20010912Pavillon de thé

Embed Size (px)

Citation preview

Le pavillon de th du muse national des Arts asiatiques Guimet

Sommaire

SommairePrfacepar Jean-Franois Jarrige

. Directeur du muse Guimet

3 5 7 8 11 15 19 20 24 27 28 31

Introductionpar Yoshiaki Iwasa

. Professeur honoraire de lUniversit de Kyto

Ikky, prcurseur de lart du thHlne Bayou

. Conservateur de la section des Arts du Japon au muse Guimet . Ancien suprieur du Datoku-ji au Shinju-an . Directeur du Muse des Arts et Traditions populaires Matsura Hirado

Lesprit du Chanoyupar Sbin Yamada

La Maison Matsura et lcole de th Chinshinpar Akira Matsura

Lunivers dun cur qui a tout mis dans le Yhenpar Kzan Kiwa

. Matre cramiste . Architecte

Larchitecture et les jardins de th au Japonpar Claire Gallian

La Chashitsu du muse Guimetpar Masao Nakamura

. Professeur honoraire de lInstitut national polytechnique de Kyto

La construction du pavillon de th Guimetpar Claire Gallian

. Architecte . Architecte . Architecte

La crmonie de Muneagepar Claire Gallian

Le nouveau jardin du Panthon bouddhiquepar Claire Gallian

Souvenirs dune construction pour le futurpar Takaaki Yamamoto

. matre charpentier, spcialiste des constructions sukiya de Kyto

Prface

Prface

D

epuis larrive dmile Guimet Yokohama en 1876, les liens entre le muse quil devait fonder par la suite et le Japon sont rests trs profonds. Cest dailleurs le remarquable ensemble de sculptures et peintures bouddhiques quil rapporta de son voyage au Japon qui devait servir de premier noyau son muse Guimet inaugur Paris en 1889. Lorsque la rnovation gnrale du muse Guimet qui sest acheve en janvier 2001 venait dtre dcide, cest du Japon que furent reues les premires manifestations de soutien, notamment du Matre Ikuo Hirayama et dun groupe dindustriels sous la prsidence du regrett Isao Masamune, ancien prsident de la Banque Industrielle du Japon. Aussi le muse Guimet est-il heureux de pouvoir aujourdhui consacrer ses riches collections dart du Japon un espace qui a doubl de taille par rapport la situation prcdente. Il y a dj plusieurs annes, nous avions reu laide du gouvernement japonais pour la mise en place des collections du Panthon bouddhique dans un btiment qui devait tre totalement rnov au 19 avenue dIna, proximit du muse. Avec laide du grand spcialiste du bouddhisme japonais, le Professeur Bernard Frank, malheureusement disparu depuis, nous avions pu rinstaller, dans une prsentation scientifique illustrant la richesse du Panthon bouddhique du Japon, le remarquable ensemble de sculptures rapportes par mile Guimet la suite de son voyage de 1876. Comme un signe du destin devant cet acte de rsurrection de luvre quelque peu oublie dmile Guimet, Bernard Frank et nous-mme avions eu la surprise de dcouvrir la statue dun Seishi Bosatsu, provenant dune triade dAmida de lpoque Kamakura, du kondo du Hory-ji. Nous avions aussi pu crer, avec laide de Robert Bazelaire, lextrieur de ce Panthon bouddhique inaugur en avril 1991, un jardin de style asiatique.

En 2001 le Panthon bouddhique clbre donc son dixime anniversaire. Aussi sommes-nous particulirement heureux de linitiative prise par un minent comit de soutien au Japon de lancer une collecte de fonds pour installer un pavillon de th cr par le grand architecte, le Professeur Masao Nakamura, dans le jardin du Panthon bouddhique. Lorsque mile Guimet visita le Japon, une politique de modernisation sous linfluence de modles occidentaux contribuait laisser dans lombre certaines des expressions les plus traditionnelles de la civilisation du pays. Ainsi limportance de la crmonie du th chappa-t-elle, faute doccasion, des voyageurs comme mile Guimet. Par la suite le muse Guimet a eu la chance de recevoir dans ses collections de trs beaux objets lis la crmonie du th, mais ils ont t exposs avant tout comme uvres dart. Lors de la rnovation gnrale du muse Guimet, nous aurions pu envisager, comme dautres muses en Occident, de construire dans les galeries dart japonais une installation en forme de maison de th qui aurait eu le mrite dvoquer le cadre mme de la crmonie du th. Toutefois nous avions la crainte de crer plus un dcor quun endroit propice voquer le vritable esprit du th. Aussi avons-nous t particulirement heureux quand le Rvrend Sbin Yamada, ancien suprieur du Datoku-ji, le temple zen qui est la source mme de la crmonie du th, et un gnreux comit de soutien prsid par Monsieur Yoshiaki Iwasa, Professeur honoraire de luniversit de Kyto, nous ont propos de construire, dans le jardin du Panthon bouddhique, un vritable pavillon de th conu par le Matre Masao Nakamura. La prsence de ce pavillon dans le jardin du Panthon bouddhique nous parat particulirement heureux. Si, en Occident, la crmonie du th est aujourdhui considre comme une des manifestations les plus subtiles et les plus3

profondes de la civilisation japonaise, son lien originel avec le bouddhisme, et tout particulirement lcole zen, est en effet parfois mconnu. Pourtant la crmonie du th fut introduite au Japon par Eisai, le fondateur de la secte zen Rinzai. Cette crmonie du th fut par la suite rige en une vritable rgle de vie par des personnalits exceptionnelles telles quIkky, prieur du temple Datoku-ji et fondateur au XVe sicle du Shinju-an, son disciple, le moine Murata Shuk, puis le clbre Senno Riky dont le Datoku-ji conserve pieusement lesprit et la mmoire. Nous ne saurions parler nous-mme de la crmonie du th dont le rvrend Yamada, une autorit mondialement connu dans ce domaine, a bien voulu rappeler quelques-uns des traits essentiels dans le beau texte crit pour cette occasion exceptionnelle. On rappellera aussi que de nombreux ouvrages ont t consacrs la voie du th, art de vivre, art de penser et lien harmonieux entre le microcosme et le macrocosme, depuis le si beau livre de Okakura Kakuz publi dabord en anglais en 1906 et que lon peut trouver en franais sous le titre Le livre du th , ditions Philippe Picquier, Arles 1996. La prsence dun authentique pavillon de th ralis par quelques-uns des meilleurs artistes et charpentiers japonais permettra donc dinviter des matres du th faire partager lesprit du cha-no-yu tous ceux qui, pendant quelques instants, tiendront dans leurs mains la coupe de lhumanit . Le matre Nakamura a dailleurs bien voulu concevoir une chambre de th qui soit par sa disposition acceptable pour les diffrentes coles qui, nous lesprons, accepteront de nous faire lhonneur de venir prparer le th pour tous ceux qui dsirent, au cours dun moment privilgi, se laisser guider sur la voie du th. Quil me soit permis de remercier une nouvelle fois le Rvrend Yamada pour le trs grand honneur quil fait non seulement au muse4

Guimet mais notre pays, en apportant son prestigieux patronage cette si importante ralisation. Notre gratitude va tous les membres du comit de soutien runis sous la prsidence du Professeur Iwasa. Je tiens aussi remercier Matre Kzan Kiwa, le potier qui, inspir par lesprit du th, a su retrouver les si belles et difficiles techniques du pass. Monsieur Tominaga, qui, avait dj jou un rle important, comme collaborateur de M. Masamune, dans une collecte de fonds pour la rnovation du muse Guimet, Madame Claire Gallian, architecte, ont tous deux Paris veill, au prix de beaucoup de travail et dnergie, aux aspects techniques fort complexes de cette ralisation sous le ciel parisien. Nous remercions pour leur prcieux soutien les responsables de la Mairie de Paris, de la Prfecture de Paris et du service de Musographie et de lArchitecture de la Direction des Muses de France. Hlne Bayou, conservateur de la section des arts du Japon au muse Guimet, et moi-mme tenons remercier aussi beaucoup Madame Anne Lauvergeon et la Cogema, qui, aprs nous avoir donn les moyens dacqurir en 2000 un mouvant portrait du grand moine Ikky, ont bien voulu permettre la ralisation de cette publication, tout en dbloquant des fonds important pour amliorer les prsentations et les clairages du Panthon bouddhique. Nous sommes aussi trs honors que Monsieur Akira Matsura, le 41e descendant de la ligne des seigneurs dHirado dont le fondateur, n en 822, tait un des fils de lempereur Saga, ait accept dtre le premier prparer le th, loccasion de linauguration de ce pavillon de th, selon le rite Chinshin, cr au XVIIe sicle par un de ses anctres.

