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HEC MONTRÉAL
L’INCERTITUDE ECONOMIQUE ET SON IMPACT SUR
L’INVESTISSEMENT CORPORATIF ET LE COUT DU CAPITAL:
UNE ETUDE CANADIENNE
par
Patrick Gilbert
Sciences de la gestion
(Finance de marché)
Mémoire présenté en vue de l’obtention
du grade de maîtrise ès sciences
(M.Sc)
Mai 2015
Patrick Gilbert, 2015
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Table des matières Chapitre 1. Définition de l’incertitude économique ........................................................................ 6
1.1 Distinction entre incertitude économique et volatilité ........................................................ 6
1.2 L’incertitude comme étalement à moyenne constante ........................................................ 7
1.3 Spécifier l’incertitude économique de l’incertitude générale ............................................. 8
Chapitre 2. Revue de littérature ...................................................................................................... 10
2.1 Mesure de l’incertitude économique .................................................................................. 10
2.2 Incertitude et impact sur le marché des capitaux............................................................... 12
2.3 Déterminants et mesure de l’investissement des entreprises ............................................ 16
2.4 Déterminants et mesure du coût du capital ........................................................................ 17
2.5 Contributions à la littérature ............................................................................................... 20
Chapitre 3. Méthodologie ............................................................................................................... 21
3.1 Construction de l’indice général d’incertitude économique (GEUI) ............................... 21
3.1.1 Les bases de l’indice GEUI : l’indice Economic Policy Uncertainty (EPU) ........... 21
3.1.2 Construction de l’indice General Economic Uncertainty Index (GEUI) ................. 23
3.2 Modèles empiriques étudiés................................................................................................ 25
3.2.1 Étude de l’impact de l’incertitude économique sur le coût du capital...................... 25
3.2.2 Régressions étudiant l’impact de l’incertitude économique canadienne sur
l’investissement ........................................................................................................................... 27
3.3 Données utilisées ................................................................................................................. 28
3.3.1 Modèles de régression portant sur l’étude du rendement excédentaire canadien .... 29
3.3.2 Modèles de régression portant sur l’étude de l’investissement corporatif ............... 30
Chapitre 4. Résultats ....................................................................................................................... 32
4.1 Évolution des indices GEUI canadien et américain durant la période 2001-2014 .......... 32
4.2 Statistiques descriptives ...................................................................................................... 33
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4.3 Résultats des modèles de régression portant sur l’impact de l’incertitude économique
générale sur la prime de risque canadienne ................................................................................... 36
4.4 Modèles de régression portant sur l’impact de l’incertitude économique sur
l’investissement des entreprises ..................................................................................................... 39
Chapitre 5. Discussion de la méthodologie et des résultats .......................................................... 42
5.1 Mesure de l’incertitude économique générale ................................................................... 42
5.2 Modèles de régression et échantillonnage ......................................................................... 42
5.2.1 Variables dépendantes ................................................................................................. 43
5.2.2 Variables de contrôle ................................................................................................... 43
5.2.3 Période d’analyse ......................................................................................................... 43
5.2.4 Modèle de régression par moindre carrés ordinaires ................................................. 44
5.2.5 Inclusion du coût de la dette dans les modèles de régression ................................... 44
Chapitre 6. Tests de robustesse et mesures alternatives d’incertitude économique .................... 45
6.1 Mesures alternatives du coût du capital ............................................................................. 45
6.1.1 Modèles modifiant la variable dépendante représentant le coût du capital.............. 45
6.1.2 Modèles alternatifs étudiant l’impact de l’incertitude économique canadienne et
américaine sur le coût du capital ................................................................................................ 47
6.2 Modèles alternatifs de l’impact de l’incertitude économique générale sur
l’investissement des entreprises ..................................................................................................... 51
BIBLIOGRAPHIE.............................................................................................................................. 56
ANNEXE A : Tests de stationnarité des variables utilisées dans les régressions .......................... 58
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INTRODUCTION
Depuis la dernière crise financière de 2008, un climat d’incertitude au niveau macro-économique
s’est installé sur le marché des capitaux. Si la crise de liquidité semble s’être résorbée, on
constate que l’incertitude au niveau budgétaire de plusieurs puissances mondiales encourage les
investisseurs à la prudence, et à faire une collecte d’information plus importante afin de prendre
de meilleures décisions d’investissement.
D’autre part, la reprise économique n’a pas progressé aussi rapidement que ce que les principaux
observateurs avaient prévu. Plusieurs mesures ont été prises au niveau gouvernemental afin
d’encourager la relance. Parmi celles-ci, on retrouve des crédits d’impôt pour les grandes
entreprises, afin de stimuler l’investissement privé, ou alors des mesures « d’assouplissement
monétaire » (Quantitative Easing) aux États-Unis. Cependant, les résultats de ces programmes
semblent mitigés, les firmes privées préférant augmenter leurs réserves de liquidité et l’épargne
de précaution dans la conjoncture actuelle.
Le cas du Canada retient particulièrement notre attention, du fait de sa proximité avec le marché
américain des capitaux. En effet, une grande majorité du commerce canadien se fait avec son
voisin du sud, ce qui fait en sorte que son économie est exposée aux aléas de la conjoncture des
États-Unis. Il sera intéressant d’étudier l’impact de l’incertitude économique canadienne sur les
investissements corporatifs.
Nous pouvons également voir à la lumière de ces constats qu’une meilleure compréhension du
comportement des investisseurs en situation d’incertitude économique permettrait aux acteurs de
trouver des solutions plus adaptées aux politiques économiques visant à stimuler l’investissement
des entreprises.
Nous proposons dans cette étude un ajustement à une mesure d’incertitude existante afin de
quantifier l’incertitude économique générale avec moins de contraintes. De plus, nous présentons
des modèles plus simples, qui ont cependant une certaine robustesse. Les résultats de notre étude
montrent que l’incertitude économique générale canadienne a un impact négatif et significatif sur
le rendement excédentaire canadien, ainsi que sur le taux d’investissement dans l’économie
5
canadienne. Nous constatons également que l’impact de l’incertitude économique est plus
prononcé en l’analysant avec un retard d’une période, et cet impact peut être plus fort que celui
de la volatilité des rendements boursiers (mesurée par l’indice VIX), de manière relative.
Finalement, nous constatons que l’incertitude économique générale américaine n’a pas d’impact
significatif sur le marché des capitaux canadien.
Dans une première partie, nous ferons la distinction entre les principales sources d’incertitude
qui peuvent avoir un impact sur le marché des capitaux et ses acteurs. En second lieu, nous
passerons en revue la littérature portant sur l’incertitude économique, notamment ses différentes
mesures, pour ensuite étudier son impact sur le marché des capitaux. La troisième partie portera
sur la méthodologie que nous choisirons afin de cerner les conséquences de l’incertitude
économique sur l’investissement des entreprises. Avec des modèles similaires, nous étudierons
ensuite les résultats des modèles évaluant l’impact de l’incertitude économique sur le coût en
capital des entreprises. Finalement, après une cinquième partie consistant en une discussion des
résultats obtenus, nous procéderons à des tests de robustesse visant à corroborer les résultats
obtenus précédemment.
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Chapitre 1. Définition de l’incertitude économique Avant d’étudier les impacts de l’incertitude économique, il est important dans un premier temps
de définir ce que l’on entend par ce terme. De plus, nous ferons la distinction entre le risque
associé aux marchés financiers et reconnu dans la littérature, notamment par l’écart-type des
rendements du marché, et l’incertitude économique. Nous ajouterons aussi à cette partie une
distinction entre différentes formes de risque. Nous présenterons également cette notion
d’incertitude comme étant un étalement à moyenne constante de la distribution des rendements
futurs, comme proposé par Bernanke (1983), et ensuite par Dixit et Pindyck (1994) .
Finalement, nous distinguerons l’incertitude économique d’autres formes d’incertitude plus
générales.
1.1 Distinction entre incertitude économique et volatilité Il y a en effet une différence entre le risque perçu sur le marché des capitaux, souvent considéré
en termes de volatilité (écart-type des rendements du portefeuille de marché), et l’incertitude.
Cette dernière notion peut être définie comme étant un manque substantiel d’information, qui
affecte le comportement des investisseurs, et qui jette de l’ombre sur les performances futures
d’un actif financier.
La volatilité observée sur les marchés a une importance capitale en ce qui a trait au
comportement des investisseurs. Ceux-ci veulent optimiser leur allocation d’actif ou leurs
décisions d’investissement, et doivent considérer le risque associé à chaque actif. Bloom (2009)
présente la volatilité implicite des indices boursiers (S&P 500) comme une mesure représentative
de l’incertitude sur les marchés. L’auteur présente également l’incertitude économique comme
étant un choc de deuxième ordre sur les indices macroéconomiques, accompagnant un
évènement d’actualité majeur (comme une crise pétrolière ou même un attentat terroriste tel le 11
septembre 2001) ou précédant une annonce importante (discours des gouverneurs de la Banque
Centrale, annonce de la politique monétaire à venir, réforme fiscale importante etc.).
Par ailleurs, il est important de distinguer deux dimensions du risque perçu par les investisseurs.
Sandmo (1970) explique la différence entre le risque de revenu et le risque de capital, qui ont
des effets opposés sur le comportement des individus sur le marché. En effet, d’un côté les
investisseurs veulent épargner dans le but de garder un niveau de consommation stable durant
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toute leur vie. D’un autre côté, l’épargne des investisseurs procure un risque de perte de capital
qui incite à la consommation immédiate. Notre étude permettra donc de vérifier de manière
empirique lequel des deux effets prédomine en période d’incertitude économique, soient
l’épargne de précaution ou l’investissement immédiat sous forme de dépenses en capital.
Comme nous le verrons dans la section suivante, on peut également percevoir que ces
évènements d’actualité sont source d’incertitude dans la mesure où ils créent des étalements à
moyenne constante sur la distribution des rendements des actifs financiers sur le marché.
1.2 L’incertitude comme étalement à moyenne constante Un actif financier (une action ordinaire par exemple) peut être considéré comme risqué dû à la
dispersion des rendements possibles, mais peut avoir un degré relativement faible d’incertitude.
En effet, un investisseur peut avoir une aversion faible pour le risque, et peut donc s’engager
dans un placement risqué, si bien sûr cette stratégie respecte son allocation optimale des
ressources. On peut donc supposer que l’incertitude est une représentation du manque
d’information quant à la distribution des rendements potentiels d’un titre financier, ou alors de la
productivité à l’échelle nationale. Ce manque d’information amène les agents sur le marché à
extraire davantage d’information, comme le soutient Dzielinski (2010) .
Si l’incertitude économique peut être simulée par des chocs de deuxième ordre provenant
d’évènements d’actualité tel qu’exposé par Bloom (2009) , ceux-ci peuvent également être vus
comme des étalements à moyenne constante (Mean-Preserving Spread) sur la distribution future
des rendements d’un investissement, qu’il s’agisse d’un actif financier ou d’un investissement
dans un projet (investissement corporatif). Dans ce cas, cela explique la baisse de l’utilité de la
consommation des agents, étant donné qu’un étalement à moyenne constante est, pour tout agent
averse au risque, nuisible à l’investissement.
Cette dernière notion nous permet de valider ce qu’avance Bernanke (1983) à propos de la
théorie de l’investissement irréversible (Irreversible Investment). En effet, un évènement
d’incertitude dans le marché peut inciter les investisseurs à attendre la résolution d’une
incertitude au niveau économique ou législatif (annonce de la Banque Centrale, résultats d’une
élection législative, etc.) pour ensuite déterminer leur stratégie d’investissement optimale. Cette
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décision est comparée à la perte des rendements espérés à court terme si un projet était mis en
place immédiatement. Il est important de noter que les investisseurs accordent une importance
particulière aux mauvaises nouvelles car celles-ci peuvent faire regretter une décision
irréversible de la part des agents. L’incertitude générant une volatilité plus importante dans la
distribution des rendements espérés, les investisseurs vont surtout porter leur attention sur les
scénarios faisant en sorte que l’espérance des flux monétaires futurs d’un projet soit en deçà des
coûts de celui-ci. Ce phénomène est connu sous le nom de « Bad News Principle », et est repris
par Dixit et Pindyck (1994) .
Dans le cadre de notre analyse, nous devrons être en mesure de spécifier notre notion
d’évènement d’incertitude économique. La section suivante distinguera l’incertitude
économique, que nous voulons étudier, par rapport à d’autres sources d’incertitude plus
générales et plus rares au Canada.
1.3 Spécifier l’incertitude économique de l’incertitude générale Une autre distinction intéressante à effectuer dans le cadre de notre analyse est d’extraire
l’incertitude économique par rapport à l’incertitude générale. Celle-ci peut être reliée à plusieurs
phénomènes qui ne sont pas économiques, tels des catastrophes naturelles, des attentats
terroristes ou même des chocs politiques indépendants de l’économie (scandale politique, coup
d’État, etc.). Baker et Bloom (2011) ont en effet analysé l’impact de ces chocs sur le marché des
capitaux, plus particulièrement sur la volatilité et le rendement des indices boursiers. Les auteurs
ont observé que ces chocs apportent des impacts de premier et de deuxième ordre de manière
significative, augmentant surtout la volatilité des rendements du marché.
Pour la suite de cette étude, nous considèrerons que l’incertitude économique sera définie comme
étant l’ensemble des éléments de source économique et politique faisant en sorte de réduire la
qualité des prévisions des investisseurs, ce qui les incitera à rechercher davantage d’information
pour prendre leurs décisions. Ces évènements engendrent des étalements à moyenne constante
sur la distribution future des rendements d’un investissement corporatif, et peut inciter les agents
à conserver leur option d’attendre d’avoir davantage d’information afin de prendre une meilleure
décision d’investissement. Parmi les éléments d’incertitude économique, nous inclurons les
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décisions politiques visant à influencer l’environnement économique, qu’il s’agisse d’une
annonce de politique monétaire, une réforme fiscale, ou alors un changement de gouvernement
(annonce d’élections).
Dans le prochain chapitre, nous analyserons les articles de la littérature existante sur lesquels
notre étude est fondée.
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Chapitre 2. Revue de littérature Les recherches portant sur l’incertitude économique sont relativement nouvelles dans la
littérature, et leur contribution gagne en importance, surtout dans le contexte actuel. La notion
d’incertitude économique étant relativement large, la littérature consacrée à ce sujet est assez
variée, et touche à la fois le domaine économique et politique. En effet, les gouvernements et les
banques centrales ont un rôle central sur l’activité économique, ce qui fait en sorte que les
principaux acteurs du marché des capitaux doivent anticiper les principales modifications aux
politiques fiscales et monétaires envisagées, ainsi qu’évaluer les actifs financiers. Ceux-ci sont
également sensibles au comportement des investisseurs selon leur degré d’incertitude.
Lors de notre revue de littérature, nous nous intéresserons aux recherches qui ont été effectuées
afin de définir et mesurer l’incertitude économique, pour ensuite étudier l’impact de celle-ci sur
le marché des capitaux et sur les investisseurs. Par la suite, nous étudierons en détails les
principaux déterminants de l’investissement des entreprises, ainsi que du coût du capital.
