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Colpocystogramme : technique et résultats M Zafiropulo A Kujas R é s u m é. Le colpocystogramme est une exploration radiologique dynamique des viscères pelvipérinéaux et du plancher pelvien, montrant les étroites connexions entre le bas appareil urinaire, le vagin et l’ampoule rectale sous l’effet dynamique de la contraction des releveurs et de la poussée abdominale. Cet examen est parfaitement reproductible, non lié à l’opérateur et peu invasif pour les patientes. Comparé à d’autres techniques, telles que l’échographie ou la résonance magnétique nucléaire, le colpocystogramme visualise les changements de position des organes sous l’action des muscles du périnée et des muscles abdominaux, en station debout. En bilan préopératoire, il permet de ne passer à côté d’aucun élément masqué ou atténué et de traiter la statique pelvienne dans son ensemble. On peut ainsi mettre en évidence des ptoses verticales des viscères, de diagnostic clinique parfois difficile, et préciser au mieux les prolapsus postérieurs (rectocèles et élytrocèles.) Mais son indication principale actuelle reste les échecs et les récidives postchirurgicales ; il permet de poser l’indication d’une reprise chirurgicale, d’en prévoir la voie d’abord et la technique à employer. Introduction Mis au point en France en 1963 par Bethoux, le colpocystogramme (CCG) est une exploration radiologique dynamique, qui visualise en même temps : le bas appareil urinaire, le vagin et l’ampoule rectale, montrant leurs évolutions entre deux contractions musculaires opposées que sont : la retenue, contraction des releveurs, la poussée, contraction des abdominaux. Cet examen est extrêmement bien toléré en raison de la petite quantité de produit de contraste utilisée (50 mL dans la vessie et l’ampoule rectale). Il montre avec une grande évidence la solidarité du combiné viscéral dans ses déplacements dynamiques tant physiologiques que pathologiques. Il permet ainsi de faire un bilan anatomique complet, véritable « carte de géographie » personnalisée, pouvant être jointe au dossier de la patiente. Les indications essentielles de cette exploration radiologique sont les prolapsus génito-urinaires et les troubles fonctionnels qui en découlent. Marilyne Zafiropulo : Attachée consultant des hôpitaux de Paris, assistante du service de chirurgie viscérale et gynécologique du Dr Richard Villet. Albert Kujas : Chef du service de radiologie. Hôpital des Diaconesses, 18, rue du Sergent-Bauchat, 75571 Paris cedex 12, France. Toute référence à cet article doit porter la mention : Zafiropulo M, Kujas A. Colpocystogramme : technique et résultats. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Radiodiagnostic – Urologie-Gynécologie, 34-625-A-10, 1998, 6 p Technique Matériel et produits Cet examen, ni traumatisant ni douloureux pour la patiente, ne nécessite qu’un matériel d’usage courant. Il est de réalisation facile et rapide dans tout centre de radiologie. Une prescription est adressée à la patiente qui doit se présenter avec : – flacons de Télébrixt 30 Méglumine (30 mL) ; – tube de Microtrastt 150 ou de Baryxinet crème ; – seringues-cathéter (60 mL) à embout conique. Instrumentation : – un spéculum de Collin ; – une pince longuette ; – une sonde vésicale ; – une seringue remplie de 60 mL de Télébrixt ; – une seringue remplie de Microtrastt ; – une cupule contenant un mélange pâteux : Microtrastt et sulfate de baryum ; – une seringue de 5 mL remplie d’une crème fluide décontaminée de sulfate de baryum. La crème fluide servant à opacifier l’urètre et le canal anal est préparée par le centre de radiologie à partir d’une poudre de sulfate de baryum décontaminée, mélangée à de l’eau distillée. Pour l’opacification vaginale, le Microtrastt peut être rendu plus épais par l’adjonction de cette poudre. L’examen comprend trois temps. 34-625-A-10 ENCYCLOPÉDIE MÉDICO-CHIRURGICALE 34-625-A-10 © Elsevier, Paris

