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Nos réformes structurelles
Propositions alternatives et priorités législatives
pour l’emploi, l’activité et la croissance
2015-2017
23 janvier 2015
Nous n’ignorons pas que la relance de l’économie ne règle pas l’ensemble des
problèmes de notre République, ses inégalités et ses fractures. Mais nous savons que le
redressement et la transformation, de notre modèle économique et social sont plus
urgents chaque jour.
En 2015, pour faire réussir notre pays, nous proposons un ensemble de réformes
réellement structurelles, qui respectent et prolongent les engagements pris en 2012.
Elles se distinguent, par leur nature et leur ampleur, des projets d’inspiration libérale,
qui se polarisent essentiellement sur la réduction des budgets publics et entraînent
l’affaiblissement des droits des salariés. Ces réformes attaquent à la racine les difficultés du
pays, les obstacles au financement des entreprises, les retards des investissements de
transitions, et portent une ambition de transformation.
En concentrant les projets actuels, dans la précipitation, sur quelques
déréglementations sectorielles, on court le risque de dégâts considérables, pour beaucoup
d’entreprises et de salariés. Nous faisons d’autres choix : celui des régulations ciblées, de
l’intervention stratégique de la puissance publique, de l’investissement durable dans des
secteurs clé, vecteurs de relance économique et de cohésion sociale, au service d’une société
plus juste, plus écologique.
Soucieux de traquer les rentes abusives (après l’occasion manquée de renégocier les
contrats des concessions autoroutières), nous souhaitons nous y atteler effectivement dans le
domaine bancaire.
Conscients des responsabilités de chacun devant la situation réelle du pays, nous
proposons de concentrer utilement la dépense publique dans les domaines prioritaires, en
particulier le numérique et les énergies renouvelables.
En redéployant les ressources du pacte de responsabilité, nous dégageons les
financements nécessaires aux politiques fiscales et sociales synonymes d’investissements
réels : des dépenses importantes à court terme peuvent rapporter beaucoup demain, par
l'augmentation du taux d'emploi, par l'amélioration de la compétitivité, et par l’avènement
d’une société où progressent l’égalité et la cohésion.
Face à la récession -aggravée en 2014- en France et en Europe, le plan d’urgence que nous
avons demandé en septembre dernier devient toujours plus nécessaire.
Un nouveau départ pour l’économie française, les moyens de la troisième
révolution industrielle, des progrès sociaux à la clé : voilà l’enjeu de cette plate-forme.
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I) Les banques au service de l’économie réelle
II) Le soutien fiscal à l’investissement productif
III) Le financement de la recherche et de l’innovation
IV) La poursuivre et le développement de la transition énergétique
V) Le déploiement accéléré des réseaux numériques à très haut débit
VI) L’urgence d’une mobilisation globale pour le logement
VII) Le nécessaire choix de de l’investissement social
I. Les banques au service de l’économie réelle
La crise financière de 2008 a démontré l’insuffisance de la régulation du secteur
financier et des pouvoirs des autorités de supervision. La nature particulière du secteur
financier, dont dépendent les autres secteurs de l'économie, justifie une régulation offensive et
un contrôle démocratique renforcé sur ses activités.
Si des réformes ont été engagées pour limiter les risques systémiques, nous sommes
encore bien loin du point d'arrivée : un secteur financier efficacement régulé ayant pour
objectif de financer l'économie réelle. Nous le devons à nos concitoyens, comme à l’ensemble
de ceux de l’Union Européenne, qui ont dû supporter le poids de la crise et refinancer des
banques qui dégagent à nouveau d'importants bénéfices.
Alors que les lobbies se font entendre, les efforts des régulateurs nationaux et
européen doivent se renforcer mutuellement. La compétition entre places financières,
largement organisée par la course à l'abaissement des exigences réglementaires, ne peut plus
être.
La régulation est, d’abord, la condition de l'efficacité économique. L'efficacité de la
régulation et l'intensité de la supervision sont désormais observées par les acteurs de marchés
eux-mêmes comme des garantes de la résilience des établissements financiers. La France ne
doit pas jouer, à rebours de cette évolution salutaire, la carte du moins disant.
Dès lors, la poursuite de l'effort de régulation du secteur financier doit s'inscrire dans
une vision d'ensemble dont les objectifs sont clairement identifiés et affirmés :
1) Renforcer la protection des consommateurs
Les frais bancaires constituent pour une part la rémunération de services effectifs, mais
pour une autre, une rente indue sur un public captif.
La loi de régulation des activités bancaires de juillet 2013 a introduit de réels progrès, à la
demande du Parlement, dans le plafonnement des frais (commissions d’intervention) et la
protection des populations en situation de fragilité financière, l’obligation d’information avant
les modifications des tarifs bancaires ou avant prélèvement des frais d’incident permettant aux
clients en difficulté d’anticiper et ainsi d’éviter la majoration des frais.
Néanmoins, ces avancées demeurent insuffisantes pour garantir la protection des
consommateurs, et en particuliers des plus fragiles. La baisse règlementaire des commissions
d’intervention a été accompagnée par l’explosion d’autres frais1. Ainsi, les « frais de tenues
des comptes » ont progressé de 14% en 2014, de 22% cette année.
