LUCIE DEMERS
LES OBSTACLES À LA TRANSITION DU
SECONDAIRE AU COLLÉGIAL Les leviers répertoriés dans les cours axés sur l’orientation
scolaire et professionnelle
Mémoire présenté
à la Faculté des études supérieures et postdoctorales de l’Université Laval
dans le cadre du programme de maîtrise en Sciences de l’orientation
pour l’obtention du grade de maître ès arts (M.A.)
DÉPARTEMENT DES FONDEMENTS ET PRATIQUES EN ÉDUCATION
FACULTÉ DES SCIENCES DE L’ÉDUCATION
UNIVERSITÉ LAVAL
QUÉBEC
2012
© Lucie Demers, 2012
Résumé
Le corpus des travaux sur les pratiques d’orientation au moment de la transition aux
études supérieures met en évidence l’importance de s’intéresser aux retombées de ces
pratiques. Au Québec, les étudiantes et étudiants de la session d’accueil et d’intégration
(SAI) peuvent s’inscrire à un cours axé sur l’orientation scolaire et professionnelle (OSP),
ce qui a pour effet de diminuer leur niveau d’indécision professionnelle entre le début et la
fin de la première session au collégial (Picard, 2011a). À ce jour, aucune recherche
québécoise n’a permis de décrire les cours axés sur l’OSP. L’objectif du présent mémoire
est de cerner dans quelle mesure les pratiques professionnelles mises en œuvre dans ces
cours permettent aux étudiantes et étudiants de développer leur marge de manœuvre dans le
processus d’orientation. À cette fin, nous avons eu recours à trois modèles conceptuels.
Ainsi, le modèle des transitions explicite les facteurs d’adaptation et les ressources
disponibles pour les personnes en transition. De son côté, l’approche centrée sur le
développement du pouvoir d’intégration socioprofessionnelle (DPIS) donne une structure à
l’analyse grâce aux concepts d’obstacle et de levier. Enfin, le recours aux facteurs
d’indécision décrits dans le modèle théorique d’indécision permet de tenir compte du
contexte de transition scolaire vécu par les étudiantes et étudiants.
Nous avons effectué une analyse qualitative secondaire des données issues d’un
programme de recherche mixte (Picard, Bourassa et Leclerc, 2009-2013). Le corpus est
composé de trois sources de données, colligées durant l’année scolaire 2009-2010 : huit
groupes de discussion rassemblant des professionnelles et professionnels représentant 21
collèges, neuf entrevues téléphoniques semi-dirigées avec les personnes dont le collège
offre un cours axé sur l’OSP et sept documents décrivant ces cours (syllabus ou autre).
Nous avons d’abord brossé un portrait descriptif des obstacles à la transition aux études
supérieures. Nous avons ensuite décrit les caractéristiques des cours axés sur l’OSP, pour
enfin présenter l’auto-évaluation de leurs effets par le personnel professionnel des collèges.
Les résultats suggèrent que les étudiantes et étudiants en transition aux études supérieures
sont susceptibles de rencontrer au moins 40 obstacles. Également, 19 caractéristiques des
cours axés sur l’OSP pourraient être considérées comme des leviers pour ces obstacles.
Avant-propos
Ce mémoire représente non seulement l’aboutissement de mes études universitaires,
mais également la conclusion d’une aventure qui aura été marquante dans mon parcours
scolaire. Je saisis donc l’occasion d’exprimer toute ma gratitude aux personnes qui m’ont
encouragée à persévérer tout au long de mes études. D’abord, je tiens à souligner la grande
implication de ma directrice, Mme France Picard, qui m’a offert un appui indéfectible à
toutes les étapes de la rédaction de mon mémoire. Ses rétroactions riches et constructives,
sa disponibilité et son enthousiasme pour mon projet ont stimulé ma motivation et mon
intérêt pour les pratiques d’orientation en milieu scolaire. De plus, en m’embauchant
comme auxiliaire de recherche, Mme Picard m’a donné de nombreuses occasions
d’apprendre les rouages du métier de chercheur. Enfin, la confiance qu’elle m’a accordée a
grandement contribué à faire de la rédaction de mon mémoire une expérience enrichissante
et positive.
Je remercie également les membres de mon entourage, qui m’ont soutenue de
différentes façons. Je suis particulièrement reconnaissante envers ma mère, car son écoute,
ses encouragements et sa bienveillance ont facilité mon parcours scolaire. Je désire aussi
souligner l’appui de mon père, dont les connaissances sur le plan du français m’ont été
utiles à de nombreuses reprises. Enfin, je tiens à remercier mon conjoint, Pierre-Olivier,
pour sa compréhension et sa patience.
Bref, j’estime avoir été bien entourée pendant toutes mes études, particulièrement
durant la dernière année. En ce sens, Mme Picard et moi utilisions régulièrement l’analogie
du marathon pour illustrer les étapes de rédaction du mémoire. Aujourd’hui, c’est donc
avec fierté, mais surtout avec reconnaissance que je franchis la ligne d’arrivée. À tous, un
grand merci !
Bonne lecture!
Table des matières
RÉSUMÉ....... ........................................................................................................................... i
AVANT-PROPOS ..................................................................................................................... ii
TABLE DES MATIÈRES........................................................................................................... iii
LISTE DES TABLEAUX ............................................................................................................ v
LISTE DES FIGURES ............................................................................................................... vi
INTRODUCTION ...................................................................................................................... 1
CHAPITRE 1 : PROBLÉMATIQUE ........................................................................................... 4
1.1 Les obstacles liés à la transition à l’enseignement supérieur ........................................ 4
1.2 État des lieux sur les mesures d’orientation dans les collèges du Québec ................... 6 1.3 Recension des écrits : le corpus des travaux états-uniens ............................................. 7
1.3.1 Le titre des cours .................................................................................................. 12 1.3.2 La population étudiante visée et la taille des groupes ......................................... 12
1.3.3 Les objectifs des cours et les thèmes abordés ...................................................... 13 1.3.4 Approche conceptuelle utilisée ............................................................................ 13 1.3.5 Les modalités pédagogiques ................................................................................ 14
1.3.6 Les responsables de cours .................................................................................... 16 1.3.7 Méthodologie et résultats ..................................................................................... 16
1.3.8 Limites des études ................................................................................................ 17
CHAPITRE 2 : CADRE CONCEPTUEL .................................................................................... 19
2.1 Le modèle des transitions ........................................................................................... 20
2.1.1 Définition des concepts ........................................................................................ 20
2.1.2 L’adaptation à la transition .................................................................................. 21 2.1.3 Le rôle des quatre ressources ............................................................................... 22 2.1.4 Les applications pratiques du modèle des transitions .......................................... 25
2.2 L’approche centrée sur le développement du pouvoir d’intégration
socioprofessionnelle (DPIS) ........................................................................................ 26 2.3 Le modèle théorique d’indécision ............................................................................... 27
2.4 Question de recherche ................................................................................................. 28
CHAPITRE 3 : MÉTHODOLOGIE .......................................................................................... 29
3.1 Méthode d’analyse secondaire .................................................................................... 29 3.2 Corpus analysé ............................................................................................................ 30
3.3 Collecte de données .................................................................................................... 32 3.3.1 Entrevues téléphoniques ...................................................................................... 33 3.3.2 Groupes de discussion ......................................................................................... 34
3.4 Techniques d’analyse qualitative ................................................................................ 35 3.4.1 Les bénéfices de la triangulation ......................................................................... 36
iv
Chapitre 4 : Présentation et analyse des résultats ................................................................ 40
4.1 Les obstacles à la transition aux études collégiales .................................................... 41
4.1.1 Caractéristiques de la transition ........................................................................... 41 4.1.2 Caractéristiques individuelles .............................................................................. 47 4.1.3 Caractéristiques de l’environnement ................................................................... 52
4.2 Les cours axés sur l’OSP : un levier aux obstacles ..................................................... 58 4.2.1 Situation ............................................................................................................... 59
4.2.2 Soi ........................................................................................................................ 67 4.2.3 Soutien ................................................................................................................. 69 4.2.4 Stratégies .............................................................................................................. 76 4.3 Les effets des cours axés sur l’OSP ........................................................................ 78
CHAPITRE 5 : DISCUSSION .................................................................................................. 88
5.1 Apport théorique de la recherche ................................................................................ 90 5.2 Apport pratique de la recherche .................................................................................. 91
5.3 Portée et limites de la recherche ................................................................................. 92
CONCLUSION ....................................................................................................................... 95
BIBLIOGRAPHIE ................................................................................................................... 97
ANNEXE 1 : Interventions suggérées par Schlossberg et al. (1989) auprès des personnes
en transition ....................................................................................................... 107
ANNEXE 2 : Éléments méthodologiques relatifs au programme de recherche initial
(Picard et al., 2009-2013) .................................................................................. 108
Liste des tableaux
Tableau 1 : Les retombées et les caractéristiques des cours axés sur l’OSP : études
recensées de 1973 à 2008 dans les collèges et les universités des États-Unis .... 10
Tableau 2 : Les trois facteurs influençant l’adaptation à une transition selon
Schlossberg (1981) .............................................................................................. 22
Tableau 3 : Les critères attestant la validité d’un fichier de données secondaires ............. 30
Tableau 4 : Les données consultées par collège et par source ........................................... 33
Tableau 5 : Codification des obstacles découlant du cadre conceptuel .............................. 38
Tableau 6 : Les leviers potentiels des cours axés sur l’OSP associés aux quatre
ressources du modèle des transitions .................................................................. 59
Tableau 7 : Les principales caractéristiques des cours axés sur l’OSP offerts dans les
collèges de notre échantillon ............................................................................... 60
Tableau 8 : Les leviers liés au Soi dans les cours axés sur l’OSP ...................................... 67
Tableau 9 : Les leviers liés au Soutien dans les cours axés sur l’OSP ............................... 70
Tableau 10 : Les leviers liés aux Stratégies dans les cours axés sur l’OSP ....................... 76
Tableau 11 : Mise en parallèle des obstacles, des leviers et des effets des cours axés sur
l’OSP ................................................................................................................... 82
Tableau 12 : Les points communs entre les pratiques porteuses (Brown et McPartland,
2005) et certains leviers répertoriés dans les cours axés sur l’OSP .................... 89
Liste des figures
Figure 1 : Les principaux éléments du modèle des transitions selon Schlossberg (1981)
et Schlossberg et al. (1989) ................................................................................. 24
Figure 2 : Les 6 facteurs d’indécision (Forner, 2010) ........................................................ 27
Figure 3 : Les étapes et les critères utilisés pour sélectionner les collèges offrant un
cours axé sur l’OSP ............................................................................................. 31
Figure 4 : Arborescence utilisée pour répertorier les obstacles à la transition aux études
supérieures ........................................................................................................... 37
Introduction
L’importance d’étudier les pratiques d’orientation au moment de la transition aux
études supérieures est mise en évidence dans le corpus des travaux à ce sujet (Chenard,
Francoeur et Doray, 2007; Conseil supérieur de l’éducation [CSE], 1995; CSE, 2010;
Fouad, Cotter et Kantamneni, 2009; Larose et Roy, 1996; Peng, 2001; Reese et Miller,
2006; Steltenpohl et Shipton, 1986; Terrill et Ducharme, 1994). Selon Schlossberg, Lynch
et Chickering (1989), il importe de trouver des façons intégrées et cohérentes d’informer et
de conseiller les étudiantes et étudiants en transition. Au Québec, peu d’études ont porté sur
les dispositifs de transition au collégial. Deux groupes de chercheurs ont abordé cette
question. Le groupe d’Étude des conditions de vie et des besoins de la population
(ÉCOBES) s’est penché sur l’évolution des aspirations scolaires et professionnelles d’un
groupe d’élèves du Saguenay-Lac-Saint-Jean (Gaudreault et al., 2010). Picard, Boutin et
Skakni (2010), pour leur part, ont mené une étude ayant permis de dresser un portrait
psychosocial des étudiantes et étudiants inscrits à la session d’accueil et d’intégration
(SAI)1 et de saisir l’ampleur de leur indécision. Les résultats préliminaires de cette
recherche révèlent qu’une des mesures d’aide déployées à la SAI donne lieu à une
diminution du niveau d’indécision professionnelle des étudiantes et étudiants, entre le début
et la fin de la première session au collégial (Picard, 2011a). Il s’agit des cours axés sur
l’orientation scolaire et professionnelle (OSP), dans lesquels au moins 60 % du contenu est
consacré à l’orientation. Cette pratique s’inscrit dans les mesures d’éducation à
l’orientation, qui désignent toutes les activités réalisées dans un cadre scolaire, empruntant
les situations d’apprentissage qui lui est propre, à des fins d’accompagnement dans la
démarche de choix vocationnel (Guichard et Huteau, 2001).
Les cours axés sur l’OSP sont offerts aux étudiantes et étudiants de la SAI qui
connaissent des difficultés d’orientation au moment de la transition aux études collégiales.
Plusieurs interventions y sont mises en œuvre, dont l’accompagnement dans la recherche
d’information scolaire et professionnelle, l’exposition à des modèles professionnels, les
1 La SAI accueille des étudiantes et étudiants qui vivent des difficultés d’orientation ou qui n’ont pas
complété les cours préalables requis pour accéder à un programme d’études donné. Cette session comprend
des cours de formation générale, un cours sur les méthodes de travail ou un atelier d’orientation et parfois, un
cours permettant d’explorer un autre programme (Commission d’évaluation de l’enseignement collégial, 1997).
2
réflexions écrites sur l’orientation et la familiarisation avec le monde professionnel (Picard
et Thibault, 2012). Bien que les pratiques déployées soient semblables d’un établissement à
l’autre, chaque cours axé sur l’OSP est développé selon le contexte singulier du collège et
des caractéristiques de sa population étudiante. Les praticiens du collégial désignent ces
cours par des expressions telles que cours charnière, cours porteur, cours dédié à
l’orientation et cours d’orientation2.
À ce jour, aucune recherche québécoise n’a accordé une attention particulière à la
description et aux répercussions de ces cours dans la démarche d’orientation à l’arrivée au
collégial. Pourtant, cette mesure d’aide constitue une stratégie reconnue pour accompagner
les étudiantes et étudiants dans leur démarche d’orientation (Schlossberg et al., 1989).
Selon Reese et Miller (2006), l’effet positif des cours axés sur l’OSP n’est plus à
démontrer; l’enjeu est plutôt de s’assurer que ces cours répondent aux demandes
nombreuses et changeantes de la population étudiante. Pour Brown et McPartland (2005),
plusieurs éléments doivent être examinés pour améliorer les interventions en orientation. Ils
suggèrent de se concentrer sur les pratiques reconnues comme étant efficaces sur le plan
scientifique et de trouver une façon de les bonifier. Comme nous le verrons, aux États-Unis,
la littérature scientifique foisonne d’études sur les retombées des freshman seminar et des
first year seminar, dispositifs analogues aux cours axés sur l’orientation offerts au collégial
(Picard, 2011b). Pour étayer la présente démarche de recherche, il s’est donc avéré
nécessaire de consulter plusieurs ouvrages états-uniens ainsi que des rapports rédigés par
des organismes gouvernementaux. Ainsi, nous avons tenté d’établir certains parallèles avec
la situation au Québec.
La question qui guide cette recherche s’énonce ainsi : Quelles sont les pratiques
professionnelles incluses dans les cours axés l’OSP qui peuvent exercer un effet bénéfique
sur la démarche d’orientation des étudiantes et étudiants de la SAI au moment de la
transition au collégial?
Dans ce mémoire, nous postulons que la finalité des pratiques professionnelles, dans
le domaine de l’intégration socioprofessionnelle comme dans celui de l’orientation,
2 Le titre exact des cours n’est pas dévoilé afin d’éviter que les collèges qui les offrent ne soient identifiés.
3
consiste à créer des conditions propices à la levée des obstacles qui restreignent les
possibilités et les marges de manœuvre des personnes accompagnées (Le Bossé, 2011).
Dans ce contexte, le concept d’obstacle réfère aux aspects structurels et aux dimensions
personnelles qui posent problème à une personne, tandis que la notion de levier décrit les
pratiques déployées pour favoriser l’élimination ou le dépassement de ces obstacles (Le
Bossé, 2011). Nous avons donc retenu les concepts d’obstacle et de levier afin d’établir un
parallèle entre les obstacles rencontrés par les étudiantes et étudiants en transition,
particulièrement les difficultés d’orientation dont l’indécision, et les pratiques déployées
dans les cours axés sur l’OSP, que nous considérerons comme étant des leviers dans ce
contexte d’étude.
Bref, ce mémoire vise la description des caractéristiques des cours axés sur l’OSP et
la compréhension de leur efficience au regard des obstacles rencontrés par les étudiantes et
étudiants en transition aux études collégiales. Pour répondre à la question de recherche,
nous avons choisi une méthodologie qualitative descriptive. Notre étude empirique se
déroule dans le contexte d’une analyse secondaire de données issues d’un programme de
recherche sur l’indécision à l’arrivée au collégial (Picard, Bourassa et Leclerc, 2009-2013).
Nos observations liées aux cours axés sur l’OSP portent sur neuf sites. Elles se fondent
principalement sur les syllabus de cours ainsi que sur le témoignage du personnel
professionnel à la SAI, rapporté dans le cadre d’entretiens téléphoniques et de discussions
de groupe. Le premier chapitre précise la problématique, dans laquelle près de 50 études
sont recensées. La plupart décrivent un cours axé sur l’OSP offert aux États-Unis. Dans le
deuxième chapitre, le cadre conceptuel choisi est présenté. Afin de bien cerner les
composantes de la présente question de recherche, l’appareillage conceptuel renvoie à trois
auteurs phares : Schlossberg, Le Bossé et Forner. Ce choix nous permet d’articuler le
phénomène d’indécision, présent dans le processus de transition au collégial, sous l’angle
du développement du pouvoir d’agir (la levée des obstacles). Le troisième chapitre traite de
la méthodologie utilisée dans la présente étude. Les étapes de la collecte de données et de
l’analyse y sont précisées. Le quatrième chapitre dévoile les résultats de recherche. Enfin,
les implications théoriques et pratiques de ce mémoire sont discutées dans le cinquième
chapitre.
Chapitre 1 : Problématique
Dans ce chapitre, nous préciserons la nature des obstacles liés à la transition à
l’enseignement supérieur. Nous présenterons ensuite les mesures d’orientation mises en
œuvre dans les collèges du Québec pour faciliter l’adaptation à cette transition. Tel que
souligné en introduction à ce mémoire, la problématique est campée dans un contexte où
aucune recherche sur les dispositifs d’OSP au Québec n’a encore été menée. Afin de saisir
les éléments distinctifs des cours axés sur l’OSP, il s’est avéré nécessaire de consulter les
travaux de nos collègues états-uniens sur la question. Nous conclurons donc ce chapitre en
présentant près de 50 études décrivant des cours axés sur l’OSP, offerts principalement
dans des collèges et universités des États-Unis.
1.1 Les obstacles liés à la transition à l’enseignement supérieur
Malgré les dispositifs d’orientation implantés au secondaire (diversification des
parcours après la troisième secondaire, service de consultation, Projet personnel
d’orientation, etc.), le passage aux études collégiales est anticipé par les élèves. Une étude
de Larose et Roy (1996) place les difficultés d’orientation scolaire en tête des huit
événements préoccupant le plus les finissantes et finissants du secondaire. À l’aube de la
transition aux études supérieures, les élèves se montrent inquiets quant à leur avenir, mais
leurs craintes disparaissent au début des études collégiales. L’anticipation des difficultés
apparaît donc plus grande que l’expérimentation des changements eux-mêmes (Larose et
Roy, 1996). Par ailleurs, les questionnements sur l’orientation reviennent au cours du
troisième trimestre. Ces inquiétudes peuvent conduire à une remise en question du choix de
programme ou du projet professionnel (Chenard et al., 2007; CSE, 2002; Doray, Picard,
Trottier et Groleau, 2009). Selon Gaudreault et al. (2010), l’absence d’un projet
professionnel peut entraîner le prolongement de la durée des études, des changements de
programme ou l’abandon scolaire.
Ainsi, les difficultés d’orientation scolaire et professionnelle touchent non
seulement les élèves à la fin du secondaire, mais aussi les étudiantes et étudiants de niveau
postsecondaire (Doray et al., 2009; Picard et Thibault, 2012). Ces difficultés peuvent
affecter leur motivation, la durée de leurs études et leur rendement scolaire (Doray et al.,
5
2009). Parmi les principaux obstacles liés à l’orientation, on retrouve le manque de
connaissance de soi, des programmes de formation, des professions et des métiers
(Gaudreault et al., 2010). Dans ce contexte, les étudiantes et étudiants peuvent connaître
une période d’indécision. À ce sujet, Guay, Ratelle, Sénécal, Larose et Deschênes (2006)
estiment que plus de la moitié des Québécois qui terminent leurs études secondaires vivent
de l’indécision. Cette étude longitudinale, menée auprès de 325 étudiantes et étudiants au
cégep, a repéré trois positions liées à l’indécision : les décidés (48 %), les indécis
développementaux, qui manquent d’information sur eux-mêmes et le monde du travail (27
%) et les indécis chroniques, persuadés d’être incapables de prendre une décision
concernant leur carrière (25 %).
De multiples obstacles sont présents à l’entrée au collège. Langevin (1996) en met
quelques-uns en lumière, comme les exigences intellectuelles plus sévères, la taille du
campus et la population étudiante plus nombreuse. Gaudreault et al. (2010) se questionnent
sur la préparation des étudiantes et étudiants aux obstacles liés à l’organisation scolaire
(contingentement, critères d’admission, etc.). D’ailleurs, plusieurs élèves du secondaire
précipitent leur choix scolaire et professionnel devant l’obligation de s’inscrire au collégial
avant la date butoir (Fortier, 2003). Pour Doray et al. (2009), la structure du système
d’éducation limite le champ de possibilités qui leur sont offertes. Autrement dit, les
contraintes imposées par les institutions scolaires balisent les parcours des étudiantes et
étudiants, ce qui complexifie leur démarche d’orientation (Chenard et al., 2007; CSE, 1995;
CSE, 2002). Leurs choix risquent donc de correspondre plus ou moins à leurs aspirations
(Chenard et al., 2007). Une préparation inadéquate au milieu collégial peut aussi faire en
sorte que le passage entre les deux ordres d’enseignement soit vécu comme un choc
(Paradis, 2000). Plus globalement, la transition du secondaire au collégial ne constitue que
l’un des changements accompagnant le passage à l’âge adulte. Quitter le domicile familial,
vivre en couple ou occuper un emploi représentent autant d’enjeux invariants à cette étape
de la vie (Doray et al., 2009; Gaudreault et al., 2010).
6
1.2 État des lieux sur les mesures d’orientation dans les collèges
du Québec
Au Québec, les mesures en place pour accompagner les étudiantes et étudiants du
collégial dans leur démarche d’orientation prennent plusieurs formes (CSE, 2002). Les
professionnelles et professionnels de l’orientation réalisent des entrevues individuelles,
animent des rencontres de groupe, organisent des stages d’exploration, mettent sur pied des
activités de mentorat, etc. Ils collaborent aussi avec le personnel enseignant et les membres
de la direction pour mettre en place des mesures d’aide. L’enquête du CSE a également
révélé que les professionnelles et professionnels de l’orientation en milieu collégial
estimaient rencontrer annuellement 20 % de la population étudiante des cégeps. Le manque
de ressources professionnelles fait partie des raisons évoquées pour expliquer ce faible
achalandage. D’un autre côté, les personnes consultées déplorent que les étudiantes et
étudiants demandent de l’aide seulement après avoir accumulé plusieurs échecs, ce qui peut
complexifier l’accompagnement dans la démarche d’orientation.
En marge de ces services réguliers d’orientation, les étudiantes et étudiants ont la
possibilité de s’inscrire à la session d’accueil et d’intégration (SAI), offerte dans la quasi-
totalité des collèges québécois. D’une durée d’une seule session, la SAI leur permet, le cas
échéant, de poursuivre leur démarche d’orientation ou de faire des cours de mise à niveau
en langue maternelle, en mathématiques et en sciences (Picard, 2011b). Avec les années,
les formules de la SAI se sont diversifiées pour répondre aux besoins multiples des
collégiens (Picard, 2011a). La plupart comprennent des cours de formation générale, un
cours sur les méthodes de travail ou un atelier d’orientation. Dans certains cégeps, il est
possible de s’inscrire à des cours donnant l’occasion d’explorer un autre programme
d’études (Commission d’évaluation de l’enseignement collégial, 1997). Enfin, dans
plusieurs collèges, le volet Orientation permet de choisir des cours visant le soutien dans la
démarche d’orientation.
Selon Picard et al. (2010), l’indécision scolaire et professionnelle à l’arrivée au
collège est significativement plus intense chez les étudiantes et étudiants de la SAI que chez
leurs homologues des secteurs de formation technique ou préuniversitaire. Des différences
significatives entre ces deux groupes ont été observées en ce qui touche le cheminement
7
emprunté au secondaire. Les étudiantes et étudiants de SAI sont proportionnellement et
significativement plus nombreux à avoir fréquenté la formation professionnelle au
secondaire et l’éducation des adultes, à avoir connu l’échec de cours au secondaire, doublé
une année scolaire complète, interrompu leurs études pendant plus de quatre mois ou avoir
accédé au collégial sans avoir obtenu leur diplôme d’études secondaires (DES). Ce
contexte, plus souvent marqué par les difficultés scolaires et la discontinuité des études,
peut avoir des incidences sur l’orientation. Pour pallier cette situation, quelques collèges
offrent la possibilité aux étudiantes et étudiants de la SAI de s’inscrire à des cours dont au
moins 60 % du contenu est consacré à l’orientation scolaire et professionnelle (OSP). Bien
que les formules utilisées pour offrir ces cours varient d’un cégep à l’autre, les activités
pédagogiques tenues dans les cours axés sur l’OSP visent l’accompagnement dans la
démarche d’orientation3. Ces cours figurent parmi les pratiques d’orientation répertoriées à
la SAI qui s’avèrent statistiquement significatives dans l’amélioration de l’indécision
professionnelle (Picard et Thibault, 2012). Ce qui nous intéresse tout particulièrement dans
l’étude de tels cours, ce sont les facteurs expliquant les effets porteurs des cours axés sur
l’OSP sur la façon dont les étudiantes et étudiants de la SAI vivent leur transition aux
études supérieures. Or, cette question précise n’a pas encore été étudiée.
1.3 Recension des écrits : le corpus des travaux états-uniens
Une des recherches incontournables dans le domaine de l’orientation est la méta-
analyse de Brown et McPartland (2005). Ces auteurs ont examiné une panoplie de pratiques
d’orientation, décrites dans une soixantaine d’études. Ils en ont ainsi ciblé cinq dont les
effets s’avèrent bénéfiques sur le choix de carrière. Ces effets sont d’autant plus
significatifs lorsqu’au moins trois des pratiques suivantes sont intégrées aux mesures d’aide
en place :
Intégrer des exercices écrits dans la démarche de choix de carrière;
Offrir une rétroaction individuelle et porter une attention particulière aux
personnes en processus de choix;
3 Rapport de recherche préliminaire rédigé par Soucy (2010) (non publié).
8
Encadrer la collecte d’information scolaire et professionnelle;
Exposer les personnes à des modèles professionnels et;
Encourager le développement d’un réseau de soutien dans les démarches
d’OSP.
