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Traumatismes du coude J Allain S Pannier D Goutallier Résumé. Les traumatismes du coude doivent être étudiés séparément chez l’enfant et chez l’adulte. Ils peuvent être responsables soit de luxations, soit de fractures de l’extrémité inférieure de l’humérus, de l’extrémité supérieure du cubitus ou du radius. Chez l’enfant, les trois lésions les plus fréquentes sont les fractures supracondyliennes, les luxations du coude et les fractures du condyle externe. Ces trois entités sont au premier plan de la pathologie traumatique de l’enfant de par la fréquence de leurs complications immédiates ou tardives, imposant une prise en charge thérapeutique adaptée. Chez l’adulte, elles sont plus rares et leur traitement est relativement bien codifié. Toutefois, les accidents de la circulation à haute vélocité sont à l’origine de fractures complexes associant des lésions ostéocartilagineuses, musculocutanées et vasculonerveuses imposant une prise en charge parfois multidisciplinaire dans des centres spécialisés. Le risque évolutif de ces traumatismes chez l’adulte est l’enraidissement du coude au retentissement fonctionnel variable, alors que chez l’enfant ils peuvent être à l’origine de séquelles anatomiques et fonctionnelles majeures secondaires au développement d’un cal vicieux, ou d’anomalies de croissance par atteinte du cartilage de croissance. © 2000 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots-clés : fracture, dislocation, coude. Rappel anatomique L’articulation du coude se compose de trois articulations : les articulations huméro- ulnaire et huméroradiale, et la radio-ulnaire proximale. Le mouvement de flexion- extension du coude fait intervenir les articulations huméro-ulnaire et huméroradiale. Le mouvement de pronosupination de l’avant-bras fait intervenir les articulations huméroradiale et radio-ulnaire proximale. Anatomiquement, ces trois articulations font partie du même complexe fonctionnel car il n’existe, pour ces trois entités articulaires, qu’une seule cavité articulaire, une seule synoviale et un même appareil ligamentaire. L’extrémité inférieure de l’humérus, encore appelée palette humérale, possède un aspect en « fourche », composée de deux piliers se terminant en épicondyle latéral et médial. Les deux piliers soutiennent le massif articulaire composé en dehors du condyle (ou capitellum) s’articulant avec la fossette radiale, et en dedans de la trochlée, en forme Jérôme Allain : Praticien hospitalo-universitaire. Stéphanie Pannier : Interne des hôpitaux de Paris. Daniel Goutallier : Professeur agrégé, chef de service. Service d’orthopédie et de traumatologie, hôpital Henri Mondor, 51, avenue du Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, 94000 Créteil, France. de poulie asymétrique dont la gorge s’articule avec l’épiphyse ulnaire proximale. Entre ces deux zones anatomiques, on individualise la gouttière condylotro- chléenne (ou zone conoïde) articulée au rebord médial de la fossette radiale. La zone comprise entre les deux piliers de l’humérus est appelée fossette olécrânienne en arrière et fossette coronoïdienne en avant. Elle correspond au point faible de l’extrémité distale de l’humérus. L’extrémité supérieure de l’ulna est constituée par deux apophyses : l’une postérieure et verticale, l’olécrâne, et l’autre antérieure et horizontale, l’apophyse coronoïde. Ces deux apophyses supportent la surface articulaire ulnaire de l’articulation huméro- ulnaire : la grande cavité sigmoïde, en forme de crochet. La petite cavité sigmoïde siège sur la face latérale de l’apophyse coronoïde. L’extrémité supérieure du radius se compose de trois parties : la tête du radius, le col et la tubérosité bicipitale qui donne insertion au tendon distal du biceps brachial. La face supérieure de la tête radiale est appelée fossette radiale. Elle est entièrement recouverte de cartilage qui est en continuité avec celui siégeant sur les 7-8 mm supérieurs du pourtour de la tête du radius (articulation radio-ulnaire proximale). Cette zone est séparée de la diaphyse par le col du radius, long de 1 cm et oblique en bas et en dedans. Lors de l’examen clinique, la palpation retrouve les trois repères classiques du coude : olécrâne, épicondyle médial et épicondyle latéral qui dessinent normalement une ligne en extension et un triangle en flexion (fig 1). DD DD 1 Les trois repères classiques du coude : olécrâne, épi- condyle médial et épicondyle latéral qui dessinent norma- lement une ligne en extension et un triangle en flexion. Encyclopédie Médico-Chirurgicale 24-100-C-50–31-018-B-10 24-100-C-50 31-018-B-10 Toute référence à cet article doit porter la mention : Allain J, Pannier S et Goutallier D. Traumatismes du coude. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Urgences, 24-100-C-50, Radiodiagnostic – Neuroradiologie-Appareil locomoteur, 31-018-B-10, 2000, 11 p. EMC [289] 150511

Traumatismes du coude

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Page 1: Traumatismes du coude

Traumatismes du coudeJ AllainS PannierD Goutall ier

Résumé. – Les traumatismes du coude doivent être étudiés séparément chez l’enfant et chez l’adulte. Ilspeuvent être responsables soit de luxations, soit de fractures de l’extrémité inférieure de l’humérus, del’extrémité supérieure du cubitus ou du radius. Chez l’enfant, les trois lésions les plus fréquentes sont lesfractures supracondyliennes, les luxations du coude et les fractures du condyle externe. Ces trois entités sontau premier plan de la pathologie traumatique de l’enfant de par la fréquence de leurs complicationsimmédiates ou tardives, imposant une prise en charge thérapeutique adaptée. Chez l’adulte, elles sont plusrares et leur traitement est relativement bien codifié. Toutefois, les accidents de la circulation à haute vélocitésont à l’origine de fractures complexes associant des lésions ostéocartilagineuses, musculocutanées etvasculonerveuses imposant une prise en charge parfois multidisciplinaire dans des centres spécialisés. Lerisque évolutif de ces traumatismes chez l’adulte est l’enraidissement du coude au retentissement fonctionnelvariable, alors que chez l’enfant ils peuvent être à l’origine de séquelles anatomiques et fonctionnellesmajeures secondaires au développement d’un cal vicieux, ou d’anomalies de croissance par atteinte ducartilage de croissance.© 2000 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : fracture, dislocation, coude.

Rappel anatomique

L’articulation du coude se compose de troisarticulations : les articulations huméro-ulnaire et huméroradiale, et la radio-ulnaireproximale. Le mouvement de flexion-extension du coude fait intervenir lesa r t i c u l a t i o n s h u m é r o - u l n a i r e e th u m é ro r a d i a l e . L e m o u v e m e n t d epronosupination de l’avant-bras faitintervenir les articulations huméroradiale etradio-ulnaire proximale. Anatomiquement,ces trois articulations font partie du mêmecomplexe fonctionnel car il n’existe, pour cestrois entités articulaires, qu’une seule cavitéarticulaire, une seule synoviale et un mêmeappareil ligamentaire.L’extrémité inférieure de l’humérus, encoreappelée palette humérale, possède un aspecten « fourche », composée de deux piliers seterminant en épicondyle latéral et médial.Les deux piliers soutiennent le massifarticulaire composé en dehors du condyle(ou capitellum) s’articulant avec la fossetteradiale, et en dedans de la trochlée, en forme

Jérôme Allain : Praticien hospitalo-universitaire.Stéphanie Pannier : Interne des hôpitaux de Paris.Daniel Goutallier : Professeur agrégé, chef de service.Service d’orthopédie et de traumatologie, hôpital Henri Mondor, 51,avenue du Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, 94000 Créteil, France.

de poulie asymétrique dont la gorges’articule avec l’épiphyse ulnaire proximale.Entre ces deux zones anatomiques, onindividualise la gouttière condylotro-chléenne (ou zone conoïde) articulée aurebord médial de la fossette radiale.

La zone comprise entre les deux piliers del’humérus est appelée fossette olécrânienneen arrière et fossette coronoïdienne en avant.Elle correspond au point faible de l’extrémitédistale de l’humérus.

