LE TROUBLE PANIQUEAVEC OU SANSAGORAPHOBIE
Docteur Christophe AndréService Hospitalo-Universitaire
Centre Hospitalier Sainte-Anne, Paris
TROUBLE PANIQUEDonnées récentes sur la clinique et la prise en charge
Plan
- Clinique du trouble panique
- Science du trouble panique
- Traitement du trouble panique
- Alliance thérapeutique dans le trouble panique
Trouble panique:De quoi s’agit-il?
Le Trouble Panique (TPA)• Attaques de panique (AP)
récurrentes etinattendues
• Au moins 1 AP est suiviede :– Crainte persistante d’avoir
une autre AP= anxiété anticipatoire
– Préoccupations à propos• Des implications possibles
de l’AP• Des conséquences de
l’AP– Changement de
comportementDSM IV-TR
Damoclès de Richard Westall : (1812)
L’attaque de panique (AP)• Période bien délimitée
• de crainteou
• de malaise intense• Peur de perdre le contrôle
• Survenue brutaleacmé en moins de 10 min.
• Nombreux symptômes :au minimum 4 sur une liste de 13
DSM IV-TR
Symptômes de l’AP
1. Palpitations2. Transpiration3. Tremblements ou
secousses musculaires4. Sensation de souffle
coupé ou impressiond’étouffement
5. Sensationd’étranglement
6. Douleur ou gênethoracique
7. Nausée ou gêneabdominale
8. Sensation de vertige,d’instabilité, de tête vide, ouimpression d’évanouissement
9. Déréalisation oudépersonnalisation
10. Peur de perdre le contrôle desoi
11. Peur de mourir12. Paresthésies
(engourdissement,picotements)
13. Frissons ou bouffées de chaleur
Fréquence des symptômes de l’AP• Palpitations, battements de cœur ou accélération du rythme cardiaque 90%• Sensation de “ souffle coupé ” ou impression d’étouffement 81%• Sensation de vertiges, d’instabilité, de tête vide 70%• ou impression d’évanouissement• Transpiration 69%• Frissons ou bouffées de chaleur 64%• Douleur ou gène thoracique 62%• Peur de mourir 60%• Tremblements ou secousses musculaires 58%• Peur de perdre le contrôle de soi ou de devenir fou 56%• Paresthésies 51%• Sensation d’étranglement 51%• Nausées ou gène abdominale 40%• Déréalisation ou dépersonnalisation 33%
Servant D et al. 2000
TPA & AgoraphobieA. Anxiété liée au fait de se retrouver dans des endroits ou
des situations d’où il pourrait être difficile ou gênant de s’échapper dans lesquelles on pourrait ne pas trouver de secours en cas
d’AP
B. Les situations sont Évitées Subies avec souffrance intense, des symptômes de panique Nécessitent la présence d’un accompagnant
DSM IV-TR
TPA =Évolution–complication « quasi naturelle » du TP
Un peu de science: lesdonnées actuelles de la
recherche
Qui, quand, avec quoi ?Prévalence• Femmes : 3,4 %• Hommes : 2,6 %
Evolution• Début 20-30 ans• Alternance phases
d’aggravation etd’accalmies
• Chronicité sur 15-20ans, puis atténuationprogressive
Comorbidité• Dépression (x30)• Autres troubles
anxieux• Alcoolo-dépendance
(x7)• Dépendances aux
benzodiazépines
Pélissolo & Lépine (2001)Alonso et al. (2004)Goodwin et al. (2005)Lépine et al. (2005)
Combien? Quels risques?Handicap• Parmi les cinq
troublespsychiatriques lesplus invalidants
• Handicapprofessionnel
• Altération de laqualité de vie
• Consommation desoins etd’examens
Complications• Agoraphobie• Dépression• Addictions
Mortalité• Tentatives de
suicide 42% (sansdépression : 17%)
• Mortalité cardiaquex10
• Risque d’AVC x11
Lépine & Pélissolo (1999)Alonso et al. (2004)Goodwin et al. (2005)Kawachi et al. (1994)Weissman et al. (1990)
Recherches neuro-biologiques
• Facteurs génétiques ?– Sur-risque familial bien établi (études familiales)– Sur-risque génétique bien établi (études de jumeaux)– Pas d’identification de gènes spécifiques actuellement
• Bases cérébrales ?– Imagerie cérébrale difficile (claustrophobie)– Quelques anomalies anatomiques– Repérage de régions dysfonctionnelles dans les circuits
de la peurGorman et al (2000)Pélissolo et Cohen-Salmon (2003)
Retentissement social du TPACoût individuel et collectif
• TPA plus invalidant que nombre demaladies physiques chroniques (diabète,hypertension, de maladies rhumatismales oucardiaques).Ceci intervient par le biais de la détresse émotionnelleinduite.
