SECUCITIES : LES VILLES CONTRE LE TERRORISME
Formation des Représentants Locaux à la
Réponse au Terrorisme
Séminaire International « Villes et Terrorisme : réduction des
risques et gestion de crise »
Rapport du 2e séminaire local à Lisbonne
26-27 octobre 2006
Nelson Lourenço (Coordination Scientifique) Graça Frias (Rapporteur)
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Avec le soutien du projet pilote pour les Victimes d’Actes Terroristes 2005 Commission Européenne – Direction Générale de la Justice, de la Liberté et de la Sécurité
TABLE DES MATIÈRES LISTE DES ORATEURS ET DES ANIMATEURS 3 REMERCIEMENTS 5 RÉSUMÉ 6
1. ACTION A LONG TERME DE LUTTE CONTRE LE TERRORISME 8 1.1. Le terrorisme dans les sociétés contemporaines 8 1.2. Stratégies de lutte contre le terrorisme 9 1.3. La prévention du terrorisme 10 1.4. Le rôle des femmes dans la résolution de conflit 12 1.5. La sécurité des événements majeurs 14 1.6. L’équilibre entre sécurité et droits de l’homme fondamentaux 17
2. GESTION DE CRISE ET INTERVENTION D’URGENCE 17 2.1. Intervention suite à un attentat terroriste (action suite aux attentats du 11 mars à
Madrid) 18 2.2. La protection civile au Portugal 19
3. SOUTIEN AUX VICTIMES DU TERRORISME 22 3.1. L’intervention psychologique des forces de sécurité 22 3.2. Droits des victimes et justice réparatrice 24
4. LE RÔLE DES AUTORITÉS LOCALES FACE AUX MENACES TERRORISTES 26 4.1. Le rôle des autorités locales dans la prévention et la gestion d’un incident
majeur 27 CONCLUSION 31 BIBLIOGRAPHIE 34
ANNEXES 34
Annexe 1) Documents de références et liens web
Annexe 2) Programme du Séminaire
Annexe 3) Conclusions du Séminaire Européen sur les actions suite aux attentats terroristes de 2004 à
Madrid
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LISTE DES ORATEURS ET DES ANIMATEURS : Orateurs de la séance d’ouverture : Fernando Rocha Andrade – Sous-secrétaire d’État à l’Intérieur Guilherme Manuel Lopes Pinto – Président du Forum Portugais pour la Prévention et la Sécurité Urbaine Marina Ferreira – Conseillère Municipale de la Municipalité de Lisbonne Nelson Lourenço – Universidade Nova de Lisboa/Universidade Atlântica Orateurs de la tribune : Anabela Rodrigues – Professeur à la Faculté de Droit de l’Universidade de Coimbra et Directeur du Centre d’Etudes Judiciaires du Ministère de la Justice António Baldo – Municipalité de Loures António Salgado Rosa – Municipalité de Matosinhos Arnaud Blin – Directeur de Projet de la Fondation Charles-Léopold Mayer (Paris), Chercheur à l’IFAS – Institut Français d’Analyse Stratégique et vice Directeur du Centre International de Recherche Beaumarchais (Washington) Bruno Brito – Psychologue de la Garde Nationale Républicaine (GNR) Carla Castro – Municipalité d’Oeiras Carlos Dueñas – Direction Générale de la Protection Civile espagnole Elza Pais – Présidente de la Commission pour l’Égalité et les Droits de la Femme Fredéric Esposito – Université de Genève et Forum Européen pour la Sécurité Urbaine Frederico Galvão da Silva – Capitaine de la GNR – Garde Nationale Républicaine Henry Shaftoe – Professeur à l’Université West of England (Bristol) Ivna Machado – Municipalité d’Oeiras Jean Claude Salomon – Chercheur en Criminologie ; ancien Professeur de l’Institut National des Hautes Études de Sécurité (Paris) ; Professeur associé de l’Université d’État de Houston José Alberto Loureiro dos Santos – Général et ancien Chef de l’Armée Justyna Kulach – Forum Européen pour la Sécurité Urbaine Luís Carvalho da Silva – Municipalité de Sintra
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Manuel João Ribeiro – Vice-Président du Service National de Protection Civile et des Pompiers Paulo Gomes – Commissaire de la Polícia de Segurança Pública (Police de Sécurité Publique) et vice Secrétaire Général du Bureau de Coordination de la Sécurité Orateurs de la séance de clôture : Arnaud Blin – Directeur de Projet de la Fondation Charles-Léopold Mayer (Paris), Chercheur à l’IFAS – Institut Français d’Analyse Stratégique et ancien Directeur du Centre de Recherche International Beaumarchais (Washington) Helena Rego – Service de Sécurité et de Renseignements Nelson Lourenço – Universidade Nova de Lisboa/Universidade Atlântica Nuno Severiano Teixeira – Ministre de la Défense Animateurs à la Tribune : João Lázaro – Association portugaise de Soutien aux Victimes José Luís Pinto Ramalho – Général, Directeur de l’Instituto de Estudos Superiores Militares Juan Mozzicafredo – Professeur à l’Instituto Superior de Ciências do Trabalho e da Empresa Leonardo Matias – Ambassadeur Luís Baptista – Professeur, Vice-Directeur de la Faculdade de Ciências Sociais e Humanas/Université Nova de Lisboa Manuel Lisboa – Directeur de la SociNova/Professeur à la Faculdade de Ciências Sociais e Humanas/Université Nova de Lisboa Vasco Rato – Professeur à l’Universidade Atlântica
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REMERCIEMENTS Le séminaire « Villes contre le Terrorisme : réduction des risques et gestion de crise » s’est tenu à
Lisbonne les 26 et 27 octobre. Il a été organisé par l’Universidade Nova de Lisboa1 en coopération avec
l’Universidade Atlântica, dans le cadre du projet « Villes contre le Terrorisme » promu par le Forum
Européen pour la Sécurité Urbaine et parrainé par la Commission Européenne dans le cadre de son projet
« Victimes d’Actes Terroristes ».
Nous sommes reconnaissants envers les nombreuses personnes et institutions qui ont généreusement
donné de leur temps et partagé leurs connaissances et qui ont contribué à rendre ce séminaire possible.
Nous souhaitons particulièrement remercier les orateurs et les animateurs des diverses tribunes et
séances de clôture pour leur contribution au débat sur un sujet qui constitue l’une des préoccupations
principales de nos sociétés contemporaines.
Nous avons été honorés que le séminaire ait pu compter sur le parrainage du Ministre d’Etat et de
l’Intérieur, M. António Costa. Les Municipalités de Lisboa et Oeiras ont également apporté un soutien
essentiel pour l’organisation de ce séminaire. Nous leur exprimons également notre plus grande et plus
sincère gratitude.
Nelson Lourenço (Coordinateur Scientifique)
Graça Frias
1 Par le biais de SociNova, Gabinete de Investigação em Sociologia Aplicada (Centre de Recherches en Sociologie Appliquée), TIRAR Faculdade de Ciências Sociais e Humanas.
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RESUME
Ce rapport est une synthèse du contenu principal et des conclusions du séminaire « Villes contre le
Terrorisme : Réduction des risques et Gestion de Crise » qui s’est tenu à Lisbonne les 26 et 27 octobre. Il
a été organisé par l’Universidade Nova de Lisboa2 en coopération avec l’Universidade Atlântica, dans le
cadre du projet « Villes contre le Terrorisme » promu par le Forum Européen pour la Sécurité Urbaine et
parrainé par la Commission Européenne dans le cadre de son projet « Victimes d’Actes Terroristes ». Il a
été parrainé au niveau national par le Ministre d’État et de l’Intérieur et les municipalités de Lisboa et
Oeiras.
L’objectif principal du séminaire était de contribuer au débat public sur le terrorisme (et également d’y
intégrer les municipalités locales), c’est-à-dire comment réduire les risques d’une menace et gérer
efficacement les crises en cas d’attentat. Bien que le Portugal n’ait pas eu d’expérience directe, le public a
été très réceptif à ce débat, comme en témoigne le grand nombre de participants issus de nombreuses
institutions portugaises.
Le séminaire a rassemblé en tout 104 personnes. L’ensemble des forces de police portugaises était
représenté (la PSP : Polícia de Segurança Pública, Police de Sécurité Publique ; la GNR : Guarda
Nacional Republicana, Garde Nationale Républicaine et la PJ : Polícia Judiciária, Police Judiciaire), ainsi
que les services d’Immigration et de Renseignements (le SEF : Serviço de Estrangeiros e Fronteiras,
Service du Contrôle des Frontières et de l’Immigration et le SIS : Serviço de Informações de Segurança,
Service de Renseignements et de Sécurité).
Parmi les autres institutions, étaient représentées au séminaire les universités et municipalités des zones
métropolitaines de Lisbonne et d’Oporto (Lisbonne, Loures, Oeiras, Sintra; et Oporto et Matosinhos,
respectivement)3, des institutions gouvernementales telles que le Bureau de Coordination de la Sécurité,
l’Inspection Générale du Ministère de l’Intérieur et les Services de Protection Civile et des Pompiers
(Ministère de l’Intérieur), le Centre d’Etudes Judiciaires (Ministère de la Justice) et la Commission pour
l’Égalité et les Droits des Femmes ainsi que des représentants du Ministère des Affaires Étrangères et de
la Présidence du Conseil des Ministres. Les organisations de soutien aux victimes (APAV : Association
Portugaise de Soutien aux Victimes et le Comité de Protection des Victimes de la Criminalité) étaient
également représentées.
2 Par le biais de SociNova, Gabinete de Investigação em Sociologia Aplicada (Centre de Recherches en Sociologie Appliquée), TIRAR Faculdade de Ciências Sociais e Humanas. 3 Les municipalités d’Oeiras, Sintra, Loures et de Matosinhos intègrent le Forum Portugais pour la Prévention et la Sécurité Urbaine.
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Des spécialistes internationaux étaient également présents au séminaire (représentants de l’Institut
Français d’Analyses Stratégiques ; de la West of England University, Royaume-Uni ; de l’Université d’État
de Houston et de la Direction Générale de la Protection Civile espagnole, Espagne).
Le Sous-secrétaire d’État à l’Intérieur a participé à la séance d’ouverture et la séance de clôture a été
présidée par le Ministre de la Défense.
Quatre thèmes principaux ont été abordés au cours du séminaire : les actions à long terme de lutte contre
le terrorisme ; la gestion de crise et la réponse d’urgence ; le soutien aux victimes du terrorisme et le rôle
des autorités locales face à la menace terroriste.
Parmi les sujets abordés dans le cadre du débat sur les stratégies à long terme de lutte contre le
terrorisme figuraient la question de la définition du terrorisme et de la perception du terrorisme comme un
phénomène qui diffère ou non de ce qu’il était au cours des siècles passés ; les vecteurs stratégiques à
adopter dans la lutte anti-terrorisme ; l’attention spécifique à apporter à la prévention et le besoin de
garantir un équilibre entre la sécurité, la lutte anti-terrorisme et les droits de l’homme fondamentaux.