L’extrémité supérieure de l’ulna estconstituée par deux apophyses : l’unepostérieure et verticale, l’olécrâne, et l’autreantérieure et horizontale, l’apophysecoronoïde.

Ces deux apophyses supportent la surfacearticulaire ulnaire de l’articulation huméro-ulnaire : la grande cavité sigmoïde, en formede crochet. La petite cavité sigmoïde siègesur la face latérale de l’apophyse coronoïde.

L’extrémité supérieure du radius se composede trois parties : la tête du radius, le col et latubérosité bicipitale qui donne insertion autendon distal du biceps brachial. La facesupérieure de la tête radiale est appeléefossette radiale.

Elle est entièrement recouverte de cartilagequi est en continuité avec celui siégeant sur

les 7-8 mm supérieurs du pourtour de la têtedu radius (articulation radio-ulnaireproximale). Cette zone est séparée de ladiaphyse par le col du radius, long de 1 cmet oblique en bas et en dedans.

Lors de l’examen clinique, la palpationretrouve les trois repères classiques ducoude : olécrâne, épicondyle médial eté p i c o n d y l e l a t é r a l q u i d e s s i n e n tnormalement une ligne en extension et untriangle en flexion (fig 1).

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1 Les trois repères classiques du coude : olécrâne, épi-condyle médial et épicondyle latéral qui dessinent norma-lement une ligne en extension et un triangle en flexion.

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Toute référence à cet article doit porter la mention : Allain J, Pannier S et Goutallier D. Traumatismes du coude. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Urgences, 24-100-C-50,Radiodiagnostic – Neuroradiologie-Appareil locomoteur, 31-018-B-10, 2000, 11 p.

EMC [289]150511

Page 2: Traumatismes du coude

Traumatismes du coudede l’adulte

FRACTURES DE L’EXTRÉMITÉINFÉRIEURE DE L’HUMÉRUS

¶ Anatomopathologie

Il existe de multiples variétés de fracturesde l’extrémité inférieure de l’humérus,regroupées au sein de nombreusesclassifications [7, 14]. La distinction principaleoppose les fractures extra-articulaires(surtout représentées par les supracondy-liennes) et les fractures articulaires (soit lessus- et intercondyliennes, soit les fracturesdites parcel la ires) [ 2 4 ] . Le degré decomminution fracturaire est le second critèredominant le pronostic.

Fractures extra-articulaires

• Fractures supracondyliennes (fig 2)

Elles représentent environ 20 % del’ensemble des fractures de l’extrémitéinférieure de l’humérus. Elles peuvent êtredéplacées ou non et leur comminution estvariable. Le pronostic fonctionnel de cesfractures est meilleur que celui des fracturesarticulaires.

• Fractures parcellaires extra-articulaires

Elles sont rares, le trait de fracture séparantun épicondyle (médial ou latéral) del’humérus. Leur déplacement est lié àl’insertion des muscles épicondyliens sur lefragment osseux fracturé.

Fractures articulaires

• Fractures sus- et intercondyliennes (fig 3)

Elles sont fréquentes, représentant environ40 % de l’ensemble des fractures del’extrémité inférieure de l’humérus. Le traitfracturaire associe une fracture des deuxcolonnes détachant l’épiphyse de ladiaphyse, et un refend articulaire séparantl’épiphyse en au moins deux fragments.L’importance de la comminution (toujourssous-estimée radiographiquement) et celledu déplacement des fragments empêchesouvent toute classification anatomopatholo-gique. Ce type de fracture entre parfois dansle cadre de traumatismes complexes ducoude à haute énergie réalisant de véritablefracas articulaires (fig 4).

• Fractures parcellaires articulaires

Elles peuvent soit être unicondyliennes, àtrait de fracture sagittal (intéressant alors lecondyle interne ou latéral, mais emportant

presque toujours le versant correspondantde la trochlée humérale) , soi t êtresecondaires à un trait de fracture frontal,détachant une partie de la surface articulairequi se déplace alors vers l’avant et le haut.Selon la taille du fragment de la surfacearticulaire fracturée, on distingue lesfractures du capitellum isolées (type I), cellesintéressant à la fois le condyle, la zoneconoïde et la joue externe de la trochlée(type II) et enfin celles emportant toute lasurface articulaire, encore appelées fracturesdiacondyliennes (type III).

Lésions associées

Les fractures de l’extrémité inférieure del’humérus peuvent s’accompagner defractures de la cupule radiale, de l’olécrâneou de l’apophyse coronoïdienne. Unel u x a t i o n d u c o u d e e t d e s l é s i o n sligamentaires (ligament collatéral médial)peuvent également être associées à lafracture.

¶ Diagnostic

Interrogatoire

Il s’agit le plus souvent soit d’un sujet jeune(20-30 ans) après un traumatisme violent,soit d’un sujet âgé (70-80 ans) au décoursd’une chute de sa hauteur [10, 25].

Le traumatisme est le plus souvent direct(coude de portière), mais parfois égalementindirect par une chute sur la paume de lamain, la tête radiale venant fracturerl’épiphyse humérale (fractures parcellairesarticulaires).

Examen clinique

Le blessé se présente aux urgences avec ungros coude très douloureux et uneimpotence fonctionnelle absolue. L’œdèmed’apparition rapide gêne l’examen du coude.L’apparition d’une ecchymose est le plussouvent retardée par rapport à l’accident.Des complications (vasculonerveuses toutparticulièrement) sont recherchées lors dubilan initial.

Examen radiographique

Il doit comprendre une incidence de face etune de profil, en n’hésitant pas, même chezl’adulte, à réaliser des clichés comparatifsdu côté opposé. Afin de pouvoir analyser aumieux les lésions anatomiques, il fauts’acharner à avoir des incidences de face etde profil strict (l’extrémité inférieurenormale de l’humérus possédant alors unaspect caractéristique en « sablier »). Ceciétant souvent difficile dans le contexte del’urgence chez un patient hyperalgique, cen’est parfois qu’au bloc opératoire, sousanesthésie, que des clichés corrects peuventêtre obtenus. On peut alors préciser le typede trait de fracture, le déplacement, lacomminution osseuse et les lésionséventuellement associées.

2 Fracture supracondylienne chez l’adulte.A. Radio de face.B. Radio de profil.C. Radio de face en traction sous anesthésie avec réduction préopératoire de lafracture autorisant une meilleure visualisation du trait de fracture (têtes de flèches).D. Radio de face postopératoire après réduction et ostéosynthèse par plaque vissée la-térale.E. Radio de profil postopératoire après réduction et ostéosynthèse par plaque vissée la-térale.

*A *B *C *D

*E

3 Fracture comminutivesus- et intercondylienne del’humérus, radio de face.

24-100-C-50 Traumatismes du coude Urgences31-018-B-10 Radiodiagnostic

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Page 3: Traumatismes du coude

¶ Évolution

Complications immédiates

L’ouverture cutanée est présente danse n v i ro n u n q u a r t d e s c a s [ 2 4 ] . L e scomplications vasculaires sont exception-nelles (moins de 1 % des cas), alors que desatteintes nerveuses sont retrouvées chezenviron 5 % des patients [10, 25], intéressantsurtout le nerf radial et moins souvent lenerf ulnaire. La régression spontanée dessignes neurologiques déficitaires est la règle,témoignant de la rareté des sections axonaleset correspondant, dans l’immense majoritédes cas, à de simples contusions nerveuses.Il faut également noter la possibilité delésion du nerf ulnaire ou du nerf radial enperopératoire soit par dissection inadéquate,s o i t p a r c o n t a c t a v e c l e m a t é r i e ld’ostéosynthèse. L’association à d’autresfractures et/ou luxations du membresupérieur doit être recherchée en cas detraumatisme violent car les lésions étagéesdu membre supérieur sont fréquentes [20]. Lasurvenue possible d’un syndrome deVolkmann doit amener à une surveillanceinitiale rapprochée.