Colpocystogramme technique et résultats

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Page 1: Colpocystogramme   technique et résultats

Colpocystogramme : techniqueet résultats

M ZafiropuloA Kujas

R é s u m é. – Le colpocystogramme est une exploration radiologique dynamiquedes viscères pelvipérinéaux et du plancher pelvien, montrant les étroites connexionsentre le bas appareil urinaire, le vagin et l’ampoule rectale sous l’effet dynamique dela contraction des releveurs et de la poussée abdominale.Cet examen est parfaitement reproductible, non lié à l’opérateur et peu invasif pourles patientes.Comparé à d’autres techniques, telles que l’échographie ou la résonance magnétiquenucléaire, le colpocystogramme visualise les changements de position des organessous l’action des muscles du périnée et des muscles abdominaux, en station debout.En bilan préopératoire, il permet de ne passer à côté d’aucun élément masqué ouatténué et de traiter la statique pelvienne dans son ensemble. On peut ainsi mettre enévidence des ptoses verticales des viscères, de diagnostic clinique parfois difficile, etpréciser au mieux les prolapsus postérieurs (rectocèles et élytrocèles.)Mais son indication principale actuelle reste les échecs et les récidivespostchirurgicales ; il permet de poser l’indication d’une reprise chirurgicale, d’enprévoir la voie d’abord et la technique à employer.

Introduction

Mis au point en France en 1963 par Bethoux, le colpocystogramme(CCG) est une exploration radiologique dynamique, qui visualise enmême temps : le bas appareil urinaire, le vagin et l’ampoule rectale,montrant leurs évolutions entre deux contractions musculaires opposéesque sont : la retenue, contraction des releveurs, la poussée, contractiondes abdominaux.

Cet examen est extrêmement bien toléré en raison de la petite quantitéde produit de contraste utilisée (50 mL dans la vessie et l’ampoulerectale).

Il montre avec une grande évidence la solidarité du combiné viscéraldans ses déplacements dynamiques tant physiologiques quepathologiques. Il permet ainsi de faire un bilan anatomique complet,véritable « carte de géographie » personnalisée, pouvant être jointe audossier de la patiente.

Les indications essentielles de cette exploration radiologique sont lesprolapsus génito-urinaires et les troubles fonctionnels qui en découlent.

Marilyne Zafiropulo : Attachée consultant des hôpitaux de Paris, assistante du servicede chirurgie viscérale et gynécologique du Dr Richard Villet.Albert Kujas : Chef du service de radiologie.Hôpital des Diaconesses, 18, rue du Sergent-Bauchat, 75571 Paris cedex 12, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Zafiropulo M, Kujas A.Colpocystogramme : technique et résultats. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris),Radiodiagnostic – Urologie-Gynécologie, 34-625-A-10, 1998, 6 p

Technique

Matériel et produits

Cet examen, ni traumatisant ni douloureux pour la patiente, ne nécessitequ’un matériel d’usage courant. Il est de réalisation facile et rapide danstout centre de radiologie.Une prescription est adressée à la patiente qui doit se présenter avec :– flacons de Télébrixt 30 Méglumine (30 mL) ;– tube de Microtrastt 150 ou de Baryxinet crème ;– seringues-cathéter (60 mL) à embout conique.Instrumentation :– un spéculum de Collin ;– une pince longuette ;– une sonde vésicale ;– une seringue remplie de 60 mL de Télébrixt ;– une seringue remplie de Microtrastt ;– une cupule contenant un mélange pâteux : Microtrastt et sulfate debaryum ;– une seringue de 5 mL remplie d’une crème fluide décontaminée desulfate de baryum.La crème fluide servant à opacifier l’urètre et le canal anal est préparéepar le centre de radiologie à partir d’une poudre de sulfate de baryumdécontaminée, mélangée à de l’eau distillée. Pour l’opacificationvaginale, le Microtrastt peut être rendu plus épais par l’adjonction decette poudre.L’examen comprend trois temps.