Concernant les montants des commissions d’intervention, la loi du 26 juillet 2013
présente des avancées : les établissements financiers ne pourront pas facturer à ce titre plus de
1 Source : étude panorama banques sir 150 banques hexagonales
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8 € par opération et plus de 80 € mensuels pour l’ensemble des clients ; pour les populations
fragiles, le plafond descend à 4 € par opération, pour un maximum de 20 € par mois.
Néanmoins, si les commissions sont ainsi plafonnées, celles-ci s’ajoutent toujours aux intérêts
débiteurs dont le taux se situe en moyenne autour de 15 %. S’ajoute également le coût
répercuté des lettres informant le client du découvert.
Notre proposition de « réforme structurelle » entend ainsi élargir les opérations à inclure
dans le plafonnement des frais imputés au client, pour mettre fin à cette inflation sans limite.
Elle vise également à renforcer l’information du client sur ces plafonnements, condition
de leur mise en œuvre et de leur effectivité. En effet, la loi du 26 juillet 2013 ne traite pas de
l’information préalable et fait ainsi peser un risque pour le consommateur, qui ignore par
exemple le point de départ du délai pour le plafonnement mensuel.
En outre, si le droit pour quiconque de disposer d’un compte bancaire existe déjà dans la
réglementation française depuis une dizaine d’années, de nombreux foyers en demeurent
privés. En matière de droit au compte, le principal apport de la loi du 26 juillet 2013 consiste
à rappeler aux banques qui refusent l’ouverture d’un compte leur obligation de fournir au
client "systématiquement et sans délai une attestation de refus". Cette dernière est en effet
nécessaire à la Banque de France pour obliger un établissement à accepter le client. Si ce
rappel était utile, ce que nous proposons vise à à promouvoir l’établissement d’un service
bancaire universel, en imposant aux banques, dans certaines conditions, d’ouvrir un compte et
de fournir les services de base à tous ceux qui n’en possèdent pas.
2) Réduire les pratiques spéculatives
La transmission de la crise des établissements bancaires à l’économie réelle par les canaux
financiers a provoqué une prise de conscience des risques induits par les comportements
spéculatifs et le développement de produits toxiques. Certaines pratiques spéculatives n’ont
été interdites ou encadrées que de façon temporaire (ventes à découvert) et certains produits
spéculatifs encadrés de façon lacunaire (dérivés de matières premières).
Nous défendons l’interdiction de la vente à découvert de produits financiers, pratique par
laquelle les acteurs financiers peuvent vendre des produits qu’ils ne possèdent pas.
La spéculation financière favorise l’instabilité des prix des matières premières, qu’elles
soient agricoles ou énergétiques. Les directives européennes, comme MIFID II, n’offrent
qu’un encadrement lacunaire. Les progrès permis par la loi de juillet 2013 en matière de
limitation de la spéculation sur les matières premières agricoles doivent être étendus à
l’ensemble des matières premières. Le stockage, la transformation et le transport de celles-ci
par des acteurs financiers doivent être interdits. En outre, la transparence de la détermination
de leur prix par les entreprises doit être garantie par le recours à des indices supervisés par
l’Autorité européenne des marchés financiers dans les contrats de dérivés de matières
premières.
3) Lutter contre les paradis fiscaux et réglementaires
Le recours aux paradis fiscaux et règlementaires par le secteur financier génère un double
risque : l’évasion fiscale sape le principe d’égalité face aux charges publiques, diminue les
recettes fiscales des Etats et mine le consentement à l’impôt et la dissimulation d’activités
financières interdites ou encadrées permet la perpétuation des risques systémiques qu’elles
comportent.
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Néanmoins, la faiblesse de la répression de la fraude et de l’optimisation fiscales comme
l’insuffisance de la coopération internationale expliquent que le montant des richesses
détenues dans les paradis fiscaux continue de croître.
La fin des activités des établissements financiers français dans les Etats et territoires non-
coopératifs en matière fiscale n’a pas été atteinte par la loi du 26 juillet 2013. Les activités des
établissements de crédit et sociétés d’investissement dans les Etats et territoires maintenus
plus de trois années successives sur la liste des territoires non-coopératifs doivent être
interdites.
L’optimisation fiscale des grands groupes doit être plus efficacement combattue. Les
activités, spécialités de cabinets de conseil, visant à aider une entreprise ou un particulier à
échapper à la fiscalité doivent être sanctionnées par les juridictions françaises. De même, une
société française dont l'Etat est l'actionnaire principal ne sera plus autorisée à créer une filiale,
à l'instar d'une captive d'assurance pour un grand groupe industriel, dans ces paradis fiscaux.
A l’international, le principe de l’échange automatique d’informations fiscales entre
pays volontaires à partir de 2017 (G20, sommet de Brisbane) doit pouvoir s’appuyer sur un
régime de contre-mesures incitant les Etats à échanger automatiquement les informations
fiscales relatives aux contribuables européens avec les Etats européens. L'argument de
l'atteinte à la compétitivité des entreprises françaises ne vaut que si notre pays ne se montre
pas, à moyen et long terme, capable d’obtenir des progrès réels et efficaces dans les enceintes
européennes et internationales. Il n'est pas recevable dès lors que l'on choisit la voie du mieux
disant réglementaire et fiscal.
4) Financer l’économie des territoires
Les réseaux bancaires collectent une partie de l’épargne des Français dans les territoires
ruraux et les zones économiquement fragiles. Réciproquement, nous affirmons un principe de
responsabilité des banques dans le financement de l’économie des territoires, y compris
auprès des entreprises traversant des difficultés passagères. Aujourd’hui, la procédure de
redressement peut signifier la mort bancaire.