Oliver et Spokane (1983, 1988) ont observé les effets bénéfiques des pratiques
d’OSP intégrées en classe. En droite ligne avec les conclusions de Brown et McPartland
(2005), ils soulignent que l’intensité des interventions est le facteur-clé contribuant de
façon significative aux retombées bénéfiques de telles interventions. Dans cette foulée, de
nombreux cours dans lesquels on présente des contenus liés à l’orientation ont fait l’objet
de recherches. Ces cours sont souvent présentés comme une mesure d’aide efficace, mais
coûteuse (Whiston, Sexton et Lasoff, 1998). Leur appellation varie d’un établissement
d’enseignement à l’autre (cours d’orientation, séminaire d’orientation, cours de
développement de carrière, cours d’intégration, etc.4). Dans le cadre de ce mémoire, nous
avons recensé les cours qui se rapprochaient le plus de notre objet d’études : les cours axés
sur l’OSP. Ceux-ci sont apparus vers 1911 comme une nouvelle façon d’offrir des services
d’orientation dans les collèges et les universités des États-Unis5 (Maverick, 1926).
Quelques décennies plus tard, cette pratique est devenue de plus en plus populaire en raison
des tendances émergentes du marché du travail et du désir grandissant des étudiantes et
étudiants de poursuivre des études supérieures (Ripley, 1975).
Particulièrement aux États-Unis, plusieurs auteures et auteurs s’entendent sur les
effets bénéfiques des cours axés sur l’OSP. Entre autres, ces cours influencent positivement
la prise de décision (Hardesty, 1991; Osborn, Howard et Leierer, 2007; Peng, 2001), la
maturité vocationnelle (Hardesty, 1991) et les croyances au regard de la carrière (Scott et
Ciani, 2008). Pour Lent, Larkin et Hasegawa (1986), les résultats positifs associés à cette
intervention s’expliqueraient par le regroupement des étudiantes et étudiants qui ont des
aspirations professionnelles communes.
4 Ces expressions ont été traduites librement à partir des articles scientifiques consultés.
5 Aux États-Unis, les collèges offrent l’enseignement de premier cycle universitaire alors qu’au Québec, ils
offrent des programmes techniques et préuniversitaires.
9
Whiston et Oliver (2005) soulignent qu’en plus de savoir que les cours axés sur
l’OSP donnent lieu à des effets bénéfiques, il importe d’identifier les éléments sur lesquels
repose leur efficience. En ce sens, les recherches sur les cours axés sur l’OSP devraient
explorer les conditions qui peuvent influencer leurs effets et cerner les interventions dont
l’impact est le plus marqué (Reed, Reardon, Lenz et Leierer, 2001). Tel est d’ailleurs notre
intérêt scientifique dans le cadre du présent mémoire.
Dans plusieurs collèges et universités, les cours axés sur l’OSP sont une mesure
d’accompagnement non obligatoire qui permet d’accumuler une à trois unités en vue de
l’obtention d’un diplôme (Halasz et Kempton, 2000; Langevin, 1996; Mead et Korschgen,
1994). Au-delà de ces aspects techniques, les objectifs des cours axés sur l’OSP varient
d’un établissement à l’autre. Tandis que certains visent l’exploration de soi (intérêts,
valeurs, compétences, etc.), d’autres misent sur les techniques de recherche d’emploi ou sur
l’utilisation efficace de l’information scolaire et professionnelle (Fouad et al., 2009). Le
Tableau 1 dresse un portrait des caractéristiques de 48 cours axés sur l’OSP offerts
principalement aux États-Unis. Ce portrait, grandement alimenté par la méta-analyse de
Folsom et Reardon (2003), est suivi d’une description plus détaillée des principaux
éléments qui les distinguent. Notons qu’un des cours axés sur l’OSP a fait l’objet de
plusieurs études (Bash, 1987; Folsom, Peterson, Reardon et Mann, 2005; Gerken, Reardon
et Bash, 1988; Reardon, Leierer et Lee, 2007; Reardon et Reagan, 1981; Reed et al., 2001;
Vernick, Reardon et Sampson, 2004). Par souci de concision, nous avons retenu l’article le
plus récent (Reardon et al., 2007) pour la recension des écrits.
Tableau 1 : Les retombées et les caractéristiques des cours axés sur l’OSP : études recensées de 1973 à 2008 dans les collèges et
les universités des États-Unis6
Auteures et auteurs7
Titre
des cours
Population
étudiante visée
Taille des
groupes
Utilisation
d’une
approche
conceptuelle
Modalités pédagogiques Responsables
des cours
Méthodologie
et résultats Durée
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*Babcock et Kauffman, 1976 1
*Barker, 1981 2
*Bartsch et Hackett, 1978 3
*Bechtol, 1978 2
*Broley, 1986 3
*Brooks, 1995
*Carver et Smart, 1985 3
*Davig et Spain, 2003 1
*Davis et Horne, 1986 3
*Dodson, Chastain et Landrum, 1996
*Evans et Rector, 1978 2
Forner et Vouillot, 1995
Fouad, Cotter et Kantamneni, 2009 1
*Ganster et Lovell, 1978 1
*Garis et Niles, 1990 1
*Gillingham et Lounsbury, 1979
*Halasz et Kempton, 1997 2
*Henry, 1993 2
*Heppner et Krause, 1979 2
Johnson, Nichols, Buboltz et Riedesel, 2002 2
*Johnson, Smither et Holland, 1981 2
*Johnson et Smouse, 1993 2
6 Un des cours a été offert à Toronto (Broley, 1986), un autre à Taiwan (Peng, 2001) et un troisième, en France (Forner et Vouillot, 1995).
7 Les références précédées d’un astérisque correspondent aux études utilisées aux fins de la méta-analyse.
11
Tableau 1 (suite) : Les retombées et les caractéristiques des cours axés sur l’OSP : études recensées de 1973 à 2008 dans les
collèges et les universités des États-Unis
Auteures et auteurs
Titre
des
cours
Population
étudiante visée
Taille des
groupes Utilisation
d’une
approche
conceptuelle
Modalités pédagogiques Responsables
des cours
Méthodologie
et résultats Durée
No
mb
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Kraus et Hughey, 1999 1
*Lent, Larkin et Hasegawa, 1986 2
*Lent, Schmidt et Larkin, 1985 2
*Lisansky, 1990 2
Malott et Magnuson, 2004 1
McAuliffe et Fredrickson, 1990 2
Osborn, Howard et Leierer, 2007 1
Peng, 2001 2
*Perovich et Mierzwa, 1980 2
*Quinn et Lewis, 1989 1
*Rayman, Bernard, Holland et Barnett, 1983 1
Reardon, Leierer et Lee, 2007 3
Reese et Miller, 2006 1
*Remer, O’Neil et Gohs, 1984 3
*Savickas, 1990 2
Scott et Ciani, 2008 1
*Sherry et Staley, 1984 1
*Smith, 1981 2
Smith et Evans, 1973 1
Steltenpohl et Shipton, 1986 2
*Stonewater et Daniels, 1983 3
Suffet, 1988 2
Swain, 1984 3
*Ware, 1985 3
Ware et Beischel, 1979
1.3.1 Le titre des cours
Tout d’abord, le titre de presque tous les cours axés sur l’OSP évoque l’orientation
(career course, orientation seminar, career development course, etc.). D’autres titres
renvoient à la planification de la carrière et de la vie en général. Certains font directement
référence à la prise de décision, tandis que d’autres mettent l’accent sur l’exploration
professionnelle. Enfin, dans quelques établissements, chaque département adapte le cours
axé sur l’OSP à un domaine d’études particulier, ce qui se reflète dans son titre.
1.3.2 La population étudiante visée et la taille des groupes
Selon Langevin (1996), les étudiantes et étudiants qui en sont à leur première année
aux études supérieures (freshmen) représentent près du quart des personnes inscrites aux
cours axés sur l’OSP. Les étudiantes et étudiants de deuxième année (sophomore), de
troisième année (junior) et de quatrième année (senior) constituent respectivement 29 %,
24 % et 23 % de l’effectif. Certains cours accueillent toutes les personnes intéressées à
s’inscrire, alors que d’autres sont conçus à l’intention d’une population étudiante précise.
Par exemple, certains cours axés sur l’OSP font partie intégrante d’un programme d’études,
comme les sciences (Lent et al., 1986), la médecine (Henry, 1993) et la psychologie
(Dodson et al., 1996). L’offre d’un tel cours à des étudiantes et étudiants dont les
aspirations sont relativement homogènes permet d’en adapter la structure pour créer des
environnements d’apprentissage personnalisés (Lent et al., 1986). Dans le cas des étudiants
qui s’intéressent aux sciences, les méthodes pédagogiques choisies intègrent des activités
concrètes (R) et des recherches intuitives (I), en référence à la typologie de Holland8.
La taille moyenne des groupes est d’environ 25 personnes (Langevin, 1996).
Toutefois, certains cours regroupent au-delà de 35 étudiantes et étudiants, alors que d’autres
en accueillent seulement six.
8 Selon la typologie de Holland, il existe six types de personnalité correspondant chacun à des caractéristiques
particulières : Réaliste (R), Investigateur (I), Artistique (A), Social (S), Entreprenant (E) et Conventionnel (C)
(Hogan et Blake, 1999).
13
1.3.3 Les objectifs des cours et les thèmes abordés
Langevin (1996) soutient que la définition claire des objectifs et du contenu du
cours contribue au succès des cours axés sur l’OSP. En ce sens, les objectifs des cours
recensés sont variés : compréhension et application du processus de planification de
carrière, identification des intérêts, des valeurs et des compétences, utilisation efficace des
informations sur les métiers, techniques de recherche d’emploi, etc. (Fouad et al., 2009).
Au-delà de ces objectifs, certains cours visent la responsabilisation des étudiantes et
étudiants dans leur processus d’orientation et la sensibilisation au monde du travail (Henry,
1993; Reardon et al., 2007).
De façon générale, les sujets abordés dans les cours axés sur l’OSP ont trait à la
prise de décision, la préparation à la recherche d’emploi, l’exploration des domaines
d’études, des métiers et des professions, la personnalité, les intérêts, les buts, les stratégies
d’étude, la résolution de problèmes, la gestion du stress, les débouchés pour les différentes
communautés culturelles, etc. (Halasz et Kempton, 2000; Langevin, 1996; Mead et
Korschgen, 1994). Certains cours touchent de façon plus particulière aux obstacles
anticipés, au style de décision (Reese et Miller, 2006), aux facteurs sociaux influençant le
développement de carrière (Reardon et al., 2007), à la compréhension des émotions (Peng,
2001) et à la gestion du temps (Davis et Horne, 1986). Enfin, dans certains établissements,
l’approche conceptuelle sur laquelle repose le cours est officiellement présentée comme
contenu à l’étude.
1.3.4 Approche conceptuelle utilisée
Afin de dégager les appuis conceptuels principalement utilisés dans les cours axés
sur l’OSP, nous avons comparé les études répertoriées dans le Tableau 1 avec le cadre
conceptuel de Guichard (2002). Cet auteur, conscient de la multiplicité des modèles
théoriques tantôt concurrents, tantôt complémentaires, est arrivé à distinguer quelques
tendances.
Ainsi, il regroupe d’une part les modèles basés sur la psychologie différentielle, qui
mettent l’accent sur l’appariement des caractéristiques individuelles et des professions
14
(l’approche traits-facteurs). La typologie de Holland, sur laquelle s’appuient plusieurs cours
décrits dans la présente analyse, en fait partie. D’autre part, Guichard (2002) rassemble
dans un même groupe les théories nées de préoccupations pour les cognitions, les aspects
développementaux et les problématiques sociales. À ce titre, bon nombre de cours axés sur
l’OSP (Tableau 1) prennent appui sur les théories cognitives, comme le modèle du
traitement cognitif de l’information (Peterson, Sampson, Reardon et Lenz, 1996). Dans
certains cours, une grande importance est accordée au lieu de contrôle (Knefelkamp et
Slepitza, 1976) et au sentiment d’efficacité personnelle en lien avec la carrière (Taylor et
Betz, 1983). Plusieurs cours s’appuient également sur les théories développementales
(Super, 1980; Tiedeman et O’Hara, 1963).
Selon Reese et Miller (2006), le succès d’un cours tient aux fondements conceptuels
sur lesquels il repose et aux pratiques empiriquement soutenues qui y sont déployées. De
son côté, Peng (2001) a comparé deux cours axés sur l’OSP inspirés d’approches
conceptuelles différentes : les théories cognitives et la théorie des traits-facteurs. Les
participantes et participants des deux groupes devaient trouver un mentor et réaliser un plan
de carrière. Dans chaque formule, leur niveau d’indécision a diminué de façon significative
entre les deux temps de mesure, en comparaison avec les personnes n’ayant suivi aucun
cours. En outre, Peng n’a identifié aucune différence en lien avec l’efficacité des
interventions. Il a plutôt conclu qu’un cours axé sur l’OSP influence la prise de décision, et
ce, peu importe l’approche conceptuelle dans laquelle il s’enracine.
1.3.5 Les modalités pédagogiques
Durée du cours
La plupart des cours axés sur l’OSP s’échelonnent de 11 à 16 semaines. Cependant,
certains sont offerts de façon intensive durant l’été, tandis que d’autres durent plus d’une
session. McAuliffe et Fredrickson (1990) ont comparé les effets de deux formules
différentes de cours fondées sur une démarche de prise de décision. Les quatre premières
étapes d’un modèle de prise de décision9 étaient présentées dans la formule courte (une
session). Dans la formule longue (deux sessions), les étudiantes et étudiants complétaient
9 Le modèle de prise de décision utilisé n’a pas été précisé par les auteurs.
15
les sept étapes du modèle, en plus de rédiger leur plan de carrière. Les résultats de l’étude
ont confirmé les effets bénéfiques des deux formules sur le niveau d’indécision et sur la
satisfaction quant au plan de carrière. Par ailleurs, le nombre d’options professionnelles
envisagé était plus élevé après le premier trimestre qu’à la fin du second. Les auteurs ont
donc conclu que le deuxième trimestre permettait d’éliminer des options, rapprochant
davantage les étudiantes et étudiants d’une prise de décision.
Nombre moyen d’heures de cours par semaine
Afin de comparer les cours sur une base commune, nous avons arrondi le nombre
d’heures de cours par semaine à l’unité supérieure. Ainsi, dans les collèges où
l’enseignement est offert durant la période estivale, le nombre hebdomadaire d’heures de
cours est parfois plus élevé. Aux fins de comparaison, nous avons codifié ces cas
particuliers en répartissant la somme des heures enseignées sur une session d’études de 11
semaines. En bout de ligne, le Tableau 1 montre que la plupart des cours axés sur l’OSP
sont offerts à raison de deux ou trois heures par semaine.
Les activités pédagogiques
Les discussions en petits groupes et les exposés magistraux font partie des activités
pédagogiques généralement tenues par les responsables de cours, en plus de diverses
formules de pédagogie active et interactive (Langevin, 1996). Diverses autres activités
d’apprentissage sont réalisées : exercices écrits, projets de recherche, lectures, études de
cas, conférences, vidéos, réalisation d’un portfolio, activités culturelles, exposés oraux,
journal de bord, visites en milieu professionnel, réflexions personnelles, exercices sur les
valeurs, etc. (Langevin, 1996).
D’autres formules de cours comprennent la passation de tests (Reese et Miller,
2006), la rédaction d’une autobiographie (Reardon et al., 2007), le mentorat (Peng, 2001),
les simulations d’entrevues (Halasz et Kempton, 1997) et la construction d’un
génogramme10
(Malott et Magnuson, 2004). Certains responsables de cours ont recours à
10
Un génogramme consiste en une représentation graphique de la famille élargie d’une personne, traversant
au moins trois générations (Papp et Imber-Black, 1996 dans Malott et Magnuson, 2004).
16
des programmes informatisés pour faciliter la démarche d’OSP. Garis et Niles (1990) ont
comparé deux groupes utilisant des logiciels différents11
, et chacun a donné lieu à des effets
bénéfiques sur l’indécision des étudiantes et étudiants.
Dans plusieurs cours, l’évaluation tient compte du niveau d’auto-exploration atteint
par les étudiantes et étudiants, de la qualité de leurs travaux, de leur présence en classe et
des activités complétées (Filer, 1986). La plupart du temps, les résultats scolaires sont notés
par un chiffre ou une lettre qui rend compte de l’appréciation du professeur concernant
l’atteinte des objectifs du cours (Langevin, 1996). Dans environ 5 % des collèges, ce
résultat est substitué par la mention réussite ou échec (Mead et Korschgen, 1994).
1.3.6 Les responsables de cours
L’équipe des responsables des cours axés sur l’OSP est généralement composée
d’au moins une personne qualifiée en orientation. Les membres d’une même équipe
peuvent porter une variété de titres différents (Halasz et Kempton, 2000). Par ailleurs, les
auteures et auteurs d’articles scientifiques sont parfois responsables du cours.
1.3.7 Méthodologie et résultats
Compte tenu de la variété des formules de cours, des moments auxquels les
recherches ont été menées et des limites méthodologiques de certains travaux, le poids
scientifique des résultats rapportés dans chaque article n’est pas le même. Il a donc été
difficile de comparer tous les résultats sur une même base. Cela dit, la plupart des auteurs
s’entendent sur l’efficacité des cours axés sur l’OSP. Le Tableau 1 identifie les cours ayant
donné lieu à un effet bénéfique sur une variable liée à l’orientation (indécision, identité
vocationnelle, résolution de problèmes, etc.). D’autres variables ont été évaluées, comme
l’appréciation du cours par les étudiantes et étudiants (Suffet, 1988) ou la persistance dans
les études (Davig et Spain, 2003). La plupart des auteures et auteurs ont utilisé un groupe
de comparaison et une méthodologie pré-test / post-test.
11
Sigi Plus et Discover.
17
Les résultats de deux études (Forner et Vouillot, 1995; Kraus et Hughey, 1999)
apparaissent moins positifs que les autres. Celle de Forner et Vouillot (1995) s’est
intéressée aux effets du cours Éducation des choix (EDC), une adaptation française du
cours québécois Éducation au choix de carrière (ECC). Pendant quelques années, les élèves
devaient réaliser quatre tâches développementales : exploration, cristallisation, spécification
et réalisation. Au terme du cours, le niveau d’indécision des personnes qui avaient suivi
l’EDC était plus élevé que chez celles qui n’y étaient pas inscrites. En dépit de ce résultat,
Forner (2001) voit dans ce cours une occasion d’éveil à la complexité des questions
d’orientation.
1.3.8 Limites des études
Quelques auteures et auteurs invitent à la prudence dans l’interprétation des résultats
des méta-analyses sur les pratiques d’OSP. En effet, la diversité des interventions
comparées (en groupe, à l’ordinateur, accompagnement individuel, etc.) peut donner lieu à
des contradictions entre les résultats (Whiston, Brecheisen et Stephens, 2003). De leur côté,
Whiston et al. (1998) déplorent que l’inscription à un freshman seminar ou l’absence d’un
choix de programme d’études à un moment attendu soient parfois considérées comme un
signe d’indécision, sans qu’une validation de cette information n’ait été effectuée. Enfin,
lorsque les recherches sur les cours axés sur l’OSP sont effectuées par la personne qui les a
développés, celle-ci peut avoir tendance à en présenter les effets bénéfiques (Folsom et
Reardon, 2003). En outre, comme l’intervention sur des comportements humains apparaît
difficile à examiner selon un modèle expérimental, les études sur les effets des cours axés
sur l’OSP peuvent s’avérer complexes à mener (Langevin, 1996).
Dans ce chapitre, nous avons mis à l’avant-plan plusieurs éléments d’information
constituant de précieuses pistes pour la suite de la recherche. Nous avons d’abord mis en
lumière que l’anticipation de la transition, les difficultés d’orientation scolaire et
professionnelle et une mauvaise préparation au passage vers les études supérieures font
partie des obstacles liés à la transition du secondaire au collégial. Dans les collèges du
Québec, plusieurs ressources sont mises en place pour faciliter l’adaptation à cette
transition. En plus des services réguliers d’aide à l’orientation, les étudiantes et étudiants
18
peuvent s’inscrire à la SAI et, dans plusieurs établissements, choisir un cours axé sur
l’OSP. Étant donné qu’aucune recherche québécoise n’a encore été menée pour décrire ces
cours, nous avons recensé près de 50 articles décrivant ceux offerts dans les collèges et
universités des États-Unis. Cela nous a permis de comprendre que les cours axés sur l’OSP
sont un dispositif d’accompagnement dans la démarche d’orientation au moment de la
transition aux études supérieures. Les objectifs et les modalités de tous les cours convergent
en ce sens, malgré l’existence de certaines différences locales entre les établissements. On
retient ainsi que la nature des pratiques d’OSP importe moins que l’intensité avec laquelle
ces pratiques sont appliquées. Également, peu importe l’approche conceptuelle dans
laquelle s’enracinent les cours axés sur l’OSP, les résultats sont porteurs sur le plan de
l’amélioration de l’indécision.
Le prochain chapitre décrit le cadre conceptuel choisi pour décortiquer les facteurs
contribuant aux effets bénéfiques des cours axés sur l’OSP dont profitent les étudiantes et
étudiants de la SAI.
Chapitre 2 : Cadre conceptuel
Le cadre conceptuel retenu pour répondre à la question de recherche renvoie à trois
auteurs phares : Schlossberg (1981), Le Bossé (2011) et Forner (2010). Ce choix repose sur
un besoin de comprendre la mécanique des transitions aux études supérieures (Schlossberg,
1981). On sait déjà que l’indécision (Forner, 2010) est une difficulté bien présente dans le
processus d’orientation à l’arrivée au collégial. Comme l’objet d’études porte sur les effets
des pratiques professionnelles, le modèle conceptuel du DPIS (Le Bossé, 2011) constitue
une piste féconde pour analyser les cours axés sur l’OSP afin d’y repérer les leviers à la
résolution d’obstacles préidentifiés. Le Schéma 2 permet de visualiser les liens entre ces
trois modèles.
Schéma 2 : Les liens unissant le modèle des transitions, le modèle théorique
d’indécision et l’approche centrée sur le DPIS
20
2.1 Le modèle des transitions
S’inscrivant en psychologie sociale, le modèle des transitions (Schlossberg, 1981)
permet d’analyser les divers ordres de facteurs en jeu dans ce phénomène, peu importe le
moment auquel cette transition se déroule dans la vie d’une personne (Schlossberg, 1981;
Schlossberg et al.). Il tient à la fois compte des caractéristiques des personnes en transition,
de celles de l’environnement et du contexte dans lequel s’inscrit le changement
(Schlossberg, 1981). En outre, ce modèle peut aider les intervenantes et intervenants à
évaluer les ressources dont disposent les personnes pour traverser une transition
(Schlossberg et al., 1989).
L’adaptation à une transition dépend de trois facteurs interdépendants : les
caractéristiques de la transition, les caractéristiques individuelles de la personne en
transition et les caractéristiques de l’environnement. Ces trois facteurs seront décrits plus
amplement dans les prochaines pages. Commençons par définir les principaux concepts du
modèle des transitions.
2.1.1 Définition des concepts
Selon Schlossberg (1981), les adultes font continuellement l’expérience de
transitions. L’auteure définit une transition comme un passage d’un état vers un autre, où
les perceptions d’une personne à propos d’elle-même et du monde qui l’entoure (rôles,
relations, habitudes, croyances) sont modifiées. Ce changement amène des modifications
dans ses comportements et son réseau social (Schlossberg, 1981; Schlossberg et al., 1989).
La transition est un processus où se succèdent des phases d’assimilation et d’évaluation
(Goodman Schlossberg et Anderson, 2006; Schlossberg et al., 1989) que nous résumons
ainsi :
L’entrée dans la transition : La personne ressent le besoin de s’approprier
les normes, les règles et les attentes relatives à la nouvelle situation.
La transition elle-même : Cette phase est caractérisée par des
questionnements sur la décision prise, la motivation à poursuivre la
démarche, le soutien reçu et la conciliation entre les différentes activités.
21
La sortie de la transition : La personne est préoccupée par ce qui suivra la
transition.
Pour bien cerner la portée d’une transition dans la vie d’une personne, Goodman et
al. (2006) recommandent de se questionner sur :
Le type de transition vécue : anticipée (changement attendu), imprévue
(changement non attendu) ou non-événement (événement souhaité, mais
non advenu).
Le contexte dans lequel cette transition s’inscrit : les conditions
environnementales qui constituent une source de tension ou un soutien
pour la personne en transition.
L’impact de la transition sur les relations, les rôles, les habitudes et les
croyances de la personne. Il s’agit du point le plus important dans la
compréhension des réactions d’une personne à la transition (Goodman et
al., 2006).
2.1.2 L’adaptation à la transition
L’adaptation à la transition est un processus dynamique. Selon Schlossberg (1981),
la personne passe d’un état, où elle est totalement préoccupée par les changements qui
s’imposent, vers un autre, où elle intègre ces changements dans sa vie. Ainsi, chacune vit sa
transition de façon différente. De plus, la même personne peut réagir différemment en
fonction du type de changement qu’elle vit ou du moment de sa vie auquel la transition
survient.
L’adaptation à une transition dépend des trois facteurs interdépendants décrits dans
le Tableau 2. L’importance de chacun dans l’adaptation à la transition dépend du stade
traversé par la personne, de ses perceptions quant au changement et de l’évaluation qu’elle
fait de ses ressources personnelles (Schlossberg, 1981; Schlossberg et al., 1989).
22
Tableau 2 : Les trois facteurs influençant l’adaptation à une transition selon
Schlossberg (1981)
Les caractéristiques de la transition
Les caractéristiques
individuelles Les caractéristiques de
l’environnement
Déclencheur : découle d’un
changement interne (décision
individuelle) ou externe
(circonstances);
Affect : affecte la personne de
façon positive ou négative;
Moment : à temps, trop tôt, trop
tard, de façon subite ou graduelle;
Durée : permanente ou temporaire
Changement de rôle : amène un
gain ou une perte de rôle;
Niveau de stress généré;
Niveau de contrôle perçu;
Autres sources de tension
concomitantes.
Âge et période de la vie;
Genre et identification
sexuelle;
État de santé;
Statut socioéconomique;
Compétences
psychosociales (Tyler, 1978
cité dans Schlossberg,
1981) : attitudes par rapport
à soi, attitudes par rapport
au monde, aptitudes
comportementales;
Expériences précédentes de
transition;
Appartenance culturelle;
Système de valeurs.
Soutien interpersonnel
reçu (proches, famille,
réseau social, etc.);
Soutien institutionnel;
Environnement
physique (climat,
milieu urbain ou rural,
services, etc.).