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Temps de l’opacification viscérale

Pratiqué par un radiologue ou un gynécologue, ce temps estextrêmement rapide, facile et indolore pour la patiente qui est placée enposition gynécologique sur la table de radiologie horizontalisée. Lesprincipes de l’hystérographie sont appliqués à cet examen qui doit êtrepratiqué en dehors des règles, en l’absence de grossesse et d’infectiongénitale ou urinaire.– Sondage vésical avec évacuation d’un éventuel résidu, puis injectionde 50 mL d’un produit de contraste hydrosoluble dans la vessie.– Mise en place du spéculum et badigeonnage des parois vaginales, desculs-de-sac cervicovaginaux et du pont anovulvaire avec le mélangepâteux de Microtrastt et de sulfate de baryum.– Injection de 50 mL de Microtrastt dans l’ampoule rectale.– Opacification de l’urètre d’abord, puis du canal anal avec les 5 mL decrème décontaminée au sulfate de baryum. On notera que l’embout dela petite seringue est placé directement au niveau du méat urétral, puisde l’anus. Nous rappelons que cette injection directe de crème fluidestérile dans l’urètre est la seule technique permettant de voir l’urètre surtout son trajet, sans aucun artefact de comportement (comme leprovoquaient les chaînettes ou repères métalliques), pouvantdiagnostiquer des anomalies telles que rétrécissement, diverticule etmême fistule, en dehors bien sûr de la miction.

Techniques d’imagerie

La patiente préparée est placée en position debout, de profil. Le centragese fait sur les grands trochanters ; il faut englober dans le champ lasymphyse pubienne et le coccyx. Les têtes fémorales doivent êtresuperposées. On utilise la haute tension (110 à 120 kV), ce qui permetdes temps de pose courts avec un débit d’environ 200 à 250 mA et unedistance focale classique de 110 cm. Il peut être utile d’interposer dansle faisceau de rayons X un filtre d’aluminium afin de rendre lescontrastes plus homogènes.En fonction de l’appareillage dont on dispose, les informations serontrecueillies soit classiquement, en technique conventionnelle sur desfilms de format 30× 40 cm, soit en technique numérisée ; celle-ci permetune présentation plus aisée des documents et également un traitementultérieur, notamment pour parfaire le contraste de l’image. La partiemanipulation proprement dite est considérablement améliorée par cettedernière technique (absence de cassette, saisie instantanée de l’imagevisualisée sur l’écran de scopie). Enfin, un couplage magnétoscopiqueest réalisable pour une étude cinétique des composants pelviens enstation debout.Deux clichés sont pris successivement, l’un en retenue maximale(contraction des releveurs, on demande à la patiente de « serrer lesfesses »), l’autre en poussée maximale (relâchement des releveurs etcontraction abdominale, pour évacuer le lavement rectal).

Temps de la construction du diagramme

Le diagramme est réalisé en décalquant sur un papier transparent lescontours du cadre osseux pelvien : symphyse pubienne, sacrum etcoccyx, puis les contours des viscères en retenue et en poussée, avec descolorations différentes pour chaque organe et chaque position.Ce diagramme, non obligatoire pour l’interprétation, constituenéanmoins une véritable « carte de géographie » personnalisée, pouvantêtre jointe au dossier de la patiente.

Interprétation et résultats normaux

La réalisation de cet examen chez des volontaires indemnes a permis dedéfinir une cinétique physiologique des viscères pelviens.

