Credit Agricole SADirection des Risques du GroupeGroupe de Recherche Operationnelle1
Modelisation du risque de creditDEA de Statistique et Modeles aleatoires en economie et finance
Universite Paris 7 â Universite Paris 1
David KURTZ2 & Thomas B. PIGNARD
Mots-clefs : Risque de credit, modeles structurels, modeles a forme reduite, copules,produits derives de credit.
1 Le Centorial, 18 rue du 4 septembre, 75002 [email protected]
Table des matieres
1 Introduction 91.1 Zoologie des risques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101.2 Enjeux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111.3 Modeles du risque de credit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
2 Produits derives de credit 152.1 Le marche des produits derives de credit . . . . . . . . . . . . . . . . . 152.2 Les obligations risquees . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 172.3 Credit default swap . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 182.4 Les Basket Default Swaps . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 212.5 Collateralized Debt Obligations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
3 Introduction aux modeles structurels 273.1 Modele de Merton . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 273.2 Modeles de premier instant de passage . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35
4 Modeles a forme reduite 414.1 Preliminaires mathematiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 414.2 Evaluation des actifs risques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47
5 Defauts correles 535.1 Produits derives sur un panier de credits . . . . . . . . . . . . . . . . . 545.2 Correlation dans les modeles structurels . . . . . . . . . . . . . . . . . 565.3 Correlation des intensites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 575.4 Correlation des instants de defaut . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58
6 Modele Hybride : le cas des obligations convertibles 656.1 Caracteristiques des obligations convertibles . . . . . . . . . . . . . . . 65
6.1.1 Definition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 656.1.2 Utilisation des obligations convertibles . . . . . . . . . . . . . . 66
8 Table des matieres
6.1.3 Obligations convertibles et options . . . . . . . . . . . . . . . . 666.1.4 Les determinants du contrat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 676.1.5 Influence des variables de marche sur le prix . . . . . . . . . . . 67
6.2 Modelisation du risque de credit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 686.3 Implementation des modeles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69
6.3.1 Les arbres multinomiaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 706.3.2 Les equations aux derivees partielles . . . . . . . . . . . . . . . 716.3.3 Synthese des obligations convertibles . . . . . . . . . . . . . . . 72
A Theorie generale des processus 77A.1 Generalites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77A.2 Temps dâarret et tribus associees . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78A.3 Les tribus optionnelles et previsibles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79A.4 Temps dâarret previsibles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79A.5 Classification des temps dâarret . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 80
B Formule dâIto avec sauts 83B.1 Processus a variation finie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83B.2 Les semimartingales simples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 87
C Rappel sur les diffusions 93C.1 Definitions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93C.2 Diffusions avec sauts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 94C.3 Diffusion affine avec des sauts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 96
D Les fonctions copules 99D.1 Definitions et exemples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 99D.2 Les copules archimediennes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101
E Demonstration du Lemme 3.1 105
CHAPITRE 1
Introduction
Ces notes constituent le support dâun cours de DEA concernant la modelisationdu risque de credit. Les deux principales sources qui ont servi de base a lâecriture dece texte sont [11] et [2].
Le but de ce cours est de presenter quelques outils et concepts qui peuvent servirde base a la modelisation du risque de credit ; il est plus specifiquement oriente vers lavalorisation des produits dont la valeur depend du risque de credit auquel il est expose.Les modeles et techniques presentes peuvent neanmoins etre utilises aussi bien pour lamesure que pour lâevaluation du risque de credit 1. Les avancees theoriques autour dela modelisation du risque de credit est lâun des facteurs qui ont rendu possible lâessordâun marche des produits derives de credit.
Le developpement du marche des produits derives de credit, qui a atteint cetteannee un encours total dâenviron 2300 milliards de dollars, a revolutionne en retour lagestion du risque de credit ainsi que lâingenierie financiere qui lui est liee. Les gestion-naires de portefeuille et les investisseurs disposent desormais dâinstruments financierspermettant le transfert efficace du risque de credit. Dâapres Alan Greenspan, la diffu-sion2 des risques que genere ce marche des produits derives de credit augmenterait laresistance de lâeconomie mondiale aux chocs systemiques comme lâaurait prouve sonbon comportement face aux recentes faillites dâEnron et de WorldCom.
Dans ce chapitre introductif et apres avoir rappele quels sont les principaux risquesauxquels sont confrontes les institutions financieres, nous expliquons quels sont lesenjeux de la modelisation du risque de credit. Nous presentons alors, brievement, lesdeux grandes classes de modeles du risque de credit : les modeles structurels et lesmodeles a forme reduite.
1Autrement dit, ces techniques servent aussi bien sous la probabilite historique que sous uneprobabilite risque-neutre.
2et donc la mutualisation
10 Introduction
1.1 Zoologie des risques
On distingue traditionnellement quatre grands types de risques financiers [11] :
1. Le risque de marche.
Le risque de marche peut se definir comme le risque de perte lie aux variations desconditions de marche (prix, taux, taux de change, volatilites, etc...)
2. Le risque de credit.
Le risque de credit est defini comme le risque de perte lie a lâevolution de la qualitede la signature dâun emetteur. On peut distinguer deux types de risque de credit :le risque de contrepartie et le risque de reference. Pour un emetteur donne, ce risquepeut se materialiser sous la forme
â du changement de sa note (upgrade ou downgrade) telle celle emise par lesgrandes agences de notations Moodyâs et Standard & Poorâs,
â dâune variation de son spread de credit,â dâun evenement de credit (credit event) tel le defaut de paiement ou la restruc-
turation de sa dette.Ces trois risques sont, bien evidemment, correles. Une augmentation brutale du niveaudu spread emetteur augmente la probabilite dâun evenement de credit. De la mememaniere, un changement de notation influe fortement sur la probabilite du defaut dâunemetteur.
Lorsque A entre en relation avec une contrepartie B via un instrument financier, ilpeut etre soumis au risque que B soit dans lâimpossibilite dâhonorer ses engagements.Par exemple, si A est en possession dâune obligation emise par B, il court le risquequâa maturite B ne puisse lui rembourser le capital investi. On parle dans ce cas derisque de contrepartie unilateral puisque B nâest pas soumis au risque de credit de A.Si A et B sont les deux contreparties dâun swap, ils sont tout deux soumis au risquede contrepartie : on parle alors de risque de contrepartie bilateral.
Supposons maintenant que la qualite de la signature des contreparties A et Bsoit de qualite infinie (de sorte que le risque de contrepartie bilateral soit nul). Lesparties A et B peuvent entrer dans un contrat qui fait intervenir le risque de creditdâune troisieme contrepartie C3. Le risque de credit associe a C est appele risque dereference. Nous verrons que le but des produits derives de credit est le transfert de cerisque de reference.
La distinction entre ces risques nâest pas toujours aisee : le risque de credit lie ala variation des spread de credit default swap peut etre considere comme un risquede marche. Les portefeuilles de produits derives OTC sont, bien evidemment, soumisaux risques de marche mais ils sont aussi exposes au risque de contrepartie.
3. Le risque de liquidite.
Il sâagit, pour une entreprise, du risque de ne pas pouvoir mobiliser a un instantdonne assez de liquidites pour pouvoir faire face a ses engagements. Voir [11] pour unsupplement dâinformation.
4. Le risque operationnel.
3un credit swap dont le payoff depend de lâoccurrence dâun evenement de credit est un exemplede tel contrat.
1.2 Enjeux 11
Dans cette categorie sont regroupes, par exemple, les risques de fraude, dâerreursdes operateurs, de pannes des systemes, etc... Pour plus de details, voir [26].
1.2 Enjeux
Le risque de credit peut etre defini, en premiere approximation, comme le risquede perte lie au changement de la qualite de la signature dâune contrepartie. Toutesles institutions financieres (ainsi que tout les acteurs du marche) accumulent unegrande quantite de risque de credit : soit directement par lâintermediaire de leursportefeuilles de creances, soit indirectement sous la forme de risques de contrepartiedans leurs portefeuilles dâactifs et de produits derives OTC.
Lâenjeu que represente la modelisation de ce risque est donc tres important : ilsâagit de pouvoir
â mesurer le risque de credit contenu dans les portefeuilles,â evaluer les instruments financiers sensibles au risque de credit et, plus
generalement, tout instrument expose a ce risque (risque de contrepartie),et ce a un niveau agrege. Il est, en effet, important de pouvoir controler lâexposition aurisque de credit contrepartie par contrepartie ainsi que lâevolution de cette expositionpar secteurs geographiques et industriels. De telles pratiques permettent, par exemple,de reduire le risque de concentration.
La production de resultats quantitatifs robustes permet alors a lâinstitutionconcernee
â dâallouer a chaque centre de profit un capital economique adequat,â dâevaluer la performance des centres de profit au regard des risques pris,â de fournir des informations fiables sur son integrite financiere aux regulateurs,
aux investisseurs et aux agences de notation,â de diversifier et reduire le risque en imposant, par exemple, des limites a lâex-
position au risque de credit par contrepartie.La mise en place de tels processus de gestion du risque correspond a lâevolution de lareglementation prudentielle et aux trois piliers du nouvel accord de Bale (sur ce sujet,nous renvoyons le lecteur a [26] pour plus de details).
1.3 Modeles du risque de credit
Dans cette section, nous exposons les approches classiques de la modelisation durisque de defaut a partir de lâetude du concept central dâobligation zero-coupon risquee(câest-a-dire soumise au risque de defaut). Il existe deux grandes familles de modelesdâevaluation de la dette risquee :
â les modeles structurels,â les modeles a forme reduite.
Nous mentionnons aussi les modeles de correlation dâinstants de defaut qui sontnecessaires a lâevaluation des produits derives exotiques de credit ainsi que les modelesdit hybrides dont le but est de permettre lâevaluation precise du risque de contrepartiedes portefeuilles de produits derives OTC.
12 Introduction
Dans la suite, nous nous placons dans le cadre de lâevaluation risque-neutre desactifs financiers : nous supposons donnes un espace probabilise filtre (Ω, F, P, (Ft)tâ„0)sur lequel est defini le processus des taux dâinteret instantanes (rt)tâ„0 et une probabi-lite risque-neutre Pâ. Rappelons quâalors la valeur des actifs contingents4 est calculeecomme lâesperance sous cette probabilite de ses flux futurs actualises au taux sansrisque.
Une obligation zero-coupon (sans risque) est un actif qui paye 1 a sa maturite T .La valeur B(t, T ) de cet actif est
B(t, T ) = Eât[exp
(â
â«T
t
r(s) ds)]
.
Si le risque de contrepartie de lâemetteur du zero-coupon nâest pas nul, lâevaluation duzero-coupon doit tenir compte de la possibilite du defaut de celui-ci : deux nouveauxrisques entrent en jeu
â lâinstant du defaut,â la perte en cas de defaut (Loss Given Default).
La perte en cas de defaut sâexprime en terme dâun taux de recouvrement ÎŽ eventuelle-ment aleatoire et dâune hypothese de recouvrement. Noter que ces hypotheses derecouvrement, que nous presentons maintenant, sâetendent immediatement a dâautresactifs que les zero-coupons risques. Nous notons D(t, T ) la valeur en t du zero-couponrisque de maturite T et Ï lâinstant du defaut de lâemetteur de ce titre.
Lâhypothese de recouvrement la plus courante sâappelle fractional recovery of parvalue et consiste en le recouvrement a lâinstant du defaut dâune fraction ÎŽ du nominaldu titre. Dans ce cas, on a
D(t, T ) = Eât[eâ
â«Tt r(s) dsIÏ>T + eâ
â«Ït r(s) dsÎŽIt<Ïâ€T
].
Si, en cas de defaut, la fraction recouvree lâest a maturite, on parle de fractionalrecovery of Treasury value. Dans ce cas, on a
D(t, T ) = Eât[eâ
â«Tt r(s) ds
(IÏ>T + ÎŽIt<Ïâ€T
)].
Une autre hypothese classique dite fractional recovery of market value suppose quâalâinstant de defaut le proprietaire du titre percoit une portion ÎŽ de la valeur precedantimmediatement le defaut. Dans ce cas
D(t, T ) = Eât[eâ
â«Tt r(s) dsIÏ>T + eâ
â«Ït r(s) dsÎŽD(Ïâ, T )It<Ïâ€T
],
ou D(Ïâ, T )5 est la valeur avant defaut de lâinstrument considere.
Modeles structurels
Lâapproche structurelle de lâevaluation de la dette risquee a ete initiee par Merton(1974) [21] et est basee sur la modelisation de lâevolution du bilan de lâentreprise. Dans
4câest-a-dire dont la valeur est contingente a lâevolution des conditions de marche.5Si f est une fonction a valeurs reelles, nous notons f(tâ) la limite limsât,s<t f(s).
1.3 Modeles du risque de credit 13
ce cadre, le defaut intervient si lâemetteur de la dette est dans lâimpossibilite dâhonorerses engagements et les zero-coupons risques apparaissent comme des produits derivessur la valeur de lâentreprise emettrice de cette dette. La qualite dâune signature estalors fonction de trois variables fondamentales : sa valeur, la variabilite de ses actifs6
et son levier dâendettement (qui est le rapport entre le niveau de sa dette et sa valeurtotale).
Les modeles structurels sont largement utilises par les praticiens. Pour sâenconvaincre, il suffit de mentionner lâentreprise Moodyâs KMV7 qui a developpe uneoffre complete de services financiers bases sur un tel modele. Ainsi, ils proposent aleurs clients des outils dâanalyse et leur fournissent des donnees (telles des estimationsde probabilites de defaut) obtenues a partir de leur modele [4].
Dans le chapitre 3, nous etudions le modele de Merton ainsi que son extension auxmodeles dits de premier instant de passage. Nous mettrons en avant les liens existantentre le risque equity et le risque de credit.
Modeles a forme reduite
Cette approche de lâevaluation de la dette risquee qui remonte a [24] a ete popu-larisee par de nombreux travaux et en particulier lâarticle [10].
Dans les modeles dits a forme reduite, et contrairement aux modeles structurels,le defaut est considere comme un evenement imprevisible dont la loi est gouverneepar un processus stochastique appele intensite dâarrivee ou taux de hasard . Lâexemplele plus simple dâun tel modele est celui ou lâinstant de defaut Ï est defini comme lepremier instant dâarrivee dâun processus de Poisson dâintensite λ8. Dans ce cas, on a
P[Ï > t] = eâλt, E[Ï ] =1
λ, P[Ï â (t, t + ât)|Ï > t] = λât + o(ât).
En pratique, on peut faire dependre cette intensite de defaut dâun certain nombre devariables economiques (tels les taux dâinteret) et/ou de variables liees a lâentreprise(telle sa notation). Noter que ces modeles sont couramment utilises pour lâevaluationdes produits derives de credit.
Dans le chapitre 4, nous generalisons considerablement le modele poissonnien :nous traitons le cas general ou lâintensite de defaut est un processus stochastique endonnant un sens precis a lâexpression
Pt
[Ï â (t, t + dt]
âŁâŁÏ > t]
= λt dt.
Nous verrons que lâintensite de defaut λ est intimement liee au spread emetteur court-terme s. Plus precisement, nous montrerons que sous lâhypothese de recouvrementfractional recovery of market value, on a
s(t) = (1â ÎŽ)λ(t),
6Par exemple, cette volatilite est plus forte pour une entreprise travaillant dans le secteur desnouvelles technologies que pour une entreprise des secteurs traditionnels.
7www.moodyskmv.com.8Autrement dit, Ï suit une loi exponentielle de parametre λ > 0.
14 Introduction
ou ÎŽ est le taux de recouvrement de lâobligation consideree. Cette egalite fondamentaleest connue sous le nom dâegalite du triangle.
Defauts correles
Lâevaluation des produits derives de credit exotiques9 tels les CDO10 et les TDP11
necessitent la modelisation de la structure de dependance qui existe entre les instantsde defaut (Ï1, . . . , ÏN) de N entreprises.
Il existe, pour lâessentiel, deux manieres de modeliser cette dependance :â en choisissant une structure de co-dependance pour les rendements instantanes
des processus de valeur des entreprises,â en specifiant la correlation entre les intensites des instants de defaut.
Ces questions seront abordees en detail dans le chapitre 5. Nous y presentons aussiquelques applications concretes de ces techniques.
Modeles hybrides
Lâevaluation du risque de contrepartie ou celle de produits mixtes12 necessite lamise en place de modeles prenant en compte lâevolution jointe de differents facteursde risque : les taux dâinteret, les taux de change, les cours des actions, lâintensite dedefaut des entreprises. Nous donnons un exemple de tels modeles dans le chapitre 6consacre aux obligations convertibles.
9Par opposition aux produits vanilla que sont les Credit Default Swap.10Collateralized Debt Obligations.11Tranche Default Product.12câest-a-dire dont la valeur depend de plusieurs facteurs de risques.
CHAPITRE 2
Produits derives de credit
Dans ce chapitre, nous presentons les principaux derives de credit. Nous y decrivonsleurs payoffs et donnons quelques indications sur leur interet financier.
Apres un rapide etat des lieux du marche des derives de credit, nous decrivons lescaracteristiques du Credit Default Swap (CDS), qui constitue le produit a la vanille dece marche. Les CDS sont a la base de produits exotiques plus complexes, et sont utilisesa la fois en tant que produits de couverture (diversification du risque, couverture dâunrisque en preservant la relation commerciale, reduction du risque de concentration,transfert du risque de credit (balance sheet CDO),...), et dâinvestissement (long dâunrisque de credit a lâaide dâun instrument hors-bilan, effets de levier, creation de positionde credit synthetique (CDO synthetiques),...). Enfin, nous presentons les produits decorrelation les plus courants : les nth-to default, et les Collateralized Debt Obligations(CDO).
Dans la suite, r designe le taux sans risque, B le processus t 7â exp(â«t
0r(s) ds
)et
Ï lâinstant de defaut dâune entreprise.
2.1 Le marche des produits derives de credit
Le marche des produits derives connaıt une croissance exponentielle depuis le debutdes annees 1990. Pour fixer les idees, precisons tout de suite que le nominal total desencours sur produits derives de credit est de 2306 milliards de dollars (Risk Magazine2003) en augmentation de plus de 50% par rapport a lâannee derniere. La standar-disation des CDS est devenue une realite grace aux nouvelles normes et definitionsmises en place par lâISDA1 [16]. Lâannee 2003 a ete marquee par les faits suivants :generalisation de lâutilisation des produits synthetiques, accroissement de la liquiditesur les produits de correlation (cotation bid-ask de tranches synthetiques), croissance
1International Swap & Derivatives Association.
16 Produits derives de credit
du marche des credit default swaptions (credit option). Ils reste, cependant, de nom-breux problemes a resoudre. Citons, par exemple, le besoin de liquidite sur le courtet le long terme de la courbe de credit qui se fait parfois sentir et les methodologiesde calibration de taux de recouvrement qui demandent a etre ameliorees.
Lâessentiel de lâencours se repartit sur : les credit default swaps (73%) et les pro-duits sur paniers de credit (22%), en particulier, les nth-to-default swap a hauteurde 0.3% et toutes les transactions synthetiques tels les CDO (Collateralized Debt Obli-gations) et les TDP (Tranche Default Product). Le reste de lâencours est constitue deCredit Linked Notes, de Total Rate of Return et de Spread Option.
Total agrégé des encours sur produits dérivés de crédit
Credit Default SwapsPortfolio TransactionTotal Return SwapsCredit Linked NotesCredit Spread OptionsDivers
Fig. 2.1 â Repartition des encours sur produits derives de credit.
Le marche vanilla (celui des credit default swaps) est essentiellement concentresur lâAmerique du nord et lâEurope. Le point de plus grande liquidite est celui desCDS de maturite comprise entre 4 et 6 ans sur des signatures investment grade. Cetterepartition geographique est interessante compte tenu du fait quâelle ne correspond pasa celle des obligations (la proportion dâobligations europeennes est significativementplus faible). La croissance de ce marche est en partie due a la demande toujours plusforte de produits permettant de couvrir les positions synthetiques (CDO).
Les banques sont les principales utilisatrices de produits derives de credit. Ceciest du a leur utilisation massive des CDS pour couvrir leurs portefeuilles de creanceset leurs positions synthetiques2. Lâactivite de couverture engendree par lâemission deCDO synthetiques a, pour la premiere fois, permis de satisfaire a la demande dâachatde protection provenant des gestionnaires de portefeuille de creances. Les principauxinvestisseurs dans les positions synthetiques restent les compagnies dâassurance : ellesdetiennent 65% des TDP et 81% des CDO de bilan3. Les hedge funds participentdesormais activement a ce marche : ils sont, par exemple, regulierement acheteurs de
2Une position synthetique est une position de credit courte ou longue (câest-a-dire acheteuse ouvendeuse de protection) obtenue a partir dâun portefeuille de CDS donc sans pret effectif de capital.
3Ces produits sont emis par les banques qui veulent couvrir le risque de credit de leur portefeuillede creances en vue de reduire leur charge en capital economique.
2.2 Les obligations risquees 17
Répartition des utilisateurs de produits dérivés de crédit
Bank Insurance Re-Insurance Hedge Funds Asset Managers Corporates SPV
Fig. 2.2 â Repartition des utilisateurs de produits derives de credit.
CDS pour leur activite dâarbitrage dâobligations convertibles.
2.2 Les obligations risquees
Outre les prets traditionnellement accordes aux entreprises, une part importantedu marche de la dette risquee consiste en obligations emises par les entreprises etcertains etats. Contrairement aux prets, les obligations sâechangent sur les marchesorganises et sont ainsi soumis au risque de marche (risque de taux), au risque de credit(risque de contrepartie) et, dans une certaine mesure, au risque de liquidite.
Le rendement de ces obligations est, en general, superieur au rendement dâobliga-tions identiques dont le risque de contrepartie est considere comme nul (par exemple,les obligation du Tresor pour les pays de lâOCDE). La difference de rendement ouspread est une prime demandee par le marche pour prendre en charge les risques decontrepartie et de liquidite4 inherents a lâinstrument. On distingue, pour un emetteurdonne, le spread calcule a partir dâobligations a taux fixe de celui cote dans les obli-gations a taux variables.
Noter que les obligations peuvent presenter des caracteristiques particulieres : ellespeuvent etre rappeles par lâemetteur avant maturite (callable bond), etre convertibleen actions (convertible bond).
4En pratique, il est difficile de modeliser le risque de liquidite. On considere souvent, en premiereapproximation, quâil est pris en compte dans le spread de credit.
18 Produits derives de credit
2.3 Credit default swap
Description du produit
Le credit default swap (CDS) est le plus simple des produits derives de credit etdoit etre considere comme la brique de base (ou le sous-jacent) des produits derivesplus exotiques.
Le CDS permet le transfert de risque de credit de reference dâune entreprise C(entite de reference) entre deux contrepartie A et B. Dans le contrat standard, lâunedes parties en question, disons A, achete une protection contre le risque de perte encas de defaut de lâentite de reference C. Ce defaut est declenche par un evenement decredit formel specifie dans le contrat. Cet evenement peut etre la faillite de lâentreprise,un defaut de paiement ou la restructuration de sa dette.
La protection est valable jusquâa la maturite du swap. En echange de cette pro-tection, lâacheteur A verse periodiquement (en general, tous les 3 mois) au vendeurB une prime et ce jusquâau defaut de C ou jusquâa maturite du swap. La jambe duswap correspondante est appele premium leg .
Si le defaut intervient avant la maturite du swap, le vendeur de protection effectueun paiement a lâacheteur de protection. Ce paiement equivaut a la difference entrele nominal de la dette couverte par le swap et le taux de recouvrement observe alâinstant du defaut. Ce paiement peut etre effectue selon deux modalites : physicalsettlement ou cash settlement . Dans le premier cas, lâacheteur de protection A livreau vendeur de protection B un nombre dâobligations emises par C correspondant aunominal du swap et recoit en retour le nominal du swap paye en cash. Dans le deuxiemecas, un paiement en cash qui correspond au pair moins le taux de recouvrement esteffectue par le vendeur de protection B vers lâacheteur de protection A. Ce taux derecouvrement est calcule a partir de cotations obtenues quelques temps apres que ledefaut se soit produit.
La prime (aussi appele spread ou marge) qui annule la valeur du CDS est dite ala monnaie (fair margin ou fair spread ou simplement spread).
