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Le journal des étudiants en journalisme de Gennevilliers.
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M
le journa
lMars 2014Numéro 5
ADOPTE UN MAIRE
« Le seul espoir,c’est le FN »
Un maire pour27 habitants
Copé Collé à Meaux
Les municipalesen 5 questions
L’abstentionnisme,favori des élections
POURQUOI VOTER ? Pour montrer son mécontentement au gouvernement ? Pour désenclaverun maire encastré dans son fauteuil ? Les raisonsde ne pas voter sont, en apparence, plus faciles àtrouver. Perte de confiance dans la classe poli"que,colère contre le gouvernement (encore), désintérêtpour la vie de sa commune, paresse du dimanche…En 2008, l’absten"on avait a#eint 35% et 31% àchaque tour des municipales, et même plus de 50%dans certaines villes de région parisienne. Le gouvernement tremble et évidemment deux par"s attendent au tournant : une UMP fracturée et un FNaux aguets. Mais les par"s oublient une chose : les municipalessont très éloignées des querelles na"onales quifont les choux gras des médias. Un député, invitédu Master de journalisme le mois dernier, l’a trèsbien résumé : « la vieille dame, elle s’en fiche de savoir si la cro"e de chien est de droite ou de gauche,ce qu’elle veut, c’est que la cro"e soit ramassée. »Et ces élec"ons sont le premier grand rendezvousna"onal depuis les élec"ons présiden"elle et législa"ves de 2012.
L’édito par Vincent Manilève
Sommaire3 Les municipales en 5 ques"ons •
4 Suismoi sur Twi#er,•je ferai de toi un électeur
6 Le maire est dans le pré•
7 Absten"on : « le choix du •mécontentement »
8 Sevran : place aux citoyens•
10 Les élec"ons en chiffres •
12 Marke"ng banlieusard•
14 Copé collé à Meaux •
16 Tel maire, tel fils•
18 Les maires •font de la résistance
19 « L’avenir, c’est le FN »•
Rédacteur en chef : Nordine NabiliRédacteur en chef adjoint : Vincent ManilèveSecrétaire de rédac!on :Sala Sall
Journalistes : Anaëlle Domi"enAssia LabbasBap"ste PirojaPa#aroneFlorian MichelÉline UlysseVincent Souchon(École de journalisme de Gennevilliers)
2 - M Le journal - mars 2014
Les Municipales en 5 questions
1 Un scrutin à enjeux locaux ou nationaux ?« Le contexte na!onal ne peut pas ne pas se jouer »,
explique Fréderic Dabi, directeur général adjoint de l’IFOP, àl’AFP. Les mauvais chiffres du chômage ou de la reprise de lacroissance en France ne seront pas neutres dans le choix du bulle#n de vote. Des analyses à nuancer pourtant avec un récentsondage réalisé par l’Ifop pour le JDD au début de l’année : 64%des Français voteront en fonc#on de considéra#ons locales.
À un mois du scru!n, l’impopularité record de François Hollande, la poli!que du gouvernement sous les feux des cri!ques, les divisions à droite ou la montée du Front Na!onal pèseront certainement dans la balance. Tour d’horizon en 5 ques!ons des enjeuxdes municipales.
@Bap!stePiroja
3 - M Le journal - mars 2014
2Doit-on s’attendre à unvote-sanction ?Les résultats des précédentes élec
#ons locales semblent aller à l’encontre dupar# au pouvoir de l’époque. Prenons deuxexemples. Il y a six ans, Nicolas Sarkozy avaitessuyé un revers avec une ne$e victoire de lagauche qui avait empoché 58% des 269 villesde plus de 30 000 habitants. Aussi, deux ansaprès l’élec#on de François Mi$errand, lagauche avait perdu des dizaines de villes en1983. 3La droite va-t-elle en profiter ?
Pas vraiment, si l’on en croit les ténors de l’UMP. Lavague bleue annoncée par JeanFrançois Copé il y a
quelques mois s’est essouflée. Dans les rangs du par# d’opposi#on, l’état d’esprit est davantage à la prudence. Plus encore,certaines grandes villes comme AixenProvence, Avignon,Bayonne et même Marseille pourraient basculer à gauche,comme le rapporte France TV Info.
4Qu’attendre du Front National ? C’est un chiffre record qui a fait beaucoup
parler de lui au mois de février. Plus d’un #ers desFrançais (34%) affirment adhérer aux idées duFront, révèle la TNS Sofres. Une adhésion que Marine Le Pen entend bien conver#r dans lesurnes pour les municipales. Son par# sera présent,en principe, dans plus de 750 villes de plus de1000 habitants, rapporte l’AFP. On vise ainsi, ausein du Front Na#onal une « dizaine de villes »,comme la très média#que HéninBeaumont ouencore Miramas, Istres et Carpentras.
5L’abstention sera-t-elle lagrande gagnante ? Un électeur sur deux environ (52%) s’en
gage à aller voter au 1er tour le 23 mars selon unsondage CSA. Si ces es#ma#ons se confirmentdans les urnes, la par#cipa#on serait ne$ementinférieure à celle de 2008 (66,5%) comme le signale l’AFP. Dans le sillage de la défiance à l’égarddes poli#ques, les Français pourraient bien s’illustrer par une absten#on massive. YvesMarieCann du CSA souligne par ailleurs que l’électoratde gauche serait le moins concerné par ce vote,seuls 57% se préparant à accomplir leur devoirélectoral, contre 64% à droite.