Jean-Franois Jarrige Directeur du muse Guimet

Introduction

Introduction

L

e muse Guimet, qui, depuis 1945, remplit la fonction de dpartement des arts asiatiques du muse du Louvre, est par sa rputation lun des muses franais les plus renomms. Ses collections darts asiatiques sont dune richesse et dune qualit uniques en Europe. Le muse Guimet vient de connatre une rnovation majeure et pour clbrer sa rouverture, qui a eu lieu il y a quelques mois seulement, nous organisons une grande manifestation sur le thme de la crmonie du th dans un pavillon spcialement cr pour faire connatre en France lesprit du th. Avec cette manifestation, nous souhaitons en effet donner aux Franais loccasion de dcouvrir la culture de la crmonie du th qui est ne et sest dveloppe au Japon. Ils auront ainsi la possibilit de participer en personne cette crmonie et celles qui seront organises par la suite dans ce pavillon. Nous sommes convaincus que ceci ne peut que favoriser, bien au-del des relations franco-japonaises, un vritable change spirituel entre les cultures dOrient et dOccident. En ce dbut du XXIe sicle, nous esprons que des manifestations de cette qualit, puisant au cur mme de nos plus profondes traditions, seront pour des cultures diffrentes les unes des autres loccasion de senrichir mutuellement. Notre projet naurait pu tre men bien sans la coopration de Monsieur Jarrige, directeur du muse Guimet, qui uvre tant pour faire mieux connatre les arts dAsie, notamment ceux du Japon, dans son pays. Nous lui en sommes trs reconnaissants et len remercions cordialement. Yoshiaki IwasaProfesseur honoraire de lUniversit de Kyto Prsident du Comit japonais pour le pavillon du th du muse Guimet 5

Ikky, prcurseur de lart du th

Lart du th lge de quatre-vingt-huit ans dans un ermitage de la province de Yamashiro. Relevant de la catgorie des chins - portraits peints du vivant du moine ou trs peu de temps aprs sa mort, transmis de matre disciple comme preuve tangible de lobtention du satori par ce dernier - la peinture, anonyme, tmoigne de fait dune qute de la vracit physique, sexerant jusque dans le moindre dtail des rides et de la barbe naissante, et psychologique qui laisse prsumer dune troite parent, au moins spirituelle, entre le peintre et son modle. Ikky reste surtout la figure mme dune excentrique austrit ; paradoxe dont tmoigne la prsente image, linstar de ses meilleurs portraits. Procdant dailleurs largement du portrait dIkky conserv au muse national de Tky (cf. catalogue de lexposition zen , Helmut Brinker et Hiroshi Kanazawa, Zrich, n 31), elle reprend de la clbre esquisse - ralise par le moine-peintre Bokusai du vivant dIkky lorthodoxie de la composition (prsentation en buste, de trois-quarts face) comme le style minutieux et incisif, susceptible de traduire une acuit intellectuelle hors du commun. En raison des liens intimes tisss entre ces deux uvres, et bien que seule la calligraphie appose dans la partie suprieure du rouleau soit attribue avec certitude au pinceau de Bokusai (1412 ?-1492), il est probable que ce disciple, compilateur de la biographie officielle dIkky, soit aussi lauteur du portrait rcemment acquis par le muse.Hlne Bayou Conservateur de la section des Arts du Japon au muse Guimetpage de gauche : Portrait du moine Ikky, poque Muromachi, collection du muse Guimet

L

acquisition en 2000, ralise grce un gnreux mcnat de la Cogema, dun portrait peint du moine Ikky Sjun (1394-1481), 48e suprieur du Datoku-ji, est un vnement marquant de lhistoire des collections dart japonais du muse Guimet. Lintrt de cette oeuvre tient aussi bien la qualit esthtique de ce remarquable portrait qu la personnalit quil reprsente. Selon une tradition bien tablie, Ikky serait le premier enfant du tout jeune empereur Go-Komatsu et dune concubine impriale. Considr comme un danger potentiel pour de futurs problmes de succession, lenfant fut exil et confi ds lge de six ans un monastre dpendant du Datoku-ji, le clbre temple zen, de la secte Rinzai, Kyto. Il devait par la suite tudier le zen auprs de divers matres dans diffrents monastres avant datteindre lveil (satori) lge de vingt-deux ans. Il mena ensuite une existence errante, prchant la doctrine zen dans les quartiers populaires des faubourgs de Kyto et de Sakai. Sa grande libert de pense, voire mme une excentricit peu courante pour lpoque, le rendit trs populaire, notamment auprs des milieux commerants. Mais son esprit novateur attira vers lui une partie de llite intellectuelle de lpoque. Ainsi, grand rformateur de la pense et des arts lis au zen, personnalit centrale, par linfluence quil exera sur le matre de Th Murata Juk (1423-1502), il joua un rle majeur dans llaboration des principes prsidant la Crmonie du Th. En 1474, un dcret imprial nomma Ikky suprieur du Datoku-ji dont il entreprit la restauration, aprs les dsastreuses destructions des guerres de lre Onin. Il sut alors mobiliser la gnrosit des marchands pour cette vaste entreprise de rsurrection de ce grand temple quil devait quitter, lextrme fin de sa vie, pour mourir

7

Lesprit du chanoyu

Chanoyu

G

page de droite : Statue de Seishi Bosatsu, en provenance du Hory-ji, poque Kamakura, collection du muse Guimet

rce la profonde comprhension pour les arts orientaux de M. Jarrige, lactuel directeur du muse national des arts asiatiquesGuimet, il sera possible ceux qui rsident en Europe de se faire, par une exprience physique directe, une ide plus prcise de cette culture du cha-no-yu (crmonie du th) si trangre la culture occidentale. La connaissance de cette culture cha-no-yu, qui est ne et sest panouie au Japon, le pays plus loign dun Orient dj extrme aux yeux des Occidentaux, ne peut que favoriser des changes spirituels entre des civilisations diffrentes, dans un cadre dpassant largement celui des relations culturelles franco-japonaises. Par ces efforts de comprhension mutuelle entre des cultures diffrentes, il nous tient cur de favoriser une rflexion approfondissant notre connaissance de notre propre culture. Ainsi pouvons-nous travailler la main dans la main une ouverture desprit salutaire et capable de favoriser la cration dun humanisme universel, rpondant aux besoins de ce sicle nouveau. Cest l notre vu le plus ardent. Aussi voyons-nous dans cette manifestation une initiative dun immense intrt et, nos yeux, particulirement prcieuse. Quil nous soit permis de rappeler brivement combien lhistoire du cha-no-yu se rattache cette plante propitiatoire des terres du sud, pour laquelle la Chine ancienne prouvait une profonde estime depuis des millnaires. La tradition veut que ce soit sous la forme dune offrande dautel loccasion de linstallation sur son pidestal de leffigie colossale du Bouddha de Nara, il y a plus de mille ans, que cette plante fut introduite au Japon. Ce ne fut cependant quau XIIIe sicle, lorsque lcole zen simplanta au Japon depuis le continent chinois que la culture japonaise devait connatre une profonde transformation.