Ï
s(T2 â T1)
1â ÎŽ
s(T1 â T0) s(Ti â Tiâ1)
T1 T2 Ti Ti+1 TN = T0
Fig. 2.3 â Un credit default swap.
Soient T0 la date dâentree dans le swap, T sa maturite, T0 < T1 < · · · < TN = Tles dates de paiements, ÎŽ le taux de recouvrement en cas de defaut et s la valeur de
2.3 Credit default swap 19
la marge. Le payoff (paye en T ) correspondant a la jambe fixe sâecrit
Nâ1âi=0
(Ti+1 â Ti)
BT
BTi+1
IÏ>Ti + (Ï â Ti)BT
BÏ
ITi+1â„Ï>Ti
.
tandis que le payoff associe a la jambe variable sâecrit
(1â ÎŽ
)BT
BÏ
IÏâ€T .
Evaluation de la marge dâun CDS
Un raisonnement simple dâabsence dâopportunite dâarbitrage permet dâobtenir unepremiere approximation du spread (fair margin) dâun credit default swap. Nous no-tons C lâentite de reference.
Considerons les deux portefeuilles suivants :
P1
long dâune obligation a taux variable emise par C de spread Ucourt dâune obligation a taux variable sans risque
P2
court dâun credit default swap sur C de spread S
Nous supposons que toutes les obligations et le CDS consideres ont meme maturite,meme dates de tombee de coupon et meme nominal. Nous supposons aussi que ledefaut ne peut intervenir quâimmediatement apres une tombee de coupon.
Les cash-flows generes par le portefeuille P1 sont decrits dans la figure 2.4. Ilscorrespondent a une position acheteuse de protection sur un CDS de spread U . Lesdeux portefeuilles P1 et P2 etant a cout dâentree nul, on a necessairement par absencedâopportunite dâarbitrage U = S.
Ainsi, en premiere approximation, la fair margin dâun CDS est egale au spreaddâune obligation a taux variable (FRN = floating rate note) de meme maturite etayant les memes dates de tombee de coupons.Remarque. Lâegalite precedente nâest pas toujours observee dans la pratique. Ceciest du au fait que les hypotheses implicites a notre raisonnement5 ne sont pas toujoursverifiees.Remarque. Ce genre de raisonnement nâest valide que pour determiner la marge ala monnaie dâun CDS. Pour determiner sa valeur en cours de vie (NPV = net presentvalue) qui nâest plus necessairement egale a 0, il faut avoir recours a un modele.Exemple. (Pricing dâun CDS.)Nous considerons un CDS de maturite T . Nous supposons que le taux de recouvrementen cas de defaut ÎŽ, le taux dâinteret sans risque r et le taux de defaut λ > 0 sontconstants. Lâinstant de defaut Ï suit une loi exponentielle de parametre λ :
P[Ï > t] = eâλt.
5telle lâabsence de cout de transaction (spread bid-ask) sur le marche du cash et des obligationsa taux fixes
20 Produits derives de credit
T1 T2 ÏTi0
ÎŽ
si
s2
s1
s1 + us2 + u
si + u
1
P2
P1
T1 T2 Ti Ï0
1â ÎŽ
u u u u u
Fig. 2.4 â Synthese dâun CDS.
On cherche a calculer la marge sâ qui annule la valeur du CDS a lâorigine. Enconsiderant que la prime est payee jusquâau defaut, et sans tenir compte du couponcouru, la valeur de la jambe fixe sâecrit :
JF (s) = s
Nâ1âi=0
(Ti+1 â Ti)E[eârTi+11Ï>Ti+1
]
= s
Nâ1âi=0
(Ti+1 â Ti)eâ(r+λ)Ti+1
' s
â« t
0
eâ(r+λ)u du
= s1â eâ(r+λ)T
r + λ.
En supposant que le flux variable est paye a lâinstant Ï dâoccurrence du defaut, lavaleur de la jambe variable est :
JV = (1â ÎŽ)E[eârÏ1Ïâ€T
]
= (1â ÎŽ)
â«T
0
λeâ(r+λ)u du
= (1â ÎŽ)λ
r + λ
(1â eâ(r+λ)T
).
Le fair spread sâ est tel que JF (sâ) = JV soit
sâ = (1â ÎŽ)λ.
2.4 Les Basket Default Swaps 21
Cette egalite est connue sous le nom dâegalite du triangleExercice. (Credit Default Swap et risque de contrepartie.)On considere 3 contreparties A, B et C. La contrepartie A entre dans un credit defaultswap avec la contrepartie B sur lâentite de reference C. Nous supposons que A estacheteur de protection ; que le taux sans risque est constant et egal a r ; que le taux derecouvrement associe a lâentite C est RC ; que les intensites de defaut des firmes B et Cvalent λB et λC respectivement. On suppose de plus que la distribution jointe risque-neutre des defauts (ÏB, ÏC) des entite B et C est modelisee de la maniere suivante : ilexiste trois variables aleatoires independantes V, TB, TC suivant des lois exponentiellesde parametres λ, lB et lC respectivement telles que
ÏB = min(V, TB), ÏC = min(V, TC).
(1) Quelles conditions faut-il imposer aux parametres pour que les hypotheses sur lesintensites de defaut soient verifiees ?(2) Calculer la survie jointe des instants de defauts (ÏB, ÏC).(3) On suppose que le flux associe a la jambe de defaut est paye a la fin de la periodeen cours pourvu que B ne fasse pas defaut dâici la et que les flux associes a la jambede prime soient payes a la fin de chaque periode pourvu que ni B, ni C nâaient faitdefaut. Calculer le fair spread. Donner en une expression approchee et interpreter ceresultat.(4) Question subsidiaire. Calculer la copule associee a la loi du couple (ÏB, ÏC).
Nous allons a present nous interesser aux produits ecrits sur des paniers de credits :les nth-to-default et les Collateralized Debt Obligations.
2.4 Les Basket Default Swaps
Lâinteret premier des paniers dâactifs risques est de pouvoir utiliser leur correlationpour restructurer le risque de credit dâun portefeuille a lâaide de plusieurs nouveauxtitres par le truchement dâun mecanisme de redistribution. La taille des portefeuillesconsideres peut varier de cinq a plusieurs centaines de sous-jacents de credit.
En general, le mecanisme de redistribution realloue les pertes dans lâordre de leurarrivee : certains titres supportent les premieres pertes, et sont donc plus risques quedâautres supportant des pertes plus lointaines. Ces mecanismes exposent les investis-seurs a la tendance quâont les emetteurs a faire defaut ou a survivre ensemble. Onmodelise generalement cette co-dependance des instants de defaut par une correlation,câest pourquoi on parle de produits de correlation.
Le produit de correlation le plus simple est le Basket Default Swap (nth-2-Default),dont la composition typique comporte de 5 a 10 credits. Ce produit est dit idiosyn-cratique, car lâidentite du defaut, et donc ses caracteristiques doivent etre connues :
1. le principe du swap est identique a celui du Credit Default Swap ;
2. seule change la definition de lâevenement de credit qui devient le defaut dunieme credit du panier.
22 Produits derives de credit
Nous allons a present etudier deux cas particuliers a titre dâexemple : les First etSecond-to-Default.
First-2-Default (n = 1)
Dans ce cas, le vendeur de protection touche un spread plus important que celuipaye par nâimporte quel emetteur du panier. En effet, ce spread est proportionnel a laprobabilite dâarrivee de lâevenement de credit multipliee par la perte en cas de defaut.Or, en supposant que le panier est homogene (i.e. que la perte 1 â ÎŽi = 1â ÎŽ, ou lesÎŽi et ÎŽ representent les taux de recouvrement, est identique pour chacun des actifs i),on remarque que :
P[Ï1 †T ] â„ P[Ïi †T ], âi.Lâinvestisseur obtient un effet de levier en augmentant le risque de credit du produit.Le risque reste cependant limite au âpire casâ, câest a dire au risque de lâemetteurayant la plus mauvaise qualite de credit. Lâevolution du spread des First-to-Defaulten fonction de la correlation est negative.
Second-2-Default (n = 2)
Pour ces produits, lâevenement de credit est le deuxieme defaut du panier. Le risquepour lâinvestisseur etant moindre que dans le cas du First-2-Default, son rendementlâest egalement. Contrairement au first-to-Default, le spread dâun Second-2-Defaultaugmente quand la correlation augmente.
Par extension, beaucoup dâautres produits sont envisageables (Third-2-Default,etc...)
Determinants du spread dâun produit sur basket
1. valeur de n : un FTD est par exemple plus risque quâun STD donc son spreadest plus eleve ;
2. nombre de credits : le risque dâun Basket Default Swap augmente avec lenombre de credits ;
3. qualite du credit des emetteurs ;
4. maturite : lâeffet de la maturite depend de la forme des courbes de credit desemetteurs ;
5. taux de recouvrement : son effet sur le prix est moindre car un taux derecouvrement plus eleve est compense (a spread donne) par une probabilite dedefaut plus forte (inegalite du triangle) ;
6. correlation de defaut : si la correlation augmente, la tendance des creditsa survivre ou a faire defaut ensemble augmente. Lâeffet sur le prix est doncfondamental, mais complexe.
Ce dernier point souligne lâimportance des correlations de defaut entre les creditsdu panier. En effet, les Basket Default Swaps sont essentiellement des produits
2.5 Collateralized Debt Obligations 23
de correlation. Le spread dâun panier depend donc sensiblement des hypotheses decorrelation que lâon fait.
En general, on suppose par exemple que les credits dâun meme secteurgeographique et industriel sont plus correles que ceux de secteurs differents. On sup-pose aussi que le risque systemique est plus fort que le risque idiosyncratique, câesta dire que lâon suppose que ces defauts sont correles positivement. Ces deux risquesse refletent dans les hypotheses de modelisation les plus couramment utilisees. Lechapitre 5 sera consacre aux outils de modelisation de cette correlation.
2.5 Collateralized Debt Obligations
Les Collateralized Debt Obligations ou CDO sont des produits obligataires adossesa des dettes, resultant dâun mecanisme relativement complexe dâingenierie financiereappele titrisation (securitization). A partir dâun panier de titres de dette (de 50 a10000 creances), lâemetteur synthetise des actifs obligataires. Les CDO se distinguentselon la nature de la dette sous-jacente : sâil sâagit de produits obligataires, on parlede âCollateralized Bond Obligationsâ ou CBO. Dans le cas ou le panier est constitueuniquement de titres de prets, on parle de âCollateralized Loan Obligationsâ ou CLO.Bien entendu, dans le cas general, le panier est mixte. Depuis sa creation dans le milieudes annees 1990, le marche des CDO nâa cesse de se developper. En 2000, il depassaitles 100 Milliards de dollars dâemission. Nous presentons les enjeux du processus detitrisation ainsi que ses mecanismes, puis les techniques recentes liees a la generationsynthetique de tranches utilisees en trading de correlation.
Titrisation
La titrisation est une technique de gestion de bilan consistant a creer des produitsobligataires a partir dâun ensemble de creances par le truchement dâune entite juri-dique particuliere appelee Special Purpose Vehicle (SPV). Un etablissement financierpossedant un ensemble de creances ou de credits aupres dâemprunteurs individuels ouinstitutionnels peut ainsi choisir de les titriser. Pour ce faire, il cree un SPV juridi-quement independant, a qui il vend ses creances. Cette etape est fondamentale, carelle lui permet, dâune part, de transferer le risque de credit au SPV, et dâautre partde retirer les creances titrisees de son bilan. Enfin, le SPV emet les CDO (voir figure2.5). Les CDO emis comportent differentes tranches dâinvestissement, chacune dâellepossedant une qualite de credit, et donc une notation differente :
â la tranche junior ou equity supporte les premieres pertes sur lâensemble decreances. Il sâagit donc dâun produit tres risque, payant un spread tres elevea lâinvestisseur. Il sâagit dâun produit purement speculatif ;
â la tranche intermediaire, dite mezzanine supporte les pertes au dela de la trancheequity, câest un produit moyennement risque, offrant un spread interessant ;
â la tranche senior supporte les pertes restantes, si elles ont lieu. Elle est la moinssoumise au risque de credit, et offre donc un coupon faible.
24 Produits derives de credit
Emprunteurs Etablissement
financier
vente des creances
SPVInvestisseursemission de CDO
emprunts, credits
Fig. 2.5 â Le mecanisme de Titrisation
Comme chacune de ces tranches porte sur un ensemble de credits, leur valorisation faitintervenir la correlation entre les defauts du panier. Nous lâaborderons plus en detailsau chapitre 5. Il est a noter que lâetablissement financier peut parfois conserver unepartie du risque de credit, ce qui ameliore la notation des tranches. Alternativement, ilpeut aussi faire appel a une compagnie dâassurance externe pour augmenter la qualitedu credit. On parle alors de credit enhancement.
Lâinteret de la titrisation est double : tout dâabord, elle permet dâeconomiserdes fonds propres et ainsi dâameliorer leur rentabilite. En effet, etant donne queles creances titrisees peuvent etre sorties du bilan, lâexigence de fonds propres seramoindre. De plus, la titrisation offre un acces simple et economique au marche finan-cier a des entreprises de faible notation, qui devraient autrement se refinancer a descouts prohibitifs. Elle permet lâassainissement de leur structure de capital.
Les produits synthetiques
Devant le developpement impressionnant du marche des CDO et la demande deproduits de correlation de plus en plus forte de la part des investisseurs, des techniquesdâingenierie financiere recentes ont donne naissance au concept des CDO synthetiques.De lâutilisation originelle dans les strategies de gestion de fonds propres, les CDOdeviennent peu a peu des produits dâinvestissement speculatifs.
Le principe de la titrisation synthetique est de constituer des produits tranches apartir, non plus dâun ensemble de credits ou creances, mais dâun ensemble de CDS.Ceci revient a dire que lâorganisme emetteur cree une exposition au risque de creditet de correlation en prenant des positions sur un ensemble de CDS. La titrisationsynthetique peut donner naissance a deux types de produits :
1. les CDO synthetiques en full capital structure sont des CDO classiques a cecipret quâils sont ecrits sur un ensemble de CDS. Comme pour les CDO classiques,
2.5 Collateralized Debt Obligations 25
le risque de defaut est entierement transfere aux investisseurs ;
2. les Tranche Default Products (TDP) consistent en lâemission dâune seule tranchede CDO synthetique. Dans ce cas, lâemetteur reste expose au risque decorrelation, ce qui impose une gestion dynamique de cette correlation par lestraders, les positions deltas equivalentes etant evaluees a partir des spreads dumarche et dâun modele de co-dependance.
Le developpement des produits synthetiques, et des TDP en particulier, ouvre desperspectives prometteuses dans le domaine du trading de correlation, et renforce lâim-portance de la modelisation.
CHAPITRE 3
Introduction aux modeles structurels
Les modeles structurels sont des modeles du risque de credit ou une entreprisedonnee est consideree en cessation de paiement lorsque la valeur de ses actifs ne suffitplus a faire face a sa dette. Dans cette approche initiee par Merton (1974) [21], lavaleur de la dette est evaluee a lâaide de la theorie des options : lâaction de lâentrepriseet sa dette y apparaissent comme des produits derives sur la valeur totale de ses actifs.
La popularite de ce modele a permis la diffusion des idees de Merton et a trans-forme en quelques decennies la vision du risque de credit. Le modele developpe parMoodyâs KMV [4] pour estimer les probabilites de defaut ou le modele Credit Gradede JP Morgan [22] sont de parfaites illustrations de cette tendance. Les modeles âala Mertonâ sont toujours largement utilises pour valoriser la dette risquee, modeliserle spread de credit, evaluer la qualite dâune signature, etablir des liens entre le risqueequity et le risque de credit, etc.
Apres avoir presente le modele de base tel que lâintroduit Merton dans son articlefondateur, nous decrivons, suivant Hull, Nelken et White [15], comment il peut etreimplemente. Nous etendons ensuite le modele de Merton dans la direction des modelesdits âde premier instant de passageâ et traitons lâexemple du modele Credit Grade deJP Morgan. Les exemples retenus mettent en evidence le lien entre risque de credit etrisque equity.
3.1 Modele de Merton
Dans le modele de Merton, lâaction et la dette dâune entreprise sont considereescomme des produits derives sur sa valeur de marche et peuvent donc etre evalueesdans le cadre de la theorie des options. Pour pouvoir appliquer cette theorie, il nousfaut faire lâhypothese de completude suivante : il existe une classe dâactifs (comprenantle cash) permettant de repliquer les futurs cash-flows de lâentreprise. Cette hypothesenous permet de justifier la valorisation des actifs de lâentreprise par absence dâoppor-
28 Introduction aux modeles structurels
tunite dâarbitrage.Soit par A la valeur totale des actifs de lâentreprise (A est la valeur de marche de
lâensemble des futurs cash-flows generes par lâactivite de lâentreprise) et nous suppo-sons que ce processus satisfait a lâequation differentielle stochastique suivante (mou-vement brownien geometrique) :
dAt
At
= ” dt + Ï dBt , (”, Ï > 0),
ou B est un mouvement brownien unidimensionnel. Nous supposons aussi que lesproprietaires de cette entreprise ont choisi de structurer son capital sous la formedâactions (pure equity) et dâun unique zero-coupon de maturite T et de nominal L(debt)1. Le bilan dâune telle entreprise est resume dans le tableau suivant :
Actif PassifEquity Et
Actifs At = Et + Dt Debt Dt
Produits derives sur la valeur des actifs de la firme
A maturite, si la valeur de lâentreprise est inferieure a la somme L due auxdetenteurs dâobligations (zero-coupon), nous considerons que la firme fait defaut. Dansce cas, elle passe aux mains des detenteurs de sa dette qui ne recuperent quâune portionAT /L de leur capital initial. Ainsi, les detenteurs dâobligations recoivent min(AT , L)a maturite tandis que les actionnaires percoivent le reliquat
(AT â L
)+.
0
50
100
150
200
0 50 100 150 200 250 300
Valeur de la firme
Valeu
r liqu
idativ
e
Valeur de la dette Valeur de l'action
Fig. 3.1 â Valeurs liquidatives pour une entreprise de dette 100.
Notons Et et Dt les valeurs respectives en t des actions et de la dette et B(t, T ) lavaleur en t dâun zero-coupon sans risque de maturite T . Dâapres la theorie des options
1Cette hypothese simplificatrice nâest que tres rarement verifiee. En pratique, la structure decapital dâune firme est infiniment plus complexe et peut comprendre, par exemple, des portions dedette convertible en action.
3.1 Modele de Merton 29
et en vertu de lâhypothese de completude, les processus E et D peuvent sâecrire sous laforme de lâesperance, sous la probabilite risque neutre, de leur valeur finale actualisee.Autrement dit, si nous avons
Et = B(t, T )Eât[(AT â L)+
]= At âD(t, T ),
Dt = B(t, T )Eât[min(AT , L)
]= B(t, T )LâB(t, T )Eâ
[(Lâ AT )+
].
Posons Lt = B(t, T )L. Appliquer la formule de Black & Scholes permet alors dâobtenirla formule de Merton pour la valeur de la dette risquee :
Dt = AtN(âd1) + LtN(d2),(3.1)
ou
d1 =ln(At/L) + (r + Ï2/2)(T â t)
Ïâ
T â t,
d2 = d1 â Ïâ
T â t,
et
N(x) =1â2Ï
â«x
ââeât2/2 dt.
La valeur de la dette apparaıt comme celle dâun zero-coupon au taux sans risque denominal L auquel on retranche un put (appele put-to-default) sur la valeur de la firmede strike L et de maturite T . La valeur de actions apparaıt, quant a elle, comme celledâun call sur la valeur de la firme de strike L et de maturite T .
Probabilites de defaut et Loss Given Default
La formule (3.1) peut se reecrire
D(t, T ) = LtPât[AT â„ L
]+ Eât
[B(t, T )AT 1L>AT
]= LtPât
[AT â„ L
]+ AtPt
[AT < L
],
ou P est la mesure martingale equivalente pour le numeraire A, câest-a-dire la proba-bilite definie par
dPdP
=1
A0
AT
B(0, T ).
Les probabilites de defaut conditionnelles
pât := Pât[AT < L
], pât := Pt
[AT < L
],
sont donnees par les formules suivantes
pât = N(âd2), pât = N(âd1).
En utilisant ces notations, la formule de Merton devient
Dt = Lt(1â pât ) + Ltpât ÎŽât = Lt(1â pât w
ât ),
ou ÎŽt est le taux de recouvrement (Recovery Rate) en cas de defaut defini par
ÎŽât =Eât
[AT 1AT <L
]
LPât[AT < L
] =At
Lt
N(âd1)
N(âd2),
et ou wât = 1â ÎŽât est la perte en cas de defaut (Loss Given Default).
30 Introduction aux modeles structurels
Distance-to-default
La probabilite de defaut sâinterprete naturellement comme une fonction de ladistance-au-defaut (distance-to-default) definie par
Xt =ln At â ln L
Ï=
1
Ïln
At
L.
Plus precisement, si mâ = (r â Ï2/2)/Ï, on peut ecrire que
pât = Pâ[XT †0
âŁâŁXt
]= N
(uâ(t, T )
),
ou
uâ(t, T ) =âXt âmâ(T â t)â
T â t.
La distance au defaut est la distance entre la valeur des actifs de la firme et leniveau L de la dette mesure en nombre dâecarts-type. Il est facile de verifier (exercice !)que X est un mouvement brownien avec derive de drift mâ.
Levier dâendettement
Introduisons la variable
lt =Lt
At
appelee levier dâendettement (leverage ratio) de lâentreprise. Ce ratio mesure le tauxdâendettement de la firme. Il permet de reinterpreter les formules de Merton.
Les formules de Merton peuvent ainsi sâexprimer sous la forme
Dt = Lt
(N(âh1)
lt+ N(h2)
),
Et = At
(N(h1)â N(h2)
lt
),
ou
h1 =ln(1/lt) + Ï2(T â t)/2
Ïâ
T â t,
h2 = h1 â Ïâ
T â t.
Les trois parametres At, lt et Ï sont des parametres-clefs de lâanalyse du risque decredit dâune entreprise. Pour plus de details sur les liens existant entre ces parametreset le risque de credit dâune firme voir [4]
3.1 Modele de Merton 31
Spread implicite
Le spread de credit S(t, T ) peut se definir comme la difference de rendement (yield)entre une dette sans risque (par exemple une obligation du Tresor) et la dette emise parune entreprise (corporate bond). Ainsi, si D(t, T ) designe la valeur dâun zero-couponrisque, on a
S(t, T ) = Y d(t, T )â Y (t, T ),
ou
Y (t, T ) = â ln B(t, T )
T â t, Y d(t, T ) = â ln D(t, T )
T â t.
Etant donne un modele, nous appellerons spread implicite, le spread induit par cemodele. Remarquons que dans le cas du modele de Merton
S(t, T ) = â L
T â tln
(N(âh1)
lt+ N(h2)
).
Le spread de credit ne depend ainsi que de la variabilite (volatilite) des actifs de lafirme, du levier dâendettement et de la distance a la maturite. Lorsque t â T , onobserve le comportement suivant (exercice !)
limtâT
S(t, T ) = â1AT <L + 01ATâ„L .
Une premiere implementation du modele de Merton
La difficulte majeure de toute implementation dâun modele financier est sa calibra-tion : comment peut-on estimer de maniere fiable les parametres apparaissant dansles formules precedentes ? En pratique, lâon peut estimer le parametre L en evaluantla dette de lâentreprise. Les parametres At et Ï nâetant pas directement observables ;neanmoins, ils peuvent etre estimes implicitement a partir des donnees de la volatilite(historique) ÏE de lâaction et de sa valeur spot Et.
Rappelons que la valeur de lâaction est donnee par la formule
Et = AtN(d1)â LtN(d2).(3.2)
La formule dâIto montre alors que Et est un processus de volatilite
ÏE(t) =At
Et
N(d1)Ï.(3.3)
Par suite, si lâon connaıt ÏE et Et, on connaıt, en principe, la valeur des variables At
et ÏA. Il suffit pour cela de resoudre en At et Ï le systeme
Et = AtN(d1)â LtN(d2),
ÏE(t) =At
Et
N(d1)Ï.
La relation (3.3) nâayant lieu quâinstantanement les resultats obtenus par cettemethode risque dâetre instables [4].