2.1.3 Le rôle des quatre ressources
Le modèle des transitions s’appuie sur un agencement entre quatre ressources dont
disposent les personnes pour s’adapter. Ces ressources changent à mesure que la situation
évolue (Schlossberg, 1981). D’abord, la Situation représente les caractéristiques de la
situation vécue (anticipée, imprévue ou non-événement). Elle englobe les caractéristiques
de la transition énumérées au Tableau 2. Le Soi réfère aux caractéristiques individuelles
(âge et période de la vie, genre et identification sexuelle, statut socioéconomique, etc.) et
aux ressources psychologiques (optimisme, sentiment d’auto-efficacité, spiritualité, etc.) de
la personne en transition. Le Soutien désigne les services et les différentes ressources
disponibles pour la personne en transition. Les proches, la famille, les amis, les institutions
qu’elle fréquente et la communauté à laquelle elle appartient en font partie. La fonction
exercée par chaque source de soutien (expression d’affection, rétroaction, opinion, soutien
matériel et émotionnel) et leur façon de se déployer dans le contexte de transition (soutien
accru, diminué, interrompu) influencent la qualité du soutien perçu. Enfin, les Stratégies
réfèrent aux comportements adoptés, à l’attitude et aux décisions prises par la personne
23
pour s’adapter. Celle-ci peut tenter de modifier la situation de transition, de réfléchir au
sens qu’elle lui donne ou de gérer les tensions qu’elle occasionne (Pearlin et Schooler,
1978, cités dans Schlossberg et al., 1989).
Compte tenu de la variété des combinaisons possibles entre les quatre ressources,
les transitions peuvent prendre différentes formes (Doray et al., 2009). Dans ce contexte,
l’adaptation à la transition consiste à restaurer graduellement les ressources après avoir
identifié les faiblesses qu’elles comportent (Schlossberg, 1981). La Figure 1 met en
évidence les principaux éléments du modèle des transitions.
Figure 1 : Les principaux éléments du modèle des transitions selon Schlossberg (1981) et Schlossberg et al. (1989)
2.1.4 Les applications pratiques du modèle des transitions
À l’instar du modèle du DPIS qui sera décrit ultérieurement, dans le modèle
conceptuel des transitions, on postule que les personnes peuvent décider de la façon dont
elles s’y adaptent en mobilisant leurs quatre ressources. De leur côté, les intervenantes et
intervenants jouent un rôle de soutien dans l’examen et la mise à l’avant-plan des
ressources dont les personnes disposent pour traverser une transition (Goodman et al.,
2006). Sur le plan de l’intervention, Schlossberg et al. (1989) et Goodman et al. (2006)
proposent certaines modalités d’intervention en milieu scolaire dans les situations de
transition. Ils suggèrent, entre autres, de :
Regrouper au même endroit les personnes responsables des différents
services (recrutement, admissions, aide financière, orientation, etc.);
Offrir un cours d’intégration aux étudiantes et étudiants de première
année;
Créer des groupes permettant d’aborder la théorie des transitions et
d’évaluer les ressources des participantes et participants et;
Enseigner des techniques d’apprentissage.
Dans une perspective plus large, l’application du modèle des transitions pourrait
prendre la forme des interventions suggérées par Schlossberg et al. (1989) (Annexe 1).
Dans un contexte de non-événement, il peut s’avérer aidant que les intervenantes et
intervenants portent attention à la souffrance ressentie par la personne, à l’effet du non-
événement sur son entourage et au niveau d’espoir possible quant à l’atteinte de l’objectif
initial (Schlossberg, 2006 citée dans Goodman et al., 2006). Les interventions peuvent
également consister à proposer des stratégies (tenir un journal de bord, fixer de nouveaux
buts) ou initier des réflexions pour ébranler les croyances de la personne en transition
(importance du plan B, perception de ce qui est normal à un âge donné, etc.).
26
2.2 L’approche centrée sur le développement du pouvoir
d’intégration socioprofessionnelle (DPIS)
Pour comprendre l’efficience des pratiques à l’œuvre dans les cours axés sur l’OSP
tout en tenant compte des conditions dans lesquelles ces cours se déroulent, nous avons eu
recours à l’approche centrée sur le développement du pouvoir d’intégration
socioprofessionnelle (DPIS). Cette approche est issue du courant interactionniste
stratégique et se situe dans le champ de la psychologie sociale. À l’image de l’approche
centrée sur le développement du pouvoir d’agir (DPA), Le Bossé (2011) considère que la
finalité des pratiques d’aide consiste à miser sur la marge de manœuvre dont dispose
chaque personne pour s’affranchir des obstacles rencontrés.
Pour Le Bossé (2011), la finalité particulière des pratiques d’orientation consiste à
identifier les obstacles à la conduite autonome d’une démarche de choix professionnel et à
en favoriser l’élimination ou le dépassement. Dans ce contexte, le concept d’obstacle réfère
aux aspects structurels et aux dimensions personnelles qui posent problème à une personne.
Les intervenantes et intervenants se questionnent donc sur la nature du problème, la façon
de le résoudre et les marges de manœuvre possibles à cette fin. Le Bossé considère que le
rôle adopté par les praticiennes et praticiens les amène à inventer et appliquer des solutions
adaptées et originales12
conciliant les aspirations des personnes avec les ressources
disponibles dans leur milieu. L’approche centrée sur le DPIS inscrit l’intervention
professionnelle dans la recherche de conditions propices pour que les personnes lèvent les
obstacles qui restreignent leurs possibilités de réguler les situations qui sont importantes
pour elles, leurs proches ou leur collectivité. En lien avec ce qui précède, nous avons retenu
le concept de levier pour décrire les pratiques déployées par les intervenantes et
intervenants pour favoriser l’élimination ou le dépassement des obstacles liés à la transition
aux études supérieures.
12
Le Bossé (2011) désigne ces solutions de plusieurs façons différentes : éléments facilitants, points d’appui,
opportunités potentielles, conditions favorables, stratégies viables, pistes de changement, solutions
envisageables, etc.
27
2.3 Le modèle théorique d’indécision
Le modèle théorique d’indécision (Forner, 2010) apporte un éclairage sur les
transitions liées aux choix professionnels. L’auteur définit l’indécision scolaire et
professionnelle comme l’incapacité de faire un choix de programme d’études ou de carrière
alors qu’il est en situation de devoir le faire. La Figure 2 révèle les six facteurs susceptibles
d’expliquer l’indécision ou les sources d’indécision.
Figure 2 : Les 6 facteurs d’indécision (Forner, 2010)
Source : Picard et Thibault, 2012, p. 106
Indécision scolaire et professionnelle
Incapacité à faire un choix
de programmes d’études ou de carrière
Manque de connaissance de soi
Instabilité de la représentation de soi
Manque de méthode de décision
Difficulté à choisir entre différents buts
Manque d’information vocationnelle
Méconnaissance des programmes d’études, des métiers et
occupations
Manque de maturité vocationnelle
Report du choix scolaire et professionnel
Obstacles externes
Faits qui s’interposent dans la réalisation
du projet
Anticipations pessimistes
Perception de son choix
comme étant improbable
28
2.4 Question de recherche
Au regard de la problématique présentée au chapitre 1, l’articulation de trois
modèles conceptuels dans le présent chapitre s’avérait nécessaire pour refléter les
composantes de notre question de recherche. Ces trois modèles se situent dans le champ de
la psychologie sociale. Le modèle des transitions (Schlossberg, 1981) permet d’expliquer et
d’analyser le phénomène de la transition à la lumière des facteurs d’adaptation et des
ressources disponibles pour les personnes qui vivent un changement. Le modèle du DPIS
(Le Bossé, 2011) est propice à l’analyse des interventions grâce aux concepts d’obstacle et
de levier. De son côté, le modèle théorique d’indécision (Forner, 201) est nécessaire pour
adapter l’analyse au contexte d’une transition scolaire.
La question de recherche peut se lire comme suit : Quelles sont les pratiques
professionnelles incluses dans les cours axés l’OSP qui peuvent exercer un effet bénéfique
sur la démarche d’orientation des étudiantes et étudiants de la SAI, au moment de la
transition au collégial? Ce questionnement suscite les sous-questions suivantes :
Quels sont les obstacles rencontrés par les étudiantes et étudiants en
transition?
Quelles sont les pratiques professionnelles d’orientation déployées par les
responsables des cours axés sur l’OSP offerts aux étudiantes et étudiants
de la SAI dans les collèges québécois?
Parmi ces pratiques, quelles sont celles qui influencent positivement la
démarche d’orientation des étudiantes et étudiants de la SAI?
Comment les cours axés sur l’OSP exploitent-ils les quatre ressources du
modèle des transitions pour lever les obstacles inhérents à cette transition?
Le prochain chapitre décrit la méthodologie retenue pour répondre à la question de
recherche et aux quatre sous-questions qu’elle soulève.
29
Chapitre 3 : Méthodologie
Ce mémoire vise la description des caractéristiques des cours axés sur l’OSP et la
compréhension de leur efficience au regard des obstacles rencontrés par les étudiantes et
étudiants en transition. Conséquemment, nous avons choisi un devis qualitatif descriptif
permettant d’accéder aux représentations des membres du personnel professionnel des
collèges, qui ont une connaissance pratique de notre objet d’étude (Cossette, 2009).
3.1 Méthode d’analyse secondaire
La présente étude s’inscrit dans un programme de recherche mixte sur l’indécision à
l’arrivée au collégial (Picard et al., 2009-2013). Ce programme visait, entre autres, la mise
au jour des pratiques d’orientation déployées à la SAI dans le but d’en comprendre les
effets sur l’indécision ainsi que les facteurs explicatifs de tels résultats. L’analyse
secondaire des données a permis d’expliciter des éléments qui ne l’avaient pas été dans le
programme de recherche initial (Hinds, Vogel et Clarke-Steffen, 1997). Notre distance par
rapport à ce dernier a fait en sorte que nous n’avions pas d’idée préconçue de ce qui pouvait
émerger du corpus (Hinds et al., 1997). En outre, les objectifs du programme initial ont
donné une direction à l’analyse secondaire, tout en permettant l’émergence de nouveaux
éléments sur les cours axés sur l’OSP (Hinds et al., 1997).
L’analyse secondaire nous a également donné l’occasion d’accéder à un large
corpus de données récentes (2009-2010) découlant des échanges avec 23 professionnelles
et professionnels représentant 21 collèges. Dans le cadre d’un mémoire de maîtrise, il aurait
été impensable de rassembler une aussi grande diversité de données issues de plusieurs
sites. De plus, ce choix méthodologique a contribué à réduire les coûts et le temps associés
à la collecte de données. En effet, les mêmes données ont servi à explorer plus d’une piste
de recherche. De plus, elles étaient immédiatement disponibles au moment de l’analyse
(Dale, 1993). Enfin, au lieu de solliciter les professionnelles et professionnels à plusieurs
reprises et de mobiliser des équipes de travail différentes, l’analyse secondaire a permis de
diminuer le nombre de personnes impliquées (Dale, 1993).
30
La qualité des données et les thèmes qu’elles couvrent influencent la valeur d’un
fichier de données secondaires (Dale, 1993). Le Tableau 3 montre que nous avons respecté
les quatre critères de validité établis par Hinds et al. (1997).
Tableau 3 : Les critères attestant la validité d’un fichier de données secondaires
La condition des documents Aucun n’était abîmé ou manquant.
La qualité de la transcription Tous les documents étaient lisibles et
compréhensibles.
La compréhensibilité des
données Les erreurs de typographie ou de style n’ont
pas gêné la compréhension des données.
Le degré auquel les données
sont interprétables
La plupart des informations étaient en lien
avec les buts de la présente recherche. Nous
avons préalablement consulté les documents
afin de nous en assurer.
Bien que nous n’ayons pas participé à l’élaboration des schémas d’entrevues
individuelles ni aux groupes de discussion du processus de collecte de données (Dale,
1993), le corpus comportait suffisamment d’informations pour procéder à leur analyse.
D’ailleurs, la triangulation des sources de données a contribué à contourner cette limite
(voir section 3.4.1). Enfin, pendant toute la durée de l’étude, nous avons pu communiquer
avec la responsable du programme de recherche initial, ce qui a facilité la compréhension
des données analysées (Hinds et al., 1997).
3.2 Corpus analysé
Compte tenu du but de la présente recherche et du cadre conceptuel choisi, l’analyse
des caractéristiques des cours axés sur l’OSP repose sur la mise en parallèle des leviers
déployés dans ces cours afin de lever les obstacles rencontrés par les étudiantes et étudiants
en transition. Dans ce contexte, les cours axés sur l’OSP constituent notre unité d’analyse.
Le témoignage des membres du personnel professionnel de 21 collèges a servi à décrire les
obstacles liés à la transition à l’arrivée au collégial et de repérer les leviers déployés à
l’intérieur des cours axés sur l’OSP offerts à la SAI, en référence à la situation de la session
d’automne 2009.
31
Parmi les 21 collèges de notre échantillon, on comptait 19 établissements
francophones et deux anglophones. Huit cégeps se situaient dans un grand centre urbain.
Onze des 17 régions administratives du Québec étaient représentées. Au moment de la
collecte de données, 16 collèges comptaient entre 1500 et 7000 étudiantes et étudiants. Les
cinq autres accueillaient moins de 1500 personnes; le plus petit collège a enregistré environ
175 inscriptions en 2009.
Dix-huit professionnelles et professionnels agissaient à titre de conseillères et
conseillers d’orientation (c.o.) ou d’aides pédagogiques individuels (a.p.i.) à l’intérieur de
leur collège. Quelques personnes portaient d’ailleurs plus d’un titre. Les autres personnes
s’identifiaient soit comme enseignantes ou enseignants, soit comme conseillères ou
conseillers pédagogiques. Dans quelques collèges, les professionnelles et professionnels
siégeaient sur un comité de coordination de la SAI.
La Figure 3 illustre les étapes du recrutement et les critères utilisés dans notre
analyse secondaire pour sélectionner les cégeps offrant un cours axé sur l’OSP.
Figure 3 : Les étapes et les critères utilisés pour sélectionner les collèges offrant un
cours axé sur l’OSP
Programme de recherche initial- 21 collèges participants
Critère 1 : Offrir la
SAI avec un volet
Orientation.
Critère 2 : Respect des proportions
(taille, région, langue d'ensei-
gnement).
Étude secondaire - 11 collèges préselectionnés
Critère 3 : Avoir été préidentifié comme un collège offrant un cours crédité dont au mois 60% des heures
de formation sont consacrées à l'OSP.
Critère 4 : Avoir été préidentifié comme un collège offrant un cours crédité où sont incluses des activités d'OSP pendant 40% ou moins du
temps de formation.
Raffinement de la sélection :
9 collèges retenus
Critère 5 : Offir au moins une
heure d'activités liées à l'OSP par
semaine, totalisant environ 15 heures
par session.
32
La méthodologie du programme de recherche initial est résumée à l’Annexe 2. Un
répertoire de pratiques a été créé à partir des données recueillies dans les 21 collèges
(Picard, Soucy et Demers, sous presse). Cet outil a permis d’identifier les cégeps offrant un
cours axé sur l’OSP qui répondent aux critères 3 et 4 (Figure 3).
Comme le critère 4 ne distingue pas les cours sur le plan de l’intensité des
interventions liées à l’OSP, nous avons raffiné notre sélection afin de renforcer la validité
interne de l’étude. Ainsi, nous avons utilisé un critère supplémentaire (critère 5) pour cibler
les cégeps qui prévoyaient consacrer un minimum de 15 heures par trimestre aux activités
liées à l’orientation, dans les cours axés sur l’OSP. Nous avons d’abord consulté les
données sur les cours offerts par les cinq établissements répondant au critère 4. Puis, nous
avons identifié deux collèges dont la proportion du contenu lié à l’orientation, dans les
cours axés sur l’OSP, ne permettait pas d’atteindre le critère 5. Ces collèges ont donc été
exclus de l’analyse sur les leviers des cours.
En fin de compte, nous avons retenu neuf collèges pour l’analyse des cours axés sur
l’OSP13
. Lors de la préidentification des collèges correspondant au critère 3, l’un d’eux a
été identifié à tort comme un cours crédité. Il s’agit d’une limite à l’étude, car la motivation
à réussir un cours peut être plus élevée lorsque des unités y sont rattachées. L’analyse des
résultats en tient compte.
3.3 Collecte de données
Les trois étapes de la collecte de données se sont déroulées au cours de l’année
scolaire 2009-2010, en milieu naturel (Fortin, 1996). Autrement dit, nous avons repéré les
pratiques mises en œuvre dans les cours axés sur l’OSP sans intervenir pour les modifier.
Les détails relatifs aux instruments de collecte de données figurent à l’Annexe 2.
Dans le programme de recherche initial, des informations sur les pratiques
d’orientation déployées à la SAI ont d’abord été colligées à partir du portail internet des
collèges participant à la recherche. À l’automne 2009, des entrevues téléphoniques avec les
membres du personnel professionnel des collèges recrutés ont été effectuées. Dans les
13
Un des établissements offre le cours en deux formules différentes.
33
semaines qui ont suivi, ces personnes ont fourni des documents relatifs aux cours axés sur
l’OSP, comme des syllabus de cours. Finalement, huit groupes de discussion ont été
organisés au printemps 2010. Le Tableau 4 résume le type de données consulté pour chaque
collège.
Tableau 4 : Les données consultées par collège et par source
Collège
Notes
d’entrevues
téléphoniques
Documents remis Groupes de discussion
Syllabus de
cours Autres documents
Nombre de
représentants
au premier
Nombre de
représentants
au second
1 Oui Oui Plan-cadre du cours 1 0
2 Oui Oui (un pour
chaque cours) Bilan SAI 2008 et
plan d’un atelier 1 1
3 Oui Oui 1 1
4 Oui Non 1 2
5 Oui Non Résumé des
activités 1 1
6 Oui Non Monographie du
programme 2 2
7 Oui Oui 1 1
8 Oui Non 1 1
9 Oui Oui 1 1
Collèges n’offrant
pas de cours axé
sur l’OSP)
- - - 11/12 11/12
3.3.1 Entrevues téléphoniques
Entre le 20 octobre et le 6 novembre 2009, une entrevue téléphonique semi-dirigée
d’environ 40 minutes a été réalisée une personne représentant chaque collège participant à
la recherche. Le but de cet entretien était de répertorier les pratiques d’orientation en place
à la SAI, de même que les éléments de l’environnement éducatif du collège. Une personne
a répondu au questionnaire par écrit. En outre, la méthode choisie a permis de rejoindre la
majorité des professionnelles et professionnels ayant accepté de participer à l’étude, ce qui
a renforcé la validité des données (Fortin, 1996).
En ce qui concerne la description des cours axés sur l’OSP, les représentantes et
représentants des neuf collèges retenus pour l’analyse secondaire ont collaboré à l’entrevue
34
téléphonique. Sept ont fourni un document (syllabus de cours ou autre) décrivant le cours
offert dans leur établissement.
3.3.2 Groupes de discussion
Afin de favoriser la spontanéité dans les échanges, deux séries de groupes de
discussion ont été organisées. Ainsi, les professionnelles et professionnels ont pu définir
leur propre réalité et voir leur point de vue confronté à celui de leurs collègues dans un
environnement intersubjectif (Leclerc, Bourassa, Picard et Courcy, 2009). Au premier
groupe de discussion, 20 des 21 collèges étaient représentés, alors que 19 l’étaient lors du
second.
Un groupe de trois à huit personnes a été formé dans quatre villes : Saguenay,
Québec, Montréal et Drummondville. Chacun s’est réuni à deux reprises, totalisant huit
rencontres d’environ deux heures et demie chacune. À chaque fois, les professionnelles et
professionnels avaient reçu par courriel la maquette des questions afin de se préparer aux
discussions, ainsi qu’un portrait statistique des étudiantes et étudiants de leur collège14
. Ce
dernier décrivait leur parcours avant d’arriver au cégep et l’évolution de leur indécision au
cours de la première session. L’objectif des échanges consistait à répertorier les conditions
éducatives et les pratiques d’orientation mises en œuvre à la SAI dans chaque cégep (Picard
et Thibault, 2012). Une animatrice posait la majorité des questions, tandis qu’une autre
personne prenait des notes en vue de la rédaction du compte-rendu des rencontres. Chacune
d’elles a été enregistrée par deux magnétophones.
La première série de groupes de discussion a eu lieu entre le 17 et le 31 mars 2010.
La description des pratiques d’orientation mises en place à la SAI et l’analyse de leurs
effets sur le développement vocationnel et le parcours des étudiantes et étudiants
constituaient les deux principaux objectifs des réunions. Entre le 18 mai et le 18 juin 2010,
14
Ce portrait fait écho au volet quantitatif du programme de recherche sur l’indécision à l’arrivée au collégial
(Picard et al., 2009-2013). Les données quantitatives ont été recueillies en 2009 auprès de 973 étudiantes et
étudiants répartis dans les 21 collèges participant à la présente étude. 506 étaient inscrits au volet Orientation
de la SAI, tandis que 467 autres faisaient partie d’un programme technique ou préuniversitaire (groupe de
comparaison). Tous les étudiants vivaient une transition aux études collégiales. Les deux groupes présentaient
des caractéristiques semblables sur le plan de l’étape du parcours scolaire et de la proportion selon le genre.
35
la deuxième série de rencontres a été tenue. L’objectif était d’aborder la transformation des
pratiques déployées par les professionnelles et professionnels, qui avaient signé le contrat
collaboratif du programme de recherche les engageant à modifier une de leurs interventions
dans la deuxième année de l’étude. Un résumé de la méta-analyse de Brown et McPartland
(2005) sur les pratiques porteuses en OSP leur avait été remis. Ainsi, les participantes et
participants devaient partager leur perception de l’efficience des différentes pratiques mises
de l’avant à la SAI en indiquant celles qui avaient été modifiées à l’automne 2010.
Le programme de recherche initial (Picard et al., 2009-2013) a été approuvé par le
Comité d’éthique de la recherche de l’Université Laval (certificat d’éthique numéro 2009-
127 R-2, approuvé le 23-08-2011). Les autorisations pour l’analyse secondaire ont été
obtenues par la suite. Toutes les personnes impliquées dans cette étude ont donc 1/ reçu
l’autorisation de la direction de leur collège; 2/ signé un formulaire de consentement les
informant qu’il était possible de se retirer en tout temps du projet 3/ signé une entente de
confidentialité assurant que la collecte et l’analyse de données se feraient sans que personne
ne puisse être identifié par son nom, celui de son collège ou par une particularité propre à
son contexte (Dale, 1993). Enfin, à l’exception d’un dédommagement pour les frais de
déplacement, aucune compensation financière n’a été versée aux participantes et
participants.
3.4 Techniques d’analyse qualitative
Au moment de l’analyse initiale, le verbatim de chaque groupe de discussion avait
été rédigé à partir de l’enregistrement des rencontres. Au besoin, nous avons consulté les
fichiers audio pour s’assurer de saisir le contenu des échanges avec exactitude, ce qui a
également permis de prendre en considération le ton et l’expression des professionnelles et
professionnels. La plupart se présentaient ou nommaient le cours axé sur l’OSP offert dans
leur collège avant de le décrire. À la lecture du verbatim, nous avons donc été en mesure
d’associer la grande majorité des propos à la personne qui les avait tenus.
Nous avons choisi de codifier l’ensemble des données à l’aide du logiciel d’analyse
qualitative QDA Miner. Les données issues des groupes de discussion étaient déjà en
36
format électronique. Nous avons donc numérisé les notes prises lors des entrevues
téléphoniques et les documents relatifs aux cours axés sur l’OSP. Ces données ont ensuite
été converties en format électronique à l’aide d’un logiciel permettant la reconnaissance de
caractères (ABBYY Finereader).
3.4.1 Les bénéfices de la triangulation
Dans le cadre de la présente étude, nous avons utilisé trois méthodes de collecte de
données, afin de favoriser la convergence des résultats (Fortin, 1996) et augmenter leur
crédibilité (Cossette, 2009). Somme toute, la triangulation des données a contribué à
contourner au moins trois limites de la recherche.
D’abord, bien que les représentantes et représentants de tous les collèges offrant un
cours axé sur l’OSP aient collaboré à l’entrevue téléphonique, quatre n’ont pas fourni le
syllabus du cours. Deux personnes ont tout de même envoyé des documents pertinents pour
l’analyse. Les autres méthodes de collecte de données ont permis de compléter les
informations manquantes. Ensuite, lors des groupes de discussion, il est arrivé que le même
collège soit représenté par deux personnes, ce qui a contribué à renforcer la validité des
données. Toutefois, une personne n’a pas pu se prononcer sur les pratiques jugées
efficientes dans son collège, car elle était absente à la deuxième rencontre. En revanche,
elle avait fourni un syllabus de cours et un plan-cadre décrivant le cours axé sur l’OSP
offert dans son collège. Enfin, comme les syllabus de cours ont été rédigés à l’intention des
personnes inscrites aux cours axés sur l’OSP, les informations pertinentes pour la recherche
n’y étaient pas toujours décrites de façon détaillée. La triangulation a permis de remédier à
cet inconvénient, car chaque personne dont le collège offrait un cours axé sur l’OSP en
2009 a participé à l’entrevue téléphonique et à au moins un des deux groupes de discussion.
Les données recueillies ont été regroupées et analysées à partir du modèle des
transitions. Celui-ci a été complété par le modèle théorique d’indécision et par l’approche
centrée sur le DPIS. La Figure 4 permet de visualiser l’arborescence utilisée pour
répertorier les obstacles à la transition entre le secondaire et le collégial. Le Tableau 5
présente l’énumération des obstacles qui ont émergé lors de la codification des données.
Figure 4 : Arborescence utilisée pour répertorier les obstacles à la transition aux études supérieures
Facteurs influençant l’adaptation à la transition
Caractéristiques de la transition Caractéristiques individuelles Caractéristiques de l’environnement
Type de
transition
anticipée,
imprévue, non-
événement
Facteurs
d’indécision
Parcours
scolaire Âge et période de la vie
Genre et identification sexuelle
État de santé
Compétences psychosociales
Statut socioéconomique
Appartenance culturelle
Système de valeurs
Soutien interpersonnel
Soutien institutionnel
Environnement
physique
Variables :
- Déclencheur - Affect
- Moment - Durée
- Changement de rôle
- Niveau de stress généré
- Etc.