Complications secondaires

• Enraidissement du coude [15]

C’est la complication la plus fréquente desfractures de l’extrémité inférieure del’humérus chez l’adulte. Elle intéressesurtout la flexion-extension du coude, maisaussi la pronosupination de l’avant-bras. Lerisque d’enraidissement est d’autant plusélevé que la fracture atteint la surfacearticulaire, que le nombre de fragments estgrand et que la comminution fracturaire estimportante. Finalement, l’apparition d’unenraidissement du coude dépend surtout dutype de traitement : en cas d’immobilisationplâtrée prolongée, l’enraidissement est trèsfréquent mais la stabilité des ostéosynthèsesn’autorise pas toujours une mobilisationimmédiate. Si une ostéosynthèse avec aborddu foyer de fracture n’est pas suivie d’unerééducation postopératoire immédiate,l’enraidissement est alors inéluctable.

• PseudarthroseEn dehors des fractures parcellaires desépicondyles, elle est rare et complique leplus souvent une ostéosynthèse inadéquate.Elle est à l’origine de douleurs et d’une

diminution de la force du membre supérieur.Son diagnostic radiographique est parfoisdifficile en raison de la présence du matérield’ostéosynthèse.

• Cals vicieux

Ils sont plus fréquents après traitementorthopédique, mais peuvent aussi se voir encas de traitement chirurgical soit par défautde réduction initiale, soit par déplacementsecondaire. Ils sont à l’origine de douleurs,mais surtout d’un enraidissement du coudepar perte de la congruence articulaire.

Complications septiques

L’abord chirurgical avec utilisation dematériel d’ostéosynthèse est à l’origine d’untaux d’infection d’environ 5 %. Cettefréquence est de 10 % en cas de fractureouverte. Pour être traitée, elle nécessite denombreuses interventions et aboutit le plussouvent à un enraidissement définitif ducoude.

¶ Traitement

Sur les lieux de l’accident ou lorsde l’arrivée du patient aux urgences

Après avoir éliminé les complicationsvasculonerveuses, le membre supérieur doitêtre immobilisé dans une attelle en prenantsoin de protéger la peau pour éviter touteaggravation de la souffrance cutanée. S’ils’agit d’une fracture ouverte, la plaie serad ’ a b o rd d é s i n f e c t é e p u i s c o u v e r t estérilement. La suite du traitement serad i c t é e p a r l e r é s u l t a t d u b i l a nradiographique.

Différentes méthodes thérapeutiques

• Traitement fonctionnel

Il repose sur le principe de la mobilisationimmédiate du coude dès que la diminutiondes douleurs initiales l’autorise. Il vise àobtenir un remodelage du foyer de fracturepour diminuer l’amplitude de l’enraidis-sement articulaire.

• Traitement orthopédique

Il correspond à l’immobilisation du membresupérieur par un plâtre brachiopalmaire à90° de flexion du coude et en pronationneutre, le coude étant maintenu au corpsdans une écharpe de Mayo ou un bandagede Dujarier pour immobiliser l’articulationsus-jacente à la fracture. La durée de cetteimmobilisation est de 45 à 60 jours selon letype de la fracture. La surveillance cliniquedoit rechercher les signes de compressionsous plâtre.

• Traitement chirurgical

Il fait appel aux différentes méthodes deréduction puis d’ostéosynthèse du foyer defracture. La voie d’abord chirurgicale peutêtre postérieure (transtricipitale outransolécrânienne) médiale ou latérale, selon

4 Fracas du coude par traumatisme balistique.A. Aspect macroscopique préopératoire.B. Radio de face : fracture multifragmentaire sus- et intercondylienne de l’humérus et fracture comminutivede l’extrémité proximale de l’ulna.C. Radio de profil.D. Aspect peropératoire de face : reconstruction de l’épiphyse humérale restante (réduction et brochage du pilieret du condyle latéral et réduction de l’articulation huméroradiale).E. Aspect postopératoire de profil : tentative de reconstruction de l’olécrâne avec les fragments restants pour avoirun butoir postérieur et immobilisation complémentaire par un fixateur externe humérocubital.F. Aspect macroscopique à 3 semaines de l’intervention avec la couverture par un lambeau libre de grand dorsalréalisé en urgence dans le même temps opératoire que l’ostéosynthèse.

*A *B *C

*D*E *F

Urgences Traumatismes du coude 24-100-C-5031-018-B-10Radiodiagnostic

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le siège et le type de la fracture. Aprèsréduction à ciel ouvert, l’ostéosynthèse seraréalisée à l’aide de vis ou de plaques visséesle plus souvent [19]. L’utilisation de brochesisolées doit être évitée car la stabilité dumontage doit être suffisante pour autoriserune mobilisation postopératoire immédiate.

Indications thérapeutiques

Dans l’immense majorité des cas, letraitement chirurgical doit être entrepris afinde réduire anatomiquement la fracture et depermettre une mobilisation précoce. Pourcertains, en cas de fracture extra-articulairenon déplacée, le traitement orthopédiquepeut être préconisé . Le tra i tementfonctionnel est le plus souvent utilisé en casde fracture déplacée et comminutive du sujetâgé car aucune ostéosynthèse ne permet icil’obtention d’une stabilité suffisante pourautoriser la mobilisation postopératoire.Dans tous les autres cas, la réduction-ostéosynthèse doit être préférée pour obtenirune consolidation en position anatomiquetout en diminuant le risque d’enraidissementdu coude.

Traitement des complications

Comme nous l’avons vu précédemment, lescomplications neurologiques ne doiventaboutir qu’à une surveillance clinique, puiséventuellement électromyographiqueappropriée.Les fractures très complexes largementouvertes ou associées à d’autres lésionstraumatiques du membre supérieur peuventimposer l’utilisation de fixateurs externesisolés ou en complément d’une ostéosyn-thèse a minima.Les indications chirurgicales devant unenraidissement fixé du coude (arthrolysesavec parfois ablation d’ostéomes du couderéalisant de véritables butoirs articulaires)doivent être mûrement réfléchies car ellesimposent l’engagement du patient àparticiper activement à une rééducationpostopératoire longue et difficile, sousréserve de n’obtenir aucune améliorationfonctionnelle. L’anatomie normale del’interligne articulaire est indispensable pourespérer améliorer la mobilité articulaire ducoude.

FRACTURES DE L’EXTRÉMITÉSUPÉRIEURE DE L’ULNA

Il en existe deux variétés. Les fractures del’olécrâne représentent la fracture du coudele plus fréquemment rencontrée, intéressantà la fois l’adulte jeune (accident de sport oude la voie publique) et le vieillard (chute desa hauteur). Les fractures de l’apophysecoronoïdiennes sont beaucoup plus rares.

¶ Fractures de l’olécrâne

Anatomopathologie

Ces fractures sont le plus souventarticulaires, intéressant la grande cavité

sigmoïde de l’ulna. Leur classification parMerle d’Aubigné les distingue selon leursiège. Les fractures du sommet ou becolécrânien, extra-articulaires, correspondentà une désinsertion osseuse du triceps. Lesfractures de la partie moyenne de l’olécrâne,articulaires, respectent de principe au moinsle tiers distal de l’apophyse olécrânienne etne mettent donc pas en jeu la stabilitésagittale du coude. Les fractures de la basede l’olécrâne, à la jonction portionhorizontale-portion verticale de la grandecavité sigmoïde, aboutissent au risque deluxation antérieure du coude (fig 5).On distingue de plus les fractures selon lecaractère simple ou comminutif du trait(fig 6) et selon le degré de déplacement desdifférents fragments qui varie en fonction del’intégrité des ailerons olécrâniens.

Diagnostic

• Interrogatoire

Ces fractures surviennent le plus souventpar flexion brutale du coude associée à unecontraction violente du triceps soit au coursd’un traumatisme indirect (chute sur lamain, coude en flexion), soit après untraumatisme direct (chute sur la face

postérieure du coude en flexion). Lesfractures en extension sont beaucoup plusrares.