Suis-moi sur Twitter, je ferai de toi un électeur
En 2008, date des derniers scrutins municipaux, lesréseaux sociaux Facebook et Twitter étaient austade embryonnaire. Depuis, ces outils de communication 2.0 se sont démocratisés. Pour donner plusde visibilité à leur liste et à leur programme électoral, de plus en plus de candidats tentent l’expérience du web.En 6 ans, Internet passe de simple vitrine moderneà un véritable outil de campagne. Aujourd’hui,76,7% des maires ont une présence sur les médiassociaux et 57% d’entre eux privilégient le canal Facebook pour diffuser leurs informations, selon lebaromètre Augure 2013.Il est certain que cette élection sera marquée parune bataille numérique, comme le souligne, Charlotte Bousser sur lopinion.fr, chargée des réseauxsociaux pour la candidate UMP Nathalie KosciuskoMorizet : « la campagne se jouera autant sur le terrain et dans les médias que sur le web. »
Opération séduction
Mailing, programme participatif en ligne… tous lesmoyens sont bons pour séduire les électeurs. Lemarketing numérique offre aux prétendants unearme de militantisme massive. Un bon militant saitrécolter aujourd’hui le mail des sympathisants ou
de ceux qui sont susceptibles de l’être. Dans le jargon, on appelle cela « l’hameçonnage ». Puis vientla technique dite de « l’embrasement ». Lescontacts obtenus sont ensuite classés par affinitésafin de bombarder les électeurs de mails, d’informations militantes, de tracts, de petites vidéos… àla gloire du candidat, évidemment. À partir de logiciels simples, les équipes de campagne peuventsavoir si le mail a été lu ou non et connaître la fréquence de consultation de leurs liens. D’autres candidats utilisent des moyens moins sophistiqués mais tout aussi efficaces. C’est le casd’Olivier AudibertTroin, candidat à la mairie deDraguignan, qui a opté pour l’humour. Grâce à Bitstrips, l’une des applications les plus populaires surFacebook. Métamorphosé en personnage de BD, ilest devenu présentateur de son propre JT de campagne, attaquant au passage ses principaux rivaux.Ses vidéos ont obtenu plus de 3 000 vues.
Viser les indécis
L’application imagée a été également utilisée par leMinistère de l’Intérieur sur Facebook pour inciterles jeunes à s’inscrire sur les listes électorales. Sensibiliser les électeurs, c’est aussi l’apanage del’équipe de communication de JeanMarc Ayrault.
À un mois des élections municipales, les candidats au siège du premier élu de la ville,à travers le porte-à-porte, les tracts sur les marchés et les traditionnels meetings mènentcampagne. Mais pour la première fois, à l’occasion d’une élection locale, les prétendantsinvestissent la toile.
4 - M Le journal - mars 2014
« Voter, c’est tweeter en vrai » ou « Vous aimez liker ?Voter » : voici les deux slogans de la campagne, lancée le 17 février par le gouvernement. Objectif :mobiliser sur les réseaux sociaux les électeurs afinde lutter contre l’abstention.Beaucoup pensent qu’il serait dommage de se priver de ces moyens de communication. Et les politiques ne dérogent pas à la règle. À l’approche d’unenjeu électoral, les candidats deviennent particulièrement actifs sur le net. Fin septembre, Augure,un éditeur de logiciel de gestion des relations publiques, a publié le premier baromètre de l’influence digitale des maires des 30 villes les plusimportantes de France. Et c’est le maire UMP deNice qui a le pouce le plus agile. Avec plus de 34300 abonnés sur Twitter, plus de 19 000 amis surFacebook et une étonnante réactivité numérique,Christian Estrosi est l’élu de France le plus influentsur les réseaux sociaux.
Réticences
Selon Pierre Guillou, le fondateur du site Elus 2.0,les réseaux sociaux n’ont pas uniquement une vocation de diffusion unilatérale d’informationscomme les autres outils de campagne traditionnels(radio, télévision , tracts). Ces nouveaux moyens decommunication favorisent un dialogue horizontalentre les citoyens, les élus et les militants. Ils apportent un changement profond dans l’exercice politique, tant au niveau national que local.
À travers sa société Idéose, Pierre Guillou initie lesélus et les collectivités locales au web. Depuis l’année dernière, il a mis en place une formation surles stratégies de webcampagne à destination descandidats aux municipales.Même si le spécialiste reconnaît que la plupart desmaires ont une présence sur Internet, certains élusrechignent à entrer dans la mouvance des réseauxsociaux. Pour Pierre Guillou, certains politiques ont uneimage erronée de ce que peut apporter Facebookou Twitter qui ne sont pour eux qu’un moyen defaire du « buzz ». Un jugement que confirme Phillipe Vittel, candidat à la mairie de La Seyne (Var),« Je préfère largement Facebook à Twitter, expliquele candidat UMP sur le site du métroplevar.fr. Il fautfaire extrêmement attention. C’est en tout cas ceque j’ai appris du désastre du tweet de JeanSébastien Viallate. » Le 13 mai dernier, le députémaireUMP, dans un tweet avait fait le parallèle entre lesdescendants d’esclaves et les casseurs, suite à desviolences commises sur la place du Trocadéro, àl’occassion du sacre du PSG.Les réseaux sociaux se révèlent être un outil destratégie de campagne pertinent. Mais mal contrôlés, ils deviennent un espace de dérapage. Maisquelle que soit leur influence, ils n’ont pas encoreremplacé les rencontres en chair et en os.
@ElineUlysse
5 - M Le journal - mars 2014
Le maire estdans le pré
On arrive à Charmont par la route de Mantes. Coincéentre les champs, le village respire la campagne. Gadoue,tracteurs, et fermes à perte de vue pour un hameau quifait office de commune. 27 habitants peuplent lesquelques maisonne"es accoudées à la départementale.« Vous l’aurez compris, Charmont est pe!t et tourne beaucoup autour de ce#e route », explique Rodolphe Thomassin, maire depuis 3 ans.Sous son grand manteau noir, l’homme de44 ans a posé seschaussures pleines deboue pour nous répondre. « Je suis agriculteur et donc à moncompte. Ça me laisseun peu de temps pourm’occuper des affairesdu village. » Présent àla mairie une à deuxfois par semaine, lecharmontois passe auminimum quatreheures par semainesans compter les événements excep$onnels et autrescommissions. Le tout pour une indemnité de 150 eurospar mois. Il reste l’un des rares agriculteurs de la région àavoir la fonc$on de maire. « On est dans une région trèsagricole et pourtant, nous ne sommes pas très nombreuxà être dans les mairies », se désoletil.
Changement en perspec!ve
Si tout semble calme, le changement est pourtant enmarche. Depuis le 17 mai 2013, la loi a évolué et le conseilmunicipal va passer de 9 à 7 membres pour les communesde moins de 100 habitants. « Ça ne change pas grandchose pour nous, on doit aller chercher des gens dans levillage qui sont compétents et surtout qui ne par!ront pasau bout de 2 ou 3 ans », constate Rodolphe Thomassin.Parmi les autres modifica$ons, il est maintenant interditde voter pour quelqu’un qui ne s’est pas présenté.