En ce qui concerne la gestion de crise et les interventions d’urgence, l’expérience espagnole de la gestion
de crise à la suite des attentats à la bombe de Madrid le 11 mars a permis aux participants de partager
leur expérience des procédures à adopter en cas d’incident majeur et des mesures à mettre en œuvre afin
d’améliorer l’action. Le rôle de l’Autorité Nationale portugaise pour la Protection Civile a également été
abordé.
En ce qui concerne le soutien aux victimes, le débat s’est focalisé sur les bonnes pratiques de soutien aux
victimes immédiatement après un incident majeur (particulièrement sur la base de l’expérience de l’Équipe
de Gestion des Incidents Critiques de la GNR) ainsi que sur la contribution importante de la justice
réparatrice afin de sauvegarder les droits des victimes à différents niveaux au cours du long processus de
rétablissement.
La tribune chargée d’aborder le thème du rôle des autorités locales face aux menaces terroristes
comprenait des représentants de municipalités qui ont exprimé leurs points de vue concernant les
mesures mises en œuvre ou devant être mises en œuvre en termes de prévention contre le terrorisme.
Il convient de mentionner que les points de vue concernant le terrorisme présentés dans ce rapport
reflètent les opinions des orateurs à ce sujet.
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1. ACTION DE LUTTE À LONG TERME CONTRE LE TERRORISME
La réflexion sur les stratégies de lutte contre le terrorisme implique de comprendre ce qu’est le terrorisme
et s’’il se présente sous de nouvelles formes aujourd’hui, ou de manière similaire à ce qu’il était dans le
passé. L’association de moyens plus traditionnels et d’une approche préventive dans la lutte contre le
terrorisme, ainsi que les risques que peut comporter cette lutte en termes de mise à mal des structures
démocratiques et sociales sont des thèmes qui ont été abordés dans le cadre de ces débats. Ce chapitre
est fondé sur les présentations d’Arnaud Blin, de José Alberto Loureiro dos Santos, d’Henry Shaftoe, de
Jean-Claude Salomon, d’Elza Pais et de Paulo Gomes.
1.1. Le terrorisme au sein des sociétés contemporaines
Il n’existe pas de définition établie du terrorisme au sein des lois et politiques internationales. Toutefois,
l’un des points communs du débat consistait à dire que le terrorisme peut être défini comme un acte visant
à tuer ou à blesser gravement des civils et / ou visant à tenter d’intimider une population entière. Certains
considèrent le terrorisme contemporain comme un phénomène nouveau : les terroristes cherchent à
générer une terreur maximale au travers de la mort d’un nombre maximum de personnes. En outre, les
terroristes n’acceptent pas uniquement de sacrifier leurs propres vies mais ils sont disposés à le faire au
nom d’une cause. Il est également important de souligner que les frontières qui séparent la sécurité
intérieure de la sécurité extérieure ont disparu étant donné que les critères communément utilisés pour les
différencier – les menaces provenant de l’intérieur par rapport aux menaces provenant de l’extérieur du
pays – ne s’appliquent pas dans le cas d’un attentat terroriste.
Cependant, Arnaud Blin souligne qu’il existait plusieurs similitudes lorsque l’on compare le terrorisme à
certaines formes de terrorismes qui ont émergé au cours des siècles passés. D’une part, Al-Qaeda
présente des similitudes avec des groupes terroristes des siècles passés4; et d’autre part les villes,
particulièrement les grandes villes, ont toujours constitué une cible pour les attentats et la scène
d’activités terroristes. Aujourd’hui, comme dans le passé, la ville, synonyme de démocratie,
d’industrialisation, de capitalisme et de modernisation, représente tout ce qui doit être éliminé et purifié et
est devenu le symbole de tous les maux. Les villes sont également un symbole de légitimité pour les
gouvernements, ce qui est précisément la cible recherchée par les groupes terroristes.
4 « La secte des Zélotes au 1er siècle , la secte des Assassins au 11e et 12e siècles et même les formes de terrorismes qui sont apparues au cours de la seconde moitié du 19e siècle ». BLIN, Arnaud).
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En outre, Arnaud Blin nous rappelle que les précédentes formes de terrorisme ressemblaient à celles
usitées par les nombreux groupes des 19e et 20e siècles et qui se faisaient appeler les armées de
libération nationale. Le Hamas, par exemple, bien que perçu comme un mouvement radical islamique
organisé, est essentiellement un mouvement nationaliste qui a choisi l’Islam comme support idéologique.
De manière similaire, la Tchétchénie rentre principalement dans la même catégorie. Les techniques
adoptées par les groupes terroristes contemporains et du passé sont également similaires, l’utilisation de
simples explosifs constituant leur premier choix.
1.2. Les stratégies de lutte contre le terrorisme
Selon José Alberto Loureiro dos Santos, certains vecteurs stratégiques jouent un rôle fondamental dans la
lutte contre le terrorisme :
- Un effort continu et permanent visant à maintenir la sécurité au sein de nos sociétés (à travers
l’utilisation des instruments policiers et judiciaires, les services de renseignements, les
communications et, en derniers recours, les forces armées à l’intérieur ou à l’extérieur du
territoire national – afin d’interdire l’accès au pays à des organisations terroristes et de
démanteler celles qui s’y sont déjà infiltrées). Ce type de mesures cadre avec ce qui a été
annoncé aux USA au mois de septembre cette année dans le cadre de la Stratégie de Lutte
contre le Terrorisme sous le titre d’approche à court terme ;
- Un effort visant à réduire / abolir les conditions politiques, économiques et sociales qui favorisent
l’émergence du terrorisme (par exemple, soutenir le développement économique et
gouvernemental, promouvoir les institutions démocratiques et renforcer la démocratie partout où
cela est possible, éradiquer les épidémies, la désertification etc.) afin de produire des effets à
moyen et long terme ;
- un combat idéologique dynamique démontrant les avantages de la garantie du respect des droits
de l’homme dans tout ce qui a trait au bien être de la société dans son ensemble.
Bien que les forces armées puissent jouer un rôle dans la lutte contre le terrorisme, la meilleure réponse à
une attaque terroriste doit être fondée sur la prévention, et de préférence de nature non militaire. La
participation des forces armées dans la lutte contre le terrorisme doit toujours être envisagée comme un
dernier recours. Leur participation peut même consister en des activités non spécifiquement militaires (par
exemple, intervention d’urgence, trouver, manipuler et nettoyer des produits chimiques, radiologiques,
biologiques et / ou des explosifs) ou en l’utilisation de leurs capacités au combat (terrestre, aérien ou
naval) ou pour le contrôle des frontières. En outre, la présence des forces armées dans des situations
conflictuelles n’implique pas nécessairement qu’elles aient la maîtrise de la situation.
10
Ainsi, l’une des notions majeures qui sous-tend la lutte contre le terrorisme est liée au fait qu’il est
nécessaire de traiter le problème non seulement en termes de réponse immédiate, mais également à long
terme, en travaillant à la prévention des menaces futures.
1.3. La prévention du terrorisme
Comment pouvons-nous prévenir ce type de menace ? L’une des perspectives présentées au cours du
séminaire par Henry Shaftoe, consiste à dire que le terrorisme constitue une méthode alternative pour
perpétrer un crime, un acte interdit par la loi. Il déclare également que la prévention de la criminalité dans
son ensemble peut, de ce fait, constituer une leçon de lutte contre le terrorisme en ce sens qu’il est
possible de travailler davantage à la prévention plutôt qu’à la réaction au terrorisme.
L’objectif principal consiste à gérer et réduire le terrorisme, non pas à l’éliminer. Des outils d’ordre plus
psychologiques et sociologiques devraient être utilisés afin de prévenir le terrorisme, en tenant compte de
concepts tels que ceux de sous-cultures et d’affiliation, parmi d’autres.
Selon Shaftoe, le terrorisme et la criminalité ordinaire partagent des terreaux communs et la notion de
mécontentement, qui résultent de trois facteurs principaux : individuels, organisationnels et
environnementaux. Les personnes qui perpétuent le terrorisme vivent dans les mêmes villes que celles
qui sont impliquées dans les violences urbaines et elles partagent des valeurs symboliques communes.
Seulement, la violence terroriste est plus ciblée et organisée que la violence perpétrée par les jeunes en
milieu urbain. Les terroristes d’aujourd’hui sont membres de réseaux, un facteur qui différencie les
activités terroristes de la violence urbaine ou d’autres activités criminelles en général. En fait, de la
sélection à l’entraînement jusqu’au stade de l’attentat, le réseau constitue un aspect central du terrorisme.
Nous devons aborder les raisons qui expliquent pourquoi tant de gens se font endoctriner, se détachent
des autres et ressentent une colère telle qu’ils sont motivés à commettre des actes de terrorisme. Nous
devons également nous tourner vers l’histoire et des exemples parallèles (tels que la guerre anti-
narcotiques et d’autres menaces mondiales) afin de trouver des méthodes alternatives de gestion des
conflits.
La tentative de dissuasion du terrorisme au travers du système de justice criminelle ne s’est pas encore
révélée efficace. Même les punitions les plus sévères (telles que la peine de mort) sont inutiles étant
donné que les terroristes sont prêts à sacrifier leurs vies. La dissuasion par le biais de la justice criminelle,
des méthodes militaires ou de réduction des opportunités peut se révéler nécessaire à court terme mais
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de telles approches comportent des risques, tels que celui de rendre le terroriste encore plus sournois et
inventif.
Dans ce contexte, quelle devrait être la politique de prévention ? Du point de vue de Jean-Claude
Salomon, la laïcité peut constituer une partie de la solution, avec une séparation de l’État et de la Religion
et la tentative d’identification d’un terrain d’entente.
Il est également important de tenter d’empêcher les individus de rallier des causes qui mènent au
terrorisme ou à l’adhésion aux actions terroristes. Cela implique de développer des politiques sur le plan
social, politique, économique et éducatif, contribuant à la réduction des discriminations et des
insatisfactions au sein des communautés. Il est également nécessaire de mobiliser les membres de
communautés spécifiques et concernées (par exemple, la communauté musulmane modérée) et de les
impliquer dans ce processus. Il a été démontré que lorsque certains membres de groupes spécifiques
modifient leur comportement habituel, cela indique une implication dans une activité terroriste. Ainsi, il faut
porter attention à de tels changements, tels que l’abandon d’un mode de vie occidental normal afin de
s’adonner à des pratiques fortement religieuses (surtout lorsqu’il s’agit de femmes) ou à l’inverse, se
détourner d’une pratique religieuse pour adopter un mode de vie occidental sans raison apparente (par
exemple, se raser la barbe).
Il est également fondamental de comprendre qui sont les terroristes. Quels types d’individus sont-ils ?
Pourquoi ont-ils choisi de commettre des actes terroristes ? On peut avoir tendance à les considérer
comme des sortes de monstres, à penser qu’ils sont fous ou qu’ils souffrent de maladies mentales.
Cependant, plusieurs études démontrent qu’ils correspondent à la description de ceux qui sont tenus pour
être des « personnes normales », bien que certains puissent souffrir des conséquences de troubles de
stress post-traumatiques ou de troubles de la personnalité. Dans nos sociétés, nous traitons
quotidiennement des personnes qui peuvent devenir des terroristes, en raison de leur colère ou de leur
insatisfaction vis-à-vis de leur situation ou de la société en général5. Certaines de ces personnes se
contenteront d’adopter une attitude d’indifférence, d’autres iront plus loin.