2.1 Mesure de l’incertitude économique Peu de recherches ont été consacrées à mesurer l’incertitude économique de manière empirique.
Selon l’étude de Dzielinski (2010) , cette incertitude encourage les investisseurs à une collecte
plus importante d’information sur l’état général de l’économie, ou alors sur les derniers
développements à l’échelle politique. L’auteur considère la fonctionnalité « Google Trends »,
disponible sur le site Internet de Google, comme étant une mesure adéquate afin de cerner
l’incertitude des investisseurs. Cet outil permet de relever l’intérêt suscité par certain thèmes
selon la période choisie. Dzielinski propose de comptabiliser les recherches contenant le mot-clé
« économie » effectuées sur Google, sur une période allant de 2004 à aujourd’hui. Cette mesure
est efficace dans la mesure où elle permet de relever le niveau de recherche d’information des
investisseurs sur le marché, mais contient toutefois peu d’information sur le niveau d’incertitude
au niveau des investisseurs privés. Comme mesure alternative d’incertitude, Dzielinski propose
les indices des indices de confiance des investisseurs, tels que le Barron’s Confidence Index, le
Shiller’s one year confidence index, ainsi que le State Street Investor Confidence Index.
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Comme nous l’avons noté dans le chapitre précédent, une mesure approximative de l’incertitude
économique peut être la volatilité du marché des actions. Bloom (2009) utilise cette variable afin
de créer un processus stochastique simulant des chocs d’incertitude sur le marché.
D’autre part, plusieurs articles ont souligné la contribution de la couverture médiatique de
l’actualité économique sur le comportement des investisseurs. Alexopoulos et Cao (2011)
considèrent un indice NEUS (Newspaper-based Economic Uncertainty Sentiment), constitué du
nombre d’articles du New-York Times contenant des mots-clés reliés à l’incertitude économique.
Les auteurs observent une corrélation positive entre le nombre d’articles concernant l’incertitude
économique et le volume de transactions, la vélocité (définie comme étant le ratio dollar share
turnover sur la capitalisation boursière) et la volatilité du marché (dispersion entre le sommet et
le creux des prix pour une journée de transaction). Ces relations ont cependant un effet négatif
sur le rendement des actions ordinaires sur le marché américain.
Baker, Bloom et Davis (2013) ont pu rassembler différentes mesures d’incertitude que nous
avons présentées précédemment afin de proposer un indice d’incertitude économique et politique
(« Economic Policy Uncertainty », ou EPU). Cette mesure est constituée de trois variables
regroupant différentes sources d’incertitude, dont la couverture médiatique accordée à des
évènements économiques et politiques, ainsi que de mesures de dispersion au niveau des
prévisions économiques des analystes. Celles-ci portent notamment sur l’inflation anticipée et
l’atteinte de l’équilibre budgétaire en ce qui concerne le Canada. L’indice de référence américain
est accompagné de ses équivalents de plusieurs pays ou zones économiques, dont le Canada, et
tous ces indices sont disponibles sur leur site Internet.
Plus récemment, Bhagat et Obreja (2013) ont développé une nouvelle mesure d’incertitude, qui
est davantage centrée sur l’incertitude des flux monétaires au niveau des firmes individuelles. En
effet, les auteurs ont calculé la dispersion dans la distribution des flux monétaires futurs des
entreprises, à l’aide d’un modèle dynamique utilisant des données de panel visant à isoler
l’innovation des flux monétaires pour une entreprise donnée. Le modèle dynamique utilise la
méthodologie GMM telle que proposé par Arellano et Bond(1991) . Les auteurs ont compilé les
flux monétaires de chaque entreprise américaine, en contrôlant les impacts de la productivité, de
la production (output), des prix, et des principaux facteurs de production. Par la suite, les auteurs
effectuent une projection des résidus, élevés au carré, obtenus lors de la première étape vers des
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variables capturant l’incertitude des flux monétaires futurs. Parmi les variables choisies, on
retrouve l’indice S&P500 VIX (élevé au carré afin d’éviter de travailler sur une mesure de
variance).
2.2 Incertitude et impact sur le marché des capitaux Comme nous l’avons mentionné en première partie, l’incertitude au niveau politique n’est pas
automatiquement de source économique. Baker et Bloom (2011) ont souligné que des
évènements d’incertitude politique pouvaient avoir un impact important sur le marché des
capitaux en termes de rendements et de volatilité des indices boursiers. Ces évènements
regroupent les révolutions, coups d’État, qui sont indépendants dans une certaine mesure des
politiques économiques.
Au niveau de l’incertitude politique Pastor et Veronesi (2011) ont démontré que les investisseurs
exigent une prime de risque de marché plus élevée lorsque les conditions économiques se
détériorent. Cet effet est dû aux anticipations des investisseurs face à des réformes politiques
visant à stimuler l’économie. Ces réformes constituent un choc orthogonal aux évènements
économiques, ce qui crée un climat d’incertitude. L’impact est d’autant plus grand que la
volatilité des coûts politiques associés à ces réformes est grande.
L’analyse de Pastor et Veronesi rejoint le principe d’irréversibilité des investissements
(« Irreversible Investment ») évoqué par Bernanke (1983) . Cette théorie semble plus complète
que la théorie orthodoxe (« Orthodox Theory »), basée sur la Valeur actuelle nette d’un projet et
la décision d’investissement appropriée. Une présentation et une comparaison de ces deux
théories ont été publiées par Dixit et Pindyck (1994) .
Dans la théorie de l’investissement irréversible, l’investisseur détient l’option d’entreprendre son
projet immédiatement, profitant des rendements à court terme espérés, ou alors de reporter sa
décision dans le temps, sacrifiant ces rendements en échange d’une information plus éclairée, ce
qui lui permet de prendre une meilleure décision d’investissement. Celle-ci doit comparer
l’espérance des rendements futurs actualisés de l’investissement à la valeur de l’option, qui
consiste au coût d’abandon du projet. Ce coût est d’autant plus élevé que l’irréversibilité du
projet est grande. Bernanke (1983) pose également comme hypothèse que l’attente d’information
permet toujours de prendre de meilleures décisions. Dans cette étude, on constate que lorsque
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l’incertitude augmente, la valeur de l’option d’abandon augmente, ce qui ralentit les investisseurs
dans leurs décisions d’investissement. En effet, les agents du marché préfèreront attendre la
venue de nouvelles informations avant de déterminer leur stratégie optimale. L’irréversibilité de
l’investissement fait également en sorte que les investisseurs attendent des conditions
économiques suffisamment bonnes afin de s’engager dans un projet, et suffisamment mauvaises
pour se retirer d’un projet qui n’est pas rentable.
L’étude de McDonald et Siegel (1982) soutient également le principe d’investissement
irréversible, et les auteurs font le constat qu’il n’est pas suffisant d’évaluer la rentabilité d’un
projet en effectuant une analyse coût-bénéfices « brute ». En effet, en fonction du processus suivi
par les bénéfices futurs du projet ainsi que les coûts associés à celui-ci, il peut être optimal
d’attendre la période où la valeur présente des bénéfices est égale au double du coût du projet.
De manière générale, plus la variabilité des bénéfices d’un projet est grande, plus la valeur
actuelle de ceux-ci doit être grande par rapport aux coûts afin d’entreprendre un projet
d’investissement.
Les études de Bernanke (1983) et de Siegel et McDonald (1982) démontrent la raison pourquoi
les investisseurs portent une attention particulière aux mauvaises nouvelles qui peuvent remettre
en doute la rentabilité d’un projet ou augmenter la variabilité des bénéfices anticipés. Ce
phénomène est connu sous le nom de « Bad news effect principle », observé de manière
empirique par l’étude de Bloom (2009) , où l’on constate une pause des investissements
lorsqu’un choc d’incertitude économique affecte le marché. Ce choc influence également la
production industrielle durant environ 6 mois, pour ensuite observer un phénomène de
surcompensation (overshooting) durant les mois suivants. L’auteur observe également une
corrélation significative entre l’écart au niveau de la croissance des profits à l’échelle des
entreprises et la volatilité du rendement des indices boursiers, ce qui semble confirmer un lien
entre l’incertitude et la volatilité.
Ces résultats sont appuyés par l’étude de Guiso et Parigi (1999) qui observent une diminution de
l’investissement des entreprises italiennes en réponse à l’incertitude face à la demande.
En contrepoids aux études précédentes, Caballero (1991) suggère que la relation entre
incertitude et niveau d’investissement est positive, et que la présence de coûts d’ajustement
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asymétriques n’est pas suffisante afin d’induire une relation inverse entre l’incertitude et
l’investissement. Pour que cette relation soit validée, il est nécessaire d’avoir une concurrence
imparfaite. Cette conclusion rejoint celles avancées par Hartman (1972) et Abel (1983) , qui
s’appliquaient à des cas de coûts d’ajustements symétriques et convexes dans un cadre de
concurrence parfaite. L’auteur souligne également le fait que les décisions d’investissement sont
principalement prises en fonction de la disponibilité et du coût du capital, ainsi que de la
rentabilité de celui-ci.
En réaction aux résultats contradictoires des recherches théoriques précédentes, Leahy et Whited
(1996) ont proposé une étude empirique s’intéressant aux conséquences de l’incertitude
économique sur l’investissement. Les auteurs font d’abord la distinction entre deux théories sur
deux différents aspects. Premièrement, ils séparent les théories étudiant la firme de manière
individuelle, l’incertitude reflétant la variance d’un élément central de leur environnement
d’affaires, et les théories étudiant la firme en liaison avec les autres, l’accent étant mis sur la
covariance entre les rendements des différents projets d’investissement. Dans le premier cas,
l’incertitude économique a un impact sur le niveau d’investissement, alors que dans le second les
effets sont ressentis uniquement si la covariance entre les rendements des firmes est touchée.
Leahy et Whited (1996) font également la distinction entre les travaux représentant le revenu
marginal brut du capital (marginal revenue product of capital) comme une fonction concave ou
convexe d’une variable aléatoire. Dans le cas de cette dernière fonction, augmenter l’incertitude
(donc la variance de la variable aléatoire étudiée) inciterait l’investissement selon l’inégalité de
Jensen, alors que le contraire se produirait dans le cas d’une fonction concave. Dans le cas d’un
investissement irréversible, les rendements anticipés deviennent asymétriques. Ce faisant, une
incertitude économique plus élevée rendra les investissements moins attrayants. En effet,
l’incertitude augmente le risque baissier des rendements d’un investissement sans en contrepartie
augmenter le potentiel haussier de ceux-ci.
L’effet de l’incertitude économique peut également être de retarder des investissements
corporatifs, même si la conjoncture est favorable à l’emploi et l’investissement. Bhagat et Obreja
(2013) suggèrent que lorsque surviennent des périodes d’incertitude élevée, par exemple la crise
de 2008-2009, les firmes ayant un bon potentiel d’investissement (mesuré par un Q de Tobin
élevé) et de faibles contraintes financières (beaucoup de liquidités et peu de levier financier)
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préfèrent attendre la résolution de cette incertitude, à la fois au niveau macroéconomique, et au
niveau de leur propre incertitude face à leurs flux monétaires futurs. De plus, Les impacts de
l’incertitude par rapport aux flux monétaires futurs ne se limitent pas à l’investissement
corporatif dans des biens tangibles, mais également dans l’investissement dans des actifs
intangibles et au niveau de l’emploi corporatif.
Gulen et Ion (2013) confirment l’impact négatif de l’incertitude sur l’investissement corporatif.
En utilisant la variable EPU développée par Baker, Bloom et Davis (2013), les auteurs observent
que les entreprises, en concordance avec le principe d’investissement irréversible de Bernanke
(1983), subissent des pressions quant à leur coût d’emprunt, et préfèrent retarder leurs
investissements, particulièrement dans des contextes de concurrence faible, de contraintes
financières élevées et de degré élevé d’irréversibilité des investissement. Cette étude estime que
durant la crise financière de 2007 à 2009, le niveau d’investissement corporatif a chuté de 32%,
et les deux-tiers de cette chute seraient attribuables à l’incertitude reliée aux politiques
économiques.
Un autre exemple d’évènement d’incertitude faisant en sorte que les investisseurs attendent la
résolution de celle-ci avant d’investir est l’anticipation des résultats d’une élection. Julio et Yook
(2012) ont évalué l’impact des élections sur le cycle d’investissement des entreprises. Ils ont
mis en lumière une relation inverse entre le degré d’incertitude qu’engendre le processus
électoral, notamment en examinant les élections serrées, et l’investissement des entreprises,
mesuré avec le taux d’investissement et le Q de Tobin. Nous retenons de cet article que les
entreprises semblent prudentes face à la montée d’une incertitude politique, ce qui les incite à
augmenter leur niveau d’encaisse dans la même mesure que leur niveau d’investissement
diminue. Durant la période post-électorale, lorsque l’incertitude est résolue, les auteurs observent
un niveau d’investissement corporatif supérieur à celui des années ne tenant pas d’élections,
avant de se stabiliser jusqu’au prochain scrutin.
L’incertitude au niveau économique peut également se refléter sur les politiques fiscales
adoptées par le gouvernement. Fernandez-Villaverde et al. (2012) ont étudié l’impact de
chocs temporaires affectant l’incertitude concernant la politique fiscale des États-Unis. Les
auteurs ont constaté dans un premier temps que la volatilité au niveau de la taxation ainsi qu’au
niveau des dépenses gouvernementales. De plus, ils suggèrent que les chocs temporaires
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d’incertitude, surtout au niveau des taux d’imposition anticipés, ont un impact négatif sur le
cycle économique des États-Unis, que ce soit à l’échelle des investissements, de la
consommation, de la production nationale ainsi que des heures travaillées.
On peut constater que l’on ne peut pas exclure l’incertitude politique de notre analyse de
l’incertitude économique générale. En effet, les causes de révolution ou de conflit interne
peuvent être perçues comme des éléments d’incertitude de la population par rapport à l’économie
du pays. Même les périodes électorales reflètent une certaine incertitude économique car les
investisseurs hésitent entre plusieurs partis politiques qui proposent des réformes économiques
différentes. L’article de Gonul et Colak (2013) démontre en effet que les périodes électorales au
niveau des gouverneurs des États américains impactent de manière négative l’activité des
premiers appels publics à l’épargne aux États-Unis.
Il faudra donc prendre en compte les évènements de nature économique et politique sous une
même variable, qui aura pour objectif de représenter l’incertitude économique de manière
générale. Nous étudierons par la suite si cette variable d’incertitude économique a un impact
marginal sur le marché des capitaux comparativement à l’incertitude économique ou politique.
Les prochaines sections auront pour objectif de cerner les principaux déterminants de
l’investissement des entreprises ainsi que du coût du capital.
2.3 Déterminants et mesure de l’investissement des entreprises Dans cette section, nous analyserons les principaux déterminants de l’investissement des
entreprises, ainsi que des différentes mesures proposées afin de mesurer celui-ci.