Manque de
connaissance de soi
Manque de maturité
vocationnelle
Manque d’information
vocationnelle
Manque de méthode
de décision
Anticipations
pessimistes
Obstacles externes
Attitudes par rapport à soi
Attitudes par rapport
au monde
Comportements et attitudes
Contingences du
système scolaire
Fonctionnement
du collège
Attitude négative
à l’égard de la
SAI
Expériences précédentes de transition
38
Tableau 5 : Codification des obstacles découlant du cadre conceptuel
Catégories Définition Obstacles associés
Car
acté
rist
iqu
es d
e la
tra
nsi
tion
Type de
transition
Anticipée, Imprévue, Non-
événement
Variables (déclencheur, affect,
moment, durée, changement de rôle,
niveau de stress généré, etc.) Pas d’obstacle associé
Parcours scolaire Difficultés rencontrées tout au long du
parcours scolaire
Difficultés scolaires Préalables manquants Méthode de travail inadéquate
Facteurs
d’indécision
Manque de
connaissance de soi Manque de connaissance de soi Manque de connaissance de soi
Manque de
maturité
vocationnelle
Report du choix scolaire et
professionnel Report du choix scolaire et professionnel
Manque de
méthode de
décision
Difficulté à choisir entre différents
buts Manque de méthode pour décider
Manque
d’information
vocationnelle
Méconnaissance des programmes
d’études, des métiers et des
professions
Manque d’information sur le monde vocationnel Méconnaissance des ressources prof. du milieu
Anticipations
pessimistes Perception de son choix comme étant
improbable Peur de l’échec Peur de mal s’adapter aux études collégiales
Obstacles externes Faits qui s’interposent dans la
réalisation d’un projet Contingentement Dates butoir à respecter
Car
acté
rist
iqu
es
ind
ivid
uel
les
Âge et période de la vie Âge et période de la vie Obstacles liés à l’âge
Genre et identification sexuelle Genre et identification sexuelle Obstacles liés au genre
État de santé Influence de l’état de santé Obstacles liés à une situation de handicap
Statut socioéconomique Influence du statut socioéconomique Faible scolarité des parents
Compétences
psychosociales Attitudes par
rapport à soi
- Perception de soi
- Lieu de contrôle - Sens des responsabilités
Besoin d’encadrement Manque de confiance en soi Attribution des difficultés à des facteurs externes
39
Catégories Définition Obstacles associés
Car
acté
rist
iqu
es
ind
ivid
uel
les
(suit
e)
Compétences
psychosociales
(suite)
Attitudes par
rapport au monde Optimisme Insécurité
Attitudes par
rapport à la
démarche
- Capacité d’adaptation
- Buts réalistes
- Initiative
- Planification
- Efforts pour atteindre ses buts
- Capacité à accepter le succès et
l’échec
Manque de motivation Croyances erronées ou incohérentes dans
l’élaboration des projets Attitude résistante Difficulté à se projeter dans l’avenir Conciliation entre études, travail et famille
Expériences précédentes de
transition Influence des expériences précédentes
de transition Pas d’obstacle associé
Appartenance culturelle Influence de l’appartenance culturelle Pas d’obstacle associé Système de valeurs Influence du système de valeurs Pas d’obstacle associé
Car
acté
rist
iqu
es d
e l’
env
iron
nem
ent
Soutien interpersonnel Soutien reçu des proches, de la famille
et du réseau social Influence négative des pairs Manque d’appui des parents
Soutien
institutionnel (Collège)
Contingences du
système scolaire Caractéristiques du système scolaire
influençant l’adaptation à la transition Changements anticipés dans le système d’éducation Rigidité des procédures
Fonctionnement du
collège
Caractéristiques du fonctionnement du
collège influençant l’adaptation à la
transition
Nombre insuffisant de ressources professionnelles Instabilité des responsables de cours Manque de financement à la SAI Manque de coordination Système de communication inadéquat Contraintes administratives
Attitude négative à
l’égard de la SAI
- Ouverture - Collaboration - Etc.
Manque d’ouverture et de collaboration des membres
de la direction Préjugés et résistances des membres de la direction
et du personnel enseignant
Environnement physique
- Climat - Milieu urbain ou rural - Services - Etc.
Éloignement géographique du collège Obstacles liés à la taille du collège Éloignement entre le collège et la résidence
Chapitre 4 : Présentation et analyse des résultats
Les pratiques professionnelles ont pour finalité la mise en œuvre de conditions
propices à la levée les obstacles qui restreignent les possibilités et les marges de manœuvre
individuelles (Le Bossé, 2011). En lien avec l’objectif du présent mémoire, nous cherchons
à cerner dans quelle mesure les pratiques professionnelles mises en œuvre dans les cours
axés sur l’OSP offerts à la SAI permettent aux étudiantes et étudiants de développer leur
marge de manœuvre dans le processus d’orientation qui s’inscrit au cœur de la transition
aux études collégiales. Au terme de notre démarche de présentation des résultats, nous
voulons mettre en parallèle les obstacles rencontrés par les étudiantes et étudiants en
transition et les leviers déployés dans les cours axés sur l’OSP.
À cette fin, nous procéderons en trois étapes successives. À la section 4.1 –
première étape de la présentation des résultats –, un portrait descriptif des obstacles à la
transition aux études supérieures sera brossé. Ce portrait est structuré de façon à suivre les
trois ordres de caractéristiques influençant l’adaptation à une transition, à savoir : les
caractéristiques inhérentes à la transition, les caractéristiques individuelles et celles liées à
l’environnement (voir le Tableau 2). Il renvoie à la description d’un contexte général des
obstacles à la transition aux études supérieures. À la seconde étape, développée à la section
4.2, les caractéristiques des cours axés sur l’OSP seront décrites à la lumière des syllabus
de cours et des commentaires des professionnelles et professionnels des collèges dans
lesquels cette pratique est déployée. À cette fin, nous mettrons à l’avant-plan les quatre
ressources dont disposent les personnes pour traverser une transition (Situation, Soi,
Soutien et Stratégies) (Figure 1). Ces ressources renvoient aux leviers présents dans les
cours axés sur l’OSP permettant de composer avec les obstacles à la transition répertoriés
précédemment. À la troisième étape, l’auto-évaluation des effets des cours axés sur l’OSP
par les professionnelles et professionnels sera résumée dans la section 4.3. En conclusion à
la présentation des résultats, le Tableau 11 met en parallèle les obstacles à la transition aux
études supérieures, les leviers des cours axés sur l’OSP et les effets de ceux-ci. Rappelons
que nos sources de données (entrevues téléphoniques semi-dirigées, syllabus de cours et
groupes de discussion) font en sorte que le point de vue des étudiantes et étudiants est
41
médiatisé par le témoignage des membres du personnel professionnel des collèges ayant
participé à la recherche, et cela dans l’ensemble de la présentation des résultats.
4.1 Les obstacles à la transition aux études collégiales
Nous avons utilisé les trois catégories de facteurs jouant un rôle dans l’adaptation à
une transition (Tableau 5) pour répertorier les obstacles inhérents à la transition aux études
collégiales : les caractéristiques de la transition, les caractéristiques individuelles et les
caractéristiques de l’environnement. Compte tenu de l’essence même de ces catégories
(Tableau 2), c’est donc le contexte général de la transition aux études supérieures qui sera
décrit. À la section suivante, un portrait du contexte spécifique des cours axés sur l’OSP
sera dépeint à partir du repérage des leviers propres à ces cours.
4.1.1 Caractéristiques de la transition
Dans cette section, nous présentons les caractéristiques de la transition aux études
supérieures susceptibles d’être vécues comme des obstacles. En plus de ces
caractéristiques, deux nouvelles catégories d’obstacles ont émergé des propos des
professionnelles et professionnels, lors des groupes de discussion. Ainsi, les observations
en lien avec le parcours scolaires sont réunies dans la catégorie Parcours scolaire, tandis
que la catégorie Facteurs d’indécision réfère aux obstacles liés à l’indécision à l’arrivée au
collégial (voir Tableau 5).
4.1.1.1 Type de transition
Une transition est définie de manière singulière par la personne qui la traverse
lorsqu’elle perçoit un changement d’état (Schlossberg, 1981). À ce titre, les personnes en
transition aux études collégiales peuvent vivre ce changement de façon différente. Leur
réaction dépend de la durée de la transition, du moment auquel elle survient, du niveau de
contrôle perçu sur les changements, des changements de rôle occasionnés, du niveau de
stress généré, etc. Ainsi, dans chaque situation particulière, divers bouleversements peuvent
accompagner la transition aux études supérieures (départ du domicile familial, début d’un
emploi à temps partiel, etc.).
42
Lorsque la transition inclut un passage en SAI, les changements s’opèrent sur deux
plans. En effet, les difficultés propres au passage entre un dispositif d’accueil temporaire et
un programme d’études régulier s’ajoutent aux obstacles liés au passage du secondaire au
collégial. À la SAI, les trois types de transition (Figure 1) sont possibles et ont été rapportés
par les professionnels, lors des groupes de discussion :
Transition anticipée : Cette catégorie reflète le choix de s’inscrire à la SAI
en sachant que les cours préalables requis pour entrer dans un programme
ne sont pas complétés. Ce type de transition peut également être vécu
lorsqu’un choix de programme n’a pas été effectué avant la date butoir.
Transition imprévue : Ce type de transition renvoie à une inscription à la
SAI découlant d’un événement non attendu. Il peut s’agir, par exemple,
d’un échec scolaire au secondaire compromettant l’admission au cégep.
Bref, le projet initial est retardé, mais toujours envisageable.
Transition de type non-événement : Il arrive que le projet scolaire souhaité
ne se concrétise pas. Les obstacles rencontrés (refus dans un programme
d’études, découverte d’un aspect décevant de la profession rêvée, etc.)
obligent une remise en question des aspirations initiales.
4.1.1.2 Parcours scolaire
L’adaptation à la transition aux études supérieures peut être affecté par la façon dont
se sont déroulées les études secondaires, notamment sur le plan des difficultés scolaires :
« La contrainte […], c’est souvent les résultats académiques. Parfois, ils ont un choix de
carrière bien défini. Mais dans les faits, ils n’arriveront pas à l’objectif, au but final. » En
plus, la réussite des cours de mise à niveau représente parfois un défi pour les étudiantes et
étudiants qui entrent au collégial à la condition de réussir les unités manquantes pour
l’obtention de leur DES15
: « Je m’aperçois que, si on en donne trop à certains élèves, ils
15
Pour être admis dans un programme conduisant à l’obtention d’un diplôme d’études collégiales (DEC), les
élèves doivent être diplômés de l’ordre secondaire. Ils peuvent cependant être admis s’il leur reste six unités
ou moins à réussir. Dès lors, des activités de mise à niveau peuvent leur être imposées pour compléter
certaines matières manquantes (Service régional d’admission du Montréal métropolitain [SRAM], 2011a).
43
échouent leurs cours à la pelletée. » En outre, malgré un choix professionnel défini, les
faibles résultats scolaires peuvent empêcher la poursuite des études dans la voie privilégiée.
Dans la même veine, il arrive que les cours préalables nécessaires pour être admis
dans un programme d’études16
n’aient pas été réussis : « L’élève s’inscrit en SAI en
provenance du secondaire, soit parce qu’il lui manque des préalables pour un futur
programme qu’il vise, soit parce qu’il a été refusé dans un programme et il ne sait plus où
aller. » Dans ce contexte, les cours exigés (mathématiques, sciences, etc.) doivent être
complétés pendant la première session d’études collégiales. Ainsi, les choix d’orientation
ne résultent pas seulement d’un ensemble de décisions individuelles; ils dépendent
également des exigences institutionnelles (Doray et al., 2009). Ces dernières peuvent
s’avérer lourdes de conséquences, dans la mesure où elles provoquent le retard ou
l’abandon de certains projets scolaires et professionnels.
Enfin, la mauvaise qualité des méthodes de travail peut elle aussi contraindre la
réalisation des projets : « Certains élèves ont eu de mauvaises habitudes de travail. Là, ils
essaient de prendre une grosse bouchée pour rattraper le retard qu’ils ont pris. […] On leur
demande de faire du marathon quand ils n’ont jamais appris à faire du jogging! » Bref, les
difficultés dans l’organisation des idées, dans la gestion du temps et dans la recherche
d’informations peuvent complexifier la démarche d’orientation. L’enseignement de
techniques d’apprentissage fait partie des recommandations de Schlossberg et al. (1989)
pour faciliter le passage d’une transition.
4.1.1.3 Facteurs d’indécision
L’arrivée au collégial peut être l’occasion de réfléchir au projet scolaire et
professionnel. Parfois, cette introspection provoque la remise en question du choix
d’orientation, accompagnée d’une période d’indécision. Cette section décrit les obstacles
liés à cet aspect de la transition, en référence aux obstacles répertoriés au Tableau 5.
16
Pour être admis dans certains programmes, les élèves doivent satisfaire aux conditions particulières
d’admission, en plus d’être diplômés du secondaire. Certaines sont énoncées par le ministre, d’autres sont
établies par les collèges (SRAM, 2011a).
44
Manque de connaissance de soi
Le manque de connaissance de soi, de ses intérêts et de ses aptitudes fait partie des
obstacles à l’orientation. À ce sujet, une personne rapporte le discours tenu par les
étudiantes et étudiants et partage ensuite son opinion sur le sujet : « Au secondaire, on a
beaucoup d’activités d’information, mais peu d’activités sur soi-même. [...] Présenter une
multitude de programmes quand tu ne te connais pas... »
Manque de maturité vocationnelle
Au moment de l’inscription au cégep, les élèves du secondaire peuvent avoir choisi
un programme d’études sans avoir précisé leurs intérêts professionnels. Il arrive même que
la SAI soit choisie au premier tour d’admissions17
, ce qui peut générer un certain malaise
chez les professionnelles et professionnels : « Les élèves qui arrivent sans projet, ils sont
désorientés. Quand on voit un élève, au premier tour d’admissions, appliquer au collège et
choisir le cours [axé sur l’OSP], pour moi, c’est un problème. Il ne devrait pas y avoir ça
ici; il remet à plus tard. »
Ainsi, l’absence d’un projet professionnel au moment de l’entrée au collège peut
provoquer un retard dans le cheminement vocationnel. Or, le report de la réflexion sur le
choix de carrière entraîne un retard dans la construction du projet professionnel et dans
l’anticipation des changements liés à la transition.
Manque de méthode de décision
Une méthode de prise de décision inadéquate peut constituer une source
d’indécision : « Moi, je considère que lorsqu’ils ont de la misère à choisir, c’est parce qu’ils
ne sont pas capables de synthétiser. » Autrement dit, la Stratégie choisie pour traverser une
transition est parfois à redéfinir.
17
Les élèves doivent se limiter à une seule demande d’admission par tour. En cas de refus, ils ont la
possibilité de faire une nouvelle demande au deuxième tour (1er
mai) et au troisième tour (1er
juin) (SRAM,
2011b).
45
Manque d’information sur le monde vocationnel
Les connaissances sur le plan de l’ISEP (information sur le système scolaire ou les
programmes d’études) sont parfois insuffisantes, ce qui amène les professionnelles et
professionnels à se questionner sur les démarches effectuées au secondaire par les élèves :
« Les connaissances en information scolaire et professionnelle des fois, on se demande ce
qu’ils ont fait au secondaire… » Lors d’un des groupes de discussion, une personne a
rapporté son expérience d’animation d’ateliers sur la transition secondaire-collégial, dans
les écoles secondaires de sa région : « Depuis qu’il n’y a plus de cours d’ECC [Éducation
au choix de carrière], il y a une méconnaissance assez incroyable des programmes d’études
collégiales. Il y a plusieurs endroits où on ne leur parle pas du tout des techniques. […] Ils
ne connaissent que les programmes préuniversitaires. » En outre, une diffusion incomplète
de l’ISEP peut nuire à la démarche d’orientation des étudiantes et étudiants.
Un autre défi inhérent à la transition aux études supérieures réside dans la
méconnaissance des ressources disponibles dans le nouveau milieu ainsi que des services
offerts au cégep ou dans la communauté (groupes communautaires, organismes, etc.). À ce
sujet, une personne expose sa stratégie pour faire connaître les ressources disponibles dans
le centre de documentation des services d’orientation : « J’irais en classe et j’apporterais
quelques guides, dont celui des études universitaires et celui des études collégiales, pour
dire ce qu’on retrouve dans un guide comme ça. Puis leur dire que les guides, on les a. Ça,
je ne suis pas sûr qu’ils le savent. En fait, je suis pas mal sûr qu’ils ne le savent pas. » Une
méconnaissance des services professionnels offerts dans le collège et dans le milieu peut
biaiser l’évaluation de la ressource Soutien dont disposent les personnes en transition. En ce
sens, il s’agit d’un obstacle à la transition aux études supérieures.
Anticipations pessimistes
Dans une autre optique, l’adaptation aux études collégiales est parfois anticipée :
« On a vraiment des gens qui se demandent s’ils seraient capables de suivre des cours au
collégial. Ils se questionnent eux-mêmes pour savoir s’ils ont les aptitudes pour suivre un
programme collégial. » Il arrive également que la conciliation entre le rythme des études et
les autres sphères de vie soit une source d’inquiétude. D’ailleurs, tout changement implique
46
un certain niveau de stress, peu importe s’il est perçu positivement ou négativement par la
personne qui le vit (Schlossberg, 1981). Bref, la crainte de mal s’adapter aux études
collégiales peut gêner l’élaboration des projets professionnels.
Dans la même veine, le passage du secondaire au collégial génère des appréhensions
sur le plan de la réussite scolaire : « Tu les mets dans une situation d’examen et ils
performent moins bien. Ils s’attendent à avoir beaucoup de difficulté. » La peur de
l’inconnu peut influencer le niveau de stress et la perception négative liée à un changement
(Schlossberg, 1981). En ce sens, la peur de l’échec représente une crainte inhérente à la
transition aux études supérieures.
Obstacles externes
La capacité d’accueil limitée de certains programmes incite les collèges à utiliser
des procédures de sélection. Les personnes qui présentent un dossier scolaire trop faible
pour répondre à ces exigences sont refusées (SRAM, 2011c), ce qui provoque le
développement de stratégies particulières : « Les techniques humaines sont des
programmes contingentés. Nécessairement, on a une clientèle qui se retrouve un petit peu
déçue, à l’automne. Ils attendent de faire une année au collégial dans le but de refaire une
demande d’admission l’année suivante. » Dans certains établissements, même les
demandes d’admission en SAI excèdent la capacité d’accueil des collèges : « Je trouve un
peu indécent de refuser au premier tour un étudiant qui s’en vient en accueil. Il a des notes
pas pires, mais parce qu’il y en a qui sont meilleurs que lui, ils s’en viennent en accueil…
Tu sais, au plan des valeurs, au plan de terre d’accueil... Le mot accueil et intégration
[…] » Ainsi, les rigidités structurelles inhérentes au système d’éducation caractérisent
l’entrée aux études supérieures. Dans ce contexte, le refus dans un programme convoité
peut être vécu comme un non-événement (Schlossberg et al., 1989), ce qui rend la
transition plus pénible.
Dans la même lignée, l’obligation de respecter les dates butoir pour la demande
d’admission ou pour l’abandon des cours nécessite des ajustements. Par exemple, la
demande d’admission dans un programme d’études qui débute à la session d’automne doit
47
être déposée avant le 1er
mars18
. Au secondaire, cette échéance peut donner lieu à un choix
précipité, lorsque la réflexion sur le choix professionnel n’est pas complétée. À la SAI,
cette date butoir représente également un obstacle, surtout à la session d’hiver : « La
pression est plus forte, ils ont seulement janvier et février pour consolider leur choix. » En
ce sens, autant au secondaire qu’au cégep, les dates butoir fixes constituent un obstacle à la
transition entre les deux ordres d’enseignement.
4.1.2 Caractéristiques individuelles
Des obstacles ont été répertoriés en ce qui touche cinq des huit caractéristiques
individuelles jouant un rôle dans l’adaptation à une transition (Tableau 5), lors des groupes
de discussion : l’âge, le genre, l’état de santé, les compétences psychosociales et le statut
socioéconomique.
4.1.2.1 Âge et période de la vie
Le moment de la vie auquel survient la transition aux études collégiales peut être
perçu comme un obstacle. D’une part, les plus jeunes peuvent hésiter à choisir un
programme d’études les obligeant à quitter le domicile familial. D’autre part, les plus âgés
sont portés à se presser dans leurs projets scolaires : « Je veux faire vite. Un DEC [Diplôme
d’études collégiales] de trois ans, pas quatre ans. […] Je n’ai pas de temps à perdre. »
Schlossberg (1981) souligne que, dans le sens commun, on associe généralement un
type de transition avec un âge et un moment précis dans la vie (ex. : graduation, mariage,
retraite, etc.) Ainsi, l’adaptation à la transition est influencée par l’âge biologique (puberté,
ménopause, etc.), psychologique (capacité de s’adapter aux pressions sociales), social
(participation aux rôles sociaux) et fonctionnel (répondre aux performances attendues à un
âge donné) (Spierer, 1977 cité dans Schlossberg, 1981). En ce sens, indépendamment de
l’âge chronologique, la perception d’être trop jeune ou trop âgé pour entrer aux études
supérieures peut constituer un autre obstacle à l’adaptation à cette transition.
18
La date limite pour présenter un dossier complet d’admission est le 1er
mars pour la session d’automne et le
1er
novembre pour la session d’hiver (SRAM, 2011b).
48
4.1.2.2 Genre et identification sexuelle
Dans la même veine, le genre peut influencer l’adaptation à la transition aux études
supérieures. Une personne commente le comportement d’un groupe de garçons dans un
cours axé sur l’OSP : « Ces garçons-là sont moins intéressés par la formule tuteurs, ce qui
me confirme que c’est une clientèle avec qui il faut travailler différemment. » Selon
Schlossberg (1981), la façon dont les hommes et les femmes s’approprient les attitudes et
les comportements typiquement masculins ou féminins influence leur degré de facilité à
s’adapter aux changements qui surviennent. Ainsi, si les activités organisées par les
collèges ne tiennent pas compte du genre des étudiantes et étudiants, l’évaluation de leur
Soi comme ressource d’adaptation à la transition aux études supérieures risque d’être
négative.
4.1.2.3 État de santé
L’état de santé de certaines personnes peut constituer une source de tension
(Schlossberg, 1981). Dans un contexte de transition du secondaire au collégial, les services
adaptés offerts aux étudiantes et étudiants en situation de handicap19
sont parfois limités :
« À l’automne dernier, on était dans un contexte qui a limité notre offre de service. C’est
que notre service s’occupe aussi de l’aide aux élèves qui ont des limitations. Il y a 15 ans,
on parlait de 15 élèves. À l’automne, c’était 100 élèves. Donc c’est une clientèle qui est très
exigeante avant le début de la session. » Dans ce collège, l’effectif des personnes en
situation de handicap excède la capacité d’accueil des services d’aide, ce qui peut être lourd
de conséquences pour l’adaptation à la transition des étudiantes et étudiants dans le besoin.
4.1.2.4 Statut socioéconomique
Concernant le statut socioéconomique, le corpus des travaux a montré la relation
significative entre le niveau d’études des parents et son influence sur les aspirations
professionnelles des enfants (Marcoux-Moisan et al., 2010) : « On sait que chez les garçons
ou chez les filles, la scolarité des parents a une influence sur l’ambition, et surtout la mère.
19
Les clientèles en situation de handicap désignent les étudiantes et étudiants qui présentent une incapacité
significative et persistante d’ordre moteur, sensoriel, organique, neurologique, un trouble de santé mentale, un
trouble de déficit d’attention avec ou sans hyperactivité ou un trouble d’apprentissage (Office des personnes
handicapées du Québec [OPHQ], cité dans Lavallée, 2011).
49
Ici, ça peut s’accoler. Dans les statistiques de mes étudiants en SAI, leurs parents sont
moins scolarisés que mon groupe témoin20
. » Dans cet extrait, il est question de la façon
dont le Soutien reçu par les parents est déployé dans le contexte de transition. En outre, lors
des groupes de discussion, les membres du personnel professionnel des collèges se sont
inquiétés de la qualité du soutien offert aux étudiantes et étudiants dont le niveau d’études
des parents était peu élevé.
4.1.2.5 Compétences psychosociales
Attitudes par rapport à soi
La mobilisation des étudiantes et étudiants pour leur démarche d’orientation est
parfois difficile (oubli de rendez-vous, faible participation aux activités organisées, etc.).
Les professionnelles et professionnels soutiennent que les consultations individuelles en
orientation pourraient répondre à un certain besoin d’encadrement : « Ils n’ont pas tous
besoin, et c’est correct. Je ne veux pas tous les avoir nécessairement. Mais j’aimerais les
questionner, parce qu’il peut s’agir d’un des fameux étudiants qui s’en vont en techniques
policières et qui ne viennent pas me voir parce qu’eux, leur choix est fait. Je voudrais
amorcer une réflexion, leur demander : Si jamais tu es refusé, as-tu un plan B? » En plus
des consultations individuelles, d’autres formes d’encadrement peuvent faciliter
l’adaptation à la transition. Il en sera question à la section 4.2.
Le manque de confiance en soi peut également poser un défi aux étudiantes et
étudiants en transition aux études supérieures. À la SAI, il arrive que leurs perceptions se
modifient entre le début et la fin des études collégiales. Ce changement peut notamment
s’observer lors d’une soirée de remise de récompenses : « Il y a des étudiants qui ont
poursuivi leurs études à cause de ça. […] Puis d’autres pour qui leur nom est sur un
diplôme pour la première fois […] Pour eux, c’est officiel et c’est quelque chose. Ils n’ont
jamais été reconnus comme ça. » À l’inverse, lorsque le sentiment d’efficacité personnelle21
20
Ces données réfèrent au portrait statistique remis aux professionnelles et professionnels avant la tenue du
deuxième groupe de discussion. 21
Il s’agit des croyances des personnes au sujet de leurs capacités à réaliser des performances particulières, ce
qui influence le choix de leurs activités, leur investissement dans la poursuite de leurs buts, la persistance de
leur effort, etc. (Rondier, 2004).
50
(SEP) est évalué négativement, l’estimation du Soi comme ressource d’adaptation est elle
aussi négative (Schlossberg et al., 1989), ce qui constitue un obstacle à l’adaptation à la
transition.
Enfin, les démarches d’OSP entreprises avant d’arriver au collégial peuvent s’avérer
décevantes. Du point de vue de quelques professionnelles et professionnels, les activités
d’orientation réalisées au secondaire n’ont pas été suffisamment approfondies. À cela
s’ajoutent un certain nombre de croyances irréalistes quant au rôle des c.o. dans le choix
professionnel : « Souvent, dans les rencontres, c’est : Je suis venu me faire dire quoi faire,
me faire orienter. J’aimerais ça que tu me dises dans quoi je suis bon, j’aimerais ça que tu
valides. » Cet extrait montre que l’attribution des difficultés d’orientation à des facteurs
externes peut être vécue comme un obstacle. En revanche, les personnes qui évoquent des
facteurs liés à elles-mêmes pour expliquer leurs difficultés ont plus de facilité à s’adapter
aux transitions (Schlossberg, 1981).
Attitudes par rapport au monde
L’entrée au collège est parfois marquée par l’insécurité : « J’évalue tout de suite
ceux qui ont vraiment besoin, puis des fois c’est quand même relativement précis. Ils ont
besoin d’être rassurés [...] » Schlossberg (1981), pour qui toute transition implique un
certain niveau de stress, soutient que l’incertitude influence la tension et la perception
négative liées à un changement. Ces inquiétudes constituent un autre obstacle possible à
l’adaptation à la transition du secondaire au collégial.