Sur la période récente, les banques ont rompu l’équilibre2
entre l'épargne qu'elles
collectent auprès des Français et les financements qu'elles accordent aux entreprises et aux
ménages.
La transparence des activités des banques au niveau de chaque territoire constituerait
une première étape d’un mécanisme qui, comme le Community Reinvestment Act américain,
permettrait de consolider l’accès des territoires dans l’accès aux financements. Ainsi, les
banques devraient publier annuellement un ensemble de données (notamment le montant de
l’épargne collectée, l’encours de crédit aux entreprises, ménages et collectivités, le nombre de
refus de crédits) par département, sous le contrôle de l’Autorité de contrôle prudentiel et de
résolution (ACPR).
Les collectivités locales et associations de consommateurs légitimement intéressées
pourraient appeler son attention, et ce publiquement, sur la situation d’un territoire particulier
où il existerait un déséquilibre manifeste entre la collecte de l’épargne et les activités de
financement de l’économie. L’ACPR pourrait diligenter une enquête et inviter l’établissement
concerné à justifier le déséquilibre constaté. Son accès aux opérations de refinancement à très
bon marché de la Banque centrale européenne doit en dépendre.
2 Pour les deux plus grandes banques françaises, les dépôts ont augmenté de 3% et 4,6% au troisième trimestre
2014, quand les crédits accordés augmentaient de 0,8% sur un an pour l'une et reculait de 2% pour l'autre
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II. Soutenir fiscalement l’investissement productif
Depuis l’automne 2012, le gouvernement s’est engagé, avec le CICE et le pacte de
responsabilité, dans une politique massive – 41 milliards d’euros - et pourtant peu efficace de
baisses d’impôts et de cotisations sur les entreprises, sans ciblage ni conditionnalité en termes
de création d’emplois ou d’investissement. Alors qu’un très grand nombre d’entreprises
souffrent d’abord de la faiblesse des carnets de commande, il paraît, de surcroît, inopportun
de financer cette politique par des mesures restreignant le pouvoir d’achat des ménages ou
l’investissement des collectivités locales.
Pour renouer avec la croissance et l’emploi, il est urgent de remédier au sous-
investissement structurel dont pâtit le tissu économique français. Nous proposons donc de
mobiliser une partie les sommes affectées au pacte de responsabilité directement vers
l’investissement et à la compétitivité hors-coût, en utilisant deux outils :
1) Fusionner le CICE et le CIR au service de l’investissement : pour un CICER
Le CICE doit être remplacé par un crédit d’impôt moins onéreux et ciblé sur les
entreprises qui investissent. Il faut renverser la logique initiale en asseyant ce crédit d’impôt
non plus sur les rémunérations et la masse salariale, mais sur les dépenses de celles-ci selon
l’exemple du crédit d’impôt recherche (CIR). Dans un deuxième temps, les deux dispositifs,
CICE et CIR, devront fusionner.
Il s’agira d’identifier une série de dépenses liées à l’investissement et à la
compétitivité et favorables à l’emploi qui ouvriront droit à un crédit d’impôt avec un taux
différent selon la taille de l’entreprise, afin d’aider d’avantage les PME et les ETI.
Les dépenses ouvrant droit à ce nouveau crédit d’impôt seraient les suivantes :
-Les investissements corporels ou incorporels réalisés par les entreprises et comptabilisés au titre de la formation brute de capital fixe, à l’exception des dépenses relatives à l’immobilier ; -Les dépenses d’innovation, de recherche et développement et de formation
2) Moduler l’impôt sur les sociétés en fonction des bénéfices réinvestis
Cette modulation doit à la fois inciter à l’investissement et décourager le versement de
dividendes importants pour être pleinement efficace et vertueuse.
Comme François Hollande l’avait annoncé lors de sa campagne électorale, nous
plaidons pour que, à partir de 2016, toutes les entreprises qui investiraient plus de la moitié de
leurs bénéfices bénéficient d’un taux réduit d’impôt sur les sociétés à 28%.
Cette mesure incitative doit être complétée par un volet « désincitatif » en matière de
dividendes : nous proposons de doubler le taux de la contribution additionnelle à l’impôt sur
les sociétés payée par les grandes entreprises sur les montants distribués.
3) Un crédit d’impôt spécifique à l’économie sociale et solidaire
Les 20 milliards d’euros dégagés pour la mise en place du CICE ne bénéficient pas aux
organismes non lucratifs. Ces derniers se trouvent écartés du dispositif et donc pénalisés, alors
que de par leur fonctionnement et leur gouvernance, ils devraient au contraire faire partie des
structures aidées en priorité : ces entreprises ont fait le choix de modèles de fonctionnement
qui priorisent l’investissement des bénéfices dans le projet collectif plutôt que dans la
rémunération du capital et l’augmentation des dividendes. Il est paradoxal que l’on attribue
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aujourd’hui le CICE à des entreprises dont on n’a aucun garantie quant à l’utilisation qu’elles
feront de l’aide, alors que des organismes sans but lucratif, pourtant créateurs d’emplois dans
nombre de secteurs clé, et en recherche de compétitivité accrue, en demeurent écartés.