Quoi qu’il en soit, le processus de conversion en terroriste ou qui mène à commettre un attentat-suicide à
la bombe est long et complexe. On ne décide pas sur un coup de tête de s’affilier. Il ne s’agit pas
simplement de recevoir quelques leçons, de fabriquer une bombe et de la faire exploser. Cela demande
un dévouement, un engagement, une implication dans le groupe et une déshumanisation, un processus
au cours duquel le terroriste va progressivement cesser de regarder les citoyens comme des êtres
humains. Cette notion est absolument essentielle car, à l’origine, le terroriste potentiel est très humain et
5 Comme le démontre, par exemple, le grand nombre de personnes qui s’abstiennent de voter aux élections.
12
perpétrer des attentats terroristes semblerait insupportable à la plupart des membres sans cette notion.
Les sermons et les vidéos utilisés par les groupes islamiques dits radicaux de par le monde peuvent être
considérés comme un bon exemple de cette notion : les occidentaux sont présentés comme de froids
tueurs d’enfants, des voleurs de terres et de ressources utilisant la force militaire contre la résistance.
Le processus de conversion au terrorisme peut également être considéré comme un processus de
responsabilisation. Bien que ce terme soit généralement utilisé dans un contexte différent, il est possible
d’en comprendre l’application dans ce domaine si l’on établit un lien entre la responsabilisation et le fait
d’être capable de contrôler sa vie et son environnement. Il s’agit d’une question d’identité personnelle,
d’estime de soi et d’honneur. Dans un contexte de violence urbaine, le contrôle est principalement lié à la
notion de « territoire », alors que les terroristes ont le contrôle de « leur cause, leur identité ». Pour les
jeunes urbains, l’estime de soi émane de la reconnaissance par leurs pairs. Pour les terroristes, l’estime
de soi émane des autres membres du mouvement et de la dimension religieuse de récompense dans la
vie après la mort. Devenir l’auteur d’un attentat-suicide à la bombe est également, d’une certaine manière,
lié aux rites de passage que plusieurs sociétés ont toujours pratiqués, ce qui dans ce contexte procure un
sens à la vie du terroriste : devenir un martyre peut être utile pour conférer un certain statut et contribuer à
se prouver aux autres.
Comme le souligne Jean-Claude Salomon, être impliqué dans des activités terroristes n’implique pas
nécessairement de devenir auteur d’un attentat-suicide. Il existe d’autres types de participation, comme la
logistique, l’information ou la planification. En outre, de nombreuses personnes, bien qu’elles ne soient
pas directement impliquées dans le terrorisme, partagent certains points de vues, opinions et causes des
terroristes. Les résultats d’une enquête ont révélé qu’environ 16% des personnes interrogées qualifiaient
les attentats de Londres de justifiables. En outre, de nombreuses personnes étaient d’accord avec le point
de vue de l’IRA consistant à dire que l’armée anglaise devrait abandonner le nord de l’Angleterre et un
nombre important de basques exprime un soutien subtil à l’ETA.
L’Histoire peut également se placer du côté des terroristes : certains de ceux qui étaient considérés
comme des terroristes sont par la suite devenus des dirigeants politiques. Les interventions au nom de
l’environnement ou de la défense des droits des animaux sont parfois mises en œuvre à l’aide de
méthodes violentes.
1.4. Le rôle des femmes dans la résolution de conflits
Comme le déclare Elza Pais, les femmes et les enfants sont des groupes particulièrement vulnérables
dans les conflits de par le monde. Le viol des femmes, par exemple, a souvent été considéré comme le
droit du vainqueur en temps de guerre, même récemment (guerre en Bosnie, conflits au Rwanda).
13
Et pourtant, l’un des stéréotypes les plus répandus est celui de « l’éternelle victime », impuissante,
passive et rarement perçue comme active et dynamique. Il est pourtant connu que cela ne correspond pas
totalement à la réalité. La tradition nous montre comment, depuis la nuit des temps, la naissance et la
mort relèvent de la responsabilité des femmes. Les femmes sont également efficaces dans l’organisation,
le soutien et le traitement des victimes et des blessés. Partout, elles assurent la réponse aux besoins
fondamentaux et la gestion des ressources humaines. Les femmes volontaires dans certaines ONG ont
démontré à quel point leur travail et leur soutien est essentiel dans des situations de conflit et de violence.
Des femmes bien intentionnées dans des pays en guerre ont également rencontré des dirigeants afin de
trouver des solutions et de faire de la médiation. C’est ce qui s’est produit entre les femmes israéliennes
et arabes, bosniaques, serbes et croates. Partout dans le monde, les femmes ont ainsi défendu la culture
de la paix, souvent contre toute attente et en faisant face aux critiques provenant des deux camps.
Au 21e siècle, la reconnaissance internationale du rôle fondamental joué par les femmes, non seulement
dans les situations d’urgence mais également dans les tâches de prévention des conflits, de gestion du
soutien, de la construction et du maintien de la paix, a finalement mené à la conclusion que les femmes
devraient bénéficier d’une représentation au sein des groupes qui aident à prévenir et à remédier aux
conflits et qui participent à la construction de la paix.
La Résolution 1325 des Nations Unies, adoptée en 2000, recommande aux Etats Membres de faire en
sorte que les femmes soient davantage représentées à tous les niveaux de prises de décisions dans les
institutions et mécanismes nationaux, régionaux et internationaux pour la prévention, la gestion et la
résolution des différends.
Que peuvent faire les femmes en cas d’attentat terroriste systématique et visant les populations civiles ?
Du point de vue d’Elza Pais, elles peuvent jouer un rôle dans la prévention et le soutien aux victimes. La
guerre en Bosnie-Herzégovine est un exemple remarquable de bonnes pratiques dans ce contexte : des
groupes de femmes de confessions et d’ethnies différentes se sont rencontrées et ont dialogué, à la
recherche de causes communes.
Elza Pais déclare que, plutôt que d’accumuler des armes pour la défense nationale, la conception qu’ont
les femmes de la sécurité consiste à promouvoir une sécurité véritablement constructive permettant de
garantir un bien-être social, économique et psychologique. Pour les femmes, la sécurité implique non
seulement d’être protégé des menaces de guerre mais également du risque de harcèlement et de
violence chez soi, au travail ou dans la rue.
14
Les études du Conseil de l’Europe ont conclu qu’il existe un besoin d’implication active des femmes dans
la transformation des cultures et dans la négociation de mécanismes de dialogues religieux et
multiculturels, afin de comprendre, de reconnaître et de respecter les différences entre les sexes et les
valeurs.
Plusieurs recommandations, émanant des Nations Unies et du Conseil de l’Europe, soulignent la
nécessaire prise en compte non seulement des organisations pacifistes ou de femmes (les organisations
pacifistes étant souvent dirigées par des femmes), mais également du besoin d’accorder une attention et
un soin particuliers à la participation des femmes dans les processus de construction de la paix et de
réconciliation, ainsi qu’à leur formation pour une participation égalitaire dans le cadre des négociations de
paix officielles.
Ainsi, l’Agenda mondial de la Plate-forme d’Action de Pékin a défini les objectifs stratégiques suivants :
Afin de renforcer la participation des femmes dans la résolution de conflits au niveau des processus de
prise de décision et de protéger les femmes vivant dans des situations de conflits armés ou d’autres types
de conflits ou sous autorité étrangère :
1) Réduire les dépenses militaires excessives et limiter la disponibilité des armes ;
2) Promouvoir des méthodes non-violentes de résolution des conflits et réduire l’incidence des
violations des droits de l’homme dans les situations de conflits ;
3) Promouvoir la contribution des femmes dans l’instauration d’une culture de la paix ;
4) Fournir protection, assistance et formation aux réfugiées et aux femmes déplacées ;
5) Fournir une assistance aux femmes vivant au sein de colonies et de territoires privés
d’autonomie.
Afin d’instaurer la paix, il est également nécessaire de tenir compte des problèmes liés aux conflits armés
et au terrorisme de manière sexospécifique. C’est seulement en travaillant ensemble que les hommes et
les femmes pourront réduire le prix de la guerre et de la violence de manière efficace.
1.5. La sécurité autour des événements importants6
L’Europe traverse un processus de changement généralisé, de croissance, de diversification et
de renforcement. La mondialisation génère de multiples connexions et renforce l’intégration
européenne au sein de la société mondiale. Malgré les nouvelles opportunités que cela engendre
(liberté de circulation, prospérité, internet, droits de l’homme et démocratie ou innovations
6 Les commentaires sur ce point étaient inspirés de la présentation de Paulo Gomes.
15
technologiques et amélioration du bien-être), cela engendre également des menaces, des
risques et des vulnérabilités. Parmi les exemples, on peut citer le terrorisme international, le
crime organisé à l’échelle transnationale, les armes de destruction massive, les conflits régionaux
et les crises humanitaires. Les nouvelles menaces sont plus diversifiées, moins visibles et moins
prévisibles et peuvent provenir de l’intérieur ou de l’extérieur de l’Union Européenne, étant donné
qu’elles sont interconnectées (exemple des trafics, du terrorisme).
Le 11 septembre a symboliquement marqué l’avènement d’un nouvel ordre international. Les
États doivent réévaluer leurs capacités et leurs vulnérabilités en termes de sécurité, ce qui donne
lieu à une réflexion concernant la possible nécessité d’un nouveau paradigme fondé sur une
nouvelle gouvernance sécuritaire, une coordination efficace, un échange d’informations et de
renseignements, l’intégration des aspects de sécurité, de protection et de défense et un
renforcement des mécanismes de coopération internationale.
L’une des conséquences de ce changement de paradigme sécuritaire et d’ordre public sera la
réforme des modèles traditionnels de gestion de la sécurité autour des grands événements,
particulièrement ceux qui, pour diverses raisons, comportent une dimension ou un impact
international. Ce nouveau contexte sécuritaire appelle de nouvelles réponses, c’est à dire
l’internationalisation des politiques de sécurité au travers de l’intensification de la coopération, de
la coordination et de l’association des moyens (police, renseignements, justice, économie,
finances, science et diplomatie). Il est également nécessaire de repenser la sécurité, et plusieurs
aspects doivent être intégrés : une dimension intérieure et extérieure, des moyens civils et
militaires, l’intégration des concepts de sécurité et de sûreté, des ressources publiques et
privées, les dimensions nationales et locales et des partenariats public-privé.
Les grands événements internationaux sont liés à des questions de sécurité. Leur importance est
croissante, particulièrement dans le domaine sportif ou lorsqu’il s’agit de sommets de haut
niveau, et leur dimension ou visibilité est susceptible d’attirer le terrorisme et des activités liées
au crime organisé. Ils offrent aux pays organisateurs une occasion de renforcer leurs
compétences dans ce nouveau cadre sécuritaire public et de contribuer à l’échange
d’informations, d’expériences et de bonnes pratiques.
Il existe des facteurs critiques en ce qui concerne la sécurité des grands événements. Les
priorités doivent être la prévention, la dissuasion et la coopération. Il est également nécessaire
16
d’évaluer les menaces et les risques (en termes d’ordre public, de santé publique et de sûreté, de
criminalité, de terrorisme et autres risques), de mettre en œuvre des mesures de sécurité et de
protection et d’être prêt à gérer toutes sortes de crises.