Attitudes par rapport à la démarche
L’engagement dans la poursuite de la démarche d’orientation traduit parfois une
certaine démotivation des étudiantes et étudiants. Au moment du choix de cours à la
première session, les professionnelles et professionnels utilisent des stratégies pour lever
cet obstacle : « Je laisse de côté la formation générale22
pour mettre un cours, au moins, du
22
Au collégial, la formation générale comprend des cours de langue d’enseignement, de philosophie, de
langue secondaire et d’éducation physique (MELS, 2009).
51
futur programme23
pour une question de motivation. » Dans le cas d’une transition de type
non-événement, caractérisée par une période d’inacceptation, d’apathie et de déprime
(Schlossberg et al., 1989), la motivation à s’engager dans un projet différent de celui de
départ peut être affectée (Schlossberg, 1981). De même, l’incertitude peut être difficile à
supporter sur le plan affectif et motivationnel (Forner, 2010). En ce sens, il est possible que
l’indécision ressentie prenne la forme d’un manque de motivation.
Il arrive également que les étudiantes et étudiants entretiennent des croyances
erronées ou incohérentes dans l’élaboration de leurs projets scolaires et professionnels. Par
exemple, certains projets s’éloignent considérablement de leurs champs d’intérêts : « Je
leur demande : Est-ce que vous aimez les sciences? [L’étudiante ou l’étudiant] : Non. Je
déteste les sciences, je haïs les maths, mais je veux être chirurgien ou ingénieur [...]. » Les
professionnelles et professionnels nomment d’autres exemples illustrant un manque d’outils
pour faire un choix qui tient compte d’un ensemble de facteurs : croire qu’une démarche
d’orientation s’effectue sans effort (pensée magique); viser un domaine d’études sans
considérer tous les aspects du métier auquel il donne accès; sous-estimer ses difficultés
scolaires et ses besoins d’accompagnement, etc..
Dans un des groupes de discussion, une personne a rapporté le témoignage d’un
membre du personnel enseignant selon lequel les étudiantes et étudiants de son groupe
avaient une attitude résistante quant à la démarche d’orientation et aux activités organisées
dans le cours axé sur l’OSP : « On travaille trop fort dans un groupe comme ça. Moi, je
suis brûlé. Je pose des questions et ils me regardent avec la veste sur le dos... » Le refus de
réfléchir à un plan B est également soulevé, lors des groupes de discussion : « Le plan B, ils
ne veulent pas qu’on aborde ça tout de suite. Ça prend une certaine maturité émotionnelle
pour arriver à dire : Oui, j’ouvre pour peut-être penser à autre chose, un plan B. » Une
période d’inacceptation, où la personne se sent apathique et déprimée (Schlossberg, 1981),
est typique des changements soudains. En ce sens, il est possible de comprendre la
résistance à la démarche d’orientation comme une mesure de protection auto-imposée pour
limiter les inconvénients et les déceptions liés à un projet professionnel qui échoue.
23
Dans certains collèges, les étudiants de la SAI ont la possibilité de s’inscrire à un cours leur permettant
d’explorer un autre programme (Picard et Thibault, 2012).
52
Dans une autre optique, la projection dans l’avenir peut parfois être difficile, pour
les étudiantes et étudiants en transition. Dans les groupes de discussion, une stratégie a été
exposée pour y remédier : « On va travailler ensemble pour voir comment on peut relier la
chimie aux différents emplois pour stimuler ces étudiants-là. Ils se disent : Je suis au cégep,
pourquoi je fais de la chimie, à quoi ça sert? » Ainsi, la difficulté à planifier à long terme
peut devenir un obstacle à l’adaptation à la transition, à certains égards.
Enfin, il est possible qu’un mode de vie conciliant différentes occupations (travail à
temps partiel, responsabilités familiales, etc.) soit vécu comme un obstacle. À ce titre,
l’inscription à la SAI peut constituer une stratégie pour surmonter les obstacles liés à un
emploi du temps chargé : « C’est une année pour se remettre dans le bain des études, mais
aussi pour travailler en même temps et pour être capable de continuer les deux. » Somme
toute, le choix de combiner plusieurs responsabilités peut aider à modifier une situation de
transition ou à réfléchir sur la signification de celle-ci (Pearlin et Schooler, 1978 cités dans
Schlossberg et al., 1989). Par exemple, le revenu généré par un emploi à temps partiel peut
permettre de défrayer certaines dépenses liées aux études collégiales. La gestion du temps
inhérente à ces différentes activités peut toutefois complexifier l’adaptation à la transition.
4.1.3 Caractéristiques de l’environnement
4.1.3.1 Soutien interpersonnel
Manque d’appui des parents
Il arrive que les parents exercent une influence, voire certaines pressions, dans la
démarche d’OSP de leur enfant : « L’élève qui veut être chirurgien ou pédiatre [...], je ne
sais pas si c’est l’élève ou ses parents qui veulent qu’il soit ça. » La fonction jouée par le
réseau de soutien de la personne (affection, opinion, soutien financier, etc.) et la façon dont
ce soutien se déploie (soutien accru, diminué, interrompu, etc.) influence l’adaptation à la
transition (Schlossberg et al., 1989). En cas de conflit, le rôle des parents peut diminuer le
Soutien reçu, complexifiant ainsi le passage aux études supérieures.
53
Influence négative des pairs
L’influence des pairs au moment du choix professionnel, du choix du cégep ou de
l’abandon d’un cours peut également avoir un effet sur l’adaptation à la transition. À ce
sujet, une dynamique particulière s’est installée dans un des cours axés sur l’OSP : « Ils
n’ont pas de modèle positif à côté d’eux. Ils se retrouvent en petites gangs entre eux, puis
ils tapent du coude parce qu’ils sont fiers de ne pas avoir d’intérêt au cours. » Tel
qu’évoqué précédemment, la fonction exercée par les proches et la façon dont leur soutien
se déploie influence la qualité du passage de la transition (Schlossberg et al., 1989). En ce
sens, l’influence négative des pairs sur le choix professionnel ou sur l’engagement dans la
démarche d’orientation peut constituer un obstacle à l’adaptation à la transition.
4.1.3.2 Soutien institutionnel
Les obstacles sur le plan du soutien institutionnel peuvent eux aussi influencer la
qualité du soutien reçu au moment de la transition. La majorité des observations des
professionnelles et professionnels à ce sujet sont liées au soutien des collèges. Nous avons
subdivisé les résultats en trois catégories que le modèle des transitions ne permet pas de
distinguer (Huberman et Miles, 1991) : les contingences du système scolaire, le
fonctionnement du collège et l’attitude négative à l’égard de la SAI.
Contingences du système scolaire
Les nouvelles pratiques accompagnant les changements dans le monde de
l’éducation24
génèrent des questionnements, lors des groupes de discussion. Entre autres,
les professionnelles et professionnels craignent l’impact de ces changements sur
l’uniformité dans l’évaluation des élèves du secondaire pour l’admission au collégial25
:
« Je pense que ça biaise un peu l’admission dans les programmes contingentés. Il y en a qui
ont été admis avec plus de notes que d’autres. Il y a un aspect d’évaluation du secondaire
qui n’est pas uniforme. » La qualité de l’arrimage entre les anciennes et les nouvelles
24
Au moment de la collecte de données, les collèges s’apprêtaient à accueillir une cohorte d’élèves dont le
parcours scolaire a été caractérisé par de nombreux changements dans le système d’éducation découlant d’une
réforme à l’enseignement primaire et secondaire. 25
Au secondaire, l’évaluation porte sur les apprentissages prévus au programme auquel est inscrit l’élève,
décrits sous forme de compétences à développer. La définition des compétences varie selon les secteurs de
formation (MELS, 2003).
54
séquences de mathématiques26
et de sciences27
est également anticipée, tout comme les
conséquences de la suppression des cours d’ECC.
D’un autre côté, la rigidité de certaines directives caractérise la transition au
collégial, notamment sur le plan de l’offre de services : « Dans mon contrat [...], je ne peux
pas rencontrer les étudiants individuellement. Je vais en classe, je leur fais des présentations
et lorsqu’ils viennent me voir et me demandent une rencontre, je leur dis non. […] Ce n’est
pas moi qui décide! » D’autres obstacles concernent la réussite obligatoire des cours du
secondaire en première session28
. En dépit des fondements logiques qui sous-tendent ce
règlement, l’intransigeance dans son application peut nuire à la motivation des étudiantes et
étudiants qui ont réussi les cours de niveau collégial malgré l’échec d’un cours de mise à
niveau (cours du secondaire).
Fonctionnement du collège
Le manque de ressources professionnelles à l’intérieur des collèges peut nuire à
l’offre de services à la population étudiante. À ce sujet, une personne commente l’ampleur
de l’achalandage à son bureau, à la suite de chaque atelier en groupe : « Tout de suite après,
ma secrétaire me dit : Ils arrivent au bureau. [...] Ils sont découragés parce que ça prend
trois semaines [pour obtenir un rendez-vous]. » Schlossberg et al. (1989) indiquent que les
personnes qui entrent aux études supérieures s’attendent à ce qu’on réponde à leurs besoins.
Dans ce contexte, le nombre de places limité pour obtenir un service particulier peut
affecter considérablement leur adaptation à la transition.
Il existe un certain roulement en ce qui touche le poste de responsable des cours
axés sur l’OSP. Il est donc possible que la fréquence à laquelle ces personnes se succèdent
affecte la qualité de l’enseignement. Ainsi, l’instabilité entre les membres de l’équipe
26
Les anciennes séquences de mathématiques de quatrième secondaire et de cinquième secondaire ont été
remplacées par trois séquences de formation choisies par les élèves en fonction de leurs intérêts, de leurs
aptitudes et de leurs besoins de formation. Il s’agit de : 1 — Culture, société et technique (CST) 2 —
Technico-sciences (TS) et 3 — Sciences naturelles (SN) (MELS, 2008a). 27
Les anciens cours de sciences de quatrième secondaire ont été remplacés par le cours Sciences et
technologies (ST). Les élèves qui le désirent peuvent choisir, en option, un cours supplémentaire pour aller
plus loin dans leurs apprentissages (MELS, 2008b). 28
Le non-respect de cette condition provoque l’expulsion du collège, le temps de compléter ces cours à
l’éducation des adultes.
55
complexifie la collaboration entre eux : « Il y a des choses qui se commencent, puis oups!
Ça tombe. » Dans ce contexte, les initiatives sont souvent à recommencer par de nouvelles
personnes. La qualité du cours dépend donc de leur engagement et du temps qu’elles ont à
consacrer au renouvellement des pratiques.
D’un autre point de vue, le manque de ressources financières peut affecter
l’organisation de certains projets ou le maintien des pratiques particulières, comme
l’inscription à Academos29
. Par exemple, dans un des collèges, une subvention a permis de
mettre en place un programme de tutorat dans le cours axé sur l’OSP. Au moment des
groupes de discussion, la personne représentant ce collège ne savait pas si cette pratique
allait être reconduite : « Le collège aura un choix à faire, à savoir : Est-ce que la mesure
qu’on a essayé d’instaurer vaut la peine d’être conservée? » Dans ce contexte,
l’insuffisance des budgets alloués à la SAI peut gêner l’offre de services. Du coup, les
moyens mis en place pour soutenir l’adaptation à la transition sont réduits.
Le manque de coordination à l’intérieur des collèges fait partie des obstacles les
plus fréquemment mentionnés, lors des groupes de discussion : « On a besoin d’un comité
qui serait en charge de la SAI. Actuellement, c’est juste l’a.p.i. et le c.o. qui en ont la
responsabilité. C’est trop. » Comme la SAI n’est pas considérée comme un programme, il
arrive que les personnes qui y interviennent se rassemblent rarement. De plus, dans les
cégeps où le cours axé sur l’OSP n’est pas offert en SAI, le sentiment d’appartenance
envers l’établissement est plus faible : « Quand ils sont ensemble, ils peuvent créer des
liens, et ça contribue à l’ancrage au cégep, à l’engagement. Nous, on n’a pas ça. » En outre,
les failles dans l’organisation des services offerts à la population étudiante peuvent
constituer un obstacle à l’adaptation à la transition.
Les faiblesses dans le système de communication utilisé peuvent faire en sorte que
certaines informations utiles se perdent : « On a l’impression qu’on n’arrive pas à les
rejoindre. On a de la misère à comprendre, parce qu’on a l’impression qu’on fait beaucoup
d’efforts. Mais finalement, ils ne participent pas et ça ne donne pas de résultat. » D’abord,
29
Academos Cybermentorat est un organisme sans but lucratif qui a pour mission de favoriser l’orientation
professionnelle et la persévérance scolaire des Québécois de 14 à 30 ans (Academos Cybermentorat, 2010). Il
permet de relier des étudiants à des mentors sur le marché du travail par divers médias électroniques.
56
les efforts déployés pour rejoindre les étudiantes et étudiants ne peuvent rien contre leur
désengagement ou leur attitude résistante. Cela dit, il y a lieu de se questionner sur la façon
dont les moyens de communication choisis sont adaptés à leurs besoins et à leur mode de
vie.
Enfin, les effets de certaines contraintes administratives sont critiqués par les
professionnelles et professionnels. Le manque de locaux, la nécessité de rendre des
comptes, l’accessibilité des services d’aide et la gestion des horaires de cours sont
soulevés : « Le problème, c’est de faire des horaires pour qu’ils aient une journée sans
cours. Ça semble très compliqué de faire ça. » En somme, ces différents éléments peuvent
gêner l’innovation et le renouvellement des pratiques qui pourraient avoir un impact positif
sur la transition aux études supérieures.
Attitude négative à l’égard de la SAI
Lors des groupes de discussion, les professionnelles et professionnels dénoncent les
préjugés entretenus par certains membres du personnel enseignant et de la direction à
l’égard de la SAI : « On essaie de dire : Ce n’est pas juste les pourris qui sont là-dedans.
C’est pas juste ceux qui sont mêlés, c’est des clientèles hétérogènes. Pour vraiment amener
les profs à avoir une stabilité, qu’ils aient envie de choisir les groupes en accueil et
intégration. » Autrement dit, l’intervention en SAI sort les enseignantes et enseignants de
leur zone de confort. La résistance à intervenir auprès de ces étudiantes et étudiants risque
donc de compromettre la qualité de l’enseignement et du soutien offert dans l’adaptation à
la transition.
Un autre obstacle réside dans le manque d’ouverture et de collaboration des
membres de la direction de certains collèges. Aux yeux des participantes et participants aux
groupes de discussion, la réussite des projets dépend de leur engagement : « Moi, je pense
que la direction doit être vraiment au cœur de tout ça. Il n’y a rien qui pourrait se réaliser si
on n’avait pas leur appui. » Sachant que les difficultés d’orientation peuvent affecter la
motivation, la durée des études et le rendement scolaire (Doray et al., 2009), le manque
d’ouverture et de collaboration des membres de la direction à l’égard des mesures
déployées à la SAI peut constituer un obstacle à la transition aux études collégiales.
57
4.1.3.3 Environnement physique
Les facteurs liés à l’environnement physique contribuent au stress et au sentiment
de bien-être des personnes qui vivent le changement (Schlossberg, 1981). Ils jouent donc
un rôle important dans l’adaptation aux transitions.
Éloignement géographique du collège
Le contexte socioéconomique de chaque région, la culture du milieu et la situation
géographique du collège peuvent influencer la démarche d’OSP. Par exemple, dans un
cégep situé en milieu rural, l’accès à certaines catégories de professions est limité : « Dans
mon petit milieu à moi, c’est la limite de professionnels. Un criminologue, on ne retrouve
pas ça. Donc Academos devient un plus quand on ne trouve pas certains professionnels. »
Ainsi, il est possible que certains facteurs d’indécision, comme le manque d’information
vocationnelle, interagissent avec le contexte géographique et socioéconomique du collège.
Obstacles liés à la taille du collège
Dans certains collèges, l’effectif étudiant ne permet pas de former un groupe
suffisamment nombreux pour offrir un cours axé sur l’OSP. Dans d’autres, le nombre élevé
d’inscriptions limite les interventions possibles : « D’un cégep à l’autre, le nombre d’élèves
change beaucoup. [...] Le volume, un moment donné, fait que tu ne peux pas aller dans
certaines directions. » Ainsi, dans les collèges de grande taille, les initiatives de
renouvellement des pratiques sont limitées. D’un autre côté, les obstacles liés à un collège
de petite taille peuvent empêcher la mise sur pied de projets d’envergure. Dans les deux
cas, l’offre de services risque de ne pas être adaptée aux besoins particuliers des étudiantes
et étudiants en transition.
Éloignement entre le collège et la résidence
La distance séparant le collège et la résidence peut constituer une source
d’inquiétudes. En milieu rural, une des stratégies pour contourner cet obstacle consiste à
retarder le départ du nid familial : « Cette année, je trouvais que les étudiants étaient pas
mal sûrs de leur choix. Ils ont pris une année parce qu’ils n’étaient pas prêts à partir de la
maison. C’est pour ça qu’ils sont en accueil. »
58
La stratégie décrite précédemment illustre une transition anticipée (Goodman et al.,
2006), où les étudiantes et étudiants choisissent de prendre du temps pour s’approprier les
normes, les règles et les attentes relatives à l’inscription au cégep. Il s’agit d’une
caractéristique de la première phase de la transition (Schlossberg et al., 1989). D’ailleurs,
les sentiments de confort et d’intimité font partie des facteurs environnementaux les plus
importants dans l’adaptation au changement (Schlossberg, 1981).
4.2 Les cours axés sur l’OSP : un levier aux obstacles
Dans cette section, les caractéristiques des cours axés sur l’OSP sont décrites à
partir des données recueillies dans les syllabus de cours, des notes prises lors des entrevues
téléphoniques et des témoignages livrés par les professionnelles et professionnels présents
lors des groupes de discussion. Ces caractéristiques renvoient aux leviers recherchés dans
les cours d’OSP, soit les éléments susceptibles de faciliter l’adaptation à la transition. Sur
un plan conceptuel, ces leviers, en tant que possibilités offertes dans les cours, sont mis en
parallèle avec les obstacles mentionnés dans la première partie de ce chapitre.
Les caractéristiques des cours axés sur l’OSP sont présentées en fonction des quatre
ressources décrites dans le modèle conceptuel de Schlossberg (Situation, Soi, Soutien,
Stratégies). Cette façon de procéder permet, sur un plan conceptuel à tout le moins,
d’associer réciproquement les leviers aux ressources personnelles qu’ils sont susceptibles
de mobiliser chez l’étudiante ou l’étudiant (voir Tableau 6). Suivant cette logique, les cours
axés sur l’OSP sont considérés comme une ressource pour lever les obstacles inhérents à la
Situation de transition. De même, les différentes caractéristiques des cours mobilisant le
Soi, le Soutien et les Stratégies des étudiantes et étudiants constituent elles aussi des leviers.
59
Tableau 6 : Les leviers potentiels des cours axés sur l’OSP associés aux quatre
ressources du modèle des transitions
La Situation
Le titre des cours La population étudiante visée et la taille des groupes
Les objectifs des cours axés sur l’OSP
Les modalités pédagogiques
Durée du cours
Nombre moyen d’heures de cours par semaine
Inscription obligatoire
Unités accordées
Approche conceptuelle utilisée
Activités pédagogiques
Les responsables des cours
Le Soi Caractéristiques personnelles Ressources psychologiques
Le Soutien
Interpersonnel Institutionnel
Pédagogie par projet
Activités de prise de contact
Activités pédagogiques
Type de suivi
Communauté
Les Stratégies Modification de la situation Réflexion sur le sens donné à la situation
Gestion du stress accompagnant la situation
4.2.1 Situation
L’accompagnement dans la transition aux études supérieures fait partie des objectifs
de la SAI. Pour les étudiantes et étudiants, il s’agit d’une occasion d’évaluer leur capacité
d’adaptation au nouvel environnement que représente le collège, à la Situation de transition
elle-même (Goodman et al., 2006).
Prenant pour modèle la recension des travaux scientifiques portant sur les cours
axés sur l’OSP dans le contexte états-unien (Tableau 1), le Tableau 7 montre un aperçu des
caractéristiques des cours offerts par chaque collège de notre échantillon. Rappelons
toutefois que tous les cours axés sur l’OSP sont uniques; ils sont développés en fonction du
contexte et des caractéristiques de la population étudiante de chaque établissement.
60
Tableau 7 : Les principales caractéristiques des cours axés sur l’OSP offerts dans les
collèges de notre échantillon
Cours
Titre
des
cours
Population
étudiante
visée
Taille des
groupes Modalités pédagogiques
Responsables
des cours
Co
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pts
lié
s à
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Cours 1 X X 2 X X 4 X X X X X
Cours 2 X X 2 X X 4 X X X X X
Cours 3 X X 3 X X 3 X X X X
Cours 4 X X 6 X X 3 X X X X X
Cours 5 X 4 X X 4 X X X X
Cours 6 X X 3 X X 3 X X X X X
Cours 7 X X 8 X X 3 X X X X
Cours 8 X 3 X X 3 X X X X
Cours 9 X 5 X X 4 X X X X
4.2.1.1 Le titre des cours
Six des cours axés sur l’OSP de notre échantillon portent un titre évoquant des
concepts liés à la démarche d’orientation. Ce titre est composé de termes ou d’expressions
comme développement de carrière, s’orienter ou exploration. Le titre des autres cours est
davantage lié à l’apprentissage de techniques d’étude ou à l’adaptation au collège. Bref,
dans les cours axés sur l’OSP, le titre évoque spécifiquement les objectifs du cours ainsi
que son contenu.
Au moment du choix de cours pour la SAI, il peut être rassurant de voir apparaître
un cours dont le titre fait référence à la démarche d’orientation. Il peut s’agir d’un levier
pour les obstacles liés à des facteurs d’indécision, comme le manque de connaissance de
soi, le manque d’information sur le monde vocationnel et le manque de méthode pour
61
décider. D’un autre côté, le fait que les objectifs d’orientation soient explicitement nommés
dans le titre du cours peut constituer un incitatif à choisir celui-ci, notamment pour les
étudiantes et étudiants qui ont tendance à reporter leur choix scolaire ou professionnel,
éprouvent de la difficulté à se projeter dans l’avenir ou ont besoin d’encadrement.
4.2.1.2 La population étudiante visée et la taille des groupes
Dans plusieurs collèges de notre échantillon, l’indécision à l’arrivée au collégial
semble le seul point commun des personnes inscrites au cours. En effet, dans cinq cégeps
de notre échantillon, aucun critère n’est utilisé pour homogénéiser la composition des
groupes. Cependant, dans quelques établissements, les groupes sont composés en fonction
des aspirations scolaires et professionnelles des étudiantes et étudiants. Par exemple, les
personnes qui désirent s’inscrire dans un programme de sciences sont placées dans le même
groupe. Les cours axés sur l’OSP leur donnent ainsi l’occasion d’explorer différents métiers
et professions liés à leurs intérêts professionnels, ou encore de se préparer au programme
d’études choisi. Dans un autre cégep, les garçons et les filles sont séparés pour tenir compte
du style d’apprentissage propre à chaque genre.
Le regroupement des personnes vivant une situation semblable de transition peut
contribuer à lever des obstacles liés au fonctionnement des collèges, comme le manque de
ressources professionnelles ou un système de communication inadéquat. En effet, la
diffusion d’informations importantes peut être facilitée lorsque les étudiantes et étudiants
qui présentent sensiblement les mêmes besoins sont regroupés. Les interventions en groupe
mobilisent également un moins grand nombre de ressources professionnelles que les
mêmes interventions réalisées individuellement. Aussi, le groupe étant un lieu naturel de
soutien (Schlossberg et al., 1989), le fait de se retrouver parmi d’autres personnes en
situation de transition peut amener les membres du groupe à s’épauler mutuellement. Ce
faisant, l’impact des obstacles suivants peut être atténué : les anticipations pessimistes,
l’insécurité, le manque de soutien interpersonnel, le manque de motivation et les attitudes
résistantes à l’égard de la démarche d’orientation.
Dans chaque collège de notre échantillon, un cours axé sur l’OSP est offert à au
moins deux groupes. Dans un cégep, ce nombre s’élève à huit. Les groupes rassemblent
62
généralement entre 25 et 35 étudiantes et étudiants, bien que deux établissements offrent le
cours à un moins grand nombre de personnes. Pour sa part, Langevin (1996) considère que
les échanges entre les responsables de cours et les étudiantes et étudiants sont favorisés
dans les groupes de 25 personnes au maximum.
4.2.1.3 Les objectifs des cours axés sur l’OSP
Pour Langevin (1996), les cours axés sur l’OSP devraient avoir pour objectif
d’outiller les étudiantes et étudiants de façon à favoriser leur réussite et leur persévérance
jusqu’à l’obtention d’un diplôme. En ce sens, l’auteure suggère un soutien sur le plan
cognitif (stratégies de travail intellectuel, capacité d’analyse et de synthèse, etc.) et affectif
(mieux se connaître, gérer sa vie personnelle, etc.).
Dans les collèges de notre échantillon, les objectifs fixés pour les cours axés sur
l’OSP vont dans le même sens que ceux de la SAI. En effet, l’accompagnement dans la
transition secondaire-collégial, dans le choix de carrière (prise de décision, connaissance de
soi, exploration professionnelle, information scolaire, etc.) et le soutien à la motivation et à
la réussite sont des visées qui émergent des différentes formules offertes.
D’autres objectifs sont particuliers à certains établissements. Dans trois collèges, ils
découlent d’une compétence ciblée par le MELS pour les cours de formation
complémentaire. Aussi, dans quelques syllabus de cours, les buts énoncés réfèrent à la mise
en action dans un projet, à la production d’un bilan et au développement de certaines
aptitudes (habiletés d’apprentissage, stratégies d’étude, méthodes de travail, travail
d’équipe, autonomie, etc.).
4.2.1.4 Les modalités pédagogiques
Durée du cours
Les cours axés sur l’OSP s’étendent sur une session d’études, soit 15 semaines,
totalisant environ 45 heures de cours par trimestre. Comme leur durée est déterminée à
l’avance, le caractère temporaire de la transition traversée est explicite. À l’inverse, les
changements permanents dont la durée est indéterminée sont appréhendés plus
63
négativement (Schlossberg, 1981). En ce sens, le fait que la durée du cours soit connue à
l’avance peut constituer un levier pour les étudiantes et étudiants ayant besoin
d’encadrement. Aussi, il est possible que cette période soit utilisée comme un moment de
réflexion, surtout lorsque la projection dans l’avenir est difficile et que les choix scolaires et
professionnels sont reportés à plus tard. Enfin, les rencontres hebdomadaires étalées sur une
session offrent un espace régulier pour la diffusion d’information, ce qui peut éliminer les
difficultés liées à un système de communication inadéquat à l’intérieur des collèges.