L’abattement forfaitaire de taxe sur les salaires dont bénéficient ces organismes a été rehaussé
de 6002 à 20 000 euros, mais cela ne suffit pas à compenser le désavantage subi. Le rapport
relatif à l’impact de la mise en œuvre du crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE) sur la
fiscalité du secteur privé non lucratif constate en effet que « pour le décile des associations
les plus grosses, qui concerne environ 80 % des emplois, l’abattement de la taxe sur les
salaires sera moins avantageux qu’une mise en œuvre théorique du CICE ».
Il s’agirait donc de créer un crédit d’impôt en faveur des organismes sans but lucratif. Seraient
visés tous les organismes employeurs passibles de l’impôt sur les sociétés au taux réduit prévu
par l’article 206-5 du Code général des impôts, et les fondations reconnues d'utilité publique.
Ce crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi associatif serait calculé sur la base des
rémunérations versées aux salariés affectés aux activités exonérées d'impôt sur les bénéfices
au taux de droit commun de manière similaire aux règles de détermination actuelles du crédit
d'impôt pour la compétitivité et l'emploi de l’article 244 quater C du code général des impôts.
Il serait assis sur les rémunérations que les organismes versent à leurs salariés au cours de
l'année civile qui n'excèdent pas 2 fois et demie le SMIC calculé sur la base de la durée légale
de travail, augmentée le cas échéant des heures complémentaires ou supplémentaires de
travail, sans prise en compte des majorations auxquelles elles donnent lieu.
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III. Financement de la recherche de l’innovation
Un haut niveau de recherche publique et privée, fondamentale et appliquée, dans
toutes les sciences, est crucial pour la compétitivité économique du pays, pour son
développement culturel, social et pour faire face aux enjeux écologiques, aux problématiques
climatiques et de biodiversité. En outre, un enseignement supérieur démocratique et de qualité
est un facteur déterminant de réduction des inégalités.
Or, malgré son potentiel considérable, la France prend du retard dans ce domaine
depuis quelques années. La condition faite aux chercheurs dans notre société est notamment
devenue indigne de l'effort, de l'investissement personnel considérable réalisé par ceux qui se
destinent à cette profession et de ce qu'ils apportent à la nation. Dans un contexte international
devenu très concurrentiel, la France est dans la moyenne haute des pays développés avec
250 000 chercheurs en 2011 mais ne se positionne qu’en 12ème
position pour le nombre de
chercheurs par rapport à la population active. En outre, certaines disciplines voient leurs
effectifs baisser (notamment la Physique et certaines disciplines de Lettres-Sciences
Humaines et Sociales).
Par ailleurs, le taux de chômage des titulaires de doctorats est nettement plus élevé en
France que dans les autres pays de l'OCDE (10% en 2009). Nous sommes aujourd’hui
confrontés à la diminution constante de l’emploi scientifique pérenne et à la croissance rapide
de la précarité des jeunes docteurs. Ce contexte défavorable est à l’origine d’une diminution
très marquée du nombre de doctorants (-15% entre 2000 et 2011). Les scénarii tendanciels
(ministère de l’Education Supérieure et de la Recherche) confirment que cette diminution se
poursuivra si rien n’est entrepris.
Ces chiffres sont à mettre en rapport avec l’état dégradé de la recherche publique, Le
nombre de postes de chercheurs du CNRS aura ainsi été divisé par deux en six ans d’ici 2016.
La situation est pire encore en ce qui concerne les postes techniques. Entre 2010 et 2014, le
nombre de postes d’enseignants-chercheurs ouverts au concours par les universités a chuté de
26%, ouvrant la voie à des enseignements de moindre qualité dispensés par des doctorants. En
outre, ces perspectives, ainsi que les conditions d’accompagnement, tant financières
qu’universitaires, de ces étudiants, sont à l’origine d’une chute de 15,3% de leur effectif, de
départs à l’étranger et de prise de postes sans lien avec leur formation initiale.
Une véritable "réforme structurelle" devrait comporter un important volet consacré à
soutenir la recherche française et ses acteurs.
Cette réforme pourrait se décliner en trois priorités:
1) Priorité à la recherche
Il nous faut garantir une évolution des crédits budgétaires propres à satisfaire la
poursuite réelle des recrutements nécessaires et le bon fonctionnement des laboratoires,
des opérateurs publics, des centres de recherches et des universités. Une simple
sanctuarisation du budget de la recherche ne peut suffire à accompagner le coût croissant
des investissements nécessaires à sa réalisation. Cette garantie budgétaire pluri-annuelle
pourrait être largement financée par les sommes récupérées à l’occasion de la fusion des
dispositifs de Crédit d’impôt recherche (CIR) et de Crédit d’impôt compétitivité emploi
(CICE) – voire page 5.
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2) Simplifier les procédures de financement de la recherche.
Les acteurs de la recherche ont autant de raison que les chefs d'entreprise de se
plaindre d'une complexité administrative qui les détourne également au quotidien de leur
activité principale. Le système actuel est en effet très complexe : tutelles pour dotations de
base (CNRS, CEA, Universités, etc.), Agence nationale de la recherche (ANR), programmes
européens, Investissements d’avenir (IA), fondations, entreprises et d’autres encore
distribuent l’ensemble de l’argent de la recherche, provoquant la multiplication des dossiers et
des démarches. L’ANR qui existe depuis 2005 est tout particulièrement critiquée pour la
lourdeur de ses procédures. Une réforme du « mille-feuilles » administratif est donc
nécessaire.