• Examen clinique

Le blessé se présente aux urgences pour unedouleur de la face postérieure du coude plusou moins marquée et une impotencefonctionnelle parfois incomplète. Il existe ungonflement de la face postérieure du coudeassocié à un hématome sous-cutané et unedouleur exquise en regard.

La mobilisation active en flexion est possiblemais l’extension active est impossible,signant la désinsertion tricipitale.

L’état de la couverture cutanée doitabsolument être précisé car l’olécrâne est unos sous-cutané et le taux d’ouverture initialeet surtout secondaire par nécrose cutanée estgrand, avec pour conséquence le risqued ’ i n f e c t i o n , e n p a r t i c u l i e r e n c a sd’ostéosynthèse.

En effet, la peau des sujets âgés est trèsfragile et le mécanisme par choc direct esttrès fréquent. Cette particularité expliquel’indispensable précocité du traitement encas de réduction-ostéosynthèse à ciel ouvert.

5 Fracture de la base de l’olécrâne avec luxation antérieure transolécrânienne du coude.A. Aspect radiographique préopératoire face/profil.B. Aspect radiographique postopératoire face/profil, après réduction et ostéosynthèse par haubanage et vissage.Le vissage a été associé au haubanage car la stabilité obtenue était insuffisante pour autoriser une mobilisation im-médiate du coude.

*A *B

6 Fracture complexe de l’extrémité proximale des deux os de l’avant-bras associée à uneluxation de la tête radiale.

A. Aspect radiographique préopératoire de profil.B. Aspect radiographique postopératoire de face et de profil, après réductionet ostéosynthèse de l’ulna par plaque vissée postérieure et prothèse de tête radialede Swanson ayant permis une mobilisation immédiate du coude.

*A

*B

"B1

24-100-C-50 Traumatismes du coude Urgences31-018-B-10 Radiodiagnostic

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Page 5: Traumatismes du coude

• Examen radiographique

Il comporte un coude de face et de profilvisualisant facilement le trait de fracture, sontype et son déplacement. La fréquence desurvenue de lésions ostéoarticulairesassociées est très importante et impose doncleur recherche systématique (cf infra).

Lésions ostéoarticulaires associées

• Luxation de la tête radiale

Cette entité correspond à la variété hautedes fractures de Monteggia.

• Fracture de l’apophyse coronoïde

Elle doit être systématiquement recherchéesur le cliché de profil car cela impose parfoissa réduction et son ostéosynthèse.

• Luxation transolécrânienne du coude

Le fragment proximal fracturé de l’olécrânereste à sa place, maintenu par le tricepsderrière l’épiphyse humérale, alors que lereste du squelette antébrachial (ulna etradius restés solidaires) est luxé en avantpar rapport à l’humérus.

Traitement

• Sur les lieux de l’accident ou lorsde l’arrivée du patient aux urgences [33]

Après avoir examiné le patient, le coude doitêtre immobilisé dans une attelle en prenantgrand soin de protéger la peau par desA m é r i c a i n s o u u n e Ve l b a n d e . L e spansements alcoolisés sont à proscrire souspeine d’entraîner des brûlures cutanées. S’ils’agit d’une fracture ouverte, la plaie estd’abord dés infectée , puis couvertestérilement.

• Différentes méthodes thérapeutiques

– Traitement fonctionnel.Il repose sur le principe de la mobilisationimmédiate du coude.

– Traitement orthopédique.Il correspond à l’immobilisation du membresupérieur par un plâtre brachiopalmaire oubrachioantébrachial (laissant libre lapronosupination) à 90° de flexion du coude,pour une période de 21 à 30 jours.

– Traitement chirurgical.La voie d’abord chirurgicale est postérieure,suivant la crête ulnaire postérieure. Laqualité de la réduction doit systémati-quement être vérifiée par une arthrotomielatérale. L’ostéosynthèse est réalisée au fild’acier ou synthétique [1, 17] soit isolément(cerclage), soit appuyé sur deux brochesentrées par le sommet de l’olécrâne ettraversant le foyer de fracture (haubanage).Certains proposent le vissage axial(centromédullaire) ou oblique, bicortical.Enfin, l’utilisation d’une plaque visséepostérieure moulée peut être renduenécessaire du fait du caractère complexe decertaines fractures. Comme dans toutes les

fractures du coude, la stabilité du montagedoit être suffisante pour autoriser unemobilisation postopératoire immédiate enflexion-extension et en pronosupinationpour éviter l’apparition d’un enraidissementarticulaire définitif.

– Indications thérapeutiques.Dans l’immense majorité des cas, letraitement chirurgical doit être entrepris afinde réduire anatomiquement la fracture et depermettre une mobilisation précoce grâce àune ostéosynthèse stable (le haubanage estla technique la mieux adaptée pour atteindrece but). En cas de lésions cutanéesimportantes, une ostéosynthèse peut êtredifférée de 1 à 2 semaines. Les fractures nondéplacées sont les seules à pouvoir êtretraitées orthopédiquement. Le traitementfonctionnel est le plus souvent utilisé en casde fracture du sujet âgé à l’état cutanéprécaire. Elle aboutit à une pseudarthrosefibreuse, le plus souvent indolore, associée àune perte de la force d’extension du coudeparfaitement compatible avec les exigencesfonctionnelles des sujets âgés.

¶ Fractures de l’apophyse coronoïde

Ces fractures sont soit associées à uneluxation du coude (fractures du bec de lacoronoïde), soit s’intègrent dans une fracturecomminutive (avec ou sans luxation ducoude) intéressant l’ensemble de l’extrémitésupérieure de l’ulna (fractures de la base dela coronoïde) [16].La symptomatologie clinique est le plussouvent celle de la lésion associée et lediagnostic des fractures de l’apophysecoronoïde repose sur une lecture attentivedes radiographies de profil de tout coudetraumatisé.Le traitement des fractures du bec de lacoronoïde est celui de la luxation du coudequ’elle accompagne. En cas de fracture dubec isolé (se méfier d’une luxationspontanément réduite), le traitement estfonctionnel. Une incarcération intra-articulaire du fragment coronoïdien fracturéest la seule indication chirurgicale théorique.Les fractures déplacées de la basecompromettant à la fois la surface articulairede la grande cavité sigmoïde de l’ulna et lastabilité du coude, elles doivent être réduiteset ostéosynthésées chirurgicalement parvissage soit par voie postérieure, soit parvoie antérieure.

FRACTURES DE L’EXTRÉMITÉSUPÉRIEURE DU RADIUS

¶ Anatomopathologie

Elles intéressent dans l’immense majoritédes cas la tête radiale (contrairement à cequi se passe chez l’enfant, où la fracturesiège presque toujours dans le col duradius). Ce sont donc des fracturesarticulaires intéressant à la fois l’articulationhuméroradiale et la radio-ulnaire proximale.La classification anatomopathologique deMason est utilisée par la grande majorité desauteurs, même si elle a souvent été modifiéepour mieux préciser le type de fracture [18].Elle distingue quatre types de fractures dela tête radiale :

– type I : fracture non déplacée ;

– type II : fracture déplacée avec un traitunique détachant seulement un fragment del’épiphyse radiale (fig 7) ;

– type III : fracture complexe multifragmen-taire avec souvent présence de refends dansle col du radius (fig 8) ;

– type IV : fracture de type I, II ou IIIassociée à une autre fracture du coude ou àune luxation.

¶ Lésions associées

Elles sont fréquentes et souvent au premierplan pour déterminer le pronostic de cesfractures. Elles peuvent en particulierintéresser le ligament collatéral médial ducoude (rupture ou désinsertion osseuse) oul’apophyse coronoïdienne (fracture) etconduisent parfois à une luxation du coudedont l’association à une fracture de la tête

8 Fracture de la tête radialeMason 3.

A. Aspect radiographiquede profil.B. Aspect radiographiquede face.

*A *B

7 Fracture de la tête ra-diale Mason 2 peu déplacée.Radio de face.

Urgences Traumatismes du coude 24-100-C-5031-018-B-10Radiodiagnostic

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Page 6: Traumatismes du coude

du radius est très fréquente. Il peutégalement exister des fractures en « miroir »du condyle externe [18] ou de l’extrémitéproximale de l’ulna.