Le bonze Eisai qui introduisit le zen au Japon fut aussi le premier planter des semences de thiers Uji, au sud de Kyto. Ce fut alors le point de dpart dune pratique qui stendit tous les grands sanctuaires du pays. Dans un premier temps, cette plante fut utilise comme une plante mdicinale trs prcieuse laquelle on reconnat entre autres vertus, celle dtre un cardiotonique. Puis, aux XIVe et XVe sicles, nombreux furent ceux qui la consommaient dj comme un produit de luxe, mais qui ne tarda pas devenir une denre essentielle de la vie courante pour ceux ayant nanmoins les moyens de se loffrir. Cet attrait pour le th suscita chez certains le dsir dimaginer, dans le cadre des relations sociales, des modes varis de dgustation de cette boisson. Toutefois ce que nous appelons aujourdhui le cha-no-yu, nous le devons un bonze du temple Datoku-ji, le Rvrend Murata Shuk, qui vcut au XVe sicle. Suivant lenseignement du zen auprs du Matre Ikky, prieur du temple Datokuji et fondateur du Shinju-an, lErmitage de la Perle, il avait contract lhabitude de se prparer un cha (un th) quil absorbait pour conjurer le dmon du sommeil qui lassaillait durant ses sances de mditation. Agissant comme un stimulant de lesprit, le cha exerce, linstar du caf, un effet dveil efficace contre la somnolence. Ds lors, mille et une manires de consommer le cha furent imagines. Les puissants et dtenteurs du pouvoir, comme le shgun Ashikaga Yoshimasa, se firent construire des pavillons de plaisance ou de th aux murs pourvus dtagres dcoratives dans le style shon pour faire talage de bols appartenant des cramiques clbres et follement coteuses de la dynastie des Tang que lon faisait venir de Chine. Ainsi ces mmes grands personnages aiment-ils exhiber des ustensiles dispendieux, alors que le cha du peuple servait prosaquement de mise aux jeux

8

de hasard, ou bien tait dbit un sou la bole par des colporteurs ou bien enfin venait agrmenter la conversation dans les bains publics. Tout autre tait lesprit du cha pour un homme comme Murata Shuk qui apportait sa consommation une tiquette proche de ce crmonial que nous appliquons quotidiennement dans la vie monastique zen. Conduite dabord de faon solitaire ou en groupe restreint, cette pratique tait dune spiritualit dautant plus leve quil tait ncessaire de sy consacrer dans un coin priv de lhabitation. Par consquent, nul apparat mondain ni vaisselle magnifique ntaient de mise. Mais dhumbles ustensiles plus ou moins disparates de la vie quotidienne se trouvaient chargs de cet pre esprit zen qui les transformait en objets de raffinement et de got correspondant un esthtisme de la solitude. Le plaisir de savourer trs posment quelques gorges de ce th qui ravit lesprit surtout en compagnie de personnes de la mme pratique et agrables frquenter, transformait chaque occasion en un cha-no-yu o rgnait entre matre et invits une parfaite communion. Ainsi, chaque rencontre devenant une occasion unique, il importait que tout soit parfaitement men. Telle est la voie du zen o lon vit dans linstant le monde o cha et zen ne font plus quun et se pratiquent de concert, lunisson avec lunivers. Il est bien connu que cest avec Riky, quelque cent ans plus tard, que la pratique du cha-no-yu prit son essor et se rpandit largement pour se perptuer jusqu nos jours en subissant bien des changements au fil du temps et de lapparition de diverses tendances ou coles. La commmoration du 500e anniversaire de la disparition de Murata Shuk (1422-1502), dont la spulture se trouve dans lenceinte de lermitage du Shinju-an approche, aussi pouvons-nous nous rjouir de linauguration de ce pavillon de th, avec ses sentiers et son jardin, excuts selon les indications10

du Professeur Masao Nakamura, autorit inconteste dans le domaine de larchitecture des pavillons de th de style dit sukiya, et membre de lInstitut des Arts du Japon. Quant au potier Kzan Kiwa, ami de longue date, il a rsolument tourn le dos aux tendances modernes pour se rattacher aux sources mme du cha-no-yu et se consacrer la recherche de la beaut scrte par la solitude et la srnit raffine. Puissiez-vous donc avaler dun trait lunivers entier avec le th du bol et goter ainsi pleinement les saveurs dtaches du monde zen, nous nen demandons pas davantage. Nous avons la chance que ces trois personnalits, dont le cur bat lunisson, aient bien voulu sinvestir dans ce projet. laube du XXIe sicle, je prie pour que, dans la suite de laction toujours vivante dans nos esprits de nos anctres et prdcesseurs, soit apporte ainsi une contribution significative la culture de lhumanit entire. Je termine en exprimant tous mon sentiment de profonde gratitude, et plus particulirement Monsieur Jarrige et son quipe, qui nont jamais mnag leurs efforts pour la ralisation de ce projet, Monsieur Shigeatsu Tominaga, et Monsieur Yoshiaki Iwasa, Professeur honoraire de lUniversit de Kyto.Sbin Yamada Ancien suprieur du Datoku-ji au Shinju-an

La Maison Matsura et lcole de th Chinshin

Maison de th

C

est pour notre modeste cole de Th une grande joie et un honneur dtre appele participer aux crmonies de clbration de la rnovation du muse Guimet. Sil est de nos jours impossible de pratiquer intgralement la culture chevaleresque et le mode de vie des grandes familles feudataires du temps jadis, je crois que le souci de discipliner le cur par lexercice de lart du th, manation de la pense zen, du refus du luxe et de lesprit de frugalit et de courage tant exalt par les samouras, reste atemporel et garde encore aujourdhui toute sa valeur. Consacrant mes faibles forces perptuer cet esprit du th en qui je vois un adjuvant la formation de la personnalit, je ne saurais pour autant dire que lair du temps soit vraiment un vent porteur pour les anciennes familles de samouras. Il marrive en effet de douter que lexemple des fiers samouras contraints par la pauvret se curer ostensiblement les dents mme quand on na pas eu dner puisse encore tre dune grande utilit pour la socit actuelle. Toutefois comme cest lpoque du fondateur de notre humble maison, Minamoto-no-Tru, dix-huitime enfant de lempereur Saga, que le th commena se rpandre et comme, en outre, cest le grand matre zen Eisai qui, de passage Hirado lors de son retour dun deuxime voyage dans la Chine des Song, y planta des graines de th dans le cadre de sa pratique de lascse zen, je ne laisse pas de ressentir ce lien indissociable attachant notre humble famille au th. Aussi sans mautoriser dtats dme sur la vanit de mes efforts, je me sens investi de la mission de perptuer la tradition de lcole de Th Chinshin fonde par les Matsura. Jadresse tous ceux qui nous ont fourni cette occasion, commencer par le Professeur Masao Nakamura, lexpression de ma profonde gratitude.