En outre, le financement sur appels à projets génériques très largement pratiqué
aujourd’hui au détriment du "récurrent" des laboratoires et des projets blancs entrave la liberté
de la recherche indispensable à l’innovation.
3) Améliorer le financement privé de la recherche.
Le CIR est un outil qui a démontré une certaine efficacité pour stimuler la recherche
privée industrielle, mais son utilisation douteuse à des fins d'optimisation fiscale par nombre
de grands groupes a été bien identifiée et constitue un gâchis de ressources au détriment de la
recherche effective. Il conviendrait donc d'accéder à la demande de nombre de députés
socialistes d'amender le dispositif pour prévenir ces détournements et de le transformer en un
CICER, fruit de sa fusion avec le CICE, susceptible de prévenir les droits « doublons » de ces
deux dispositifs et d’en optimiser l’efficacité.
Pour développer l’emploi scientifique, une part du CICER devrait être conditionnée à
l’embauche par les grands groupes de docteurs ou doctorants. Des contrats permettant aux
entreprises de financer des thèses en contrepartie d’un engagement du doctorant à demeurer
dans l’entreprise permettraient également d'offrir des débouchés aux jeunes chercheurs tout en
sécurisant des petites et moyennes entreprises à la recherche de chercheurs à haut potentiel.
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IV. Poursuivre et amplifier la transition énergétique
Nous ne pouvons plus penser notre développement sans intégrer les enjeux
climatiques et écologiques. Nous ne pouvons construire l’économie d’aujourd’hui sans penser
l'énergie pour la mouvoir. La facture énergétique est un élément déterminant des coûts de
production de notre industrie et de la compétitivité de nos entreprises, particulièrement à
moyen et long termes. Et cela est bien secondaire face au coût humain et financier du
changement climatique ou de l’impact d’une crise nucléaire.
Le secteur énergétique français et, plus largement, européen, recèle un potentiel
d'innovation, de croissance et donc d'emplois aujourd'hui largement sous-exploité.
En ce sens, des engagements ambitieux ont été pris par le Président de la République
lors des premières conférences environnementales du quinquennat, en plus des engagements
de la France à 2020 au titre du paquet énergie-climat européen) :
-baisse des émissions de gaz à effet de serre de 40% en 2030 (par rapport à 1990), division
des émissions de gaz à effet de serre par 4 d'ici à 2050;
-amélioration de l’efficacité énergétique : réduction de 50 % de la consommation d’énergie à
horizon 2050, avec un objectif intermédiaire de -20 % en 2030;
-réduction de 30 % de la consommation de combustible fossile à l’horizon 2030;
-diversification du mix électrique : part des énergies renouvelables portée à 23 % en 2020 et à
32 % en 2030, réduction de la part du nucléaire à 50 % à l’horizon 2025.
La loi sur la transition énergétique, actuellement au Sénat, prévoit des outils pour atteindre
ces objectifs. Néanmoins, dans une perspective de "croissance et d'activité", il serait utile et
efficace à court et moyen terme de :
1) prévoir d'aller au-delà du doublement en trois ans du fonds chaleur, actuellement notre
outil le plus efficace (en tonnes équivalent pétrole –tep- par euro public investi) pour la
transition énergétique. Un fonds chaleur "illimité" tel qu'évoqué par la Ministre Ségolène
Royal serait un outil puissant.
2) relancer les plans de la Nouvelle France industrielle liés à la transition énergétique (voiture
2L/100, énergies renouvelables, avions électriques, TGV du futur, navires écologiques,
rénovation thermique des bâtiments, etc.)
3) positionner notre pays comme le laboratoire de l'éco-conception et de l'anticipation du
recyclage des produits : il s’agit d’anticiper la rareté de l’ensemble des ressources (naturelles,
énergétiques, mais également par exemple, le déclin des réserves mondiales de métaux).
L’enjeu de faire de la France un pays "zéro déchet" (c'est-à-dire où tous les déchets
deviennent des ressources) peut être obtenu par la mobilisation des politiques publiques et des
acteurs privés.
4) engager l'ensemble des opérateurs de production et de transport de l'énergie à ouvrir leurs
données pour permettre le développement d'innovations (start-ups, collectifs citoyens...) au
service des consommateurs et des collectivités locales dans leur rôle de planification (plans
énergie-climats).
5) questionner la gouvernance des réseaux de distribution de l'énergie, dont on connaît les
enjeux stratégiques. La légitime question technique (les difficultés que pose la gestion d'un
réseau avec de nombreux producteurs au regard de besoins plus "lissés" des consommateurs)
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ne saurait conduire à un dessaisissement démocratique de leur fonctionnement : les
collectivités territoriales pourraient, de même que pour les réseaux de transports, en être les
opérateurs.
6) proposer une contrepartie de développement de projets d'économies de ressources ou leur
duplication au CICER
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V. Déploiement accéléré des réseaux numériques à très haut débit.
Les investissements dans le numérique sont vitaux pour la troisième révolution
industrielle. Les entreprises, grandes ou petites, les villes, les services publics le savent et se
sont engagés massivement. Les besoins en débit pour l’internet fixe et mobile explosent.