Dans le hameau, les voca$ons sont difficiles à trouver.« Quand on a des choses à dire, on le dit au maire. Tout lemonde se connaît alors ça va vite », détaille une habitantequi ne voit pas d’intérêt à se présenter pour une place auconseil. La proximité avec les habitants permet de simplifier la ges$on de la commune et les problèmes sont forcément à pe$te échelle. Pas de piscine, pas d’école, pas
d’employés municipaux,le budget est minusculemais il doit être géré.« On fait a#en!on, on apar exemple installé unradar pédagogique pourla sécurité du village.Nos dépenses concernent surtout la rénova!on des équipementsextérieurs », argumentele maire.
Un seul absten!onniste
Pour les élec$ons demars, rien ne semble
presser. Celui qu’on est venu chercher pour remplacer aupied levé l’ancien édile, contraint de renoncer à la fonc$onsuite à un déménagement, devrait rempiler pour un nouveau mandat. « Tant que je suis dans la discussion avec leconseil et les habitants, tout va bien et on devrait con!nueravec la même liste ». On est bien loin de la commune voisine qui compte 300 habitants pour 4 listes et 2 ou 3 candidats seuls. Pourtant, les charmontois montrent un réelintérêt pour les élec$ons. Les taux de par$cipa$on dépassent 90% à chaque élec$on.Malgré tout, Rodolphe Thomassin a un regret. « Le préfetnous a obligé à rentrer dans l’intercommunalité et ça afait monter les impôts locaux. C’est le premier pas vers unra#achement de notre village à une autre commune. » Sipour l’instant la dispari$on de Charmont n’est pas à l’ordredu jour, à terme, le village pourrait se perdre comme uneaiguille dans une bo"e de foin administra$ve.
À 50km de Paris, Charmont (Val d’Oise) est la plus pe!te commune d’ÎledeFrance avec27 habitants. Après l’élec!on du 23 mars prochain, 25% des villageois seront conseillersmunicipaux.
@FlorianMchl
6 - M Le journal - mars 2014
L’abstention : « le choixdu mécontentement »
Comment expliquezvous le phénomène de l’absten"on ?C’est un comportement qui touche toutes les sociétésdémocra!ques depuis 30 ans. Il est révélateur dedeux tendances sociologiques. D’une part on assisteà une crise de la représenta!on poli!que : la sociétévit dans la défiance de ses dirigeants. D’autre part il ya une profonde recomposi!on du rapport au vote,avec des citoyens de plus en plus cri!ques qui n’agissent plus par idéologie. L’absten!on est le choix dumécontentement, vote sanc!on contre un pouvoirpoli!que insa!sfaisant.
Dans quelle mesure les élec"ons municipales sontelles touchées par ce phénomène ?Les seules élec!ons qui con!nuent de passionner lesfoules ce sont les présiden!elles, on les surnommed’ailleurs “les reines de la Vème République“. Toutes
les autres élec!ons enregistrent des records d’absten!on. Dans le cas des municipales, on a affaire à un vraiparadoxe : les études montrent que les gens aimentleur maire et lui accordent une grande confiance etpourtant ils sont peu à se déplacer pour voter.
Quelles solu"ons préconisezvous pour lu#er contrel’absten"on ?Il faut commencer par faciliter au maximum toutes lesformalités administra!ves nécessaires pour voter : lesinscrip!ons, la procura!on... etc. Ça ne suffit pas cependant. Sur le fond, et c’est la par!e la plus difficile, ilest urgent de rétablir un lien de confiance entre lesFrançais et la poli!que. Les derniers sondages Cevipofindiquent que 89 % des Français considèrent que leshommes et femmes poli!ques ne se préoccupent pasd’eux. Ces chiffres sont alarmants.
La mise en place du vote obligatoire seraitelle unesolu"on?Le vote obligatoire existe en Belgique parce qu’il estenraciné dans une culture poli!que par!culière. Jedoute que ce système coerci!f fonc!onne vraimenten France, où le vote est plus considéré comme undroit que comme un devoir.Par ailleurs, il faut faire a%en!on à ce que l’on souhaite. L’obliga!on de voter a tendance à renforcer l’expression des votes protestataires pour des par!san!système ou extrémistes.
Pensezvous que la reconnaissance du vote blancpourrait changer les choses ?Ce%e reconnaissance est une bonne chose mais atten!on, le vote blanc n’est toujours pas comptabilisé.On va simplement le dis!nguer du vote nul. C’est unemeilleure prise en compte des opinions des votantsmais il est trop tôt pour dire si cela va inciter les absten!onnistes à retourner dans les bureaux de vote.
Anne Muxel, docteure en sociologie et directrice de recherche en science poli"que, étudie l’absten"on depuis plus de 15 ans pour le CNRS. Elle tente de mieux comprendred’où vient l’absten"onnisme et pourquoi il con"nue de gagner du terrain, au point d’êtresurnommé “premier par" de France”.
@_Souche_
7 - M Le journal - mars 2014
Sevran :Place aux citoyens
L’une des villes les plus pauvres du pays est aussicelle où on vote le moins. Sevran en SeineSaintDenis compte plus de 50% d’abstention aux dernières municipales.Pour inciter plus d’habitants à voter, plusieurs candidats se bousculent.La commune dirigée par Stéphane Gatignon (EELV),qui n’avait pas hésité, en 2012, à se mettre en grèvede la faim pour récolter des aides de l’État, voudraitplus de changement.Parmi les candidats, Clémentine Autain, représentele Front de Gauche. Ses tracts insolites avec desimages de clémentines flanquées du slogan : « Desvitamines pour les Sevranais », ont amusé le web.Mais audelà des plaisanteries, les regards sont surtout tournés vers un mouvement qui souhaite incarner le futur de la ville. Il s’agit du MCS(Mouvement Citoyen de Sevran). Il propose de redonner un plus grand pouvoir de décision aux habitants. Son projet est de rédiger des promessesélectorales à partir de leurs attentes et besoins.L’idée n’est pas nouvelle. Il s’agit de community organizing, un concept importé des ÉtatsUnis etfondé sur l’implication de résidents des quartierspopulaires dans les événements et projets de leur
ville.Pour le voir à l’œuvre à Sevran, il faut pousser lesportes des brasseries de la ville.