Outre les facteurs théoriques qui définissent l’investissement des entreprises, plusieurs éléments
doivent être pris en considération. Par exemple, des caractéristiques comportementales des
gestionnaires peuvent influencer le niveau d’investissement. L’étude de Malmendier et Tate
(2005) soutient que l’optimisme de la part des dirigeants d’entreprise peut engendrer des
distorsions du niveau optimal d’investissement. En effet, les auteurs observent que les
gestionnaires les plus confiants, définis comme étant ceux qui ne réduisent pas leur exposition au
risque idiosyncratique de leur entreprise, ont une sensibilité accrue de leur niveau
d’investissement en capital, surtout dans des situations où le financement de l’entreprise est
dépendant des investisseurs externes de fonds propres. Il y aura donc un excès de dépenses en
17
capital dans le cas où le financement interne est la principale source des investissements, alors
que l’on observe un resserrement de ceux-ci lorsque l’entreprise dépend surtout du financement
externe.
L’article de Damodaran (2008) souligne de son côté l’importance du coût du capital, par le biais
de la prime de risque, dans le niveau d’investissement des entreprises. Celles-ci voudront
entreprendre des projets qui génèrent un rendement supérieur au coût du capital. Une hausse de
celui-ci aura de ce fait un impact négatif sur le niveau d’investissement corporatif, qui aura
comme conséquence de ralentir la croissance économique.
Outre le coût du capital et la prime de risque, l’investissement des entreprises est également
affecté par l’épargne de précaution. Leland (1968) définit celle-ci comme étant la somme
supplémentaire des montants épargnés en raison de l’incertitude reliée aux revenus futurs. Les
investisseurs ayant une fonction d’utilité concave dû à leur aversion au risque, ceux-ci souhaitent
lisser leur profil de consommation à travers le temps, et l’épargne de précaution sert à s’assurer
d’obtenir un certain niveau de consommation dans le futur.
D’un autre côté, ce type d’épargne de précaution est uniquement relié au risque de revenu.
Comme nous l’avons expliqué au chapitre précédent, Sandmo (1970) fait la distinction entre le
risque de revenu et le risque de croissance du capital. Dans ce dernier cas, les investisseurs ont
intérêt à consommer leurs revenus immédiatement car le risque de rendement peut entrainer des
pertes qui feront diminuer la consommation future.
Les deux études mentionnées précédemment permettent de déterminer que la troisième dérivée
de la fonction d’utilité permet de mesurer le niveau de prudence des investisseurs, et leur
propension à consacrer une partie de leurs choix de consommation envers l’épargne de
précaution. L’étude de Kimball (1990) soutient cette théorie, et permet de tracer des parallèles
reliant les principes d’aversion au risque énoncés par Arrow et Pratt, et l’épargne de précaution.
2.4 Déterminants et mesure du coût du capital Dans cette section, nous aborderons les principaux déterminants du coût en capital des
entreprises, ainsi que des différentes méthodes afin d’évaluer celui-ci. Tout d’abord, nous
introduirons des bases théoriques sur le coût du capital, ainsi que certaines différences
géographiques entre le Canada et les États-Unis dans le calcul de ce dernier. Par la suite, nous
18
aborderons des modèles classiques d’évaluation du coût du capital, avant d’étudier des modèles
plus récents tentant d’inférer un coût du capital implicite basé sur des prévisions à long terme.
À l’échelle macroéconomique, le coût du capital a une influence majeure auprès du niveau de
croissance économique. En effet, Shoven et Topper (1992) soutiennent que le coût du capital
détermine le niveau d’investissement à l’échelle d’un pays, ce qui a une incidence sur le niveau
des salaires et de la productivité.
L’étude de Shoven et de Topper (1992) soulève également des enjeux géographiques entre le
Canada et les États-Unis. Les auteurs indiquent que le coût du capital au niveau du Canada, un
pays développé ayant tout de même une économie plus petite que les États-Unis, est davantage
sensible aux fluctuations des déterminants du coût du capital américain qu’inversement. Par
exemple, lorsque les États-Unis ont abaissé le niveau du taux d’impôt corporatif en 1986, les
observateurs ont craint une fuite de capitaux provenant du Canada vers les États-Unis, ce qui
aurait eu une incidence négative sur l’économie canadienne. Cette crainte peut être dissipée dans
la mesure où le Canada compense cette mesure par une baisse de son niveau d’impôt corporatif.
Une méthode qui permet d’évaluer le coût du capital dans une économie est d’étudier la prime de
risque de marché, tel que soutenu par Damodaran (2008). D’après celui-ci, cette mesure reflète le
prix que les investisseurs d’une économie sont prêts à payer pour détenir un certain niveau de
risque. Cette même prime de risque peut également être approximée par le ratio de rendement du
dividende (Dividende/Prix). L’auteur prévient par ailleurs qu’il y a plusieurs manières d’estimer
la prime de risque pour un même marché, soient la prime de risque tirée des rendements
historiques, des sondages demandant à divers acteurs quel serait leur prime de risque exigée afin
de détenir une certaine classe d’actifs, et une prime de risque implicite calculée à partir des prix
observés actuellement sur le marché. On observe des différences significatives dans ces trois
différentes mesures, tant au niveau de la valeur absolue de la prime de risque calculée qu’au
niveau de la volatilité de cette prime à travers le temps. On remarque également des niveaux de
la prime de risque très différents selon le pays observé.
Les auteurs Gebhardt, Lee et Swaminathan (2001) ont quant à eux développé une
méthodologie permettant d’estimer une version du « coût du capital implicite » en utilisant un
modèle de bénéfice résiduel actualisé (Residual Income Model, ou RIM) et le cours des actions
19
de ces firmes. Cette mesure de coût du capital implicite est fonction de plusieurs variables
exogènes telles le type d’industrie, le ratio valeur aux livres sur valeur marchande, le taux
d’intérêt prévu à long terme ainsi que la dispersion dans les prévisions d’analystes quant aux
bénéfices futurs de la compagnie. La plupart de ces mesures étant stable à long terme et pouvant
être évaluées de manière ex ante, elles peuvent donc fournir une bonne estimation du risque
perçu de l’entreprise chez les investisseurs.
Une autre contribution majeure de cet article a été de changer l’approche d’évaluation du coût du
capital. En effet, plusieurs études empiriques antérieures utilisent un ou des modèles d’évaluation
prenant en considération les rendements prévus ou observés des entreprises. Étant donné que le
rendement anticipé n’est pas une donnée observable, plusieurs tests des modèles classiques
d’évaluation tels le Modèle d’Évaluation Des Actifs Financiers (MÉDAF) et l’Arbitrage Pricing
Theory (APT) utilisent comme substitut le rendement réalisé. Les auteurs évitent donc
« l’imprécision inévitable »1 d’une évaluation de la prime de risque en utilisant un modèle de
bénéfice résiduel actualisé. L’étude de Gode et Mohanram (2003) soutient également que le
fait d’induire la prime de risque anticipée à partir de rendement observés pose problème en
raison de la faible corrélation entre les rendements anticipés et les rendements observés.
L’étude de Gode et Mohanram (2003) soulève une problématique concernant l’évaluation du
coût du capital de manière implicite. En effet, les méthodes précédentes sont basées sur les
prévisions à long terme d’analystes, qui servent d’approximation des anticipations de marché.
Cependant, les principales données utilisées ne sont pas observables sur la durée de vie de
l’entreprise, et les chercheurs doivent donc se baser sur les prévisions d’analystes. Les données
les plus utilisées sont les prévisions de bénéfices sur un an, deux ans, ainsi que le taux de
croissance à long terme (sur les cinq dernières années).
De leur côté, Gode et Mohanram (2003) proposent d’inférer le coût du capital des entreprises en
utilisant un modèle D’Ohlson-Juettner. Ce modèle consiste à faire converger de manière
asymptotique le taux de croissance à court terme des bénéfices vers un taux de croissance
perpétuel équivalent au taux de croissance de l’économie. L’avantage d’une telle mesure est le
fait de ne pas avoir besoin des prévisions à long terme d’analystes en ce qui concerne la valeur
1 Citation tirée de l’article de Fama, French (1997)
20
aux livres ou alors le rendement des fonds propres. De plus, ce modèle permet avec une seule
variable de déterminer à la fois le taux de croissance perpétuel ainsi que le taux de convergence
vers cette valeur. Les auteurs utilisent le modèle Ohlson-Juettner afin d’inférer une prime de
risque implicite.
2.5 Contributions à la littérature Notre étude apportera plusieurs contributions à la littérature scientifique. Tout d’abord, nous
proposerons une généralisation quant à la mesure de l’incertitude économique. En effet, celle-ci
est seulement estimée à partir d’un sous-ensemble, que ce soit l’incertitude quant aux politiques
économiques (par exemple l’indice EPU de Baker, Bloom et Davis), ou alors le modèle
d’incertitude quant aux flux monétaires de Bhagat (2013) . Notre étude apportera un ajustement
à l’indice EPU de Baker, Bloom et Davis, qui permettra d’estimer une mesure d’incertitude
économique générale, et simplifie la collecte de données en retirant une contrainte de recherche.
Par la suite, notre étude se démarque de la littérature existante dans la mesure où nous ferons une
analyse de l’économie canadienne. À notre connaissance, il n’y a pas encore eu de recherches
académiques s’intéressant à l’incertitude économique spécifiquement au Canada. Finalement,
nous contribuerons à la littérature académique en faisant le lien direct entre l’incertitude
économique et le coût du capital, par le biais de la prime de risque. Nous étudierons également
l’impact de cette incertitude sur le niveau d’investissement des entreprises canadiennes à
l’échelle macroéconomique. Les modèles utilisés seront simplifiés, ce qui a comme effet de
rendre les conclusions de la littérature plus robustes.
Dans le prochain chapitre, nous détaillerons les étapes de la méthodologie utilisée dans notre
analyse.
21
Chapitre 3. Méthodologie Afin d’étudier l’impact de l’incertitude économique sur l’investissement corporatif et le coût du
capital au Canada, nous devons dans un premier temps quantifier cette incertitude. Étant donné
que la littérature s’intéresse surtout à quantifier l’incertitude politique, nous tenterons de choisir
la mesure la plus globale possible, pouvant regrouper toutes les sources d’incertitude qu’un
acteur du marché des capitaux puisse avoir. C’est pourquoi nous présenterons une nouvelle
mesure d’incertitude économique générale, nommée GEUI (General Economic Uncertainty
Index).
Dans ce chapitre, nous analyserons la composition de l’indice GEUI, largement inspiré de
l’indice EPU proposé par Baker, Bloom et Davis (2013). Nous étudierons premièrement la
structure de celui-ci, ainsi que les raisons nous menant à faire les ajustements qui permettent
d’aboutir à un indice général GEUI d’incertitude économique. Par la suite, nous présenterons
l’indice GEUI, sa composition, ainsi que sa sensibilité face à d’autres variables
macroéconomiques. Nous poserons finalement les hypothèses de notre analyse, en vue des
modèles de régression effectués dans le chapitre suivant. Nous conclurons par la mise en place
des modèles empiriques de régression utilisés.
3.1 Construction de l’indice général d’incertitude économique (GEUI) Afin de représenter l’incertitude économique, nous nous inspirerons des travaux de Baker,
Bloom et Davis (2013). Comme nous l’avons vu dans le chapitre précédent, ceux-ci ont présenté
un indice d’incertitude économique EPU (Economic Policy Uncertainty) pour le Canada. La
section suivante présentera en détail la composition de cet indice EPU. Par la suite, nous
justifierons les raisons qui nous poussent à utiliser cette méthodologie comme base de l’indice
GEUI (General Economic Uncertainty Index).
3.1.1 Les bases de l’indice GEUI : l’indice Economic Policy Uncertainty (EPU)2
Dans cette section, nous détaillons la composition de l’indice que nous appelons EPU, développé
par Baker, Bloom et Davis (2013). Ceux-ci ont conçu un indice propre aux États-Unis, puis un
indice canadien plus récemment. Les données obtenues par les auteurs sont disponibles sur leur
site internet.
2 Cette section résume les travaux de Baker, Bloom et Davis (2013)
22
L’indice EPU que les auteurs ont conçu afin de représenter l’incertitude économique du Canada
est construit de manière similaire à l’indice EPU des États-Unis, que nous avons étudié dans la
section précédente. Auparavant, il était composé de trois composantes majeures, soient la
couverture médiatique de l’incertitude économique au Canada et la dispersion dans les prévisions
d’analystes en ce qui concerne le niveau d’inflation, ainsi que de l’équilibre budgétaire. Plus
récemment, Baker, Bloom et Davis ont seulement conservé l’indice de couverture médiatique du
pays, qui a une très forte corrélation avec l’indice global. La présente section détaille les étapes
de construction de l’indice EPU global du Canada.
Couverture médiatique : L’indice de couverture médiatique pour l’indice EPU est mis en place
de manière similaire que l’indice de couverture des États-Unis. En effet, les auteurs recensent le
nombre d’articles de cinq journaux nationaux, qui sont The Gazette3, Vancouver Sun, Toronto
Star, Ottawa Citizen et le Globe and Mail, ainsi que des articles du groupe CNW (Canadian
Newswire), comportant au moins un mot-clé dans chacune des trois catégories suivantes, soient
l’incertitude (« uncertainty » ou « uncertain »), l’économie (« economic » ou « economy ») et
des termes reliées aux politiques économiques (« policy », « tax », « spending », « regulation »,
« central bank », « budget » et « deficit »).
Étant donné la différence entre le nombre d’articles diffusé par chacun de ces quotidiens, cet
indice se doit d’être normalisé. En premier lieu, la série temporelle mensuelle obtenue est
normalisée par le nombre d’articles du même quotidien dans le même mois comportant le mot-
clé « today » (aujourd’hui). Ensuite, la série de chaque quotidien national est normalisée afin
d’obtenir un écart-type unitaire sur les données d’avant août 2011. Les cinq séries normalisées
sont sommées, et normalisées de nouveau afin d’obtenir une moyenne de 100 pour la période
avant 2011. Les données disponibles sur le site Internet des auteurs montrent une série
temporelle mensuelle débutant en janvier 1990.
Cet indice de couverture médiatique était auparavant combiné à deux autres indices, soient un
indice de dispersion dans les prévisions d’analystes quant au niveau d’inflation et de l’équilibre
budgétaire. On observe toutefois que la corrélation entre un indice composé de ces trois séries
3 Ce quotidien couvre la province de Québec, et facilite la recherche étant donné qu’il est un des seuls quotidiens québécois anglophones.
23
mensuelles est très forte face à l’indice de couverture médiatique, ce qui simplifie la
représentation de l’incertitude sur le marché.
Dans la prochaine section, nous justifierons les ajustements que nous effectuerons à l’indice EPU
canadien que nous avons étudié afin d’obtenir un indice d’incertitude économique générale
(General Economic Uncertainty Index, ou GEUI). Nous constaterons que la modification
majeure apportée concerne la méthode de recensement des articles dans les quotidiens
nationaux.