Histoire de la famille Matsura de Hirado, anciennement Hizen (Maison-mre de lEcole de Th Chinshin) Notre patronyme qui se lit par lision, Matsura , tire son origine dun nom de lieu sur le littoral nord-est de lle de Kyshu. Lhistoire de notre famille commence avec Minamoto-no-Tru, dix-huitime enfant de lempereur Saga, qui naquit en lan 18 du rgne Kojin (822) et fut investi de la fonction de Ministre de la Snestre. Ses descendants devenus samouras, cest en lan 1 de lre Enky (1069) que Minamoto-no-Hisashi, huitime du nom, se vit attribuer une snchalerie au Kyshu oriental o il alla sinstaller et adopta le toponyme de Matsura comme nouveau nom de famille. Par la suite, la onzime gnration de Matsura, la famille reut en tenure le fief de Hirado-Matsura au revenu de quelque soixante mille piculs de riz, quelle conserva jusqu la Restauration Meiji. Nous en sommes aujourdhui la 41e gnration. Au temps jadis, notre humble maison de guerriers constituait le noyau dun clan de samouras connu sous le nom de Parti des Matsura , qui participa la lutte contre lenvahisseur mongol, sadonna la piraterie sur les rivages du continent asiatique et joua un rle de premier plan dans le corps expditionnaire du shgun Hideyoshi en Core. Le nom est aussi rest dans lHistoire car ce fief fut un lieu dchanges commerciaux avec les puissances europennes. Les archives et les ustensiles anciens qui subsistent nous enseignent que, dans notre humble famille, lon cultivait la modestie qui sied lesprit chevaleresque en pratiquant le th de bibliothque , mais cest Matsura Chinshin, 29e du nom, qui fit cole en crant une tendance nouvelle dans lart du th, que nous pouvons faire remonter les dbuts de cette tradition familiale. Ayant tudi le th dans sa jeunesse avec les matres clbres de lpoque,11

page de droite : Chasen, petits fouets battre le th, diffrents stades de fabrication, en provenance dIkoma prs de Nara, collection Claire Gallian

Chinshin, avanant en ge, devint disciple de Katagiri Sekish dont il perfectionna lart en crant cette tendance Sekish-Chinshin parvenue jusqu nous sous lappellation dcole Chinshin . lpoque de la Restauration Meiji, le grand matre de cette cole, Matsura Shingetsu fut lorigine du renouveau de lcole Chinshin. Membre de la Chambre des Pairs et Conseiller de la Maison Impriale, il se consacra faire revivre cet art du th que menaait lengouement nouveau pour la culture occidentale. Il se fit lavocat de linclusion de lart du th au programme des disciplines enseignes dans les grandes coles fminines telles celles de Nihon Joshi Dai, de Joshi Gakushu-in, etc. Lcole Chinshin actuelle repose sur les fondations jetes par Shingetsu. Jusqu lre Meiji, ce style tait pratiqu exclusivement dans les manoirs des grands feudataires provinciaux, et il faisait partie des disciplines spirituelles auxquelles on sappliquait dans les familles de laristocratie militaire pour forger le temprament, lgal des autres styles de th guerriers. Lors de la monte en puissance de la caste militaire, celle-ci fut amene faire la conqute du haut lieu de la culture propre la noblesse impriale de la Cour de Kyto. Il en rsulta chez ces reprsentants de la classe guerrire un besoin plus pressant de se dgrossir culturellement. Pour le rustre guerrier, la pratique de lart du th avec son fond de spiritualit zen devint un vecteur de raffinement dans la vie quotidienne. Le fondateur de notre cole, Matsura Chinshin, considrait le th comme llgance suprme des arts, des armes et des lettres ; il se plaisait dire que le cur doit recouvrer sa srnit le temps dune crmonie du th , et que le mou et le faible sont excrables, seuls le fort et le beau mritant admiration . Le guerrier, toujours prt au sacrifice de sa vie, trouvait dans lart du th lquanimit permettant de vivre fort mais beau .12

Lpoque des guerriers chevaleresques est depuis longtemps rvolue, mais il nen reste pas moins que, toutes situations, poques et lieux confondus, chacun a encore lutter contre soi-mme, affiner ltre aux pulsions vulgaires et barbares qui sommeille en soi pour atteindre une force que seule peut confrer la srnit. Notre modeste cole nambitionne nullement de stendre, son objet tant de sauvegarder une dimension humaine essentielle de notre hritage culturel.Akira Matsura quarante-et-unime du nom, Directeur du muse des Arts et Traditions Populaires Matsura

Matre Kzan Kiwa dans son atelier

Lunivers dun cur qui a tout mis dans le Yhen

Yhen

e suis n et jai grandi Kyto o, depuis ma tendre enfance, je naimais rien tant que de contempler les myriades dtoiles tincelant dans limmensit du ciel bleu noir. Et jai toujours limpression davoir conserv enfoui au plus profond de mon coeur, cet univers qui ravissait mon me denfant. Il y a environ trente ans de cela, moccupant dune maison de commerce, il marrivait daller acheter en Chine de la glaise et des pigments servant colorier les cramiques. Ce fut alors que jai senti que la beaut des innombrables toiles couvrant dun dais somptueux le vaste continent chinois, ainsi que celle des merveilleuses poteries que je voyais dans les muses de Pkin, venaient se superposer cette image de lunivers que je portais en moi depuis toujours. Je dcouvrais ainsi dans les bols th, dits temmoku, rpandant leur si trange clat, un condens dunivers. Lamour pour ces poteries qui mavaient tant fascin en Chine crt de jour en jour, devint dbordant, telle enseigne quil me jeta sur la voie des arts du feu m par le seul dsir de reproduire dans un bol, une jatte, cet univers que je navais jamais cess de porter en moi. Et cest ainsi que jen suis arriv installer un four Kyto et me lancer dans cette activit cratrice de la cramique : la reproduction du yhen-temmoku, reflet de lunivers intrieur. Mais voil, tout le problme rside dans la temprature du four et dans la terre utilise. Dans le processus de fabrication utilisant un four spcial dans lequel il est possible de cuire haute temprature et haute pression tout en devant contrler ces paramtres, linvitable finissait toujours par arriver. Incapable de rsister plus longtemps aux rptitions quotidiennes et alternes des hautes pressions et hautes tempratures, le four explosait en rduisant en miettes les

J

poteries qui lui avaient t confies ! Combien de fois nai-je pas essuy cet chec ! Quant la terre, je men fus lacqurir dans toutes les contres de la vaste Chine et dans bien dautres pays encore ; las ! tous les rsultats de mes cuissons les plus attentives taient bien loigns de limage du rsultat attendu. Cest dans cette situation conflictuelle que je maccrochai lide, pour le moins fixe, de russir cote que cote reproduire dans un bol le monde coruscant de la Voie Lacte aux myriades dtoiles. Et ce fut il y a une dizaine dannes peine que, au terme de mois, de dcennies, de frustrantes rptitions dessais et derreurs, je commenai enfin acqurir quelque peu la confiance dans la possibilit de voir un bol temmoku sortir de mes mains. Et toute ma production doeuvres nes dune qute inlassable de la Voie Lacte resplendissant au plus profond de cet univers qui avait si violemment mu mon coeur denfant, ntait en fait, je pense, quune longue lutte avec moi-mme. Il me fallait sans cesse investir toutes mes ressources intrieures dans ce combat contre ce qui se drobait. Et ce nest pas fini, car jai bien lintention de creuser et de poursuivre toujours plus avant le grand rve de la Voie Lacte. Yuteki Temmoku Les mouchetures or, argent, bleu fonc maillant toute la surface sont gnres par les particules doxyde ferrique cristallises dans le sillage des myriades de bulles dair clates dans le pigment au cours du processus de cuisson. Le pigment de noir de laque est suppos stagner en couche paisse au centre, tandis que tout alentour des mouchetures de cristaux assez petites resplendissent en notes argent et bleu argent, ce qui, par endroits, nest pas sans rappeler la chevelure des toiles filantes.15