32 Introduction aux modeles structurels
Spread implicite et smile de volatilite
Nous presentons maintenant une nouvelle methode pour implementer le modele deMerton, dâapres Hull, Nelken et White [15]. Il sâagit dâutiliser lâinformation contenuedans le smile de volatilite implicite pour calibrer le modele de Merton et en particulierestimer le spread implicite.
Cette implementation permet de classer les emetteurs de dette risquee selon laqualite de leur signature. Lâinteret dâun tel classement est important : dâune part, ilpermet de comparer le risque de credit entre plusieurs firmes et dâautre part, il peutservir de base a une estimation des probabilites de defaut a horizon donne. Enfin, cemodele permet de relier risque equity et risque de credit.
Dans le modele de Merton, un put de maturite Ï < T et de strike K apparaıtcomme une option composee (voir [14]) sur la valeur de lâentreprise. Ainsi, la valeurdu put sur lâaction est donnee par la formule suivante :
P = L0M(âa2, d2;â
âÏ/T
)â A0M(âa1, d1;â
âÏ/T
)+ KB(0, Ï)N(âa2),
avec
a1 =ln
(A0/A
âÏB(0, Ï)
)+ Ï2Ï/2
Ïâ
Ï,
a2 = a1 â Ïâ
Ï ,
ou M designe la fonction de repartition dâune gaussienne bivariee :
M(x, y; Ï
)=
1
2Ï
â«x
ââdu
â« yâÏuâ1âÏ2
ââdv eâ(u2+v2)/2, (â1 â€ Ï â€ +1),
et AâÏ represente la valeur de la firme telle quâa lâinstant Ï , lâon ait
EâÏ := Aâ
ÏN(d1)â LÏN(d2)K = K.
Autrement dit, AâÏ est la valeur en dessous de laquelle le put sur lâaction sera exerce.
Notons Μ la volatilite implicite du put et posons
α =Aâ
Ï
A0B(0, Ï), Îș =
K
E0B(0, T ).
Le parametre Îș est souvent appele moneyness de lâoption (lorsque Îș = 1, lâoptionest a la monnaie du forward). Le parametre α est la moneyness du point de vue dela valeur de la firme. Par definition, la volatilite implicite Îœ du put est solution delâequation
L0M(âa2, d2;â
âÏ/T
)â A0M(âa1, d1;â
âÏ/T
)+ ÎșE0N(âa2)
= ÎșE0N(âdâ2)â E0N(âdâ1).
3.1 Modele de Merton 33
ou
dâ1 =ln(1/Îș) + Îœ2Ï/2
Îœâ
Ï, dâ2 = dâ1 â Îœ
âÏ ,
a1 =ln(1/α) + Ï2Ï/2
Ïâ
Ï, a2 = a1 â Ï
âÏ .
En utilisant alors lâequation
E0 = A0
(N(h1)â lâ1
0 N(h2)),(3.4)
il vient
(3.5)
lâ10 M
(âa2, d2;ââ
Ï/T)âM
(âa1, d1;ââ
Ï/T)
+ ÎșN(âa2)[N(h1)â lâ1
0 N(h2)]
= Îș[N(âdâ2)âN(âdâ1)
][N(h1)â lâ1
0 N(h2)].
En utilisant une nouvelle fois lâequation (3.4), nous pouvons aussi ecrire que
ÎșE0erT = Eâ(Ï, T ) = Aâ
Ï
[N(h1,Ï )â 1
αl0N(h2,Ï )
],
ou
h1,Ï =ln
(1/(αl0)
)+ Ï2(T â t)/2
Ïâ
T â t,
h2,Ï = h1,Ï â Ïâ
T â t.
de sorte que
Îș =αN(d1,Ï )â lâ1
0 N(h2,Ï )
N(h1)â lâ10 N(h2)
,(3.6)
Pour un jeu de parametres (l0, Ï, T ) du modele de Merton et une maturite dâoptionÏ(< T ), les equations (3.5) et (3.6) definissent une relation implicite de la forme
Îœ = Fonction(Îș),
qui conduit a un smile de volatilite. Les proprietes de cette relation peuvent se resumeren quelques faits stylises :
(1) le spread de credit est une fonction croissante de la volatilite implicite ;(2) la relation entre la pente (skew) du smile de volatilite et le spread de credit est
plus complexe : pour des spreads faibles, la pente est une fonction croissante duspread ; pour des niveaux de spread plus eleves, la variation de la pente devientnegligeable ;
(3) enfin, la pente est une fonction croissante de la volatilite implicite a la monnaie.
34 Introduction aux modeles structurels
Ces resultats suggerent une nouvelle methode pour implementer le modele deMerton : etant donnees deux volatilites implicites et une valeur pour T , on peutresoudre les equations (3.5) et (3.6) pour obtenir l0 et Ï. Cette implementation permetdonc dâestimer directement le spread de credit et la probabilite risque-neutre de defauta partir du smile de volatilite tout en evitant le recours a la relation instantanee (3.3).
Ces resultats peuvent ensuite etre utilises comme un indicateur du risque de credit.Les auteurs ont teste cette approche en comparant le classement des spreads obtenuspar cette methode avec les spreads du marche des CDS et ont montre que ces classe-ments sont proches. Cette methode permet donc, par exemple, dâetudier la qualite dela signature dâentreprises dont le marche de CDS nâexiste pas ou nâest pas tres liquide.
Limites du modele et extensions
La principale limitation du modele de Merton est que les spreads implicites court-terme sont necessairement proches de zero contrairement aux spreads reellement ob-serves sur les marches de capitaux. Cette propriete du modele est liee a la continuitede la filtration brownienne (ou, de maniere equivalente, a la previsibilite de lâins-tant de defaut). Duffie et Lando expliquent cette apparente contradiction par le faitque lâasymetrie dâinformation qui existe entre les actionnaires et les detenteurs de ladette nâest pas prise en compte par ce modele. Ils ont montre [8] que si ces derniersne disposent que dâune information comptable partielle (ou âbruiteeâ) lâinstant dedefaut leur apparaıt comme totalement inaccessible. Ces resultats permettent de jus-tifier lâutilisation des modeles a forme reduite dont nous aborderons lâetude dans leprochain chapitre.
Le modele de Merton peut etre etendu dans differentes directions : Nous verronsdans la section 3.2 consacree aux modeles de premier instant de passage commentlâon peut incorporer des defaut se produisant a un instant quelconque de lâintervalle[0, T ] ; Vasicek [30] propose un modele de Merton prenant en compte lâechelonnementde la dette ; Longstaff & Schwartz [20] introduisent un modele de Merton integrantdes taux stochastiques.
Notons enfin que si lâon souhaite tenir compte des imperfections de marche (telslâincompletude ou le controle que peuvent exercer actionnaires et detenteurs de ladette sur la conduite de lâentreprise), la theorie sâeloigne sensiblement de la theoriedes options. Sur ce sujet, lâon pourra se referer a Leland [19].
Exercice. (Extension du modele de Merton au cas ou la valeur des actifs de la firmeest un processus a sauts.)Soit N un processus de Poisson de parametre λ et U = Ui, i â„ 1 une suite dev.a. i.i.d. de moyenne Îœ. Nous supposons que les tribus Ï(W ), Ï(N) et Ï(U) sontmutuellement independantes.
Nous considerons une entreprise dont la dynamique risque-neutre de la valeur deses actifs est decrite par lâEDS
dVt = Vtâ((r â λΜ) dt + ÏV dWt + dÏt
),
3.2 Modeles de premier instant de passage 35
ou W est un mouvement brownien standard et Ï est le processus de saut Ït =âNt
i=1 Ui
et r est la taux sans risque. Dans la suite, Ft designe la tribu Ï(Ws, Ïs ; s †t).(1) Verifier que Ït = Ït â λΜt est une martingale relativement a la filtration F.(2) Montrer que V â
t = eârtVt satisfait a
dV ât = V â
tâ(ÏV dWt + dÏt
).(3.7)
En deduire que V â est une martingale.(3) Verifier que
Xt = V0eÏt+ÏV Wtâ 1
2Ï2
V tâ
0<uâ€t
(1 + âÏu)eââÏu = V0e
ÏV Wtâ(Ï2V /2+λΜ)t
Ntâi=1
(1 + Ui)
est solution de (3.7). On admettra lâunicite des solutions de (3.7) de sorte que V â = X.(4) Nous supposons desormais que ln(1+Ui) suit une loi normale de moyenne ” et devariance Ï2. Montrer que Îœ = e”+Ï2/2 â 1.(5) On considere le bond risque de maturite T et de nominal L dont le payoff estL
(IVTâ„L + VT /L)IVT <L
). 2 Montrer que la probabilite de defaut du bond sâecrit
P[VT < L] =+ââi=0
eâλT (λT )i
i!N(âd2(i)),
ou
d2(i) =ln(V0/L) + ”i(T )
Ïi(T ), ”i(T ) = (r â Ï2
V /2â λΜ) + i”, Ï2i (T ) = Ï2
V T + iÏ2.
(6) Verifier que la valeur du bond risque est
D(0, T ) = LB(0, T )(1â
+ââi=0
eâλT (λT )i
i!
[N(âd2(i)) +
V0
Le”i(T )+Ï2
i (T )T/2N(âd1(i))])
,
ou
d1(i) = d2(i) + Ïi(T ).
3.2 Modeles de premier instant de passage
Lâune des limites du modele de Merton reside dans le fait que le defaut delâemetteur ne peut intervenir quâa la maturite de la dette. Dans les modeles de premierinstant de passage, au contraire, lâinstant de defaut est (un temps dâarret) de la forme
Ï = inft > 0 ; At < Bar(t)
ou Bar est une barriere qui peut etre aleatoire et A est une variable de type âvaleurde la firmeâ. Dans les modeles de ce type, il est possible de specifier une grande varietedâhypotheses de recouvrement en cas de defaut (voir [2], chapitre 3). Apres quelquespreliminaires mathematiques, nous presenterons un exemple de modele de premierinstant de passage : le modele Credit Grade developpe par JP Morgan.
2Ce sont les hypotheses habituelles du modele de la firme selon Merton.
36 Introduction aux modeles structurels
Preliminaires mathematiques
Nous commencons ce paragraphe par un lemme bien connu de la theorie des dif-fusions (voir [17]). Dans la suite, Y designe un mouvement brownien avec derive desorte que
Yt = y0 + ”t + ÏBt , (y0 > 0, ” â R, Ï > 0),
ou B est un mouvement brownien unidimensionnel.
Lemme 3.1
P[
inf0â€uâ€s
(Yu â y0) â„ y]
= N(ây + ”s
Ïâ
s
)â e
2”
Ï2 yN(y + ”s
Ïâ
s
).
Une preuve de ce lemme est donnee en appendice E
Considerons le temps dâarret
Ï = inft > 0 ; Yt < 0
Appliquer le lemme precedent a Y â y0 suffit a prouver :
Proposition 3.2 La variable aleatoire Ï est distribue selon la loi gaussienne inverse.Plus precisement,
P[Ï â€ s
]= P
[Ï < s
]= N
(h1(s)
)+ eâ
2ÎœÏ2 y0N
(h2(s)
),
ou
h1(s) = ây0 + Îœs
Ïâ
s, h2(s) = ây0 â Îœs
Ïâ
s.
Exemple. Nous considerons une entreprise dont la valeur A est decrite comme dansle modele de Merton et nous supposons que lâinstant de defaut de la firme se presentesous la forme
Ï = inft > 0 ; At < v
ou v est un reel inferieur a A.
Dans ce cas, nous avons :
P[Ï > s
âŁâŁAt
]= N
( ln(v/At)â Îœ(sâ t)
Ïâ
sâ t
)+
( v
At
)2a
N( ln(v/At) + Îœ(sâ t)
Ïâ
sâ t
),
ou
a =Μ
Ï2=
r â Ï2/2
Ï2.
3.2 Modeles de premier instant de passage 37
Modele Credit Grade
Dans ce paragraphe, nous presentons un modele de premier instant de passagedeveloppe par JP Morgan (Credit Grade, voir [22]). Nous avons choisi de presenter cemodele car il nous semble quâil contient des intuitions puissantes sur ce que sont lesdeterminants du risque de defaut et les liens qui existent entre le risque de credit etle risque equity.
Description du modele
Nous supposons que la âvaleurâ V dâune entreprise est decrite par un processussatisfaisant a lâEDS
dVt
Vt
= Ï dWt , (Ï > 0),
ou W est un mouvement brownien unidimensionnel et Ï > 0 est la volatilite de V . Ici,V nâest pas reellement la valeur de la firme mais plutot un indice mesurant lâevolutiontemporelle de la qualite du credit de lâentreprise. Dans ce modele, le defaut est definicomme le premier instant ou V atteint une barriere LD ou
(1) D est le ratio debt-per-share,(2) L est une grandeur aleatoire representant le taux de recouvrement moyen
global en cas de defaut.La variable L est supposee lognormale de moyenne L et dâecart-type λ de sorte que
LD = LDeλZâλ2/2
ou Z suit une loi normale centree reduite.La moyenne L et lâecart-type λ sont estimes historiquement en utilisant des
donnees de taux de recouvrement telles celles fournies par Standard & Poorâs. Dans[22], les auteurs mentionnent les valeurs L = 0.5 et λ = 0.3 obtenues a partir desdonnees de defaut de 300 entreprises americaines (hors institutions financieres) entre1987 et 1997. Le ratio debt-per-share D est obtenu en divisant le nominal de la detteglobale par le nombre dâactions emises par lâentreprise.
Pour une valeur V0 donnee, lâinstant Ï de defaut est donc
Ï = inft > 0 ; Vt < LD
,
et si lâon pose
Xt = ÏWt â λZ â Ï2
2tâ λ2
2,
de sorte que Xt ⌠N(â1/2A2t , A
2t ) ou At = Ï2t + λ2, cette formule peut se reecrire
Ï = inft > 0 ; Xt < ln(LD/V0)â λ2
.
Pour appliquer les formules presentees dans le paragraphe precedent (afin dâobtenirune formule fermee pour la structure par terme de probabilite de defaut), les auteurs
38 Introduction aux modeles structurels
proposent de remplacer Xt avec un mouvement brownien Yt de loi N(”t, Ξ2t), ouΞ2t = A2
t = Ï2t + λ2 et ”t = âA2t /2. Dâapres le lemme 3.1, lâon a
P[infsâ€t
Ys > y]
= N(”tâ y
Ξâ
t
)â e
2”y
Ξ2 N(”t + y
Ξâ
t
)
et en posant y = ln(LD/V0)â λ2, lâon obtient la formule
P (t) := P[Ï > t] = N(âAt
2+
ln d
At
)â dN
(âAt
2â ln d
At
),
ou
d =V0e
λ2
LD.
Remarque. Lâon peut, au prix dâune integration supplementaire, eviter lâapproxi-mation (X ⌠Y ) precedente. En effet, lâon a
P[Ï > t
]= P
[ÏWs â Ï2s/2 > ln(LD/V0) + λZ â λ2/2, âs †t
]
=
â«+â
ââ
dzâ2Ï
P[ÏWs â Ï2s/2 > F (z),âs †t
]
=
â«+â
ââ
dzâ2Ï
N
(âF (z)â Ï2t/2
Ïâ
t
)â eâF (z)N
(F (z)â Ï2t/2
Ïâ
t
)
ou
F (z) = ln(LD
V0
)â λ2
2+ λz.
Remarque. Lâintroduction dans un modele structurel dâune barriere aleatoire im-plique que la probabilite de defaut instantanee nâest plus nulle. Ceci conduit a unspread court-terme non nul et permet de resoudre lâun des problemes inherents auxmodeles a la Merton.
Probabilite de defaut et spread de credit
Dans ce paragraphe, nous designons par spread de credit la valeur de la margedâun Credit Default Swap qui annule sa valeur au moment de lâentree dans le swap.Autrement dit, le spread est donne par la formule
s(t) = (1âR)
â«
]0,t]
DF (0, s)P (ds) + 1â P (0)
â« t
0
DF (0, s)P (s) ds
.
Il faut bien prendre garde au fait que R est le taux de recouvrement specifique autitre couvert par le CDS et nâest donc pas necessairement egal a L qui est un taux de
3.2 Modeles de premier instant de passage 39
recouvrement moyen global. Typiquement, le taux de recouvrement pour une detteunsecured sera plus faible que L, alors que celui lie a une dette secured sera plus grandque L.Remarque. Si lâon note
p(t) = â1
tln P (t),
le taux de defaut moyen et si lâon suppose que(1) p(t) ' p constant,(2) P (0) ' 1,
alors lâapproximation suivante est justifiee
s(t) ' (1âR)p.
Calibration du modele sur les donnees de marche
Nous cherchons maintenant a calibrer ce modele sur des donnees de marche ob-servables (donnees equity). Soient S et ÏS respectivement la valeur de lâaction et lavolatilite de lâaction de lâentreprise consideree. La methode proposee par JP Morganconsiste a examiner les conditions aux bords a long terme sur une expression de typedistance-au-defaut pour les deux regimes extremes
âą pres du defaut câest-a-dire S â 0,âą loin de la barriere câest-a-dire S Ă LD.Soit donc η la distance-au-defaut mesure en ecart-type de V et definie par
η =ln V â ln(LD)
Ï=
1
Ïln
V
LD.
Reprendre le raisonnement qui nous a conduit a la formule 3.3 permet dâexprimer ladistance-au-defaut sous la forme
η =V
ÏSS
âS
âVln
( V
LD
).(3.8)
Nous allons etablir les conditions aux bords pour η. Pres du defaut (S â 0), nousavons
V ' V (S = 0) +âV
âSS + o(S2) = LD +
S
α+ o(S2)
En utilisant lâequation precedente et (3.8), on montre que lorsque S â 0
η =1
ÏS
+ o(S).
Lorsque S Ă LD, on suppose que S/V â 1 (ce qui est coherent avec le comportementdâun modele de Merton standard). Par suite,
η ' 1
ÏS
ln( S
LD
), (S Ă LD).
40 Introduction aux modeles structurels
Lâexpression la plus simple pour η qui satisfasse simultanement a ces deux conditionsaux bords est
η =S + LD
SÏS
ln(S + LD
LD
).
En comparant lâequation precedente avec (3.8) nous sommes conduits a
V = S + LD,
et donc
V0 = S0 + LD.
Finalement, lâon obtient
Ï = ÏâSSâ
Sâ + LD,
pour une valeur de lâaction egale a Sâ et sa volatilite (historique ou implicite) corres-pondante.
La formule suivante pour la probabilite (risque neutre) de defaut ne fait plusintervenir que des variables observables
P (t) = N(âAt
2+
ln d
At
)â dN
(âAt
2â ln d
At
),
ou
A2t =
(ÏâS
Sâ
Sâ + LD
)2
t + λ2, d =Sâ + LD
LDeλ2
.
CHAPITRE 4
Modeles a forme reduite
Nous presentons dans ce chapitre les bases de la modelisation du risque de defauta lâaide de modeles a forme reduite.
Apres avoir pose les fondations mathematiques des modeles a forme reduite, nousnous placons dans le cadre des modeles doublement stochastiques. Conditionnellementa lâinformation de marche, les instants de defaut y apparaissent comme le premierinstant de saut dâun processus de Poisson. Nous verrons que cette propriete est aucoeur de la tractabilite analytique de cette approche. Nous terminons ce chapitre pardes exemples dâapplications lorsque lâintensite de defaut est un processus affine (cf.appendice C).
4.1 Preliminaires mathematiques
Dans cette section inspiree de [2], [7] et de [29], nous presentons les definitionset resultats mathematiques qui sous-tendent la theorie des modeles a intensite. Ellese veut elementaire et câest pourquoi nous nâentrons pas dans toutes les subtilitestechniques. Pour plus de details sur la theorie generale des processus, nous renvoyonsa lâannexe A.
Dans la suite, (Ω, F, P, G = (Gt)tâ„0) designe un espace probabilise satisfaisant auxconditions habituelles. Toutes les filtrations considerees dans la suite sont, elles aussi,supposees verifier les conditions habituelles.
Definitions
Nous introduisons la definition suivante qui est centrale dans la suite :
Definition 4.1 Soient Ï un temps dâarret de la filtration G et N le processus t 7âNt = 1Ïâ€t. On dit que le processus G-adapte et positif λ = (λt)tâ„0 est lâ intensite (ou
42 Modeles a forme reduite
taux de hasard) de Ï si
Nt ââ« t
0
1]]0,Ï ]](s)λs ds = Nt ââ« Ïâ§t
0
λs ds
est une (G, P)-martingale.
Remarque. Si λ est deterministe, ceci revient a dire que Ï est le premier instant desaut dâun processus de Poisson dâintensite λ.
Intuitivement, cette definition signifie que, conditionnellement a la realisation delâevenement Ï > t, on a
P[Ï â (t, t + dt]
âŁâŁGt
]= λt dt.
Le resultat suivant [1] formalise mathematiquement cette derniere egalite.
Theoreme 4.2 Soient (Δn)nâ„0 une suite de reels strictement positifs decroissant
vers 0 et Yn une version mesurable du processus Yn(t) = Δâ1n P
[t < Ï â€ t + Δn|Gt
].
Sâil existe deux processus λ et y tels que, pour tout t, la limite λt = limn Yn(t) existeet
|Yn(s)â λs| †ys,âs †t et
â« t
0
ys ds < +â p.s ,
alors λ est lâintensite de Ï .
Nous utiliserons ce resultat dans le prochain chapitre de la maniere suivante : si lasurvie conditionnelle S(t, T ) = P
[Ï > T
âŁâŁGt
]est un processus suffisamment regulier,
alors lâintensite de Ï est donnee par
λt = â â
âTS(t, T )
âŁâŁâŁâŁT=t
.
Remarque. Par analogie avec la definition des taux courts, on peut interpreter λcomme un spread instantane :
rt = â â
âTB(t, T )
âŁâŁâŁâŁT=t
.
Exercice. Soit Ï une variable aleatoire exponentielle de parametre λ > 0 : pardefinition, on a P[Ï > t] = exp(âλt). Montrer que dans la plus petite filtrationdans laquelle Ï un temps dâarret, Ï admet pour intensite le processus constant egal a λ.
Soit Ï un temps dâarret tel que P[0 < Ï < +â] > 0. Si la filtration G estengendree par un mouvement brownien (disons W ), le temps dâarret Ï ne peut pasadmettre dâintensite. En effet, dans le cas contraire, on pourrait trouver un processusprevisible H tel que
Mt = Nt ââ« Ïâ§t
0
λ(s) ds =
â« t
0
Hs dWs ,
4.1 Preliminaires mathematiques 43
ce qui est absurde car sur lâevenement 0 < Ï < +â, on aurait alors âMÏ = 0. Enfait, pour quâun temps dâarret admettent une intensite, il faut quâil soit totalementinaccessible (câest-a-dire quâil arrive comme une surprise totale). A contrario, les tempsdâarret dâune filtration brownienne sont previsibles et sont donc annonces par une seriede signes avant-coureurs.
Nous nous interessons desormais a la situation ou la variable aleatoire Ï est untemps dâarret dâune filtration plus grande que celle dans laquelle est definie son tauxde hasard. Nous supposons donc que F = (F)tâ„0 est une filtration telle que Ft â Gt.
Lâutilisation de ce cadre peut se justifier de la maniere suivante : supposons quelâinstant de defaut est defini par un modele structurel brownien. Pour les agents ayantacces a lâinformation de cette filtration (disons le conseil dâadministration de lâentre-prise et ses managers), lâinstant de defaut est un temps dâarret previsible qui nâadmetpas dâintensite. Or, si lâon fait lâhypothese que les informations comptables necessairesa la calibration du modele structurel precedent sont âbruiteesâ 1, les agents de marchenâont acces, en terme dâinformation, quâa une sous-filtration de la premiere dans la-quelle lâinstant de defaut est totalement inaccessible et possede une intensite [8]. Lesmodeles a forme reduite rendent compte de lâasymetrie dâinformation qui existe entrelâagent du marche non-informe et le management dâune entreprise.2
Definition 4.3 Soit Ï un temps dâarret de G dâintensite λ. On dit que Ï est dou-blement stochastique relativement a la filtration F si λ est un processus F-adapte3 etsi pour tout t †s, on a
P[Ï > s|Fs âš Gt
]= exp
(â
â« s
t
λu du)1Ï>t.