3.1.2 Construction de l’indice General Economic Uncertainty Index (GEUI)
Dans cette section, nous proposerons une modification à l’indice EPU du Canada afin de mieux
représenter l’incertitude économique de manière générale, non seulement l’incertitude reliée aux
politiques économiques. Dans leur étude, Baker, Bloom et Davis (2013) suggèrent que cette
forme d’incertitude reflète environ le deux-tiers de l’ensemble de l’incertitude relevée. Cette
valeur est difficile à évaluer de manière exacte, et est calculée par les auteurs d’après une
recherche par mots-clés dans les médias nationaux. Cependant, dans le cadre de notre étude, il
n’est pas nécessaire de limiter notre recherche à l’incertitude face aux politiques économiques,
même si elle semble un bon estimateur de l’ensemble de l’incertitude présente sur le marché des
capitaux.
L’indice GEUI que nous proposons sera donc largement inspiré des travaux de Baker, Bloom et
Davis (2013), qui eux-mêmes s’inspirent de plusieurs études récentes sur l’incertitude
économique, abordées dans le chapitre précédent. Cette méthodologie offre plusieurs avantages.
En effet, elle s’inspire de plusieurs manières de mesurer l’incertitude économique, soient la
couverture médiatique proposée par Alexopoulos (2011) et Dzielinski (2010), ainsi que les
mesures de dispersion dans les prévisions d’analystes suggérées par les articles de Sill (2013) et
Bachmann (2010) . Cependant, dans le cadre de notre étude, nous aurons uniquement besoin de
l’indice de couverture médiatique EPU à des fins de comparaison.
Finalement, nous utiliserons les données de Baker, Bloom et Davis car celles-ci sont disponibles
sur leur site Internet, ce qui facilite la compilation et la comparaison des données. De plus, ces
données sont reconnues et utilisées dans la littérature actuelle, notamment dans les travaux de
Pastor et Veronesi (2011) .
24
Afin de construire notre indice GEUI, nous allons apporter une modification à l’indice EPU en
ce qui concerne la couverture médiatique de l’incertitude économique. Dans l’indice développé
par les auteurs, ceux-ci recensent le nombre d’articles comportant des mots-clés appartenant à
trois thèmes distincts, soient l’incertitude, l’économie et la politique économique. Étant donné le
fait que nous travaillerons sur l’incertitude économique générale, nous allons uniquement
conserver les deux premières catégories de mots-clés dans notre analyse. Nous proposerons donc
de comptabiliser le nombre d’articles de quotidiens nationaux comportant un des mots-clés
suivants : « economic » ou « economy » en tant que termes reliés à l’économie, ainsi que
« uncertainty » ou « uncertain » en tant que termes reliés à l’incertitude. Les quotidiens
nationaux retenus seront les mêmes que ceux de l’indice EPU canadien, soient The Gazette4,
Vancouver Sun, Toronto Star, Ottawa Citizen et le Globe and Mail. Nous nous limiterons à ces
cinq journaux car ils couvrent la majorité des grands centres économiques canadiens.
Après avoir comptabilisé le nombre d’articles contenant au moins un mot-clé de chaque
catégorie (incertitude et économie), nous procèderons aux mêmes étapes de normalisation que
pour l’indice EPU détaillé dans la section précédente. En effet, dans notre indice GEUI, la série
temporelle mensuelle obtenue est normalisée par le nombre d’articles du même quotidien dans le
même mois comportant le mot-clé « today » (aujourd’hui). Ensuite, la série de chaque quotidien
national est normalisée afin d’obtenir un écart-type unitaire sur les données d’avant août 2011
pour l’indice canadien, et d’avant 2010 pour l’indice des États-Unis.
Par la suite, les séries normalisées de chaque quotidien sont sommées, à raison des cinq
quotidiens canadiens et des dix quotidiens des États-Unis. Les données sont normalisées de
nouveau afin d’obtenir une moyenne de 100 pour la période avant 2013 pour les deux indices.
Nous obtenons donc un indice canadien avec des données datant de 1990 à décembre 2014.
Afin de faire la collecte de données, nous utilisons les bases de données Factiva ainsi que
LexisNexis Academic, qui permettent de recenser le nombre d’articles de journaux spécifiques,
comportant un ou plusieurs mots-clés, sur une période donnée. Nous pouvons ainsi obtenir une
série mensuelle pour l’indice GEUI.
4 Ce quotidien couvre la province de Québec, et facilite la recherche étant donné qu’il est un des seuls quotidiens québécois anglophones.
25
Dans la prochaine section, nous analyserons les modèles de régression étudiés afin d’évaluer
l’impact de l’incertitude économique sur le coût du capital, par le biais de la prime de risque,
ainsi que l’investissement corporatif. Par la suite, nous présenterons les données utilisées afin de
mener notre étude empirique.
3.2 Modèles empiriques étudiés Dans cette section, nous présentons les modèles empirique utilisés afin d’étudier l’impact de
l’incertitude économique sur l’investissement et le coût du capital. Nous débuterons par l’étude
de la prime de risque, servant à évaluer la relation entre l’incertitude et le coût du capital, avant
d’étendre l’analyse à l’investissement. L’ensemble des régressions linéaires se fera par la
méthode des moindres carrés ordinaires (MCO).
3.2.1 Étude de l’impact de l’incertitude économique sur le coût du capital
Nous allons étudier de deux manières l’impact de l’incertitude économique sur le coût du capital.
Celui-ci étant plus facile à évaluer pour une entreprise que pour une économie entière, nous nous
tournerons vers la prime de risque afin d’avoir une analyse du comportement des investisseurs.
La prime de risque se définit comme étant la différence entre le rendement de l’indice boursier
S&P/TSX Total Return et un rendement sans risque, que nous définirons par le rendement des
Bons du Trésor 1 mois du gouvernement canadien.
On peut s’attendre à ce qu’une diminution du niveau de la prime de risque, que ce soit par une
hausse du rendement du marché boursier ou par une baisse du taux sans risque, soit synonyme
d’une hausse du coût du capital, ce qui nuirait ultimement à l’investissement. À l’inverse, une
diminution de la prime de risque inciterait les entreprises à investir, le coût du capital étant moins
élevé.
Nous étudierons donc dans un premier modèle de régression l’impact de notre indice
d’incertitude économique générale GEUICAN sur la prime de risque historique. L’équation
principale de ce modèle est la suivante5 :
où :
5 Une liste des variables utilisées et leur définition est disponible en Annexe
26
DIFFCPICAN est la première différence de la série mensuelle de l’Indice des Prix à la
Consommation (IPC)
DIFFUNEMPCAN est la première différence de la série mensuelle du taux de chômage
canadien
DIFFVIXCAN est la première différence de la série mensuelle de l’indice VIX canadien
DIFFGEUICAN est la première différence de l’indice mensuel GEUI canadien (General
Economic Uncertainty Index)
RPREMCAN est le niveau de la prime de risque canadienne, en considérant soit le
rendement excédentaire de l’indice S&P/TSX Total Return (RPREMCANTOT) ou la
première différence du rendement du dividende canadien (DIFFDYCAN)
et représentent respectivement la constante et le terme d’erreur du modèle de
régression
Nous étudierons ce modèle de régression sous quatre formes différentes. Dans les deux premiers
modèles étudiés, nous prendrons comme variable dépendante la première différence du
rendement excédentaire canadien (DIFFRPREMCANTOT), les variables indépendantes étant
contemporaines en premier lieu (Modèle 1) ou ayant une période de retard (Modèle 2). Les deux
modèles suivants utilisent le rendement du dividende canadien (DIFFDYCAN) comme variable
dépendante, les variables indépendantes étant contemporaines (Modèle 3) ou ayant une période
(un mois) de retard (Modèle 4). Les résultats de ces régressions sont dans le Tableau 1 du
chapitre suivant. Tous les modèles présentés ont des termes d’erreur robustes, en appliquant la
correction de Newey-West.
Nous ferons également des tests de robustesse de ce modèle en utilisant à la fois des variables
d’incertitude canadienne et américaine, soient les variables GEUICAN et GEUIUSA. Les
modèles et leurs résultats seront présentés au chapitre 6.
Tous les modèles de régression seront constitués des quatre mêmes variables indépendantes,
soient les séries différenciées de l’IPC canadien, du taux de chômage, l’indice VIX du Canada,
ainsi que l’indice GEUI canadien, qui est l’objet de notre étude. Les deux premières variables
sont des variables servant à contrôler les effets macroéconomiques sur le marché. L’indice VIX
est utilisé afin de différencier l’effet de la volatilité de celui de l’incertitude économique.
27
Par la suite. Nous étudierons l’impact de l’incertitude économique canadienne sur
l’investissement.
3.2.2 Régressions étudiant l’impact de l’incertitude économique canadienne sur
l’investissement
Dans cette section, nous présentons les deux modèles étudiant l’impact de l’incertitude
canadienne sur l’investissement. Ces modèles sont similaires à ceux de la section précédente, et
se veulent la suite du raisonnement commencé précédemment. En effet, si l’on observe une
hausse de la prime de risque, on peut en déduire une hausse du coût du capital, ce qui devrait
avoir comme effet de diminuer l’investissement. Par conséquent, si dans les modèles précédents
nous parvenons à la conclusion que l’incertitude économique a un effet positif et significatif sur
le coût du capital, l’effet de l’incertitude économique devrait être négatif sur l’investissement. À
l’inverse, si le coût du capital est affecté négativement par l’incertitude économique, nous
pouvons nous attendre à une augmentation des investissements en situation d’incertitude.
Cependant, il est possible que l’incertitude économique ait un effet positif sur l’épargne de
précaution, ce qui ferait en sorte de diminuer la prime de risque du fait de la hausse du
rendement sans risque, ainsi que de produire une pression à la baisse sur les investissements, en
raison de l’attente des investisseurs de meilleures conditions économiques pour procéder à des
investissements, surtout s’ils ont un degré élevé d’irréversibilité.
Nous allons donc étudier un modèle similaire à celui de la section précédente. En effet, la seule
modification sera au niveau de la variable dépendante, qui mesurera le niveau d’investissement à
l’échelle macroéconomique. Celui-ci sera calculé par le taux d’investissement de l’économie
canadienne, variable détaillée dans la section suivante. Nous obtenons donc le modèle de
régression suivant :
où :
DIFFCPICAN est la première différence de la série trimestrielle de l’Indice des Prix à la
Consommation (IPC)
DIFFUNEMPCAN est la première différence de la série trimestrielle du taux de chômage
canadien
28
DIFFVIXCAN est la première différence de la série trimestrielle de l’indice VIX
canadien
DIFFGEUICAN est la première différence de l’indice trimestriel GEUI canadien
(General Economic Uncertainty Index)
INVCAN est la série trimestrielle de l’investissement dans l’économie canadienne,
utilisant soit la première différence du taux d’investissement (DIFFIRCAN), soit la
première différence du taux d’investissement des entreprises dans l’économie canadienne
(DIFFIRECAN).
et représentent respectivement la constante et le terme d’erreur du modèle de
régression6
Nous étudierons ce modèle sous quatre formes différentes. Dans les deux premiers modèles
étudiés, nous prendrons comme variable dépendante la première différence du taux
d’investissement dans l’économie canadienne (DIFFIRCAN), les variables indépendantes étant
contemporaines en premier lieu (Modèle 1) ou ayant une période de retard (Modèle 2). Les deux
modèles suivants utilisent le taux d’investissement des entreprises dans l’économie canadienne
(DIFFIRECAN) comme variable dépendante, les variables indépendantes étant contemporaines
(Modèle 3) ou ayant une période (un trimestre) de retard (Modèle 4). Les résultats de ces
régressions sont présentés dans le tableau 2 du chapitre suivant. Tous les modèles mentionnés
ont des termes d’erreur robustes, en appliquant la correction de Newey-West.
Nous ferons également des tests de robustesse de ce modèle en utilisant à la fois des variables
d’incertitude canadienne et américaine, soient les variables GEUICAN et GEUIUSA. Les
modèles et leurs résultats seront présentés au chapitre 6.
La section suivante fournit davantage de détails sur l’ensemble des variables utilisées dans les
modèles de régression, notamment en ce qui a trait à la mesure de l’investissement dans
l’économie canadienne.
3.3 Données utilisées Les régressions sont effectuées en utilisant des données sur 10 ans, de janvier 2004 à décembre
2014. Dans le cas des modèles visant à étudier l’impact de l’incertitude économique générale sur 6 Une liste des variables utilisées et leur définition est disponible en Annexe
29
le rendement excédentaire, nous utiliserons des séries mensuelles. Cependant, dans le cas de
l’étude de l’investissement des entreprises au niveau macroéconomique, les données nous
permettent seulement d’obtenir des séries temporelles sur une base trimestrielle sur la même
période. Dans un premier temps, nous présenterons les données utilisées pour les modèles visant
à étudier le rendement excédentaire, pour ensuite analyser les données des modèles portant sur
l’investissement corporatif.
3.3.1 Modèles de régression portant sur l’étude du rendement excédentaire canadien
Nous utiliserons quatre variables indépendantes pour l’ensemble des modèles étudiant le
rendement excédentaire canadien, soient l’indice des prix à la consommation (IPC) canadien, le
taux de chômage, l’indice VIX canadien ainsi que l’indice d’incertitude économique générale
GEUI. Les deux premières variables sont extraites de la base de données CANSIM(Statistiques
Canada - CANSIM)(Statistiques Canada - CANSIM)(Statistiques Canada - CANSIM) de
Statistiques Canada, et sont incluses dans les modèles afin de contrôler les effets de la
conjoncture économique sur le rendement excédentaire. En effet, l’inflation permet de mesurer
les anticipations des investisseurs, notamment au niveau des taux d’intérêts futurs, et le taux de
chômage est une mesure qui a un impact direct sur la politique monétaire, budgétaire et fiscale
d’un pays comme le Canada. Nous utilisons également la variable de volatilité VIX afin de
démontrer la distinction entre l’incertitude économique et la volatilité des rendements boursiers,
tel qu’expliqué au premier chapitre.
Cet indice VIX canadien est la combinaison de deux sous-indices, la méthodologie ayant changé
en 2009. La période d’octobre 2009 à octobre 2010 contenait deux valeurs possibles pour
l’indice VIX, dépendamment de la méthodologie utilisée, et nous avons choisi les données de la
méthodologie la plus récente. Les deux séries temporelles sont disponibles sur le site de la
Bourse TMX.
Dans le cas de l’indice d’incertitude économique générale, nous utiliserons l’indice GEUI tel que
décrit dans la première section. Le recensement des articles de journaux a été effectué avec les
bases de données LexisNexis Academic et Factiva. Le traitement de ces données afin d’obtenir
un indice mensuel a été réalisé par les logiciels Microsoft Excel et Matlab.
30
Nous utiliserons plusieurs variables dépendantes visant à évaluer la prime de risque et ses
caractéristiques, qui par extension reflètent l’évolution du coût du capital au Canada. Dans un
premier temps, nous utiliserons le rendement excédentaire historique observé sur le marché
canadien durant les dix dernières années. Nous définirons ce rendement excédentaire comme
étant la différence entre le rendement mensuel de l’indice S&P/TSX Total Return et un
rendement sans risque, soit celui des Bons du Trésor d’une échéance d’un mois, émis par la
Banque du Canada. Cette première série est obtenue par la base de données Bloomberg, et le
rendement sans risque est disponible sur CANSIM.