La France a fait le choix pour le déploiement de ses grands réseaux du 21ème
siècle
(pour l’internet et les usages mobiles) d’un modèle mixte, alliant investissements privés et
initiative publique. Ce modèle peut être fécond s’il est loyal et si le dernier mot reste à
l’aménageur, c’est-à-dire à la puissance publique. Or, les intérêts des opérateurs et de leurs
actionnaires et ceux de nos territoires ne sont pas identiques.
A ce jour, la stratégie retenue pour cet immense chantier reste insuffisante pour
permettre le déploiement de la fibre optique en moins de dix ans sur l’ensemble du pays. La
couverture numérique universelle et le très haut débit par la fibre optique à domicile sont
devenus les conditions de l’attractivité des territoires, pour l’industrie, la distribution, les
services publics et la vie quotidienne des Français. La couverture du territoire à 100 mégabits
et plus répond aux besoins professionnels et privés qui s’accélèrent (usages fixes et mobiles).
Cette infrastructure est devenue la « nouvelle frontière » à atteindre pour l’égalité des
territoires.
Trois obstacles doivent être levés :
- les opérateurs privés peinent à tenir leurs engagements sur les agglomérations (objectif
2022 : 7 milliards d’euros d’investissements, 57% de la population en zones conventionnées) ;
- l’action trop dispersée des collectivités publiques freinent les réseaux d’initiative publique
(objectif 2022 : 13 milliards d’euros, 47% de la population) ; ces réseaux se déploient de
façon hétérogène, et la fracture numérique s’annonce très préoccupante.
- à la fibre optique, investissement durable, il est souvent préféré les technologies de montée
en débit, prolongeant avec l’argent public l’usage des réseaux anciens de France Télécom.
Les objectifs « fibre » pour 2017 et 2022 restent hors d’atteinte si une relance vigoureuse
n’est pas engagée.
Aussi, nous proposons de donner à notre pays une ambition numérique qui mette en
accord les discours et les choix :
1) la création d’un établissement public réunissant tous les niveaux d’action publique
pour affirmer une stratégie nationale réellement commune, piloter le déploiement du
Très haut débit (THD) sur l’ensemble du territoire, avec des contrats associant toutes
les collectivités à l’échelle des nouvelles régions. Intensifier ces investissements induit
une commande publique massive pour le génie civil, le BTP, l’industrie des télécoms,
etc.
2) la priorité effectivement donnée à la migration vers la fibre optique à domicile,
investissement durable ;
3) la mobilisation coordonnée de 2 milliards d’euros par an d’investissements publics
(subventions Etat et collectivités, prêts à long terme, financements européens), dans le
cadre de modèles économiques viables.
Des dizaines de milliers d’emplois sont l’enjeu à court terme de ce programme. Dans
la durée, c’est l’aménagement numérique du territoire qui redonnera une vitalité nouvelle à de
très nombreux territoires urbains et ruraux. C’est un enjeu de compétitivité à réussir en
construisant un patrimoine commun.
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VI. L’urgence d’une mobilisation globale pour le logement
Le logement en France se caractérise par l'oxymore d’une « crise qui dure », avec un
décrochage depuis les années 2000 entre le prix des logements, dans l’accession comme dans
la location, et les revenus de nos concitoyens. Cet état de fait pèse sur les conditions de vie
des ménages -pas uniquement les plus modestes- et met en difficulté de nombreuses
entreprises de la filière du bâtiment. De plus, cette difficulté à se loger pour nombre
d'habitants est un handicap pour la compétitivité de notre pays, en étant un frein à la mobilité
professionnelle, une pression supplémentaire sur les salaires et les revenus des ménages et un
manque de finances disponibles à injecter dans l'économie. Engager une mobilisation
effective pour construire en nombre des logements adaptés aux revenus des habitants est une
priorité.
C'est aussi une source importante d’inégalités au sein de la société française, encore
accrues dans la dernière période :
- inter-générationnelle : les jeunes primo-accédants sont les premières victimes d'un
« pouvoir d'achat immobilier » divisé par deux en termes de surface sur 15 ans dans les zones
tendues ;
- intra-générationnelle : celle-ci est aggravée par le durcissement des conditions de prêts
et la fragilité accrue des parcours professionnels et personnels ;
- territoriale : suivant les quartiers d'habitation, avec un sentiment d'assignation à
résidence, que ce soit dans les quartiers de banlieue, périurbains ou de centres-bourgs ruraux
dévitalisés. Une partie de l’offre de logements qui s'est beaucoup développée en France,
engendre une forme de ghettoïsation par le haut la société française ;
- professionnelles : en repoussant toujours plus loin des centres urbains celles et ceux
qui n'ont pas les moyens d'habiter au plus près de leur lieu de travail, avec un étalement
urbain parfois entretenu par des décisions publiques ou privées d'aménagement.
Les prix dans l'immobilier ont fortement augmenté durant les années 2000, sans baisser
depuis, contrairement aux pays voisins. Il est vrai que la conjugaison d'une population qui
continue d'augmenter, d'évolutions sociologiques (durée de vie, composition des ménages,...),
de la métropolisation du territoire non régulée par des politiques volontaristes et coordonnées
en termes d'aménagement et de logement, n'a pas trouvé de réponse à la hauteur. Il faut
ajouter à cela un phénomène de repli sur soi et de refus de toute construction dans certains
quartiers, d’autant plus lorsqu’il s’agit de logement sociaux, phénomène entretenu dans de
nombreuses villes par des élus UMP et UDI lors des élections municipales avec des messages
électoraux limpides, mais aux effets désastreux : « votez pour moi, rien ne se construira ; il
n'y aura pas de mixité d'habitat et aucun logement social ne sera prévu dans les quartiers qui
en sont dépourvus » !