Yhen Temmoku Parmi les bols th en cramique temmoku du pays de Tang (cest--dire chinois), les yhen temmoku occupent, depuis lpoque de Muromachi (1336~1573), la position la plus haute. Outre les yhen encore existants qui ne subsistent plus quau Japon, lon trouve encore les bols connus sous lappellation de inaba temmoku (conservs au muse des Beaux-Arts Shizukad Bunko) et les bols provenant de la Maison Tokugawa de Mito (conservs au muse des Beaux-Arts Fujita). Si le brillant nest pas aussi clatant que celui des cristaux constituant les mouchetures que lon voit en particulier sur les bols dits inaba temmoku, celles-ci nen ont pas moins un clat caractristique d au fait quelles retiennent des traces argentes venues flotter sur le noir de laque.Kzan Kiwa Matre cramiste

page de droite : Un bol th yhen de Matre Kiwa

Larchitecture et les jardins de th au JaponWa, Harmonie, Kei, Respect, Sei, Puret, Jaku, Srnit

Larchitecture

L

es quatre rgles riges en principes par le matre de Th Sen no Riky (1522-1591) furent avant tout appliques lart de servir le th sain et simple , comme lavaient initi, avant lui, Murata Shko, disciple du moine Ikky, puis Sh qui dveloppa la notion de wabi. Elles furent toutefois trs vite dterminantes pour tous les arts lis celui de la voie du th comme lart des jardins et larchitecture. Linfluence de la pense et de la philosophie zen y est aussi prsente que celle dcrite par le Rvrend Yamada pour le dveloppement de lart du th. La formalisation de larchitecture de style sukiya, considre comme la quintessence du raffinement de larchitecture japonaise et de lesthtique, en est issue, et les jardins de th, chatei, en sont un complment naturel. Le propre des pavillons de th, comme des jardins de th au Japon, est de respecter des rgles strictes dans leurs principes constructifs, leurs proportions et les matriaux employs mais de ntre jamais construits lidentique dun pavillon existant. Cest l une des caractristiques de larchitecture de style sukiya largement inspire de larchitecture de style shoin dont elle reprend les lments de base (lalcve tokonoma, les tagres asymtriques chigai-dana, les sols recouverts de tatami, la division des espaces) mais avec une beaucoup plus grande libert dans ses arrangements. Ainsi, chaque construction, aussi modeste soit-elle dans son apparence, est une uvre unique, reflet du got du client, du talent de larchitecte et de lart du charpentier, auxquels il est permis une grande libert. Si tous les jardins japonais ont en commun quils cherchent provoquer une motion, il est bien sr que les jardins de th y aspirent dautant plus quils sont associs une pratique proche du rituel religieux. Les jardins de th sont considrs au Japon comme les plus raffins. Ils se doivent de

montrer une beaut austre et le pavillon qui y est intgr prend lapparence dune humble maison dermite, inspir dans sa forme et ses matriaux par les maisons rurales de sobre cachet. Le jardin, comme le pavillon de th, font appel aux sentiments dhumilit de lhomme face la nature. Conu comme un parcours de prparation la rencontre de lhte, des autres invits et finalement de soi-mme, le jardin doit, dans sa composition de minraux et de vgtaux, dpayser celui qui y dambule, le couper du monde extrieur et de ses soucis qui y sont rattachs. Le pavillon construit en structure lgre dapparence rustique nest quun lment de composition marquant le point dorgue dun ensemble pens globalement pour une purification de lme au contact de cette nature recompose. Il doit exprimer un idal de paix et de modestie. Ses principes constructifs sont ceux de larchitecture traditionnelle en bois au Japon, par assemblage de tenons et mortaises. Les finitions sont dune extrme prcision et donnent lapparence dune grande simplicit (wabi) o la patine du temps et limperfection simules (sabi) visent fondre larchitecture en harmonie parfaite avec son environnement de nature limage de larchitecture vernaculaire. Les jardins de th sont le plus souvent agrments darbres et darbustes fleurs ou feuillage color, de rochers, deau On y trouve rarement des plantations renouveler annuellement, ce qui en permet une maintenance aise, mme si lentretien rgulier conditionne la prennit des quilibres mis en place par le crateur. Le matre Riky prohibait lusage de plantes fleurs aux couleurs trop vives dans le jardin, dans une recherche constante de sobrit fidle lesprit wabi.Claire Gallian Architecte 19

La Chashitsu du muse Guimet

La Chashitsu

L

page de droite : dessins du Professeur Masao Nakamura

a crmonie du th est laboutisse ment de la culture japonaise, un moment privilgi pendant lequel lme dun peuple amoureux de la nature sauvage, do il est issu et dans laquelle il a appris survivre, prend tout son relief. La crmonie du th, cest un hte, le matre de crmonie jouant traiter des invits qui lui sont chers. Mais, pour la circonstance, lhte se mue en un ascte retir des vanits de ce monde dans son ermitage, et il consacre toute son attention aux gestes du service de ses invits. Cest dans cette concentration extrme traiter ses invits pour mieux leur faire oublier le quotidien contraignant, mieux leur rchauffer le cur, que rside le plaisir de la crmonie du th. Le pavillon dans lequel se droule la crmonie du th est donc dune architecture sobre, limage de la hutte de lascte vivant dans le dnuement, et le jardin qui lentoure voque le cadre de vie de lermite sur sa montagne. Pour crer une ambiance propre favoriser la communion de sentiment entre le matre de crmonie et ses invits, le pavillon de th prend toujours des dimensions rduites, sans que cette exigut devienne oppressante pour les participants. Parvenir rendre une impression de vaste tendue dans un espace aussi limit relve de linspiration zen. Il existait des compagnons-charpentiers consacrant leur existence la construction des pavillons de th. Ni solennit, ni majest, ni gravit, ni somptuosit. Le pavillon de th se veut lexpression dun idal de paix et de modestie. Lamnagement et la dcoration ne font appel aucun lment susceptible dvoquer un quelconque rang social et respectent la beaut et laspect originels des matriaux naturels. Le pavillon de th prsente la particularit dtre construit en bois, matriau naturel par excellence, qui est ici utilis sous sa forme la plus naturelle, et lon peut dire que cest avec le pavillon de th que culmine

lart des charpentiers japonais de mettre en valeur la beaut du matriau brut. Refusant lemphase et le luxe, la sobre architecture du pavillon de th, loin de chercher en imposer au voisinage, sintgre harmonieusement tout environnement, y compris naturel. L, se cache la quintessence dune esthtique quaffectionnent particulirement les Japonais. Avec le projet du pavillon de th ralis dans lenceinte du muse Guimet, nous souhaitons exprimer cette spcificit, cette sobrit caractristique de la culture japonaise. Il sagit donc dun pavillon de th de type san, littralement cabane en vgtal qui, offre une surface de quatre tatamis trois quarts (yoj daime) pour la pice de th. Lintrieur de ce pavillon reconstitue ainsi fidlement lunivers traditionnel de la crmonie du th. Que la ralisation de ce pavillon de th contribue mieux faire connatre aux Franais la manire de vivre des Japonais, leur recherche de vie en communion avec la nature et limportance quils attachent aux relations de personne personne, et mon vu sera combl. Masao NakamuraProfesseur honoraire de lInstitut national polytechnique de Kyto Kyto Kogei Seni Dagaku

20

lvation sud

lvation ouest

axonomtrie plongeante

plan

Dans la montagne Kitayama, au nord-est de Kyto, les cryptomerias sont soigns un par un comme des enfants que lon fait grandir individuellement en les faonnant parfois avec des dcors artificiels. Les femmes se chargent den retirer lcorce comme une peau avant de polir le tronc la main avec de leau et du sable de la rivire qui coule en contrebas. A Paris, comme sur un chantier japonais, une grande tente blanche protgera la construction naissante qui, comme le papillon sortant de sa chrysalide, ne sera libre au grand jour quune fois devenue pavillon rsistant aux intempries.

