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Entre commodités, gaz à effet de serre et dimensions culturelles, l’élevage en
question ?Pour une nouvelle approche en
termes de ressources, l’intégrité fonctionnelle
Bernard Hubert(Inra, Ehess)
15ème Carrefour des Productions Animales
Gembloux, 10/02/2010
L’agriculture et l’élevage questionnés
• Un constat de situation qui conduit à
• Faire face à de “nouveaux” enjeux
• À partir de “nouveaux” termes de référence …
• … Qui nécessitent de revoir les référentiels !
Une évolution du centrage de la question agricole en quarante ans
• Du paysan : la stabilité politique de la IIIème République (entre aristocrates terriens et prolétaires urbains (cf. Hervieu et Viard)
• À l’agriculteur : la production (cf. les ordres socio-économiques – Aggeri et Hatchuel)
un groupe social/changement technique/traitement spécialisé de chaque question/encadrement technique et politique
agronomie, sociologie, agro-économie• À l’espace rural: l’habiterun groupe social en mutation et en interaction avec ses
voisins/enchevêtrement des pratiques et des intérêtsaménagement du territoire, sociologie, sciences politiques,
droit• Aux questions d’environnement : les ressources, les
pollutions, les impacts, le changement climatique, la biodiversité …
un groupe social local confronté à des enjeux globauxComplexification/interdépendances, local/global, temps
court/longécologie, biotechnologies, sciences de l’univers …
De nouvelles questions fondées sur un constat de situation
• Une simplification des paysages pour des productions destinées au marché et ayant conduit à la stabilisation des flux de certaines ressources à court terme
• Des seuils écologiques instables et difficiles à prédire
• Une gestion ‘à l’optimum’ de systèmes considérés comme stables et prédictibles - en supprimant les perturbations et en réduisant la diversité de l’environnement- qui a réduit les options et compromis la capacité des écosystèmes à tamponner les changements
De nouvelles questions fondées sur un constat de situation
• Qui a conduit à des transformations drastiques de la démographie agricole (de 5M à 600 000 … en 50 ans en France)
• Corrélée à un considérable effort dans les sciences et les technologies
• qui ont masqué les feedback de l’environnement à des échelles spatiales larges et sur des pas de temps étendus
• Menant à une nouvelle distribution des connaissances, savoir-faire et pratiques sur la gestion du vivant … depuis les campagnes vers les laboratoires !
Les étapes de la domestication des plantes selon le GNIS …
• Et difficilement transposable à l’échelle du monde !
Crop yields (kcal/d/ha) / Labor productivity (ha/worker)
(1961 – 2003). Source : B. Dorin
Une situation de ‘lock-in’ technologique ?
Le poids des choix antérieurs • Technologiques : mécanisation, engrais,
pesticides, génétique• Cognitifs : savoirs et savoir-faire,
représentations de la nature, des nuisances, du paysage, etc.
La difficulté d’en sortir : modes de raisonnement (technoscientifique, autres secteurs, etc.)
Conditions d’émergence vs conditions de maintien (de choix technologiques): un piège de la rationalisation technique ?
Irréversibilités/bifurcations ?
• Des choix conceptuels : technologies, politiques publiques, intégration sociale, etc.