Construire des logements socialement accessibles au plus grand nombre et
équitablement répartis sur le territoire est une nécessité, construire plus de logements, plus
vite et moins cher est un objectif réalisable. Devant l'éparpillement des responsabilités et la
puissance de certains lobbies à courte vue, seul l’État régulateur peut aujourd'hui tenir cette
parole forte et déterminée de mobilisation pour le logement : il le peut, il le doit et cela fait
défaut aujourd’hui. Cette parole doit se traduire par l’engagement d’une nouvelle organisation
de l’action publique et des moyens juridiques et financiers allant en ce sens.
Il s'agit de lutter pour mobiliser effectivement tout le foncier utile disponible, mettre
chacun devant ses responsabilités en luttant contre la rente immobilière et foncière, sans
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renoncer à nos engagements de régulation pris en 2012 et, notamment, ceux votés par la
Gauche dans la loi ALUR.
1) Mobiliser efficacement du foncier privé… : sur les terrains constructibles en zone
tendue, créer une obligation à construire dans un délai imparti, assortie soit d'une sanction
fiscale (taxation du terrain sur le montant de sa valeur vénale), soit d’une cession totale ou
partielle des droits à construire (portage foncier ou bail à construction dans lequel le
propriétaire cède l'usufruit, notamment à un bailleur social ou pour du logement
intermédiaire) ;
2) … et du foncier public : la loi votée en janvier 2013 doit être mieux appliquée, par une
action résolue des préfets et la systématisation de l’intéressement des propriétaires publics au
résultat des opérations de construction afin de les encourager à céder leurs terrains. Des
opérations prévoyant une dissociation définitive du foncier et du bâti pourrait être fortement
engagées sur ces terrains ;
3) En Ile-de-France, mettre en place d'un délégué interministériel à la construction : au
vu de la situation particulière du logement dans cette région (à envisager également en
PACA), avec le rôle de faciliter, encourager ou débloquer les projets de construction, en
utilisant tous les outils à sa disposition. De plus, en attendant que la future Métropole du
Grand Paris soit opérationnelle, engager rapidement l’adoption du Schéma régional de
l’habitat et de l’hébergement qui serait prescriptif et élaboré par le Comité régional (CRHH) ;
4) Donner aux intercommunalités des responsabilités supplémentaires en matière
d'urbanisme et de logement sous la forme de contrats d'objectifs et de moyens avec l’État liant
fortement leurs dotations avec des objectifs ambitieux de construction, facilitant l’acceptation
de nouveaux habitants dans un quartier par une meilleure qualité de vie pour tous. Sur les
terrains nus ou à démolir, les intercommunalités auraient la responsabilité d’encourager la
construction au maximum des possibilités offertes par le Plan local d’urbanisme (PLU), sous
peine de contraintes pour le propriétaire. Sur les terrains peu bâtis, elles pourraient engager
des échanges avec le propriétaire, soit pour aller vers le plafond de constructibilité, soit pour
l’inciter à en vendre une partie pour construire ;
5) Modifier la taxation de la rente immobilière par une refonte rapide des valeurs
locatives, en différenciant la situation des propriétaires occupants et celle des propriétaires
bailleurs ;
6) Suspendre pendant une durée limitée l'abattement fiscal de 30 % sur la résidence
principale dans le cadre de l'ISF et la contribution de solidarité urbaine pour des prix de
cession allant au-delà de 10 000€/m2
pour financer la construction de logements socialement
accessibles. De même, une mobilisation de l'épargne privée disponible, en particulier de
l’assurance vie, en faveur de la construction, est aujourd’hui nécessaire ;
7) Encourager les reconstructions ou réhabilitations par un partage de droits à construire
supplémentaires entre collectivités et propriétaires dans les quartiers anciens dégradés ;
8) Développer l'accession sécurisée à la propriété pour les primo-accédants : recours
étendu à la location-accession, dissociation foncier/bâti, prime spéciale pour les ménages
modestes ;
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9) Traiter les recours contre les permis de construire : lors de recours manifestement
abusifs, rendre possible des jugements en référé sous deux mois. Lorsque l'intérêt à agir est
reconnu, créer une chambre amiable paritaire avant renvoi au tribunal pour rechercher sous
six mois un accord entre les parties ;
10) S’engager dans une production de logements facilement adaptables aux difficultés de
mobilité à mettre en regard de l'obligation actuelle d'accessibilité de tous les logements, en
lien avec les associations spécialisées ; encourager fiscalement dans l'habitat collectif des
formes participatives et de cogestion des espaces (buanderie ou chambre d'ami partagées) afin
de diminuer le prix total de l'opération.
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VII. Faire le choix de l’investissement social
Faire le choix de l’investissement social, c’est faire de notre protection sociale et de
nos droits sociaux les racines d’investissements et de progrès durables.
Une réforme structurelle impliquerait la mise en œuvre d'une stratégie ambitieuse et
durable d'investissement social, autour de droits collectifs mis en œuvre pour et avec nos
concitoyens. Il y a, à la clé, des enjeux sociaux, économiques et démocratiques majeurs. Il
s'agit d’être porteur d’un projet de société mobilisateur, vecteur de cohésion sociale,
permettant de concilier parcours individuels et protections collectives, et d’imaginer les
nouvelles conquêtes sociales que la Gauche mettra en œuvre au 21ème siècle. Il s'agit
également de comprendre que les grands défis économiques et sociaux de notre temps ne
pourront être véritablement relevés sans la mise en œuvre de cette stratégie.