En peine plus dune semaine, lensemble de la structure est mont et la poutre fatire pose. Le dcor des plafonds et des dessous de toiture revt un caractre assez important pour qu la main, les charpentiers nouent, laide de lianes de glycine, de fins bambous qui apparatront en quadrillage vu du dessous. Des planches seront ensuite poses et fixes aux chevrons par des clous spciaux. Elles seront plus tard recouvertes dun isolant et de feuilles mtalliques.

Pour la toiture, des feuilles de titane sont plies, ajustes et fixes sur un tissu isolant bitumineux. Ce travail minutieux donnera un fini trs discret la couverture dont la longvit est garantie aussi par la qualit du matriau. La poutre fatire sera ensuite recouverte de tuiles garantissant une tanchit parfaite tout en apportant une petite touche dcorative qui respecte la sobrit traditionnelle dune chashitsu. La finition des murs, qui exige huit tapes diffrentes, met en valeur le rythme savant des pleins et des vides comme la beaut naturelle et la diversit des bois exceptionnels utiliss ici. Les fins bambous qui protgent la fentre sont des bambous de sept ans dge, vieillis naturellement, dont on a fait vacuer la sve tout en le schant et le redressant au dessus dun feu au charbon de bois.

22

Ds le lendemain de leur arrive, les matres charpentiers commencent lassemblage des pices qui ont t clairement rpertories avec chiffres et lettres avant leur dpart du Japon. En vingt-quatre heures, les premires cloisons prfabriques au Japon et lessentiel des poteaux de cryptomeria (Kitayama-sugi) sont monts, peine dshabills de leur papier de protection l o le travail dassemblage lexige. Trs vite, les chevrons en fin troncs de cryptomeria de Kitayama, sont poss et annoncent dj la forme de la toiture. Lensemble parat ne reposer sur rien mais les solives qui soutiendront le plancher permettent dj de rigidifier la construction avec les cloisons intrieures et larmature des murs.

Paralllement, le matre maon et son compagnon prparent les murs recevoir leurs finitions de terre fine aux tons ocres. Les travaux de finition des diffrentes couches denduits en terre mlange de la paille trs finement coupe dureront plus dun mois. La complexit de rythme des toitures apparat clairement lorsque les auvents bas sont recouverts et les chevrons du toit suprieur poss. La fentre de type tsuki-age directement perce dans la toiture permet la fois une ventilation efficace et un clairage plus direct que par les fentres latrales, dont la lumire est volontairement adoucie. Certains assemblages de chevrons, poutres et poteau relvent du tour de force et rvlent la qualit exceptionnelle des charpentiers dart qui ont labor la mise en uvre et le choix des matriaux slectionns un un avant la construction.

Les planches de kurobe-sugi qui ont servi crer cette cloison purement dcorative ont t fendues dun coup en planches fines ce qui accentue le relief naturel des veines du bois. Le tokonoma, doucement clair grce la petite fentre latrale de type shitaji mado, pourra accueillir un vase ou un kakemono mis en valeur par la profondeur de lalcve. Enfin, la diversit et la richesse des textures de plafond, en bois de kurobe-sugi fendu en planches fines ou tress pour une meilleure ventilation au-dessus de la pice de prparation, montrent en point dorgue le raffinement de lensemble de la construction.

23

La construction du pavillon de th Guimet

La constructionla plus anime au sud. Elle comporte la petite entre basse (nijiri-guchi) destine faire courber linvit, en signe dhumilit, pour pntrer lintrieur. Devant cette porte est dispose une grosse pierre de couleur rougetre qui marque, pour linvit, la fois le seuil du btiment et la fin du parcours sur les pierres volantes du jardin. Ce rocher, aux contours arrondis, a t choisi par le charpentier et larchitecte dans la rgion nord de Kyto, puis transport par bateau depuis le Japon, comme tous les matriaux qui ont servi la construction Paris. Le pavillon de th comprend deux autres entres : lune, coulissante et de pleine hauteur sur la faade ouest, est destine lentre dinvits que lon ne souhaite pas se faire plier aux rgles strictes imposant une posture physique difficile ; lautre, sur la faade est, joue le rle dentre de service, pour les aides la prparation de lensemble des objets ncessaires la crmonie du th dans la pice appele mizuya. Les poteaux sont construits en cryptomeria, Kitayama sugi, sauf pour le poteau le plus dcoratif situ en angle du tokonoma, qui est en enshu, sorte dif du Japon, taill lherminette pour lui donner un aspect rustique. Le bois utilis, le Kitayama-sugi est une varit de cryptomeria cultive spcialement dans la rgion de Kitayama, au nord de Kyto, en particulier pour les poteaux dornement. Ces arbres sont priss pour leur qualit de rsistance, leur finition parfaite et leur rectitude. Ils font lobjet de soins mticuleux et les branches en sont rgulirement coupes avant davoir grossi de faon limiter la taille des nuds. Il faut de 20 40 ans pour mener une plantation jusqu la coupe. Le travail de polissage des troncs, aprs le retrait de lcorce, est effectu, la plupart du temps par des femmes, sur place, la main avec le sable de la rivire qui coule en contrebas. Les poutres sont en pin, sauf mention contraire o elles peuvent, elles aussi tre en Kitayama-sugi,

L

e pavillon de th dessin par le Professeur Masao Nakamura est une chashitsu de type son, dun peu moins de 25 m2 de surface de plancher, compos de deux pices, lune destine au service, la mizuya, lautre la clbration de la crmonie du th selon les codifications des diffrentes coles qui se sont dveloppes depuis la formalisation de lart du th par Sen no Riky au XVIe sicle. La pice de th proprement dite, la chashitsu, de quatre tatami trois-quarts (yojo-dame), permet dans un espace extrmement restreint (moins de 9m2) daccueillir jusqu sept invits tout en respectant la place dvolue aux htes et au matre de th. Le tokonoma, alcve devant laquelle sera plac lhte principal, donne une impression de profondeur lespace et le dcor qui y sera install, bouquet lger et sobre (chabana), rouleau peint suspendu (kakemono) ou bote encens, rappellera la saison, lvnement que lon souhaite clbrer, lattention particulire du matre de crmonie pour ses invits ce jour l. Les larges auvents qui dbordent de la surface construite sont destins tant protger les parois extrieures contre les intempries que les visiteurs au moment o ils pntrent dans le pavillon pour la clbration de la crmonie du th. La zone protge ainsi par la toiture et dlimite clairement au sol par une rigole de petites pierres qui reoit les eaux de pluie en rideau descendant des toitures, joue un rle dintermdiaire essentiel entre le jardin proprement dit et le pavillon. Construit sur un principe dassemblage poteau-poutre, le pavillon de th est ralis selon les principes les plus labors de larchitecture japonaise, o chaque pice de bois sencastre dans une ou plusieurs autres selon des dcoupes complexes et prcises. Daspect rustique mais o chaque dtail, chaque matriau est pens et slectionn avec grand soin, cette construction offre sa faade24

voire en chtaignier, comme cest le cas de la poutre fatire. Les murs extrieurs ont t prpars en atelier Kyto et apports en France sous forme de panneaux prts monter. Ils sont composs dune armature qui a t recouverte, une fois en place, de plusieurs couches dun mlange de terre lgre, de paille coupe finement et de sable. La finition des revtements muraux a comport huit tapes successives. Ces murs ne sont que du remplissage de vide entre les poteaux, nassurant aucune fonction porteuse de lensemble. Les partitions fixes intrieures sont construites selon les mmes principes, permettant ainsi aisment des troues entre les diffrents espaces. Les fentres sont de trois types : Les shitaji, fentres clayonnes aux angles arrondis, sont de simples ouvertures de taille rduite, sans encadrement, espaces laisss en rserve lors de la pose du torchis sur les murs. Elles laissent apparatre le clayonnage de fines tiges de bambou noues par des lianes de glycine, qui sert darmature aux murs. Les renji, ouvertures coulissantes avec cadre tendu de papier translucide ; elles sont parfois protges en extrieur par des bambous fins appels shiratake, qui sont coups lautomne puis schs et vids de leur huile avec des contraintes permettant de les redresser. Les bambous ici utiliss ont 7 ans dge. Sur la faade arrire, certains bambous bruns ont, eux, 120 ans dge et proviennent danciennes toitures de maisons rurales. Enfin, les tsuki-age, petites ouvertures pratiques directement dans la toiture sont formes dune planche de bois qui peut tre retenue en position haute par un bton que lon positionne depuis lintrieur. Lorsque les fentres ouverture coulissante sont ouvertes en t, la lumire est tamise par des sudare, stores suspendus en extrieur, qui donnent une atmosphre de pnombre et de fracheur lintrieur. Ils sont toutefois retirs lors des crmonies du th.