• Altération de la qualité de vie• Surconsommation de soins• Absentéisme professionnel• Réduction de la productivité au travail
Trouble Panique avec ou sansagoraphobie
Quels choix thérapeutiques?
Quels antidépresseurs prescrire?
• Traitement doit être poursuivi 12 à 12 moisaprès traitement aigu
• Molécules ayant en France l’AMM- Citalopram (ISRS)- Clomipramine (Tricyclique)- Escitalopram (ISRS)- Paroxétine (ISRS)- Venlafaxine (ISRSNa)
APA Guidelines Watch 2006
Les TCC• Plusieurs techniques associées
- information- exposition aux sensations physiques et in vivo- thérapie cognitive- contrôle respiratoire et relaxation
• Programme structuré (12 à 20 séances hebdomadaires).
• Pratique nécessite une formation
TCCComment ? Pourquoi?
• Exposition
• Thérapie cognitive
Servant D. 2007
• Habituation auxsensations physiques
• Désensibilisation
• Identification despenséesdysfonctionnelles etalternatives
• Modification descroyances erronées
Contrôle respiratoire et relaxation
• Techniques qui peuvent proposées en MG et enpsychiatrie
• Support self help (ouvrages, CD…)• Relaxation musculaire progressive le plus
souvent proposée• Intérêt de techniques de relaxation associant
également une approche cognitive des émotionset des pensées anxieuses
Ost et al 1995, Calbring et al 2001
L’exposition
• Exposition aux sensation redoutées : déclencher dessensations physiologiques activatrices de panique, pourapprendre à les maîtriser (dyspnée et tachycardie parl’hyperventilation, vertiges par position ou mouvement…)
. Exposition aux situations (surtout si évitement phobique) : - Hiérarchiser les situations redoutées et évitées , choisir
la situation la moins anxiogène - Exposition graduée en imagination (faire décrire le
scénario), in vivo ( accompagné du thérapeute), parprescription de tâche (le patient seul)
- Aborder une autre situation
La thérapie cognitive
• Modèle de Clarck de la spirale de la panique• Décrire les pensées automatiques et les scénarios
catastrophes associés à la panique• Questionnement socratique pour les tester les
probabilités et les risques liés à ces scénarios• Elaborer d’autres pensées à partir d’un tableau à
colonnes (situations –pensées automatiques - penséesalternatives)
• Modifier les croyances anxieuses concernant lasurvenue d’une attaque de panique
• Clarck 1986
Spirale de la panique :La peur qui fait peur!
( Clark, 1986)
Appréhension
Sensations corporelles :Accélération durythme cardiaqueet de la respiration (hyperventilation)
Interprétations deces sensations
comme catastrophiques : distorsions cognitives
Perceptiond’une
menace
Agent(interneouexterne)
COMBIEN DE PATIENTS GUÉRISSENT?
• 50% à 70% de patient « panic free » à court terme (2-3 mois).
• Réduction de l’anxiété globale des symptômesdépressifs et amélioration de la qualité de vie.
• Etude naturalistique sur le long terme :– 50% de réponse à 9 mois après arrêt du
traitement,– rechutes à long terme assez fréquentes.
« EN SÉANCE »Psycho-éducation
et alliance thérapeutiqueavec le patient paniqueur
« Je restais là figé, impuissant,frissonnant, conscient pour lapremière fois d’avoir été frappé nonpar de simples angoisses, mais parune maladie grave… »
William Styron, Face aux ténèbres
TROIS GRANDS OBJECTIFSLORS DES PREMIÈRES CONSULTATIONS
1) Poser les bases de l’alliance, en montrant au patient que l’onconnaît bien son trouble :
- informations sur la clinique,- informations sur les causes.2) Impliquer dans le traitement :- informations sur les mécanismes,- informations sur les médicaments.3) Poser les bases du suivi au long cours :- inciter à l’observance,- rappeler les efforts personnels à accomplir.
Consacrer un temps spécifique à ces informations et leur discussion.
1) Poser les bases de l’alliance :INFORMATIONS SUR LA CLINIQUE
DU TROUBLE PANIQUE
• Les starters des malaises anxieux :- sensations physiques, émotions ou pensées (cognitions) désagréables,- situations qui génèrent ces sensations, émotions ou pensées.
• Les attaques de panique:- débutantes (« début de malaise »),- avérées.
• Le trouble panique :- anticipation et inquiétudes à propos des crises à venir.
• L’agoraphobie :- la tentation des évitements.