Nombre moyen d’heures de cours par semaine
Tous les cours axés sur l’OSP sont offerts à la session d’automne, mais quelques
cégeps les offrent également à la session d’hiver. Leur contenu est parfois divisé en deux
rencontres hebdomadaires. Une des formules utilisées consiste à concentrer plusieurs
heures de cours dans les quatre premières semaines du trimestre, puis à remplacer
graduellement le temps de classe par la réalisation d’un projet de session.
Les cours axés sur l’OSP occupent une plage horaire d’une durée totale de trois ou
quatre heures par semaine, au cours desquelles au moins une heure est réservée à
l’orientation. De cette façon, la diffusion des informations pertinentes est améliorée, ce qui
facilite la communication à l’intérieur des collèges. De plus, consacrer une heure par
semaine à la démarche d’orientation de plusieurs personnes à la fois peut représenter une
économie de temps, dans les cégeps où les ressources professionnelles sont peu
nombreuses.
Cette heure réservée à l’orientation offre également un moment pour surmonter des
obstacles liés à l’indécision, comme le manque de connaissance de soi, le manque de
maturité vocationnelle, le manque de méthode pour décider et le manque d’information sur
le monde vocationnel. Aussi, la répétition des informations pertinentes à chaque semaine
peut favoriser une meilleure préparation à des obstacles comme le contingentement et le
respect des dates butoir. Enfin, les étudiantes et étudiants qui entretiennent des croyances
erronées ou incohérentes dans l’élaboration de leurs projets ou qui ont de la difficulté à se
projeter dans l’avenir peuvent en bénéficier pour réfléchir sérieusement à leur démarche.
64
Inscription obligatoire
Dans quelques cégeps, la réussite du cours axé sur l’OSP est conditionnelle à la
poursuite des études collégiales. Cela dit, dans la majeure partie des collèges de notre
échantillon, le cours n’est obligatoire que dans le volet Orientation de la SAI. Deux
établissements offrent une alternative au cours axé sur l’OSP. L’un propose un cours axé
sur les techniques d’apprentissage, l’autre offre une démarche d’orientation individuelle.
Dans un autre cégep, le cours axé sur l’OSP est automatiquement placé à l’horaire des
étudiantes et étudiants dont la moyenne générale au secondaire est inférieure à un seuil
donné, où des méthodes de travail leur sont enseignées. Enfin, dans un collège, le cours est
automatiquement intégré à tous les horaires, même s’il n’est pas obligatoire.
Unités accordées
À l’exception d’un collège, les cours axés sur l’OSP sont crédités comme cours de
la formation générale complémentaire30
dans tous les établissements de notre échantillon.
Par conséquent, les étudiantes et étudiants qui manquent de motivation ou qui ont une
attitude résistante à l’égard de la démarche d’orientation peuvent avoir intérêt à réussir ce
cours et à y participer activement. Aussi, la réussite d’un cours mesurant l’évolution dans le
processus d’orientation peut contribuer à améliorer le dossier scolaire des étudiantes et
étudiants qui ont des difficultés scolaires ou qui ont anticipent des échecs. Enfin, la
possibilité d’accumuler des unités pour l’obtention du DEC peut s’avérer intéressante pour
les personnes qui désirent terminer leurs études rapidement en raison de leur âge.
Modes d’évaluation
Pour Langevin (1996), il est important que les étudiantes et étudiants s’autoévaluent
pour tous leurs travaux avant que les responsables de cours indiquent leur appréciation du
travail accompli. Dans les collèges de notre échantillon, l’évaluation porte sur diverses
facettes : présentations orales, démarches d’employabilité (rédaction du curriculum vitae,
simulations d’entrevue, etc.), présence en classe, etc. Dans quelques cégeps, certaines
activités sont évaluées de façon formative, comme la tenue du journal de bord. En outre,
30
Pour obtenir un DEC, les étudiantes et étudiants doivent réussir quatre unités (deux cours) de cours de
formation générale complémentaire (MELS, 2011).
65
l’évaluation des apprentissages passe le plus souvent par des travaux écrits comme des
projets, des bilans, des recherches ou des auto-évaluations.
Selon Brown et McPartland (2005), l’usage de l’écrit fait partie des cinq pratiques
qui exercent une influence positive sur le choix de carrière. En ce sens, le manque de
connaissance de soi et la tendance à reporter le choix scolaire et professionnel à plus tard
sont des obstacles qui peuvent être éliminés par la réalisation de travaux écrits, car ceux-ci
permettent une récapitulation des apprentissages. Le fait de conserver des traces écrites du
cheminement effectué peut également profiter aux étudiantes et étudiants qui ont besoin
d’encadrement, ont une attitude résistante à l’égard de la démarche d’orientation ou
manquent de motivation.
Approche conceptuelle utilisée
Au regard des documents consultés, peu d’établissements identifient clairement une
approche conceptuelle particulière soutenant les cours axés sur l’OSP. Néanmoins, un des
cégeps se donne pour mission de faire vivre une réussite aux étudiantes et étudiants. Ainsi,
la pédagogie de la réussite sert de fondement conceptuel à ce cours, où une démarche
réflexive est mise de l’avant pour développer l’autonomie et la confiance en soi. Les
responsables de cours utilisent également une approche constructiviste faisant référence aux
métacognitions (conscience de soi, conscience de sa façon de fonctionner et bilan du
parcours effectué).
Dans les autres collèges, les approches conceptuelles évoquées dans les syllabus de
cours ne structurent pas l’ensemble du trimestre. Par ailleurs, dans certains établissements,
les documents fournis par les professionnelles et professionnels réfèrent à des contenus
relatifs aux intelligences multiples, aux métacognitions, aux types de motivation, aux styles
d’apprentissage et aux approches théoriques et personnelles de la réussite.
66
4.2.1.5 Les responsables des cours
Dans tous les collèges de notre échantillon, les cours axés sur l’OSP sont offerts par
des enseignantes et enseignants dont le domaine de formation est la psychologie, la
philosophie ou la sociologie31
. Dans chaque cégep, les c.o. et les a.p.i. offrent un soutien au
personnel enseignant. Le niveau d’engagement de chaque personne varie d’un
établissement à l’autre. Par exemple, dans un des collèges, une formule de team teaching
est mise de l’avant. Au moins une heure de contenu par semaine est donc enseignée par un
ou une c.o. qui offre, en plus, des périodes de disponibilité fixes pour assurer le suivi et
l’encadrement des étudiantes et étudiants. Dans d’autres cégeps, les professionnelles et
professionnels de l’orientation participent au cours en animant des ateliers ponctuels sur un
thème lié à l’orientation.
Les tournées de classes et les suivis individualisés sont les façons les plus
communes de rejoindre les étudiantes et étudiants. D’ailleurs, dans la plupart des collèges,
les c.o. et les a.p.i. sont disponibles pour effectuer des rencontres individuelles. Parfois, on
leur permet même de réserver une période hebdomadaire à la population étudiante de la
SAI. Dans quelques cégeps, une personne est identifiée comme responsable de la SAI pour
en assurer la coordination, en collaboration avec les autres intervenantes et intervenants.
La collaboration entre les responsables de cours est généralement décrite de façon
positive, même si la conciliation des horaires et des responsabilités représente parfois un
défi. Ces personnes connaissent bien les membres de leur groupe, ont à cœur leur réussite et
suivent leur cheminement de façon personnalisée. Dans un seul collège, le nombre élevé de
groupes ne permet pas le développement de cette complicité. Langevin (1996) souligne
l’importance que les responsables de cours soient bien préparés, enthousiastes et proches
des étudiantes et étudiants, en plus de connaître leurs besoins et de leur démontrer un
intérêt authentique. En outre, l’auteure recommande d’encourager leurs efforts, tout en
exigeant un rendement élevé de leur part.
31
Il est possible que ce cours ne soit pas offert par une enseignante ou un enseignant, dans les collèges où la
convention collective le permet.
67
Dans les collèges de notre échantillon, la complémentarité entre les compétences
des professionnelles et professionnels de l’orientation et celles des enseignantes et
enseignants constitue un levier, dans les cours axés sur l’OSP. En effet, l’expertise des
professionnelles et professionnels de l’orientation peut permettre de surmonter des
obstacles comme l’indécision (manque de connaissance de soi, anticipations pessimistes,
etc.), les croyances erronées ou incohérentes dans l’élaboration des projets et l’attribution
des difficultés à des facteurs externes. De la même manière, les habiletés pédagogiques des
enseignantes et enseignants sont susceptibles d’aider les étudiantes et étudiants qui
manquent de motivation ou qui ont besoin d’encadrement dans leur démarche. La
collaboration entre l’ensemble des responsables de cours, quant à elle, peut lever les
obstacles liés aux faiblesses du système de communication de certains collèges en facilitant
la circulation des informations pertinentes.
4.2.2 Soi
Le Tableau 8 regroupe les leviers liés au Soi mentionnés pour chaque cours axé sur
l’OSP faisant partie de notre échantillon.
Tableau 8 : Les leviers liés au Soi dans les cours axés sur l’OSP
Cours Activités permettant de
mieux se connaître
Activités permettant de
développer les
ressources
psychologiques
Cours 1 X X
Cours 2 X X
Cours 3 X X
Cours 4 X X
Cours 5 X X
Cours 6 X X
Cours 7 X X
Cours 8 X X
Cours 9 X X
68
4.2.2.1 Caractéristiques personnelles
Tous les cours axés sur l’OSP faisant partie de notre échantillon incluent des
activités pédagogiques en lien avec la connaissance de soi. Dans certains collèges, on
prévoit la rédaction d’un bilan réflexif, d’un portfolio ou d’un travail écrit impliquant une
introspection. Également, plusieurs établissements se servent d’outils psychométriques
pour amorcer une réflexion sur les caractéristiques personnelles (la personnalité, les
intérêts, les valeurs, les aptitudes, etc.). Les instruments les plus utilisés sont inspirés de la
typologie de Holland, comme le Guide de recherche d’une orientation professionnelle
(GROP)32
. Le recours à la classification Cursus33
est également répandu. Dans un des
collèges, les responsables de cours tirent profit de deux outils psychométriques : « Ils ont
fait cinq groupes, un pour chacun des domaines Cursus, et ils ont fait des ateliers avec les
élèves à partir de leurs résultats au test GROP. »
Pour aider à traverser une période de transition, Schlossberg et al. (1989) et
Goodman et al. (2006) suggèrent d’offrir des ateliers sur l’exploration des besoins et des
intérêts des personnes. En ce sens, les activités décrites précédemment peuvent lever des
obstacles comme le manque de connaissance de soi et le manque d’information sur le
monde vocationnel. En effet, ces démarches peuvent amener à utiliser des critères plus
précis dans les recherches sur les métiers et professions. De plus, en se connaissant mieux,
les étudiantes et étudiants qui attribuent leurs difficultés à des facteurs externes ou qui ont
tendance à reporter à plus tard leur choix scolaire et professionnel sont susceptibles de se
pencher davantage sur leur démarche d’orientation.
4.2.2.2 Ressources psychologiques
Les ressources psychologiques réfèrent aux attitudes et aux comportements
déployés pour résister à une menace (optimisme, auto-efficacité, engagement, résilience,
etc.) (Pearlin et Schooler, 1978 cités dans Schlossberg et al., 1989). À ce sujet, dans tous
les collèges, au moins un élément du contenu des cours vise à développer des ressources
psychologiques comme la motivation, l’autonomie et la responsabilisation envers les
32
Le GROP est un inventaire d’intérêts professionnels (Tétreau, 2005). 33
Cursus est une classification des métiers et des professions en cinq domaines : le Vivant, la Matière,
l’Humain, la Gestion et la Culture (Septembre éditeur, 2011).
69
études. Dans certains syllabus, on peut lire que des ateliers liés à la résilience, à l’estime de
soi, à la pensée critique, aux aptitudes à travailler en équipe, à l’introspection et au lieu de
contrôle sont prévus.
Dans un des collèges, les étudiantes et étudiants doivent analyser les déterminants
de leur performance au collégial (dispositions personnelles, motivation, comportements
d’étude, etc.). Dans un autre établissement, une démarche de résolution de problèmes est
mise en application pour réaliser un projet. L’accent est mis sur la motivation à prendre une
décision éclairée et satisfaisante pour l’avenir.
Le manque de motivation caractérisant la deuxième phase de la transition
(Schlossberg et al., 1989) peut être atténué par des activités permettant de développer les
ressources psychologiques. Aussi, en favorisant l’autonomie et la responsabilisation dans
les études, ces activités peuvent servir de levier aux étudiantes et étudiants qui ont des
difficultés scolaires, attribuent leurs difficultés à des facteurs externes, ont une attitude
résistante à l’égard de leur démarche d’orientation, ont tendance à reporter leur choix
scolaire et professionnel et ont besoin d’encadrement.
De la même manière, les activités sur l’estime de soi peuvent développer la
confiance en soi, en plus de diminuer les anticipations pessimistes et l’insécurité. Les
exercices d’introspection, quant à eux, sont susceptibles de lever les difficultés à se projeter
dans l’avenir. Enfin, les activités sur le développement de la pensée critique peuvent
profiter aux étudiantes et étudiants qui entretiennent des croyances erronées ou
incohérentes dans l’élaboration de leurs projets.
4.2.3 Soutien
Selon Guichard et Huteau (2001), toutes les personnes engagées dans l’éducation
des étudiantes et étudiants doivent se mobiliser pour les soutenir. Ainsi, le soutien des
proches, de l’institution fréquentée et de la communauté d’appartenance peut influencer
positivement ou négativement la manière de traverser une transition (Goodman et al.,
2006).
70
Le Tableau 9 regroupe les leviers liés au Soutien pour chaque cours axé sur l’OSP
faisant partie de notre échantillon.
Tableau 9 : Les leviers liés au Soutien dans les cours axés sur l’OSP
Cours
Stimulation
du soutien
interper-
sonnel
Soutien institutionnel Échanges
avec la
communauté Pédagogie
par projet Présentation
des services
Activités
de prise
de
contact
Contenus
liés à
l’ISEP
Suivi
indivi-
dualisé
Cours 1 X X X X X
Cours 2 X X X X X X
Cours 3 X X X X X X
Cours 4 X X X
Cours 5 X X X X X X X
Cours 6 X X X X
Cours 7 X X X X X X
Cours 8 X X X X X
Cours 9 X X X X X
4.2.3.1 Soutien interpersonnel
Au cœur de la transition, les personnes se questionnent non seulement sur leur
motivation à poursuivre les démarches entreprises, mais aussi sur le soutien qu’elles
reçoivent (Schlossberg et al., 1989). À ce titre, le soutien interpersonnel (conjoint, famille,
amis) peut s’avérer essentiel à une adaptation réussie (Schlossberg, 1981).
L’encouragement au développement d’un réseau de soutien fait d’ailleurs partie des cinq
pratiques porteuses identifiées par Brown et McPartland (2005).
En ce sens, dans quelques établissements, le soutien de la famille et des pairs est
stimulé par les cours axés sur l’OSP. Dans un collège, une stratégie est mise en place pour
engager les parents dans le projet sur lequel leur enfant travaille durant la session : « Tu
invites les parents [à la présentation finale]. À ce moment-là, il y a une fierté de voir leur
jeune, il y a un accomplissement […]. »
Ainsi, les activités stimulant le soutien interpersonnel peuvent servir de levier au
manque de soutien des parents, indépendamment du niveau de scolarité qu’ils ont atteint. Il
71
est également possible qu’elles pallient le nombre insuffisant de ressources professionnelles
du collège. De même, les pratiques en lien avec le développement du réseau de soutien
peuvent aider les étudiantes et étudiants qui se font peu confiance, vivent de l’insécurité,
ont des responsabilités familiales, subissent une influence négative de leurs pairs ou sont en
situation de handicap.
4.2.3.2 Soutien institutionnel
Dans le modèle des transitions, le soutien institutionnel réfère aux organisations
externes, formelles ou informelles, vers lesquelles la personne peut se tourner pour obtenir
de l’aide. Lors des groupes de discussion, les commentaires des professionnelles et
professionnels ont porté principalement sur le soutien offert par les collèges, par
l’intermédiaire des cours axés sur l’OSP. Cette section décrit les projets et les activités qui
s’y déroulent, de même que la façon dont les responsables de cours assurent un suivi auprès
des étudiantes et étudiants.
Pédagogie par projet
Bien que tous les cours axés sur l’OSP offerts dans les collèges de notre échantillon
visent sensiblement les mêmes objectifs, les moyens employés pour les atteindre varient
d’un établissement à l’autre. Certains responsables de cours alternent les exposés
magistraux et les activités pédagogiques de différente nature, tandis que d’autres misent sur
un projet de session.
À cet égard, dans un des collèges, un projet artistique (maquette, court métrage ou
entrevue journalistique) en lien avec l’exploration d’un métier ou d’une profession structure
l’ensemble du cours. Dans deux autres cégeps, une rencontre professionnelle sert de
prétexte à la réalisation d’une vidéo présentée aux autres membres du groupe, qui votent
pour décerner une récompense au meilleur projet. Ailleurs, le cours comporte un volet de
15 heures de travail communautaire où les étudiantes et étudiants s’engagent dans un milieu
correspondant à leurs intérêts professionnels. Dans un autre collège, le projet touche autant
aux stratégies d’apprentissage qu’à la réflexion sur soi. D’une part, des ateliers
hebdomadaires sur les formes d’intelligence et sur l’exploitation des forces et faiblesses
72
sont obligatoires pour l’ensemble des personnes inscrites au cours axé sur l’OSP. D’autre
part, les filles doivent effectuer une recherche documentaire sur une problématique liée à
l’apprentissage. De leur côté, les garçons planifient, durant la session, une excursion en
forêt où sont organisées des activités physiques. Des ateliers d’orientation sont offerts dans
chaque groupe.
Langevin (1996) affirme qu’il importe d’utiliser des pédagogies actives et
interactives (approche par problème, magistral interactif, etc.) dans les cours axés sur
l’OSP. En ce sens, l’idée d’organiser la stratégie pédagogique et le contenu du cours autour
d’un projet de longue haleine peut contribuer à lever certains obstacles, comme le manque
de motivation ou l’attitude résistante à l’égard de la démarche d’orientation. Également, le
fait de mener un projet à terme peut favoriser le développement de la confiance en soi.
Enfin, il est possible que la connaissance de soi soit renforcée par les projets qui offrent une
occasion d’introspection.
Activités de prise de contact
Le soutien institutionnel offert par les établissements peut prendre la forme de
rituels marquant les transitions particulières (Schlossberg, 1981). Dans la plupart des
cégeps de notre échantillon, une tournée des classes ou une visite guidée du collège en
début de session permet la présentation des ressources disponibles dans leur milieu.
Quelques obstacles institutionnels peuvent ainsi être contournés, comme la grande
superficie d’un collège et les contraintes administratives faisant en sorte que les bureaux
des professionnelles et professionnels de l’orientation sont difficiles à repérer. Ce rituel
peut également profiter aux étudiantes et étudiants qui ne connaissent pas les ressources du
milieu, ont besoin d’encadrement, vivent de l’insécurité, craignent de mal s’adapter aux
études collégiales, ont des difficultés scolaires ou sont en situation de handicap.
En plus de présenter les services en début de session, les responsables de certains
cours prévoient des activités de prise de contact, comme un rallye ou une activité brise-
glace. Par exemple : « Les élèves ont des questions à poser à différents services. Ils doivent
faire le rallye, trouver la question à poser et y répondre. […] Ils font vraiment le tour des
différents services offerts au collège [...]. Puis il y a un travail à faire là-dessus. »
73
Ce genre d’activité peut faire en sorte que l’accueil des étudiantes et étudiants qui
anticipent l’adaptation aux études supérieures ou qui vivent de l’insécurité soit vécu de
façon positive. En effet, le début des études collégiales coïncide avec l’entrée dans la
transition, la phase à laquelle les personnes ont besoin de s’approprier les normes, les règles
et les attentes relatives à la nouvelle situation (Schlossberg et al., 1989).
Activités pédagogiques
Dans les cours axés sur l’OSP, les responsables de cours abordent plusieurs thèmes
liés à l’ISEP : les particularités du système scolaire, le marché du travail, la recherche
d’emploi, les outils d’information, etc. Dans certains cégeps, on traite également de la
mémoire, du cerveau, des intelligences multiples et des comportements au travail. Les
présentations magistrales, les projets, les discussions, les lectures et les recherches
documentaires constituent autant de moyens d’aborder ces contenus. Également, dans plus
d’un collège, des exercices liés au curriculum vitae et à l’entrevue d’embauche sont prévus.
L’encadrement dans la collecte d’ISEP fait partie des cinq pratiques porteuses
identifiées par Brown et McPartland (2005). En ce sens, la présentation de contenus liés à
l’ISEP peut constituer un levier à certains obstacles, comme les faiblesses du système de
communication utilisé par les collèges. De même, les étudiantes et étudiants qui manquent
d’information sur le monde vocationnel, qui entretiennent des croyances erronées ou
incohérentes dans l’élaboration de leurs projets ou qui ont de la difficulté à se projeter dans
l’avenir peuvent en bénéficier. Enfin, il est possible que la diffusion d’ISEP favorise une
meilleure préparation au contingentement et au respect des dates butoir.
Type de suivi
Les choix de carrière se construisent progressivement et de façon différente pour
chaque personne, ce qui nécessite des interventions continues et individualisées (Guichard
et Huteau, 2001). En ce sens, les contacts avec les membres du personnel constituent une
part importante de toute mesure de soutien, car ils aident les personnes à s’intégrer, à
s’identifier à l’institution et à résoudre leurs problèmes (Schlossberg et al., 1989). Dans les
74
collèges de notre échantillon, des rétroactions personnalisées sont offertes par au moins un
responsable de cours.
La rédaction d’un journal de bord est également recommandée pour accompagner
les personnes qui vivent un non-événement (Schlossberg, 2006 citée dans Goodman et al.,
2006). Dans certains établissements de notre échantillon, l’utilisation de cet outil permet
aux responsables de cours d’offrir une rétroaction individuelle aux étudiantes et étudiants et
de suivre l’évolution de leur démarche : « La c.o. va faire différentes activités d’orientation
thématiques [...] Les enseignants se servent de ces activités pour faire remplir un journal de
bord aux élèves afin de les accompagner dans leur découverte de soi. »
Dans plusieurs collèges, une équipe d’intervenantes et intervenants se réunit
régulièrement pour discuter des risques d’échec parmi les membres du groupe. Dans
quelques établissements, au moins une rencontre individuelle avec un responsable de cours
est obligatoire afin de faire le point sur le déroulement de la session. Dans d’autres cégeps,
une plage horaire hebdomadaire est réservée aux personnes inscrites au cours axé sur
l’OSP. Parfois, les professionnelles et professionnels effectuent également un sondage sur
les besoins d’orientation au moyen d’un questionnaire. Enfin, dans certains cégeps, un
système de tutorat est mis en place. L’un d’eux reconduit même cette pratique au-delà de la
durée du cours axé sur l’OSP : « Il n’y a plus de cours, mais le tuteur est toujours présent
auprès d’eux. […] Il est dégagé et il fonctionne avec le système intranet. Il peut donc écrire
des courriels et donner de l’information aux étudiants. »
L’attention portée aux personnes en processus de choix par la rétroaction
individuelle fait partie des cinq pratiques porteuses définies par Brown et McPartland
(2005). Les mesures d’aide en ce sens peuvent donc amener les étudiantes et étudiants qui
éprouvent des difficultés d’ordre scolaire (difficultés d’apprentissage, méthode de travail
inadéquate, peur de l’échec, difficultés d’apprentissage, préalables manquants) à se servir
des ressources mises à leur disposition. De cette façon, la préparation aux exigences
d’admission de certains programmes d’études (contingentement, respect des dates butoir,
etc.) risque d’être plus adéquate.
75
Un suivi individualisé peut aussi soutenir la réflexion des étudiantes et étudiants qui
se connaissent peu, qui manquent de motivation, qui entretiennent des croyances erronées
ou incohérentes dans l’élaboration de leurs projets ou qui ont tendance à reporter leur choix
de carrière. L’insuffisance de ressources professionnelles, les faiblesses du système de
communication des cégeps et les obstacles liés à un collège de grande taille sont d’autres
difficultés qui peuvent être contournées par un suivi individualisé. Enfin, ce type de suivi
peut contribuer à lever des obstacles comme le besoin d’encadrement, le manque de
confiance en soi, l’attribution des difficultés à des facteurs externes, l’insécurité, la peur de
mal s’adapter aux études collégiales et le manque de soutien des parents.
4.2.3.3 Communauté
En plus d’offrir un soutien institutionnel et d’inciter le développement d’un réseau
de soutien, tous les cours axés sur l’OSP stimulent le soutien de la communauté envers les
étudiantes et étudiants de la SAI. La façon la plus commune d’y arriver consiste à les
inviter à échanger avec une personne exerçant un métier qui les intéresse (visites en milieu
de travail, recherches sur le terrain, etc.). Certains responsables de cours utilisent également
le cybermentorat : « Il y a deux à trois entrevues avec des personnes qui travaillent dans le
domaine. Elles sont déjà enregistrées, mais l’élève a au moins une bonne idée de ce qui se
passe réellement dans sa carrière. »
En plus de ces initiatives, les activités Étudiant d’un jour permettent de visiter un
programme d’études dans un autre établissement. Dans un des cégeps, une expérience de
bénévolat donne l’occasion de prendre contact avec un milieu professionnel. Ailleurs, des
étudiantes et étudiants représentant chaque programme technique offert au collège
rencontrent les personnes inscrites à un cours axé sur l’OSP : « L’activité consistait à
préparer des questions sur les programmes [...], les préalables que ça prend, le placement en
emploi, les possibilités au niveau des stages, etc. Les ambassadeurs étaient placés par
petites tables et les étudiants circulaient. Il y avait beaucoup de vie, d’activité et d’échanges
entre eux. »
En exposant les étudiantes et étudiants à des modèles professionnels (Brown et
McPartland, 2005), ces activités permettent d’accumuler de l’information sur le monde
76
vocationnel, en plus de renforcer la connaissance de soi. Aussi, il est possible que la
rencontre d’une personne exerçant le métier désiré constitue une source de motivation pour
la suite du projet scolaire et professionnel. À l’inverse, elle peut révéler des aspects plus
réalistes d’un métier jusque-là idéalisé, ou encore stimuler la réflexion lorsqu’il est difficile
de se projeter dans l’avenir. Il en est de même pour les étudiantes et étudiants qui ont une
attitude résistante à l’égard de la démarche d’orientation ou qui ont tendance à reporter
cette réflexion à plus tard. Enfin, le cybermentorat peut diminuer les inconvénients liés à la
fréquentation d’un collège éloigné des centres urbains et au manque de ressources
professionnelles des cégeps.
4.2.4 Stratégies
Le Tableau 10 regroupe les leviers liés aux Stratégies pour chaque cours axé sur
l’OSP faisant partie de notre échantillon.