Nous allons également étudier l’impact de l’incertitude sur la volatilité du rendement
excédentaire canadien. Afin de quantifier cette volatilité, nous calculons l’écart-type des
rendements quotidiens de l’indice S&P/TSX Total Return sur une base mensuelle. De plus, nous
mettrons le niveau du rendement excédentaire en proportion de sa volatilité mensuelle, pour
créer l’équivalent d’un ratio de Sharpe.
Finalement, nous inclurons dans notre analyse des substituts du rendement excédentaire utilisés
dans la littérature. Nous prendrons le rendement du dividende de l’indice S&P/TSX, extrait de la
base de données WRDS, ainsi que le ratio cours-bénéfice de l’indice S&P/TSX ajusté pour le
cycle économique (Cycle-Adjusted Price-Earnings Ratio). Afin d’obtenir cette dernière série
temporelle, nous utilisons la méthodologie utilisée par Robert Shiller sur son site Internet. En
effet, nous calculons, à partir du ratio cours-bénéfice de l’indice S&P/TSX, la valeur implicite
des bénéfices en divisant la valeur de l’indice boursier à son ratio cours-bénéfice. Par la suite, à
l’aide de l’indice des prix à la consommation, nous obtenons un indice S&P/TSX ajusté pour
l’inflation, ainsi qu’une valeur des bénéfices également ajustée pour l’inflation. Le ratio cours-
bénéfice de l’indice S&P/TSX ajusté pour le cycle économique est le quotient de l’indice
boursier par la moyenne des bénéfices sur les dix années précédentes (120 mois). Il est à noter
qu’en raison de la disponibilité des données, les six premières valeurs de cette série, soit de
janvier à juin 2004, la moyenne des bénéfices est calculée sur un peu moins de 120 mois, plus
précisément de 114 à 119 progressivement.
3.3.2 Modèles de régression portant sur l’étude de l’investissement corporatif
Les modèles portant sur l’investissement des entreprises canadiennes à l’échelle
macroéconomique incluront les mêmes variables indépendantes que les modèles précédents,
31
soient l’indice des prix à la consommation, le taux de chômage, l’indice de volatilité VIX ainsi
que l’indice d’incertitude économique GEUI. La seule différence est que nous devons convertir
ces séries mensuelles en séries trimestrielles. Nous procéderons donc en prenant la dernière
valeur observée pour chaque trimestre, au lieu de faire la moyenne des trois mois du trimestre.
Nous constatons que ces deux séries sont très fortement corrélées, et il n’y a pas d’impact
significatif sur les résultats obtenus.
Nous utiliserons deux variables dépendantes afin d’évaluer l’impact de l’incertitude économique.
Nous utiliserons le taux d’investissement dans l’économie canadienne, calculé comme étant le
niveau d’investissement durant un mois donné divisé par le niveau du PIB réel du mois
précédent. Les variables servant à mesurer le niveau d’investissement sont la Formation Brute de
Capital Fixe (FBCF) ainsi que la Formation Brute de Capital Fixe des Entreprises (FBCFE). Ces
données macroéconomiques sont obtenues à partir de Statistiques Canada, sur la base de données
CANSIM.
Afin d’obtenir des résultats qui peuvent être interprétés, nous avons vérifié la stationnarité de
l’ensemble des variables. Nous avons d’abord analysé la fonction d’autocorrélation de celles-ci,
puis nous avons effectué des tests statistiques de stationnarité. Plus précisément, nous avons
réalisé un test de Dickey-Fuller à l’aide du logiciel RATS. Nous constatons que pour l’ensemble
des variables indépendantes de nos modèles, nous devons procéder à une première
différenciation. En effectuant cette opération, nous obtenons des résultats significatifs à 1% pour
l’ensemble des variables. Dans le cas des variables dépendantes des modèles portant sur
l’investissement, nous devons également effectuer une première différence afin d’obtenir un
processus stationnaire. Les variables dépendantes des modèles portant sur le rendement
excédentaire, quant à eux, sont généralement stationnaires sans avoir besoin de différenciation, à
l’exception du rendement du dividende et du ratio cours-bénéfice ajusté pour le cycle
économique, qui ont besoin d’être différenciés une fois afin de rejeter l’hypothèse d’une racine
unitaire. Nous ferons tout de même une première différenciation de toutes les variables utilisées
dans cette étude.
Le prochain chapitre présentera l’évolution des indices d’incertitude économique canadienne et
américaine, avant d’analyser les résultats des modèles de régression présentés.
32
Chapitre 4. Résultats Dans cette section, nous présentons une analyse des indices d’incertitude économique que nous
avons proposés dans le chapitre précédent, ainsi que des résultats des modèles de régressions
spécifiés. Nous ferons l’analyse des modèles portant sur les effets de l’incertitude économique
sur le rendement excédentaire canadien en premier lieu, pour ensuite étudier l’impact de
l’incertitude sur l’investissement corporatif.
Tel que mentionné dans le chapitre précédent, nous utiliserons les quatre mêmes variables
indépendantes, soient les séries mensuelles différenciées de l’IPC canadien, de l’indice VIX
canadien, du taux de chômage et de l’indice GEUI canadien. Nous utilisons des séries
différenciées d’une période afin d’obtenir de respecter la stationnarité des variables utilisées dans
les modèles de régression.
4.1 Évolution des indices GEUI canadien et américain durant la période
2001-2014 Nous étudierons dans un premier temps l’évolution de l’indice GEUI canadien durant la période
de 2000 à 2014. Celle-ci est intéressante du fait qu’elle contient une crise économique majeure,
soit la crise financière de 2008. Cela met en valeur la capacité de l’indice GEUI à refléter le
climat d’incertitude sur le marché selon le contexte économique.
À titre de comparaison, nous constituerons un indice d’incertitude économique générale pour les
États-Unis, que nous appellerons l’indice GEUI américain. Celui-ci est conçu de manière
identique à l’indice GEUI canadien (tel qu’exposé au chapitre précédent), en utilisant cinq
quotidiens américains d’envergure, soient le Boston Globe, le USA Today, le New York Times,
le Wall Street Journal et le Washington Post. Nous obtenons donc le graphique 1 ci-dessous:
33
Graphique 1 : Évolution des indices d’incertitude économique générale au Canada et aux
États-Unis au cours de la période 2001-2014
Le graphique 1 nous permet de constater que les deux séries sont fortement corrélées. En effet,
le coefficient de corrélation entre les deux séries est de 0.87572878. Nous pouvons donc
observer des hausses du niveau d’incertitude économique lors de l’éclatement de la bulle
technologique en 2001, lors de la crise de 2008, ainsi que des périodes d’incertitude plus élevées
durant les quatre dernières années de l’échantillon étudié, notamment en raison de la crise
budgétaire européenne et une certaine faiblesse de l’économie américaine. On constate par
ailleurs que d’après les indices GEUI ci-dessus, l’année 2014 aura été plus incertaine du côté
canadien, notamment en raison de la pression à la baisse du cours du pétrole, et des premiers
signes de faiblesse de l’économie canadienne.
Les sections suivantes montrent les statistiques descriptives des variables utilisées dans les
modèles de régression, suivies des résultats de ceux-ci.
4.2 Statistiques descriptives Le Tableau 1 ci-dessous présente les statistiques descriptives des variables dépendantes et
indépendantes utilisées dans les modèles de régression.
0
50
100
150
200
250
300
35001
/01/
2001
01/0
6/20
0101
/11/
2001
01/0
4/20
0201
/09/
2002
01/0
2/20
0301
/07/
2003
01/1
2/20
0301
/05/
2004
01/1
0/20
0401
/03/
2005
01/0
8/20
0501
/01/
2006
01/0
6/20
0601
/11/
2006
01/0
4/20
0701
/09/
2007
01/0
2/20
0801
/07/
2008
01/1
2/20
0801
/05/
2009
01/1
0/20
0901
/03/
2010
01/0
8/20
1001
/01/
2011
01/0
6/20
1101
/11/
2011
01/0
4/20
1201
/09/
2012
01/0
2/20
1301
/07/
2013
01/1
2/20
1301
/05/
2014
01/1
0/20
14
Val
eur d
e l'i
ndic
e G
EUI
Date
Évolution des indices d'incertitude économique générale au niveau du Canada (GEUICAN) et des États-Unis (GEUIUSA)
GEUIUSA GEUICAN
34
Tableau 1 Statistiques descriptives des variables étudiées
Section A : Variables indépendantes des modèles portant sur le coût du capital
N Moyenne Écart-
type Médiane Min Max
Inflation 144 114.19 7.11 115.50 101.80 125.50
Chômage 144 7.08% 0.70% 7.1% 5.9% 8.7%
Indice de volatilité VIX canadien 144 18.23 8.58 16.01 9.62 60.95
Incertitude économique générale
canadienne 144 112.42 69.75 105.65 24.32 318.11
Incertitude économique générale
américaine 144 101.57 46.37 96.28 34.38 239.46
Section B : Variables dépendantes utilisées dans les modèles portant sur le coût du capital
Rendement excédentaire canadien 144 0.70% 3.81% 1.26% -16.42% 11.45%
Rendement du dividende canadien 144 2.55% 0.58% 2.61% 1.57% 4.17%
Ratio de Sharpe canadien ajusté 144 1.80 4.09 2.10 -7.37 12.34
Ratio cours-bénéfice canadien ajusté 132 26.54 5.25 25.00 18.04 36.84
Section C : Variables indépendantes utilisées dans les modèles portant sur l’investissement
Inflation 48 114.34 7.09 115.65 102.30 125.50
Chômage 48 7.08% 0.70% 7.1% 5.9% 8.6%
Indice de volatilité VIX canadien 48 17.35 7.54 15.09 9.84 43.14
Incertitude économique générale
canadienne 48 113.89 71.34 99.85 24.32 318.11
Incertitude économique générale
américaine 48 100.07 44.77 100.58 34.40 211.72
Section D : Variables dépendantes utilisées dans les modèles portant sur l’investissement
Taux d’investissement dans l’économie canadienne 48 24.35% 1.31% 24.89% 21.14% 25.90%
Taux d’investissement des entreprises dans l’économie canadienne 48 20.15% 1.19% 20.74% 17.64% 21.58%
35
Les sections A et B correspondent respectivement aux statistiques descriptives des variables
indépendantes et dépendantes utilisées dans les modèles portant sur le coût du capital. Les séries
sont mensuelles. Les sections C et D correspondent respectivement aux statistiques descriptives
des variables indépendantes et dépendantes utilisées dans les modèles portant sur
l’investissement. Les séries sont trimestrielles.
La définition et les sources des variables sont présentées au troisième chapitre. Une liste des
variables utilisées est également présentée à l’Annexe. Les quatre sections de ce tableau
présentent les statistiques descriptives des séries avant d’être différenciées. « N » représente le
nombre d’observations de la série.
Nous constatons premièrement que, comme sur le Graphique 1 de la section précédente,
l’incertitude économique générale canadienne est plus volatile que son équivalent américain si
l’on regarde son écart-type (69.75 pour l’indice du Canada comparé à 46.37 aux États-Unis).
Cela est notamment dû au nombre plus petit d’articles de journaux compilés dans les quotidiens
canadiens. D’autre part, les variables dépendantes des modèles de régression portant sur le coût
du capital permettent de vérifier l’impact de l’incertitude économique sur des séries de
différentes volatilités. En effet, nous pouvons remarquer que l’écart-type du rendement
excédentaire canadien est très élevé (3.81%), ainsi que son étendue, comparativement à une série
comme le rendement du dividende canadien, qui a une faible mesure de dispersion.
Du côté de la section C et D du tableau, notons que par construction, le taux d’investissement des
entreprises dans l’économie canadienne est plus faible que le taux d’investissement général. Les
deux séries ont un comportement similaire, ayant une faible dispersion. Nous remarquons par
ailleurs que dans l’indice de volatilité VIX trimestriel a une étendue et un écart-type plus faible
que l’indice mensuel.
Les sections suivantes présentent les résultats des modèles de régression présentés au chapitre
précédent.
36
4.3 Résultats des modèles de régression portant sur l’impact de l’incertitude
économique générale sur la prime de risque canadienne Nous analyserons en premier lieu les résultats des modèles ayant comme variable dépendante la
prime de risque canadienne. Celle-ci est estimée à l’aide de deux variables dépendantes, soient le
rendement excédentaire canadien et la première différence du rendement du dividende canadien,
tel que mentionné au chapitre précédent. Les résultats de ces régressions sont présentés dans le
Tableau 2 ci-dessous.
Nous constatons tout d’abord que les indices de volatilité VIX et d’incertitude économique
générale GEUI ont un impact négatif et significatif sur le niveau du rendement excédentaire
canadien (Modèles 1 et 2). En effet, dans le modèle où les variables indépendantes sont
contemporaines à la variable dépendante (Modèle 1), une augmentation d’une unité de l’indice
VIX fait diminuer le rendement excédentaire canadien de 45.33 points de base, et une hausse
d’une unité de l’indice d’incertitude économique générale GEUI entraine une diminution du
rendement excédentaire de 2.22 points de base. Une augmentation d’une unité de chacun de ces
indices fait diminuer le rendement excédentaire canadien de 20.44 et 3.72 points de base
respectivement lorsque ces variables sont analysées avec un mois de retard. Notons également
que l’effet de l’inflation est positif et statistiquement significatif dans le Modèle 1, où elle est
analysée de manière contemporaine. Par ailleurs, les régressions analysant l’impact de
l’incertitude économique sur la première différence du rendement excédentaire n’ont pas généré
de résultats significatifs.
Ces résultats permettent de supporter l’hypothèse comme quoi l’incertitude économique
générale, ainsi que la volatilité des rendements boursiers, a un effet sur l’épargne de précaution
des investisseurs, ce qui augmente le rendement sans risque. L’effet de l’incertitude peut
également être dû à une diminution des rendements du marché boursier en période d’incertitude
et de volatilité. Ces deux effets peuvent être simultanés.
Nous pouvons observer que la volatilité des rendements boursiers, captée par l’indice VIX,
apporte un effet plus important sur le niveau du rendement excédentaire canadien, mais cet effet
diminue de plus de moitié en l’espace d’un mois, alors que les effets de l’incertitude économique
générale sont plus faibles, mais constants sur les deux périodes étudiées. Nous constatons même
37
que l’effet de l’incertitude économique est plus fort lorsqu’étudié avec un mois de retard. De
plus, tel que présenté dans les statistiques descriptives (Tableau 1), l’écart-type de l’indice GEUI
est beaucoup plus élevé que celui de l’indice VIX. En effet, une augmentation d’un écart-type de
l’indice VIX entraine une diminution du rendement excédentaire canadien de 389 points de base
de manière contemporaine, comparativement à 175 points de base avec une période de retard. De
l’autre côté, ces valeurs sont respectivement de 155 points de base et de 259 points de base pour
l’indice GEUI canadien. Nous constatons donc que l’effet de l’incertitude est presque équivalent
à celui de la volatilité de manière contemporaine, alors que l’effet de l’incertitude économique
est plus fort de manière relative lorsque les variables indépendantes sont étudiées avec une
période de retard.