Étude synthétique : rapports viscéraux

Étroitement solidaires dans leurs déplacements, vessie, col utérin, moitiésupérieure du vagin et ampoule rectale constituent un véritable« combiné viscéral » (fig 1). Sous l’effet de la contraction des releveurs,ce « combiné viscéral » se déplace vers l’avant et le haut. Lors de lapoussée abdominale, il se déplace vers le bas et l’arrière. Au repos laposition est intermédiaire.La marque d’insertion du faisceau puborectal des releveurs sur lesorganes du combiné viscéral forme, lors de la contraction, les trois capsviscéraux : vésico-urétral, vaginal et anorectal.Le col vésical et le col utérin évoluent parallèlement dans l’excavationpelvienne, sensiblement à la même hauteur, le premier en avant, lesecond en arrière du cap anorectal. En effort de poussée, ils restent tousdeux au-dessus de l’horizontale tracée entre le bord inférieur du pubis etla pointe du coccyx.Le vagin et le col utérin restent plaqués contre la face antérieure del’image rectale fermant ainsi l’espace du cul-de-sac de Douglas enpoussée.Enfin, l’urètre évolue parallèlement à la moitié inférieure du vagin.Ainsi, l’étude analytique puis synthétique du CCG normal puispathologique a permis de faire des déductions anatomofonctionnellessur les éléments de soutènement et de suspension des viscères pelvienset sur leurs points faibles.

Colpocystogramme pathologique

Le CCG permet de décrire sur les mêmes clichés les anomaliespositionnelles du bas appareil urinaire, de l’appareil génital, del’ampoule rectale et du cul-de-sac de Douglas. Il n’est pas rare qu’unélément prolabé de façon importante masque un autre élément. Dans cescas, le radiologue peut faire une variante technique du CCG que l’on

1 Diagramme normal. Radio-graphies en retenue et en poussée.

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appelle position III (la retenue étant la position I, la poussée la positionII) et qui consiste en un troisième cliché pris en poussée, mais enrefoulant à l’aide d’une pince longuette montée en tampon, l’élémentprolabé dominant.Les lésions peuvent s’observer au niveau de l’étage antérieur, de l’étagemoyen et de l’étage postérieur.

Étage antérieur

Positionnements anormaux du bas appareil urinaire : base vésicale eturètre.Le CCG a permis de montrer trois images distinctes de la régioncervicotrigonale.

Cystocèle avec coudure urétrale(fig 2)

La cystocèle, de diagnostic clinique facile, répond à une convexité de laportion inférieure de l’image vésicale faisant bomber la paroi vaginaleantérieure dans la direction de la vulve. Elle peut n’exister que lors de lapoussée, lorsque les muscles releveurs sont encore fonctionnels, ou êtredéjà présente lors de la retenue et atteindre parfois un volume trèsimportant, avec au maximum une extériorisation complète de la vessie.La cystocèle est dans la grande majorité des cas accompagnée d’unecervicocystoptôse, avec déplacement global de l’image vésicale dont lecol descend parfois très en dessous du bord inférieur de la symphysepubienne, l’urètre est alors coudé. Plus rarement, et surtout aprèschirurgie, la cystocèle peut se faire en arrière du col vésical, qui reste àl’aplomb de la symphyse pubienne.

Cervicocystoptôse avec horizontalisation urétrale(fig 3)

Il s’agit de la chute isolée du col vésical, pouvant s’associer à unecystocèle intravaginale plus ou moins marquée. Liée à un déficit dusystème ligamentaire suspensif postérieur, la vessie reste mobile entreretenue et poussée, traduisant la conservation du pouvoir contractile desreleveurs et correspondant à une hypermobilité du col vésical.Dans le cas d’une patiente jamais opérée, le diagnostic clinique decervicocystoptôse se fait par la mise en évidence de l’incontinence en

jet concomitante d’un effort de toux, et surtout par sa correction enrepositionnant le col vésical dans l’enceinte abdominale : c’est lamanœuvre clinique de Bonney, facile pour une patiente examinable sansgros prolapsus associé et dont l’incontinence urinaire est mise enévidence en position allongée.

Vésicalisation urétrale avec verticalisation urétrale(fig 4)

Il s’agit là d’un aspect infundibulaire du col vésical, avec disparition lorsde la retenue, de l’angle urétrovésical. En poussée, le col vésical s’ouvrecomme lors d’une miction physiologique et l’image vésicale est aucontraire figée entre les deux radiographies.