Cette definition signifie que conditionnellement a Fâ, Ï est le premier instant desaut dâun processus de Poisson N = (Nt, t â„ 0) par rapport a G dâintensite (λt, t â„ 0).En effet
P[Ï > s|Fâ âš Gt] = P[Ns â Nt = 0; Nt = 0
âŁâŁâŁ Fâ âš Gt
]
= 1 eNt=0P[Ns â Nt
âŁâŁâŁ Fâ]
= 1Ï>teâ â«t
s λu du,
et donc
P[Ï > s|Fs âš Gt] = E[1Ï>te
â â«ts λu du
âŁâŁâŁ Fs âš Gt
]
= 1Ï>teâ â«t
s λu du.
Dans la pratique, nous partons dâune filtration F qui est, en general, la filtrationengendree par un processus de Markov (disons, un processus affine) representant lâin-formation de marche hors instant de defaut et nous construisons une v.a. Ï et unefiltration G de la maniere suivante (processus de Cox) :
1voire incompletes, voire truquees...2le delit dâinitie protege, en principe, le marche des abus potentiels lie a lâutilisation en vue dâun
enrichissement personnel de cette asymetrie dâinformation.3en fait, previsible.
44 Modeles a forme reduite
Soient λ un processus F-adapte et positif, Îł le processus t 7â exp(â â«t
0λs ds) et U
une v.a. de loi uniforme sur [0, 1] independante de Fâ4 Si nous definissons la v.a.
Ï = inft â„ 0 ; Îł(t) †U
et la tribu
Gt = Ft âš Ht
ou Ht = Ï(Ïâ§t), alors il est facile de verifier que Ï est un temps dâarret de G dâintensiteλ (exercice !). Nous montrerons dans la prochaine sous-section que le temps dâarret Ïest aussi doublement stochastique relativement a F.
Calculs dâesperances conditionnelles
Nous detaillons une serie de calculs dâesperances conditionnelles valable dans uncontexte assez general. Ces resultats vont nous permettre de demontrer que les pro-cessus de Cox sont doublement stochastiques mais aussi de prouver une formule quiinterviendra de maniere recurrente dans la suite.
Soient F â G deux filtrations et Ï une v.a. telle que si H designe la filtrationHt = Ï(Ï â§ t), alors on a G = F âšH. Dans la pratique, G sera la filtration du traderde CDS, convertibles, sur la firme en question, tandis que F designera la filtration demarche hors defaut de la firme consideree. Nous aurons besoin du lemme fondamentalsuivant sur les tribus :
Lemme 4.4 Soit T une sous-tribu de Gâ. Pour tout t, on a
Ht â© T â A â Gâ ; âB â T, A â© Ï > t = B â© Ï > t,
autrement dit Htâ©T est inclus dans lâensemble des elements de Gâ dont la restrictiona Ï > t est dans T.
Preuve. Notons Gât le membre de droite dans lâegalite ci-dessus. Il est clair que Gâtest une sous-tribu de Gâ. Il suffit donc de prouver que Ht â Gât et que T â Gât . Pource faire, il suffit encore de prouver que si A = Ï â€ u(u †t) ou A â T, alors il existeB â T tel que Aâ©Ï > t = B â©Ï > t. Dans le premier cas, on peut choisir B = â ,dans le second B = A. „Proposition 4.5 Soient T une sous-tribu de Gâ et Y une v.a. Gâ-mesurable etintegrable. On a
E[Y 1Ï>t|Ht âš T] = 1Ï>tE[1Ï>tY |T]
P[Ï > t|T],
ce qui revient a dire que si lâon se restreint a Ï > t, la tribu Ht ne contient plusdâinformation.
4On pourrait dire que câest dans lâalea de cette variable aleatoire que se concentre lâinformationnon disponible.
4.1 Preliminaires mathematiques 45
Preuve. Puisque le membre de droite dans lâegalite precedente est HtâšT-mesurable,il suffit de prouver que pour tout A â Ht âš T, on a
â«
A
1CY P[C|Ft] dP =
â«
A
1CE[1CY |Ft] dP.
ou C = Ï > t. Dâapres le lemme precedent, il existe B â T tel que A â© C = B â© Cet par suite, on peut ecrire que
â«
A
1CY P[C|T] dP =
â«
Aâ©C
Y P[C|T] dP =
â«
Bâ©C
Y P[C|T] dP
=
â«
B
1CY P[C|T] dP =
â«
B
E[1CY |T]P[C|T] dP
=
â«
B
E[1CE[1CY |T]|T] dP =
â«
Bâ©C
E[1CY |T] dP
=
â«
Bâ©A
E[1CY |T] dP =
â«
A
1CE[1CY |T] dP,
dâou le resultat. „Nous allons demontrer que le processus de Cox defini dans la sous-section
precedente est doublement stochastique. Nous reprenons pour un instant les nota-tions definies precedemment. Il sâagit de prouver que
P[Ï > s|Fs âš Gt] = exp(â
â« s
t
λu du)1Ï>t, (t †s).
Les hypothese du lemme precedent etant verifiees (G = F âš H), il sâapplique a nosfiltrations pour donner dâune part
P[Ï > s|Fs âš Gt] = P[Ï > s|Fs âš Ht]
= 1Ï>tP[Ï > s|Fs]
P[Ï > t|Fs].
Dâautre part et puisque par hypothese U est independant de Gâ et donc de Fs, onpeut aussi ecrire que pour tout t †s
P[Ï > t|Fs] = exp(â
â« t
0
λu du).
Le resultat desire est alors immediat.Nous sommes desormais en mesure de prouver le principal theoreme de ce para-
graphe. Celui-ci est fondamental et il interviendra a de nombreuses reprises dans lasuite.
Theoreme 4.6 Soient Ï un temps dâarret de G dâintensite λ et doublement stochas-tique relativement a F et Z un processus F-previsible borne. Alors, pour tout s â„ t, ona
E[1t<Ïâ€sZÏ
âŁâŁGt
]= 1Ï>te
Î(t)E[â«
]t,s]
ZuλueâÎu du
âŁâŁâŁFt
],
46 Modeles a forme reduite
ou Î(t) =
â« t
0
λs ds.
Noter que ce theoreme sâapplique aux processus de Cox.
Remarque. Ce resultat tres puissant nous dit que les calculs dans la filtrationetendue (du trader) peuvent se ramener (dans le cadre des modeles doublement sto-chastiques) a des calculs dans la filtration de marche (ou les calculs sont simples, parexemple lorsque F est engendree par un processus affine).
Remarque. (admise) La tribu F-previsible est la tribu sur Ωà R+ engendree par
1. les processus (Xt, t â„ 0) continus et F-adaptes ;
2. les ensembles de la forme
AĂ]s, t], s < t, A â Fs
AĂ 0, A â F0.
Preuve. Nous commencons par prouver le resultat pour un processus F-previsible Zde la forme 1]u,v]Yu ou Yu est une v.a. Fu-mesurable. Dans ce cas, le resultat se deduitdes calculs suivants :
E[1t<Ïâ€sZÏ
âŁâŁGt
]= E
[1Ï>t1uâšt<Ïâ€sâ§vYu
âŁâŁHt âš Ft
]
= 1Ï>tE[1uâšt<Ïâ€sâ§vYu
âŁâŁFt
]
P[Ï > t
âŁâŁFt
]
= 1Ï>teÎtE
[Yu(1Ï>uâšt â 1Ï>sâ§v)
âŁâŁFt
]
= 1Ï>teÎtE
[Yu(E
[1Ï>uâšt
âŁâŁFuâšt
]â E[1Ï>sâ§v
âŁâŁFsâ§v
])âŁâŁFt
]
= 1Ï>teÎtE
[Yu(e
âÎuâšt â eâÎsâ§v)âŁâŁFt
]
= 1Ï>teÎ(t)E
[â«
]t,s]
Zw deâÎw
âŁâŁâŁFt
]
= 1Ï>teÎ(t)E
[â«
]t,s]
ZwλweâÎw dwâŁâŁâŁFt
].
Par linearite, le resultat reste vrai pour un Z de la formeâN
i=1 1]ti,ti+1]Yti ou lesYti sont des v.a. Fti-mesurables bornees. Pour prouver le cas general, il suffit alorsde remarquer quâun processus F-previsible borne Z peut etre approche uniformementpar une suite de processus previsible de la forme precedente. „
Un theoreme de representation
Nous terminons cette section par lâenonce dâun theoreme qui precise la structurede la filtration G lorsque F est une filtration brownienne. Nous supposons donc ici queF est la filtration engendree par un mouvement brownien B (eventuellement multi-dimensionnel).
Theoreme 4.7 Soient X une v.a. et M la G-martingale Mt = E[X
âŁâŁGt
], t â [0, T ].
4.2 Evaluation des actifs risques 47
Alors, il existe un processus F-previsible Ο et un processus G-previsible ζ tels que
Mt = M0 +
â« t
0
Οs dBs +
â«
]0,쉤t]
ζu
(λu duâ dNu
).
Preuve. Voir [2]. „
4.2 Evaluation des actifs risques
Dans cette section, nous nous interessons a lâevaluation des actifs soumis au risquede defaut. Nous nous placons dans le cadre de lâabsence dâopportunite dâarbitrage.Nous supposons donc que tous les actifs consideres sont definis sur un espace pro-babilise filtre
(Ω,A, Pâ, G = (Gt)tâ„0
). Nous supposons de plus quâil existe un temps
dâarret Ï de la filtration G, dâintensite λ, doublement stochastique relativement a unefiltration F â G telle que G = F âš H, ou Ht = Ï(Ï â§ t). Ce temps Ï represente lâins-tant de defaut dâune entite de reference fixee. Lâhypothese sur les filtration signifieque toutes les informations de marche autres que lâinstant de defaut Ï sont contenuesdans la filtration F.
La probabilite Pâ est une probabilite risque-neutre relativement au processus detaux dâinteret r = (rt)tâ„0 que nous choisirons F-adapte. Ceci entraıne, en particulier,que les prix des actifs contingents a evaluer se calculent comme lâesperance sous Pâdes flux futurs reactualises a lâaide du taux sans risque r.
Le cas du fractional recovery of par value
Nous considerons un produit donnant droit en T a un flux F represente par unev.a. GT -mesurable et payant un flux WÏ (taux de recouvrement) si lâentite de referencefait defaut avant la maturite T du titre ou W est un processus F-previsible. La valeuren t dâun tel actif sâecrit
p(t, T ) = Eâ[eâ
â«T0 rs dsF1Ï>t + eâ
â«Ï0 rs dsWÏ1t<Ïâ€T
âŁâŁGt
],
or, il decoule du theoreme 4.6 que
Eâ[eâ
â«T0 rs dsF1Ï>t
âŁâŁGt
]= 1Ï>te
â«t0 λu duE
[eâ
â«Tt ru duF1Ï>t
âŁâŁâŁFt
]
= 1Ï>teâ«t0 λu duE
[eâ
â«Tt (ru+λu) duF
âŁâŁâŁFt
],
et
Eâ[eâ
â«Ï0 rs dsWÏ1t<Ïâ€T
âŁâŁGt
]= 1Ï>te
â«t0 λu duE
[â«
(t,T ]
Wsλseâ â«s
t (ru+λu) du dsâŁâŁâŁFt
]
= 1Ï>teâ«t0 λu du
â«
(t,T ]
Ï(t, s) ds,
ou
Ï(t, s) = Eâ[e
â«s0(ru+λu) duWsλs
âŁâŁFt
],
48 Modeles a forme reduite
et finalement, la valeur de lâactif sâecrit
p(t, T ) = 1Ï>t(Eâ
[eâ
â«T0 (rs+λs) dsF
âŁâŁFt
]+ e
â«t0 λs ds
â«
]t,T ]
Ï(t, s) ds).
Remarque. Le calcul de la premiere esperance met en lumiere le fait que la valeurdâun flux de la forme F1Ï>t se calcule comme celle dâun flux de la forme F avec untaux dâactualisation r + λ. Ceci constitue une premiere interpretation de lâintensitede defaut comme un spread emetteur instantane.
Le cas du fractional recovery of market value
Une hypothese de recouvrement particulierement interessante est lâhypothese diteMarket Value Recovery (MVR). Soient une variable aleatoire FT -mesurable F et unprocessus F-previsible l a valeurs dans (0, 1), nous considerons lâactif contingent Wcomme le processus F-previsible payant le flux suivant :
â F en T si lâentite de reference nâa pas fait defaut a maturite ;â Wt = (1 â lt)p(tâ, T ) si le defaut intervient en t < T ou p(t, T ) represente la
valeur en t de cet actif.Par absence dâopportunite dâarbitrage, la valeur p(t, T ) en t de cet actif doit sa-
tisfaire a lâequation
p(t, T ) = E[eâ
â«Tt rs dsF1Ï>t + eâ
â«Tt rs dslÏp(Ïâ, T )1t<Ïâ€T
âŁâŁâŁGt
].
La valeur p sâexprime donc sous la forme dâune equation differentielle stochastiquebackward (EDSB). Nous admettrons dans la suite que cette equation admet uneunique solution. Pour plus dâinformations sur la theorie des EDSB, le lecteur pourrase referer a [13] ou au cours de M. Chaleyat-Maurel.
Proposition 4.8 Soit
Vt = E[eâ
â«Tt (rs+(1âls)λs) dsF
âŁâŁFt
],
nous supposons que, presque surement, âVÏ = 0. Alors Ut = Vt1Ï>t est lâuniquesolution de lâequation differentielle stochastique backward
Ut = E[eâ
â«Tt rs dsF1Ï>t + eâ
â«Tt rs dslÏUÏâ1t<Ïâ€T
âŁâŁâŁGt
].
Preuve. Voir [2] ou lâarticle fondateur [10]. „Remarque. Pour valoriser un actif soumis au risque de defaut dans le cadre dufractional recovery of market value, il suffit dâajouter au taux sans risque r le spreadinstantane st = (1 â lt)λt. Ceci est constitue une autre version de la relation dutriangle deja obtenue dans le cadre du pricing des CDS :
S = (1âR)λ,
ou R designe le taux de recouvrement et λ le taux de defaut.Exercice. (Intensite de defaut et Modele Affine de Base.)
4.2 Evaluation des actifs risques 49
Soit N un processus de Poisson de parametre λ et U = Ui, i â„ 1 une suite de v.a.i.i.d. de loi Îœ a support inclus dans R+. On considere le processus h dont la dynamiqueest decrite par lâEDS
dht = Îș(hâ ht) dt + Îłâ
ht dWt + dJt
ou W est un mouvement brownien standard et J est le processus de saut Jt =âNt
i=0 Ui.On designe par F la filtration engendree par le processus h.(1) Soit L lâoperateur defini par
Lf(x) =Îł2
2xf âČâČ(x) + Îș(hâ x)f âČ(x) + λ
â«(f(x + z)â f(x)
)Μ(dz).
Verifier que pour toute fonction f de classe C2, bornee et a derives bornes, le processus
f(ht)ââ« t
0
(Lf)(hsâ) ds
est une martingale.(2) On admet quâil existe deux fonctions de classe C1 αu et ÎČu telles que
E[euhTâ
â«Tt hs ds
âŁâŁâŁFt
]= eαu(Tât)+htÎČu(Tât), (0 †t †T ).
Montrer que αu et ÎČu sont solutions des equations de Riccati
αâČ = âhÎșÎČ â λ(Ξ(ÎČ)â 1)
ÎČâČ = 1â ÎșhÎČ â Îł2
2ÎČ2,
avec α(0) = 0, ÎČ(0) = u et Ξ(c) = E[exp(cU1)] (c â C).(3) On suppose que h est lâintensite risque-neutre de lâinstant de defaut Ï dâuneentreprise et que le taux sans risque est constant egal a r. Calculer la marge a lamonnaie (break even spread) dâun credit default swap dont la jambe fixe prend encompte les flux intervenant avant le defaut et le coupon couru, et la jambe variableest payee des lâoccurrence du defaut.
Exercice. (Examen juin 2004.)Le but de ce probleme est dâetablir les formules de base de la valorisation des actifssoumis au risque de defaut dans un modele ou taux sans risque et intensite de defautsont des processus correles.
Partie I : Preliminaires. Soit (Ω,A, P, F = (Ft)tâ„0) un espace probabilise filtresur lequel vit un F-mouvement brownien W . On considere le processus x solution delâEDS
dxt = (Îșt â αxt) dt + Ï dWt, x0 > 0
ou Îș est une fonction deterministe strictement positive et α, Ï â (0, +â).
50 Modeles a forme reduite
(1) Verifier que yt := eαtxt satisfait a lâEDS
dyt = eαt(Îșt dt + Ï dWt
), y0 = x0.
(2) Montrer que, pour tout s â„ t, z(s, t) = xs â eâα(sât)xt est une gaussienneindependante de la tribu Ft, dont on determinera la variance.
(3) En deduire lâexistence de deux fonctions A et B (que lâon ne cherchera pas acalculer) telles que
E[eââ«T
t xs ds|Ft] = exp(A(t, T )â xtB(t, T )
)=: Ï(t, xt).
(4) Montrer que les fonctions A et B sont solutions des EDO
âB
ât(t, T ) = αB(t, T )â 1, B(T, T ) = 0,
âA
ât(t, T ) = âÏ2
2B2(t, T ) + ÎștB(t, T ), A(T, T ) = 0.
[Indication : le processus Mt = eââ«t0 xs dsÏ(t, xt) est une F-martingale.]
(5) En deduire que
A(t, T ) = A(t, T ; α, Îș, Ï) =Ï2
2
â«B2(s, T ) dsâ
â«T
t
ÎșsB(s, T ) ds,
B(t, T ) = B(t, T ; α) =1â eâα(Tât)
α.
Partie II. Tous les processus et v.a. consideres dans la suite vivent sur un espaceprobabilise complet (Ω,A, P). Soient B = (B1
t , B2t ; t â„ 0) un mouvement brownien
standard et W = (W 1t ,W 2
t ; t â„ 0) le processus defini par
W 1 = B1, W 2 = ÏB1 +â
1â Ï2B2 (Ï â [â1, +1]),
de sorte que W soit un mouvement brownien tel que
dăW 1,W 2ăt = Ï dt.
On designe par F = (Ft)tâ„0 la filtration engendree par B. On considere une economiedans laquelle les dynamiques risque-neutre des taux sans risque r et de lâintensite dedefaut λ de lâentite de reference sont de la forme
drt = (kt â art) dt + Ï dW 1t ,
dλt = (kt â aλt) dt + Ï dW 2t .
Les fonctions strictement positives et deterministes k et k ainsi que les parametresa, a, Ï et Ï sont supposes connus. On considere une v.a. Ï a valeurs dans [0, +â] telleque, si G est la filtration engendree par F et Ï , a savoir Gt = Ft âš Ï(Ï â§ t), alors
4.2 Evaluation des actifs risques 51
(i) Ï admet λ pour G-intensite,(ii) Ï est doublement stochastique relativement a F.
On admettra que, dans ce cas, la propriete suivante est verifiee : tout F-mouvementbrownien est un G-mouvement brownien.
Lâespace probabilise filtre (Ω,A, P, G) est la base du modele dâevaluation desactifs de sorte que la tribu Gt modelise lâinformation disponible a lâinstant t et Ïrepresente lâinstant de defaut de lâentite de reference.
(1) Montrer que la valeur B(t, T ), en t, dâune obligation zero-coupon sans risque dematurite T sâecrit
exp(A(t, T ; a; k; Ï)â rtB(t, T ; a)
).
Quelle est la volatilite de cette obligation zero-coupon ?
(2) Montrer que la probabilite de survie de lâentite de reference au dela de lâinstantT , conditionnellement a lâinformation disponible a lâinstant t, sâecrit
IÏ>t exp(A(t, T ; a; k; Ï)â λtB(t, T ; a)
).
(3) Soit PT la probabilite forward-neutre de la maturite T dans le monde sans risquede defaut. Autrement dit, PT est defini par les relations
dPT
dP
âŁâŁâŁFt
=1
eâ«t0 rs ds
B(t, T )
B(0, T ), (0 †t †T ).
(i) Montrer que le processus BTt = (B1
t + Ïâ«t
0B(s, T ; a) ds,B2
t ) est un PT -mouvement brownien standard.
(ii) En deduire que la valeur B(t, T ), en t, dâune obligation zero-coupon risque dematurite T et de taux de recouvrement nul sâecrit
IÏ>tB(t, T ) exp(A(t, T ; a; k; Ï)â λtB(t, T ; a)
)
ou
kt = kt â ÏÏÏB(t, T ; a).
(4) Montrer que la valeur BRMV (t, T ), en t, dâune obligation zero-coupon risque dematurite T soumise a lâhypothese âFractional Recovery of Market Valueâ et de tauxde recouvrement egal a R â (0, 1) sâecrit
IÏ>tB(t, T ) exp(AâČ(t, T )â (1âR)λtB(t, T ; a)
)
ou
AâČ(t, T ) =(1âR)2Ï2
2
â«T
t
B(s, T ; a)2 dsâ (1âR)
â«T
t
B(s, T, a)ks ds.
52 Modeles a forme reduite
(5) Montrer que la valeur, en t, dâun titre rapportant 1 a lâinstant du defaut, si celui-cise produit avant la maturite T , sâecrit
IÏ>t
â«T
t
e(t, s) ds
ou
e(t, s) = E[λ(s)eââ«s
t (ru+λu) du], (s ℠t).
(6) Soit PâČT la probabilite definie par les relations
dPâČTdP
âŁâŁâŁFt
=1
eâ«t0(rs+λs) ds
P (t, T )
P (0, T ), (0 †t †T )
ou P (t, T ) = E[eââ«T
t (rs+λs) ds|Ft].(i) Montrer que le processus
BTt =
(B1
t +
â« t
0
(ÏB(s, T ; a) + ÏÏB(s, T ; a
)ds,B2
t +â
1â Ï2
â« t
0
ÏB(s, T ; a) ds)
est un PâČT -mouvement brownien.(ii) En deduire que
e(t, s) = B(t, T )(λte
âa(Tât) +
â«T
t
eâa(Tâs)kâČ(s) ds)
ou
kâČ(t) = k(t)â ÏÏÏB(t, T ; a)â Ï2B(t, T ; a).
CHAPITRE 5
Defauts correles
Dans ce chapitre, nous decrivons plusieurs methodes pour definir la loi jointe dâunefamille dâinstants de defauts.
Une entreprise donnee possede necessairement des liens economiques avec dâautresacteurs (fournisseurs, clients, debiteurs...), de telle sorte que son defaut peut affecter laqualite du credit dâautres entreprises. Il sâavere donc crucial de modeliser cette relationde dependance (souvent appelee correlation) entre les defauts lorsque lâon sâinteressea des situations faisant intervenir le risque de defaut de nombreux emetteurs. Detelles situations sont courantes : citons les problemes dâevaluation et couverture desproduits derives de credit sur panier (Nth-to-default, CDO), ceux de la mesure durisque de credit dâun portefeuille de creance et des calculs dâexposition au risque decontrepartie dâun portefeuille de produits derives OTC.
De maniere generale, on distingue deux grands principes :
1. On suppose en general que le principal facteur de risque de credit est un fac-teur economique global. La qualite du credit des entreprises dâun meme secteureconomique (Europe, Etats-Unis, Asie) est donc a priori correlee positivement.
2. La degradation de la qualite de credit dâune firme donnee peut entraıner ladegradation de la sante financiere des entreprises partenaires dâun meme secteurindustriel. La encore, la correlation est donc positive.
Dans la pratique, la co-dependance sâobserve effectivement sur les marches parla degradation du spread de credit des entreprises partenaires lors du defaut dâuneentreprise particuliere.
Lâenjeu est dâelaborer des modeles qui rendent compte de ces phenomenes tout enrestant aisement interpretables. Nous nous restreindrons ici a la modelisation la pluscourante a lâaide des copules.
Nous presentons tout dâabord des methodes de modelisation du defaut dâun en-semble de credits. Nous nous interessons ensuite a la generalisation des deux approchesprecedentes, structurelle et a forme reduite, dans le cadre des defauts multiples. Enfin,
54 Defauts correles
nous traitons le probleme de la calibration sur sauts de spread.