¶ Diagnostic

– Interrogatoire.Ces fractures surviennent lors d’une chutesur la paume de la main, la position ducoude en flexion-extension et pronosupi-nation déterminant le type fracturaire.

– Examen clinique.La douleur, parfois très modérée, siège à laface postéroexterne du coude. L’impotencefonctionnelle est souvent discrète. Il existeun gonflement de la face postéroexterne ducoude avec une douleur exquise lors de lapalpation de la tête du radius. Enfin, lamobilisation en pronosupination déclenchela douleur.

– Examen radiographique.Il comporte un coude de face et de profil,mais le trait de fracture est parfois difficile àmettre en évidence et il ne faut alors pashésiter à demander d’autres incidences, enparticulier par une pronosupinationprogressive déroulant la tête radiale.L’existence de lésions ostéoarticulairesassociées est systématiquement recherchée.

¶ Traitement

Il est très controversé, même si le but estuniformément admis : permettre unemobilisation précoce du coude pour éviterla principale complication de ces fractures,l’enraidissement.

Différentes méthodes thérapeutiques

• Traitement non chirurgical

Il repose sur le principe de la mobilisationprécoce du coude dès la diminution desphénomènes douloureux. Pendant la phasealgique (8-10 jours), une immobilisationantalgique du membre supérieur dans unplâtre brachiopalmaire est réalisée.

¶ Traitement chirurgical (fig 9)

Il peut être effectué par voie d’abord externeou postéroexterne.

– Réduction-ostéosynthèse (fig 10).Après reposit ionnement du ou des

fragments, une ostéosynthèse à l’aide debroches ou de vis est pratiquée. Cetteintervention est de réalisation délicate et doitaboutir à un résultat anatomique parfaitassocié à une bonne stabilité du montage.

– Résection de la tête radiale simple [6, 12].Elle correspond à la réalisation d’uneostéotomie du col du radius pour exérèse dela tête radiale fracturée qui doit être aussiéconomique que possible. C’est uneintervention simple mais répondant à desrègles précises et non sans conséquences surla stabilité ultérieure du coude et sur lefonctionnement biomécanique de l’avant-bras et du poignet.

– Résection suivie d’une arthroplastie de la têteradiale [27, 36].Deux principaux types de prothèsesexistent : la prothèse de Swanson (fig 11, 12)et les prothèses métalliques. La première esten réalité une entretoise en siliconefonctionnant comme une arthroplastied’interposition. Elle se complique souventpar l’apparition d’une siliconite liée à l’usure

des prothèses, responsable d’ostéolysesparfois majeures [8]. Cette complication aa m e n é c e r t a i n s à a b a n d o n n e r l e sarthroplasties de tête radiale, d’autrespréconisent leur ablation systématique aprèsguérison des lésions associées (la prothèse aalors joué son rôle d’entretoise pendant laphase de c ica t r i sa t ion des lés ionsligamentaires), d’autres enfin ont abandonnéce type d’implants pour les prothèsesmétalliques qui ne possèdent pas les mêmesinconvénients.

– Ablation économique d’un ou plusieursfragments de tête radiale.Cette méthode correspond à la résection dela tête limitée aux morceaux libérés pouréviter les complications de la résection. Ellene peut toutefois se discuter qu’en cas depetits fragments faisant corps étrangersintra-articulaires où elle possède un intérêtthéorique.

• Indications thérapeutiques

Elles dépendent du type fracturaire(classification de Mason), de l’existence delésions associées, et en particulier d’uneinstabilité du coude par atteinte du ligamentcollatéral médial. Toutefois, les différentsauteurs ne sont d’accord que sur quelquesindications classiques, la prise en charge deces traumatismes restant encore aujourd’huiune affaire d’école.

Les fractures non déplacées (type I) sonttraitées par immobilisation courte etmobilisation rapide (8-10 jours). Lesfractures de types III sont traitées parrésection isolée ou suivie d’une prothèse detête radiale. Les fractures de types II à deuxfragments représentent la meilleureindication à la réduction suivie d’uneostéosynthèse. En dehors de ces situations,aucune technique ne fait l’unanimité.Toutefois, il semble que les prothèsesmétalliques de tête radiale donnent de bonsrésultats à moyen terme.

La rupture associée du ligament collatéralmédial impose son traitement spécifique quipeut faire appel soit à l’immobilisationplâtrée 3 semaines (source de raideur), soit àsa répara t ion chi rurg ica le . En casd’indication de résection de la tête radiale,l’existence d’une rupture associée dul igament co l la téra l média l about i tinéluctablement à un échec par instabilitédu coude, déviation rapide en valgus etperturbations de toute la biomécanique del’avant-bras. Certains ont proposé laréparation chirurgicale du ligament associéeà la résection, mais il semble que cettesituation soit une bonne indication deprothèse de tête radiale. En effet, celle-ci jouealors le rôle de butoir latéral luttant contrele valgus et permet donc la cicatrisation duligament collatéral médial tout en autorisantla mobilisation immédiate du coude.

9 Fracture de la tête radiale : aspect macroscopiqueperopératoire.

10 Fracture de la tête ra-diale Mason 2. Réduction-ostéosynthèse par vissage.Radio de face.

11 Fracture de la tête radiale : implantation d’une pro-thèse de tête radiale en silicone de Swanson. Aspectmacroscopique peropératoire.

12 Fracture de la tête ra-diale : prothèse de tête ra-diale en silicone de Swan-son. Aspect radiographiquepostopératoire de face.

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Page 7: Traumatismes du coude

Traumatismes du coudede l’enfant

FRACTURES DE L’EXTRÉMITÉINFÉRIEURE DE L’HUMÉRUS

¶ Anatomopathologie

Fractures supracondyliennes (fig 13)

Ce sont les fractures du coude de l’enfantles plus fréquentes, particulièrement entre 5et 10 ans [11, 34]. Lors du traumatisme,l’épiphyse humérale se fracture juste au-dessus du cartilage de croissance, à traversla partie moyenne des deux fossettes(olécrânienne et coronoïdienne) et se déplaceen arrière. Le déplacement se fait le plussouvent avec une rotation interne, unebascule et une translation postérieure dufragment inférieur. La classification de cesfractures est faite selon son déplacement :

– stade I : fracture non déplacée ;

– stade II : fracture avec déplacementmodéré (un seul déplacement primaire) ;

– stade III : fracture avec déplacementimportant, mais avec un contact persistantentre les deux fragments ;

– stade IV : fracture avec déplacementmajeur où il n’existe plus de contact entreles deux fragments.

Fractures du condyle latéral (fig 14)

Cette fracture doit être bien connue car ellepasse souvent inaperçue. Il s’agit d’un

décollement épiphysaire de stade IV selonSalter et Harris [35] . Le trait, qui estarticulaire, détache le condyle, l’épicondyleexterne, le versant latéral de la trochlée etun fragment plus ou moins important de lamétaphyse humérale. Les fractures sontclassées selon leur déplacement :

– stade I : fracture non déplacée ;

– stade II : fracture avec translation externeet bascule minime ;

– stade III : fracture avec translation externeet bascule postéroexterne.

Fractures de l’épicondyle médial

Il s’agit d’un décollement apophysaireséparant l ’épicondyle médial de lamétaphyse. La classification de ces fracturesest établie en fonction du déplacement del’épicondyle :

– stade I : fracture peu ou pas déplacée ;

– stade II : fracture déplacée ;

– stade III : fracture avec incarcération del’épicondyle ;

– stade IV : fracture associée à une luxationdu coude (fig 15).

Fractures du condyle médial

B ien que rares , e l l es doivent ê t resystématiquement recherchées car source deséquelles importantes. C’est un décollementépiphysaire de stade IV selon Salter etHarris, emportant la partie médiale del’épiphyse avec un fragment de la trochléehumérale.