En ce qui concerne la première différence du rendement du dividende canadien, nous constatons
qu’elle est influencée de manière positive et significative par l’indice de volatilité VIX et l’indice
d’incertitude économique générale GEUI. En effet, une hausse d’un écart-type de l’indice VIX
augmente de 1.36 points de base le rendement du dividende canadien, alors que pour l’indice
GEUI canadien, cette augmentation est de 0.06 points de base, si l’on étudie les variables
indépendantes de manière contemporaine (Modèle 3). Dans le cas où ces variables sont étudiées
avec un mois de retard (Modèle 4), ces augmentations sont de 0.74 et 0.08 points de base
respectivement.
Nous supposons que ces résultats sont principalement causés par la baisse du niveau des prix des
actions en période d’incertitude et de volatilité, ce qui expliquerait également la diminution du
rendement excédentaire canadien. Nous remarquons également les mêmes effets observés dans
les Modèles 1 et 2, soient une certaine constance de l’impact de l’incertitude économique
générale à travers les périodes étudiées, et une diminution rapide de l’effet de la volatilité sur le
rendement du dividende canadien. De manière relative, l’effet de la volatilité est plus fort que
l’effet de l’incertitude économique de manière contemporaine, avec une augmentation de 11.67
points de base du rendement du dividende suite à une hausse d’un écart-type de l’indice VIX,
comparativement à 4.19 points de base pour l’indice GEUI. Lorsque les variables indépendantes
sont étudiées selon le Modèle 4, ces valeurs passent à 6.34 points de base, comparé à 5.58 points
de base. Nous pouvons donc constater qu’avec une période de retard, l’effet de l’incertitude
économique est presque équivalent à celui de la volatilité.
38
Tableau 2 Impact de l’incertitude économique générale sur la prime de risque canadienne
Le tableau présente les résultats de la régression définie selon l’équation suivante :
Les variables dépendantes sont indiquées sur la troisième ligne du tableau, et les variables
indépendantes sont indiquées dans la première colonne. Celles-ci sont contemporaines pour les
Modèles 1 et 3, et ont une période de retard pour les Modèles 2 et 4. Toutes les variables sont
différenciées d’une période (un mois), à l’exception du rendement excédentaire canadien. Celles-
ci sont définies au chapitre 3, ainsi qu’en Annexe. Les erreurs-type sont indiquées entre crochets
sous les valeurs des coefficients, *, ** et *** représentant des significativités statistiques
respectives de 10%, 5% et 1%. Les résidus sont corrigés par la méthode de Newey-West. L’unité
de la variable dépendante est le pourcentage (1%).
Mesure de la prime de risque
Modèle 1 Modèle 2 Modèle 3 Modèle 4
Rendement excédentaire
canadien
Rendement du dividende
canadien
Inflation 1.8884
[0.6779]***
-0.5313
[0.6995]
-0.0262
[0.0215]
0.0041
[0.0222]
Taux de chômage -0.1328
[2.0401]
-1.4360
[2.4513]
-0.0108
[0.0765]
-0.1028
[0.0977]
Volatilité -0.4533
[0.1154] ***
-0.2044
[0.1074] *
0.0136
[0.0035] ***
0.0074
[0.0031] **
Incertitude économique générale
canadienne (GEUI)
-0.0222
[0.0095] **
-0.0372
[0.0112] ***
0.0006
[0.0003] **
0.0008
[0.0003] **
Constante 0.3833
[0.2844]
0.7787
[0.3288] **
0.0121
[0.0092]
0.0062
[0.0105]
Nombre d’observations 143 142 143 142
R2 0.40 0.19 0.30 0.16
39
La prochaine section présentera les résultats des régressions étudiant l’impact de l’incertitude
économique sur l’investissement. Nous vérifierons également si les résultats obtenus dans cette
section corroborent les conclusions que nous venons d’obtenir.
4.4 Modèles de régression portant sur l’impact de l’incertitude économique
sur l’investissement des entreprises
Les résultats de la section précédente suggèrent que l’incertitude économique générale a un effet
négatif sur le niveau du rendement excédentaire canadien. Dépendamment du niveau du taux
sans risque, ainsi que du rendement espéré du marché boursier, les investisseurs prennent la
décision d’investir, ou d’attendre la résolution de l’incertitude avant de lancer un projet
d’investissement, surtout si celui-ci a un degré élevé d’irréversibilité.
Le Tableau 3 ci-dessous présente les résultats de modèles de régression mesurant l’impact de
l’incertitude économique générale sur l’investissement, tel que défini au chapitre précédent.
Nous constatons que l’incertitude économique générale a un effet négatif et significatif sur le
taux d’investissement, uniquement lorsque les variables indépendantes sont étudiées avec une
période de retard (Modèles 2 et 4). Une augmentation d’un écart-type de l’indice GEUI canadien
entraine une diminution du taux d’investissement et du taux d’investissement des entreprises de
22.05 et 20.04 points de base respectivement. Cependant, l’impact de l’incertitude économique
sur l’investissement n’est pas statistiquement significatif si les variables indépendantes sont
analysées de manière contemporaine (Modèles 1 et 3). Cela peut être dû à l’effet « wait and see »
proposé par Bernanke (1983), qui consiste au fait que les entreprises retiennent leurs projets
d’investissement, surtout les projets irréversibles, jusqu’au moment où l’incertitude se résorbe.
D’autre part, nous pouvons observer que l’indice de volatilité VIX a un impact négatif et
significatif sur le taux d’investissement dans l’économie canadienne, à l’exception du Modèle 4
où les résultats ne sont pas significatifs. En effet, l’augmentation d’un écart-type de l’indice VIX
entraine une diminution du taux d’investissement général de 17.14 points de base de manière
contemporaine, et 14.75 points de base avec un trimestre de retard. L’effet de l’indice VIX est
40
similaire pour le taux d’investissement des entreprises, avec une diminution de 15.21 points de
base par unité si les variables indépendantes sont analysées de manière contemporaine (Modèle
3). Nous constatons que lorsque les variables indépendantes sont analysées avec un trimestre de
retard (Modèles 2 et 4), l’impact de l’incertitude économique générale est plus fort que celui de
la volatilité.
Notons également qu’un des déterminants de l’investissement est le taux de chômage. Celui-ci,
d’après les résultats obtenus, a un effet contemporain négatif et significatif sur le taux
d’investissement dans l’économie canadienne. Une augmentation de 100 points de base du taux
de chômage entraine une diminution du taux d’investissement de 89.40 points de base, et une
diminution du taux d’investissement des entreprises de 92.71 points de base.
Notre étude permet de conclure que l’incertitude économique générale a un effet négatif et
significatif sur le coût du capital canadien, par le biais du rendement excédentaire canadien. Cet
impact, causé par l’épargne de précaution et la diminution des rendements boursiers, est plus
soutenu dans le temps que celui de la volatilité des rendements du marché boursier, capté par
l’indice VIX. L’incertitude permet également d’observer un impact négatif et significatif sur le
taux d’investissement dans l’économie canadienne, plus fort que celui de l’indice VIX lorsque
les variables indépendantes sont étudiées avec un trimestre de retard.
Les résultats obtenus corroborent ceux des études de Bloom (2009), Baker, Bloom et Davis
(2013) en ce qui a trait à l’effet de l’incertitude sur la croissance économique et l’investissement.
De plus, l’effet « Wait and see » proposé par Bernanke (1983), qui consiste à attendre la
résolution de l’incertitude afin de démarrer un projet d’investissement, et qui est appuyé par
Bhagat et Obreja (2013), ainsi que Dixit et Pindyck (1994), semble confirmé par les résultats
observés dans les régressions portant sur l’investissement.
L’étude de Caballero (1991) suggère qu’il est nécessaire, en plus de l’incertitude économique,
d’avoir un contexte de concurrence imparfaite pour observer une relation négative avec
l’investissement. À la lumière des résultats obtenus, on peut soumettre l’idée que le marché des
capitaux canadiens est en situation de concurrence imparfaite.
Le chapitre suivant présentera une discussion des résultats obtenus, ainsi que les limites de notre
méthodologie. Nous conclurons par d’autres tests de régression afin de vérifier la robustesse des
résultats obtenus.
41
Tableau 3 Impact de l’incertitude économique générale sur l’investissement
Le tableau présente les résultats de la régression définie selon l’équation suivante :
Les variables dépendantes sont indiquées sur la troisième ligne du tableau, et les variables
indépendantes sont indiquées dans la première colonne. Celles-ci sont contemporaines pour les
Modèles 1 et 3, et ont une période de retard pour les Modèles 2 et 4. Toutes les variables sont
différenciées d’une période (un trimestre). Celles-ci sont définies au chapitre 3, ainsi qu’en
Annexe. Les erreurs-type sont indiquées entre crochets sous les valeurs des coefficients, *, ** et
*** représentant des significativités statistiques respectives de 10%, 5% et 1%. Les résidus sont
corrigés avec la méthode de Newey-West. L’unité de la variable dépendante est le point de base
(0.01%).
Mesure de l’investissement
Modèle 1 Modèle 2 Modèle 3 Modèle 4
Taux d’investissement dans
l’économie canadienne
Taux d’investissement des
entreprises dans l’économie
canadienne
Inflation 7.8041
[6.4983]
6.6712
[9.2075]
8.7352
[6.0040]
7.8136
[8.9910]
Taux de chômage -89.4026
[20.0139] ***
-26.5696
[21.1751]
-92.7053
[20.2490] ***
-37.8717
[20.0360] *
Volatilité -2.2731
[0.8787] ***
-1.9562
[1.0037] *
-2.0169
[0.8185] **
-1.6198
[1.1575]
Incertitude économique
générale canadienne (GEUI)
0.0476
[0.1080]
-0.3091
[0.1583]*
0.0767
[0.1033]
-0.2809
[0.1604] *
Constante 2.7434
[5.4710]
3.9680
[8.4246]
1.3596
[5.0571]
2.4253
[8.1190]
Nombre d’observations 47 46 47 46
R2 0.49 0.35 0.57 0.35
42
Chapitre 5. Discussion de la méthodologie et des résultats
Si l’étude permet de cerner l’impact de l’incertitude économique sur le marché des capitaux,
plusieurs limites sont à considérer par rapport à la méthodologie. Dans ce chapitre, nous allons
étudier certaines hypothèses qui peuvent influencer de manière significative les résultats obtenus.
5.1 Mesure de l’incertitude économique générale Notre étude utilise de manière exhaustive des variables mesurant l’incertitude économique,
soient l’indice GEUI canadien, largement inspirés des indices EPU développés par Baker, Bloom
et Davis(2013) . Par définition, l’incertitude économique est difficilement mesurable. La présente
section présentera des limites à considérer dans l’interprétation de notre indice GEUI.
Le fait d’inclure un indice relevant le nombre d’articles de journaux portant sur l’incertitude
économique générale comporte certains risques. En effet, nous n’avons pas d’indication, outre le
nombre d’articles publiés, sur la gravité de l’évènement discuté dans les articles. De plus, les
articles peuvent être consacrés à des évènements se déroulant à l’extérieur des frontières, ce qui
peut biaiser à la hausse l’indice national d’incertitude économique. D’autre part, plusieurs sujets
très techniques peuvent ne pas être couverts par les journaux de masse, ce qui pourrait avoir
comme effet de sous-estimer l’incertitude économique captée par cet indice. Il est donc difficile
de déterminer quel sera l’effet net de ces deux limites.
Par ailleurs, il est possible d’inclure dans l’indice d’incertitude économique générale les
éléments de dispersion dans les prévisions d’analystes, tels que décrits dans l’étude de Sill
(1992)
5.2 Modèles de régression et échantillonnage Les résultats des modèles économétriques que nous présentons dans notre étude sont fortement
influencés par ses différentes composantes, soient les variables dépendantes étudiées, les
variables de contrôle (variables indépendantes), ainsi que la période analysée.
43
5.2.1 Variables dépendantes
Dans les modèles de régression étudiant l’impact de l’incertitude économique sur le coût du
capital, nous utilisons le rendement excédentaire canadien en tant que substitut de celui-ci. En
effet, il est difficile d’évaluer un coût du capital global pour l’économie canadienne, alors que la
mesure du rendement excédentaire est plus précise. Toutefois, celui-ci donne une indication
théorique du comportement futur des investisseurs quant à leur coût en capital, mais des biais
peuvent être possibles dans ce processus.
Par ailleurs, l’étude de Damodaran (2008) présente le rendement du dividende comme étant un
substitut de la prime de risque. Nous observons dans nos résultats un effet contradictoire de
l’indice d’incertitude économique générale sur le rendement du dividende canadien et sur la
prime de risque canadienne, ce qui semble indiquer que cette relation n’est pas vérifiée. Nous
constatons qu’il n’y a pas de consensus dans la littérature à ce propos.
5.2.2 Variables de contrôle
Nos modèles de régression contiennent chacun trois variables de contrôle, en plus de la variable
représentant l’incertitude économique générale. Il s’agit de l’indice des prix à la consommation
(IPC), du taux de chômage canadien, ainsi que de l’indice VIX canadien, représentant la
volatilité des rendements boursiers. Les résultats des régressions seront fortement influencés par
le retrait ou l’ajout de nouvelles variables de contrôle. Nous avons choisi celles-ci afin de mettre
en relief l’incertitude économique et la volatilité, tel que décrit au premier chapitre, ainsi que de
prendre en compte les effets de la conjoncture sur le rendement excédentaire et l’investissement
au Canada. Ces variables indépendantes sont également utilisées dans la littérature, par exemple
dans l’étude de Durnev (2010).
5.2.3 Période d’analyse
Notre étude est effectuée sur une période de plus de dix ans, soit de 2003 à 2014. Un des
avantages de cette durée est que nous pouvons analyser un cycle économique presque complet,
qui inclut une période de forte volatilité et de forte incertitude, soit la crise financière de 2008.
La principale raison qui nous force à limiter l’étude à une décennie est le fait que l’indice VIX
canadien possède des données jusqu’à la fin de 2002, ce qui nous empêche de remonter plus loin
dans le temps. Le fait d’augmenter ou de réduire la fenêtre temporelle étudiée peut avoir une
incidence significative sur les résultats obtenus. Cela est surtout vrai pour les modèles de
44
régression étudiant l’impact de l’incertitude économique sur l’investissement, étant donné que
les données du PIB et de la Formation Brute de Capital Fixe sont trimestrielles. Nous nous
retrouvons donc avec un total de 48 données par variable, ce qui donne un effet significatif à
chacune d’entre elles.
5.2.4 Modèle de régression par moindre carrés ordinaires
Nous effectuons la totalité de nos régressions linéaires par la méthodologie des moindres carrés
ordinaires. Nous faisons donc une analyse sur des effets de premier ordre de l’incertitude
économique générale sur le coût du capital et sur l’investissement au Canada. Il est possible que
certains effets de deuxième ordre de l’incertitude économique soient laissés de côté par notre
étude.