• Dont la mise en œuvre n’est pas évidente- référentiels des PP- priorités et dynamiques sociales et économiques- systèmes de valeur socioprofessionnels- dispositif d’encadrement et d’appui- la complexification des enjeux
Une diversité des regards et des attentes
• Touchant la conception et la mise en œuvre de la production
• Conduisant à revisiter des choix productifs jugés « évidents »
• Faisant surgir de nouveaux repères : diversification, extensification, multifonctionnalité
• Qui requièrent de nouveaux cadres théoriques… et leur mise à l’épreuve
Un nouveau cahier des charges pour une « agri-culture/nomie
écologiquement intensive »• Maintenir voire augmenter les rendements
agricoles• A partir de techniques moins polluantes• Moins dangereuses pour les travailleurs, la flore
et la faune• Fondées sur:
- une meilleure valorisation des services des écosystèmes (pollinisation, IP, …) - de nouvelles technologies (informatique, génétique, monitoring …) - mobilisant ensemble à la fois les connaissances scientifiques et locales par des processus d’apprentissages croisés
Un challenge pour la R&DConcevoir une gestion des RNR fondée sur la
fertilisation croisée entre les méthodes et concepts de l’agronomie, de l’écologie et des sciences sociales en mobilisant largement les savoirs locaux
Afin de surmonter le dilemme production vs. conservation
ProductionProduction ConservationConservation
•Affrontement •Rupture avec les dynamiques et les processus naturels. •Déséquilibre •Artificialisation des espèces et des structures biologiques •Substitution des mécanismes naturels par la technique
•Effacement •Respect total des dynamiques et
des processus naturels. •Recherche de l’équilibre
•Espèces et structures « naturelles »
•Interdiction des activités humaines
•Continuité, connivence•Intégration dans les processus naturels
•Restitution mesurée des équilibres. •Co-adaptation, co-évolution, ajustements continuels
•Infléchissement des processus naturels visant à la recherche d’une production optimale
Nouveau paradigmeNouveau paradigme
Agroécologie?• ou Ecoagriculture, Systèmes de production
écologiquement intensifs, Conservation farming, Ecoculture …- Un nouveau cadre scientifique orienté
‘écologie’ ?- Une vision sociale du Développement?- une ‘value oriented research’?
• Nouveaux paradigmes?- ‘modernisation écologique’ appliquée à l’agriculture- approches ‘systèmes’- la gestion des agro-écosystèmes : agronomie / ingénierie écologique- alternative à l’agriculture conventionnelle- mouvement social
Agroécologie
• Contrôler la ‘frontière agraire’Par le zonage, la création de nouvelles institutions, des
économies d’échelle, le paiement des services des écosystèmes, des échanges cognitifs intersectoriels …
• Ou bien transformer l’agriculture et pas seulement la recomposer
En travaillant à la fois au niveau des territorial et sectoriel afin de - créer des mosaïques paysagères (connectivité dynamique, hétérogénéité), - générer des économies de diversité, de gamme (des agriculteurs, des produits et outputs, des connaissances, du matériel génétique), - prendre en compte les faisceaux de droits relatifs à l’exploitation des ressources (accès, usage, transmission, dévolution, appropriation foncière, matériel génétique …)
Stratification vs Intégration
• La stratification entre communautés rurales peut conduire à accroître les inégalités en regard de: allocation des terres, droits des peuples indigènes et des agriculteurs, sécurité alimentaire, éco-impérialisme/valeurs locales des espèces et habitats (‘justice environnementale’)
• L’intégration peut favoriser la diversité à différents niveaux à partir d’un ensemble de systèmes de production (différentes tailles, types de ménages, de produits, disponibilité en travail, etc.) et une meilleure productivité de l’ensemble (hétérogénéité et complémentarités)
Environnement Territoire
Dimensions sociales et spatiales des techniques !
• Dépasser les frontières habituelles entre l’urbain, la campagne et les espaces naturels:- agriculture urbaine & périurbaine …- agroforesterie, agro-écologie … - gestion des zones humides … pas seulement par le drainage- complémentarités entre des espaces et des systèmes de production différenciés … sans marginalisation des territoires ‘peu productifs’ ni de ceux et celles qui y vivent !