Santé, assurance chômage, éducation/formation, accompagnement de la perte
d'autonomie, conciliation vie privée/professionnelle, etc. Tous ces sujets sont concernés, et
nécessitent une réflexion sur l'évolution dans son ensemble (et non pas branche par branche,
ou secteur après secteur) de notre système de protection sociale : financement, gouvernance,
droits collectifs garantis, etc.
Mais dans un premier temps, une politique publique beaucoup plus affirmée devrait
être mise en œuvre sur deux sujets spécifiques, essentiels pour notre avenir : l'accueil de la
petite enfance et la formation professionnelle.
1) Concrétiser un service public de la petite enfance
Développer un service public efficace pour la petite enfance, c’est agir pour l’égalité
au moment le plus décisif.
-entre les enfants : l'accueil précoce est reconnu comme un vecteur d'amélioration des
capacités d'apprentissage, en particulier pour les enfants issus des milieux les plus
défavorisés.
-entre les femmes et les hommes : l'absence de mode de garde est une cause majeure
du non-emploi des femmes. Accueillir les jeunes enfants est donc une condition de la
pérennisation de notre modèle économique et de la progression de l’égalité entre les sexes.
-entre les familles : s’adapter aux familles nécessite de diversifier les modes d’accueil
(crèches, garderies, assistantes maternelles, etc.) tout en recherchant la continuité avec l’école
maternelle, notamment pour les moins de 3 ans. L’inclusion sociale et culturelle des familles
les plus en difficulté, mais également l’avenir de chaque enfant, nécessitent qu’elles se sentent
légitimes à l’accès à ces services, y compris lorsque l’un ou les deux parents sont sans emploi.
Notre majorité s'est fixée l'objectif ambitieux de réaliser en cinq ans une augmentation
de 20% du nombre de places d'accueil de jeunes enfants (+ 275 000), mais le Haut Conseil de
la Famille a révélé qu'en 2013, seul un quart des objectifs fixés pour l'année avait été atteint
(en comptant les places en crèches, les places auprès d’assistant(e)s maternel(le)s, et les
places en écoles maternelles pour les moins de 3 ans). Les explications avancées par la CNAF
pointent, notamment, les craintes et les difficultés des communes, du fait de la baisse des
dotations des collectivités locales. Le gouvernement a, heureusement, décidé de mettre en
place en 2015 une aide exceptionnelle à la subvention pour toute nouvelle place en crèche
créée. Toutefois, cela ne permettra pas d’atteindre les objectifs qui permettraient à chaque
parent le nécessitant de bénéficier d’une solution de garde, d’autant plus qu’il faut également
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financer de nouvelles places en maternelle, des formations de personnels… Tout en travaillant
à la meilleure qualité de l’accueil offert. Des moyens plus massifs doivent être dégagés pour
agir directement, années après années, sur la concrétisation de ce service public de la petite
enfance.
2) Faire de la formation professionnelle un puissant levier pour l’émancipation et la
compétitivité
Le développement de la formation professionnelle continue recouvre deux enjeux
primordiaux.
-l’enjeu économique : une politique massive d’élévation du niveau de qualification des
salariés est essentielle pour améliorer la compétitivité des entreprises, assurer la place de la
France dans la mondialisation, faire face à des défis comme la révolution numérique ou la
mise en œuvre de la transition écologique,,permettre l’évolution et la progression des
carrières, nécessaires à une adaptation des travailleurs au marché de l’emploi.
-l’émancipation des individus : la société doit se fixer l’objectif d’un droit pour chacun
à connaître une évolution sociale et professionnelle choisie, tout en garantissant une
sécurisation des parcours.
La réforme de mars 2014 a été porteuse d’avancées, avec notamment la mise en place
du Compte Personnel de Formation (CPF), individualisé et portable, entrant en vigueur au 1er
janvier 2015. Son application, dans l’intégrité du dispositif adopté par la représentation
nationale, permettra la mise en œuvre d’une première étape décisive.
Néanmoins, pour consolider de nouveaux droits effectifs, il ne faut pas en rester là: la
gouvernance du système doit encore être améliorée et simplifiée, pour permettre à tous un
accès effectif. Le plafond de 150h de formation associé au CPF doit être supprimé, pour
permettre de garantir un abondement plus important pour celles et ceux qui en ont besoin3.
L’enjeu de mobilisation de moyens à la hauteur des besoins demeure devant nous :
des financements supplémentaires, dont des financements publics, devront être déployés, non
seulement pour la formation des demandeurs d'emploi et des chômeurs de longue durée, mais
bien pour la formation de tous les salariés. Le coût de la formation, sur la base d’un million de
formations réalisées dans l’hypothèse où chaque salarié utiliserait deux fois son CPF au cours
de sa carrière, étant évalué à 6 milliards d’euros annuels4, nous restons, aujourd’hui, loin du
compte.
3 Selon l’INSEE, les formations qualifiantes et diplômées durent en moyenne 450 heures 4 Rapport de Marc Ferracci et Bertrand Martinot pour l’Institut Montaigne