5.2.5 Inclusion du coût de la dette dans les modèles de régression
Finalement, le coût de la dette n’est pas pris en compte dans les modèles économétriques
présentés. Nous avons préféré nous concentrer sur l’impact de l’incertitude économique sur le
marché boursier, en raison de la disponibilité des données et de la sensibilité du rendement des
obligations corporatives face aux variations de marché. En effet, selon le Modèle d’Évaluation
des Actifs Financiers (MÉDAF), le coefficient Beta de la dette est faible, ce qui donne le
rendement espéré du marché boursier comme mesure principale de risque d’un actif financier.
D’un autre côté, l’inclusion de la variable d’inflation (CPICAN) permet de refléter une partie des
anticipations des investisseurs, notamment en ce qui a trait aux taux d’intérêts.
Nous présenterons dans le prochain chapitre des tests de robustesse contenant des mesures
alternatives au coût du capital et à l’investissement comme variables dépendantes. Nous
vérifierons si les résultats obtenus sont consistants avec ceux présentés au quatrième chapitre,
ainsi qu’avec la littérature existante.
45
Chapitre 6. Tests de robustesse et mesures alternatives d’incertitude
économique Dans ce chapitre, nous présentons des tests économétriques visant à valider les hypothèses
soutenues dans cette étude. Nous allons entre autres modifier les variables dépendantes de nos
modèles de régression afin de vérifier les effets de l’incertitude économique générale sur
l’économie canadienne. Dans un premier temps, nous analyserons deux modèles étudiant
l’impact de cette mesure sur le coût du capital, avant de proposer des modèles étudiant l’impact
de l’incertitude sur l’investissement des entreprises canadiennes. Par la suite, nous étudierons les
résultats de modèles de régression ayant pour variables indépendantes les mesures d’incertitude
canadiennes et américaines simultanément.
6.1 Mesures alternatives du coût du capital Nous proposerons plusieurs modèles similaires à ceux présentés au troisième chapitre. Dans un
premier temps, nous modifierons la variable dépendante étudiée. Les modèles subséquents
auront comme différence d’ajouter une variable indépendante, soit la première différence de
l’indice américain d’incertitude économique générale (GEUIUSA).
6.1.1 Modèles modifiant la variable dépendante représentant le coût du capital
Dans cette section, nous nous intéresserons à deux variantes du coût du capital. Nous reprenons
l’équation de régression des modèles portant sur le coût du capital au chapitre précédent7 :
où :
DIFFCPICAN est la première différence de la série mensuelle de l’Indice des Prix à la
Consommation (IPC)
DIFFUNEMPCAN est la première différence de la série mensuelle du taux de chômage
canadien
DIFFVIXCAN est la première différence de la série mensuelle de l’indice VIX canadien
DIFFGEUICAN est la première différence de l’indice mensuel GEUI canadien (General
Economic Uncertainty Index)
7 Les définitions des variables sont disponibles à l’Annexe
46
RPREMCAN est le niveau de la prime de risque canadienne, en considérant soit le
rendement excédentaire de l’indice S&P/TSX Total Return (RPREMCANTOT) ou la
première différence du rendement du dividende canadien (DIFFDYCAN)
et représentent respectivement la constante et le terme d’erreur du modèle de
régression
Nous étudierons cette même équation de régression, cette fois-ci en modifiant la variable
dépendante RPREMCAN sous deux déclinaisons. Les résultats sont présentés ci-dessous dans le
Tableau 4. Dans un premier temps, nous étudierons l’impact de l’incertitude économique sur le
ratio cours-bénéfice ajusté pour le cycle économique (Cycle-Adjusted Price-Earnings Ratio, ou
DIFFCAPECAN). D’une manière similaire au troisième chapitre, nous proposons un premier
modèle où les variables indépendantes sont contemporaines (Modèle 1), et un deuxième où les
variables indépendantes sont retardées d’un mois (Modèle 2) puis sur le ratio de Sharpe canadien
ajusté (SHRPCANTOT). Pour obtenir cette dernière variable, nous calculerons le quotient du
rendement excédentaire, tel que défini au troisième chapitre, avec la volatilité mensuelle des
rendements de l’indice S&P/TSX Total Return. Afin de mesurer cette volatilité, nous calculons
l’écart-type des rendements de cet indice pour tous les jours ouvrables du mois en question, et
nous obtenons une série mensuelle. Le Modèle 3 montre les résultats de la régression ayant les
variables indépendantes contemporaines, tandis que celles-ci sont retardées d’une période (un
mois) dans le Modèle 4.
Nous constatons que l’incertitude économique générale a un effet négatif et significatif sur les
deux variables dépendantes étudiées, lorsque les variables indépendantes ont une période (un
mois) de retard (Modèles 2 et 4). En effet, dans ces modèles, une hausse d’un écart-type de
l’indice GEUI entraine une diminution du ratio cours-bénéfice ajusté pour le cycle économique
et du ratio de Sharpe canadien ajusté de 72.54 points de base et 205.07 points de base
respectivement.
D’un autre côté, on constate que l’indice de volatilité VIX a également un effet négatif sur ces
variables dépendantes. Cependant, la significativité est plus faible pour les modèles ayant les
variables indépendantes retardées d’un mois, n’ayant pas d’impact significatif sur le ratio cours-
bénéfice canadien ajusté et ayant un seuil de significativité de 10% dans le cas du ratio de Sharpe
canadien ajusté. Nous observons cependant que l’impact de la volatilité se fait surtout sentir de
47
manière contemporaine (Modèles 1 et 3). Une hausse d’un écart-type de l’indice VIX mensuel
entraine une diminution du ratio cours-bénéfice ajusté pour le cycle économique et du ratio de
Sharpe canadien ajusté de 41.87 points de base et 280.22 points de base respectivement. Cette
dernière valeur est cohérente avec le fait que par définition, le ratio de Sharpe contient la
volatilité des rendements du marché au dénominateur, valeur captée par l’indice VIX lors de sa
composition.
6.1.2 Modèles alternatifs étudiant l’impact de l’incertitude économique canadienne et
américaine sur le coût du capital
Dans cette section, nous modifions les modèles présentés au troisième chapitre pour y ajouter
une cinquième variable indépendante, soit la première différence de la série mensuelle de
l’indice américain d’incertitude économique générale (GEUIUSA). L’objectif visé est d’étudier
l’impact d’inclure l’incertitude économique canadienne et américaine de manière simultanée.
Nous obtenons dons l’équation de régression suivante :
où :
DIFFCPICAN est la première différence de la série mensuelle de l’Indice des Prix à la
Consommation (IPC)
DIFFUNEMPCAN est la première différence de la série mensuelle du taux de chômage
canadien
DIFFVIXCAN est la première différence de la série mensuelle de l’indice VIX canadien
DIFFGEUICAN est la première différence de l’indice mensuel GEUI canadien (General
Economic Uncertainty Index)
DIFFGEUIUSA est la première différence de l’indice mensuel GEUI américain (General
Economic Uncertainty Index)
RPREMCAN est le niveau de la prime de risque canadienne, en considérant soit le
rendement excédentaire de l’indice S&P/TSX Total Return (RPREMCANTOT) ou la
première différence du rendement du dividende canadien (DIFFDYCAN)
48
Tableau 4 Impact de l’incertitude économique générale canadienne sur la prime de risque
canadienne, utilisant des variables dépendantes alternatives
Le tableau présente les résultats de la régression définie selon l’équation suivante :
Les variables dépendantes sont indiquées sur la troisième ligne du tableau, et les variables
indépendantes sont indiquées dans la première colonne. Celles-ci sont contemporaines pour les
Modèles 1 et 3, et ont une période de retard pour les Modèles 2 et 4. Toutes les variables sont
différenciées d’une période (un mois), sauf le ratio de Sharpe canadien ajusté. Celles-ci sont
définies au chapitre 3, ainsi qu’en Annexe. Les erreurs-type sont indiquées entre crochets sous
les valeurs des coefficients, *, ** et *** représentant des significativités statistiques respectives
de 10%, 5% et 1%. Les résidus sont corrigés par la méthode de Newey-West. Les variables
dépendantes sont des ratios, et nous conservons ces valeurs telles quelles.
Mesure de la prime de risque
Modèle 1 Modèle 2 Modèle 3 Modèle 4
Ratio cours-bénéfices ajusté
pour le cycle économique
Ratio de Sharpe canadien
ajusté
Inflation
0.2559
[0.2156]
-0.1087
[0.2218]
1.1232
[0.6732] *
-1.3934
[0.7741] *
Taux de chômage
-0.4436
[0.6015]
-0.4199
[0.5464]
1.8482
[2.1731]
-2.6401
[2.0332]
Volatilité
-0.0488
[0.0293] *
0.0136
[0.0238]
-0.3266
[0.0962] ***
-0.1063
[0.0631] *
Incertitude économique générale
(GEUI)
-0.0059
[0.0040]
-0.0104
[0.0035] ***
-0.0113
[0.0092]
-0.0294
[0.0091] ***
Constante
-0.0802
[0.1019]
-0.0263
[0.0961]
1.6282
[0.3398] ***
2.0322
[0.3514] ***
Nombre d’observations 131 131 143 142
R2 0.11 0.11 0.30 0.24
49
et représentent respectivement la constante et le terme d’erreur du modèle de
régression8
Nous étudierons ce modèle de régression sous quatre formes différentes. Dans les deux
premiers modèles étudiés, nous prendrons comme variable dépendante le niveau du
rendement excédentaire canadien (RPREMCANTOT), les variables indépendantes étant
contemporaines en premier lieu (Modèle 1) ou ayant une période de retard (Modèle 2). Les
deux modèles suivants utilisent le rendement du dividende canadien (DIFFDYCAN) comme
variable dépendante, les variables indépendantes étant contemporaines (Modèle 3) ou ayant
une période (un mois) de retard (Modèle 4). Les résultats de ces régressions sont dans le
Tableau 5 ci-dessous.
Nous pouvons observer dans un premier temps que l’indice de volatilité VIX a un effet
significatif sur tous les modèles. De manière similaire aux résultats du Tableau 2, nous
pouvons remarquer que la volatilité des rendements boursiers a un impact négatif et
significatif sur le rendement excédentaire. En effet, une hausse d’un écart-type de l’indice
VIX entraine une diminution du rendement excédentaire de 370.23 points de base de manière
contemporaine (Modèle 1), et de 184.30 points de base avec une période de retard (Modèle
2). De plus, une hausse d’un écart-type de l’indice VIX entraine une hausse du rendement du
dividende canadien de 11.33 points de base de manière contemporaine (Modèle 3), et de 6.52
points de base avec une période de retard (Modèle 4). Ces résultats sont comparables à ceux
du Tableau 2 au quatrième chapitre.
Nous pouvons constater par ailleurs que l’incertitude économique américaine n’a pas
d’impact significatif sur le coût du capital canadien. De l’autre côté, l’indice GEUI canadien
a un impact significatif dans les modèles où les variables indépendantes sont analysées avec
un mois de retard (Modèles 2 et 4). Dans ces modèles, une hausse d’un écart-type de l’indice
GEUI entraine une diminution du rendement excédentaire canadien de 283.19 points de base,
ainsi qu’une augmentation du rendement du dividende de 6.28 points de base. Dans le cas du
8 Une liste des variables utilisées et leur définition est disponible en Annexe
50
Tableau 5 Impact de l’incertitude économique générale canadienne et américaine sur la prime de risque canadienne
Le tableau présente les résultats de la régression définie selon l’équation suivante :
Les variables dépendantes sont indiquées sur la troisième ligne du tableau, et les variables
indépendantes sont indiquées dans la première colonne. Celles-ci sont contemporaines pour les
Modèles 1 et 3, et ont une période de retard pour les Modèles 2 et 4. Toutes les variables sont
différenciées d’une période (un mois), à l’exception du rendement excédentaire canadien. Celles-
ci sont définies au chapitre 3, ainsi qu’en Annexe. Les erreurs-type sont indiquées entre crochets
sous les valeurs des coefficients, *, ** et *** représentant des significativités statistiques
respectives de 10%, 5% et 1%. Les résidus sont corrigés par la méthode de Newey-West. L’unité
des variables dépendantes est le pourcentage (1%)
Mesure de la prime de risque
Modèle 1 Modèle 2 Modèle 3 Modèle 4
Rendement excédentaire
canadien
Rendement du dividende
canadien
Inflation 1.8994
[0.6786] ***
-0.5388
[0.7021]
-0.0263
[0.0216]
0.0043
[0.0223]
Taux de chômage -0.0523
[2.0948]
-1.4751
[2.4361]
-0.0122
[0.0773]
-0.1020
[0.0973]
Volatilité -0.4315
[0.1144] ***
-0.2148
[0.1045] **
0.0132
[0.0035] ***
0.0076
[0.0030] **
Incertitude économique générale
canadienne (GEUICAN)
-0.0152
[0.0117]
-0.0406
[0.0126] ***
0.0005
[0.0004]
0.0009
[0.0004] **
Incertitude économique générale
américaine (GEUIUSA)
-0.0198
[0.0123]
0.0096
[0.0119]
0.0003
[0.0004]
-0.0002
[0.0004]
Constante 0.3821
[0.2840]
0.7800
[0.3293] **
0.0121
[0.0092]
0.0061
[0.0106]
Nombre d’observations 143 142 143 142
R2 0.41 0.20 0.31 0.16
51
rendement excédentaire canadien, nous constatons que l’impact de l’incertitude économique est
plus fort que celui de l’indice VIX avec un retard d’une période.
La prochaine section abordera des tests de robustesse portant sur l’impact de l’incertitude
économique générale sur l’investissement.
6.2 Modèles alternatifs de l’impact de l’incertitude économique générale sur
l’investissement des entreprises
Dans cette section, nous modifions les modèles présentés au troisième chapitre pour y ajouter
une cinquième variable indépendante, soit la première différence de la série trimestrielle de
l’indice américain d’incertitude économique générale (GEUIUSA). L’objectif visé est d’étudier
l’impact d’inclure l’incertitude économique canadienne et américaine de manière simultanée.