Parmi les mesures devant être prises en termes de sécurité et d’ordre public figurent :
- L’échange et le traitement efficaces des informations policières au niveau international,
tout en tenant compte du réseau national ;
- L’articulation des informations, de la sécurité, des politiques judiciaires et de contrôle des
frontières ;
- L’élaboration d’une stratégie nationale et de structures centrales de coordination et de
coopération (organisateurs, forces de sécurité, services et organismes, bureau de
coordination de la sécurité) ;
- L’intégration de la prévention contre la criminalité liée aux événements internationaux ;
- La planification des activités de police en fonction du risque induit par la ville et par
l’événement ;
- Des campagnes de sensibilisation visant les populations locales.
Ces mesures doivent être planifiées et mises en œuvre en étroite collaboration avec les
municipalités locales en tenant compte des aspects suivants :
- La coopération avec les structures de sécurité publiques et privées ;
- Des plans d’urgence externes ;
- L’amélioration des conditions environnementales des espaces publics ;
- La prévention des comportements indésirables ;
- L’amélioration des accès et des réseaux de transport publics ;
- La politique d’accueil ;
- La sensibilisation des populations locales ;
- Des zones alternatives d’hébergement et de restauration.
Certaines mesures ont été prises en ce qui concerne la coopération sécuritaire au niveau
européen dans le cadre d’événements importants. Il existe un Plan d’Action et une Stratégie de
Lutte Anti-Terroriste européenne et bientôt une Stratégie Européenne de Sécurité autour des
Evénements importants sera mise en place. Dans le cadre du programme EU-SEC (UNICRI/UN),
17
le Portugal a été chargé de décrire le status quo des Programmes Nationaux de Recherche sur la
Sécurité des Événements Importants en Europe.
Pourtant, en 2006, l’ECOSOC (Le Conseil Économique et Social des Nations Unies) a approuvé
une résolution reconnaissant l’existence d’un Observatoire International Permanent de la
Sécurité des Événements Importants, qui était déjà en activité de manière informelle. Cet
Observatoire a récemment produit une boîte à outils contenant des instruments théoriques et
méthodologiques pouvant être utilisés comme directives pour l’organisation d’un événement
important.
1.6. Équilibre entre sécurité et droits de l’homme fondamentaux
Du point de vue d’Arnaud Blin, le fait même que les sociétés qui sont la cible d’attentats soient
principalement des sociétés démocratiques peut constituer une difficulté supplémentaire en termes de
réaction au terrorisme. Une démocratie permet la liberté, ce qui permet aux terroristes de jouir de toute la
liberté dont ils ont besoin afin de circuler : en protégeant les droits des citoyens, elles protègent également
les droits de potentiels terroristes. En outre, la liberté des médias représente un instrument d’importance
pour les terroristes, qui cherchent à modifier l’opinion publique.
Une fois que nous sentons que les menaces augmentent, nous sommes plus disposés à renoncer à ce
que nous avions l’habitude de considérer comme les principes fondamentaux des sociétés
démocratiques, au nom de la sécurité, et une société peut plus aisément céder au totalitarisme. Le fait
que la peur soit présente dans nos sociétés constitue déjà une victoire pour les terroristes. Cela joue un
rôle important dans l’affaiblissement de la confiance publique, la déstabilisation de l’intervention
gouvernementale et la paralysie de l’État. L’utilisation de la force en retour, la restriction ou réduction des
libertés civiles sont un miroir qui reflète l’action des terroristes et la récompense efficacement. Il devient
alors essentiel que la lutte contre le terrorisme ne devienne pas, pour les sociétés, un prétexte justifiant
qu’elles amoindrissent leurs structures démocratiques. Les sociétés sont confrontées à un nouveau défi,
celui de trouver un équilibre entre la sécurité et les libertés et droits civils. Comment relever ce défi et
partager les expériences, voilà l’une des questions qui se posent et qui ont fait l’objet de nombreux débats
entre les participants au séminaire.
2. GESTION DE CRISE ET INTERVENTION D’URGENCE
Les sujets principaux abordés ont été : - quelles procédures principales adopter en cas d’attentat
terroriste ? - les conclusions d’un séminaire Européen qui s’est tenu en Espagne en 2004 visant à évaluer
18
l’efficacité des actions entreprises en termes de Protection Civile suite aux attentats de Madrid - les
fonctions des Services de Protection Civile Portugais et la question de savoir s’ils sont prêts à gérer des
situations de crises liées aux menaces terroristes, et quel rôle ils peuvent jouer dans ce contexte.
2.1. Intervention suite à un attentat terroriste (Action suite aux attentats du 11 mars à Madrid)
En cas d’attentat terroriste, quelles sont les procédures principales qui doivent être envisagées dans
l’intervention et la réduction des impacts et des conséquences ? Les commentaires suivants sont
fondés sur l’expérience espagnole suite aux attentats du 11 mars à Madrid et extraits de la
présentation de Carlos Dueñas.
Il existe plusieurs procédures à appliquer sur le lieu de l’incident : isoler la zone, évacuer les blessés,
contrôler la circulation et faciliter l’accès aux services d’urgence, éteindre les éventuels incendies,
évaluer les risques, récupérer les cadavres (en collaboration avec les experts médicolégaux et les
autorités judiciaires). L’intervention in situ s’achève lorsqu’on a garanti que la zone est propre et sûre
et que les services publics de base ont été rétablis.
Dans le cadre de l’intervention initiale suite à un attentat terroriste, il convient également d’envisager
un autre domaine d’action fondamental, qui n’est pas directement lié à la localisation de l’incident,
c’est à dire l’assistance médicale et hospitalière, la transmission d’information au public, la mise à
disposition d’hébergements et d’un soutien aux victimes non hospitalisées et aux familles des
victimes.
Il est toujours nécessaire d’entreprendre des actions à plusieurs niveaux, tels que : le niveau
sécuritaire, sanitaire, l’attention apportée aux victimes et à leur entourage, l’extinction des incendies,
les secours, le soutien psychologique et l’identification des corps7.
En 2004, lors d’un séminaire visant à évaluer les actions suite aux attentats du 11 mars et qui s’est
tenu à l’Ecole Nationale de Protection Civile à Madrid, des conclusions ont été tirées afin d’améliorer
la qualité des interventions :
- Il est nécessaire de cibler les protocoles d’intervention et de coordonner l’ensemble des services
d’urgence impliqués ;
7 Suite au 11 mars à Madrid, une attention particulière a été portée à l’assistance aux familles pour l’identification des corps : les proches ont été répartis dans des salles différentes en fonction du nom de la personne disparue et ont reçu le soutien de psychologues et de prêtres. De la nourriture et des couvertures ont été mises à leur disposition et seules deux personnes étaient autorisées à identifier le corps. L’accès aux pavillons était strictement contrôlé et interdit à la presse afin de respecter le deuil des familles.
19
- Il est fondamental de disposer d’un système de communication d’urgence fiable et compatible
entre les services qui sont susceptibles d’agir conjointement au cours d’une crise ;
- Il est vital de garantir une gestion globale de la crise à de multiples niveaux et dans différents
domaines d’intervention.
Il existe un véritable besoin de coopération transnationale étant donné qu’il n’est pas possible pour un
pays isolé de lutter correctement contre le terrorisme. Le Mécanisme Public de Protection Civile, adopté
par le Conseil de l’Union Européenne le 23 octobre 2001 et visant à faciliter une coopération renforcée
dans le cadre d’interventions d’assistance et de protection civile, est considéré comme un instrument
approprié pour assurer une coopération entre les états membres européens. Il est également essentiel de
promouvoir une formation conjointe des différents services d’intervention à plusieurs niveaux afin
d’améliorer les procédures. Enfin, il est vital d’informer les citoyens de manière appropriée8.
2.2. La Protection Civile au Portugal9
Au Portugal, la Protection Civile a principalement été impliquée dans la gestion d’urgence et son
intervention s’est essentiellement concentrée sur les accidents graves et les catastrophes, comme défini
récemment par la Loi sur la Protection Civile10. La Protection Civile est chargée de traiter et de réduire les
risques et dangers naturels et technologiques susceptibles de constituer une menace pour la vie et la
propriété des populations. Ainsi, leur mission consiste non seulement à traiter les situations d’inondations,
de tremblements de terre, d’incendies et d’éruptions volcaniques, mais également les accidents (par
exemple, accidents industriels, transport de matières dangereuses et toxiques, pollution toxique). La
protection civile se concentre sur les urgences et les accidents perçus comme identifiables et limités.
Généralement, la situation est connue dans le cadre des urgences : les menaces, vulnérabilités et risques
sont globalement identifiés et bien connus ; des plans et des moyens d’intervention sont au moins
partiellement mis en place. Les partenaires intervenant dans le cadre des opérations d’urgence se
connaissent et sont informés de leurs missions et responsabilités spécifiques.
Cependant, selon Manuel João Ribeiro, les événements du 11 septembre à New York, ainsi que les
attentats du 11 mars à Madrid et du 7 juillet à Londres, pour n’en citer que quelques-uns, ont provoqué de
profonds changements en termes d’approche. Le concept de crise est en pleine reconstruction et
s’oppose aux concepts d’accident ou d’urgence.
8 Pour de plus amples renseignements sur le séminaire et ses conclusions, consulter l’Annexe nº 3 (en espagnol). 9 Les commentaires à ce sujet sont fondé sur la présentation de Manuel João Ribeiro. 10 Loi n. 27/2006, du 3 juillet 2006.
20
L’une des conséquences est l’abandon de l’idée qu’il existe des « endroits sacrés » - un attentat peut se
produire n’importe où. De même, les acteurs prenant part aux conflits étaient les États, parfaitement
identifiables en tant que tels. Aujourd’hui, il existe de nouvelles entités et de nouveaux groupes, des
organisations travaillant au sein de réseaux transnationaux (mafias, cartels, groupes fondamentalistes).
En ce qui concerne la terminologie utilisée, bien qu’il y ait de nombreuses références à la mondialisation,
les problèmes et conséquences sont principalement exprimés en termes locaux (la région, et même la
ville). Les principales cibles ne sont plus les structures et institutions de l’État (l’armée, la police) mais les
populations civiles. Ceci modifie la perception des valeurs qui, jusqu’alors, étaient considérées comme
sécurisées et intouchables, comme la vie elle-même.
Ces nouveaux scénarii ont rendu nécessaire un réexamen des références éthiques et socioculturelles.
Une crise n’affecte pas seulement les populations, elle affecte également les institutions politiques,
économiques et culturelles, ainsi que l’ensemble des structures de premiers secours et d’urgence. En ce
qui concerne les actes terroristes, considérés comme des manifestations de crises, leur conséquences ne
sont plus mesurées en termes de dommages physiques et humains (quantifiables) mais de manière plus
globale en termes d’univers culturels et de valeurs symboliques qui résident au cœur des sociétés,
particulièrement des sociétés occidentales.
Ainsi, il est important de savoir si le système de protection civile national est prêt à faire face aux
nouvelles menaces et aux nouvelles exigences résultant des situations de crises, c’est à dire des attentats
terroristes.
Au Portugal, l’Autorité Nationale de Protection Civile 11 (NACP) est l’organisme chargé d’orienter et de
superviser les activités des Services de Pompiers et de coordonner l’ensemble des activités de protection
civile et de premiers secours à l’échelle nationale.