Illustrer ces différents élémentsavec les propres symptômes du patient.
1) Poser les bases de l’alliance :INFORMATIONS SUR LES CAUSES
DU TROUBLE PANIQUE
Comment expliquer au patient un modèle étiologique complexe etpolyfactoriel ? En utilisant par exemple par le modèle bio-psycho-social…
« Bio » : une vulnérabilité organique ? (par ex. de légersdysfonctionnements de l’oreille interne…)
« Psycho » : une hyperpersensibilité émotionnelle ? (par ex. la « peur de lapeur ») et/ou intéroceptive ? (la notion de « phobie intéroceptive » avecréactivité immédiate par ex. à la tachycardie ou aux sensationsvertigineuses)
« Social » : rôle des événements de vie précipitants ? (stresseurs dansl’année qui a précédé la première attaque) ou chronicisants ? (conflitconjugal)
Rappeler au patient qu’il est nécessaire d’intervenirsur les trois familles de causes.
2) Impliquer dans le traitement :INFORMATIONS SUR LES MÉCANISMES
DU TROUBLE PANIQUE
• L’amplification des sensations physiologiques par la spiralepanique (cf. schéma, à présenter et commenter avec le patient).
• Les évitements (situationnels et subtils).
• Le conditionnement à partir des premières attaques (« faussesalarmes »)
• Le rôle chronicisant des évitements.
• L’aggravation des symptômes par la fatigue, le stress, lesconflits, etc.
Rappeler l’importance de travailler sur ces facteurs de maintiendu trouble et pas seulement sur la recherche des causes.
ÉVITEMENTS SUBTILSDANS LE TROUBLE PANIQUE
• Modifications du style de vie au quotidien : choix deshoraires (courses aux heures creuses), des trajets(routes où l’on peut s’arrêter), des lieux (sièges en boutde rangée au cinéma), etc.
• Comportements de réassurance : médicaments dans lapoche, téléphone portable, présence de tiers…
• Distraction : lecture, musique, discussion…
Le patient n’en a pas toujours une conscience claire :les lui faire repérer et lister. Et commencer à lui expliquer
qu’il va falloir peu à peu y renoncer…
2) Impliquer dans le traitement :INFORMATIONS SUR LES MÉDICAMENTS
DU TROUBLE PANIQUE
Familles de médicaments : IRS, BZD.
Nécessité d’une attitude active du patient (« lesmédicaments ne guérissent pas à eux seuls, mais vousaident à vous guérir »).
Aborder les éventuels effets indésirables, et la marche àsuivre en cas de survenue (les patients paniqueurs sonttrès sensibles à ces effets).
Éviter les prescriptions « orphelines », en proposant auminimum des conseils sur efforts à conduire au
quotidien par le patient, et à chaque fois que possible,une psychothérapie.
3) Poser les bases du suivi au long cours :INCITER À L’OBSERVANCE
Clarifier le rôle des médicaments : soulager dans l’immédiat, puisaider ensuite, sur la durée, à « cicatriser » psychologiquementet à « reconquérir le territoire ».
Insister sur la nécessité d’une bonne observance.
Parler de la possibilité de « retours de la peur », aprèsl’amélioration initiale.
Souligner que c’est normal, en proposant des comparaisons àpropos de la vulnérabilité : cf. les lombalgies récidivantes…
Rappeler qu’en comprenant et acceptant ces « retours de peur »,et en y faisant face (consulter, reprendre efforts d’hygiène de
vie…), ils sont alors surmontables.
3) Poser les bases du suivi au long cours :EFFORTS PERSONNELS À ACCOMPLIR
PAR LE PATIENT
• Supprimer ou diminuer café, tabac et excitants.• Exercice physique.• Limitation de l’impact du stress quotidien (voir
psychothérapies).• Bibliothérapie.• Associations de patients (Mediagora).
S’impliquer dans ces conseils, consacrer dutemps à les planifier dans le quotidien du
patient (où, quand, comment ?). Les présentercomme des facteurs favorisant le maintien des
résultats thérapeutiques.
Diapo à mettre en BUQUELQUES RECOMMANDATIONS DE LECTURE
SUR LE TROUBLE PANIQUE(* = livres d’aide pour patients)
* André C. Psychologie de la peur. Odile Jacob 2005.
* Émery JL. Surmontez vos peurs. Odile Jacob 2000.
Orlemans H et Van den Bergh O. Phobies intéroceptives etphobies des maladies. PUF 1997.
* Peyré F. Faire face au paniques, Faire face à l’agoraphobie.Retz 2002 et 2006.
Servant D. Attaques de panique et agoraphobie. Masson 2001.