5.1 Produits derives sur un panier de credits
On considere ici des produits derives ecrits sur un panier de k credits possedantles caracteristiques suivantes :
â Ri â (0, 1) est le taux de recouvrement du ieme credit ;â Ni est le nominal du ieme credit ;â Ïi est lâinstant de defaut du ieme credit ;
On fait lâhypothese selon laquelle les instants de defaut sont independants du tauxcourt :
(rs)sâ„0 â„ (Ï1, . . . , Ïk)
et lâon suppose connue la distribution risque neutre
Fi(t) = Pâ[Ïi †t]
de chacun des instants de defaut. Par exemple, dans le cas dâune intensite λi de defautconstante, le spread de CDS si sâecrit
si = (1âRi)λi,
ce qui conduit a la distribution suivante :
Fi(t) = eâλit = exp(â si
1âRi
t).
Dans la suite, on notera
min(Ïi) = Ï(1) < Ï(2) < · · · < Ï(k) = max(Ïi)
le vecteur des statistiques dâordre du vecteur Ï = (Ï1, . . . , Ïk).Nous allons distinguer deux types de produits derives sur panier de credits : les
nth-to-default et les CDO.
nth-to-default
Un nth-to-default offre une protection contre le nieme defaut dâun panier de credits.n â 1, . . . , k est appele ordre de defaut. Nous supposerons pour simplifier que lepanier est homogene, i.e.
âi â 1, . . . , k, Ni = N, Ri = R.
Une prime (spread) dâassurance est payee jusquâa lâoccurrence du nieme defaut. Levendeur de protection paye alors a lâacheteur du nth-to-default la quantite L definiepar :
L = (1âRi)N si Ï(n) = Ïi.
5.1 Produits derives sur un panier de credits 55
La valorisation dâun nth-to-default necessite lâevaluation des jambes fixe et variablesous la forme des esperances suivantes :
NPV (JF ) = Nâ
i
s(Ti+1 â Ti)Eâ[eâ
â«Ti0 rs ds1Ï(n)>Ti
],
et sous lâhypothese dâindependance r â„ (Ï1, .., Ïk) :
NPV (JF ) = Nâ
i
s(Ti+1 â Ti)B(0, Ti)Pâ[Ï(n) > Ti
]
' SN
â«T
0
B(0, t)Qn(t) dt
ou Qn(t) designe la survie du nieme credit a faire defaut au temps t. En ce qui concernela jambe variable :
NPV (JV ) = Eâ[eâ
â«Ï(n)0 rs dsL1Ï(n)â€T
],
et sous lâhypothese dâhomogeneite, L = (1âR)N :
NPV (JV ) = (1âR)N
â«T
0
B(0, t)Pâ[Ï(n) â dt
]
' (1âR)N
â«T
0
B(0, t)Qn(t) dt,
ce qui permet dâen deduire lâexpression du spread immediatement.
Collateralized Debt Obligations (CDO)
Dans cette partie, on note 0 †A < B †1 et N =â
i Ni le nominal du panier.Lâacheteur de protection sur la tranche A-B paye a chaque periode un spread corres-pondant au capital restant sur la tranche et recoit en echange une protection contretoutes les pertes comprises entre AĂN et B ĂN . La perte cumulee Lt a lâinstant tsâecrit :
Lt =kâ
i=1
Ni(1âRi)1Ïiâ€t,
et donc la perte cumulee sur la tranche A-B est
Lt(A, B) = (Lt â A)+ â (Lt âB)+.
On en deduit le pourcentage du capital CA,Bt restant a lâinstant t :
CA,Bt = 1â (Lt â A)+ â (Lt âB)+
B â A.
56 Defauts correles
On peut donc calculer le prix du CDO : lâacheteur de protection verse SN(BâA)CA,BTi
a lâinstant Ti donc la jambe fixe sâexprime comme :
NPV (JF ) =â
i
(Ti+1 â Ti)SN(B â A)Eâ[CA,BTi
]
' SN(B â A)
â«T
0
B(0, t)Q(A,B, t) dt,
ou Q(A,B, t) = Eâ[CA,BTi
] est la survie sur la tranche A-B. Le vendeur de protection
verse a lâinstant du ieme defaut L(A,B)Ï(i) â L
(A,B)Ï(i)â , donc la jambe variable vaut :
NPV (JV ) = Eâ[â«T
0
B(0, t) dLA,Bt
]
=
â«T
0
B(0, t) dEâ[LA,B
t
]
= â(B â A)
â«T
0
B(0, t)Q(A,B, dt).
Tout le probleme se resume donc au calcul de
Q(A,B, t) = Eâ[CA,B
t
]
pour tout t, ce qui necessite de modeliser la loi jointe des (Ï1, . . . , Ïk) connaissant leslois marginales, i.e. la loi des Ïi, (1 †i †k).
Lâoutil privilegie pour resoudre ce type de probleme est la fonction copule (voirlâannexe D).
5.2 Correlation dans les modeles structurels
Dans cette partie, on suppose que chaque defaut est declenche par un mecanismea la Merton, i.e. âi â 1, . . . , k,âXi ⌠N(0, 1) telles que
Ïi †t â Xi †Bi(t).
Xi peut sâinterpreter comme le rendement normalise de valeur de la firme. Pour quelâhypothese sur la loi des Ïi soit verifiee, il faut que
Fi(t) = P[Xi †Bi(t)] = Ï(Bi(t)),
soitBi(t) = Ïâ1(Fi(t))),
ou
Ï(x) =1â2Ï
â«x
ââeâ
t2
2 dt.
Exemple. (Modele a un facteur)On suppose que les variables Xi partagent un facteur commun X, decrivant lâetat
5.3 Correlation des intensites 57
de lâeconomie mondiale. Un tel facteur est dit facteur systemique car il modelise unrisque global, par opposition aux facteurs idiosyncratiques Yi modelisant un risque decredit specifique a lâemetteur. En dâautres termes, âX, Y1, . . . , Yn iid suivant une loiN(0, 1) et Ïi â [0, 1] tels que
Xi = ÏiX +â
1â Ï2i Yi.
Ïi est une mesure de la dependance de la qualite du credit aux facteurs economiquesglobaux.
Remarque. Conditionnellement au facteur X, les instants de defaut sontindependants. En consequence, la loi jointe peut sâecrire :
P[Ï1 †t1, . . . , Ïk †tk]
= E[P[Ï1 †t1, . . . , Ïk †tk|X]
]
= E[P[X1 †B1(t), . . . , Xk †Bk(t)|X]
]
= E[P[X1 †B1(t)|X] . . . P[Xk †Bk(t)|X]
]
=1â2Ï
â«âââ
P[X1 †B1(t)|X = x] . . . P[Xk †Bk(t)|X = x]eâx2
2 dx,
ou
P[Xi †Bi(t)|X = x] = Ï(Ïâ1(Fi(t))â Ïixâ
1â Ï2i
).
Remarque. Cet exemple est en fait un cas de modelisation avec la copule gaussienne.Dans la pratique, le choix de la copule a utiliser est guide par lâhypothese que lâon faitsur la dependance jointe des rendements des actifs des entreprises. Des etudes recentestendent a prouver que cette dependance nâest pas effectivement gaussienne, mais detype student (dont le degre de liberte est estime a 8 ou 9). Ces etudes justifieraient lapratique courante qui consiste a utiliser la copule de student.
5.3 Correlation des intensites
Dans cette section, (Ω,F, P, G = (Gt)tâ„0) designe un espace probabilise satisfaisantaux conditions habituelles. Nous introduisons la definition suivante qui generalise ladefinition unidimensionnelle introduite au chapitre precedent (cf. definition 4.3).
Definition 5.1 Une famille (Ï1, . . . , ÏN) de G-temps dâarret dâintensite λi est ditedoublement stochastique relativement a la filtration F si les processus λi sont F-adapteet si pour tout t1, . . . , tN â [t, s], on a
P[Ï1 > t1, . . . , ÏN > tN
âŁâŁFs âš Gt
]=
Nâi=1
exp(â
â« ti
t
λi(u) du)1Ïi>t.
58 Defauts correles
Exercice. Montrer que dans ce cadre le G-temps dâarret Ï = Ï1 ⧠· · · ⧠ÏN estdoublement stochastique relativement a la filtration F dâintensite λ =
âNi=1 λi.
Ici encore, nous partons dâune filtration F representant lâinformation de marchehors instant de defaut et nous construisons une famille de v.a. Ï1, λN et une filtrationG de la maniere suivante :
Soient λi des processus F-adapte et positif, Îłi les processus t 7â exp(â â«t
0λi(s) ds)
et les Ui des v.a. independantes de loi uniforme sur [0, 1] et independante de Fâ. Sinous definissons les v.a.
Ïi = inft â„ 0 ; Îł(t) †U
et les tribus
Gt = Ft ⚠H1t ⚠· · · ⚠H1
t ,
ou Hit = Ï(Ïi ⧠t), alors il est facile de verifier que les Ïi sont des temps dâarret de
G dâintensite λi (exercice !). On peut montrer en utilisant des arguments similairesa ceux deja employe dans le chapitre precedent (exercice !) que les Ïi sont, de plus,doublement stochastique relativement a F.
5.4 Correlation des instants de defaut
Lâapproche que nous presentons dans cette section est due a Schonbucher et Schu-bert [29]. Dans ce modele, lâon âcorreleâ directement les instants de defaut a lâaidedâune copule. Cette technique va permettre dâeclairer lâimpact de la modelisation surles trajectoires des intensites.
Dans la suite (Ω, A, P) est lâespace probabilise de base sur lequel nous travaillons.Il est suppose suffisamment riche pour contenir toutes les v.a. que nous introduironspar la suite.
Description du modele
On suppose donnes une filtration F contenant lâinformation sur le marche autreque les defauts (background filtration) et une famille de processus F-adaptes et positifsλi. Nous appelons pseudo-intensite ces processus pour des raisons qui seront bientotclaires. Soit U = (U1, . . . , UN) une v.a. independantes de Fâ de loi determinee parune copule C (voir annexe D pour plus de details sur ces objets).
Pour tout 1 †i †N , nous definissons le temps aleatoire Ïi en posant
Ïi = inft â„ 0 ; Îłi(t) †Ui
ou Îłi(t) = exp(â â«t
0λi(s) ds). Il est facile (exercice !) de calculer la fonction de survie
des Ïi :
P[Ï1 > t1, . . . , ÏN ] = E[C(Îł1(t1), . . . , ÎłN(tN)
].
5.4 Correlation des instants de defaut 59
Nous introduisons aussi les filtrations suivantes :
Gi = F âšHi, Gi = Fâ âšGi,
G =Nâš
i=1
Gi, G =Nâš
i=1
Gi,
ou Hi = (Ï(Ïi ⧠t))tâ„0.Le point important a comprendre (et qui est aussi la raison pour laquelle nous
avons appele les processus λi pseudo-intensite), est que lâintensite des Ïi depend demaniere cruciale de la filtration de reference consideree. Par exemple, le processus λi
est bien la Gi-intensite de Ïi (exercice !), mais ce resultat nâest plus vrai relativementa la filtration qui nous interesse ici câest-a-dire G.
Dynamique de lâintensite
Nous allons calculer la G-intensite des instants Ïi induite par le modele etdeterminer sa dynamique. Pour ce faire, nous allons utiliser le theoreme 4.2 et nouscommencons par la remarque suivante qui simplifiera nos calculs : si lâon note Pi(t, T )et Pi(t, T ) la survie conditionnelle de Ïi relative a la filtration G et G respectivement,alors la G-intensite hi de Ïi peut se calculer de la maniere suivante :
hi(t) =â
âTPi(t, T )
âŁâŁâŁâŁT=t
, hi(t) =â
âTPi(t, T )
âŁâŁâŁâŁT=t
.
Pi(t, T ) = E[Ïi > T
âŁâŁGt
], Pi(t, T ) = E
[Ïi > T
âŁâŁGt
].
Avant de demontrer le lemme a la base de ces calculs, nous introduisons quelquesnotations : si d est un sous-ensemble de 1, . . . , N, on note Cd la derivee (Î kâdâk)C ;plus generalement, si d1 et d2 sont deux sous-ensembles de 1, . . . , N, on note Cd1+d2
la derivee (Î k1âd1âk1Î k2âd2âk2)C ; si d2 = j, on ecrira simplement Cd1+j ; on designepar d(t) lâensemble aleatoire k ; Ïk †t. Si u = (u1, . . . , uN) est un vecteur etv un nombre reels, on note u ⧠v et (uâi, v) les vecteurs (u1 ⧠v, . . . , uN ⧠v) et(u1, . . . , uiâ1, v, ui+1, . . . , uN) respectivement.
Lemme 5.2 La survie conditionnelle Pi(t, T ) de Ïi est donnee par la formule suivante
Pi(t, T ) = 1Ïi>tCd(t)(Îłâi(t ⧠Ï), Îłi(T ))
Cd(t)(Îł(t ⧠Ï)).
ou Îł(t) =(e
â«t0 λ1(s) ds, . . . , e
â«t0 λk(s) ds
)
Preuve. Pour montrer ce lemme, on commence par remarquer que
Pi(t, T ) = P[Ïi > T
âŁâŁFâ âšHt
]
=â
d ; d3i
1d(t)=dP[Ïi > T
âŁâŁFâ, Ïj > t, âj 6â d, Uk = Îł(Ïk),âk â d].
60 Defauts correles
Il suffit alors pour conclure de remarquer que pour tout d tel que i 6â d, on a
P[Ïi > T
âŁâŁFâ, Ïj > t, âj 6â d, Uk = Îł(Ïk),âk â d]
=
P[Îłi(T ) > Ui, Îłj(t) > Uj,âj 6â dâ i, Uk = Îł(Ïk),âk â d
âŁâŁFâ]
P[Îłj(t) > Uj,âj 6â d, Uk = Îł(Ïk),âk â d
âŁâŁFâ] =
Cd(Îłâi(t ⧠Ï); Îłi(T ))
Cd(Îł(t ⧠Ï)),
en vertu de lâindependance de U et de Fâ. „
Remarque. Ce lemme signifie que la survie conditionnelle depend du nombre desauts (defauts) deja arrives avant lâinstant t. En effet, cette formule prend en comptelâinformation sur la structure de dependance qui arrive au fur et a mesure que lesdefauts se produisent.
Exemple. (Application 1 )De la proposition precedente, on deduit de facon immediate que sur Ï(1) > t (pasde defaut)
hi(t) = λi(t)γi(t)Ci(γ(t))
C(Îł(t))= hi(t)
car hi(t) = E[hi(t)
âŁâŁGt
]= hi(t).
Exemple. (Application 2 )On va chercher a determiner lâintensite de lâemetteur i sachant quâen t, lâemetteurj 6= i a deja fait defaut. Autrement dit, on se place sur lâevenement Ï(1) = Ïj †t.On a alors :
Pi(t, T ) =Cj(Îłâi(t ⧠Ï), Îłi(T )))
Cj(Îł(t ⧠Ï))
hi(t) = hi(t)
hi(t) = λi(t)γi(t)Cij(γ(t))
Cj(Îł(t)).
La proposition suivante decrit la dynamique de lâintensite induite par le modele.Une fois un modele de recouvrement choisi, nous pourrons en deduire la dynamique duspread court terme. Ce resultat nous ouvrira aussi la voie dâune methode de calibrationde ce type de modele.
Proposition 5.3 Pour tout 1 †i †N , on a
dhi
hi
=dλi
λi
â (hiâii + λi) dtâ dNi +â
j 6âd : j 6=i
âij(dNj â hj) dt,
5.4 Correlation des instants de defaut 61
ou Ni(t) = 1Ïâ€t et
âij = âij(t, d(t)) =Cd(t)+i+jCd(t)
Cd(t)+iCd(t)+j
(Îł(Ï â§ t))â 1.
Le terme dλi/λi est le terme de risque de diffusion de hi : λi et hi ont la memevolatilite. Le terme suivant est un terme correctif exprimant le fait que hi 6= λi. Leterme â dNi est le saut a 0 si lâemetteur i fait defaut. Le terme de somme representelâinfluence sur lâintensite de Ïi du comportement des autres emetteurs : il prenden compte lâinformation contenue dans les defauts potentiels et la survie de toutesles entites de reference du panier. Cette information est resumee dans la matriceâ = (âij)ij. Cette matrice â depend pour une grande part des caracteristiques de lacopule.
Preuve. Nous supposons que λi est une diffusion. Au vu du lemme precedent, hi
saute a chaque defaut et tombe a 0 en cas de defaut de lâemetteur i. Soient Ï(k) < Ï(k+1)
deux instants de defauts consecutifs tels que Ïi > Ï(k). Le saut de lâintensite hi ent = Ï(k+1) se calcule explicitement :
âhi(t)
hi(tâ)=
â1, si Ï(k+1) = Ïi,Cd+i+j
Cd+j
â Cd+i
Cd
, si Ï(k+1) = Ïj, i 6= j.
Pour obtenir la dynamique du terme de diffusion de hi sur lâintervalle ]]Ï(k), Ï(k+1)[[, onapplique la formule dâIto a
hi = λif(γ), ou f(γ) = γiCd+i(γ)
Cd(Îł),
pour obtenir
dhi = λi df(γ) + f(γ) dλi
= λifi dγi + λi
â
j /ââd : j /âi
fj(γ) dγj + hidλi
λi
= hi
(dλi
λi
+ λi dt + hi
(Cd+i+iCd
Cd+iCd+i
â 1)
dt +â
j /âd : j 6=i
(Cd+i+jCd
Cd+iCd+j
â 1)hj dt
)dt.
Pour trouver la dynamique de hi sur lâintervalle ]]Ï(k), Ï(k+1)]], il suffit dâintegrer le sauten Ï(k+1) ; il vient alors
dhi
hi
=dλi
λi
â (hiâii + λi) dtâ dNi +â
j 6âd : j 6=i
âij(dNj â hj) dt,
et le resultat sâen deduit immediatement. „
62 Defauts correles
Calibration sur sauts de spread
Nous allons nous servir de ce resultat pour expliquer comment calibrer la structurede correlation du modele sur un a priori de sauts du spread court-terme.
Supposons quâaucun defaut nâa eu lieu juste avant t et quâen t lâemetteur j fassedefaut. Si lâon note hâj
i (t) la valeur juste apres cet evenement de credit, on deduit duresultat precedent que
hâji (t)
hi(t)= 1 + âij(t, â ).
et dans le cadre du modele de recouvrement MVR la meme relation est vrai pour lespread court-terme (et est approximativement vrai pour le modele de recouvrementdit RFV recovery of face value). Par consequent, etant donne un a priori du tradersur la valeur du saut de spread de lâemetteur i en cas de defaut de lâemetteur j, il estpossible dans les bons cas, de choisir les parametres de la fonction copule redonnantcet a priori.
Commencons par examiner la nature de ce saut de spread lorsque la copule utiliseeest archimedienne. Autrement dit, on suppose quâil existe une fonction Ï, appeleegenerateur (qui est, par exemple, la transformee de Laplace inversible dâune v.a. Y >0 : Ï(s) = E[eâsY ], Ï = Ïâ1) telle que
C(u) = Ï( Nâ
i=1
Ï(ui)).
Par exemple, la copule de Gumbel a pour generateur la fonction Ï(s) = (â ln(x))Ξ etcorrespond a une v.a. de loi α-stable de parametre α = 1/Ξ. La copule de Clayton a,
quant a elle, pour generateur la fonction Ï(s) = (1 + s)â1/Ξ et correspond a une v.a.Y de loi gamma de parametre 1/Ξ.
Dans le cadre des copules archimediennes, on peut montrer (exercice !) que, si tousles instants de defaut sont posterieurs a t,
hi(t) = λiÎłiÏâČ(Îłi)
C(Îł)ÏâČ(C(Îł))
hâji (t)
hi(t)= âC(Îłt)Ï
âČâČ(C(Îłt))
ÏâČ(Îłt).
Et ces formules, nous conduisent a (exercice !)
hi = λi
( Îi
âÎâΞ
)Ξâ1
,
hâji (t)
hi(t)= 1 +
Ξ â 1
âÎâΞ
5.4 Correlation des instants de defaut 63
dans le cas de la copule de Gumbel et a
hi = λi
(C(Îł)
Îłi
)α
,
hâji (t)
hi(t)= 1 + α
dans le cas de la copule de Clayton.Il y a ici deux remarques importantes a faire. La premiere câest que les copules
archimediennes nâautorisent pas de structure asymetriques de dependance : lorsquâuneentite de reference fait defaut lâintensite de defaut de tout les autres noms du panierest multipliee par le meme facteur. Dans le cas de la copule de Gumbel, ce facteur estindependant du moment ou le saut a lieu et cette propriete peut sâaverer interessantecomme nous le verrons dans la suite.
Il apparaıt necessaire de generaliser le concept de copules archimedienne pourpouvoir autoriser des changements asymetriques dans le spread court-terme en casde defaut dâune firme. Câest pourquoi, suivant [28], on peut utiliser des copules ar-chimediennes generalisees (cf. Appendice D).Exercice. (Evaluation de CDO par Monte-Carlo.)On considere un panier de credit contenant N noms. On note Ïi lâinstant de defaut duieme nom ; Ni son nominal ; Ri son taux de recouvrement et λi son intensite risque-neutre supposee constante. Le taux sans risque est constant egal a r. On suppose quela structure de dependance de la loi jointe des Ïi est caracterisee par la copule gaus-sienne associee a une matrice de correlation Ï. On considere un CDO sur ce panier depoints dâattachement 0 †A < B †1.(1) Exprimer sous forme dâesperance la valeur presente des deux jambes du CDO ensupposant que la jambe de prime prend en compte tous les flux et que la jambe deprotection est payee a la fin de la periode au cours de laquelle le defaut a lieu.(2) Proposer un algorithme de simulation par Monte-Carlo pour calculer la valeurdes deux jambes du CDO.
Exercice. (Determination de la loi du premier et du second instant de defaut).On considere un panier de credit contenant N noms. On note Ïi lâinstant de defautdu ieme nom ; Ni son nominal ; Ri = R son taux de recouvrement suppose constant.Le taux sans risque est constant egal a r.
On suppose de plus quâil existe une v.a. X (facteur de risque) telle que condition-nellement a X les Ïi forment une famille de v.a. independantes et lâon pose
pi(t,X) = P[Ïi †t|X], qi(t,X) = P[Ïi > t|X].
On designe par Nt la v.a.âN
i=1 IÏiâ€t et on considere sa fonction generatrice desmoments
ÏNt(u) = E[eNt ] =Nâ
l=0
P[Nt = l]ul.
64 Defauts correles
(1) Montrer que
ÏNt(u) = E[ Nâ
i=1
(qi(t, X) + pi(t,X)u
)].
(2) En deduire une expression integrale pour les probabilites P[Nt = 0] et P[Nt = 1].(3) On suppose desormais que les Ïi sont des variables exponentielles dâintensitesrespectives λi et que leur structure de dependance est decrite par la copule associeea un modele gaussien a 1 facteur a correlation constante. Autrement dit, on supposeque
Ïi †t ââ Xi = ÏX +â
1â Ï2Yi †Bi(t),
ou les v.a. X, Y1, . . . , YN sont des gaussiennes standard independantes. En utilisantles resultats precedents, calculer des formules semi-explicites pour les jambes dâunFirst-2-Default (jambe de prime de tenant uniquement compte des flux intervenantavant le defaut, et jambe de protection payee a la fin de la periode en cours).
CHAPITRE 6
Modele Hybride : le cas des obligations convertibles
Ce chapitre constitue une application des chapitres precedents a partir de lâexempledes obligations convertibles. Ces produits prennent une importance de plus en plusconsiderable et certains hedge funds fondent meme toute leur strategie dâinvestis-sement sur cet unique actif. Apres une breve description des caracteristiques de cestitres, et de leurs sources de risque, nous presentons la structure des modeles du risquede credit adaptes a ces produits, ainsi que les techniques numeriques intervenant danslâimplementation de tels modeles. La modelisation des obligations convertibles permetde repliquer artificiellement le produit, dans une optique de couverture des risques.