Un nouveau dilemme
• Repenser les modes actuels de séparation entre les espaces de productions et les espaces de protection (sanctuarisés)
• Par la conception de mosaïques d’écosystèmes fournisseurs d’une diversité de fonctions et services
Dilemme production/conservationSégrégation vs Intégration
Dilemne production/conservationSégrégation vs Intégration
EHESS 3-02-2010
Un territoire intégré
EHESS 3-02-2010
Un espace dual
EHESS 3-02-2010
Un territoire à réinventer
Le Développement DurableLe Développement Durable
• G.H. Brundtland (1987)
• « le développement durable est un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre à leurs propres besoins »
• « deux concepts sont inhérents à cette notion : le concept de « besoin » et plus particulièrement des besoins essentiels des plus démunis, à qui il convient d’accorder la plus grande priorité, et l’idée des limitations que l’état de nos techniques et de notre organisation sociale imposent sur la capacité de l’environnement à répondre aux besoins actuels et futurs »
Une question de compréhension institutionnalisée
• Beaucoup de pratiques agricoles (forestières, halieutiques …) de nos jours ne sont pas durables, voire même contre-productives, parce qu’elles raisonnent uniquement comment des ressources peuvent être produites et exploitées, plutôt que de concevoir les ressources comme dynamiques et se transformant elles-mêmes du fait de leurs connections à des écosystèmes complexes
• La durabilité doit ainsi être vue comme une propriété émergente des interactions entre les acteurs et leur environnement et non pas comme une qualité intrinsèque et technique de l’écosystème
Une question de compréhension institutionnalisée (d’après Thompson, 1997)
• Resource sufficiencyVision utilitariste de la nature Ressources vues comme un capital donné (stock)en abondance /renouvelable /critiqueLe maintien de la durabilité face au déclin du stock s’obtient:
- soit en réduisant le taux de consommation de la ressource,- soit en augmentant l’efficacité avec laquelle la ressource est produite, - soit en lui substituant d’autres ressources.
• Il se fonde sur le principe - qu’un agro-écosystème peut être abordé à partir du simple bilan entre la production et la consommation de ressources- que les interactions en son sein sont considérées comme suffisamment stables pour être ignorées
• Il débouche sur des politiques qui visent à valoriser seulement l’efficience
Une question de compréhension institutionnalisée (d’après Thompson, 1997)
• Functional integrityUn processus coévolutif Ressources émergent des interactions au sein d’un socio-
écosystème Maintenir la durabilité repose sur l’identification des points
critiques pour son fonctionnementEt l’amélioration technique et sociale des modes de gestion
vus comme un ensemble d’activités par la révision des rôles et des modalités d’interactions enter les parties prenantes
Il s’appuie sur des politiques dont la mise en œuvre - tient compte des conditions locales,
- est contextualisable et adaptable- dont les effets sont observables et évaluables
Ce qui exclue des objectifs centralisés et des prescriptions normalisées
Vers une rupture conceptuelle ?
Passer d’un cadre
• Dans lequel un agro-écosystème est vu comme la somme des transformations et consommations/production capital/technologies/ressources
dans un environnement considéré comme stable (ou prévisible)
Au pilotage (stewardship) des fonctionnalités des écosystèmes afin de faciliter les ‘services écologiques’ (cf. MEA), et l’acquisition des savoirs et compétences, et capacités d’adaptation aux changements (climat, politiques, valeurs, normes …)
A partir de nouveaux concepts: dynamiques, seuils, résilience, noyau de viabilité, processus d’apprentissage et action collective, etc.
fondée sur la coévolution et les interactions système/environnement en situation d’incertitude !
Pour construire sur la durée une approche en termes de ‘sécurisation alimentaire’ dans un monde globalisé ? Prenant en compte les biens publics mondiaux …
EHESS 16-12-2009
Un bref regard Nord/Sud
Pour conclure
Un enrôlement différencié de l ’agriculture dans l ’environnement
Au Nord une forme d ’écologisation qui profite d ’une politique coûteuse
• … tant qu’elle se justifie socialement (maîtrise des impacts, aménités, emploi, etc.),
• passant par des politiques, des technologies, des redéploiements financiers
• au nom de nouveaux biens communs dont la gestion repose sur des opérateurs privés
• et favorisent l ’émergence de nouvelles figures (fonctions, métiers, agences, institutions, surfaces de compensation écologique …)
Un enrôlement différencié de l ’agriculture dans l ’environnement
au Sud, une confrontation souvent frontale avec des procédures internationalisées (Réserves de Biosphères, Aires protégées, etc.)
• sans moyens financiers propres pérennes• sans protection par rapport au marché • avec des incompatibilités entre savoirs locaux et
recommandations techniques• des formes de « participation » souvent peu
appropriées aux organisations sociales• et des situations foncières précaires ...
Merci de votre attention !
A suivre …
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