Une image de petit débutant
Début février, dans un café au cœur des quartiersaisés de la ville, un homme agite les bras face à unepoignée d’habitants.Il s’agit de Mohammed Chirani, 36 ans, lui aussi candidat aux prochaines municipales.Droit comme un i, dans un costume bleu roi au pliimpeccable, il s’adresse à son maigre comité de soutien qui acquiesce à chacune de ses déclarations.Sous ses airs de gendre idéal, il n’hésite pas à distribuer quelques bises à son auditoire composé, cejourlà, pour la plupart de femmes. Tutoiement, discussions à voix basse autour d’un thé ou d’un café,dans un coin de la salle à la lumière tamisée, l’ambiance est amicale voire familiale.Une stratégie de séduction pour un candidat quicherche à tout prix à montrer qu’il est proche deshabitants même s’il n’a jamais résidé dans la ville.Né dans l’Ain, il a grandi en Algérie jusqu’à l’âge de19 ans, avant de revenir en France finir ses études
À l’approche des municipales, de plus en plus de mouvements citoyens voient le jour. Plu-sieurs d’entre eux sont en campagne pour briguer des mairies en banlieue. C’est le cas àSevran.
8 - M Le journal - mars 2014
et décrocher un emploi dans la capitale.Diplômé de Science Po et ancien délégué du Préfetde SeineSaintDenis pour Sevran, Chirani se définitcomme un compétiteur « plus authentique » queses adversaires. En 2007 il possédait encore sa carteà l’UMP avant de quitter le parti pour cause de désaccord politique avec Nicolas Sarkozy. Depuis, il sedit apolitique et grand militant pour la banlieue.
Des habitants qui espèrent
Parmi ceux qui ont fait le déplacement, un groupede femmes dont Wassila, 54 ans, éducatrice, Soraya,49 ans, entrepreneur, Selma, 54 ans, distributricede journaux et Leila, 38 ans, mère au foyer. Ellesviennent de couches sociales différentes mais onttoutes les mêmes attentes électorales. « Noussommes de ferventes militantes du mouvement citoyen mais avant tout, nous sommes des mamanssoucieuses de l’avenir de nos enfants et qui avonsenvie que l’image de Sevran s’améliore », lâche Soraya, d’un ton déterminé.Certaines d’entre elles vivent dans la ville depuis delongues années comme Leila qui y réside depuis1980. Et pour elle, Sevran n’a pas changé. La quinquagénaire dit avoir toujours noté un « favori"sme »de la part de la municipalité envers les quartiersSud, composés de zones pavillonnaires et qui, selonelle, bénéficient d’écoles mieux tenues et d’unemeilleure écoute de la part du maire. Et cela au détriment des quartiers Nord, dont Les Beaudottes,qui concentrent la plupart des logements sociaux
de la ville. Toutes habitantes de ce secteur, elles justifient leuradhésion au mouvement citoyen par le fait qu’ellesne se sentent plus proches d’aucun parti politiquemais militent pour un combat plus collectif : « Nousne sommes plus ni pour la droite ni pour la gauche.S’il y a de bonnes idées à droite, nous prenons, s’il yen a à gauche, nous prenons aussi, l’important étantde trouver des solutions concrètes pour la ville », argumente Wassila.Mais avant de trouver des idées « concrètes » pourla ville, le mouvement citoyen doit se construire uneimage crédible pour pouvoir briguer le poste demaire. Pour cela, ses premières mesures neconvainquent pas encore.L’un des sujets auxquels Mohammed Chirani veuts’attaquer est le taux de plus en plus alarmant duchômage chez les jeunes. La ville compte 35% dechômeurs chez les moins de 25 ans.Pour y remédier Chirani souhaite transformer leshalls d’immeubles des quartiers difficiles en pépinière d’entreprises. Autrement dit, pour lui, si lajeunesse ne trouve pas de travail, c’est les entreprises qui viendront à elle. Une mesure qui paraîtnaïve lorsqu’on sait que la problématique est bienplus complexe que ça : les jeunes les plus en difficultés sont souvent ceux qui n’ont ni formation, nidiplôme. Dans les prochaines semaines, Chirani devrait dévoiler le reste de son programme et essayerde prouver qu’il n’est pas un amateur au milieu dela bataille GatignonAutain.
@SashaSall
9 - M Le journal - mars 2014
les électionsInégalités, manque de parité hommes-femmes, cumul des mandats dans l’espace et dansle temps... Les élections municipales, bien que locales, posent des question d’ordre national. Et puisque le data-journalisme est à la mode, décryptage en chiffre et en cartes.
10 - M Le journal - mars 2014
La parité en mairie ce n’est pas pour toutde suite : actuellement les femmes nereprésentent que 17% des maires de lapetite couronne Parisienne. Elles nesont que 23 contre 114 hommes.
Les maires UMP sont les plus nombreux en petite couronne mais ceux du PS et du parti communiste, additionnés, les dépassent. Les autres partis n’additionnent que 29 mairesen tout.
11 - M Le journal - mars 2014
en chiffres
Ils sont 17 à avoir enchainé au moins4 mandats depuis le début de leur prisede pouvoir. Les plus anciens sont lesmaires de Sceaux, Créteil et Neuilly-sur-Marne, à la tête de leurs mairiesrespectives depuis 36 ans cette année.
En France il n’existe aucune limiteau nombre de mandats municipaux, ducoup certains maires sont à latête de leur ville depuis plusieurs décennies. Qui sont ces mairesaccrochés à leur fauteuil dans lapetite couronne ?