6.1 Caracteristiques des obligations convertibles
6.1.1 Definition
Une obligation convertible est un titre de creance similaire a une obligation tradi-tionnelle a ceci pres quâelle peut etre echangee contre un nombre predetermine dâautrestitres (habituellement lâaction de lâentreprise emettrice). Le detenteur dâun tel pro-duit recoit un coupon paye periodiquement jusquâa la conversion de lâobligation ousa maturite. Si lâobligation nâest pas convertie avant la maturite, lâinvestisseur recoitle nominal, comme dans le cas dâune obligation traditionnelle. Apres conversion, lâin-vestisseur possede des actions : il recoit des dividendes mais plus de coupon ni, deremboursement du nominal. Le prix de conversion etant predetermine, tout se passedonc comme si lâemetteur avait vendu un call sur lâaction sous-jacente. Comme ce callpossede une valeur pour lâinvestisseur, celui-ci accepte de recevoir un coupon moinsimportant que dans le cas dâune obligation standard. Les obligations convertibles sontsouvent considerees comme de la dette subordonnee, en ce sens que si lâentrepriseemettrice fait defaut avant la maturite, les obligations traditionnelles ont priorite surles obligations convertibles, qui elles memes ont priorite sur les actions. Les obliga-tions convertibles constituent donc des produits hybrides complexes, a la limite des
66 Modele Hybride : le cas des obligations convertibles
produits de taux, dâactions et de credit.
6.1.2 Utilisation des obligations convertibles
Les entreprises emettent des obligations convertibles car celles-ci permettent delever des fonds importants de facon economique, la presence de lâoption de conversionpersuadant les investisseurs dâaccepter un taux de coupon moins eleve que ceux en vi-gueur. Les obligations convertibles sont aussi utilisees au cours dâoperations financierescomme par exemple les Leverage BuyâOut (une prise de controle particuliere dâunesociete qui consiste a en financer lâachat par un endettement, pour exploiter lâeffet delevier), comme motivation pour les nouveaux dirigeants : si lâentreprise fait du profitet que le prix de ses actions augmente, le prix des obligations convertibles augmenteraaussi.
6.1.3 Obligations convertibles et options
Les obligations convertibles sont des produits derives complexes, dont le prixdepend a la fois de la valeur de lâactif et du passif de lâentreprise. Pour simplifierlâetude de leur comportement, on les decompose parfois en produits financiers plussimples. Il existe deux representations de base, reliees par la relation de parite call-put :
â OC = Obligation + Call dâechange de lâobligation contre lâaction ;â OC = Action + Put dâechange de lâaction contre lâobligation + Swap dâechange
des dividendes contre les coupons jusquâa maturite.
La premiere representation peut etre interpretee dans le cadre des marches detaux dâinterets, lâemetteur vendant une obligation, et un call pour reduire le coutde la dette. La seconde representation est plus coherente dans le cadre des marchesdâactions, lâinvestisseur possedant une action, un put de protection, et un swap pourassurer un paiement de coupons constant au lieu de dividendes aleatoires.
La convertibilite de lâobligation a lieu jusquâa maturite pour les produits a la va-nille, donc les detenteurs dâobligations convertibles vont exercer lâoption de facon aoptimiser leur richesse. Cependant, pour la plupart des produits convertibles, la possi-bilite dâexercer lâoption nâa lieu quâapres une periode predeterminee. Dâautres produitsfixent des dates ou des periodes de conversion. De plus, les obligations convertiblesincluent parfois des clauses dites callable et puttable : lâobligation est dite callable silâemetteur se reserve la possibilite de racheter le produit a un prix fixe au prealable. Ledetenteur peut alors choisir de convertir le produit en actions, ou bien est oblige de lerevendre a lâemetteur. En pratique, cette clause est utilisee pour forcer la conversionlorsque la valeur du produit converti est un peu au dessus de la valeur de lâobligation.Un produit callable possede un degre dâoptionnalite moindre que pour une obligationconvertible a la vanille et est donc moins cher. A contrario, une obligation convertibleputtable donne le droit a lâinvestisseur de revendre le produit a lâacheteur a un prixpredetermine. De tels produits sont donc plus chers.
6.1 Caracteristiques des obligations convertibles 67
6.1.4 Les determinants du contrat
Le prix des obligations convertibles depend de nombreuses caracteristiquesdefinissant le comportement du contrat. Nous donnons ici les principales :
1. le nominal est la valeur faciale de lâobligation ;
2. le coupon est le taux dâinteret annuel verse par le produit ;
3. la frequence des coupons represente le nombre de coupons payes par an ;
4. le ratio de conversion est le nombre dâactions sous-jacentes contre lequel lâobli-gation convertible peut etre echangee ;
5. le prix de conversion represente le prix paye pour chaque action a la conversion,câest a dire le quotient du nominal par le ratio de conversion ;
6. la parite represente le ratio de conversion multiplie par le prix des actions ;
7. la premiere date de conversion est la premiere date a laquelle le detenteur estautorise a convertir sâil existe une periode de prescription ;
8. lâexistence dâun call emetteur (caractere callable) ;
9. lâexistence dâun put investisseur (caractere puttable).
Tous ces parametres sont generalement definis dans le contrat et sont pris encompte pour etablir le prix initial de lâobligation convertible. Cependant, pendant lavie de lâobligation, ce prix va etre influence par les variables de marche suivantes :
1. le prix des actions sous-jacentes ;
2. la volatilite des actions ;
3. le taux de dividende ;
4. le taux dâemprunt de lâaction (taux de REPO) ;
5. le taux sans risque ;
6. le spread de credit de lâemetteur.
Les quatre premiers facteurs sont tous relies au prix de lâaction sous-jacente, doncpour simplifier, le prix des obligations convertibles est influence par trois sources derisque : le prix de lâaction, le taux sans risque, et le spread de credit de lâemetteur.
6.1.5 Influence des variables de marche sur le prix
Comme les parametres intrinseques nâaffectent plus le prix une fois que lecontrat est etabli, les variations du prix durant la vie de lâobligation convertibleresultent des variations dâun ou plusieurs parametres de marche. Il est possibledâetudier historiquement la dependance des variations du prix par rapport a cellesde variables de marche. Les tendances generales sont resumees dans le tableau suivant :
68 Modele Hybride : le cas des obligations convertibles
Param. intrinseques Var. Prix Param. de marche Var. PrixMaturite Prix de lâaction Coupon Taux sans risque Nominal Spread de lâemetteur
Prix de conversion Volatilite de lâaction Existence dâun call Dividendes Existence dâun put Taux de REPO
Eu egard a la dependance complexe du prix des obligations convertibles aux troissources de risque (taux, action, et credit), lâevaluation de tels produits necessite unemodelisation du risque de credit mettant en jeu les techniques introduites aux cha-pitres precedents.
6.2 Modelisation du risque de credit
Dans cette section, nous considerons un espace probabilise filtre(Ω,F, P, G =
(Gt)tâ„0
)et nous nous placons dans le cadre doublement stochastique (voir chapitre 4)
dans lequel lâinstant de defaut Ï possede une G-intensite λ, F-previsible ou F est unesous-filtration de la filtration G generee par le processus de diffusion de lâaction. Poursimplifier le probleme, nous allons supposer que la variation des taux dâinterets estdeterministe (il est en effet dâusage de considerer que les variation de taux agissentau second ordre face a lâinfluence du risque de defaut). Nous nous interessons doncuniquement a lâinfluence du prix de lâaction et du risque de credit sur le prix delâobligation convertible. Ces deux sources de risque ne peuvent etre considerees commeindependantes : supposons en effet que la valeur du spot chute, ceci peut presager delâimminence dâun possible defaut, et en consequence, le spread de credit aura tendancea augmenter. De facon empirique, on remarque que lâevolution du spread de credit acinq ans en fonction de la valeur du spot possede la forme representee a la figure 6.1.
Spot
Spread 5 ans
Fig. 6.1 â Evolution du spread a 5 ans en fonction du spot.
6.3 Implementation des modeles 69
Nous allons donc utiliser un modele hybride, câest a dire que lâintensite de defautλ est fonction convexe de S :
λt = λ(t, St),
prenant une forme similaire a celle representee sur la figure 6.2.
(St)tâ„0
(λt)tâ„0
Fig. 6.2 â Relation intensite-spot.
On trouve dans la litterature plusieurs formes parametriques differentes pour λdont
λ(t, St) = a +b
St
λ(t, St) = câ d ln(St)
λ(t, St) = e + feâgSt .
La premiere parametrisation se retrouve dans le modele de Takahashi et al (2001)notamment, la deuxieme par Bloch et Miralles (2002), et la troisieme par Arvanitiset Gregory (2001). Ces formes parametriques permettent de capturer lâune des ca-racteristiques du prix des obligations convertibles : quand le prix de lâaction S est treseleve par rapport au prix de lâobligation elle-meme, lâobligation convertible se com-porte comme un call sur S. En revanche, lorsque la valeur de lâaction S est tres faible,lâintensite λ augmente et avec elle la probabilite de defaut, donc le prix de lâobligationchute. (voir [11]). Le graphe du prix de lâobligation convertible, en fonction du prixde lâaction possede donc la forme decrite sur la figure 6.3.
6.3 Implementation des modeles
Considerons une obligation convertible de nominal N et de maturite T ecrite surun sous-jacent S ne versant pas de dividende, de taux de recouvrement ÎŽ, et de ratio
70 Modele Hybride : le cas des obligations convertibles
0
(St)tâ„0
Prix
Fig. 6.3 â Prix de lâobligation convertible en fonction du prix de lâaction.
de conversion Îș. Lâobligation est supposee verser continument un taux de couponconstant c. Nous supposons que la valeur de lâaction S suit lâequation de diffusionavec saut suivante :
dSt = rtSt dt + ÏSt dWt â Stâ(dNt â λt dt) sur t < Ï= (rt + λt)St dt + ÏSt dWt â Stâ dNt sur t < Ï,
ou W est un mouvement Brownien standard, et Nt = 1Ïâ€t un processus de Coxdâintensite λ. Comme precedemment, nous faisons lâhypothese que lâintensite de defautλ est une fonction deterministe de t et de S.
6.3.1 Les arbres multinomiaux
Lâidee a la base des modeles de resolution par arbre est la discretisation en tempsde la dynamique de lâaction. On divise la periode consideree en petits intervalles detemps de longueur ât, et de calculer le prix a lâinstant initial par retropropagationdans lâarbre de la matrice des valeurs finales.
On fait lâhypothese que le defaut ne peut avoir lieu quâa un noeud de lâarbre (voirfigure 6.4.
En un noeud donne de lâarbre, la firme peut faire defaut avec une probabilite1 â eâλtât â auquel cas la valeur de lâobligation convertible tombe a ÎŽ â ou survivreavec une probabilite eâλtât. Comme dans un arbre binomial classique, le rendementde lâaction peut etre positif avec une probabilite eâλtâtp pendant le petit intervallede temps ât et prendre une valeur ”+ ou etre negatif avec une probabilite eâλtât(1âp) de valeur ”â. La valeur de lâobligation convertible au temps t â 1 est egale aumaximum de la valeur convertie, i.e. ÎșS, et de la valeur V de lâobligation calculee par
6.3 Implementation des modeles 71
1â eâλ(S)ât
ât
ÎŽ
Ӊ
”+
eâλ(S)ât(1â p)
eâλ(S)âtp
ttâ 1
Fig. 6.4 â Retropropagation et risque de defaut.
retropropagation, soit
V (S, tâ 1) = max
(ÎșS, eâ(rtâc)ât
(eλ(S,t)ât
(pV (S”+, t)
+ (1â p)V (S”â, t))
+(1â eâλ(S,t)ât
)ÎŽ))
.
En chaque noeud de lâarbre, la valeur de S est determinee par la valeur au pasprecedent et le rendement. On en deduit la valeur de λ grace a la formule parametrique,et celle du prix de lâobligation convertible via lâexpression ci-dessus.
Reste a initialiser la matrice des valeurs du prix a maturite. Pour chaque valeurde ST , le prix final est egal au maximum de lâensemble des flux obligataires et de lavaleur convertie soit
V (S, T ) = max(ÎșS, NecT ).
Cet algorithme peut etre etendu facilement en ajoutant des clauses callable ou put-table, des periodes de non-convertibilite, des dividendes, etc...
6.3.2 Les equations aux derivees partielles
Sachant que le prix V de lâobligation convertible est fonction de S et de t, Nousallons utiliser la formule dâIto avec sauts pour trouver lâequation aux derivees partiellesquâil verifie. Considerons un portefeuille Ï compose dâune obligation convertible, etdâune quantite α de sous-jacent S :
Ï = V + αS,
par application de la formule dâIto :
dÏ(t, St) =âV
âtdt +
(âV
âS+ α
)dS +
1
2
â2V
âS2dăS, Să+ âV + αâS.
72 Modele Hybride : le cas des obligations convertibles
On peut donc supprimer le risque lie a la variation Brownienne en choisissant α = ââVâS
et donc
dÏ(t, St) =âV
âtdt +
1
2Ï2â2V
âS2dt + (ÎŽ â 1)V dNt â âV
âSdNt.
=âV
âtdt +
1
2Ï2â2V
âS2dt +
((ÎŽ â 1)V â âV
âS
)(dNt â λt dt)
+((ÎŽ â 1)V â âV
âS
)λt dt.
Les sauts etant compenses, le portefeuille est sans risque, donc par absence dâoppor-tunite dâarbitrage, il rapporte le taux sans risque r :
E[ dÏ
ÏââŁâŁâŁFt
]= (rt â c) dt,
donc finalement
âV
ât+
1
2Ï2â2V
âS2â λt
âV
âS+ rt
âV
âSS =
((rt â c) + (1â ÎŽ)λt
)V,
les conditions a la limite etant identiques a celles utilisees dans le cas des arbres.Ce systeme peut ensuite etre resolu par des methodes numeriques de differences ouelements finis.
6.3.3 Synthese des obligations convertibles
Outre la valorisation des produits, la modelisation des obligations convertiblesrevet un interet tout particulier en matiere de couverture des risques. En effet, lâidenti-fication des sources de risque va permettre de repliquer le produit par une combinaisondâautres actifs.
Les obligations convertibles sont souvent considerees en premiere approximationcomme un produit derive sur lâaction sous-jacente. Nous avons vu en effet quâellepouvait etre globalement decomposee comme une obligation classique ainsi quâunoption dâechange. Cette vision neglige cependant les risques de credit et de taux liesau produit. En effet, comme le montre la figure 6.3, le prix de lâobligation convertiblene se comporte pas de la meme facon que celui dâun derive action. Une couverture endelta classique par achat du sous-jacent nâimmuniserait pas le portefeuille aux fortesvariations de S a la baisse (risque de defaut) et aux changements de volatilite. Enpratique, les traders repliquent lâeffet de volatilite en couvrant en vega, câest a dire enprenant une position opposee sur des options ayant la meme sensibilite a la volatilite.Enfin, le risque de credit peut etre replique par des CDS digitaux, a savoir un contratpayant 1 au temps t si Ï â€ t. Ces produits ne sont malheureusement pas du toutliquides sur le marche, et sont eux meme repliques par des CDS classiques dans lapratique. Le risque de taux etant, pour sa part, couvert par des swaps.
Lâun des principaux problemes lies a cette approche pour la gestion des risquesliee aux obligations convertibles est la grande maturite de ce type de contrat : selonJim Vinci, directeur des risques du fond dâarbitrage dâobligations convertibles Paloma
6.3 Implementation des modeles 73
Partners. âOne of the final pieces would be if dealers start offering more longer-datedequity options â the replication possibility in convertibles would become even betterâ.En effet, a lâheure actuelle, la liquidite des options sur action de longue maturite estinsuffisante.
Bibliographie
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[30] Vasicek (O.). Credit Valuation. Working Paper. KMV Corporation.www.kmv.com (1984).
ANNEXE A
Theorie generale des processus
Cette annexe se veut une presentation tres succinte de la theorie generale des pro-cessus et du calcul stochastique. Pour plus de details et les preuves, le lecteur pourraconsulter [5]. Dans toute la suite (Ω,F, P) designe un espace probabilise complet.
A.1 Generalites
Lâobjet fondamental de la theorie sâappelle filtration et consiste en la donnee dâunefamille croissante (Ft)tâ„0 de sous-tribu de F :
Fs â Ft, âs †t.
Nous supposons que les hypotheses suivantes sont verifiees :(1) La tribu F0 contient les ensembles P-negligeables,(2) Ft =
âs>t Fs (continuite a droite).
Les conditions (1) et (2) sâappellent les conditions usuelles de la theorie generale desprocessus.
Un processus sur cet espace est une famille (Xt)tâ„0 de v.a. a valeurs reelles. Si lâap-plication (t, Ï) 7â Xt(Ï) est mesurable, on dit que le processus (Xt)tâ„0 est mesurable.Si pour tout t â„ 0, la v.a. Xt est Ft-mesurable, on dit que le processus est adapte. Sipour P-presque tout Ï la trajectoire t 7â Xt(Ï) est continue (respectivement continuea droite, continue a gauche, pourvue de limite a droite,...) on dit que le processus(Xt)tâ„0 est continu (respectivement cad, cag, lad, ...). Un processus continu a droiteet pourvue de limites a gauches est dit cad-lag. Un tel processus est mesurable.
Soient X = (Xt)tâ„0 et Y = (Yt)tâ„0 deux processus. On dit que X et Y sont desversions lâun de lâautre ou que Y est une modification de X si Xt = Yt p.s. pour toutt â„ 0. On dit que X et Y sont indistinguables si X. = Y. p.s. Une partie A de R+ĂΩest dite evanescente si sa projection sur Ω est une partie P-negligeable. Un processusX est dit evanescent sâil est indistinguable du processus nul.
78 Theorie generale des processus
A.2 Temps dâarret et tribus associees
Une v.a. positive T est appelee un temps dâarret de la filtration (Ft)tâ„0 si
T †t â Ft
pour tout t â„ 0. La filtration etant suppose continue a droite, nous pouvons remplacerlâensemble T †t par T < t dans la definition precedente.
On verifie que si S et T sont des temps dâarret, il en est de meme des v.a. S â§T etSâšT . Si (Sn) est une suite de temps dâarret telle que Sn â S (respectivement Sn â S),alors S est un temps dâarret.
Soit T un temps dâarret. La tribu FT des evenements anterieurs a T est lâensembledes A â Fâ tels que la v.a. TA = T1A +â1Ac soit un temps dâarret. On verifie que
FT = A â Fâ ; A â© T †t â Ft, ât â„ 0 .
La tribu FTâ des evenements strictement anterieurs a T est la tribu engendree parF0 et les evenements de la forme
A â© t < T , A â Ft (t â„ 0) .
Les resultats de base sur ces differentes notions sont regroupes dans le theoremesuivant.
Theoreme A.1 Soient S et T deux temps dâarret.(1) FSâ â FS et S est FSâ-mesurable,(2) Pour tout A â FS, A â© S †T â FT et A â© S < T â FTâ. En particulier,S †T et S = T appartiennent a FSâ©FT et S < T appartient a FSâ©FTâ.,
(3) Pour tout A â FS, A â© S = +â â FSâ,(4) Si S †T , alors FS â FT et FSâ â FTâ. Si de plus, S < T partout sur0 < T < +â, alors FS â FTâ,
(5) Soit (Sn)nâN une suite monotone de temps dâarret. Si Sn â S, alors FSâ =âšnâN FSnâ. Si de plus, Sn < S sur 0 < S < +â, alors FSâ =
âšnâN FSn. Si
Sn â S, alors FS =â
nâN FSn.
Nous presentons maintenant lâexemple fondamental de temps dâarret. On dit quâunprocessus (Xt)tâ„0 est progressivement mesurable ou progressif si lâapplication
[0, t]à Ω â R , (s, Ï) 7â Xs(Ï)
est B([0, t]) â Ft-mesurable. En particulier, un processus progressivement mesurableest adapte. Les processus adaptes et continus (respectivement cad, cag,...) sont pro-gressivement mesurables. On note Prog la tribu sur R+ĂΩ engendree par les processusprogressifs. Les elements de cette tribu sont appeles ensembles progressifs. Soit A unepartie de R+ à Ω. On appelle debut de A la fonction positive definie sur Ω par
DA(Ï) = inf t â„ 0 ; (t, Ï) â A ,
avec la convention inf â = +â.
Theoreme A.2 Le debut DA dâun ensemble progressif A est un temps dâarret de lafiltration (Ft)tâ„0.
A.3 Les tribus optionnelles et previsibles 79
A.3 Les tribus optionnelles et previsibles
Soient U, V deux applications definies sur Ω et a valeurs dans R+ telles que U †V .On pose
[[U, V [[= (t, Ï) â R+ à Ω ; U(Ï) †t < V (Ï) .
Remarquer que [[U, V [[ est un sous-ensemble de R+ ĂΩ. Nous definissons de la mememaniere les intervalles de la forme [[U, V ]], ]]U, V ]],... En particulier, [[U ]] = [[U,U ]] estle graphe de U .
Definition A.3 La tribu optionnelle est la tribu O sur R+ à Ω engendree par lesprocessus adaptes et cad-lag. La tribu previsible est la tribu P sur R+ à Ω engendreepar les processus adaptes et cag sur (0, +â).
Exemple. Si S et T sont deux temps dâarret tels que S †T , les ensembles [[0, T ]] et[[S, +â]] sont optionnels (car adaptes et cad-lag). Donc, [[S, T [[ est optionnel. En pre-nant T = S +1/n et en faisant tendre n â +â, nous prouvons que [[S]] est optionnel.Ainsi, tous les intervalles stochastiques determines par S et T sont optionnels. Plusgeneralement, le processus Z1[[S,T [[, ou Z est FS-mesurable, est optionnel. Il suffit, eneffet, de le verifier pour Z = 1A(A â FS) et dans ce cas Z1[[S,T [[ = 1[[SA,TA[[. Lâintervalle]]S, T ]] est previsible (car adapte et cag).
Nous resumons dans les deux theoremes suivants les proprietes fondamentales destribus O et P.
Theoreme A.4(1) Les ensembles optionnels sont progressifs,(2) Si T est un temps dâarret et X un processus progressif, alors XT 1T<+â est
une v.a. FT -mesurable. Inversement, si Y est une v.a. FT -mesurable alors ilexiste un processus optionnel X tel que Y 1T<+â = XT 1T<+â,
(3) La tribu optionnelle est engendree par les intervalles stochastiques des la forme[[S, +â[[, ou S est un temps dâarret,
(4) La tribu optionnelle est engendree par les processus adaptes et continus adroite.
Theoreme A.5(1) Les ensembles previsibles sont optionnels,(2) Si T est un temps dâarret et si X est un processus previsible, alors la va-
riable aleatoire XT 1T<+â est FTâ-mesurable. Inversement, si Y est une v.a.FTâ-mesurable alors il existe un processus previsible X tel que Y 1T<+â =XT 1T<+â.
(3) La tribu previsible est engendree par les ensembles de la formes
0 Ă A (A â F0) et (s, t]Ă A (0 < s < t, A â Fs).
A.4 Temps dâarret previsibles
Definition A.6 Un temps dâarret T est dit previsible sâil existe une suite (Tn)nâNde temps dâarret telle que
80 Theorie generale des processus
(1) Tn â T ,(2) Tn < T sur T > 0, pour tout n.
Dans ce cas, on dit que la suite (Tn)nâN annonce T .
Sous les conditions habituelles une suite (Tn) annonce un temps dâarret T desquâelle lâannonce presque surement. En effet, si (Tn) annonce T sur A, ou Ac estnegligeable, alors A â F0 et les temps dâ arret
T âČn = Tn1Ac + (T â 1/n)+1A
annoncent T partout.La signification intuitive de la definition est claire : un phenomene physique est
previsible sâil existe une suite de signes avant-coureurs annoncant son apparition.
Theoreme A.7 Soient S un temps dâarret previsible, A â FSâ et T un tempsdâarret. Alors A â© S †T â FTâ. En particulier, S < T, S = T, S †Tappartiennent a FTâ.
Theoreme A.8(1) Si S, T sont des temps dâarret previsibles, il en est de meme des temps S ⧠T
et S âš T ,(2) Soit (Sn) une suite monotone de temps dâarret previsibles. Si Sn â S, alors S
est un temps dâarret previsible. Si Sn â S et si pour tout Ï il existe n(Ï) tel queSn(Ï) = S(Ï),ân â„ n(Ï), alors S est un temps dâarret previsible,
(3) Si S et T sont des temps dâarret previsibles, il en est de meme de SS<T,(4) Si T est un temps dâarret previsible, TA est un temps dâarret previsible si et
seulement si A â FTâ.