Nous obtenons dons l’équation de régression suivante :
où :
DIFFCPICAN est la première différence de la série trimestrielle de l’Indice des Prix à la
Consommation (IPC)
DIFFUNEMPCAN est la première différence de la série trimestrielle du taux de chômage
canadien
DIFFVIXCAN est la première différence de la série trimestrielle de l’indice VIX
canadien
DIFFGEUICAN est la première différence de l’indice trimestriel GEUI canadien
(General Economic Uncertainty Index)
DIFFGEUIUSA est la première différence de l’indice trimestriel GEUI américain
(General Economic Uncertainty Index)
52
INVCAN est la série trimestrielle de l’investissement dans l’économie canadienne,
utilisant soit la première différence du taux d’investissement (DIFFIRCAN), soit la
première différence du taux d’investissement des entreprises dans l’économie canadienne
(DIFFIRECAN).
et représentent respectivement la constante et le terme d’erreur du modèle de
régression9
Nous étudierons ce modèle sous quatre formes différentes. Dans les deux premiers modèles
étudiés, nous prendrons comme variable dépendante la première différence du taux
d’investissement dans l’économie canadienne (DIFFIRCAN), les variables indépendantes étant
contemporaines en premier lieu (Modèle 1) ou ayant une période de retard (Modèle 2). Les deux
modèles suivants utilisent le taux d’investissement des entreprises dans l’économie canadienne
(DIFFIRECAN) comme variable dépendante, les variables indépendantes étant contemporaines
(Modèle 3) ou ayant une période (un trimestre) de retard (Modèle 4). Les résultats de ces
régressions sont présentés dans le Tableau 6 ci-dessous.
Nous observons que les résultats sont similaires à ceux observés au quatrième chapitre, au
Tableau 3. En effet, le taux de chômage est toujours un facteur déterminant du taux
d’investissement. L’impact de l’indice de volatilité VIX est également négatif et significatif sur
les trois premiers modèles, dans des proportions comparables.
En ce qui concerne l’incertitude économique générale américaine (GEUIUSA), nous pouvons
observer qu’elle n’a pas d’impact significatif sur le taux d’investissement au Canada. Seule
l’incertitude économique générale canadienne (GEUICAN) a un impact négatif et significatif sur
ces taux d’investissement, lorsque les variables indépendantes sont analysées avec un trimestre
de retard (Modèles 2 et 4). En effet, une hausse d’un écart-type de l’indice GEUI canadien
entraine une diminution du taux d’investissement de 24.46 points de base, et une diminution du
taux d’investissements des entreprises canadiennes de 24.88 points de base.
9 Une liste des variables utilisées et leur définition est disponible en Annexe
53
Tableau 6 Impact de l’incertitude économique générale canadienne et américaine sur l’investissement des entreprises canadiennes
Le tableau présente les résultats de la régression définie selon l’équation suivante :
Les variables dépendantes sont indiquées sur la troisième ligne du tableau, et les variables indépendantes sont indiquées dans la première colonne. Celles-ci sont contemporaines pour les Modèles 1 et 3, et ont une période de retard pour les Modèles 2 et 4. Toutes les variables sont différenciées d’une période (un trimestre). Celles-ci sont définies au chapitre 3, ainsi qu’en Annexe. Les erreurs-type sont indiquées entre crochets sous les valeurs des coefficients, *, ** et *** représentant des significativités statistiques respectives de 10%, 5% et 1%. Les résidus sont corrigés avec la méthode de Newey-West. L’unité de la variable dépendante est le point de base (0.01%).
Mesure de l’investissement
Modèle 1 Modèle 2 Modèle 3 Modèle 4
Taux d’investissement dans
l’économie canadienne
Taux d’investissement des
entreprises dans
l’économie canadienne
Inflation 8.4320
[6.5530]
8.9908
[9.7830]
8.9755
[6.1094]
9.8558
[9.7090]
Taux de chômage -90.5135
[20.3201] ***
-29.6927
[20.5153]
-93.1305
[20.2028]
***
-40.6213
[20.0549]
**
Volatilité -2.5798
[1.1583] **
-2.9411
[1.4475] **
-2.1343
[1.0248] **
-2.4869
[1.6423]
Incertitude économique générale
canadienne
0.0217
[0.1445]
-0.3863
[0.1920] **
0.0668
[0.1445]
-0.3488
[0.1961] *
Incertitude économique générale
américaine
0.1022
[0.2674]
0.3212
[0.2913]
0.0391
[0.2469]
0.2828
[0.2970]
Constante 2.5253
[5.4709]
3.0197
[8.6592]
1.2761
[5.1107]
1.5904
[8.4337]
Nombre d’observations 47 46 47 46
R2 0.50 0.37 0.57 0.37
54
CONCLUSION
L’incertitude économique est un thème qui gagne en popularité, surtout depuis les dernières
années, où les investisseurs réalisent son importance et ses effets sur l’économie. Notre étude
permet d’introduire un indice d’incertitude économique générale canadien (GEUI), inspiré des
travaux de Baker, Bloom et Davis (2013). En effet, cet indice permet de retirer la contrainte
consistant à se concentrer sur l’incertitude quant aux politiques économiques, pour obtenir une
analyse plus complète de l’incertitude. De plus, nous avons analysé l’impact de celle-ci sur le
marché des capitaux, plus précisément au niveau du rendement excédentaire et de
l’investissement.
Les résultats obtenus indiquent que l’incertitude économique générale a un effet dissuasif sur
l’investissement, surtout l’investissement corporatif. Les effets observés sur le coût du capital,
plus précisément le rendement excédentaire, sont mitigés dans la mesure où l’on observe un
impact négatif sur le rendement excédentaire canadien, mais de l’autre côté un effet positif sur le
rendement du dividende, un substitut de la prime de risque d’après l’étude de Damodaran (2008).
Toutefois, on semble observer une relation claire entre le rendement boursier et l’incertitude
économique, dans la mesure où, parmi les quatre modèles consacrés au rendement excédentaire,
l’impact de l’incertitude peut être expliqué par une baisse du rendement des indices boursiers.
Ces résultats corroborent ceux des études de Dzielinski (2010) et Alexopoulos et Cohen (2011).
Une des principales contributions de notre étude est d’analyser l’impact de l’incertitude
économique canadienne sur son marché des capitaux. À notre connaissance, il s’agit de la
première étude consacrée à ce phénomène au Canada. De plus, nous parvenons à des résultats
corroborant la majeure partie de la littérature existante en utilisant des modèles plus simples, ce
qui rend les conclusions plus robustes. Il serait pertinent, dans les prochaines études sur
l’incertitude économique, de s’intéresser aux effets de l’incertitude économique d’un pays sur le
marché des capitaux d’un pays voisin, par exemple le Canada et les États-Unis. Par ailleurs, il
serait intéressant d’étudier le phénomène de l’incertitude économique sur une période plus
longue, ce qui pourrait aider les investisseurs, ainsi que les décideurs publics, à prendre de
55
meilleures décisions d’investissement. En ayant des échantillons de données sur une plus longue
période, il serait pertinent d’évaluer l’impact de l’incertitude économique comme indicateur
retardé de plusieurs périodes de variables majeures de l’économie canadienne, telles le coût du
capital ou l’investissement corporatif canadien.
56
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58
ANNEXE A : Tests de stationnarité des variables utilisées dans les régressions
Les deux tableaux suivants (Tableau 13 et Tableau 14) présentent les valeurs de la fonction
d’autocorrélation de toutes les variables utilisées dans les modèles de régression linéaire. Le
Tableau 13 regroupe les variables nécessaires pour les modèles analysant l’impact de
l’incertitude économique générale sur le niveau du rendement excédentaire, tandis que le
Tableau 14 contient les variables analysant l’effet de l’incertitude économique générale sur le
taux d’investissement canadien. Suite à chaque tableau, nous présenterons la définition de
chaque variable.
Afin de vérifier la stationnarité des variables utilisées, nous effectuons un test par la méthode de
Dickey-Fuller. Les deux dernières colonnes des Tableaux 13 et 14 présentent le nombre
d’observations, ainsi que la valeur critique de la statistique T pour chaque variable. Cette valeur
critique est accompagnée de deux étoiles (**) pour un résultat rejetant l’hypothèse nulle d’un
processus contenant une racine unitaire à un seuil de significativité de 95%, et trois étoiles (***)
pour un résultat rejetant cette même hypothèse nulle à un seuil de 99%.
Par la suite, nous présenterons les graphiques des fonctions d’autocorrélation de chaque variable.
Les variables mensuelles seront analysées jusqu’à 24 retards, et les variables trimestrielles vont
jusqu’à 12 périodes de retard. Les Tableaux 13 et 14 présentent également les valeurs
numériques des sept premiers retards de chaque variable.
59
Définitions des variables des modèles de régression
Nom de la Variable Définition
CPICAN Indice des Prix à la Consommation (IPC) du Canada (Statistiques Canada)
DIFFCPICAN Première différence de la série de l’Indice des Prix à la Consommation (IPC)
VIXCAN Indice de volatilité VIX canadien (Bourse TMX)
DIFFVIXCAN Première différence de la série de l’Indice de volatilité VIX canadien
DYCAN Rendement du dividende canadien (WRDS)
DIFFDYCAN Première différence de la série du rendement du dividende canadien
UNEMPCAN Taux de chômage canadien (Statistiques Canada)
DIFFUNEMPCAN Première différence de la série du taux de chômage canadien
GEUICAN Indice d’incertitude économique générale canadien
DIFFGEUICAN Première différence de la série de l’Indice d’incertitude économique générale canadien
GEUIUSA Indice d’incertitude économique générale américain
DIFFGEUIUSA Première différence de la série de l’Indice d’incertitude économique générale américain
CAPECAN Ratio cours-bénéfice ajusté pour le cycle économique (Méthodologie de Robert Shiller)
DIFFCAPECAN Première différence de la série du ratio cours-bénéfice ajusté pour le cycle économique
RPREMCANTOT Niveau du rendement excédentaire canadien (S&P/TSX Total Return – Bons du Trésor 1 mois)
SIGMARPREM Volatilité des rendements journaliers de l’indice S&P/TSX Total Return
DIFFSIGMARPREM Première différence de la série de la volatilité des rendements journaliers de l’indice S&P/TSX Total Return
SHRPCANTOT Ratio de Sharpe ajusté canadien : rendement de l’indice S&P/TSX total Return / Volatilité des rendements
TSXTOTRETURN Rendement de l’indice S&P/TSX Total Return
DIFFTSXTOTRETURN Première différence de la série du rendement de l’indice S&P/TSX Total Return IRCAN Taux d’investissement canadien : Formation Brute de Capital Fixet / Produit Intérieur Brutt-1 (PIB)
DIFFIRCAN Première différence de la série du taux d’investissement canadien
IRECAN Taux d’investissement des entreprises canadiennes : Formation Brute de Capital Fixe des Entreprises (FBCFE)t / PIBt-1 )
DIFFIRECAN Première différence de la série du taux d’investissement des entreprises canadiennes
60
Tableau 13 : Fonction d’autocorrélation et test de stationnarité Dickey-Fuller des variables utilisées dans les régressions
analysant l’impact de l’incertitude économique générale sur le niveau du rendement excédentaire canadien
Variables Mensuelles
Fonction d'autocorrélation Test de stationnarité Dickey-Fuller
Retard Nombre d'observations
valeur critique Statistique T Nom de la Variable 1 2 3 4 5 6 7
CPICAN 0.980423 0.959847 0.938612 0.916174 0.893915 0.871713 0.848993 144 -2.44026
DIFFCPICAN 0.21385 -0.00417 -0.10193 -0.10550 -0.15802 -0.03002 -0.22480 143 -9.33265***
VIXCAN 0.85595 0.72707 0.67790 0.61352 0.50623 0.41088 0.35780 144 -3.34900
DIFFVIXCAN -0.05034 -0.27833 0.06560 0.15592 -0.04261 -0.14836 -0.11305 143 -12.4032***
DYCAN 0.972681 0.939378 0.896577 0.847829 0.796565 0.747387 0.705322 144 -1.74251
DIFFDYCAN 0.15602 0.24033 0.12208 0.06227 -0.07661 -0.17876 -0.14022 143 -10.0746***
UNEMPCAN 0.97050 0.93589 0.89619 0.85268 0.80381 0.75086 0.69633 144 -1.33204
DIFFUNEMPCAN 0.09317 0.07991 0.09053 0.09824 0.09066 0.04100 -0.02744 143 -10.7395***
GEUICAN 0.893235 0.814704 0.702105 0.625643 0.570898 0.521453 0.478901 144 -3.63530**
DIFFGEUICAN -0.12686 0.14735 -0.15251 -0.09689 -0.02083 -0.02729 -0.15123 143 -13.3690***
CAPECAN 0.976545 0.944620 0.905881 0.862733 0.817175 0.777060 0.742873 132 -1.80860
DIFFCAPECAN 0.21921 0.18852 0.09942 0.07230 -0.10049 -0.15162 -0.06553 131 -9.05364***
RPREMCANTOT 0.20538 0.16048 0.08118 0.05944 -0.10516 -0.16713 -0.11029 144 -9.64706***
SIGMARPREM 0.80190 0.66730 0.52811 0.43327 0.39282 0.33378 0.33956 144 -3.90664**
DIFFSIGMARPREM -0.15551 0.00866 -0.10878 -0.13604 0.04726 -0.16362 0.08303 143 -13.7424***
SHRPCANTOT 0.09099 0.05617 0.00842 0.02476 0.03854 -0.02677 0.01977 144 -10.9188***
TSXTOTRETURN 0.20485 0.16127 0.08225 0.06097 -0.10396 -0.16475 -0.10784 144 -9.67569***
DIFFTSXTOTRETURN -0.47231 0.01986 -0.03421 0.09297 -0.06676 -0.07225 0.01522 143 -19.6945***
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Tableau 14 : Fonction d’autocorrélation et test de stationnarité Dickey-Fuller des variables utilisées dans les régressions analysant l’impact de l’incertitude économique générale sur le taux d’investissement canadien
Variables Trimestrielles
Fonction d'autocorrélation Test de stationnarité Dickey-Fuller
Retard Nombre d'observations
valeur critique Statistique T Nom de la Variable 1 2 3 4 5 6 7
CPICAN 0.941931 0.873398 0.808272 0.745607 0.684131 0.622758 0.560617 48 -3.28236
DIFFCPICAN -0.12472 -0.34686 -0.14000 0.38877 -0.04731 -0.15691 -0.15132 47 -7.38963***
VIXCAN 0.64170 0.48346 0.29326 0.13076 0.12180 -0.01738 -0.04177 48 -3.15885
DIFFVIXCAN -0.26292 0.04539 -0.03475 -0.22124 0.18588 -0.15848 0.00397 47 -8.73385***
UNEMPCAN 0.89261 0.75398 0.59669 0.40629 0.26636 0.09764 -0.03542 48 -1.48422
DIFFUNEMPCAN 0.15292 0.10763 0.18503 -0.22205 0.11109 -0.13677 -0.13647 47 -5.65751***
GEUICAN 0.696948 0.516391 0.484416 0.462999 0.408546 0.302691 0.303160 48 -4.16476***
DIFFGEUICAN -0.14491 -0.24969 -0.00740 0.04939 0.09420 -0.19306 0.17098 47 -7.86476***
IRCAN 0.87625 0.69616 0.52944 0.38707 0.29079 0.20334 0.11354 48 -2.57467
DIFFIRCAN 0.47130 0.06907 -0.12954 -0.33712 -0.07961 0.05345 -0.06786 47 -3.94894***
IRECAN 0.88508 0.70011 0.51726 0.34837 0.21888 0.09998 -0.01952 48 -2.10886
DIFFIRECAN 0.51965 0.14570 -0.03640 -0.26632 -0.08771 0.03650 -0.07376 47 -3.70744***
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