La principale mission de cette structure nationale, telle que définie par la Loi sur la Protection Civile, est :
- De prévenir et minimiser les risques liés aux catastrophes et de réduire leurs effets potentiels ;
- De coordonner et superviser toutes les activités opérationnelles des pompiers portugais ;
- D’évaluer les études, projets et plans relatifs aux zones de prévention des incendies et de vérifier
et superviser leur applicabilité in loco;
- De gérer et coordonner les opérations d’intervention d’urgence à l’échelle nationale et locale.
Outre les services centraux (qui comprennent un Poste de Commandement National pour les
Interventions d’Urgence), la NACP compte toujours de 18 Postes de Commandement de District pour les
11 Issue de la fusion de trois organisations : le Service National des Pompiers, le Service National de Protection Civile et la Commission Nationale spécialisée dans les incendies de forêts.
21
Interventions d’Urgence (un pour chacun des 18 districts du territoire national portugais). Au niveau
municipal, les responsabilités en termes de protection civile sont attribuées au maire. Chaque municipalité
doit se doter d’un service municipal responsable de la protection civile et disposant des compétences
nécessaires afin d’organiser, de préparer, d’activer et d’appuyer l’ensemble des interventions de
protection civile.
La NACP, comme le veut la norme des services de protection civile à l’échelle internationale, développe
ses activités autour de quatre domaines d’intervention :
- La prévention (analyse des risques, recherche et suivi des problèmes de sécurité, éducation,
sensibilisation et sensibilisation du public) ;
- La préparation (outils de planification visant à organiser les interventions d’urgence relatives à
certaines menaces et certains risques) ;
- Les premiers secours et les urgences (incendies de forêts et urbains, accidents, activités pré
hospitalières, missions internationales d’aide humanitaire et technique) ;
- La réhabilitation (contribuer à l’organisation territoriale par la supervision des Plans de
Développement Territoriaux et des Plans d’Urbanisme Municipaux.)
En ce qui concerne la menace et le risque concret d’attentats terroristes, il est nécessaire de reconnaître
que ce domaine spécifique n’a pas constitué une priorité historique de la NACP. Cependant, certaines
activités liées notamment à des simulations et à des exercices ont été organisées et la NACP y participe.
En outre, sur le plan opérationnel, plusieurs interventions, principalement suite au 11 septembre, ont été
organisées en raison de la menace liée à l’Anthrax (c’est à dire, la poudre blanche).
Toujours est-il que ce domaine était de la responsabilité des structures de police chargée des recherches
et de la sécurité, domaines où les forces armées jouent également un rôle important. Ainsi, comment la
NACP peut-elle intervenir dans ce domaine ? Une intervention de la NACP est-elle appropriée ?
Tout d’abord, il s’agit d’un domaine qui relève de la responsabilité du gouvernement. Ainsi, il est
parfaitement justifié de tirer avantage de toutes les ressources et moyens disponibles. Deuxièmement, la
NACP dispose de matrices de référence qui, bien que non spécifiquement définies afin de répondre aux
menaces terroristes et problématiques correspondantes, peuvent être facilement adpatées afin de les
intégrer. Troisièmement, le besoin d’adapter toute politique d’intervention centrée sur un concept de
menaces multiples plutôt que sur un risque spécifique est de plus en plus reconnu. Enfin, la coopération
entre toutes les parties prenantes doit être favorisée.
En conséquence, dans le cadre de la gestion de crises liées à des menaces terroristes, la NACP doit
assumer le rôle de partie prenante et de partenaire ayant des responsabilités spécifiques, et ne doit pas
22
interférer avec d’autres organisations. La NACP peut coopérer au cours de la phase de prévention, de
formation des populations cibles et de promotion de la sensibilisation publique, un domaine pour lequel
elle dispose d’une vaste expérience. Elle peut également contribuer à améliorer la structuration, la
complémentarité et la coordination des plans d’urgence.12 Les simulations et exercices à l’échelle
nationale et internationale doivent continuer et se concentrer particulièrement sur la reconnaissance des
erreurs et fragilités afin de les corriger et de les utiliser comme leviers d’amélioration.
3. LE SOUTIEN AUX VICTIMES DU TERRORISME
Deux sujets principaux ont été abordés dans ce cadre : les bonnes pratiques et les compétences
nécessaires en termes d’assistance immédiate aux victimes (sur la base de l’expérience de la GNR, au
travers de son équipe de Gestion des Incidents Critiques et de la présentation Frederico Galvão da Silva
et Bruno Brito); ainsi que l’assistance à long terme aux victimes afin d’améliorer leur situation à tous les
niveaux (social, relationnel et psychologique) et la possible contribution de la justice réparatrice dans ce
contexte. Les commentaires relatifs au second sujet de la discussion sont fondés sur la présentation
d’Anabela Rodrigues.
3.1. La réponse psychologique des forces de sécurité
L’une des missions de la GNR, en tant que groupe doté d’un statut militaire, est de « porter assistance et
protéger les citoyens, défendre et préserver les actifs mis en danger par l’action humaine ou la nature ».
La GNR est ainsi constamment confrontée à des incidents critiques devant être traités.
Les homicides, suicides, accidents graves, agressions et catastrophes on un impact sur la population et
les armées. Précédemment, comme le déclarent Galvão da Silva et Bruno Brito, la structuration d’une
nouvelle méthode de gestion des incidents critiques était fondée sur le bon sens et une formation non
spécialisée. Ultérieurement, le Service de Gestion des Incidents Critiques a été créé. Étant donné que la
GNR compte des professionnels issus de différents domaines (ex : psychologie, services sociaux,
assistance religieuse, relations publiques, presse, gestion et coordination des incidents critiques), le
nouveau paradigme des incidents critiques a permis d’utiliser à bon escient les ressources existantes afin
de traiter les véritables besoins qui surgissent suite à un incident critique. Le Service agit à l’aide des
Équipes d’Intervention Technique ou de l’Équipe de Gestion des Incidents Critiques.
12 L’accomplissement de ces tâches a été un élément clé de la réussite des opérations d’intervention d’urgence suite aux attentats de Londres.
23
Les incidents critiques peuvent être traités soit en interne ou en externe. En interne, en cas d’accident
grave, les services d’astreinte devront fournir une réponse rapide. Une assistance psychologique peut être
fournie immédiatement suite à l’incident et les services de soutien sont contactés de manière à ce que les
militaires soient rapidement assistés. Le CIMT fournit également une formation à la gestion des incidents
aux personnels à différents niveaux du commandement institutionnel. Il cherche à créer des organes
stratégiques au niveau des Brigades Territoriales afin de décentraliser le premier niveau d’intervention. La
planification stratégique et le suivi des opérations relève toujours de la responsabilité du CIMT.
En ce qui concerne l’intervention externe, elle se concentre principalement sur la protection civile. La
coopération entre la GNR et les autres institutions spécialisées est courante lorsque des équipes
pluridisciplinaires doivent être mises en places afin de gérer des catastrophes. Habituellement, ces
équipes travaillent en étroite collaboration avec l’Autorité Nationale de Protection Civile.
Le modèle d’intervention psychologique de la GNR a fait l’objet de nombreux débats au cours du
séminaire international promu par la GNR en juillet 2006 sur le thème : « Victimes du Terrorisme : la
réponse psychologique des forces de sécurité ». Plusieurs facteurs sous-tendent ce modèle, tels que :
- La spécificité de la GNR en tant que force de sécurité dotée d’un statut militaire ;
- Les relations entre la GNR et d’autres institutions également chargées d’intervenir sur les
accidents graves ou les catastrophes d’envergure nationale ou internationale ;
- Les différentes chronologies d’intervention en cas de catastrophe, particulièrement le premier
niveau d’intervention ;
- Les modèles d’intervention inspirés des protocoles nord-américains (Gestion du Stress en cas
d’incident critique - Critical Incident Stress Management - CISM)
- Le modèle d’intervention contextuel proposé par la « Note d’Orientation » de la Communauté
Européenne : « Soutien psychologique en cas d’urgence collective ».
La CIMT est capable d’intervenir en l’espace de 6 heures au niveau national et de 24 heures à l’étranger.
Les objectifs de l’intervention de la CIMT sont : le conseil aux commandants, l’assistance aux survivants,
l’identification et la mise en contact avec des techniciens ou services tiers afin qu’ils continuent le travail
initié par la CIMT.
Depuis le 11 septembre, les conséquences d’un attentat terroriste sont considérées de la même manière
que celles d’une catastrophe provoquée par la nature ou l’action de l’homme. L’intervention, en cas
d’attentat terroriste comme en cas de catastrophe, implique ainsi la mobilisation de moyens humains et
techniques très similaires. Les institutions chargées de la sécurité et des premiers secours ont adopté des
protocoles de coopération : les nouveaux modèles de gestion prévoient l’intervention conjointe de
plusieurs institutions, sous l’autorité d’un seul centre de commandement qui peut varier uniquement en
24
fonction de la dimension et de la typologie de l’incident. Ce paradigme, adopté par les services de sécurité
et d’urgence il y a plusieurs années13, a récemment été adapté à la réalité portugaise au travers d’un
dispositif législatif, Sistema Integrado das Operações de Protecção e Socorro14 (Système intégré
d’Interventions de Protection et d’Assistance).
La protection des victimes du terrorisme impose de nouvelles demandes aux forces de sécurité qui, dans
la plupart des situations, sont les premières à être en contact. L’action de la GNR dans ce contexte
consiste à extraire les victimes de la zone incidentée et à les acheminer vers un endroit sûr, à les protéger
des stimuli relatifs à l’incident, de toute exposition ou menace et à leur fournir le moyen de rentrer en
contact avec leurs entourages. La GNR apporte également une aide dans le cadre des affaires mortuaires
et gère l’information relative aux décès, disparitions ou les SDF. Le soutien psychologique est essentiel
dans ces situations et l’intervention de l’équipe peut être directe, au sein de la population, ou indirecte, au
travers d’une coordination d’autres équipes de psychologues.
Le modèle d’action psychologique de la GNR en cas de catastrophe démontre une nouvelle attitude
proactive, intégrée aux scénarii opérationnels et aux ressources humaines engagées. Ceci représente un
gain énorme en termes d’intervention des forces de sécurité, de protection et d’assistance aux
populations. Cela renforce l’attention croissante portée à la modernisation et à l’adaptation de la GNR aux
besoins contemporains, à la population nationale et à la communauté mondiale.
3.2. Droits des victimes et justice réparatrice
La victimologie constitue incontestablement un élément clé de tout débat autour du terrorisme et doit
toujours être prise en compte étant donné qu’elle a permis de souligner l’importance de la participation
des victimes dans le processus de réconciliation.
Si, précédemment, la priorité était de garantir les droits des victimes dans le cadre de la procédure
pénale, aujourd’hui, il est largement reconnu qu’il est également nécessaire d’améliorer la situation
sociale, relationnelle et psychologique des victimes.
Progressivement, une importance croissante a été accordée à la justice réparatrice. Bien qu’il soit reconnu
que la médiation entre la victime et l’agresseur ne doit pas être utilisée comme unique réponse à tous les
besoins et attentes des victimes de crimes, elle peut toutefois contribuer à leur rétablissement.