2 Cystocèle et coudure urétrale (radiographie en poussée).

3 Cervicocystoptôse et horizontalisation urétrale (radiographie en poussée).

4 Vésicalisation urétrale (radiographie en poussée).

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On notera que la visualisation de l’urètre, depuis le méat urétral jusqu’aucol vésical, permet de mettre en évidence parfois des diverticulesurétraux (fig 5).

Étage moyen

L’hystérocèle, de diagnostic clinique évident, n’a pu se constituerqu’après désaxation du corps utérin qui se retrouve dans l’axe du vagin.Physiologiquement, l’antéversion, flexion du corps utérin, fait que lesforces de poussée abdominale s’exercent en arrière sur le raphéanococcygien.De même qu’il existe des cervicocystoptôses sans cystocèle, il existe deshystéroptôses sans désaxation utérine, que l’on ne peut diagnostiquercliniquement. Sur le CCG on comprend parfaitement lasymptomatologie clinique alléguée, faite de pesanteurs périnéales àprédominance postérieure. Le vagin est presque horizontalisé, le colutérin appuie sur l’ampoule rectale et il existe un cul-de-sac de Douglasprofond.Dans sa technique princeps, Bethoux plaçait un repère métallique dansla cavité utérine afin d’en suivre exactement le déplacement. Nous avonsabandonné ce temps douloureux pour les patientes et convenons qu’unbadigeonnage vaginal complet, à l’aide d’une crème barytée, sur toutela longueur du vagin, y compris les culs-de-sac vaginaux, permet desuivre l’évolution de l’utérus. Enfin un stérilet repère parfois la cavitéutérine.Le vocabulaire employé :– hystérocèle et hystéroptôse ;– trachélocèle et trachéloptôse (col utérin restant) ;– colpocèle et colpoptôse fundique (fond vaginal restant).

Étage postérieur

Deux éléments peuvent habiter une colpocèle postérieure : la rectocèleet l’élytrocèle, dont le diagnostic clinique n’est pas toujours aisé (fig 6,7).De plus, il est important de considérer les éléments suivants : la distanceanovulvaire, la descente du périnée, le noyau fibreux central du périnée,les prolapsus rectaux, la tonicité du sphincter anal.Ainsi l’on peut différencier les rectocèles basses qui, le plus souvent,accompagnent un prolapsus génito-urinaire, des rectocèles hautes, avecdyschésie, lorsque le périnée reste tonique.

De plus, nous rappelons que les colpocèles postérieures peuventmasquer un prolapsus antérieur latent, mis en évidence lors de laposition III, où la colpocèle postérieure est refoulée à l’aide d’une pincelonguette montée en tampon.L’élytrocèle se traduit par un décollement de la paroi vaginalepostérieure et de la paroi rectale antérieure. L’image peut n’exister qu’àla poussée mais dans les élytrocèles plus importantes, on constate ce« vide » entre le vagin et le rectum même en retenue.

Échecs et récidives

Devant un prolapsus récidivé, la récupération des comptes-rendusopératoires et l’analyse rétrospective de la sémiologie initiale sontfondamentales puisqu’elles permettront de distinguer :– les récidives par erreur tactique, les plus fréquentes, où l’une descomposantes du prolapsus a été négligée ;– les récidives par erreur technique, où l’intervention a été malexécutée.Ces deux formes récidivent assez rapidement.Les récidives tardives, plus de 10 ans après la première intervention,montrent la poursuite du processus de dégradation tissulaire.Les récidives constituent la principale indication du CCG qui apporte làun maximum de renseignements. Il existe une grande variété de cascliniques, nous allons décrire les plus fréquemment rencontrés.

Anomalies du bas appareil urinaire

Dans le cas de patientes déjà opérées, il est indispensable de situerradiologiquement la région cervicotrigonale, afin de mieux comprendrel’origine des troubles urinaires en présence, comprenant souvent demanière intriquée : incontinence urinaire persistante ou apparue depuisle geste chirurgical, mictions impérieuses, pollakiurie et dysurie.