Tableau 10 : Les leviers liés aux Stratégies dans les cours axés sur l’OSP
Cours Modification de
la situation
Réflexion sur le
sens donné à la
situation
Gestion du stress accompagnant la
situation
Cours 1 X X X
Cours 2 X X X
Cours 3 X
Cours 4 X
Cours 5 X
Cours 6 X X
Cours 7 X X X
Cours 8 X X
Cours 9 X X X
4.2.4.1 Modification de la situation
Dans tous les collèges de notre échantillon, l’enseignement de stratégies pour
modifier une situation difficile est intégré dans les cours axés sur l’OSP. Le développement
de techniques d’apprentissage et de méthodes de travail (structure personnelle, prise de
notes, techniques de lecture, etc.) est la stratégie la plus répandue : « À travers leur projet
77
d’exploration, on va glisser des techniques d’apprentissage. [...] Comment bien lire un
texte, se préparer à un examen, la prise de notes... » L’enseignement de techniques
d’apprentissage fait d’ailleurs partie des recommandations de Schlossberg et al. (1989) et
de Goodman et al. (2006) pour aider à traverser une transition.
D’autres thèmes font partie du contenu des cours, comme la démarche de prise de
décision ou la résolution de problèmes. Dans certains collèges, des périodes de classe sont
réservées pour enseigner des notions relatives au travail d’équipe, aux présentations orales,
au plagiat, aux normes de présentation des travaux, à la recherche en bibliothèque et à
l’utilisation d’un ordinateur. Enfin, un cégep impose une heure d’étude obligatoire par
semaine pour l’ensemble des étudiantes et étudiants.
En outre, les activités visant la modification de la situation peuvent lever des
obstacles liés à la méthode de prise de décision et à la réussite scolaire (difficultés scolaires,
difficultés d’apprentissage, méthode de travail inadéquate). Aussi, il est possible que les
outils enseignés diminuent les inquiétudes liées à l’adaptation aux études collégiales.
4.2.4.2 Réflexion sur le sens donné à la situation
Dans environ la moitié des collèges, les responsables de cours mettent en place des
activités pédagogiques visant à réfléchir au sens donné à la situation de transition par les
étudiantes et étudiants. Les réflexions sur soi, sur la capacité à faire des choix ou sur les
conséquences de ces choix font partie des thèmes exploités. Dans un des syllabus de cours,
l’objectif de ces activités est explicité : « L’étudiant doit apprendre à gérer de mieux en
mieux son processus d’apprentissage [...]. Il doit donc réfléchir sur ce qu’il fait, comment il
le fait et les conséquences de ce qu’il fait. Il doit apprendre à tirer des leçons et ajuster sa
démarche pour renforcer son efficacité. »
Pour amener la personne à réfléchir au sens qu’elle donne à un non-événement, les
interventions soulignant l’importance du plan B ou explicitant ses croyances quant à la
normalité et l’anormalité sont recommandées (Schlossberg, 2006 citée dans Goodman et
al., 2006). En ce sens, les étudiantes et étudiants qui ont subi un refus dans un programme
d’études à cause des mesures de contingentement peuvent en bénéficier. De la même
78
manière, ces méthodes peuvent changer la perception des obstacles comme l’âge, le genre
et une situation de handicap. Elles sont aussi susceptibles d’inciter les étudiantes et
étudiants à se responsabiliser quant à leurs difficultés scolaires, d’augmenter leur confiance
en leurs capacités, en plus de diminuer leur insécurité et leurs anticipations pessimistes.
Enfin, les interventions permettant de réfléchir au sens donné à la situation peuvent profiter
aux étudiantes et étudiants qui ont une attitude résistante à l’égard de la démarche
d’orientation, reportent leur choix scolaire et professionnel à plus tard, manquent de
motivation et attribuent leurs difficultés à des facteurs externes.
4.2.4.3 Gestion du stress accompagnant la situation
La conciliation entre différentes activités préoccupe les personnes en transition
(Schlossberg et al., 1989). Dans certains collèges de notre échantillon, des ateliers sur la
gestion du temps sont organisés dans les cours axés sur l’OSP. Ces ateliers peuvent servir
de levier pour les étudiantes et étudiants qui utilisent une méthode de travail inadéquate, qui
habitent loin de leur collège ou qui doivent concilier plusieurs responsabilités.
Également, la gestion d’un agenda et la gestion du stress lié à la préparation aux
examens font partie des thèmes exploités. Ces ateliers sont susceptibles de diminuer
l’insécurité, les anticipations pessimistes et les tensions engendrées par une situation de
handicap. Enfin, ils peuvent aider à surmonter les obstacles psychologiques liés au
contingentement et des obstacles administratifs, comme le respect des dates butoir lors
d’une demande d’admission à un programme d’études.
4.3 Les effets des cours axés sur l’OSP
Dans la présente section, les résultats portent sur l’auto-évaluation de l’efficacité
des cours axés sur l’OSP réalisée par le personnel des collèges. Dans les syllabus de cours,
le résumé des entretiens téléphoniques et le verbatim des groupes de discussion, les cours
axés sur l’OSP sont décrits comme efficaces, dynamiques et agréables. Une personne
considère que le cours offert dans son collège constitue la pierre angulaire de la SAI, alors
qu’une autre observe que la formule actuelle du cours est celle qui fonctionne le mieux
dans son cégep. Dans certains collèges, la perception et le jugement porté sur les étudiantes
79
et étudiants de la SAI se modifient grâce aux cours axés sur l’OSP: « Je suis content de voir
que les perceptions semblent se modifier [...]. Même à la commission des études, j’ai
l’impression que les gens en parlent. Aussi, les gens qui ont enseigné les projets veulent
continuer à enseigner en Accueil et intégration. »
Du point de vue des professionnelles et professionnels, la plupart des étudiantes et
étudiants apprécient les activités organisées dans les cours axés sur l’OSP (présentation
d’outils d’information, questionnaires d’intérêts, conférences, etc.). La qualité des travaux
effectués est soulignée, de même que les améliorations sur le plan des méthodes
d’apprentissage. Dans deux établissements, les projets proposés sont une source de fierté et
de motivation : « Pour certains étudiants qui ont mené un projet à terme, c’était la première
fois que ça leur arrivait de s’investir autant dans un projet. »
Par contre, certains commentaires montrent la nécessité de réviser le cours. Par
exemple, si le taux de réussite est excellent dans quelques cégeps, d’autres font exception :
« On a quand même une partie des élèves en échec, alors que ça pourrait être très bien
réussi par tout le monde. » Également, il arrive que les étudiantes et étudiants n’apprécient
pas le cours axé sur l’OSP : « Les étudiants trouvent que ce n’est pas utile, ils ne veulent
pas avoir le cours. » Si certains responsables de cours sont habiles pour créer des liens avec
les membres du groupe, d’autres n’y arrivent pas. De la même manière, la collaboration
entre les responsables de cours pourrait être meilleure : « Pour la passation des
questionnaires, qui demandait relativement peu de temps, ça a été difficile d’entrer dans les
classes. Ça, c’est ma plus grande contrainte à l’heure actuelle. » Enfin, dans certains
collèges, les modalités relatives aux projets et aux travaux pourraient être améliorées et le
développement d’un réseau de soutien pour les étudiantes et étudiants gagnerait à être plus
soutenu.
En marge de ces commentaires, les professionnelles et professionnels reconnaissent
les effets positifs des cours axés sur l’OSP sur la démarche d’orientation des personnes qui
choisissent le cours. Les étudiantes et étudiants découvrent différents aspects d’une
profession, connaissent mieux leurs forces et leurs limites et apprennent à utiliser les outils
à leur disposition dans leur quête d’information sur le monde professionnel. On souligne
80
aussi que leurs projets scolaires et professionnels se précisent : « Ça a permis à certains
étudiants de découvrir qu’ils n’étaient pas si certains de leur choix. Ça les a amenés à se
questionner sur : [...] Est-ce que ça va vraiment avec ce que je veux faire? Est-ce que j’ai
les aptitudes, les intérêts? Est-ce que j’ai développé les capacités pour me rendre là? […]
Ça a permis une discussion et d’ouvrir les yeux à plusieurs étudiants. » De même, la qualité
de l’encadrement offert est identifiée comme un point fort des cours axés sur l’OSP. Les
effets bénéfiques du tutorat sont soulignés dans un des groupes : « Étant donné qu’ils sont
obligés de voir leur tuteur [...] deux fois par semaine, le professeur peut suivre davantage
l’évolution du jeune et prendre ses besoins au vol. [...] Toi, tu te poses des questions sur un
préalable? Va voir l’a.p.i., elle est là [...]. Au fur et à mesure. »
Bien que le taux de participation aux activités organisées soit parfois décevant, les
membres du personnel professionnel de plusieurs collèges en sont assez satisfaits. De plus,
les personnes inscrites aux cours axés sur l’OSP sont nombreuses à utiliser les services
d’orientation : « Étant donné que je vais les voir en groupe et que j’ai des contacts officiels
avec eux trois ou quatre fois par session, il y a un lien qui se développe. Donc, ils viennent
me rencontrer en individuel. » Le développement d’un sentiment d’appartenance au collège
est quant à lui fortement médiatisé par les liens créés entre les étudiantes et étudiants d’un
des cours axés sur l’OSP : « Le sentiment d’appartenance fait défaut, quand même. Mais au
moins, dans le cours […], c’est créé dans ce groupe-là. »
Enfin, il semble que les cours axés sur l’OSP facilitent la diffusion des informations
aux étudiantes et étudiants. C’est le cas dans un collège où ce cours est obligatoire pour les
huit groupes inscrits à la SAI : « Ici, ils sont tellement nombreux que s’il n’y avait pas de
cours où on peut aller se présenter… Oui, offrir le suivi individuel, mais il faut d’abord
qu’on fasse un premier contact, qu’on leur donne un certain nombre d’informations. »
En résumé, selon l’auto-évaluation du personnel des collèges, les cours axés sur
l’OSP sont efficaces, dynamiques et agréables. La plupart des étudiantes et étudiants
apprécient le cours et cheminent dans leur démarche d’orientation (connaissance de soi, des
métiers et des professions, précision du projet scolaire et professionnel, etc.). La qualité de
l’encadrement, la facilitation de la diffusion des informations et l’utilisation soutenue des
81
services d’orientation constituent des effets positifs du cours. Aussi, la perception et le
jugement porté sur les étudiantes et étudiants de la SAI se modifie peu à peu.
Le Tableau 11 met en parallèle les 40 obstacles inhérents à la transition aux études
supérieures répertoriés dans ce mémoire, les 19 leviers présents dans les cours axés sur
l’OSP et leurs effets bénéfiques, tel qu’en ont témoigné les membres du personnel
professionnel des collèges. L’occurrence de chaque obstacle est précisée, c’est-à-dire la
fréquence des extraits dans lesquels cet obstacle est traité. En ce qui concerne les leviers,
l’occurrence renvoie à sa présence dans un collège donné et ne peut dépasser la valeur « 9 »
qui correspond aux neuf sites inclus dans notre échantillon. Il en est de même pour les
observations sur les effets des leviers par les professionnelles et professionnels.
À la lecture du Tableau 11, on remarque que plusieurs caractéristiques des cours
axés sur l’OSP jouent un rôle de levier pour de nombreux obstacles. Certains de ces leviers
sont d’ailleurs déployés dans plus d’un collège. À la lumière de ces observations, il y a lieu
de croire qu’en intégrant les quatre ressources du modèle des transitions (la Situation, le
Soi, le Soutien et les Stratégies), les cours axés sur l’OSP ont un effet bénéfique sur la
démarche d’orientation des étudiantes et étudiants en transition.
Tableau 11 : Mise en parallèle des obstacles, des leviers et des effets des cours axés sur l’OSP
Les Obstacles
liés à la transition aux
études supérieures
Leviers
Les caractéristiques des cours axés sur l’OSP
susceptibles de lever les obstacles rencontrés
Effets bénéfiques des cours
Les observations des professionnelles et
professionnels
Ca
ract
éris
tiq
ues
de l
a t
ran
siti
on
Parcours
scolaire
Difficultés
scolaires
(67)
• Activités permettant le développement des ressources psychologiques (9) (autonomie,
responsabilisation)
• Services du collège présentés en début de session (7)
• Suivi individualisé (9)
• Stratégies visant à modifier une situation (9) (techniques d’apprentissage, normes de présentation
des travaux, recherche en bibliothèque, étude obligatoire)
• Stratégies visant à réfléchir au sens donné à une situation (5)
• Cours crédité comme cours complémentaire (8)
• Qualité de l’encadrement (7)
• Bénéfices sur le plan des méthodes d’apprentissage
(1)
• Cours apprécié par les étudiantes et étudiants (7)
Préalables
manquants
(15)
• Suivi individualisé (9) • Qualité de l’encadrement (7)
Méthode de
travail
inadéquate
(5)
• Stratégies visant à modifier une situation (9) (méthodes de travail, normes de présentation des
travaux, recherche en bibliothèque, utilisation d’un ordinateur)
• Suivi individualisé (9)
• Stratégies permettant de gérer le stress accompagnant une situation (5) (gestion du stress, gestion du
temps, gestion d’un agenda, préparation aux examens)
• Cours apprécié par les étudiantes et étudiants (7)
• Qualité de l’encadrement (7)
• Bénéfices sur le plan des méthodes d’apprentissage
(1)
Fac
teurs
d’i
nd
écis
ion
Ma
nq
ue
de
con
na
issa
nce
de
soi
Manque de
connaissan-
ce de soi (3)
• Activités permettant d’apprendre à se connaître (9)
• Échanges avec la communauté permettant l’exploration des professions (9)
• Pédagogie par projet (6)
• Suivi individualisé (9)
• Titre du cours évoquant la démarche d’orientation (6)
• Au moins une heure par semaine consacrée à l’orientation (9)
• Évaluation des apprentissages par des travaux écrits (9)
• Complémentarité entre les aptitudes des responsables de cours (9)
• Cours apprécié par les étudiantes et étudiants (7)
• Bénéfices pour la démarche d’orientation : meilleure
connaissance de soi et des métiers, précision d’un
choix, etc. (6)
• Qualité de l’encadrement (7)
Ma
nq
ue
de
ma
turi
té
voca
tionn
elle
Report du
choix
scolaire et
profession-
nel (26)
• Activités permettant d’apprendre à se connaître (9)
• Activités permettant le développement des ressources psychologiques (9) (autonomie,
responsabilisation)
• Échanges avec la communauté permettant l’exploration des professions (9)
• Stratégies visant à réfléchir au sens donné à une situation (5)
• Suivi individualisé (9)
• Évaluation des apprentissages par des travaux écrits (9)
• Titre du cours évoquant la démarche d’orientation (6)
• Complémentarité entre les aptitudes des responsables de cours (9)
• Cours d’une durée déterminée de 15 semaines (9)
• Au moins une heure par semaine consacrée à l’orientation (9)
• Cours apprécié par les étudiantes et étudiants (7)
• Bénéfices pour la démarche d’orientation : meilleure
connaissance de soi et des métiers, précision d’un
choix, etc. (6)
• Recours plus fréquent aux services d’orientation (6)
• Qualité de l’encadrement (7)
83
Les Obstacles
liés à la transition aux
études supérieures
Leviers
Les caractéristiques des cours axés sur l’OSP
susceptibles de lever les obstacles rencontrés
Effets bénéfiques des cours
Les observations des professionnelles et
professionnels
Ca
ract
éris
tiq
ues
de l
a t
ran
siti
on
(su
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Fac
teurs
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(su
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Ma
nq
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tion
voca
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elle
Manque
d’informa-
tion sur le
monde
vocationnel
(30)
• Présentation de contenus liés à l’ISEP (9)
• Activités permettant d’apprendre à se connaître (9)
• Échanges avec la communauté permettant l’exploration des professions (9)
• Titre du cours évoquant la démarche d’orientation (6)
• Au moins une heure par semaine consacrée à l’orientation (9)
• Complémentarité entre les aptitudes des responsables de cours (9)
• Bénéfices pour la démarche d’orientation : meilleure
connaissance de soi et des métiers, précision d’un
choix, etc. (6)
• Facilité à rejoindre les étudiantes et étudiants(2)
• Recours plus fréquent aux services d’orientation (6)
• Cours apprécié par les étudiantes et étudiants (7)
Méconnais-
sance des
ressources
profession-
nelles du
milieu (5)
• Services du collège présentés en début de session (7)
• Au moins une heure par semaine consacrée à l’orientation (9)
• Complémentarité entre les aptitudes des responsables de cours (9)
• Recours plus fréquent aux services d’orientation (6)
• Facilité à rejoindre les étudiantes et étudiants(2)
• Cours apprécié par les étudiantes et étudiants (7)
Man
que
de
mét
hod
e de
pri
se
de
déc
isio
n
Manque de
méthode pour
décider (2)
• Au moins une heure par semaine consacrée à l’orientation (9)
• Stratégies visant à modifier une situation (9) (démarche de prise de décision)
• Titre du cours évoquant la démarche d’orientation (6)
• Complémentarité entre les aptitudes des responsables de cours (9)
• Cours apprécié par les étudiantes et étudiants (7)
• Bénéfices pour la démarche d’orientation : meilleure
connaissance de soi et des métiers, précision d’un
choix, etc. (6)
An
tici
pa
tion
s pes
sim
iste
s
Peur de mal
s’adapter aux
études
collégiales (4)
• Activités permettant le développement des ressources psychologiques (9) (estime de soi, autonomie)
• Activités de prise de contact (5)
• Suivi individualisé (9)
• Stratégies visant à modifier une situation (9) (méthodes de travail, démarche de résolution de
problèmes, normes de présentation des travaux, recherche en bibliothèque, utilisation d’un ordinateur)
• Stratégies visant à réfléchir au sens donné à une situation (5)
• Stratégies permettant de gérer le stress accompagnant une situation (5) (gestion du stress, gestion du
temps, etc.)
• Regroupement des étudiantes et étudiants vivant une situation semblable de transition (9)
• Complémentarité entre les aptitudes des responsables de cours (9)
• Services du collège présentés en début de session (7)
• Cours apprécié par les étudiantes et étudiants (7)
• Qualité de l’encadrement (7)
• Développement du sentiment d’appartenance au
groupe (6)
• Bénéfices sur le plan des méthodes d’apprentissage
(1)
Peur de
l’échec (11)
• Activités permettant le développement des ressources psychologiques (9) (estime de soi, lieu de
contrôle)
• Suivi individualisé (9)
• Stratégies visant à réfléchir au sens donné à une situation (5)
• Stratégies permettant de gérer le stress accompagnant une situation (5) (gestion du stress,
préparation aux examens)
• Cours crédité comme cours complémentaire (8)
• Complémentarité entre les aptitudes des responsables de cours (9)
• Regroupement des étudiantes et étudiants vivant une situation semblable de transition (9)
• Qualité de l’encadrement (7)
• Recours plus fréquent aux services d’orientation (6)
• Bénéfices sur le plan des méthodes d’apprentissage
(1)
• Cours apprécié par les étudiantes et étudiants (7)
84
Les Obstacles
liés à la transition aux
études supérieures
Leviers
Les caractéristiques des cours axés sur l’OSP
susceptibles de lever les obstacles rencontrés
Effets bénéfiques des cours
Les observations des professionnelles et
professionnels
Ca
r. d
e l
a t
ran
siti
on
(su
ite)
Fac
teurs
d’i
nd
écis
ion
Ob
sta
cles
ext
ern
es Contingen-
tement (32)
• Présentation de contenus liés à l’ISEP (9)
• Stratégies permettant de gérer le stress accompagnant une situation (5) (gestion du stress, gestion du
temps, gestion d’un agenda, préparation aux examens)
• Stratégies visant à réfléchir au sens donné à une situation (5)
• Au moins une heure par semaine consacrée à l’orientation (9)
• Complémentarité entre les aptitudes des responsables de cours (9)
• Suivi individualisé (9)
• Recours plus fréquent aux services d’orientation (6)
• Qualité de l’encadrement (7)
• Cours apprécié par les étudiantes et étudiants (7)
Dates butoir
à respecter
(6)
• Présentation de contenus liés à l’ISEP (9)
• Suivi individualisé (9)
• Stratégies permettant de gérer le stress accompagnant une situation (5) (gestion du stress, du temps,
d’un agenda)
• Au moins une heure par semaine consacrée à l’orientation (9)
• Complémentarité entre les aptitudes des responsables de cours (9)
• Qualité de l’encadrement (7)
• Recours plus fréquent aux services d’orientation (6)
• Facilité à rejoindre les étudiantes et étudiants(2)
• Cours apprécié par les étudiantes et étudiants (7)
Ca
ract
éris
tiq
ues
ind
ivid
uell
es
Âge et
période de
la vie
Obstacles
liés à l’âge
(6)
• Stratégies visant à réfléchir au sens donné à une situation (5)
• Cours crédité comme cours complémentaire (8)
• Développement du sentiment d’appartenance au
groupe (6)
• Cours apprécié par les étudiantes et étudiants (7)
Genre et
identifica-
tion sexuelle
Obstacles
liés au genre
(3)
• Stratégies visant à réfléchir au sens donné à une situation (5) • Cours apprécié par les étudiantes et étudiants (7)
État de
santé
Obstacles
liés à une
situation de
handicap (8)
• Services du collège présentés en début de session (7)
• Stratégies visant à modifier une situation (9) (techniques d’apprentissage)
• Stratégies visant à réfléchir au sens donné à une situation (5)
• Stratégies permettant de gérer le stress accompagnant une situation (5) (gestion du stress, gestion du
temps)
• Stimulation du soutien des proches (famille, pairs, etc.) (3)
• Suivi individualisé (9)
• Qualité de l’encadrement (7)
• Bénéfices sur le plan des méthodes d’apprentissage
(1)
• Cours apprécié par les étudiantes et étudiants (7)
Statut
socio-
écono-
mique
Faible
scolarité des
parents (7)
• Stimulation du soutien des proches (famille, pairs, etc.) (3)
Co
mp
éten
ces
psy
choso
cial
es
Att
itu
des
pa
r
rap
po
rt à
so
i
Besoin
d’encadre-
ment (36)
• Activités permettant le développement des ressources psychologiques (9) (autonomie,
responsabilisation)
• Suivi individualisé (9)
• Services du collège présentés en début de session (7)
• Titre du cours évoquant la démarche d’orientation (6)
• Cours d’une durée déterminée de 15 semaines (9)
• Évaluation des apprentissages par des travaux écrits (9)
• Complémentarité entre les aptitudes des responsables de cours (9)
• Cours apprécié par les étudiantes et étudiants (7)
• Qualité de l’encadrement (7)
• Recours plus fréquent aux services d’orientation (6)
• Développement du sentiment d’appartenance au
groupe (6)
• Facilité à rejoindre les étudiantes et étudiants(2)
• Taux de participation aux activités satisfaisant (6)
85
Les Obstacles
liés à la transition aux
études supérieures
Leviers
Les caractéristiques des cours axés sur l’OSP
susceptibles de lever les obstacles rencontrés
Effets bénéfiques des cours
Les observations des professionnelles et
professionnels
Ca
ract
éris
tiq
ues
ind
ivid
uell
es (
suit
e)
Co
mp
éten
ces
psy
cho
soci
ales
(su
ite)
Att
itu
des
pa
r
rap
po
rt à
so
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e)
Manque de
confiance en
soi (7)
• Activités permettant le développement des ressources psychologiques (9) (estime de soi, autonomie)
• Stimulation du soutien des proches (famille, pairs, etc.) (3)
• Suivi individualisé (9)
• Stratégies visant à réfléchir au sens donné à une situation (5)
• Pédagogie par projet (6)
• Cours apprécié par les étudiantes et étudiants (7)
• Qualité de l’encadrement (7)
• Projets motivants(2)
Attribution
des
difficultés à
des facteurs
externes
(12)
• Activités permettant le développement des ressources psychologiques (9) (autonomie, lieu de
contrôle, etc.)