Les sols seront recouverts de tatami, sauf indication contraire pour la pice appele mizuya et qui sert la prparation de la vaisselle, des ustensiles (vase eau, bouilloire, bols, chasen, bote et cuillre th, louche en bambou etc..) et des ingrdients (eau, th en poudre). L, on trouve un caillebotis de petits bambous blancs sur lequel sera verse leau ayant servi rincer les bols th. On trouve aussi un petit espace de plancher en pin, qui permet dentreposer les ustensiles et le bac eau dans lequel on puisera pour la crmonie du th. La toiture est recouverte de feuilles de titane traites tout spcialement pour garder un fini mat dans les tons verdtres et ncessiter un minimum dentretien. Ce matriau est dun usage rcent. Son prix est souvent prohibitif pour les constructions au Japon, mais cest dans un souci la fois de longvit et desthtisme que ce matriau a t choisi. Les fatires en bois de chtaignier sont recouvertes dune range de tuiles rondes vernisses spcialement formes et cuites pour cette construction dans la Province de Gifu rpute pour ses tuiles de qualit. Elles assurent non seulement ltanchit mais aussi une finition traditionnelle avec un discret aspect dcoratif. Livr en pices dtaches au muse Guimet le 15 mars 2001, ce pavillon de th dune qualit exceptionnelle, tant par les matriaux utiliss que par les comptences de haut niveau des compagnons qui ont travaill sa ralisation, a pu tre mont et compltement termin en deux mois et demi, du 15 mai au 31 juillet 2001. Un montage blanc de la structure avait eu lieu dans les ateliers de la Socit Yamamoto Kgy Kyto en dcembre 2000. La crmonie de monte de la poutre fatire a eu lieu le 10 juin 2001. Claire Gallian Architecte25

La crmonie de Muneage

Muneageutiliss pour la construction. Au centre, symbole concret de la crmonie dont elle porte trace crite, la munafuda, planche de bois qui porte sur ses deux faces, lindication du type de construction, le nom des personnes qui ont particip sa ralisation, la date de crmonie. Cette munafuda sera, la fin de la crmonie, fixe par le matre charpentier, try, M. Fukumori, sous la toiture, au-dessus des plafonds de la pice de th (photos ci-contre). Une fois les invits arrivs dans le jardin, on a arros les grosses pierres poses devant lentre, ce qui a mis en valeur la beaut de la pierre aux nuances ainsi claires, et purifi symboliquement le passage, comme on le fait lors des crmonies du th. Aprs avoir accueilli les personnalits invites pour cette crmonie unique sous le ciel de Paris, M. Yamamoto a, au cours dune srie dune dizaine de squences, appel les divinits venir dans les lieux quil avait pralablement purifis laide du sel lanc aux quatre coins du btiment et les a remercis davoir protg le chantier jusqu ce stade majeur de la construction. Aprs leur avoir fait des offrandes, les avoir pri de protger le pavillon de th en construction et les personnes prsentes, il a invit le try, matre charpentier, puis ses htes venir sincliner devant lautel. Enfin, il a psalmodi une prire charge daider les divinites retrouver leur chemin. Le point fort de la crmonie fut sans aucun doute le moment o le matre charpentier et son compagnon couvreur, monts en haut de la charpente ont frapp trois grands coups sur le sommet de la toiture, pour confirmer la fixation relle de la poutre fatire. Une fois la crmonie, extrmement mouvante, termine, lensemble de lassistance fut invite partager une coupe de sak apport du Japon pour cette occasion exceptionnelle.Claire Gallian Architecte 27

T

oute construction au Japon est prcde de la crmonie de jichinsai, pratique par un prtre shintoste charg de purifier le terrain et den chasser les mauvais esprits. Les premiers travaux de remise en tat du jardin de lannexe du muse Guimet et les travaux de fondation stant drouls avant larrive des Japonais responsables de la construction du pavillon de th, cette crmonie na pas pu avoir lieu Paris. Toutefois, la deuxime crmonie habituellement pratique au Japon, la crmonie de monte de la poutre fatire muneage, qui rappelle celle que lon pratique en France pour clbrer laccomplissement de la charpente dune maison en plantant un grand bouquet ou un jeune arbre dans la chemine, a pu tre clbre dans le respect de la tradition japonaise le 10 juin 2001, lintrieur du pavillon de th en cours de construction. Cest M. Takaaki Yamamoto, matre charpentier dart responsable de lensemble de la construction, qui a offici crmonieusement sur les lieux pour marquer cette tape dterminante de lensemble du processus complexe qui mne le terrain vierge lexistence dun pavillon de th de style sukiya. Avant la crmonie proprement dite, un himorogi, cordon garni de bandelettes de papier blanc charg de dlimiter lespace, entoure le pavillon de th. Lespace ainsi marqu par le himorogi fut install autour de la tente de protection de la construction, grce des bambous coups la veille dans le jardin du Panthon bouddhique, et un petit autel fut dress lintrieur du tokonoma de la pice de th encore en chantier. Sur cet autel, M. Yamamoto avait pralablement dispos du sak, du riz, des fruits et des lgumes frais destins aux offrandes pour les divinits, ainsi quun ensemble de petits bouquets de feuilles de camlia. En outre, taient poss sur lautel, son querre de charpentier et deux marteaux, symboles des outils

Le nouveau jardin du Panthon bouddhique

Nouveau jardin

S

itu larrire du btiment annexe du muse Guimet, le jardin du Panthon bouddhique, dune surface denviron 450 m2, a t amnag par Robert Bazelaire en jardin dinspiration japonaise ds la cration du Panthon bouddhique en 1991. cette poque dj, le concept directeur fut de mettre en valeur cette petite parcelle de nature en dissociant le jardin du btiment par un plan deau et de louvrir vers la rue de Lubeck en supprimant le mur de fermeture existant. Invitant le visiteur la promenade, il offrait aussi des zones de repos au flneur dsireux dun moment de posie asiatique sous le ciel de Paris. Aujourdhui, le mme crateur, accompagn de son ami Bernard Peuble, invite le visiteur dcouvrir un nouveau jardin conu en fonction de limplantation du pavillon de th en bordure de la rue de Lubeck, dans lesprit des jardins de th japonais. Dans leur note de prsentation, ils rappellent en prologue, quelques lignes du Sakutei-ki, ou livre de composition des jardins japonais , ouvrage de rfrence sur lart des jardins, que lon attribue Fujiwara Toshitsuna (1028-1094) : Il ne faut suivre quun seul principe fondamental : Suivre sa premire ide Ensuite Pour ce qui en dcoulera, Suivre son cur Conu comme un parcours prparant le cur et lme pour les crmonies du th qui se drouleront dans le pavillon install cet effet, ce jardin est bord dune haie vive le long de la rue, et de bambous gants sur les deux cts perpendiculaires.. Les vgtaux, pour beaucoup conservs de lancien jardin dont les magnifiques bambous gants qui en ont fait sa rputation, visent crer, avec leau, les pierres, lombre et la lumire, une ambiance de srnit dans le parcours complexe