Theoreme A.9 La tribu sur R+ à Ω engendree par les intervalles stochastiques dela forme [[S, T [[, ou S et T sont des temps dâarret previsibles, est la tribu previsible P.
A.5 Classification des temps dâarret
On se propose de classer les temps dâarret selon leur situation âgeometriqueâpar rapport aux temps dâarret previsibles. Plus precisement, nous introduisons ladefinition suivante :
Definition A.10 Un temps dâarret T est dit accessible sâil existe une suite (Tn)nâNde temps dâarret previsibles telle que
[[T ]] âânâN
[[Tn]] , a un ensemble evanescent pres,
ce qui sâecrit encore P[â
nT = Tn < +â] = P[T < +â].Un temps dâarret T est dit totalement inaccessible si pour tout temps dâarret
previsible S, on a
[[T ]] â© [[S]] = â , a un ensemble evanescent pres,
ce qui sâecrit encore P[S = T < +â] = 0.
A.5 Classification des temps dâarret 81
Les temps dâarret previsibles sont accessibles. Un temps dâarret a la fois accessibleet totalement inaccessible est p.s. infini. Un temps dâarret totalement inaccessible estp.s. strictement positif.
Soit T un temps dâarret et considerons lâensemble S[T ] des suites croissantes detemps dâarret majorees par T . Pour toute suite (Sn) de S[T ], posons
A[(Sn)] = limnâ Sn = T ; Sn < T, ân âȘ T = 0 .
Si lâon oublie T = 0, A[(Sn)] est lâensemble sur lequel la suite (Sn) annonce T . Deplus, nous avons
A[(Sn)] = T = 0 âȘân
Sn < T \ S < T ,
ce qui prouve que A[(Sn)] est un element de la tribu FTâ. Soit A[T ] un representantde la reunion essentielle de tous les A[(Sn)] et I[T ] = A[T ]c. Remarquons que A[T ]contient p.s. les ensembles T = 0 et T = +â.Theoreme A.11
(1) Un temps dâarret T est accessible si et seulement si A[T ] = Ω p.s.(2) Un temps dâarret T est totalement inaccessible si et seulement si A[T ] = T =
+â p.s.(3) Le temps dâarret TA[T ] est accessible, le temps dâarret TI[T ] est totalement in-
accessible et cette decomposition est unique, en ce sens que si U et V sont deuxtemps dâarret tels que U soit accessible, V totalement inaccessible, U ⧠V = T ,U âš V = +â, alors TA[T ] = U p.s. et TI[T ] = V p.s.
ANNEXE B
Formule dâIto avec sauts
Le but de cet appendice est dâenoncer une version de la formule dâIto pour desprocessus avec des sauts. Pour plus de details sur ces questions le lecteur pourraconsulter lâouvrage [23] ou le survey [12]. Dans la suite (Ω,A, P, (Ft)tâ„0) designe unespace probabilise filtre satisfaisant aux conditions habituelles.
Avant dâaller plus lois rappelons quelques definitions classiques : une fonctionF : R+ 7â R est dite continue a droite si limsât F (s) = F (t), continue a gauchesi limsât F (s) = F (t) ; on dit que F admet une limite gauche si la limite F (tâ) :=limsât F (s) existe. Le saut âF de F a lâinstant t est definie par âF (t) := F (t)âF (tâ).Dans la suite, toutes les fonctions (et par extension tout les processus) consideresseront supposes cad-lag câest-a-dire continus a droite et admettant des limites a gaucheen tout point.
B.1 Processus a variation finie
Nous commencons ce paragraphe par quelques rappels sur les fonctions a variationfinie (pour plus de details, on peut consulter lâexcellent [27]).
Fonctions a variation finie
On note Î lâensemble des subdivisions 0 = t0 < t1 < · · · < tN = t. Une fonctiona valeurs reelles F est dite a variation finie sur R+, si pour tout t â„ 0, sa variationtotale
â«
(0,t]
| dfs| := supÎ
Nâi=1
|f(ti)â f(tiâ1)|
= limnâ+â
â
kâ„0
âŁâŁf((k + 1)2ân ⧠t
)â f(k2ân ⧠t
)âŁâŁ
84 Formule dâIto avec sauts
est une quantite finie.
Exemple. Une fonction croissante est une fonction a variation finie, en effet :â«
(0,t]
| dfs| = limnââ
â
kâ„0
âŁâŁf((k + 1)2ân ⧠t
)â f(k2ân ⧠t
)âŁâŁ
= limnââ
â
kâ„0
f((k + 1)2ân ⧠t
)â f(k2ân ⧠t
)
= limnââ
(f(t)â f(0))
= f(t)â f(0) < â.
Exemple. Soit g appartenant a L1loc(R+), alors f(t) = f(0) +
â«t
0g(s) ds est a
variation finie etâ«
(0,t]| dfs| =
â«t
0|g(s)| ds. La demonstration de ce resultat dans le cas
ou g est continue repose sur le theoreme des accroissements finis (exercice).
Exemple. Soient (tn)nâ„0 â Râ+ et (ân)nâ„0 â R telle queâ
nâ„0 |ân| †â, alors
f(t) =ânâ„0
ân1tnâ€t
est a variation finie. Montrer que dans ce cas, sa variation est donnee par la fonctionâ«
(0,t]
| dfs| =ânâ„0
|ân|1tnâ€t.
La mesure de Radon correspondante est la mesure ” =â
n ânÎŽtn , ou ÎŽt est la massede Dirac au point t.
On dit dans ce cas que f est purement atomique ou purement de saut.
Remarque. On note parfois V (f)(t) =â«
(0,t]| dfs| la variation totale de la fonction f .
Proposition B.1
1. Les fonctions a variation finie forment un espace vectoriel.
2. Si f est a variation finie, alors
f = f(0) + f+ + fâ
ou f+ et fâ sont deux fonctions croissantes qui sâecrivent de la facon suivante :
f+(t) =1
2
(f(t)â f(0) +
â«
(0,t]
| dfs|)
fâ(t) =1
2
(f(t)â f(0)â
â«
(0,t]
| dfs|).
B.1 Processus a variation finie 85
Preuve. Montrons que f+ est croissante. Soit t1 †t2 appartenant au domaine dedefinition de f+, on a alors :
2(f+(t2)â f+(t1)) = f(t2)â f(t1) + V (f)(t2)â V (f)(t1)
â„ f(t2)â f(t1) + |f(t2)â f(t1)| â„ 0.
„
Identification de f avec une mesure signee
Les fonctions a variation finie sont en bijection avec les mesures signees (differencede deux mesures finies sur R+) : la donnee de la fonction a variation finie f estequivalente a celle de la mesure ”f definie par ”f (a, b] = f(b)âf(a). Plus precisement,on peut definir pour toute fonction g continue a support compact :
â«
(0,â)
g(t)f(dt) :=
â«
(0,â)
g(t)”f (dt).
Le membre de gauche est appele integrale au sens de Riemann-Stieljes, et est definiecomme la limite
limnââ
â
kâ„0
g(k2ân)(f((k + 1)2ân
)â f(k2ân
)).
Remarque. La mesure ”f possede un atome (masse de Dirac) en t0 si et seulementsi âf(t0) 6= 0. En effet, ”f (t0) = f(t0)â f(t0â) = âf(t0).
Decomposition de f en parties continue et atomique
Soit f une fonction a variation finie, on peut ecrire f sous la forme
f = f0 + f c + fd
ou fd(t) :=â
0<sâ€t âf(s) (la somme des sauts de f), est une fonction purement
discontinue, et f c = f â f0 â fd est continue.
Exercice. Montrer queâŁâŁâŁâ«
g dfâŁâŁâŁ â€
â« |g| dV (f).
Preuve. Modulo lâutilisation dâun lemme de classe monotone, il suffit de prouver leresultat pour g = 1(a,b], et dans ce cas, on a :
âŁâŁâŁâŁâ«
g df
âŁâŁâŁâŁ =
âŁâŁâŁâŁâ«
(a,b]
df
âŁâŁâŁâŁ = |f(b)â f(a)| â€â«
(a,b]
| df |.
„Exercice. Montrer que
â0â€sâ€t |âf(s)| †â«t
0| dfs| < â.
Exercice. Montrer que lâensemble des sauts dâune fonction a variation finie est auplus denombrableExercice. Montrer que k : t 7â â«
(0,t]g df est a variation finie et âk(t) = g(t)âf(t).
86 Formule dâIto avec sauts
Formule de changement de variable
Nous allons generaliser la formule dâintegration par partie aux fonctions a variationfinie.
Lemme B.2 (integration par partie.) Soient f, g : [0,â) 7â R+ a variation fi-nie, alors la fonction produit fg est a variation finie et on a
f(t)g(t) = f(0)g(0) +
â«
(0,t]
fsâ dgs +
â«
(0,t]
gsâ dfs +[f, g
]t
ou[f, g
]trepresente le crochet ou covariation quadratique de f et g et est defini par
la relation :
[f, g
]t=
â0<sâ€t
âf(s)âg(s).
Remarque. La covariation quadratique de f et g est bien definie et est elle-memeune fonction a variation finie (exercice, indication : utiliser une inegalite de typeCauchy-Schwarz).
Preuve. Soient ” et Îœ les mesures associees a f et a g respectivement. Le membrede gauche de lâegalite a demontrer nâest autre que
(” â Îœ
)((0, t] Ă (0, t]
). Soient
T1 =(x, y) ; 0 < x < y †t
, T2 =
(x, y) ; 0 < y < x †t
et D =
(x, y) ; x = y.
Il est facile de montrer que le membre de droite de lâegalite precedente nâest autreque
(”âÎœ
)(T1
)+
(”âÎœ
)(T2
)+
(”âÎœ
)(D
)et le resultat sâen deduit immediatement. „
Ce resultat etant acquis, il est aise de demontrer la proposition suivante :
Proposition B.3 (Formule de changement de variable) Soient f une fonc-tion de classe C1 et F une fonction a variation finie. On a
f(Ft)â f(F0) =
â«
(0,t]
f âČ(Fsâ)F (ds) +â
0<sâ€t
[âf(Fs)â f âČ(Fsâ)âFs
],
ou sous forme differentielle en notant gt = f(Ft) :
dgt = f âČ(Ftâ) dFt + (âgt â f âČ(FtââFt)).
Ce resultat se generalise aisement au cadre multidimensionnel : soient f â C1(Rd) etF 1, . . . , F d a variation finie :
f(F 1t , . . . , F d
t ) = f(F 10 , . . . , F d
0 ) +
â«
(0,t]
âi
âf
âxi
(Fsâ) df is
+â
0<sâ€t
(âf(F 1
s , . . . , F ds )â
âi
âf
âxi
(Fsâ)âf is
)
B.2 Les semimartingales simples 87
Un moyen mnemotechnique pour retenir cette formule est dâecrire que les sauts sontles memes a gauche et a droite de lâegalite.
Preuve. Le resultat est vrai pour f(x) = x. Par integration par partie, il est vraipour xf(x), donc pour les polynomes, et pour les fonctions continues par des argu-ments de densite. Voir [23]. „
Nous terminons ce paragraphe par une definition cruciale dans ce qui suit
Definition B.4 Un processus a variation finie est un processus stochastique Aadapte a la filtration F et tel que, pour presque surement tout Ï, la trajectoiret 7â At(Ï) est une fonction a variation finie.
Les deux exemples precedents peuvent se generaliser a cette situation stochastique :si B est un processus adapte tel que, presque surement,
â«t
0|Bs| ds < â, alors le
processus At =â«t
0Bs ds est un processus a variation finie. Soient (tn)nâ„0 une suite de
reels et (An)nâ„0 une suite de variables aleatoires telles que An soit Ftn-mesurable pourtout n. Si, pour tout t â„ 0,
ân |An|1tnâ€t < â presque surement, alors le processus
At =â
n An1tnâ€t est un processus a variation finie. Cet exemple peut encore segeneraliser au cas ou les tn sont des temps dâarret de la filtration F.
B.2 Les semimartingales simples
Dans cette partie, nous nous placons dans le cadre dâun espace de probabilite filtre(Ω,F, P, ((Ft)tâ„0)) tel que
(i) F0 contient les P-negligeables (completude) ;
(ii) Ft = â©s>tFs (continuite a droite).
Remarque. Considerons deux processus mesurables X = (Xt)tâ„0 et Y = (Yt)tâ„0,la condition (i) entraıne que si X et Y sont deux versions (voir Annexe A) lâun delâautre et que X est adapte a la filtration (Ft)tâ„0, alors Y est lui aussi adapte a cettefiltration.
Remarque. Lâhypothese (ii) nous permettra de supposer que toutes les martingalesconsiderees sont cad-lag. En effet, si M est une Ft-martingale et que (ii) est verifiee,
il existe une version M de M dont les trajectoires sont cad-lag. (cf. Theoreme fonda-mental de la theorie des martingales)
Soit H un processus verifiant des conditions de mesurabilite et dâintegrabilite apreciser et X une semimartingale âsimpleâ de la forme
X = X0 + A + M,
ou A designe un processus a variation finie et M =â«
K dW une martingale localebrownienne. Lâobjet de cette section est definir lâintegrale stochastique
â«H dX telle
que si X est un martingale locale, alorsâ«
H dX est egalement une martingale locale.Câest pour preserver cette propriete (vraie si A = 0, ce qui est le cas de lâintegralestochastique standard), que lâon impose des conditions de mesurabilite sur H, enparticulier, nous allons imposer a H dâetre un processus previsible (cf. Annexe A).
88 Formule dâIto avec sauts
Definition B.5 Soient A un processus a variation finie et H un processus previsible,on dit que H est integrable par rapport a A si
âtâ«
(0,t]
|Hs| dAs < â,
dans ce cas,â«
(0,t]|Hs| dAs est simplement lâintegrale de Stieljes consideree trajectoire
par trajectoire.
Proposition B.6 (Admise) Soit A un processus a variation finie. Si A est un mar-tingale (locale) et si H est un processus previsible et (localement) borne, alors
â«H dA
est une martingale locale.
Integration par rapport aux semimartingales simples
Definition B.7 On appelle semimartingale simple un processus de la forme
Xt = X0 + At + Mt,
ou
(i) X0 â R ;
(ii) A est un processus a variation finie ;
(iii) M est de la formeâ«
K ·dW ou W est un mouvement brownien (d-dimensionnel)par rapport a (Ft)t>0et K est un processus previsible localement de carreintegrable i.e.
â«t
0â Ks â2 ds < â pour tout t â„ 0.
Definition B.8 Soit X = X0 + A + K une semimartingale simple. Un processus Hprevisible est dit integrable par rapport a X si et seulement si
(i) ât â«(0,t]
|Hs|| dAs| < â p.s. (lâintegrale usuelle existe pour toutes les trajec-
toires) ;
(ii) ât â«(0,t]
|Hs|2 â Ks â2 ds < â p.s. (existence de lâintegrale brownienne).
Dans ce cas, on poseâ«
(0,t]
Hs dXs :=
â«
(0,t]
Hs dAs +
â«
(0,t]
HsKs · dWs,
ce qui definit une integration par rapport aux semimartingales simples.
Crochets droit et oblique de deux semimartingales simples
Soient X et Y deux semimartingales simples telles que X = X0 + A +â«
H dW etY = Y0 + B +
â«K dW , on definit le crochet droit de X et Y en t par :
[X, Y ] = ăâ«
H dW,
â«K dW ă+ [A,B]
=
â«HK dt + [A,B].
B.2 Les semimartingales simples 89
Le crochet droit represente la covariation quadratique des semimartingales simples.Grace a cette definition, nous pouvons generaliser a la fois la formule dâintegration
par parties pour les fonctions a variation finie et celle (classique) pour les processusdâIto :
Lemme B.9 (Integration par parties) Soient X et Y deux semimartingalessimples, alors Z = XY est aussi une semimartingale simple et lâon a :
Zt = Z0 +
â«
(0,t]
Xsâ dYs +
â«
(0,t]
Ysâ dXs + [X, Y ]t.
Preuve. Il suffit de demontrer le resultat dans les trois cas suivants :
1. X = A, Y = B ;
2. X =â«
H dW,Y =â«
K dW ;
3. X = A, Y =â«
K dW .
Les cas 1. et 2. sont immediats : il sâagit respectivement du lemme sur les processusa variation finie et de la theorie classique dâIto. Reste donc a prouver
AtMt =
â«
(0,t]
Ms dAs +
â« t
0
AsKs dWs,
ou Mt =â«t
0Ks dWs. Modulo lâutilisation dâune procedure de localisation, on peut
supposer que sur [0, t]
(i) A est a variation bornee :â«
(0,t]| dAs| †cte ;
(ii) M est bornee : supsâ€t |Ms| †cte.
Remarque. Localiser le probleme signifie trouver une suite de temps dâarrets(Tn)nâ„0 â â telle que
Ant = Atâ§Tn ,Mn
t = Mtâ§Tn
verifient les proprietes considerees. Il suffit ici de choisir
Tn = inftâ„0
â«
(0,t]
| dAs| > n ou supsâ€t
|Ms| > n
.
Une fois le resultat prouve dans ce cas, il suffit de faire tendre n vers +â.Soit tnk = k2ân ⧠t, on ecrit que
AtMt =â
kâ„0
AtnkâMtnk
+â
kâ„0
MtnkâAtnk
+â
kâ„0
âAtnkâMtnk
avec âMtnk= Mtnk+1
âMtnket âAtnk
= Atnk+1âAtnk
, et on etudie separement la conver-gence de chacune de ces trois sommes. Tout dâabord,
â
kâ„0
AtnkâMtnk
=
â« t
0
Ans dMs,
90 Formule dâIto avec sauts
avec Ans =
âkâ„0 Atnk
1(tnk ,tnk+1], et dâapres le theoreme de Lebesgue, on a
E[â« t
0
(Ans â As)
2K2s ds
]â 0,
doncâ
kâ„0 AtnkâMtnk
âL2
â«t
0As dMs.
En ce qui concerne la deuxieme somme, on a immediatement par definition delâintegrale de Riemann-Stieltjes
â
kâ„0
MtnkâAtnk
âp.s.
â«
(0,t]
Ms dAs,
et enfin, on a â
kâ„0
âAtnkâMtnk
âp.s. 0
car â
kâ„0
âAtnkâMtnk
†sup|Mu âMs|; u, s †t, |uâ s| †2ân
â«
(0,t]
dAs,
ce qui tend bien vers 0 car la borne superieure tend vers 0 par continuite de M etlâintegrale est a variation finie.
Ceci acheve la demonstration „
Formule de changement de variable
Nous allons maintenant generaliser la formule de changement de variable au casdes semimartingales simples.
Proposition B.10 Soit X une semimartingale simple et f une fonction C2, alorsf(X) est aussi une semimartingale simple et lâon a la relation suivante :
f(Xt) = f(X0) +
â«
(0,t]
f âČ(Xsâ) dXs +1
2
â«
(0,t]
f âČâČ(Xsâ) dăXc, Xcăs
+â
0<sâ€t
(âf(Xs)â f âČ(Xsâ)âXs
).
Ce resultat sâetend au cadre multidimensionnel de la facon suivante :
Proposition B.11 Soit X = (X1, . . . , Xn) une semimartingale simple et f une fonc-tion C2, alors f(X) est aussi une semimartingale simple et lâon a la relation suivante :
f(Xt) = f(X0) +â
i
â«
(0,t]
âif(Xsâ) dX is +
1
2
âi,j
â«
(0,t]
âijf(Xsâ) dăXci , X
cj ăs
+â
0<sâ€t
(âf(Xs)â
âi
âif(Xsâ)âX is
).
Preuve. La demonstration est analogue a celle effectuee dans le cadre des fonctionsa variation finie, a partir de la formule dâintegration par parties. „
On peut alors demontrer le lemme suivant :
B.2 Les semimartingales simples 91
Lemme B.12 Soient X = X0 + A + M et Y = Y0 + B + N deux semimartingalessimples,
X = Y â A + X0 = B + Y0,M = N
Preuve.
X = Y â AâB + X0 â Y0 =
â«(K âH) dW.
Le membre de gauche, disons Ï, est un processus a variation finie et celui de droiteest une martingale continue. Le processus Ï est donc une martingale continue et est avariation finie. Par suite, et en vertu de la formule dâintegration par parties, on peutecrire :
E[(Ït â Ï0)
2]
= E[Ï2
t â Ï20
]= E
[â« t
0
Ns dNs
]= 0.
Le processus Ï est donc constant et vaut 0 en 0 donc câest le processus nul. „
Application : autour du processus de Poisson
Soit (Nt)tâ„0 un processus de comptage, i.e. tel que
âNt â 0, 1N est constant entre deux sautsNt < âât p.s.
,
Nous faisons lâhypothese selon laquelle ât, Nt < â presque surement.
Definition B.13 Soit λ : R+ â Râ+. Un processus de comptage N est un processusde Poisson dâintensite λ si
âs â (0, t],L(Nt âNs|Nu, u †s) = P(â« t
0
λ(u) du).
Remarque. On rappelle que X ⌠P(λ) â P[X = k] = eâλ λk
k!, k â N. La propriete
precedente entraıne que le processus de Poisson est a accroissements independants :0 †u1 < u2 < v1 < v2 < ââ Nu2 âNu1 â„ Nv2 âNv1 .
Proposition B.14 Soit N un processus de Poisson, les assertions suivantes sontequivalentes :
(i) N est un processus de Poisson dâintensite λ ;
(ii) E[Nt+h âNt
âŁâŁFNt
]= λth + o(h)
(iii) Nt ââ«t
0λu du est une FN -martingale.
Preuve.(i)â(ii) est trivial(ii)â(iii) : supposons que E
[Nt+hâNt
âŁâŁFNt
]= λth+o(h) et montrons que, pour s †t,
92 Formule dâIto avec sauts
E[Nt âNs
âŁâŁFNs
]=
â«t
sλu du.
E[Nt âNs
âŁâŁFNs
]=
nâ
k=1
E[Ns+ k
n(tâs) âNsâ kâ1
n(tâs)
âŁâŁâŁFNs
]
=nâ
k=1
E[Ns+ k
n(tâs) âNsâ kâ1
n(tâs)
âŁâŁâŁFNs+ kâ1
n(tâs)
âŁâŁâŁFNs
]
=nâ
k=1
E[λs+ kâ1
n(tâs)
1
n+ o
( 1
n
)âŁâŁâŁFNs
]
=nâ
k=1
1
nλs+ kâ1
n(tâs) + o(1) âânââ
â« t
s
λu du + o(1).
(iii)â(i) : dâapres la formule de changement de variable, on a
f(Nt âNs) = 1 +
â«(s, t]f âČ(Nuâ âNs) dNu
+â
s<uâ€t
(f(1 + Nuâ âNs)â f(Nuâ)â f âČ(Nuâ âNs)âNu
)
= 1 +â
s<uâ€t
f âČ(Nu âNs)âNu + f(1 + Nuâ âNs)
â f(Nuâ âNs)â f âČ(Nu âNs)âNu
= 1 +
â«(s, t]
(f(1 + Nuâ âNs)â f(Nuâ âNs)
)dNs.
Pour f(x) = eicx, lâexpression devient :
eic(NtâNs) = 1 + (eic â 1)
â«
(s,t]
eic(NuââNs) dNu
= 1 + (eic â 1)
â«
(s,t]
eic(NuââNs)(dNu â λu du) + (eic â 1)
â«
(s,t]
eic(NuââNs)λu du,
et comme dNu â λu du est une martingale, on a
E[eic(NtâNs)
âŁâŁFNs
]= 1 + E
[(eic â 1)
â«
(s,t]
eic(NuââNs)λu duâŁâŁFN
s
]
= 1 + (eic â 1)
â« t
s
E[eic(NuââNs)
âŁâŁFNs
]λu du.
Et en posant g(t) = E[eic(NtâNs)
âŁâŁFNs
], on obtient pour g une equation differentielle
usuelle qui se resout en
g(t) = exp((eic â 1)
â« t
s
λu du),
qui est bien la fonction caracteristique dâun loi de Poisson de parametreâ«t
0λu du. „
ANNEXE C
Rappel sur les diffusions
Dans cette partie, nous nous interessons aux proprietes de base des processus dediffusion, et a leurs extensions aux diffusions avec des sauts. Un cas particulierementinteressant en finance est celui des diffusions affines qui seront etudiees en fin dechapitre.