¶ Diagnostic

La forme prise pour description est laclassique fracture supracondylienne.

Interrogatoire

Le mécanisme le plus fréquent (plus de neuffois sur dix) se fait en extension par unechute sur la paume de la main, coude fléchi.

Examen clinique

Il est souvent difficile du fait de l’installationrapide de l’œdème et des douleurs del’enfant. Son but essentiel est donc derechercher l’existence d’une complicationvasculonerveuse. L’abolition du pouls radialn’est pas exceptionnelle. Elle est parfoisaccompagnée de signes ischémiques distaux(perte de la chaleur cutanée, cyanose,paresthésies...) et doit mener à la réalisationimmédiate du traitement.

Examen radiographique

Il comporte dans tous les cas une incidencede face et de profil bilatérale afin de pouvoirréaliser une étude comparative. En effet,l’analyse des radios du coude de l’enfant estrendue difficile par l’apparition progressivedes quatre points d’ossification de l’épiphysehumérale (point condylien latéral entre6 mois et 2 ans, point épicondylien médialvers 6 ans, point trochléen et pointépicondylien latéral vers 12 ans). Ce n’estque vers 13 à 15 ans que la réunion desquatre points d’ossification fait disparaîtreles cartilages de conjugaison huméraux [31].

¶ Évolution

Favorable

Le plus souvent, après un traitement adapté,la guérison se fait sans séquelle. La fractureconsolide en 30 à 45 jours, puis lamobilisation du coude permet de retrouverdes amplitudes articulaires pratiquementsymétriques.

Complications immédiates

Une ouverture cutanée est retrouvée dansenviron 5 % des cas . En revanche,d’importantes lésions cutanées secondairespar suffusion hémorragique sous-cutanée àpartir de la fracture sont fréquentes. Descomplications vasculonerveuses sont

13 Fracture supracondylienne chez l’enfant de stade IV.A, B. Aspect radiographique préopératoire de face (A) et de profil (B).C. Aspect radiographique postopératoire après réduction et embrochage.

*A *B *C

14 Fracture du condyle latéral chez l’enfant.A. Aspect radiographique préopératoire de face et de profil.B. Aspect radiographique postopératoire de face et de profil après réduction et embrochage.

*A *B

15 Luxation du coude as-sociée à une fracture del’épicondyle médial chezl’enfant.

Urgences Traumatismes du coude 24-100-C-5031-018-B-10Radiodiagnostic

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Page 8: Traumatismes du coude

possibles (5 à 10 %), en particulier dans lesfractures à grand déplacement. L’artèrehumérale, le nerf médian ou radial peuventen effet être directement lésés par l’arêteosseuse frac tura ire responsable decontusions ou de compressions. Leurincarcération dans le foyer de fracture estexceptionnelle et le pronostic des atteintesnerveuses est donc, dans l’immense majoritédes cas, très favorable. La rupture vraie del’artère humérale est rarissime mais doit êtreévoquée en cas de persistance de signesischémiques après réduction et contentionde la fracture.Une étude au doppler peut alors amener àl’abord de l’artère. L’absence de réapparitiondu pouls radial sans signe d’ischémie distalecorrespond le plus souvent à un spasme del’artère. Ici aussi, la possibilité d’apparitiond’un syndrome de Volkmann doit rendretrès prudente la surveillance initiale de cesenfants.

Complications secondaires

• Déplacements secondaires

Ils sont liés à une ostéosynthèse ou uneimmobilisation insuffisante et mènent àl’apparition d’un cal vicieux.

• Cals vicieux

La séquelle la plus fréquente est ledéveloppement d’un cubitus-varus peuinvalidant, mais esthétiquement trèsdésagréable. Les cals vicieux en rotationinterne sont également fréquents.

• Enraidissement du coude

Il ne doit plus exister du fait de l’abandonde toute rééducation précoce traumatisante,source par le passé de volumineusesossifications.

¶ Traitement

Méthodes

Lorsqu’un déplacement existe, celui-ci doitêtre réduit sous peine de laisser apparaîtreun cal vicieux. Cette réduction peut êtreréalisée à foyer ouvert (abord chirurgical dela fracture) ou à foyer fermé (méthodeorthopédique par manœuvres externes).Une fois la réduction obtenue, la contentionfracturaire doit assurer la stabilité de cetteréduction jusqu’à consolidation. Lacontention peut être assurée soit par uneimmobilisation plâtrée de type thoracobra-chial ou brachiopalmaire avec une écharpede Mayo ou un bandage de Dujarier, soitpar un brochage (deux broches sont le plussouvent utilisées) toujours associé à la mêmeimmobilisation postopératoire. L’embro-chage peut être réalisé selon la technique deJudet en percutané par voie externe [23], ouaprès abord du foyer fracturaire par unebroche interne et une externe [2].La méthode de Blount [4] est prônée par denombreux auteurs. Elle correspond à une

immobilisation du coude au-delà de 90° deflexion par un collier maintenant le poignetau cou. Son utilisation impose une bonneinformation aux parents et la possibilité desurveiller parfaitement l’enfant.

Indications

Les fractures non déplacées sont traitées parimmobilisation dans un plâtre brachiopal-maire à angle droit, avant-bras en demi-pronation pour 30 à 45 jours selon l’âge [13].Les fractures déplacées de type II ou IIIdoivent être réduites orthopédiquement. Lacontention sera assurée soit par la méthodede Blount, soit par l’embrochage selon Judet.Dans les fractures déplacées de type IV, unetentative de réduction orthopédique précèdetoujours la réduction sanglante réservée auxéchecs de la première méthode ou à certainsautres cas particuliers (fracture vue avecretard, ischémie sévère selon les auteurs) [13].Un embrochage est ici systématiquementutilisé une fois la réduction obtenue [13].Dans tous les cas, un contrôle clinique etradiographique sera effectué aux deuxièmeet septième jours.

¶ Autres fractures de l’extrémitédistale de l’humérus

Fractures du condyle latéral

Elles surviennent deux fois sur trois chezl’enfant de moins de 8 ans. La douleur et latuméfaction siègent sur la face externe ducoude. L’aspect radiographique ne doit pastromper car la grande majorité du fragmentfracturé n’est pas ossifiée et celui-ci apparaîtdonc toujours de petite taille sur les clichésréalisés. L’évolution de ces fractures est toutd’abord marquée par le r isque deméconnaissance initiale sur les radios faitesen urgence, puis par leur caractère instablelié à l’insertion des muscles épicondyliens.Or, la réduction de cette fracture articulairedoit être anatomique pour rétablir lacongruence du coude et éviter le cubitus-valgus dont le retentissement fonctionnel estvariable. Le traitement des fractures nond é p l a c é e s e s t o r t h o p é d i q u e p a rimmobilisation plâtrée de type thoracobra-chial ou brachiopalmaire, associée à uneécharpe de Mayo ou un bandage de Dujarierpour 4 à 6 semaines. Les fractures déplacéessont le plus souvent traitées par réductionsanglante car le contrôle radiographique dela qualité de la réduction est d’interprétationtrès délicate. Dans ce cas, un brochageassocié à une immobilisation plâtrée doitêtre pratiqué.

Fractures de l’épicondyle médial

Elles surviennent chez l’enfant entre 7 et 15ans et entrent très souvent dans le cadred’une luxation du coude. Après untraumatisme indirect du coude avecmécanisme d’arrachement par traction surl’épicondyle médial apparaît une douleurlocalisée à la face médiale du coude.La radiographie met en évidence la fracture.En cas de fracture non déplacée, une

immobilisation 3 à 4 semaines doit êtrepratiquée. En cas de déplacement, cettedernière doit être réduite soit orthopédi-quement par manœuvres externes, soit aprèsabord chirurgical. Une contention parbroches ou vis est alors le plus souventréalisée, suivie d’une immobilisation plâtréede 3 ou 4 semaines. L’incarcération dufragment fracturé dans l’interligne articulairehuméro-ulnaire, surtout en cas de luxationdu coude associée, impose le recours à laréduction sanglante du fragment et à sonostéosynthèse par broches ou vis.