13 Système de Commandement en cas d’Incident – Agence Fédérale de Gestion des Urgences - Federal Emergency Management Agency, USA 14 Pour plus d’informations, consulter le site http://www.mai.gov.pt/data/pdf/siops.pdf (en portugais)
25
En 2004, Le Forum Européen des Services aux Victimes, une plate-forme regroupant 20 organismes
nationaux de soutien aux victimes, a adopté la Déclaration concernant le Statut des Victimes au cours du
Processus de Médiation, qui affirme le besoin de respecter un certain nombre de garanties au cours du
processus de médiation, un élément essentiel de la sauvegarde des droits des victimes.
Tout modèle de résolution alternative de conflit intégrant la médiation devra assurément impliquer la
privatisation de certains actes illicites, dont le système pénal et juridique était responsable. Ce qui est
présenté ici, bien au-delà d’une philosophie de réparation, est une philosophie de réconciliation, une
transaction entre l’auteur et la victime. Cela implique un rôle de l’État amoindri étant donné que l’essence
même du modèle de justice réparatrice exclut l’intervention de l’État dans le cadre d’un processus
supposé être purement informel et communautaire.
Qu’en est-il de la victime ? Il convient de considérer que les victimes n’ont pas toujours intérêt à coopérer
avec le système judiciaire traditionnel et sa nature principalement punitive. Une sentence sévère peut
apaiser la colère de la victime dans l’immédiat, mais ne favorise pas son équilibre psychologique, pourtant
essentiel à long terme. Il est également reconnu que, lorsqu’elles sont confrontées à des procureurs
judiciaires souvent dénués d’empathie, de nombreuses victimes font à nouveau l’expérience de leur
victimisation. En outre, l’expérience passée a montré que la majorité des victimes exprime une plus
grande satisfaction après avoir participé à une interaction constructive avec le délinquant qu’après lui
avoir fait face dans un tribunal.
Le processus pénal est en fait davantage orienté vers la punition du contrevenant, reléguant à un niveau
de moindre importance les effets secondaires matériels et psychologiques et les dommages infligés aux
victimes. Les études réalisées dans plusieurs pays ont démontré que les victimes tendent à considérer la
compensation comme étant la réponse la plus appropriée afin de réduire les dommages, et un grand
pourcentage d’entre elles souligne l’importance des excuses.
Ces résultats sont d’autant plus intéressants si l’on se souvient que les études génériques révèlent
habituellement une préférence marquée pour une punition sévère, telle que la peine de mort ou la prison à
perpétuité. Cependant, dans des cas concrets, ces préférences ont eut tendance a être remplacées par
des moyens de réparation ou de compensation directe. Il semblerait donc que les victimes se préoccupent
plus d’un soutien matériel et psychologique que de la punition infligée à l’agresseur.
Dans le cadre de la justice réparatrice, il est important de souligner qu’elle prévoit une conception de la
justice plus constructive et moins répressive ainsi qu’un règlement du conflit entre l’agresseur et la
victime. En permettant aux victimes de se prendre en charge et en reconnaissant ce qu’elles ont subi, la
justice réparatrice favorise de plus en plus la participation de chaque partie prenante, particulièrement la
26
victime, à la résolution du conflit. Se retrouver face à l’agresseur peut également aider la victime à mieux
gérer et combattre la peur.
La justice réparatrice exige une plus grande rationalisation et simplification du système pénal, impliquant
moins de bureaucratie et de formalités au bénéfice d’une plus grande empathie de la part du système.
Cela est également lié aux besoins de la victime et à la réévaluation de son rôle dans la gestion du conflit,
ainsi que sa disposition à accepter une compensation qui constitue, tout au moins, un moyen de produire
des effets préventifs.
Les traités internationaux ont influencé de manière positive les législations nationales afin qu’elles
intègrent les éléments suivants à leurs codes judiciaires : réparation, compensation, restitution. La
résolution 44/2002 de la Commission des Droits de l’Homme des Nations Unies stipule que « selon les
principes des droits de l’homme reconnus internationalement, les victimes de violations graves des droits
de l’homme ont le droit (…) à la restitution, la compensation et la réadaptation ». Aujourd’hui, les victimes
jouent un rôle central dans les lois pénales internationales, qui ont toujours porté une attention spécifique
au modèle de justice réparatrice. Le Statut de Rome de la Cour Pénale Internationale contient plusieurs
références au rôle des victimes et à leur droit à participer au processus et à être correctement protégées.
Il contient également une Unité des Victimes et Témoins et la reconnaissance des droits des victimes à la
réparation.
Les victimes du terrorisme ne peuvent pas être considérées exactement de la même manière que les
autres victimes : elles sont particulièrement vulnérables étant donné qu’elles sont étrangères à la cause
des terroristes. En conséquence des attentats terroristes massifs, le besoin de développer de nouveaux
systèmes de compensation pour les victimes a été reconnu (la France a déjà créé un statut spécifique
pour les victimes du terrorisme15, ainsi qu’un fond spécial de garantie).
4. LE RÔLE DES AUTORITES LOCALES DANS LA REPONSE AUX MENACES
TERRORISTES
Les villes ont constitué des cibles préférentielles pour les attentats terroristes. Après un état initial
de choc et d’incrédulité, il existe plusieurs réactions possibles à cette nouvelle menace, non
seulement à l’échelle internationale et nationale, mais également à l’échelle locale.
15 Selon la loi du 23 janvier 1990, les victimes du terrorisme en France bénéficient du statut de victime civile de guerre – pour plus d’information, consulter le site http://www.sos-attentats.org/aide-victimes-victime-civile.asp
27
La lutte contre le terrorisme doit-elle être considérée comme une affaire locale ? Comme le
rappelle Arnaud Blin, la ville de New York, par exemple, a renforcé son dispositif policier de
manière importante et est parvenue à prendre des mesures afin de se préparer à tout futur
attentat. Aux Etats-Unis, un montant important a également été alloué à des zones ne présentant
quasiment aucun risque. La population du Wyoming a, par exemple, reçu plus de budget anti-
terroriste par personne que la ville de New York.
Selon Arnaud Blin ainsi que d’autres participants au séminaire, une plus grande implication des
villes contribuerait à réduire le fardeau du gouvernement. Les initiatives locales peuvent varier
d’un pays à l’autre. Il est absolument nécessaire de construire des passerelles entre les villes et
qu’elles partagent leurs expériences et leurs techniques. Il faut se souvenir des leçons tirées car
ce qui a bien fonctionné dans une ville peut ne pas être la meilleure solution pour une autre ville.
Toutefois, il est important de comprendre si les municipalités se considèrent comme ayant un rôle
à jouer dans la lutte contre le terrorisme. Si tel est le cas, quelles mesures mettent-elles en place
ou pensent-elles qu’elles devraient mettre en place ? Les commentaires et réponses à ces
questions sont tirés des présentations des représentants des municipalités de Loures (António
Baldo), Matosinhos (António Salagado Rosa), Oeiras (Ivna Machado et Carla Castro) et Sintra
(Luís Carvalho da Silva).
4.1. Le rôle des autorités locales dans la prévention et la gestion d’un incident majeur
Au Portugal, la loi n° 169/99 du 18 septembre définit les compétences des municipalités
portugaises et établit le régime juridique de leurs organes et des communes. Certaines des
responsabilités des municipalités sont comparables à celles d’une police administrative. L’une de
leurs compétences consiste à décider de créer, ou non, un service de police municipale et le
Conseil de Sécurité municipal. En outre, chaque maire est responsable, en étroite collaboration
avec l’Autorité Nationale de Protection Civile, du service municipal de protection civile, en tenant
compte de la nécessaire conformité aux plans et programmes précédemment établis et de la
nécessaire coordination des interventions avec la protection civile (c’est à dire, les opérations
d’assistance, particulièrement en cas de catastrophes ou de calamités).
28
Selon António Salgado Rosa, bien que le pays ne dispose pas d’une expérience directe de la
gestion de la menace terroriste, aucun État ne peut se sentir à l’abri de la menace du terrorisme
radical. Ainsi, chacun doit être conscient du phénomène pouvant être lié à la délinquance et au
recrutement de potentiels membres de groupes terroristes. Plusieurs facteurs doivent être pris en
compte afin d’analyser la possibilité d’une menace terroriste au Portugal. D’une part, le pays lui-
même ne constitue pas une cible attrayante. Étant donné sa situation périphérique, il ne dispose
pas d’une grande influence dans le cadre des stratégies et décisions mondiales. En outre, la
communauté musulmane portugaise (y compris la seconde génération) est très intégrée à la
société portugaise. Cependant, le Portugal a été le partenaire de décisions importantes relatives
à la stratégie mondiale, comme lors du sommet des Açores et de la décision d’envoyer des
troupes en Iraq et en Afghanistan. Des individus liés à des mouvements radicaux ont été
remarqués dans le pays et d’autres individus sont détenus justement pour cette raison dans
d’autres pays. Globalement, il existe un programme de nature idéologique qui vise à l’instauration
d’un Califat Islamique, dont la Péninsule Ibérique fait partie. Les autorités portugaises, face à
cette réalité, doivent rester vigilantes et prêtes à intervenir si nécessaire.
La lutte contre le terrorisme doit impliquer le recours à des moyens policiers, c’est à dire la
collecte de renseignements et le traitement spécialisé de ceux-ci, ainsi qu’à l’étude d’indicateurs
minimes, de personnes, de groupes et de moyens financiers suspicieux, ainsi que des
« entreprises fantômes ». Cependant, le rôle des communautés locales est grandissant en
termes de prévention et de gestion d’incidents majeurs. En fait, ce sont les villes qui absorbent
une grande majorité des populations immigrantes. C’est également dans les villes que le
phénomène de délinquance est le plus ressenti (la pauvreté est d’autant plus tangible qu’elle
côtoie les charmes de la richesse et de la consommation). La ville devient alors un terreau pour
le recrutement de jeunes, certains d’entre eux étant disposés à adhérer à de nouvelles cultures
idéologiques de contestation en raison de frustrations collectives et personnelles.
Étant donné que le recrutement est facilité par la concentration de jeunes au chômage vivant
dans des bidonvilles, détachés de leur environnement, les villes dans lesquelles ils vivent doivent
promouvoir des programmes visant au suivi et à l’intégration des populations immigrantes et de
leurs descendances. La gestion des espaces publics à l’aide de réseaux de caméras en circuit
fermé constitue également une prévention. En outre, la création de Conseils Municipaux de
Sécurité et l’intégration dans ces conseils de membres de différentes communautés et de
minorités ethniques peut constituer un moyen efficace permettant de comprendre leurs
29
problèmes et d’encourager les membres à participer plus activement. Il est également important
de préparer soigneusement des plans d’urgence et d’intervention relatifs aux écoles, entreprises,
réseaux d’approvisionnement en eau et solutions alternatives de transports et de demander la
participation au système de planification des institutions publiques de l’administration centrale.16.
Toutefois, il reste souhaitable que les autorités locales puissent gérer efficacement les moyens
qui sont mis à leur disposition afin de garantir la sécurité. Une collaboration étroite doit avoir lieu
entre les polices municipales et les services de protection civile municipaux. Comme le dit
António Baldo, plus les polices municipales sont impliquées dans ce dispositif, plus les forces de
sécurité au niveau national17 seront disponibles pour mener des enquêtes criminelles et lutter
contre le terrorisme.