Il est enfin intéressant de remarquer que l’intégralitéde ces 17 vieux habitués de la politique locale sont deshommes.
le marketingbanlieusard
Que vaut le terme banlieue dans une électionmunicipale ? Hormis jouer la caution adjoint ausport, à la jeunesse ou la petite en enfance ?Non pas que ces responsabilités soient moinsimportantes mais pourquoi voiton moins de filsd’ouvriers ou filles d’immigrés aux finances ouau poste de premier adjoint ? Parfois la représentation sociale d’une ville, de sa populationnourrie des quartiers populaires et des zonespavillonnaires ne fonctionnent pas. KarimBouamrane, candidat PS à la mairie de SaintOuen a grandi et fait évoluer sa carrière politique en banlieue. Après être lui aussi passé parla case d’élu bénévole aux sports et à la jeunesse, il continue de grimper sur l’échelle politique. Cette année, à 41 ans, il mène la listesocialiste “SaintOuen pour une ambition nou
velle”. Pour cette élection, le candidat a décidéde muscler sa candidature, car lorsqu’on vientdu Vieux SaintOuen et de la cité Emile Cordonon a plus de mal a remporté une élection de sesseuls bras. À ses côtés des personnalités politiques importantes se rassemblent. C ’estcomme cela qu’on a retrouvé, un lundi soir, salleBarbara à SaintOuen. Christine Taubira etBruno Leroux pour son grand meeting.
Typique en SeineSaintDenis
Le trombinoscope des maires de la SeineSaintDenis est plutôt homogène. Un profil redondant: homme, blanc, la cinquantaine, diplôméd’études supérieures. Ce constat suscitequelques interrogations. Car le département est
Parfois mise de côté, parfois revendiquée, la banlieue a su trouver sa place au sein de lapolitique française et questionne notamment la représentativité des élus dans les collecti-vités locales.
12 - M Le journal - mars 2014
Corinne Matusiak
jeune, héritier d’une culture ouvrière et de l’immigration des années 1960. La représentationsociale dans les mandats locaux ne fonctionnepas ici. Olivier Mascleta enquêté surla municipalitécommuniste deGennevi l l iers .Dans son ouvrage intituléLa Gauche etl e s c i t é s . E n quête sur unr e n d e z v o u sm a n q u é , l eprofesseur desociologie analyse la représentation de lapopulation au sein de la liste communale :« Tout se passe en effet comme si le PCF et sesreprésentants locaux avaient méconnu ce “nouveau prolétariat de banlieues ”, dont une largepartie est constituée des fils et des filles issus del’immigration algérienne et marocaine.»
Banlieue pour tous
Le souvenir des émeutes de 2005 colle encoreaujourd’hui à la banlieue. Lassé d’être stigmatisé par les politiques, d’être « traité qu’à desfins électoralistes et polémiques», un collectifmené par AbdelMalik Djermoune a décidé de
lancer fin 2013 le parti de la banlieue. Il dénonce ce marketing de banlieue utilisé par lespolitiques, plus précisément un «marketing de
f a c i è s . » « O ninscrit sur seslistes des noirs,des maghrébins, ou desreprésentantsde tels ou telscultes pour ladiversité [...]ce sont desgens issus d’unchoix marketing au lieud’un vrai travail de terrain». Et pourcontrer cela,
le parti de la banlieue a décidé de promouvoirla diversité de faciès mais aussi celle des idées.Car «les villes sont dominées par des parties»rajoute le président fondateur. C ’est la notionde multiculturalisme que le nouveau parti défend «pour que l’expression des Banlieues ne sefasse pas qu’à travers des émeutes.» À ce jour,douze sections se sont implantées sur l’hexagone à Romainville, au Blanc Mesnil et à Aubervilliers. Mais aussi à Lyon, à Marseille et àGrenoble. Réveiller la démocratie en banlieue, une nécessité qui amènerait un réel pouvoir d’action auxhabitants, ceux qui vivent en banlieue ceux quila font. Des idées émergent, des propositions ouplans banlieues sont discutés. Mais si la solution était de tout arrêter. D’arrêter d’être aveuglé par le prisme banlieue pour l’emploi,l’intégration, la culture. Car l’envie de réussirdans la vie, de trouver un travail, de profiter dessalles de cinéma ou des librairies de quartiersconcerne un bon nombre des citoyens, au delàdes étiquettes qu’on essaye de justifier à tordet à travers pour mieux régner.
@anaelledom
13 - M Le journal - mars 2014
Le 10 février, le meeting de K.Bouamrane fait salle comble
Une tour, une casquette le nouveau parti se joue des clichés
copé collé À meaux
1995, un jeune trentenaire fait tomber la maison socialocommuniste de Meaux, en place depuis 1977. Après unéchec à VilleneuveSaintGeorges, c’est dans la SeineetMarne qu’il avait jeté son dévolu. Ce nouveau maire s’appelle JeanFrançois Copé et il vient de loin. Né dans lesHautsdeSeine, il avait débarqué quelques années plustôt à Meaux pour succéder à Guy Drut comme chef defile de l’opposi"on. Une image de parachuté qui lui collera à la peau pendant plus de deux ans. Invité du BondyBlog Café au mois de février, JeanFrançois Copé est revenu sur ces débuts difficiles. « Avant de devenir maire,j’ai fait du porte à porte pendant trois ans. » Le présidentUMP aime raconter ce qu’il appelle son « épopée » auxcôtés de « pe!ts jeunes en qui personne ne croyait. » Élumaire en 1995, il remplacera son ami Guy Drut à l’Assemblée na"onale la même année, faisant de lui le plus jeunedéputé de l’hémicycle.2014, l’histoire semble se répéter mais à gauche ce$efois. Comme tous les samedis depuis quelques mois, surle marché de Meaux, un jeune homme a décidé d’écourter sa grasse ma"née. Entre l’étal d’un producteur dePassyenValois et le volailler local, il déambule en costume, distribue des tracts, serre des mains, souritavec une étonnante assurance et la cascade d’éléments de langage d’usage. Peu le reconnaissent encore, mais ce « gamin » de 22 ans espère lui aussiréussir l’exploit de ravir le siège du maire en place,JeanFrançois Copé. « Être jeune est un atout, il faut dé
poussiérer ce#e classe poli!que clientéliste et dépassée », explique Bas"en Marguerite, encore étudiant àScience Po. Et sa détermina"on est incontestable : ilvient d’entamer son cinquième mois de campagne. Enoctobre dernier, il emménageait dans la ville et commençait à ba$re le pavé avant même d’avoir été officiellement nommé par le par" socialiste.Un a$errissage un peu mouvementé au sein d’une sec"on locale agacée, ce qui n’a pas découragé le jeune socialiste. Le secrétaire Pierre Dupuis a mêmedémissionné en janvier pour rejoindre la liste du Frontde Gauche. « C’est une affaire interne au PS », expliqueJeanFrançois Dirringer, cotête de liste PCFFDG, mais sil’on en croit certains socialistes, Bas"en Marguerite a étébombardé ici pour restructurer la sec"on PS sur le longterme. Sur la page Facebook de la sec"on locale, PierreDupuis, qui lui aussi ambi"onnait la mairie, dénonça un« déni pitoyable et désastreux de démocra!e ». Il y a 20ans, le « bébé Chirac » Copé connaissait les mêmes péripé"es. À tel point qu’il avait dû lui aussi faire face à l’opposi"on locale de son propre par", le RPR, et à uneprimaire avec le député Pierre Quillet, qui décidera malgrétout de se présenter aux élec"ons. JeanFrançois Copé neménagera pas son rival que beaucoup voyaient prendrela tête de la ville. À l’époque, les lu$es intes"nes faisaientrage au sein même du RPR : Chiraquiens et Balladurienss’étaient lancés dans une guerre fratricide, et JeanFrançois Copé gardera une rancune tenace à l’égard du camp
Alors que l’UMP est toujours en crise, Jean-François Copé va devoir s’occuper d’un autrechamp de bataille : la ville de Meaux dont il est le maire depuis plus de 15 ans. Bastien Mar-guerite, un jeune socialiste de 22 ans, est bien décidé à s’enraciner dans la ville commel’avait fait Copé il y a 20 ans. Sans fleur au fusil.