qui permet de donner, par des jeux de cachecache et de labyrinthe, le sentiment dune distance par rapport au monde extrieur dont on sabstrait. Ils ont t choisis, en outre, pour permettre une bonne tenue de lensemble en toute saison sans exiger un entretien ou une taille trop frquente.. Ainsi, ce jardin est envisag comme un havre de paix permettant un tat de bien-tre et un sentiment disolement solitaire. Des sentiers sinueux sont marqus de dalles de pierres qui, limage des tobi-ishi (littralement, pierres volantes) des jardins japonais, rythment le pas au gr de leur disposition sur leau ou sur la terre. Un grand pont en zig-zag traverse les bassins, marque une fracture dlibre de lespace et bouleverse un ordre relatif des lments en place . Comme dans le jardin de Katsura, tout est conu pour faire perdre au visiteur le sens de la distance relle, pour lamener progressivement dans une profondeur qui sans cesse fuit et se drobe devant ses pas , ont crit ses crateurs. Le chuchotement des cascades deau rappelle le cycle continu du temps qui passe. En cours de chemin, linvit la crmonie du th peut symboliquement se purifier le corps et le cur en se rinant les mains et la bouche la vasque creuse dans du granit rose de Bretagne et pose directement au dessus de leau dun bassin. Ce dtour vers le chzubachi annonce lapproche du pavillon de th qui tourne sa faade sud, la plus dcorative, vers le btiment principal et le plan deau qui len dissocie. Le professeur Nakamura, venu sur le chantier pendant les travaux, a confirm sa joie de voir combien ce jardin illustrera, en combinaison avec le pavillon de th quil a dessin, une vritable rencontre des cultures franaise et japonaise dans la cration dun ensemble harmonieux au cur de Paris.Claire Gallian Architecte

28

Souvenirs dune construction pour le futur

Souvenirs

C

est une grande joie pour moi qu loccasion de la rouverture du muse Guimet rnov, il mait t donn de raliser, sous le ciel de Paris, la construction dun authentique pavillon de th dessin par le clbre architecte Masao Nakamura dans le respect de la tradition. Cette joie est comble par le fait que les crmonies qui clbreront linauguration de ce pavillon de th permettront aussi dadmirer les merveilleuses cramiques de Matre Kzan Kiwa. De tout cur je remercie particulirement le Professeur Masao Nakamura et Matre Kzan Kiwa, qui, par la confiance quils mont accorde en me donnant cette opportunit, mont offert la possibilit de dmontrer ma comptence technique et mon savoir-faire, fruit de nombreuses annes dexprience en tant que charpentier dart spcialis dans les constructions sukiya de Kyto. Avec le dsir de permettre aux Franais dont la culture est si riche, de comprendre un symbole de la quintessence de la culture japonaise, jai slectionn chacun des matriaux un un. Tous ont t vrifis avec attention, faonns la main avec grand soin, puis assembls pour donner naissance cette chashitsu comme sil sagissait de notre enfant. Mon souhait est aujourdhui que cette construction sur le sol parisien soit apprcie de tous, le plus longtemps possible. Les beaux troncs de cryptomeria, qui ont grandi Kitayama au nord de Kyto, sont intgrs la construction dans leur tat le plus naturel possible, lart traditionnel du charpentier de style sukiya consistant respecter et mettre en valeur la nature propre de chaque pice de bois avec ses nuances et son caractre dans sa mise en uvre pour la ralisation de la construction. Jespre que ce pavillon de th permettra chacun de sentir quil a t construit dans le respect de cette

tradition de lart des charpentiers de style sukiya. Aprs avoir vu le bois, aprs lui avoir parl, alors seulement, on entre en communication avec lui et on peut lui donner la place qui lui revient dans la construction. En outre, une telle chashitsu ne peut tre ralise que grce au concours de nombreux corps de mtiers et non seulement par les charpentiers. Le matre maon pour donner une finition parfaite aux murs de terre, le spcialiste des cloisons coulissantes et des tatamis dont la prcision est essentielle, les spcialistes en mtaux et les couvreurs qui donnent une belle finition au toit surmont de tuiles, tous ont contribu ensemble la ralisation de ce pavillon de th. Je pense sincrement que cest grce aux efforts conjugus des meilleurs compagnons de chaque branche que cette construction peut exprimer pleinement toute sa complexit en harmonie. Que cet espace o souffle un vent de culture japonaise sur le sol franais, soit un lieu dchanges culturels de haut niveau pour tous, de France et du Japon, tel est notre souhait ! Enfin, je tiens remercier du fond du cur toutes les personnes qui, tant en France quau Japon, nous ont aid la ralisation de ce projet depuis avant mme sa mise en route, puis tout au cours de la construction qui a dur plusieurs mois.Takaaki Yamamoto matre charpentier, spcialiste des constructions sukiya de Kyto

page de gauche : la faade sud du pavillon de th du muse Guimet en cours de finition

31

Les compagnons artisans qui ont ralis le pavillon de th du muse Guimet Paris sont : Takaaki Yamamoto, matre charpentier de style sukiya, responsable de lensemble de la construction, Shizuo Fukumori, matre charpentier, try responsable des travaux de charpente, Seiichi Hosono, matre charpentier, vice-try, Yoshinobu Sugimori, matre maon, Yoshio Tomita, maon, Takeshi Itao, assistant, Yoshio Shibata, couvreur pour le mtal, Noboru Iwata, couvreur pour le mtal, Yoshinori Maeda, couvreur pour les tuiles, Yukio Kitagawa, spcialiste des cloisons coulissantes et fentres. En outre ont travaill Kyto, dans les diffrents corps de mtier : Yoshikazu Shibukawa, Takeshi Hayasaka, Hideki Yamada, Akira Tada, Keisuke Shimizu, Setsuo Itao, Takahiro Ito, Masao Takemura, Ryoz Matsuda, Takayuki Asada, Otojir Takamuro, Mitsuru Kubota. Enfin, rien neut pu tre ralis sans la premire visite sur place de larchitecte Yochi Kawashima en septembre 2000, puis la supervision et la coordination densemble assures par Toshifumi Samon, chef du bureau de design et directeur gnral de lentreprise Yamamoto Kgy Kyto. Remerciements Cette brochure a t ralise loccasion de linauguration du pavillon de th du muse Guimet Paris, offert par le Comit japonais pour le pavillon de th du muse Guimet . Cette inauguration fut clbre dans le pavillon de th et dans lannexe du muse, par trois journes exceptionnelles de crmonies du th les 12, 13 et 14 septembre 2001. Nous tenons remercier particulirement tous les membres de ce Comit, reprsent par son Prsident M. le Professeur Yoshiaki Iwasa ainsi que les gnreux donateurs tels que M. Yamamoto, M. Kiwa et M. Nakamura pour leur soutien inestimable et leur parfaite organisation. Nous remercions aussi les socits Kamo Izumi, Lihaku, Masumi et P&M Distribution, qui ont contribu au succs de linauguration. Enfin, cet ouvrage est ralis grce au concours de la COGEMA.

Conception de louvrage Claire Gallian et Franois Mutterer Ralisation graphique Studio Leroy Mutterer Maquette : Charly Leclercq et Piet Dfossez Crdit photographique Jean-Claude Agostini, Paris, pages 11, 12, 13, 18, 19, 20, 22, 23, 24, 25, 30 Claire Gallian, Paris, pages 22, 23, 31 Muse Guimet, Paris, pages 6, 9 New color Shashin, Kyto, couverture et pages 14, 15, 16, 17 Walter Pennino, Paris, pages 26, 27 Impression Imprimerie No Typo, Besanon, septembre 2001