C.1 Definitions
Point de vue des caracteristiques locales
Une diffusion est un processus continu (Xt, t â„ 0) a valeurs dans Rd, defini surun espace probabilise (Ω, F, P, (Ft)tâ„0) tel quâil existe deux fonctions ” : Rd â Rd eta : Rd â SdĂd
+ (ou SdĂd+ designe lâensemble des matrices symetriques definies positives
sur dĂ d), tels que
1. E[dXt|Ft] = ”(Xt) dt + o(dt)
2. E[(dX it â ”i dt)(dXj
t â ”j dt)|Ft] = ai,j(Xt) dt + o(dt).
On sait construire de tels processus a lâaide de la theorie des equations differentiellesstochastiques : Si ” et a sont des fonctions suffisamment regulieres, i.e. verifient lesconditions de Lipschitz, alors on peut construire X comme solution de lâequationdifferentielle stochastique
dXt = ”(Xt) dt + Ï(Xt) dWt
ou Ï verifie ÏÏâ = a.Remarque. Les proprietes 1. et 2. caracterisent la loi du processus.
94 Rappel sur les diffusions
Point de vue des processus de Markov
On peut egalement voir le processus X defini precedemment comme un processusde Markov de generateur infinitesimal
L =1
2
nâi,j=1
ai,jDiDj +nâ
i=1
”iDi
ou Di designe lâoperateur de derivation par rapport a la variable xi
Di =â
âxi
.
Point de vue des problemes de martingales
Enfin, il est possible de definir une diffusion comme un processus X tel que, pourtoute fonction f â C2
b , le processus
Mt = f(Xt)â f(X0)ââ« t
0
(Lf)(Xs) ds
est une martingale, ou lâoperateur L designe le generateur defini ci-dessus.Ces definitions sont equivalentes, et il est possible de les generaliser dans le cas
des processus a sauts.
C.2 Diffusions avec sauts
Definition C.1 Une diffusion avec sauts est un processus cad-lag (Xt, t â„ 0) definisur (Ω,F, P, (Ft)tâ„0) et a valeurs dans R tel quâil existe ” : Rd â Rd, a : Rd â SdĂd
+ ,λ : Rd â Râ+ et Îœ une mesure sur Rd tels que
(i) E[dXt|Ft] = ”(Xt) dt + o(dt)
(ii) E[(dX it â ”i dt)(dXj
t â ”j dt)|Ft] = ai,j(Xt) dt + o(dt)
(iii) E[dNt|Ft] = λ(Xtâ) dt + o(dt)
(iv) E[f(âXt)|Ft, âXt 6= 0] =â«
f(x)Μ(dx),
ou Nt est le processus de comptage des sauts de X :
Nt :=â
0<sâ€t
1âXs 6=0.
Remarque. Les deux premieres conditions sont directement heritees de la definitionclassique des diffusions (sans saut) tandis que lâon peut interpreter les deux dernieresconditions de la facon suivante :
1. (iii) signifie que, conditionnellement a lâensemble de lâinformation disponible autemps t, les sauts du processus (Xt, t â„ 0) se produisent suivant un processusde Poisson dâintensite λ(Xtâ), t > 0 ;
C.2 Diffusions avec sauts 95
2. la condition (iv) est equivalente a
(ivâ) L(âXt|Ft, âXt 6= 0) = Îœ.
Ceci signifie que la loi Îœ de lâamplitude de chacun des sauts est independantedes autres parametres du processus.
Un tel processus se construit comme :
1. Une diffusion avec des sauts
dXt = ”(Xt) dt + Ï(Xt) dWt + dJt,
ou J est un processus purement de saut dâintensite λ(Xtâ) et dâamplitude Îœ ;
2. un process de Markov de generateur
(Lf)(x) =1
2
âi,j
ai,jDi,j +â
i
”iDi + λ(x)
â«(f(x + z)â f(x))Îœ(dz).
Le lien entre (1) et (2) sâecrit :
Proposition C.2 Pour toute fonction f appartenant a C2b , le processus
Mt = f(Xt)â f(X0)ââ« t
0
(Lf)(Xsâ) ds
est une martingale.
Preuve. Dâapres la formule dâIto
df(Xt) = f âČ(Xtâ) dXt +1
2f âČâČ(Xtâ) d< Xc, Xc >t +âf(Xt)â f âČ(Xtâ)â(Xt)
= f âČ(Xtâ)”(Xt) dt + f âČ(Xtâ)Ï(Xt) dWt +1
2f âČâČ(Xtâ)Ï2(Xt) dt
+ f âČ(Xtâ) dJt + âf(Xt)â f âČ(Xtâ)â(Xt)
= (Lf)(Xtâ) dt + âf(Xt)â λ(Xtâ)
â«(f(z + Xtâ)â f(Xtâ))Îœ(dz)
= (Lf)(Xtâ) dt + (f(Xt + âXt)â f(Xtâ)) dNt
â λ(Xtâ)
â«(f(z + Xtâ)â f(Xtâ))Îœ(dz),
donc
E[df(Xt)â (Lf)(Xtâ) dt|Ft]
= E[(f(Xt + âXt)â f(Xtâ)) dNt â λ(Xtâ)
â«(f(z + Xtâ)â f(Xtâ))Îœ(dz)|Ft]
= E[(f(Xt + âXt)â f(Xtâ)) dNt|Ft]â λ(Xtâ)
â«(f(z + Xtâ)â f(Xtâ))Îœ(dz)
= E[dNt|Ft]
â«(f(z + Xtâ)â f(Xtâ))Îœ(dz)
â λ(Xtâ)
â«(f(z + Xtâ)â f(Xtâ))Îœ(dz)
= 0,
96 Rappel sur les diffusions
ce qui acheve la preuve. „La theorie des diffusions offre un cadre de travail tres general, qui ne permet
pas toujours de faire les calculs explicitement. Câest pourquoi, dans la pratique, onconsidere souvent des diffusions affines avec sauts. Ces processus sont commodes pourleur tractabilite analytique qui en font des outils de modelisation incontournables.Pour plus de details sur ces processus, nous renvoyons le lecteur a Pan et Filipovicainsi quâaux articles [9] et [6].
C.3 Diffusion affine avec des sauts
On suppose que ”, a, λ sont des fonctions affines de X, autrement dit quâil existek0 â Rd, k1 â RdĂd, H0 â RdĂd, H1 â Rd â RdĂd lineaire, et l0 â R, l1 â Rd tels que
”(x) = k0 + k1x
a(x) = H0 + H1x
λ(x) = l0 + l1x.
On note Ξ la transformee de Laplace de Îœ. Autrement dit, pour tout c â Z, on a
Ξ(c) =
â«eczÎœ(dz).
Proposition C.3 Soient X une diffusion affine avec des sauts et R : Rd â R, y 7âl0 + l1y une application lineaire, alors
E[exp
(â
â«T
t
R(Xs) ds)eu.XT
âŁâŁâŁFXt
]= eαu(Tât)+ÎČu(Tât).Xt ,
ou αu et ÎČu sont solution des equations differentielles suivantes :
αâČ = l0 â ÎČâ.k0 â 12ÎČâH0ÎČ â l0(Ξ(ÎČ)â 1)
ÎČâČ = l1 â kâ1.ÎČ â 12ÎČâH1ÎČ â l1(Ξ(ÎČ)â 1),
avec les conditions aux bords
αu(T, T ) = 0, ÎČu(T, T ) = u.
On est donc ramene au probleme de resolution dâun systeme de deux equationsdifferentielles ordinaires. En pratique, soit il existe des solutions explicites, soit onutilise un algorithme numerique de type Runge-Kutta.
Preuve. On admet que Ï sâecrit bien sous cette forme. Nous allons verifier que lesequations differentielles ordinaires sont satisfaites. Pour simplifier les notations, nousnous limiterons a un cadre de dimension 1, lâextension aux dimensions superieuresetant immediate. Posons
Ï(t,Xt) = E[e
â«Tt R(Xs) dseu.XT
âŁâŁâŁFXt
]= eαu(Tât)+ÎČu(Tât).Xt .
C.3 Diffusion affine avec des sauts 97
Il est clair que eââ«t0 R(Xs) dsÏ(t,Xt) est une martingale, et de plus
E[dÏ(t, T )
Ï(t, T )
âŁâŁâŁFt
]= R(Xt) dt.
Par application de la formule dâIto :
dÏ(t,Xt) =âÏ
âtdt +
âÏ(t,Xtâ)
âXdXt +
1
2
â2Ï
âX2dăXc, Xcă+ âÏâ âÏ
âXâX
=âÏ
âtdt
âÏ
âX(” dt + Ï(Xt) dWt + dJt) +
1
2
â2Ï
âX2Ï2(Xt) dt
+ âÏâ âÏ
âXâX.
Or, dâapres la forme affine de Ï, on a
Ï(t,Xtâ + z) = Ï(t, Xtâ)ezÎČ(Tât),
et donc
dÏ(t, Xt)
Ï(t,Xtâ)=
(αâČ + ÎČâČXtâ + ÎČ(k0 + k1Xt) +
ÎČ2
2(H0 + H1Xtâ)
+ (l0 + l1Xtâ)
â«(eÎČz â 1)Îœ(dz)
)dt + Ï(Xt) dWt
+(â(Ï(t, Xt))
Ï(t,Xtâ)â (l0 + l1Xtâ)
â«Ï(t, Xtâ + z)â Ï(t, Xtâ)
Ï(t, Xtâ)Îœ(dz) dt
).
Les deux derniers termes de la somme etant martingales, on a dâapres lâexpression delâesperance
αâČ â l0 + ÎČk0 +ÎČ2
2H0ÎČ
âČXtâ + l0(Ξ(ÎČ)â 1)
+ (ÎČâČ â l1 + ÎČk1 +ÎČ2
2H1 + l1(Ξ(ÎČ)â 1))Xtâ = 0,
ce qui est vrai pour toutes les valeurs du processus X. On en deduit doncimmediatement les deux equations
αâČ = l0 â ÎČ.k0 â 1
2ÎČâH0ÎČ â l0(Ξ(ÎČ)â 1)
ÎČâČ = l1 â kâ1ÎČ â 12ÎČâH1ÎČ â l1(Ξ(ÎČ)â 1),
les conditions aux bords etant la consequence de
Ï(T, XT ) = eα(T,T )+ÎČ(T,T )XT = e0+uXT .
„
98 Rappel sur les diffusions
Corollaire C.4 Soient X une diffusion affine avec des sauts et R : Rd â R, y 7âl0 + l1y une application lineaire.
E[exp
(â
â«T
t
R(Xs) ds)XT eu.XT
âŁâŁâŁFXt
]= (Au(T â t) + Bu(T â t).Xt)e
αu(Tât)+ÎČu(Tât).Xt ,
ou Au et Bu sont solution des equations differentielles suivantes :
âAâČ = kâ0.B + ÎČâH0B + l0(âΞ)(ÎČ).BâBâČ = kâ1.B + ÎČâH1B + l1(âΞ)(ÎČ).B,
avec les conditions aux bords
Au(T, T ) = 0, Bu(T, T ) = 1.
Preuve. Il suffit de reprendre la preuve precedente en derivant par rapport a u. „
ANNEXE D
Les fonctions copules
Les fonctions copules ou plus simplement copules sont un outil mathematiquepermettant de modeliser la dependance entre des variables aleatoires connaissant leurslois marginales. Dans cette partie, nous definissons les fonctions copules, et presentonsles exemples les plus couramment utilises en finance. Le resultat fondamental de latheorie etant le theoreme de Sklar. Nous nous interessons ensuite au cas particulierdes copules archimediennes qui revetent une importance particuliere pour les calculs.
D.1 Definitions et exemples
Definition D.1 La fonction C : [0, 1]N â [0, 1] est une copule de dimension N sâilexiste un vecteur aleatoire a marges uniformes U = (U1, . . . , UN) tel que
C(u1, . . . , uN) = P[U1 †u1, . . . , UN †uN ].
Autrement dit, C est la fonction de repartition dâun vecteur aleatoire a marges uni-formes.
Remarque. On rappelle que, si X est une variable aleatoire et FX sa fonction derepartition,
Z = FX(X) ⌠U(0, 1),
ou U est une variable aleatoire de loi uniforme sur [0, 1]. Soient X1, X2, . . . , XN
des variables aleatoires, de fonctions de repartitions F1, . . . , Fn, alors la fonction derepartition jointe F est definie par
F (x) = P[X1 †x1, . . . , XN †xN ].
Le theoreme fondamental est le suivant :
100 Les fonctions copules
Theoreme D.2 (Sklar)Avec les notations precedentes, il existe une fonction copule C de dimension N telleque
F (x) = C(F1(x1), . . . , FN(xN)).
Si les fonctions Fi sont continues, C est unique, sinon, elle est uniquement determineesur Im(F1)à · · · à Im(FN).
Remarque. Dâapres le theoreme de Sklar, une distribution multidimensionnellecontinue F est uniquement determinee par
â ses lois marginales ;â sa structure de dependance decrite par une fonction copule C.
On dit alors que F a pour copule C. Dans la suite, on sâinteressera uniquement ades distributions continues, ce qui permet dâen deduire lâunicite de la fonction copuleassociee.
Proposition D.3 La fonction copule de X = (X1, . . . , XN) est la fonction derepartition du vecteur aleatoire (F1(X1), . . . , FN(XN)).
Preuve. Notons C la fonction de repartition du vecteur (F1(X1), . . . , FN(XN)),
F (x) = P[X1 †x1, . . . , XN †xN ]
= P[F1(X1) †F (x1), . . . , FN(XN) †F (xN)]
= C(F1(X1), . . . , FN(XN)),
dâou le resultat par unicite. „Proposition D.4 Soient f1, . . . , fN des fonction croissantes et X1, . . . , XN des va-riables aleatoires. Pour tout i appartenant a 1, . . . , N, on pose Yi = Fi(Xi). Alorsla copule des Yi est la meme que celle est Xi. En dâautres termes, la structure dedependance est invariante par transformation monotone.
Preuve. La preuve est laissee au lecteur „Exemple. La copule independante represente la structure de dependance associee aune famille de variables aleatoires uniformes independantes
C(u1, . . . , uN) = u1 . . . uN .
Exemple. La copule gaussienne est associee a la distribution normale multidimen-sionnelle. Soit X = (X1, . . . , XN) un vecteur gaussien standard (i.e pour tout i appar-tenant a 1, . . . , N, E[Xi] = 1, Var(Xi) = 0), de matrice de correlation (Ïij)i,jâ1,...,N.Notons ÏÏ la fonction de repartition dâune gaussienne multivariee, on a par definition :
CÏ(Ï(u1), . . . , Ï(uN)) = ÏÏ(u1, . . . , uN).
La copule gaussienne est donc definie de facon implicite par la relation
CÏ(u1, . . . , uN) = ÏÏ(Ïâ1(u1), . . . , Ï
â1(uN)).
D.2 Les copules archimediennes 101
Exercice. Montrer que la copule gaussienne bivariee admet la representationintegrale suivante :
C(u1, u2, Ï) =
â«u1
0
Ï(Ïâ1(u2)â ÏÏâ1(u)â
1â Ï2
).
Remarque. Bien quâil nâexiste pas dâexpression explicite pour cette fonction copule,il est tres aise de simuler des variables aleatoires de lois marginales donnees ayant unestructure de dependance decrite par cette fonction copule. Cette propriete expliqueen partie la popularite de cette structure de dependance.
Remarque. Dans les cas ou la matrice des correlations est de la forme
cor(Xi, Xj) = ÏiÏj,
on peut trouver des variables aleatoires gaussiennes independantes X, Y1, . . . , YN tellesque
Xi = ÏiX +â
1â Ï2i Yi (modele a un facteur).
Dans ce cas, la fonction copule correspondante sâecrit (exercice) :
C(u1, u2, Ï) =1â2Ï
â«âââ
Ï(Ïâ1(u1)â Ï1xâ
1â Ï21
). . . Ï
(Ïâ1(uN)â ÏNxâ1â Ï2
N
)dx.
Exemple. De la meme maniere que pour la copule gaussienne, il est possible dedefinir la copule de student.
D.2 Les copules archimediennes
Definition D.5 On appelle copule archimedienne une fonction copule telle quâilexiste une fonction inversible Ï : [0, 1] â R+ âȘ â verifiant
C(u1, ..., uN) = Ïâ1( Nâ
i=1
Ï(xi)).
Dans ce cas, pout tout x appartenant a R+ âȘ â, on a ÏâČ(x) < 0, ÏâČâČ(x) > 0.
Exercice. Soit C une copule archimedienne de generateur Ï, montrer que
âC
âui
(u) =ÏâČ(ui)
ÏâČ(C(u1, . . . , uN)),
etâC
âuiâuj
(u) = âÏâČ(ui)ÏâČ(uj)
ÏâČâČ(C(u))
ÏâČ(C(u))3.
102 Les fonctions copules
Exemple. (Copule de Gumbel)
Ï(x) = â ln(x)Ξ, Ξ â„ 1
C(u1, . . . , uN) = exp(â
[ Nâi=1
â ln xΞi
]).
Exemple. (Copule de Clayton)
Ï(x) =
(1
xα â 1)
α, α ℠0
C(u1, . . . , uN) =(1âN +
Nâi=1
1
uαi
)â 1α.
Exercice. Soient Y une variable aleatoire a valeurs dans (0, +â) et Ï satransformee de Laplace definie par
Ï(u) = E[eâuY ], (u â„ 0).
(1) Montrer que Ï realise une bijection de [0, +â) sur [0, 1].On note Ï lâinverse Ïâ1 de la transformee de Laplace de Y . On considere une
famille X1, . . . , XN de variables aleatoires i.i.d. de loi uniforme sur (0, 1). On supposeque les Xi sont independantes de la variable Y . On pose
Ui = Ï(â 1
Yln Xi
), (1 †i †N).
(2) Montrer que les Ui sont des v.a. de loi uniforme sur (0, 1) dont la distributionjointe est decrite par la copule archimedienne de generateur Ï ; autrement dit, que
P[U1 †u1; · · · ; UN †uN ] = Ï( Nâ
i=1
Ï(ui)).
(3) Deduire de ce qui precede un algorithme pour simuler un vecteur de v.a. de loiuniforme dont la loi jointe est caracterisee par la copule archimedienne de generateur Ï.
Le cas des copules archimediennes generalises
Pour definir une copule archimedienne generalisee nous partons des donnees sui-vantes : un vecteur Y â RK de facteurs de risque qui sont des v.a. positives et unematrice A â RNĂK de poids. On pose alors pour tout 1 †i †N et 1 †k †K
Yi =Nâ
i=1
aikYk = ai · Y,
Ïi(s) = E[eâsYi
], Ïi = Ïâ1,
Ï(s) = E[eâsY
].
D.2 Les copules archimediennes 103
La copule archimedienne generalisee correspondante est alors definie par
C(u) = Ï( Nâ
i=1
ai1Ïi(ui), . . . ,Nâ
i=1
aiKÏi(ui))
Le lemme suivant nous assure que C est bien une copule et fournit un moyencommode de simuler des v.a. de loi decrite par la copule C.
Lemme D.6 Soient (Xi, 1 †i †N) des v.a. independantes de loi uniformes sur[0, 1]et (Ui, 1 †i †N) les v.a. definies par la formule suivante :
Ui = Ïi
(â ln Xi/Yi
).
Alors, la distribution jointe des Ui est donnee par
P[Ui †ui, 1 †i †N ] = Ï( Nâ
i=1
ai1Ïi(ui), . . . ,Nâ
i=1
aiKÏi(ui)).
et les lois marginales des Ui sont des lois uniformes sur [0, 1].
Preuve. Par definition, on a
P[Ui †ui,âi] = P[Xi †exp(âYiÏi(ui)),âi]= E
[P[Xi †exp(âYiÏi(ui)),âi|Y1, . . . , YN ]
]
= E[exp
( Nâi=1
YiÏi(ui))]
= E[exp
( Kâ
k=1
( Nâi=1
aikÏi(ui))Yk
)]
= Ï( Nâ
i=1
ai1Ïi(ui), . . . ,Nâ
i=1
aiKÏi(ui)).
Il reste a montrer que pour tout i, on a P[Ui †ui] = ui. Pour le voir, on ecrit enutilisant le meme genre de conditionnement que precedemment que
P[Ui †ui] = E[exp(âYiÏi(ui))
]= Ïi(Ïi(ui)) = ui .
„Dans la pratique, il est judicieux de choisir des facteurs tels que les transformees de
Laplace precedentes soient faciles a calculer et a inverser. Un exemple simple consistea choisir les facteurs de risques independants et dans une famille dont les lois sontstable par sommation.
ANNEXE E
Demonstration du Lemme 3.1
Dans cette partie, nous allons demontrer le resultat suivant :
P[
inf0â€sâ€t
(”s + ÏBs) â„ y]
= N(”tâ y
Ïâ
t
)â e
2”
Ï2 yN(y + ”t
Ïâ
t
).
Posons Xt = Bt + ”t, Mt = max0â€sâ€t Xt, et mt = min0â€sâ€t Xt . La demonstrationrevient a prouver le lemme suivant :
Lemme E.1
P[Xt †x; Mt â„ y] = e2”yP[Xt â„ 2y â x + 2”t] = e2”yN(xâ 2y â ”tâ
t
).
En effet :
P[Mt â„ y] = P[Xt â„ y] + P[Xt < y; Mt â„ y]
= N(”tâ y
Ïâ
t
)+ e2”yN
(â”tâ y
Ïâ
t
),
et donc
P[mt â„ y] = P[â min
0â€sâ€t(Bs + ”s) †ây
]
= P[max0â€sâ€t
(âBs â ”s) †ây]
= P[max0â€sâ€t
(Bs â ”s) †ây]
= 1â P[max0â€sâ€t
(Bs â ”s) â„ ây]
= 1âN(y â ”t
Ïâ
t
)â e2”yN
(y + ”t
Ïâ
t
)
= N(”tâ y
Ïâ
t
)â e2”yN
(y + ”t
Ïâ
t
).
106 Demonstration du Lemme 3.1
Lâextension au cas general est alors immediate en ecrivant :
P[
inf0â€sâ€t
(”s + ÏBs) â„ y]
= P[
inf0â€sâ€t
(”
Ïs + Bs
)â„ y
Ï
].
La demonstration du lemme E.1 repose sur le Principe de reflexion dont nousrappelons lâenonce :
Proposition E.2 (principe de reflexion) Parmi les trajectoires browniennesqui atteignent le niveau y avant lâinstant t, il y en a autant en dessous de x quâaudessus de 2y â x en t. Autrement dit :
P[Bt †x; Mt â„ y] = P[Bt â„ 2y â x; Mt â„ y]
= P[Bt â„ 2y â x],
ce qui se reecrit de la facon suivante :
E[1Mtâ„yf(Bt)
]= E
[1Mtâ„yf(2y âBt)
].
Nous allons a present prouver le lemme. Dâapres le theoreme de Girsanov il existeune probabilite P equivalente a P definie par sa densite de Radon-Nikodym
dPdP
= eâ”BTâ”2
2T
telle que Xt = Bt+”t soit un P-mouvement brownien, et une probabilite P equivalentea P definie par la densite
dPdP
= eâ”XTâ”2
2T
telle que Wt = Xt + ”t soit un P-mouvement brownien. Soit x †y, on a
P[Xt †x; Mt â„ y] = E[1Xtâ€x;Mtâ„y
]
= E[e”Bt+
”2
2t1Xtâ€x;Mtâ„y
]
= E[e”Xtâ”2
2t1Xtâ€x;Mtâ„y
],
et dâapres le principe de reflexion :
P[Xt †x; Mt â„ y] = E[e”(2yâXt)â”2
2t12yâXtâ€x;Mtâ„y
]
= e2”yE[eâ”Xtâ”2
2t1Xtâ„2yâx
]
= e2”yP[Xt â„ 2y â x]
= e2”yP[Wt + ”t â„ 2y â x + 2”t]
= e2”yP[Xt â„ 2y â x + 2”t],
car W est un P-mouvement brownien. Ceci acheve la demonstration „