Fractures du condyle médial

Elles sont rares (2 à 3 % des fractures ducoude de l’enfant), mais souvent source deséquelles. Les signes cliniques siègent sur laface médiale du coude, mais seule laradiographie permet de réal iser lediagnostic. En l’absence de déplacementdans le foyer de fracture, un traitement parimmobilisation plâtrée est indiqué. Lesdéplacements fracturaires doivent êtreréduits sous peine d’aboutir à un cubitusvalgus et un enraidissement du coude.

FRACTURES DE L’EXTRÉMITÉSUPÉRIEURE DE L’ULNA

Tout comme chez l’adulte, les fracturespeuvent intéresser l’olécrâne ou l’apophysecoronoïde [11, 34].

¶ Fractures de l’olécrâne

Elles surviennent le plus souvent après untraumatisme direct et représentent 3 % desfractures du coude de l’enfant. Leurclassification se fait en fonction du siège detrait de fracture et du déplacement. Leurpronostic est lié aux lésions associées(fractures du radius ou de l’épiphysehumérale ou encore luxation du coude). Iciaussi, une fracture de type Monteggia doittoujours être éliminée par la lecture attentivedu cliché de profil du coude. Le risqueévolutif est surtout l’apparition d’unenraidissement du coude. Le traitement desfractures non déplacées consiste en uneimmobilisation par plâtre brachiopalmaire,coude fléchi à 90°, pendant 6 semaines. Encas de léger déplacement, le coude peut êtreinitialement immobilisé à 60°. Dans lesfractures très déplacées ou après échec dutraitement orthopédique, le traitementcomprend une réduction à ciel ouvert, suivied’un embrochage.

¶ Fractures de l’apophyse coronoïde

Elles ne représentent que 1 % des fracturesdu coude de l’enfant et leur pronostic est liéaux lésions associées (luxation du coudesurtout). Si le coude est stable, le traitementconsiste en une immobilisation par plâtrebrachiopalmaire, coude fléchi à 100° avec 45°de supination, pendant 4 semaines. Si lecoude est instable, la fracture de lacoronoïde doit être ostéosynthésée aprèsréduction d’un éventuel déplacement

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Page 9: Traumatismes du coude

fracturaire. En postopératoire, le membre estimmobilisé dans un plâtre brachiopalmairependant 4 semaines.

FRACTURES DE L’EXTRÉMITÉSUPÉRIEURE DU RADIUS

Contrairement à l’adulte, elles intéressentdans la grande majorité des cas (trois foissur quatre) le col du radius [32, 34] etreprésentent environ 7 % des fractures ducoude, survenant le plus souvent vers l’âgede 10 ans [5, 21].

¶ Anatomopathologie

Les fractures du col du radius sont classéesselon leur déplacement initial [11].

– Stade I : fracture non déplacée.

– Stade II : fracture avec bascule de fragmentproximal inférieure à 30°.

– Stade III : fracture avec bascule defragment proximal entre 30° et 60°.

– Stade IV : fracture avec bascule defragment proximal supérieure à 60°.

¶ Lésions associées

Les fractures de l’extrémité supérieure duradius accompagnent très fréquemment uneautre lésion traumatique du coude (40 % descas) qui doit donc être systématiquementrecherchée : fracture de l’olécrâne, luxationdu coude, fracture de la coronoïde ou del’épicondyle interne. L’atteinte associée duligament collatéral médial est aussifréquente, liée au mécanisme lésionnel.

¶ Diagnostic

L’impotence fonctionnelle fait suite à untraumatisme indirect du coude au coursd’un mouvement de valgus forcé enextension du coude. La douleur siège sur laface latérale du coude et l ’examenradiographique confirme le diagnostic. Unelésion associée doit être éliminée.

¶ Évolution

Bien traitée, la fracture du col du radiusévolue trois fois sur quatre vers la guérisonsans séquelle. Néanmoins, un enraidis-sement du coude ou une déformation encubitus-valgus par épiphysiodèse ou nécrosede la tête radiale peuvent survenir. Cescomplications sont plus fréquentes en cas defracture de la tête du radius que du col.

¶ Traitement

Le traitement des fractures non déplacéesfait appel à une immobilisation dans unplâtre brachiopalmaire pendant 4 semaines.Les fractures de type II sont traitées parréduction par manœuvres externes avecpression directe manuelle sur la tête radialeet la même immobilisation plâtrée. En casde fracture de type III, le même traitementpeut être tenté (un poinçon planté dans latête peut éventuellement aider à la

réduction), mais l’embrochage centromédul-laire ascendant selon Métaizeau sans aborddu foyer trouve ici une de ses meilleuresindications [29]. Dans les fractures de type IV,ce n’est qu’après échec de cette techniquequ’un abord du foyer est réalisé pourréduction à ciel ouvert et brochagecondyloradial.

Une immobilisation plâtrée accompagnel’embrochage, quelle que soit sa technique.Enfin, la résection de la tête radiale estformellement proscrite chez l’enfant.

PRONATION DOULOUREUSEDE L’ENFANT

Il s’agit d’une subluxation de la tête radialepar rapport au ligament annulaire radio-ulnaire [31]. Ce tableau est stéréotypé,fréquent, et de diagnostic facile. Il s’agit d’unpetit enfant, âgé de 1 à 5 ans, qui présente,après avoir subi une traction brutale dansl’axe du bras alors que le membre est enextension (souvent pour le faire monter surun trottoir...), une impotence fonctionnelledu membre. En effet, l’enfant ne se sertabsolument plus de son membre supérieur,conservant son coude immobile en extensionet pronation, l’avant-bras pendant le longdu corps (fig 16). La palpation douceretrouve les différents repères anatomiquesdu coude en position normale. Toutetentative de supination déclenche la douleurqui siège au coude. Les radiographies deface et de profil du coude sont normales.Cette association avec le mécanismelésionnel permet de poser le diagnostic depronation douloureuse et d’en réaliser letraitement.

Il faut, après avoir mis en confiance l’enfant,porter l’avant-bras en supination progressiveet en flexion du coude plus ou moinsassociées à une pression sur la tête radiale(fig 17). En cours de manœuvre, un ressautest perçu par l’examinateur (il peut aussiêtre audible) signant la guérison. Dès ladisparition de son appréhension, l’enfantreprend ses jeux en utilisant symétriquementses deux membres supérieurs confirmant,s’il en était besoin, le diagnostic dep r o n a t i o n d o u l o u r e u s e . A u c u n eimmobilisation ne doit être réalisée, mais lesparents doivent être informés du mécanismecausal pour éviter les récidives tout ensachant qu’il n’existe pas de risque deséquelle de cet accident.

17 Manœuvre de réduction.A. Poignet en position initiale : pronation complète.B. Mise progressive en supination et flexion du coude ; le ressaut est palpé par la main gauche de l’examinateur.C. La flexion complète du coude est retrouvée, témoignant de la réduction.

16 Attitude antalgique dela pronation douloureuse.

Urgences Traumatismes du coude 24-100-C-5031-018-B-10Radiodiagnostic

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Page 10: Traumatismes du coude

Luxations du coude

Ce sont des urgences fréquentes (environ10 % des traumatismes du coude del’adulte), touchant surtout l’adulte jeune aucours d’un accident de sport [9].

ANATOMOPATHOLOGIE

Trois types de luxations du coude peuventê t re dis t inguées : les luxat ions del’articulation huméroantibrachiale (luxationconjointe), les luxations isolées d’un des osde l’avant-bras (il s’agit à peu près toujoursde luxations de la tête radiale) et lesluxations huméroradio-ulnaires transversalesintéressant les trois articulations du coude(luxations divergentes) qui sont tout à faitexceptionnelles.