Les autorités locales de Matosinhos, étant donné l’importance stratégique et économique de la
ville, considèrent celle-ci comme une cible potentielle du terrorisme international. Elle dispose du
port le plus important au nord du pays (deuxième port au niveau national). Le port peut constituer
un éventuel point d’entrée pour des individus liés à des groupes extrémistes, ce qui est difficile à
contrôler étant donné qu’il permet un accès simple à des flux de personnes et de marchandises.
Matosinhos compte plusieurs industries liées au pétrole et revêtant une importance vitale et
stratégique. Elle dispose du deuxième aéroport portugais en termes d’importance et comprend
un pôle urbain de dimension significative (la zone métropolitaine d’Oporto), situé aux confluents
des accès à Oporto et au sud du pays, ce qui en fait une cible potentielle d’attentat terroriste.
Sur la base de ces faits, la municipalité a adopté plusieurs mesures :
- La minimisation des impacts d’un tel acte au travers de la caractérisation du risque, de la
création de plans d’urgence prévoyant les situations à haut risques et, surtout, la
planification des interventions appropriées en cas d’urgence. Le rôle de chaque
intervenant a été correctement défini et chaque phase de l’urgence prévue, depuis
l’intervention immédiate jusqu’à l’assistance aux victimes après l’accident ;
16 Les représentants des municipalités ont validé l’adoption de ces mesures. 17 Seules 33 des 308 municipalités portugaises disposent d’une police municipale. En ce qui concerne les forces de police au niveau national : la PSP : Police de Sécurité Publique (Polícia de Segurança Pública), intervient dans les zones urbaines de plus de 20 000 habitants ; la GNR: Garde Nationale Républicaine (Guarda Nacional Republicana), intervient dans les zones rurales comme la gendarmerie, avec des domaines spécifiques17; et la PJ : Police Judiciaire (Polícia Judiciária), est responsable des interventions préventives et d’enquêtes en collaboration avec les autorités judiciaires.
30
- L’organisation de réunions régulières avec des entités publiques et privées participant à
l’élaboration des plans d’urgence et à leur mise en œuvre ;
- Dans un avenir proche, tenir les citoyens au courant des mesures à prendre en cas
d’attentat ;
- La création d’un Conseil Municipal de la Sécurité intégrant les personnes responsables
au sein des institutions locales, écoles, diverses associations (comprenant des
employeurs et des salariés) et les ONG intervenant dans le domaine social ;
- D’autres mesures visant à minimiser les effets de l’exclusion sociale, telles que : des
programmes pour la jeunesse (pour occuper les temps libres), la réimplantation des
personnes déplacées et éviter les grandes concentrations de quartiers de personnes
réimplantées ;
- La municipalité examine toutefois tous les plans d’urgence relatifs aux infrastructures
publiques et participe à l’élaboration des plans des entreprises et institutions privées. Elle
envisage également de promouvoir des exercices de simulation de crise afin de garantir
que les ressources appropriées sont mises en place afin de faire face à toute situation
réelle.
En ce qui concerne la municipalité d’Oeiras, elle a pris des mesures visant à délocaliser les
populations pauvres, ce qui est considéré comme un processus de changement, une occasion de
valoriser les individus et les familles de manière à les encourager à participer à la reconstruction
des identités et de la citoyenneté. La sécurité urbaine doit être considérée, dans les villes,
comme un processus participatif, au cours duquel les institutions communautaires se dotent de
ressources permettant d’améliorer la qualité de vie de la population, dans le but de consolider
des normes de conduite et des valeurs, d’optimiser la socialisation des jeunes, de mobiliser des
moyens de combattre la pauvreté et le déficit social et économique et de renforcer la cohésion
sociale. La réduction des stigmates sociaux que peuvent générer certaines zones résidentielles
est également un aspect important.
La sécurité a constitué une préoccupation constante pour la municipalité de Sintra. Les fonctions
allouées aux services de police municipale comprennent plusieurs aspects de la vie publique : la
médiation lors de conflits, l’assistance en cas d’urgence sociale et sanitaire, la résolution des
crises de circulation urbaine, la mise en œuvre de normes administratives municipales, la
coopération avec les forces de sécurité pour la protection des communautés locales, la protection
des bâtiments municipaux etc. A Sintra, il est nécessaire d’élaborer un document stratégique
31
pouvant être utilisé comme directive par les services municipaux, ou autres, intervenant dans les
domaines de la sécurité et de la prévention, et pour lequel il est possible de faire des suggestions
afin de mettre en œuvre un Plan Municipal de Sécurité Intérieure pour la municipalité.
CONCLUSION Il n’y a pas eu de consensus permettant de dire si le terrorisme tel que nous le connaissons est
un phénomène nouveau. Ceux qui sont de cet avis soulignent que l’objectif des terroristes est de
produire au maximum la terreur au travers du plus grand nombre possible de décès. Les
terroristes sont également disposés à sacrifier leurs vies, et les frontières entre la sécurité
intérieure et extérieure ont disparu étant donné que le critère habituellement utilisé pour les
définir ne peut être utilisé pour les attentats terroristes. D’autres considèrent que le terrorisme
d’aujourd’hui (les groupes terroristes, leurs techniques et le fait qu’ils prennent pour cible des
villes) comporte des similitudes avec les formes de terrorisme utilisées au cours des siècles
derniers.
La lutte contre le terrorisme doit intégrer des vecteurs stratégiques. Tout d’abord, un effort
continu et permanent doit être fourni afin de maintenir la sécurité au sein des sociétés, en
utilisant les instruments policiers et judiciaires, les services de renseignements, les
communications et, en dernier recours, les forces armées.
Deuxièmement, il est nécessaire de minimiser / d’abolir les conditions politiques, économiques et
sociales qui favorisent l’émergence du terrorisme (soutien gouvernemental et au développement,
entre autres).
L’une des préoccupations fréquemment exprimées au cours du séminaire est le besoin
d’équilibre entre la sécurité et les droits de l’homme fondamentaux étant donné que, si les
menaces augmentent, la tendance à renoncer aux principes fondamentaux au nom de la sécurité
peut émerger, ce qui pourrait gravement nuire aux libertés civiles et donner lieu au totalitarisme.
La lutte contre le terrorisme ne doit donc pas devenir, pour les sociétés, un prétexte à la remise
en cause de leurs structures démocratiques. Un combat idéologique est ainsi nécessaire afin de
démontrer les avantages du respect des droits de l’homme comme outil essentiel au bien-être de
la société dans son ensemble.
32
La prévention est généralement considérée comme un aspect fondamental de la lutte contre le
terrorisme. Il a été souligné que la prévention de la criminalité en général peut constituer une
leçon de gestion du terrorisme étant donné que le terrorisme et la criminalité ordinaire partagent
des terreaux communs et la notion de désaffection. Au-delà du recours au système judiciaire et
aux forces de sécurité, un effort doit être fourni afin d’utiliser les outils psychologiques et
sociologiques dans la prévention du terrorisme. Les autres sujets abordés comprenaient la
laïcité, le développement de politiques à l’échelle sociale, politique, économique et pédagogique
afin de contribuer à la réduction des situations de discrimination et de désaffection des
communautés ainsi qu’à la mobilisation des membres de communautés spécifiques et
concernées (par exemple, les musulmans), et enfin le besoin de s’appuyer de plus en plus sur la
participation des femmes au processus de prévention dans sa globalité.
En outre, il a été souligné qu’il est fondamental de comprendre que le processus de conversion
en terroriste est long et complexe, impliquant un dévouement, un engagement, une implication et
une déshumanisation de la cible, processus qui doit également être considéré comme une forme
de responsabilisation. Enfin, les auteurs d’attentats suicide ne sont pas les seuls terroristes. Il
existe d’autres modes de participation (par exemple, la logistique, l’information, la planification) et
il faut se souvenir que de nombreuses personnes, bien qu’elles ne soient pas directement
impliquées dans les actes/attentats terroristes, partagent certaines des opinions, causes et points
de vues des terroristes.
L’une des principales conclusions du débat sur la Gestion de Crise et l’Intervention d’Urgence a
été le besoin de coopération transnationale dans le cadre des interventions lors de situations de
crise. Le Mécanisme Communautaire pour la Protection Civile, adopté par le Conseil de l’Union
Européenne le 23 octobre 2001 était considéré comme un instrument approprié afin de réaliser la
coopération entre les états membres de l’Union Européenne dans ce domaine. La promotion
d’actions conjointes de formation entre les différents services intervenants était également
considérée comme essentielle.
En ce qui concerne les procédures à adopter dans le cas d’un attentat terroriste tel que celui de
Madrid, certains aspects ont été considérés comme fondamentaux afin d’améliorer l’efficacité de
l’intervention : l’utilité de pouvoir s’appuyer sur des procédures d’intervention et une coordination
entre les services impliqués dans l’intervention ; une communication d’urgence sûre et
33
compatible entre les services et l’existence d’un unique centre de commandement garantissant
une gestion globale de la crise à tous les niveaux et dans tous les domaines d’intervention.
En ce qui concerne la gestion de crise dans le cadre des menaces terroristes, l’Autorité Nationale
de Protection Civile portugaise peut coopérer en phase de prévention grâce à une information
appropriée du public, de la formation et une sensibilisation adéquate des cibles potentielles.
Cette Autorité peut également contribuer à améliorer l’organisation, la complémentarité et la
coordination du plan d’urgence.
L’existence de victimes est l’une des conséquences les plus importantes des attentats terroristes.
Aujourd’hui, il est reconnu comme absolument nécessaire de respecter les droits des victimes au
cours des processus judiciaires afin d’améliorer leurs situations sociales, relationnelles et
psychologiques. La justice réparatrice peut jouer un rôle important étant donné qu’elle est fondée
sur des concepts tels que la médiation et l’aspect informel et peut contribuer au rétablissement
des victimes. Ce modèle de justice est de plus en plus présent dans le cadre des lois pénales
internationales où les victimes occupent une place centrale.
En conséquence d’attentats terroristes massifs, et en tenant compte que les victimes du
terrorisme sont particulièrement vulnérables, certains pays créent de nouveaux systèmes de
compensation (par exemple, un statut spécial et un fonds de garantie en France).
Au Portugal, la GNR est l’une des forces de sécurité chargée d’assister les victimes au travers de
son Équipe de Gestion des Incidents Critiques (CIMT). Ses actions se concentrent sur le soutien
psychologique (assistance psychologique, mise à disposition de moyens leur permettant de
contacter leur entourage, aide dans le cadre des affaires mortuaires ainsi que gestion des
informations relatives aux personnes décédées, disparues etc.)
Habituellement, la CIMT coopère avec des spécialistes d’autres institutions et avec l’Autorité
Nationale de Protection Civile, formant ainsi une équipe pluridisciplinaire chargée de gérer les
catastrophes. Elle peut intervenir directement, au sein des populations, ou indirectement, en
gérant d’autres équipes.