14 - M Le journal - mars 2014
JF Copé en 1995 lors de sa campagne à Meaux (Source : INA.fr) Bas"en Marguerite, en 2014, âgé d’à peine 22 ans.
BalladurSarkozy.
« Le visiteur du vendredi soir »
Un climat toujours tendu aujourd’hui, mais côté socialiste ce$e fois. Une crise gouvernementale qui ne perturbe pas Bas"en Marguerite, luimême employé auministère des Transports. « La campagne se déroule surle terrain, je ne prête pas a#en!on à ce qui se dit ou sepasse à ce niveaulà, je m’occupe des Meldois et en priorité de l’emploi », répond Marguerite avant d’ajouter :« JeanFrançois Copé ne s’occupe plus de sa ville. Certainsl’appellent même le “visiteur du vendredi soir”. Vous avezvu ce qu’il fait de sa réserve parlementaire ? Il a donné35 000 euros à Meaux et 60 000 à l’Union na!onaleinteruniversitaire (associa!on classée à droite). Il s’ensert pour faire sa propre campagne dans le pays. » Carle députémaire, mais aussi président de l’UMP et de lacommunauté d'aggloméra"on, n’a jamais caché qu’ilpensait à l’Elysée, et pas qu’en se rasant. Bas"en Marguerite se refuse à toute esquisse d’ambi"on. « Je ne meproje#e pas du tout, ce qui m’intéresse, c’est Meaux »,évacuetil. Il ne compte pas cumuler les mandatscomme son adversaire et il est bien trop tôt pour voirplus loin.
« Vous êtes qui ? »
Mais pour l’instant, les habitants semblent acquis aucamp Copéiste. « On est à 99% derrière lui, personne neconnaît son opposant », martèle une femme au café
Jeanne d’Arc. Bas"en Marguerite essuiera d’ailleurs plusieurs « Vous êtes qui ? » ce ma"nlà. « C’est normal,mais on fait beaucoup de porte à porte ! » Sur son sitede campagne, un compteur annonce, fin février : 3 700portes frappées, 2 200 portes ouvertes. De son côté, surwww.copemeauxpourtous (slogan évocateur), le mairejoue aussi avec sa calcule$e et se targue de 4 850 Meldois rencontrés par ses « binômes ». L’Ins"tut na"onalde l’audiovisuel conserve précieusement les images duchiraquien qui, en 1995, arpentait luimême les rues vallonnées de Meaux.Désormais, c’est au tour de Bas"en Marguerite dedéambuler autour de la place du marché. Au détourd’une de ses nombreuses discussions avec les habitants,Bas"en Marguerite croisera même Ange Anziani, ancienbrasdroit de JeanFrançois Copé. C’est grâce à cet ancien entraîneur de l’équipe de football de la ville que leprésident de l’UMP a pu s’implanter à son arrivée etfaire oublier son image de parachuté. Mais lorsque l’ancien footeux a voulu apporter son sou"en à Nicolas Sarkozy en 2007, le maire chiraquien ne l’a pas supporté,gardant en mémoire de vieilles querelles. Ange Anzianiest évincé du conseil municipal et vit désormais re"rédes tourments du monde poli"que. Face à Bas"en Marguerite, l’ancien maire garde en mémoire ses déboiresavec JeanFrançois Copé dont l’ambi"on juvénile n’a pasdisparu. Après avoir souhaité « bon courage » au jeunesocialiste, il repart, bague$e au bras. Meaux est décidément le tremplin des jeunes lions de la poli"que française.
@VincentMnv
15 - M Le journal - mars 2014
Tel maire,tel fils
« Plus tard, je voudrai faire comme mon père. »Une phrase anodine quand on parle de son enfance. Mais lorsque celleci se réalise, et surtouten politique, cela suscite beaucoup de questions.Parachutage, népotisme, fils ou fille de, plusieursexpressions peuvent sortir de la bouche d’un citoyen lorsque le maire laisse sa place à sa descendance. Et pour coller à l’inégalité hommesfemmes des mandats locaux, ce sont le plus souvent les fils qui prennent la relève sans toutefoisque le processus démocratique soit rompu. Lesbébésmaires sont toujours élus par le conseilmunicipal. C’est le cas d’Axel Poniatowski, maire de l’IsleAdam (95). Entré d’abord à la mairie en tant queconseiller municipal, il a succédé à son père Michel Poniatowksi à la mairie depuis 1971. Danscette petite ville du Vald’Oise, on placarde lesaffiches de campagne des Poniatowski depuis 43ans et peutêtre pour encore quelques annéespuisque le patron de l’UMP du départementbrigue un troisième mandat. Au sein de cette famille, parente du dernier roi de Pologne, la poli
tique colle à la peau. C’est donc sans surprisequ’on retrouve l’autre fils Poniatowski, Ladislas,maire d’une petite ville de l’Eure depuis 1977.Des fils qui endossent le costume du père, il y ena eu aussi à Mennecy (Xavier et JeanPhillipe DugoinClément), à Gagny (Jean et Raymond Valenet) ou encore dans le XIIe arrondissement deParis (Paul et JeanFrançois Pernin).