¶ Luxations huméroantibrachiales

Elles représentent la grande majorité desluxations du coude. Dans plus de 90 % descas, il s’agit de luxations postérieures, c’est-à-dire que le squelette antibrachial sedéplace en bloc en arrière sous la palettehumérale (fig 18). La luxation antérieure,beaucoup plus rare, peut être pure etsurvient alors dans un contexte malformatifou d’hyperlaxité pathologique ou associée àune fracture de l’olécrâne (luxationtransolécrânienne).

¶ Luxations de la tête radiale

Chez l’adulte, elles s’associent toujours à unefracture de la diaphyse ulnaire entrant dansle cadre d’une fracture de Monteggia. Chezl’enfant, même si la recherche de la fracturede l’ulna doit être systématique (fig 19), lesluxations isolées de la tête radiale existent.

¶ Luxations divergentes des deux osde l’avant-bras

Elles sont très rares et sont consécutives àl’enfoncement de l’humérus (tel un coin)entre le radius et l’ulna. Elles s’associentforcément à une rupture du ligamentannulaire.

LÉSIONS ASSOCIÉES

Une rupture du ligament collatéral médialest souvent retrouvée dans les traumatismescomportant un valgus forcé du coude. Ils’agit souvent d’un arrachement de soninsertion humérale, comme en témoigne lafracture-arrachement de l’épicondyle médial.Il peut également exister des fracturesassociées de l’épicondyle latéral ou ducondyle huméral.

DIAGNOSTIC

La forme prise pour description est laclassique luxation conjointe postérieure.

¶ Interrogatoire.

Ces luxations surviennent le plus souventchez l’adolescent ou l’adulte jeune lors d’untraumatisme indirect violent au cours d’unechute sur la main, le coude en hyperex-tension et supination [26, 28].

¶ Examen clinique

La douleur es t t rès importante e tl’impotence fonctionnelle est totale. Lepatient se présente dans la position destraumatisés du membre supérieur, le coudeen demi-flexion. Initialement, il existe deprofil une déformation caractéristique dumembre supérieur. L’avant-bras estraccourci, l’axe du bras tombant face au tierssupérieur de l’avant-bras et le diamètre ducoude est très augmenté. La palettehumérale fait saillie en avant et l’olécrâne enarrière. La palpation montre la perte destrois repères anatomiques fondamentaux ducoude (cf supra).L’état cutané doit être précisé et l’examend o i t re c h e rc h e r d e s c o m p l i c a t i o n svasculonerveuses.

¶ Examen radiographique

Il comporte un coude de face et de profilaboutissant facilement au diagnosticl é s i o n n e l . L ’ e x i s t e n c e d e l é s i o n sostéoarticulaires associées est systémati-quement recherchée.

ÉVOLUTION

¶ Évolution favorable

Réduite en urgence et correctement traitéeet surveillée, la luxation du coude a un bonpronostic [9, 22].

¶ Complications

Complications immédiates

Les complications artérielles à l’origine dephénomènes ischémiques sont très rares,même si la rupture sous-adventitielle del’artère humérale est possible. L’atteinte desnerfs médian ou radial est exceptionnelle,alors que celle du nerf cubital est plusfréquente.La survenue d’un syndrome de Volkmannsous plâtre est possible et doit êtresystématiquement recherchée (cf supra).Des fractures peuvent s’associer à la luxationdu coude : fracture de l’épicondyle médial,de la coronoïde et de la tête radiale enparticulier [3]. La fracture de l’épicondylemédial peut aboutir à l’incarcération dufragment dans l’interligne huméro-ulnairelors du traumatisme ou après réduction dela luxation.Enfin, une radiographie de contrôle sousplâtre à la 48e heure doit vérifier la pérennitéde la réduction.

Complications secondaires

À terme, le risque majeur est la survenued’un enraidissement du coude qui peut allerjusqu’à l’ankylose complète (absence totalede mobilité). Ceci est lié aux lésionsassociées osseuses (fractures parcellaires) etsurtout à l’atteinte des parties mollespériarticulaires (muscles, ligaments etcapsule) qui se rétractent lors de leurcicatrisation. Le développement d’unostéome post-traumatique par ossification del ’hématome antér ieur sous-périostéintervient aussi de façon prépondérantedans certains cas (fig 20).La survenue de luxations récidivantes esttrès rare, correspondant à une instabilitéchronique postérolatérale [30].

TRAITEMENT

¶ Traitement de la luxation

La réduction d’urgence s’impose. Elle peutêtre réalisée soit sous analgésie, soit deprincipe sous anesthésie générale, ce quipermet de tester la stabilité du coude aprèsla réduction. Une courte immobilisationd’environ 10 jours dans un plâtrebrachiopalmaire avec 90° de flexion estensuite nécessaire pour favoriser lacicatrisation des lésions capsuloligamen-taires. S’il est bien entendu indispensable de

18 Luxation postérieuredu coude. Aspect radiogra-phique de profil.

19 Fracture de Monteggia chez un enfant de 6 ans :fracture de la diaphyse de l’ulna avec luxation de la têteradiale.

A. Aspect radiographique de profil.B. Aspect radiographique de profil au troisièmemois postopératoire (traitement orthopédique parréduction et immobilisation plâtrée).

*A

*B

20 Séquelle d’un trauma-tisme du coude avec luxa-tion postérieure du coudeet fracture de l’apophyse co-ronoïde : enraidissement ducoude avec ostéome anté-rieur. Aspect radiographi-que de profil.

24-100-C-50 Traumatismes du coude Urgences31-018-B-10 Radiodiagnostic

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vérifier par une radiographie de face et deprofil que la réduction du coude aeffectivement été obtenue, il est encore plusessentiel de contrôler à nouveau les rapportsanatomiques du coude après la réalisationdu plâtre brachiopalmaire car la récidiveimmédiate de luxation est possible, surtoutsi le plâtre est fait avec un angle de flexioninsuffisant. La prescription d’un traitementmédical par indométacine (75 mg/j pendant5 à 15 jours) participe à la prévention dud é v e l o p p e m e n t d e s o s t é o m e s . L amobilisation active du coude sera ensuitedébutée, le plus souvent avec l’aide d’unkinésithérapeute. La progression del’amplitude de mobilité du coude doit êtrevérifiée en consultation afin d’adapter leprotocole en fonction des progrès dumalade.Lorsque l’épicondyle médial est fracturé, sonéventuelle incarcération dans l’interligne

huméro-ulnaire impose l’abord chirurgicaldu coude pour réduire et ostéosynthéserl’épicondyle médial incarcéré.

¶ Traitement de l’enraidissementséquellaire du coudeIl est avant tout préventif, grâce à uneimmobilisation courte, une rééducationprécoce bien menée et, éventuellement, untraitement médical luttant contre l’apparitiond’ostéomes.Si, malgré ces précautions, le coude resteenraidi à distance de l’accident, se pose leproblème de l’indication chirurgicale pourtenter d’améliorer la mobilité du coude. Ilfaut bien savoir que la perte définitive d’unedizaine de degrés d’extension du coudeaprès luxation est quasi systématique et nenécessite aucun traitement (le patient doitêtre prévenu d’emblée de cette évolution).Ce n ’es t qu ’après avo i r éva lué le

re tent i ssement fonct ionne l rée l del’enraidissement et déterminé son origineexacte, que l’on pourra envisager sontraitement chirurgical qui fait appel auxrésections d’éventuels ostéomes et à lapratique d’arthrolyse (libération desrétractions et des adhérences, en particuliercapsuloligamentaires). Toutefois, un délaiminimal de plusieurs mois à 2 ans (selon lesauteurs) doit être respecté sous peined’aboutir à un échec, quelle que soit latechnique utilisée.

¶ Traitement des luxationsdu coude chez l’enfant

La tendance à l’enraidissement étant moinsm a r q u é e c h e z l ’ e n f a n t , l a d u r é ed’immobilisation sera plus longue (enmoyenne 3 semaines). On évitera touterééducation.

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