Insuffisance de cervicocystopexie

Quelle que soit la technique chirurgicale employée, le soutènement et/oula fixation du col vésical sont les temps essentiels de la cure del’incontinence urinaire d’effort. Le CCG diagnostique très facilement

5 Diverticule urétral et vésicalisation urétrale.

6 Élytrocèle et rectocèle (radiographie en poussée).

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des anomalies de position de la région cervicotrigonale :cervicocystoptôse persistante, vésicalisation urétrale avec base vésicalesouvent très haut fixée par une promontofixation. Lors de la radiographieen poussée, la fuite urinaire est souvent patente, visualisée par la baissedu niveau de produit de contraste intravésical.

Insuffisance de soutènement vésical (distorsionscervicotrigonales)(fig 7)Inversement, la cervicocystopexie peut être correctement positionnée,mais il existe une insuffisance de soutènement de la base vésicale. LeCCG montre une récidive de cystocèle, plus ou moins marquée, lors ducliché en poussée (position II) et une fixation rigide rétropubienne ducol vésical.

Malposition d’une fronde (trop haut ou trop bas située)La fronde (ou « l’effet fronde ») peut ne pas être située exactement auniveau de la jonction urétrale. Si elle est placée trop bas, on observe lorsde la position II, une coudure postérieure de l’urètre. Si elle est placéetrop haut, à l’aplomb du trigone, on objective une « encoche trigonale »,et l’urètre sous-jacent est verticalisé et hypotonique.

Persistance d’un élément de prolapsus(fig 7, 8)La persistance d’un prolapsus utérin négligé ou insuffisamment traité,après cure d’un prolapsus vésical, en est l’exemple le plus fréquemmentrencontré.Bien sûr, il faudra faire une confrontation anatomique et fonctionnelleavec les paramètres d’un bilan urodynamique, mais il faut préciser quele CCG est un examen dynamique qui met en évidence des fuitesurinaires patentes au cours de l’effort de poussée abdominale et montreparfaitement la contraction des muscles releveurs, s’ils ont gardé leurpouvoir contractile.

Prolapsus démasquésL’exemple type est un prolapsus de tout le combiné viscéral où seul leprolapsus vésical a été traité.La majoration d’un prolapsus postérieur (rectocèle ou élytrocèle) serencontre fréquemment après cervicocystopexie avec ou sans bandeletteantérieure et promontofixation ou après cervicocystopexie avechystérectomie (fig 6).

FistulesLe diagnostic des fistules est fait, le plus souvent, au cours de l’examenclinique, mais il peut l’être également au cours de l’examenradiologique. On peut diagnostiquer des fistules vésicovaginales ouurétrovaginales.

Enfin, on peut rencontrer un aspect totalement figé du combiné viscéralavec superposition des positions I et II par des actes chirurgicauxréitérés.

Indications du colpocystogramme

Patiente jamais opérée

Il ne fait que confirmer l’examen clinique du chirurgien, permettant dene passer à côté d’aucun élément masqué ou atténué et de traiter lastatique pelvienne dans son ensemble.Devant un prolapsus postérieur prédominant, le CCG permet de faire lediagnostic différentiel entre les différents types de rectocèles etl’élytrocèle.En cas de difficulté de l’examen clinique, étroitesse vaginale ou patientepeu coopérante, ou en cas de discordance entre les signes fonctionnelset les constatations cliniques, le CCG est utile.En cas de prolapsus posthystérectomie où l’inventaire des élémentsprolabés dans une colpoptôse fundique est parfois trompeur, le CCGpeut également rendre service.

Patiente déjà opérée

Le CCG met en lumière les éléments fixés et les distorsions anatomiquesapparues.Il permet de poser au mieux l’indication d’une éventuelle reprisechirurgicale et surtout d’en prévoir la voie d’abord et la technique àemployer. Mais les récidives demandent une parfaite confrontationanatomique et fonctionnelle, et l’on doit se souvenir que l’on ne traitepas des « images » mais bien des troubles fonctionnels, qu’ils soienturinaires, génitaux ou rectaux.

