Perchées sur leurs talons aiguilles, vertigineux, des centaines de � lles se pressent vers l’imposant bâti-ment en briques rouges. Certains disent que le « Raï », qui signi� e paradis en russe, n’est plus la boîte la plus chaude de Moscou. La longue file d’attente qui se

rétorque Vladimir. La nuit moscovite, heureusement, est variée. À deux pas du « Raï », le « Rolling Stone Bar & Tattoo » est un club rock où le risque n'est pas d'être rejeté mais, si vous

buvez trop, de vous retrouver dans le salon de tatouage. Juste après la crise, les clubs se sont mis à fermer les uns après les autres. Très vite, les magnats de l’immobilier y ont vu des op-

Dans la salle principale du club « Raï »...

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portunités, et ont commencé à in-vestir les locaux. « Les prix ont baissé, c’est pourquoi des clubs ouvrent leurs portes », explique le videur du « Rolling Stone Bar », Fillip Alexeev, qui avoue gagner 5 600 euros par mois pour deux jours de travail par semaine. « C’est un boulot dangereux », prévient-il. « Je reçois des mena-ces de mort, les gens menacent de m’attendre à la sortie de mon travail. Des gardes du corps me raccompagnent chez moi après mon travail ». Pour ceux qui préfèrent une am-biance plus démocratique et moins branchée, il existe des lieux comme le « Mayak », un bar relié au Théâtre Maïakovski. C'est le lieu de prédilection des journa-listes et des acteurs.Quelques heures avant la ferme-ture du club, Vladimir surveille les noceurs désireux d’entrer au « Raï ». Certains sont encore plein d’espoir, d’autres emplis d’arro-gance. Deux jeunes hommes aux montres un peu trop lourdes pour leurs poignets chétifs s’appro-chent jusqu’à la grille. Quand Vla-dimir leur crie que l’accès est re-fusé, l’un deux lui lance : « Je connais le propriétaire du club depuis des années. Sais-tu qui est mon père ? ». L’autre, Adam, se frotte le pouce et l’index pour dé-

signer l’argent, et demande « pou-vons-nous résoudre ce problème à la manière de Tchékhov ? ». Vla-dimir comprend l’allusion mais refuse le bakchich.

L'heure de fermetureIl est maintenant 6 heures du matin, et presque tous les clubs de Moscou ont fermé leurs por-tes. Quelques fêtards se dirigent vers « Krisha Mira », le Toit du Monde en russe. Au sommet d’une usine désaffectée, le club donne

une vue imprenable sur la Mos-cow-City, le centre � nancier de la capitale. Difficile de mettre � n à cette nuit de folie, même si dans ce club, un cocktail Cuba Libre coûte 15 euros. Alors que le so-leil pointe ses rayons, les derniers fêtards viennent � nalement s’ef-fondrer sur les banquettes arriè-res des taxis, les jeunes � lles, leurs talons aiguilles à la main.L’entrée est libre. Mais, comme vous l'avez déjà compris, les pla-ces sont chères.

Artplay, le pionnier du genre, a été fondé en 2003 par l’architecte Ser-guei Dessiatov. Il est Installé depuis 2009 dans l’ancienne usine Mo-nomètre, et rassemble architectes, designers et urbanistes.Garage, fondé en 2008, ce « Cen-tre de la culture contemporaine » est le plus à la mode. Proekt Fabrika partage les lieux avec une usine de papier encore en activité et héberge des ateliers et agences de tous les horizons.Flakon : à partir de 2009, cette an-cienne usine de verre se transfor-me en zone mixte de business et de création, partagée entre espa-ces d'événementiel, bureaux, agen-ces de pub et de design, studios d’enregistrement et show-rooms.

ZOOM

Les principaux clusters créatifs :

Votre chance dépend du physio, qui d'un coup d'oeil détermine ce que vous êtes en mesure de claquer

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