Tuer le père
Aux pieds du quartier de la Défense, à Puteaux,on se transmet aussi l’écharpe du maire entre générations. Mais cette foisci, depuis que Joëlle asuccédé à son père Charles CeccaldiRaynaud,les repas de famille sont plus tendus. En 2004,père et fille jouent aux chaises musicales russes.Pendant que Charles CeccaldiRaynaud estcontraint de laisser le siège de maire pour hospitalisation, c’est Joëlle qui reprend les clés de lacommune. L’adjointe devient maire et le mairedevient adjoint. Seulement, une fois remis enforme, l’ancien décide de revenir, la nouvelle ne
Dans certaines villes, la liste des maires s’apparente parfois à un livret de famille. Un phénomène qui touche aussi bien la capitale que sa banlieue. De Mennecy (91) à l’Isle-Adam (95) en passant par le XIIe arrondissement de Paris, les fils (en majorité) et les fillessuivent les pas de leur géniteur.
16 - M Le journal - mars 2014
veut plus lui céder sa place fraîchement gagnée.L’univers impitoyable de la saga CeccaldiRaynaud peut commencer. On s’accuse de mentiraux citoyens sur les pages de blogs, on s’adonneaux joutes verbales pendant les conseils municipaux. Tous les coups sont permis. Cette année,Joëlle CeccaldiRaynaud présente de nouveau saliste pour un autre mandat, pendant que Charlesrépand dans les médias quelques phrases encoreassassines : «Ma fille ? J’ai fait sa carrière etmaintenant elle m’ignore.» La mairie devient lascène des histoires de famille mais aussi des histoires de coeur. Un jeu des sept familles où lescompagnes sont aussi de la partie.
Les confessions sur l’oreiller
L’union fait la force. C’est peutêtre sur ce dictonbien connu que le couple Isabelle et Patrick Balkany ont mené leurs carrières politiques. Malgréles condamnations pour prise illégale d’intérêts,les accusations de mauvaise gestion, les siègesperdus de députés, le couple est encore au
jourd’hui soudé et en fonction à la mairie de LevalloisPerret dans les HautsdeSeine. Maiscomme dans toutes les relations, il y a des bas.Lorsque Patrick Balkany perd la mairie de LevalloisPerret en 1995 (et de surcroît, Isabelle sonposte de responsable de la communication), lecouple n’y résiste pas et se sépare pendantquelques mois. Mais heureusement, il y aussi deshauts. En 2001, Patrick gagne les élections municipales, Isabelle est présente à ses côtés lors dela campagne, retrouve son poste à la communication, acquiert également celui des affaires sociales et monte en grade : elle devient premièreadjointe. 184 ans après la mort du dernier roi de France,que ce soit en campagne ou en ville, on ne voteplus pour une idéologie mais pour un nom. Etpour ceux qui souhaitent plus de renouvellement, de pluralité dans la politique locale, il faudra attendre quelques années encore.
@anaelledom
17 - M Le journal - mars 2014
les maires font de lA résistance
Ils s’appellent Michel Vallade ou André Toulouse, respec"vement maires de Pierrelaye et RoissyenFrance. Ils sontà la tête de leur commune depuis 1977, année où Elvisnous a qui#é et où la Russie s’appelait encore l’URSS. Ilfaut aussi parler de Patrick Balkany, arrivé à la mairie deLevalloisPerret en 1983, il y a 31 ans.Depuis plus de trois décennies, ils s’accrochent à leur villemais pour beaucoup, ce phénomène n’étonne pas car cesmaires sont démocra"quement élus. Frédéric Dabi, directeur général adjoint de l'Ifop, l’explique dans le JDD : « Unmaire réélu, c'est plus la norme que l'excep!on. Danstoutes les villes de France, les maires font plusieurs mandats et, sauf accident, sont souvent réélus. »Pour JeanPierre Friedman, psychologue et auteur des essais Du pouvoir et des hommes et Du pouvoir et desfemmes, la longévité des maires s’explique par plusieurscritères : « Pour beaucoup, la fonc!on municipale est vuecomme un marchepied vers d’autres fonc!ons, comme unrôle dans l’intercommunalité. » L’arrivée à la mairie est undébut dans l’ascension poli"que. C’est ce que vit FrancisDela#re, maire de Franconville (Val d’Oise) depuis 1983.Parmi ses mul"ples fonc"ons, on compte celle de sénateur, de premier viceprésident de l’Union des Maires duVald’Oise, de président du syndicat intercommunal desBu#es du Parisis ou de membre à la commission des finances. L’ambi"on est aussi sociale. Pour des paysans, despersonnes issues de la classe ouvrière ou moyenne, devenir maire est une réelle ascension. « Les avantages personnels et financiers comme les indemnités, prononcer undiscours devant une foule, ça frappe le narcissisme et cen’est pas négligeable », souligne Friedman.Pour d’autres, l’ambi"on est d’implanter sa dynas"e ausein de la ville comme la famille CeccaldiRaynaud à Puteaux qui habite la mairie depuis 1969. La fille Joëlle a succédé à son père Charles en 2004. Conséquence directe :des conflits au sein de la dynas"e et des habitants souffrant des querelles internes de la famille (en lire plus page16). Mais tous les maires ne se considèrent pas commeles propriétaires de leur ville. D’autres se voient en « pèrede la commune », explique JeanPierre Friedman. Michel Vallade se représente à Pierrelaye (8 200 habitants)pour un 7e mandat et s’il retourne en campagne, c’est surtout par passion : « Le mandat de maire est le plus intéressant car je suis sur le terrain, je touche à tout, je suis àla disposi!on des gens ». Retraité, il admet aussi qu’il nese voit pas ne plus rien faire dans la vie.