La CIMT a la capacité d’intervenir sur un incident en l’espace de six heures maximum sur le
territoire national et de 24 heures à l’étranger. Depuis le 11 septembre, les conséquences d’un
34
attentat terroriste sont considérées de la même manière que les conséquences de n’importe
quelle catastrophe. De nouveaux modèles de gestion, adoptés il y a des années par plusieurs
pays et prévoyant une intervention conjointe avec un unique centre de commandement, ont été
adaptés à la réalité portugaise au travers d’un dispositif législatif.
Le Portugal n’a pas d’expérience directe en matière de gestion d’attentats terroristes. Bien que la
lutte contre le terrorisme implique le recours à des moyens policiers afin de collecter et de traiter
les renseignements, le rôle des autorités locales est de plus en plus important en termes de
prévention et de gestion d’un incident majeur si un tel incident devait se produire. Certaines des
mesures qui devraient être adoptées par les autorités locales comprennent l’intégration des
immigrants / l’occupation des temps libres des jeunes ; la gestion des espaces publics à l’aide de
caméras en circuit fermé ; la création de Conseils Municipaux de la Sécurité et l’intégration, au
sein de ceux-ci, de membres des communautés et des minorités ethniques, la préparation de
plans d’urgence relatifs aux problématiques d’approvisionnement en aux et de systèmes
alternatifs de transport, parmi d’autres ; et enfin la promotion de simulations de situations de
catastrophes.
BIBLIOGRAPHIE : Conférences au cours du séminaire : BALDO, António, « Les villes et le Phénomène du Terrorisme », Directeur du Personnel de la Municipalité de Loures BLIN, Arnaud, « La démocratie, l’urbanisation et le terrorisme – ce que peut nous dire l’Histoire », Directeur de Projet de la Fondation Charles- Léopold Mayer (Paris), Chercheur à l’IFAS – Institut Français d’Analyse Stratégique et ex-directeur du Centre International de Recherche Beaumarchais (Washington). DUEÑAS, Carlos, « L’intervention de la Protection Civile dans le cadre des attentas de Madrid », Direction de la Protection Civile espagnole. GOMES, Paulo, « Menaces et risques lors d’événements internationaux majeurs », Commissaire de la Polícia de Segurança Pública (Police de Sécurité Publique) et vice secrétaire général du Bureau de la Coordination de la Sécurité. MACHADO, Ivna e CASTRO, Carla, « Logement, Relogement et Unité Sociale », Division de la Gestion Sociale, Municipalité d’Oeiras PAIS, Elza, « Les femmes et le Terrorisme : le rôle des femmes dans la résolution de conflits : la perspective sexospécifique » , Présidente de la Commission pour l’Egalité et les Droits des Femmes. RIBEIRO, Manuel João, « Le Service National de Protection Civile et la Gestion de Crise », vice-président du Service National de Protection Civile et des Pompiers.
35
RODRIGUES, Anabela, « Le droit des victimes et la justice réparatrice – une relation complexe », Professeur à la Faculté de Droit de l‘Universidade de Coimbra et Directeur du Centre d’Etudes Judiciaires du Ministère de la Justice. ROSA, António Salgado, « Matosinhos : caractérisation et évaluation des risques », chef de la police, Directeur du service de Sécurité et de Protection Civile – Municipalité de Matosinhos SALOMON, Jean Claude, « Comprendre l’esprit d’un terroriste », Chercheur en Criminologie ; ex professeur à l’Institut National d’Hautes Études de Sécurité (Paris) ; Professeur Associé de l’Université d’Etat de Houston. SANTOS, José Alberto Loureiro dos, « Les forces armées dans la lutte contre le terrorisme », Général et ancien Chef de l’Armée. SHAFTOE, Henry, « Le terrorisme : prévention plutôt que réaction », Professeur à la West of England University SILVA, Frederico Galvão da (Capitaine de la Garde Nationale Républicaine) et BRITO, Bruno (Psychologue de la Garde Nationale Républicaine), « Victimes du terrorisme : l’intervention psychologique des forces de sécurité ». SILVA, Luís Carvalho da, « Panorama stratégique de la sécurité depuis la perspective municipale », Commandant de la Police Municpale de Sintra – Municipalité de Sintra.
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ANNEXES
ANNEXE 1:
DOCUMENTS DE RÉFÉRENCE ET LIENS WEB :
- Lei de Bases da Protecção Civil - Lei nº 27/2006, 03 de Julho (Loi sur la Protection Civile - Loi
27/2006, du 3 juillet)
- Résolution 44/2002 de la Commission des Droits de l’Homme des Nations Unies
- Stratégie nationale de lutte anti-terrorisme des USA – voir le Rapport sur la Stratégie de Sécurité
Nationale - www.globalsecurity.org/military/library/policy/national/nss-020920.pdf
- Résolution 1325 des Nations Unies pour les Femmes, la Paix et la Sécurité (adoptée en 2000) -
www.peacewomen.org/un/sc/1325.html
- Mécanisme Communautaire de Protection Civile (adopté par le Conseil de l’Union Européenne le
23 octobre 2001) - http://ec.europa.eu/environment/civil/prote/mechanism.htm
- Déclaration sur le Statut de Victime au cours du processus de médiation (adoptée par le Forum
Européen pour les Services aux Victimes en in 2004) – page web du Forum Européen -
www.euvictimservices.org/index.asp
- Statut de Rome du Tribunal Pénal International – www.icc-
cpi.int/library/about/officialjournal/Rome_Statute_120704-EN.pdf
- Note d’Orientation Européenne sur le « Soutien Psychologique en cas d’Urgence Collective »–
http://ec.europa.eu/environment/civil/pdfdocs/cpact03h-en.pdf
- Sistema Integrado das Operações de Protecção e Socorro (Système intégré de Protection et de
Premiers Secours) - http://www.mai.gov.pt/data/pdf/siops.pdf (en portugais)
37
- Loi nº 169/99 du 18 septembre établissant les compétences des municipalités et des communes
civiles http://www.cga.pt/Legislacao/Lei_19990918169.pdf (en portugais)
- Stratégie et Plan d’Action Contre le Terrorisme (EU)
http://register.consilium.eu.int/pdf/en/05/st14/st14469-re04.en05.pdf
- Observatoire Permanent International sur la Sécurité au cours d’événements majeurs
- http://www.unicri-ipo.org
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Séminaire International « Villes et Terrorisme : la réduction des
risques et la gestion de crise »
Centro de Informação Urbana de Lisboa – Picoas Plaza, Lisbonne, Portugal 26-27 octobre 2006
Coordination scientifique : Nelson Lourenço (Recteur de l’Universidade Atlântica/ Professeur Titulaire de l’Universidade Nova de
Lisboa)
26 octobre 2006 09h00 – 09h30 Séance d’ouverture
Guilherme Manuel Lopes Pinto – Forum Portugais pour la Prévention et la Sécurité Urbaine Nelson Lourenço – Universidade Nova de Lisboa/Universidade Atlântica Marina Ferreira – Conseillère Municipale de la Municipalité de Lisbonne Fernando Rocha Andrade – Sous-secrétaire d’État à l’Intérieur
09h30 – 09h45 Présentation du projet « Villes contre le Terrorisme »
Fredéric Esposito – Université de Genève et Forum Européen pour la Sécurité Urbaine Justyna Kulach – Forum Européen pour la Sécurité Urbaine
09h45 – 11h30 Démocratie, urbanisation et terrorisme : ce que l’Histoire
peut nous apprendre - Arnaud Blin – Directeur de projet de la Fondation Charles- Léopold Mayer (Paris), Chercheur à l’IFAS – Institut Français d’Analyse Stratégique et vice Directeur du Centre International de Recherche Beaumarchais (Washington)
Les forces armées dans la lutte contre le terrorisme
- José Alberto Loureiro dos Santos – Général et vice Chef de l’Armée
Rapporteur : Leonardo Mathias - Ambassadeur
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11h30 – 11h45 Pause café 11h45 – 13h15 Terrorisme : prévention plutôt que réaction
- Henry Shaftoe - Professeur à la West of England University (Bristol)
Comprendre l’esprit d’un terroriste
Jean Claude Salomon – Chercheur en Criminologie ; ex Professeur à l’Institut National des Hautes Études de Sécurité (Paris) ; Professeur Associé de l’Université d’État de Houston
Rapporteur : Vasco Rato – Professeur à l’Universidade Atlântica 13h15 – 14h45 Déjeuner 14h45 – 16h30 Gestion de crise et intervention d’urgence
- Carlos Dueñas – Direction Générale de la Protection Civile Espagnole Le Service National de Protection Civile et la Gestion de Crise
- Manuel João Ribeiro – Vice-président du Service National de Protection Civile et des Pompiers
Rapporteur : José Luís Pinto Ramalho – Général, directeur de
l’Instituto de Estudos Superiores Militares 16h30 – 16h5 Pause café
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16h45 – 18h30 Les Droits des Victimes et la Justice Réparatrice – une
relation complexe
- Anabela Rodrigues – Professeur à la Faculté de Droit de l’Universidade de Coimbra et Directeur du Centre d’Études Judiciaires du Ministère de la Justice Les femmes et le terrorisme : le rôle des femmes dans la résolution de Conflit : une perspective sexospécifique
- Elza Pais – Présidente de la Commission pour l’Égalité et les Droits des Femmes
Rapporteur : Manuel Lisboa – Directeur de SociNova/Professeur
à la Faculdade de Ciências Sociais e Humanas/Universidade
Nova de Lisboa 27 octobre 2006 09h30 – 11h00 Le rôle des municipalités dans la lutte contre le terrorisme
Forum portugais pour la Prévention et la Sécurité Urbaine António Salgado Rosa – Municipalité de Matosinhos Ivna Machado – Municipalité d’Oeiras Carla Castro – Municipalité d’Oeiras António Baldo – Municipalité de Loures Luís Carvalho da Silva – Municipalité de Sintra
Rapporteur : Luís Baptista – Professeur, Vice-Directeur de la
Faculdade de Ciências Sociais e Humanas/Universidade Nova de
Lisboa 11h00 – 11h30 Pause café 11h30 – 13h00 Menaces et risques lors des événements internationaux
majeurs
Paulo Gomes – Commissaire de la Police de Sécurité Publique of (Polícia de Segurança Pública) et Vice-secrétaire Général du Bureau de Coordination de la Sécurité
Rapporteur : Juan Mozzicafredo – Professeur à l’Instituto
Superior de Ciências do Trabalho e da Empresa
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13h00 – 14h30 Déjeuner 14h30 – 16h00 Victimes du terrorisme : la réponse psychologique des forces
de sécurité
Frederico Galvão da Silva – Capitaine de la GNR – Garde Nationale Républicaine Bruno Brito – Psychologue de la GNR – Garde Nationale Républicaine Rapporteur : João Lázaro – Associação Portuguesa de Apoio à
Vítima/ Association portugaise pour le soutien aux victimes 16h00 – 16h30 Pause café 16h30 – 18h00 Tribune : « Les villes et le Terrorisme »
(Discussion relative aux résultats : débat entre les orateurs et les autres participants) Rapporteur : Nelson Lourenço – Professeur à l’Universidade
Nova de Lisboa/Recteur de l’Universidade Atlântica
18h00 – 18h30 Séance de clôture présidée par le Ministre de la Défense - Nuno
Severiano Teixeira 18h30 – 19h15 Cocktail