• Activités permettant d’apprendre à se connaître (9)
• Suivi individualisé (9)
• Stratégies visant à réfléchir au sens donné à une situation (5)
• Complémentarité entre les aptitudes des responsables de cours (9)
• Cours apprécié par les étudiantes et étudiants (7)
• Bénéfices pour la démarche d’orientation : meilleure
connaissance de soi et des métiers, précision d’un
choix, etc. (6)
• Qualité de l’encadrement (7)
• Recours plus fréquent aux services d’orientation (6)
Att
itu
des
pa
r ra
pp
ort
au
mo
nde
Insécurité
(11)
• Activités permettant le développement des ressources psychologiques (9) (estime de soi, autonomie)
• Activités de prise de contact (5)
• Suivi individualisé (9)
• Stratégies visant à réfléchir au sens donné à une situation (5)
• Stimulation du soutien des proches (famille, pairs, etc.) (3)
• Stratégies permettant de gérer le stress accompagnant une situation (5) (gestion du stress, gestion du
temps, préparation aux examens)
• Regroupement des étudiantes et étudiants vivant une situation semblable de transition (9)
• Services du collège présentés en début de session (7)
• Cours apprécié par les étudiantes et étudiants (7)
• Qualité de l’encadrement (7)
• Recours plus fréquent aux services d’orientation (6)
• Développement du sentiment d’appartenance au
groupe (6)
Att
itu
des
pa
r ra
pp
ort
à l
a d
éma
rche
Manque de
motivation
(11)
• Activités permettant le développement des ressources psychologiques (9) (motivation,
responsabilisation)
• Suivi individualisé (9)
• Échanges avec la communauté permettant l’exploration des professions (9)
• Évaluation des apprentissages par des travaux écrits (9)
• Stratégies visant à réfléchir au sens donné à une situation (5)
• Pédagogie par projet (6)
• Cours crédité comme cours complémentaire (8)
• Regroupement des étudiantes et étudiants vivant une situation semblable de transition (9)
• Complémentarité entre les aptitudes des responsables de cours (9)
• Cours apprécié par les étudiantes et étudiants (7)
• Qualité de l’encadrement (7)
• Recours plus fréquent aux services d’orientation (6)
• Taux de participation aux activités satisfaisant (6)
• Développement du sentiment d’appartenance au
groupe (6)
• Projets motivants(2)
Croyances
erronées ou
incohérentes
dans
l’élaboration
des projets
(34)
• Présentation de contenus liés à l’ISEP (9)
• Suivi individualisé (9)
• Activités permettant le développement des ressources psychologiques (9) (introspection, pensée
critique)
• Échanges avec la communauté permettant l’exploration des professions (9)
• Au moins une heure par semaine consacrée à l’orientation (9)
• Complémentarité entre les aptitudes des responsables de cours (9)
• Bénéfices pour la démarche d’orientation : meilleure
connaissance de soi et des métiers, précision d’un
choix, etc. (6)
• Qualité de l’encadrement (7)
• Recours plus fréquent aux services d’orientation (6)
• Cours apprécié par les étudiantes et étudiants (7)
86
Les Obstacles
liés à la transition aux
études supérieures
Leviers
Les caractéristiques des cours axés sur l’OSP
susceptibles de lever les obstacles rencontrés
Effets bénéfiques des cours
Les observations des professionnelles et
professionnels
Ca
ract
éris
tiq
ues
ind
ivid
uell
es (
suit
e)
Co
mp
éten
ces
psy
cho
soci
ales
(su
ite)
Att
itu
des
pa
r ra
pp
ort
à l
a d
éma
rche
(suit
e)
Attitude
résistante
(12)
• Activités permettant le développement des ressources psychologiques (9) (autonomie,
responsabilisation)
• Suivi individualisé (9)
• Échanges avec la communauté permettant l’exploration des professions (9)
• Stratégies visant à réfléchir au sens donné à une situation (5)
• Cours crédité comme cours complémentaire (8)
• Évaluation des apprentissages par des travaux écrits (9)
• Regroupement des étudiantes et étudiants vivant une situation semblable de transition (9)
• Pédagogie par projet (6)
• Cours apprécié par les étudiantes et étudiants (7)
• Bénéfices pour la démarche d’orientation : meilleure
connaissance de soi et des métiers, précision d’un
choix, etc. (6)
• Qualité de l’encadrement (7)
• Recours plus fréquent aux services d’orientation (6)
• Taux de participation aux activités satisfaisant (6)
Difficulté à
se projeter
dans
l’avenir (10)
• Activités permettant le développement des ressources psychologiques (9) (introspection, pensée critique) • Échanges avec la communauté permettant l’exploration des professions (9)
• Présentation de contenus liés à l’ISEP (9)
• Cours d’une durée déterminée de 15 semaines (9)
• Titre du cours évoquant la démarche d’orientation (6)
• Au moins une heure par semaine consacrée à l’orientation (9)
• Cours apprécié par les étudiantes et étudiants (7)
• Bénéfices pour la démarche d’orientation : meilleure
connaissance de soi et des métiers, précision d’un
choix, etc. (6)
• Recours plus fréquent aux services d’orientation (6)
Conciliation entre études,
travail et
famille (9)
• Stimulation du soutien des proches (famille, pairs, etc.) (3)
• Stratégies permettant de gérer le stress accompagnant une situation (5) (gestion du stress et du
temps)
• Cours apprécié par les étudiantes et étudiants (7)
Ca
r. d
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près
la
tra
nsi
tio
n Soutien
inter-
personnel
Manque
d’appui des
parents (15)
• Stimulation du soutien des proches (famille, pairs, etc.) (3)
• Suivi individualisé (9)
• Regroupement des étudiants vivant une situation semblable de transition (9)
• Qualité de l’encadrement (7)
• Recours plus fréquent aux services d’orientation (6)
• Développement du sentiment d’appartenance au
groupe (6)
Influence
négative des
pairs (10)
• Stimulation du soutien des proches (famille, pairs, etc.) (3)
• Regroupement des étudiants vivant une situation semblable de transition (9)
• Développement du sentiment d’appartenance au
groupe (6)
Sou
tien
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uti
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Co
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en-c
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du
sys
tèm
e
d’é
du
cati
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Changements
anticipés
dans le syst.
d’éduc. (19)
• Bénéfices pour la démarche d’orientation : meilleure
connaissance de soi et des métiers, précision d’un
choix, etc. (6)
Rigidité des
procédures
(6)
Fo
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t
du
co
llèg
e
Nombre
insuff. de
ressources
prof. (31)
• Échanges avec la communauté permettant l’exploration des professions (9)
• Regroupement des étudiantes et étudiants vivant une situation semblable de transition (9)
• Au moins une heure par semaine consacrée à l’orientation (9)
• Stimulation du soutien des proches (famille, pairs, etc.) (3)
• Facilité à rejoindre les étudiantes et étudiants(2)
• Qualité de l’encadrement (7)
• Cours apprécié par les étudiantes et étudiants (7)
Instabilité
des resp. de cours (10)
• Plaisir des enseignants à offrir le cours (1)
87
Les Obstacles
liés à la transition aux
études supérieures
Leviers
Les caractéristiques des cours axés sur l’OSP
susceptibles de lever les obstacles rencontrés
Effets bénéfiques des cours
Les observations des professionnelles et
professionnels
Ca
r. d
e l
’en
v. a
va
nt
et
ap
rès
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ran
siti
on
(su
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Sou
tien
in
stit
uti
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Fo
nct
ionn
emen
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oll
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(su
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Manque de financement à
la SAI (12)
• Changement de perception par rapport à la SAI (2)
Manque de coordination
(21)
• Recours plus fréquent aux services d’orientation (6)
• Développement du sentiment d’appartenance au
groupe (6)
• Facilité à rejoindre les étudiantes et étudiants(2)
Système de communication
inadéquat (13)
• Présentation de contenus liés à l’ISEP (9)
• Suivi individualisé (9)
• Complémentarité entre les aptitudes des responsables de cours (9)
• Cours d’une durée déterminée de 15 semaines (9)
• Regroupement des étudiantes et étudiants vivant une situation semblable de transition (9)
• Au moins une heure par semaine consacrée à l’orientation (9)
• Qualité de l’encadrement (7)
• Recours plus fréquent aux services d’orientation (6)
• Facilité à rejoindre les étudiantes et étudiants(2)
• Cours apprécié par les étudiantes et étudiants (7)
Contraintes
administratives (29)
• Présenter les services en début de session (7) • Facilité à rejoindre les étudiantes et étudiants(2)
• Recours plus fréquent aux services d’orientation (6)
Att
itu
de
nég
ati
ve à
l’é
ga
rd
de
la S
AI
Préjugés et
résistances des membres de la
direction et du
personnel enseignant (42)
• Changement de perception par rapport à la SAI (2)
• Plaisir des enseignants à offrir le cours (1)
Manque
d’ouverture et
de collaboration
des membres
de la direction (18)
• Changement de perception par rapport à la SAI (2)
Environ-
nement
physique
Éloignement
géographique du collège (8)
• Échanges avec la communauté permettant l’exploration des professions (9)
• Cours apprécié par les étudiantes et étudiants (7)
• Bénéfices pour la démarche d’orientation : meilleure
connaissance de soi et des métiers, précision d’un
choix, etc. (6)
Obstacles liés à
la taille du collège (8)
• Services du collège présentés en début de session (7)
• Suivi individualisé (9)
• Qualité de l’encadrement (7)
• Développement du sentiment d’appartenance au
groupe (6)
• Facilité à rejoindre les étudiantes et étudiants(2) Éloignement
entre le collège et la résidence
(14)
• Stratégies permettant de gérer le stress accompagnant une situation (5) (gestion du temps) • Cours apprécié par les étudiantes et étudiants (7)
Chapitre 5 : Discussion
Dans le cadre du présent mémoire, nous avons repéré les obstacles typiques de la
transition secondaire-collégial. Nous avions pour but d’analyser dans quelle mesure les
cours axés sur l’OSP comportent des leviers adaptés à de tels obstacles. Autrement dit, nous
avons tenté de décrire les pratiques professionnelles incluses dans ces cours qui pouvaient
avoir un effet tangible et bénéfique sur la démarche d’orientation au moment de la
transition au collégial.
Comme le souligne Le Bossé (2011), il faut se garder de penser que la véritable
efficience des pratiques tient à leur capacité de reproduire les mêmes résultats sans égard
aux contextes d’application. En ce sens, les leviers répertoriés ne doivent pas être
considérés comme des solutions infaillibles pour tous les obstacles rencontrés, mais bien
comme des solutions possibles pour l’affranchissement de ces obstacles dans certaines
conditions particulières. Dans cette foulée, soulignons le caractère singulier des cours axés
sur l’OSP, dans la mesure où ce sont des cours développés par chaque établissement qui, du
moins en principe, tiennent compte du contexte propre au collège et des caractéristiques de
sa population étudiante.
Parmi les leviers déployés dans les cours axés sur l’OSP, certains (10 sur 19) se
rapprochent des pratiques porteuses mises en lumière par Brown et McPartland (2005).
Selon ces auteurs, la combinaison d’au moins trois des cinq pratiques porteuses influence
positivement la démarche d’orientation. Par conséquent, il est possible que le soutien offert
aux étudiantes et étudiants soit accru dans les cours où plusieurs leviers décrits dans cette
recherche sont mis en place. Le Tableau 12 permet d’expliciter les points communs entre
les pratiques porteuses et certains leviers identifiés dans la présente étude.
89
Tableau 12 : Les points communs entre les pratiques porteuses (Brown et
McPartland, 2005) et certains leviers répertoriés dans les cours axés sur l’OSP
Leviers identifiés Pratiques
porteuses Observations
Évaluer les apprentissages
par des travaux écrits.
Intégrer des
exercices écrits
dans la
démarche de
choix de
carrière.
Le mode d’évaluation choisi pour
plusieurs activités permet aux
étudiantes et étudiants de
conserver des traces de leur
démarche.
Offrir un suivi individualisé.
Consacrer au moins une
heure par semaine à
l’orientation.
Offrir une
rétroaction
individuelle et
de l’attention
aux personnes
en processus de
choix.
Le fait de réserver une heure par
semaine à la démarche d’OSP des
étudiantes et étudiants permet de
leur accorder de l’attention. Le
suivi individualisé est propice à la
rétroaction individuelle.
Les aptitudes des
responsables de cours sont
complémentaires.
Présenter des contenus liés à
l’ISEP.
Utiliser une pédagogie par
projet.
Le cours a une durée fixe de
15 semaines.
Encadrer la
collecte
d’information
scolaire et
professionnelle.
La diffusion d’ISEP par les
professionnelles et professionnels
de l’orientation peut guider les
étudiantes et étudiants dans leur
collecte d’information. La durée
fixe du cours et l’utilisation d’une
pédagogie par projet encadrent
cette collecte.
Organiser des échanges avec
la communauté permettant
l’exploration des professions
(journées carrière,
cybermentorat, etc.).
Exposer les
personnes à des
modèles.
Les échanges avec la
communauté, sous forme
d’activités d’exploration en milieu
de travail, favorisent l’exposition
à des modèles.
Stimuler le soutien des
proches (famille, pairs, etc.).
Présenter les services du
collège en début de session.
Encourager le
développement
d’un réseau de
soutien.
Les ressources professionnelles du
collège, la famille et les pairs font
partie du réseau de soutien des
étudiantes et étudiants dans leur
démarche d’orientation.
90
5.1 Apport théorique de la recherche
La méta-analyse de Folsom et Reardon (2003) a déjà démontré les effets bénéfiques
de plusieurs cours axés sur l’OSP offerts aux États-Unis sur de nombreuses variables, dont
l’indécision. La recension des écrits et l’analyse des données de la présente recherche ont
permis de comparer ces pratiques avec les mesures d’aide à l’orientation québécoises. En ce
sens, cette étude ouvre un domaine de recherche encore inexploré au Québec : celui des
pratiques d’aide à l’orientation déployées dans les collèges.
Les résultats préliminaires de l’étude de Picard (2011a) ont souligné un effet
bénéfique des cours axés sur l’OSP, à savoir la diminution significative de l’indécision
professionnelle des étudiantes et étudiants de la SAI, à la fin de la première session au
cégep. Étant donné qu’aucune recherche québécoise n’avait encore décrit ces cours, la
présente étude constitue un apport scientifique dans ce domaine. Quelques auteurs ont
d’ailleurs souligné l’importance d’explorer les conditions mises en place dans les cours qui
favorisent l’orientation, l’adaptation et l’intégration au collège (Davig et Spain, 2003; Reed
et al., 2001). L’originalité de la présente recherche réside dans le repérage minutieux des
leviers présents dans les cours axés sur l’OSP, susceptibles d’aplanir les obstacles liés à la
transition aux études supérieures en ce qui touche l’orientation.
Notre modèle conceptuel intégrant trois sources théoriques s’est avéré porteur. Le
modèle conceptuel des transitions (Schlossberg, 1981) a permis de mieux comprendre les
conditions d’efficience des pratiques à l’œuvre dans les cours axés sur l’OSP. L’analyse des
données à la lumière du modèle des transitions a mis en évidence l’impact de chacune des
quatre ressources (Situation, Soi, Soutien, Stratégies) sur la démarche d’orientation des
étudiantes et étudiants. Le modèle théorique d’indécision a mis en lumière un large éventail
d’obstacles liés à l’indécision inhérente à la transition se rapportant aux sources
d’indécision. Le concept d’ « obstacle », dans la mesure où il contribue à mettre l’accent
sur l’importance de la définition d’un problème avant la mise en œuvre d’une pratique
professionnelle (Le Bossé, 2011), a ajouté une dimension essentielle à la présente analyse
de l’efficience des cours axés sur l’OSP. De plus, le caractère dynamique de la transition a
pris tout son sens grâce au concept de « levier », qui rend compte du rôle des intervenantes
91
et intervenants dans l’ajustement des personnes à leur environnement (Le Bossé, 2011).
Cette vision correspond d’ailleurs à celle véhiculée par le modèle des transitions, où l’aide
aux personnes consiste à collaborer avec elles pour éliminer ou atténuer les répercussions
des sources de tension (Schlossberg et al., 1989). En bout de ligne, l’articulation des
concepts d’obstacle et de levier a facilité la mise en parallèle du vécu des étudiantes et
étudiants en transition et des caractéristiques des cours axés sur l’OSP.
5.2 Apport pratique de la recherche
Les résultats de la présente recherche pourraient avoir des répercussions sur les
pratiques d’orientation au collégial. D’ailleurs, la majorité des commentaires des membres
du personnel professionnel des collèges sur les effets des cours axés sur l’OSP appuient la
pertinence de cette mesure d’aide à l’orientation dans le curriculum des étudiantes et
étudiants de la SAI.
Les difficultés d’orientation scolaire et professionnelle sont inhérentes à la
transition aux études supérieures (Doray et al., 2009). Sachant que les étudiantes et
étudiants de la SAI vivent l’indécision scolaire et professionnelle de façon
significativement plus intense que leurs homologues des autres programmes d’études
(Picard et al., 2010), la description détaillée des leviers présents dans les cours axés sur
l’OSP peut servir d’amorce à une réflexion sur l’efficacité et l’affinement des pratiques
d’orientation dans les collèges. Dans le présent mémoire, nous avons eu le souci constant
d’apparier obstacle et levier, comme les deux faces d’une même médaille dans la pratique
professionnelle. À titre d’exemple, Forner (2007) souligne la pertinence de bien cerner les
sources d’indécision afin d’ajuster les interventions professionnelles en conséquence. La
prise en compte de ces sources d’indécision (manque de connaissance de soi, anticipations
pessimistes, etc.) à titre d’obstacles à la démarche d’orientation et la référence aux leviers
correspondants illustrent la pertinence d’un bon ajustement des pratiques à la définition du
problème dans le choix des interventions professionnelles.
Par ailleurs, le portrait qui a été dressé pourrait inspirer des pistes pour réviser
certaines composantes des cours axés sur l’OSP déjà en place. De plus, les résultats de cette
92
étude pourraient amener l’implantation des cours axés sur l’OSP dans les collèges qui n’en
offrent pas. Aussi, si de nouvelles recherches documentent davantage leur effet, ces cours
pourraient être offerts aux étudiantes et étudiants des autres ordres d’enseignement, comme
les élèves du secondaire.
Enfin, certains obstacles ont été mentionnés à plusieurs reprises, sans qu’aucun
levier ne leur ait été associé. Cette observation souligne que le cours axé sur l’OSP n’est
pas une panacée. En effet, les cours axés sur l’OSP, dans leur forme actuelle, ne jouent pas
un rôle de levier pour tous les obstacles inhérents à la transition aux études supérieures. La
diversité des leviers qui y ont été répertoriés est le reflet des ajustements ponctuels et
nécessaires que les intervenantes et intervenants introduisent dans leurs pratiques pour
répondre aux besoins des étudiantes et étudiants.
5.3 Portée et limites de la recherche
Dans le cadre de cette étude, nous avons pris toutes les dispositions en notre pouvoir
pour assurer la rigueur scientifique à chacune des étapes de la recherche, du choix du
matériau à retenir à partir des données disponibles dans le programme de recherche initial
jusqu’à l’analyse de données. Par contre, comme les formules de cours différaient entre
elles (objectifs, activités, contexte, etc.), il existait un risque que les résultats soient
interprétés de façon plus organisée et cohérente que ce n’était le cas en réalité (Albarello
Digneffe et Hierneaux, 1995).
La méthode des groupes de discussion exige l’adoption d’un style directif sur la
forme, mais non directif sur le contenu (Leclerc, 2009). Les questions centrales posées lors
de ces rencontres ont permis d’assurer une certaine uniformité dans les sujets abordés.
Toutefois, en divisant les 23 professionnelles et professionnels en quatre groupes, dans le
programme de recherche initial, des préoccupations de divers ordres ont été soulevées par
les membres de chaque sous-groupe. Par exemple, en dehors des questions centrales,
quelques personnes ont largement discuté du manque d’information des étudiantes et
étudiants. Certains sujets ont donc été examinés dans certains groupes et occultés dans
d’autres (Leclerc, 2009). Cela dit, il est possible que les hypothèses des professionnelles et
93
professionnels sur les facteurs d’efficience des cours axés sur l’OSP aient été moins
affectées par cette limite, car les effets des pratiques d’orientation faisaient partie des
questions abordées lors des discussions.
Bien que nous ayons mentionné que les données de recherche étaient traitées de
façon confidentielle, il est possible que les participantes et participants aient voulu donner
une image favorable de leur cégep, au moment des entrevues téléphoniques et des groupes
de discussion. Il s’agit du phénomène de désirabilité sociale34
. On peut se demander si une
certaine forme de concurrence préexistait entre les collèges d’une même région en ce qui
touche le recrutement de la population étudiante et, le cas échéant, si cette situation pourrait
avoir eu un effet sur le partage des informations sur les pratiques efficientes. Afin de
prévenir cette situation, les animatrices ont répété les consignes relatives au déroulement
d’un groupe de discussion (Leclerc, 2009) au début de chaque rencontre. À cette occasion,
les participantes et participants ont été mis au fait qu’aucune information échangée ne
devait être dévoilée.
Étant donné que certaines personnes participant à la recherche ne portaient pas le
titre de c.o., l’angle adopté pour évaluer les pratiques d’OSP s’est avéré différent pour
chacune. De même, le rôle du personnel professionnel dans la coordination de la SAI varie
d’un collège à l’autre. Ainsi, les intervenantes et intervenants qui s’impliquaient
régulièrement dans les cours axés sur l’OSP étaient en meilleure position pour décrire les
activités organisées. En comparaison, les autres n’ont donné que leur perception du
déroulement de ce cours. Cela dit, aucune réponse n’est mauvaise, dans un groupe de
discussion (Leclerc, 2009). En ce sens, de multiples éclairages sur un phénomène ne
peuvent qu’en enrichir l’analyse.
Finalement, l’échantillon utilisé pour cette étude a été constitué selon la
méthodologie du programme de recherche initial (Picard et al., 2009-2013), qui
s’intéressait aux mesures d’orientation implantées à la SAI et à leur incidence sur les
étudiantes et étudiants. Le recrutement des professionnels des collèges a d’ailleurs été fait
34
La désirabilité sociale réfère à la tendance des gens à vouloir paraître sous un jour favorable (prestige,
richesse, intelligence, niveau d’information, etc.) (Voyer, 1995).
94
en ce sens, ce qui a influencé le choix des sujets abordés lors des groupes de discussion et
des entrevues téléphoniques. Dans ce contexte, il est possible que le portrait des obstacles
rencontrés lors de la transition aux études supérieures représente davantage les enjeux des
personnes inscrites à un tel dispositif. Il est aussi possible que ce portrait varie en ce qui
touche la population étudiante des programmes préuniversitaires et techniques. Toutefois,
le fait que l’ensemble des étudiantes et étudiants concernés par ce mémoire répondait
strictement au critère de la première inscription au collégial, vivant ainsi une transition,
renforce la validité interne de notre étude.
Conclusion
De nombreuses recherches ont mis à l’avant-plan la nécessité d’étudier les pratiques
d’orientation déployées auprès des étudiantes et étudiants en transition aux études
supérieures. Si certaines études québécoises ont exploré les dispositifs de transition qui
existent actuellement dans la province, aucune n’avait encore décrit les cours axés sur
l’OSP. Pourtant, ceux-ci jouent un rôle dans la diminution de l’indécision professionnelle
des personnes inscrites à la SAI (Picard, 2011a). Cette étude avait pour but d’identifier les
pratiques professionnelles incluses dans les cours axés l’OSP susceptibles d’avoir un effet
bénéfique sur la démarche d’orientation des étudiantes et étudiants de la SAI au moment de
la transition au collégial.
Un portrait de cette mesure d’aide a été dressé à la lumière de la recension des
écrits, rassemblant des études évaluatives de près de 50 cours axés sur l’OSP offerts
essentiellement aux États-Unis depuis 1975. Pour répondre à la question de recherche, nous
avons opté pour une analyse secondaire de données recueillies par l’intermédiaire
d’entrevues téléphoniques, de syllabus de cours et de groupes de discussion. L’approche
conceptuelle retenue, inspirée de trois modèles conceptuels dans le champ de la
psychologie sociale, a permis de mettre en parallèle les obstacles liés à cette transition, les
leviers présents dans les cours axés sur l’OSP et leurs effets. À la lumière de l’analyse des
données empiriques, nous avons identifié 19 leviers susceptibles d’aider les étudiantes et
étudiants à surmonter au moins 40 obstacles présents au moment de la transition aux études
supérieures. Nous avons également mis au jour les points communs entre ces leviers et les
pratiques d’orientation porteuses (Brown et McPartland, 2005).
Afin de corroborer les résultats obtenus dans la présente recherche, il serait pertinent
d’élargir la vérification empirique en intégrant la population étudiante des programmes
réguliers de formation technique ou préuniversitaire. D’ailleurs, les résultats préliminaires
de l’étude de Picard et al. (2010) soulignent que l’indécision liée au choix de carrière des
étudiantes et étudiants de la SAI inscrits à un cours axé sur l’OSP diminue
significativement durant la session. Si ce cours était offert à la population étudiante des
programmes réguliers, quels effets seraient observés sur l’évolution de l’indécision au fil de
96
la première session? Comme le soulignent les conclusions de Picard et Thibault (2012), les
étudiantes et étudiants ayant emprunté les filières régulières de formation au collège sans
faire l’objet d’un accompagnement en orientation pourraient bénéficier des cours axés sur
l’OSP.
Dans la même veine, une comparaison plus pointue des différentes formules
utilisées pour offrir les cours axés sur l’OSP permettrait d’approfondir davantage la
compréhension de leurs conditions d’efficience. Une des façons d’y parvenir consisterait à
recueillir directement le point de vue des étudiantes et étudiants sur les pratiques déployées
dans les cours afin de circonscrire l’effet réel de chacun des leviers sur leur démarche
d’orientation. Il ne nous a pas été possible d’explorer cette source de données dans la
présente étude.
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Annexe 1 : Interventions suggérées par Schlossberg et al.
(1989) auprès des personnes en transition
Interventions
sur la
Situation
Expliquer comment le contexte affecte l’effet de la transition.
Discuter de la façon dont cette transition modifie le style de vie, les
rôles, les relations, etc.
Utiliser les rétroactions des membres du groupe pour mettre en
lumière qu’ils vivent une transition similaire, mais de façon
différente pour chaque personne.
Interventions
sur le Soi
Discuter des moyens pris par les autres pour reprendre contrôle sur
leur vie.
Le simple fait de se rencontrer chaque semaine peut aider à affronter
une certaine solitude.
Interventions
sur le
Soutien
Le groupe, de nature, est un lieu de support mutuel.
Le groupe peut encourager les personnes à créer un réseau de
soutien.
L’évaluation du réseau de soutien au regard des besoins (acceptation,
estime de soi, modèles, etc.) peut mener à l’identification des
faiblesses de ce système et donner lieu à des suggestions pour
l’améliorer ou pour demander de l’aide.
Interventions
sur les
Stratégies
Essayer de gérer le stress accompagnant le changement.
Tenter de modifier la situation ou sa signification.
108
Annexe 2 : Éléments méthodologiques relatifs au
programme de recherche initial (Picard et al., 2009-2013)
Corpus analysé
Dans l’étude initiale, les collèges retenus ont d’abord été recrutés sur la base du fait
qu’ils offraient la SAI, mais également parce que la formule utilisée contenait des objectifs
liés à l’orientation des personnes inscrites dans ce programme. Un feuillet d’information a
été publié dans le bulletin de l’Association des Conseillers en Orientation au Collégial
(ACOC) et sur le site internet du Carrefour de la réussite (Fédération des cégeps), ce qui a
permis de recruter sept volontaires.
Ensuite, une période de sollicitation directe auprès des conseillers d’orientation a eu
lieu. Afin de prendre en compte la diversité du réseau collégial, nous avons sollicité la
collaboration de 23 professionnelles et professionnels représentant des collèges de toute
taille, de grands centres urbains, semi-urbains ou ruraux et dont la langue d’enseignement
était le français et l’anglais. À la suite de cette seconde période de recrutement, 15
personnes ont accepté de collaborer à la recherche et six ont refusé. Enfin, quatre personnes
se sont désistées après avoir donné leur accord, dont trois avant le début de la collecte de
données. En tout, 22 intervenantes et intervenants représentant 20 collèges ont participé à
toutes les étapes de la recherche.
Méthode et instruments de collecte de données
Pour les entrevues téléphoniques, un questionnaire semi-structuré a préalablement
été remis aux professionnelles et professionnels, ce qui a permis de donner un cadre à
l’entrevue et de couvrir les thèmes à aborder. La formule choisie a donné l’occasion à tout
le monde de s’exprimer sur les thèmes de discussion, de partager ses perceptions et de
fournir des détails sur les mesures en place dans son collège (Mayer et Ouellet, 2000). La
personne chargée de réaliser les entrevues a pris en note les propos des professionnelles et
professionnels. À la suite des entrevues téléphoniques, la plupart ont envoyé par courriel
des documents relatifs aux cours axés sur l’OSP.
109
Les groupes de discussion visaient à expliciter les pratiques d’orientation mises en
place à la SAI et à cerner leurs effets sur le développement vocationnel et le parcours des
étudiantes et étudiants. Les interactions entre les participantes et participants ont pu être
observées, ce qui a éclairé la recherche d’une autre façon que la somme des entrevues
individuelles (Mayer et Ouellet, 2000; Leclerc et al., 2009). Quatre questions ouvertes ont
été posées à la première série de rencontres, tandis que trois l’ont été à la seconde.
Techniques d’analyse
À la suite de la collecte de données, les analystes ont organisé les informations
obtenues dans une méta-matrice (Huberman et Miles, 1991) rassemblant les données pour
chaque collège sous quatre rubriques :
La place accordée à l’orientation dans les objectifs du programme;
L’environnement du collège;
Les activités et interventions liées à l’orientation offertes;
La participation aux activités d’orientation.
La description de chaque rubrique était classifiée selon leur intensité de 1 à 4 en
référence au continuum préalablement élaboré. Par la suite, les résultats cumulés ont été
répartis en deux catégories : l’environnement éducatif de la SAI (taille du collège, type de
coordination, objectifs du programme, etc.) et les interventions en orientation déployées
auprès des étudiantes et étudiants de la SAI. La seconde catégorie a donné lieu à la création
d’un répertoire de pratiques.