L’image du maire amoureux de sa ville sans but lucra"fn’est pas la seule. « Dans les plus grandes aggloméra!ons,on ne parle plus de proximité. Le maire va être élu grâce àses rela!ons, qui pourront lui décrocher des subven!onspour ses électeurs ». Pour JeanPierre Friedman, lesmoyens de pression et les chantages ont un vrai rôle dansles réélec"ons. L’IledeFrance compte plusieurs mairestrempés dans des affaires judiciaires. « L’ambi!on estpure, il y a ce désir de posséder le pouvoir », explique lepsychologue.Si leurs inten"ons sont différentes, ils ont tous le pointcommun d’être des hommes. Il y a plus de 30 ans, lesfemmes maires étaient rares. « C’était une période patriarcale », rappelle le psychologue. Aujourd’hui, elles sontde plus en plus présentes et dans trois décennies, certaines seront peutêtre toujours au pouvoir.Il manque à présent la catégorie des jeunes dans les mairies. Si Le Monde faisait le constat d’un “papyboom desmaires” en 2008, on peut espérer pour les élec"ons de2020 l’arrivée d’une nouvelle généra"on qui apporterapeutêtre une vision moins archaïque de la poli"que. Pouréviter que des villes ne connaissent que deux maires en80 ans.
Ils sont maires depuis les années 1970 ou 1980 et briguent pour les municipales un énième mandat.Une longévité (presque) record pour des maires “accros” à leur ville et surtout au pouvoir.
@AssiaLabb
18 - M Le journal - mars 2014
« Le seul espoir, c’est le Front national »Ce dimanche ma!n sous un ciel dégagé, on comptepresque plus de militants que de Tabernaciens sur la placeprincipale. Autour du marché couvert, les têtes de liste attendent de longues minutes à la recherche du moindre passant. Interdic!on pour eux de faire de la poli!que àl’intérieur du marché. Alors Alexandre Simmonot, le candidat du Front Na!onal patrouille au centre ville pour faireentendre ses idées. Rompu à cet exercice, ilconstate que depuis plusieurs années le contactavec les citadins s’améliore ne#ement. « L’accueil y est largement plusagréable qu’avant »,confietil. C’est en effet ladeuxième fois que le secrétaire départementaldu Val d’Oise se présenteauprès des électeurs pourles municipales. Il y a 6ans, sa liste avait récolté6,74% des suffrages tandis que le maire Maurice Boscavertrecevait le feu vert pour entamer son quatrième mandatsuccessif. Dans ce#e nouvelle campagne, les habitants font avant toutpart de leurs craintes pour l’avenir de leur pays, expliquetil. « Même si c’est une élec"on locale, les Français donnentle diapason de leur état d’esprit, le rejet de la gauche, de lafausse droite. Le seul espoir qu’ils ont à l’heure actuelle, c’estle Front Na"onal.»
Le voisin en guise de sou!en
Diffusion de tracts, boitages en semaine. La liste Front Na!onal emploie des stratégies iden!ques aux autres par!s.Mais aujourd’hui, c’est avec le sou!en de Chris!an Malacain, le candidat FN de la ville voisine SaintLeu, qui bordeégalement la forêt de Montmorency, qu’Alexandre Simmonot va à la rencontre des citoyens. Pour les deuxhommes qui font par!e du bureau poli!que du Val d’Oise,rien d’anormal à s’aider mutuellement dans le cadre de
leur campagne respec!ve. Lorsqu’on interroge le candidat d’à côté, c’est avant tout l’indigna!on envers la poli!que des derniers gouvernementsqui ressort de la conversa!on. « On était une puissancemondiale. On va se retrouver des arrièrés du monde »,s’alarme Chris!an Malacain qui est au Front Na!onal depuis30 ans. De passage ce ma!n à Taverny, il avoue ne pas très
bien connaître le paysagepoli!que de la ville mêmes’il s’alarme de la présence de « communistes alorsqu’il n y a plusqu’en Chine que ce bordpoli"que existe.»
Gale"e des rois
Ces communistes justement, distribuent destracts quelques mètresplus loin. La liste Front degauche fait même cam
pagne côte à côte avec celle du maire sortant de gauche.« Le FN à Taverny, c’est un non événement. Alexandre Simmonot ne représente que luimême. C’est une campagnede s"gma"sa"on, de peur. Les militants ne nous en parlentpas », avance Serge Zetlaoui, sur la liste Front de Gauche. Bruno Devoize, candidat Front de Gauche, reconnaît entretenir des rela!ons cordiales avec le par! de Marine Le Pen.« Je lui adresse la parole quand je dois le faire. Mais oncondamne le Front Na"onal. Et on peut craindre une poussée de ce par" aux municipales.»Les colis!ers FN, eux, tablent sur la venue récente de Marine Le Pen à l’occasion de la gale#e des Rois à Taverny pourconfirmer leur progression et encourager leur mouvement.Mais ce n’est pas tout. « À Taverny, il y a beaucoup de gensqui ne voulaient pas adhérer mais qui finalement s’engagent. »,souligne Philippe Houline, le troisième de liste. Pourlui, l’impact de la "dédiabolisa!on" se concré!se désormaissur le terrain. Verdict a#endu dans les urnes.
La liste montée par Alexandre Simmonot à Taverny cherche à confirmer l’implanta!on localedésirée par Marine le Pen. La montée du FN se concré!seratelle dans les communes ? Reportage lors d’une scéance de tractage.
@Bap!stePiroja
19 - M Le journal - mars 2014
Les promos de l’école de Journalisme
Le site sur les municipales est lancé ! Retrouvez tous nos ar!cles, sur
bloodymairie.fr
Les étudiants en journalisme lors de la journée porte ouverte à Cergy et à Gennevilliers
M Le journal - mars 2014
Prochain M le Journal avril 2014
Les municipales 2014 :
L’entre-deux-tours
NumerosZero
Le blog de la promo est officiellement en ligne.Tous les ar!cles et toutes les informatons sur
les étudiants en M1 et M2 sur : numeroszero.com