Colpocystogramme face aux autresexplorations morphologiques

Explorations du bas appareil urinaire

L’urographie intraveineuse visualise parfaitement la vessie et l’urètre,mais uniquement lors de la miction. Cet examen nous paraît surtoutintéressant lorsque l’on veut visualiser également le haut appareilurinaire et le trajet des uretères.

7 Rectocèle et hystéroptôse périnéale moyenne, col vésical fixé et base vésicale insuffisamment épaulée.8 Persistance d’un prolapsus de l’étage moyen et postérieur après cervicocystopexie (radiographie en poussée).

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L’urétrocystographie rétrograde permet, lors de troubles urinairesisolés, de visualiser le comportement du col vésical pendant la miction.

L’échographie urétrovésicale, réalisée avec un remplissage vésicald’environ 250 mLet une sonde sectorielle de 5 MHz placée sous le méaturétral, permet de situer la position du col vésical et de l’urètre. Lesimages sont prises au repos, en retenue et à la poussée. Le repère osseuxanatomique est la symphyse pubienne. On peut lui préférerl’échographie endovaginale linéaire à 7,5 MHz, permettant les mesuresde la longueur urétrale totale et de la descente et de la béance du col lorsd’un effort de toux maximal.

Explorations rectales

La rectographie dynamique, ou défécographie, permet d’étudier lesfonctions de continence et d’évacuation du rectum et du canal anal.

Cet examen est très différent du CCG par sa technique de réalisation(patiente assise, volume plus important d’une baryte rectale solide). Ilexplore une fonction physiologique, la défécation, et ne cherche doncpas à mettre en évidence les dégradations périnéales lors des efforts depoussée abdominale. Coupler les deux examens nous semble doncdifficile et illogique.

En ce qui concerne l’imagerie par résonance magnétique, des études dela cinétique pelvienne sont en cours d’évaluation et les résultatsapparaissent encourageants ; les trois plans de l’espace peuvent êtreétudiés au cours des différentes manœuvres demandées à la patiente.

Les forces de gravité, si vraiment elles jouent un rôle dans les domainesd’étude du CCG, ne peuvent être prises en considération en raison dudécubitus lors de l’examen par résonance magnétique. Enfin, son coûtest actuellement nettement plus élevé que celui d’un CCG réalisé selonles techniques habituelles.

•• •

La colpocystorectographie dynamique est une explorationradiologique réalisée après visualisation des organes pelvienspar des produits de contraste radio-opaque. Cet examen estparfaitement reproductible, non opérateur dépendant, peutraumatisant pour les patientes.Il a permis, à son origine, une meilleure compréhension desmécanismes physiopathologiques des prolapsus vaginaux,puis avec l’évolution des techniques chirurgicales, de rendrecompte tant des succès que des échecs des différentesinterventions.Explorant globalement les trois organes pelvipérinéaux, il aprouvé l’étroite solidarité de leurs déplacements physiologique etpathologique et a contribué au développement du concept de« spécialité du périnée ».Mais cet examen, essentiellement morphologique, doit êtreconfronté aux explorations fonctionnelles manométriques, car lacorrection anatomique des prolapsus vaginaux doit être faite enrespectant les fonctions urinaire et rectale de continence maisaussi d’évacuation.

Références

[1] Bethoux A, Bory S, Hughier M. Radio-cinétique viscéralepelvienne, le colpocystogramme. Encycl Med Chir(Elsevier, Paris), Radiodiagnostic-Urologie-gynécologie,34-630-A-10, 1967

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[5] Kujas A, Coussement A, Villet R. Imagerie dynamique destroubles pelvi-périnéaux de la femme. Paris : Vigot, 1998 :19-30

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[7] Zafiropulo M. À propos de la technique, de la lecture etdes indications du colpocystogramme. [thèse]. Paris, 1977

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